[23 Décembre 1597] Une visite amicale

Dans un salon réchauffé par les braises du feu de cheminée, Leyria relisait pour la énième fois ce roman regroupant plusieurs récits de batailles menées par Monbrina. A défaut de ne pas pouvoir avec cette température glaciale passer ses après-midis à l'extérieur, elle profitait de ce temps à la lecture de ses ouvrages préférés. Elle s'imaginait toujours, être à la tête d'une puissant armée et découpant deux, trois têtes de ces barbares. Un rêve bien bizarre, comparée à celles des autres dames nobles qui souhaitaient plutôt avoir la dernière paire de talon à la mode à la cour.

Mais sa lecture fut interrompue par une domestique qui vint la prévenir de l'arrivée d'un visiteur la demandant spécialement. La jeune femme ferma son roman et voulut rencontrer de par elle-même, la personne qui voulait la rencontrer. Elle pensa à bien se couvrir d'une cape et de gants chauds avant de mettre le bout son nez dehors. Elle traversa la cour, rejoignant les grilles du domaine. Arrivant enfin sur place, elle vit l'homme en question qui paraissait d'un domestique, portant un paquet. Elle l'accueillit :

- Bienvenue. Je suis désolée de vous avoir fait patienter. - Le froid hivernal la faisait frissonné, ce qui était certainement de même pour son invité. - Il serait préférable de rentrer avec ce froid, n'est ce pas ?

Elle l'invita à le suivre jusqu'à la demeure. Ils entrèrent dans un salon chauffé grâce à la cheminée allumée. Après avoir ôter ses gants et sa cape, elle s'adressa de nouveau à son invité :

- Asseyez-vous, je vous en prie. - Elle s'installa dans un des fauteuils en face de l'homme, elle lui sourit - Alors... Dîtes moi donc la raison de votre venue.

Malgré le froid qui le faisait légèrement trembler, William ne s'impatientait pas de l'attente. Il n'avait pas été invité. Par conséquent, cela s'avérait normal que les maîtres des lieux ne se manifestent pas tout de suite. Le domestique prit son mal à patience, sans paraître tracassé par l'épreuve. Il en profita même pour discourir avec les gardes, parlant de banalités.

Lorsque Leyria de Phietom vint enfin l'accueillir, William descendit de cheval, confiant l'animal à un ds gardes, puis salua la jeune femme convenablement.

"Je vous présente mes hommages, mademoiselle. Et oui, je songe que ce serait effectivement mieux pour nous de poursuivre cet échange auprès d'une cheminée, à moins de souhaiter être alité dès demain."

Là-dessus, le domestique suivit la maîtresse des lieux à l'intérieur du château. Il portait sous le bras le paquet confié par Dyonis en partant. Dans l'entrée, William donna son manteau à un domestique en le remerciant poliment. Il rejoignit Leyria dans le salon. Elle venait de s'installer dans un superbe fauteuil, près d'une belle cheminée en pierres où brûlait un bon feu réconfortant. Il s'assit dans un second, en face d'elle.

"En premier lieu, il me faudrait tout d'abord me présenter, mademoiselle. Les convenances l'exigent. Je me nomme William Wagner, un employé du seigneur de Frenn, qui est notre actuel Premier Conseiller. Mon maître m'a chargé au matin d'une mission qui vous concerne."

William se redressa et montra plus en évidence un paquet, joliment enveloppé, de taille moyenne, et le déposa sur la table basse entre eux.

"Mon maître souhaitait vous faire remettre ce présent. Dans l'espoir que celui-ci vous plaise."

Cela aurait bien étonnant du contraire. Il avait personnellement le maître à superviser l'achat d'une superbe rapière. La jeune femme, si amoureuse de l'escrime, ne pourrait qu'être enchantée par le cadeau.

La marquise héritière écouta le visiteur se présenter. Leyria eut un sourire radieux. Ce paquet était donc...pour elle ? Et il venait en plus du Premier Conseiller lui-même. Elle ne savait pas si elle méritait réellement un tel présent. Il était vrai qui lui arrivait parfois de se mettre à ferrailler avec Dyonis, il était pour elle un très bon adversaire. C'était grâce à lui qu'elle s'était amélioré dans l'escrime. Lui n'avait que faire de savoir qu'une femme n'avait "apparemment" pas autant de capacités que les hommes, et c'était une des choses qui faisait que la jeune femme appréciait tout particulièrement le baron de Frenn.

- Je vous remercie énormément de vous être déplacé, c'est un véritable honneur. - un domestique vint prendre avec lui le cadeau du baron de Frenn. Leyria préférait garder la surprise jusqu'au bout et elle prévue de le déballer le jour J - Je vous prierais de présenter à Monsieur le Premier Conseiller tous mes remerciements pour cette si belle intention.

Elle appela un domestique et susurra à l'oreille de celui-ci de lui apporter le cadeau prévue pour Dyonis de Freen et comme elle ne voulait pas que son serviteur parte quant à lui les mains vides, elle demanda à ce qu'on emballe le beau ouvrage de Guillaume de Lorris et de Jean de Meung : Le Roman de la Rose, un pur classique. Et le temps que ses serviteurs devaient s'occuper de cela, elle devait garder l'invité encore un peu. Alors autant en profiter pour prendre des nouvelles de ce qu'il se passait à Frenn et demander comment se portait ce cher Dyonis.

- Souhaitez-vous un chocolat chaud ?

William contemplait la jeune femme lui sourire, toute en politesse, sans faire non plus de manière excessive. Elle lui plaisait et il il comprenait que son maître l'appréciait pareillement. Il lui avait sommairement conté les quelques leçons données à cette héritière et il se dégageait de ces récits un bel enthousiasme, que le domestique découvrait en ce jour de ses propres yeux.

Après reception fameux cadeau, elle fit appeler un serviteur pour que celui-ci l'apporte en lieu sûr. La bonne education voulait de ne pas ouvrir devant la personne qui l'avait offerte, bien sûr, au cas où on aurait une déception ou une surprise qui pourrait déplaire ou blesser son bienfaiteur. Il lui sourit suite à ses remerciements.

"Je ne manquerai pas de lui répéter."

Elle li proposait une tasse de chocolat à présent, ce qui était absolument une intention charmant.

"Bien sûr. Après cette longue route, avec ce froid, ce sera des plus agréables."

Il tourna la tête, un court instant, vers une armure, sans doute un héritage de ses ancêtres, qui portait l'épée au ceinturon.

"Mon maître m'a vanté vos capacités à l'escrime, savez-vous ? En ce domaine, je dispose moi aussi de bonnes notions. Ulysse... Ulysse aimait beaucoup lors des beaux jours réaliser des duels, amicaux bien sûr, dans la cour ou les jardins du domaine de Rottenberg. Il excellait, lui. A l'occassion si vous rechigniez à vous battre contre un simple domestique, qui se doit être sans doute rouillé, nous pourrions nous entraîner mutuellement."

Dyonis ? Lui vantait ses capacités à l'escrime ? Leyria rougit légèrement sur le coup, charmé par ses compliments qu'elle pensait ne pas mériter. C'était au baron qu'elle devait tous ce qu'elle avait appris jusqu'à aujourd'hui, de part les entraînements à l'épée qu'il lui donnait. Elle lui en serait à jamais reconnaissante.

- Je vous remercie du compliment mais je ne suis pas aussi bonne que Son Eminence à l'escrime, il me reste beaucoup à apprendre. C'est toujours un honneur de pouvoir s'entraîner avec lui.

Elle lui sourit chaleureusement. Dès qu'on lui proposait de manier un fleuret, elle ne refusait jamais. Justement, autant profiter de suite pour poser une date pour leur entraînement d'escrime. Elle serait de plus, impatiente de découvrir le style de combat de son invité et ce serait l'occasion pour se perfectionner. Alors elle enchaîna :

- Ce serait un réel plaisir de m'entraîner en votre compagnie. Que dîtes-vous de revenir ici afin de nous affronter dans un duel amical ? Le 3 Janvier, vous conviendrez-t-il ?

Un serviteur vint leur apporter les deux chocolats chauds. Elle adorait sentir cette douce odeur de chocolat ainsi que le goût sucré de cette boisson qui réussissait à réchauffer tout un corps en une seule gorgée. C'était un luxe qu'elle aimait réellement, pour cette fois (en autre elle pouvait se passer des robes, des bijoux et des autres choses coûtant une fortune).

- D'ailleurs, comment se porte M. de Frenn ?

Léyria rougissait du compliment que William venait de lui adresser. Quelle jeune fille touchante, bien éduquée, et modeste.

"Ne soyez pas sévère avec vous-mêmes. Vous êtes jeune et le baron est un homme d'expérience. Il est naturel qu'avec les années il soit plus expert mais je suis assuré que vous saurez un jour atteindre un aussi bon niveau si vous persistez dans vos efforts."

Elle accepta avec un plaisir immense sa proposition et il opina aussitôt du chef suite à son invitation.

"Je demanderai à mon maître la permission mais il serait étonnant de me la voir refuser. pour être honnête, il me trouve trop sérieux à rester au domaine de Frenn, à ne songer qu'au travail, et m'encourage régulièrement à prendre l'air."

William laissa échapper un rire un peu gêné. C'était décidément le monde à l'envers qu'un maitre qui poussait un serviteur à prendre un congé. Commentaire autrement ? Il se sentait si reconnaissant envers le baron. Un domestique vint apporter les chocolats chauds. William le remercia et but une première gorgée.

"Une excellente boisson que ce breuvage."

Leyria demandait des nouvelles du baron. William but une seconde gorgée.

"Il va très bien, oui. Il a revu hier sa fille Lavinia et vous ne pouvez imaginer le bonheur que ces retrouvailles ont causé. Elle se nomme Lavinia de Kergemont. Peut-être la connaissez-vous ?"

- Je l'espère.

Devenir aussi forte à l'épée que le baron était un de ses buts personnels premiers.  Si elle gagnait contre lui, cela signifiait pour elle qu'elle serait capable de battre n'importe qui. Un jour, l'apprentie dépassera le maître. Et c'était par l'entraînement qu'elle allait y parvenir, elle en était persuadé.

- Son Eminence a parfaitement raison, un peu de repos ne fait de mal à personne. - elle lâcha un rire - Enfin... Si nous pouvons réellement définir un duel à l'escrime à une activité reposante.

Lavinia de Kergemont, la fille du baron de Frenn. Il était vrai qu'elle avait rapidement entendu via les goûter organisés par sa mère que celle-ci était de retour chez son père, Son Eminence. Enfin, c'était une information qui restait vague pour elle puisque pendant ces discussions entre femmes nobles, sa concentration était beaucoup plus dirigée vers ce qui se passait à l'extérieur ou dans sa tasse de thé. En autre, elle s'ennuyait à mourir...
Elle prit une nouvelle gorgée de cette boisson chaude et répondit.

- Je suis heureuse pour eux. - elle continua - M. de Frenn m'a déjà parlé de sa chère fille, en effet, mais je n'ai pas encore eu la chance de la rencontrer. Si vous me dîtes qu'elle est en ce moment parmi nous à la Cour, je serais enchantée de converser avec elle.

William but une nouvelle gorgée de chocolat chaud en en adressant son habituel sourire bienveillant à Leyria. Le seigneur de Frenn avait raison : cette jeune femme était une personne charmante et d'une excellente compagnie.

"La maitrise des armes est à mon sens un loisir. Comme la chasse ou la pêche. Cela nous divertit et en même temps exerce notre corps et notre esprit. Une parfaite activité en somme pour un esprit qui souhaite être complet."

En son for intérieur, le domestique songea qu'en rentrant, après avoir demandé la permission à son maitre pour cette sortie, il chercherait à obtenir son accord pour utiliser une heure par jour la salle d'arme, histoire de renouer avec ses réflexes. Dix ans sans pratique, ils devaient être rouillés.

Leur conversation porta ensuite sur Lavinia de Kergemont qui venait de retenir au domaine. Il but une nouvelle gorgée de chocolat avant de poursuivre.

"Vous pouvez également nous rendre visite. Nous serions tous ravis de vous voir à Fren. Madame Kergemont a d'ailleurs un projet de commerces de bijoux. Je ne sais pas encore tout des détails mais son Excellence en est déjà très fier. "

L'escrime était un moyen pour elle de fuir pendant un moment ses responsabilités qui la pesaient de plus en plus au fil des années. C'était son échappatoire. A ses devoirs de marquise héritière : Se trouver un mari, assurer une descendance, se former un cercle de nobles influents, puissants et pleins d'autres. Alors manier une épée lui donnait l'impression d'être libre.

- Je le pense aussi. Personnellement, l'escrime me permet de me décontracter et je peux ainsi me reposer l'esprit.

Elle but une gorgée de chocolat chaud. Les bijoux et les robes étaient de loin des domaines qu'elle maîtrisait, au contraire d'une femme noble quelconque. Emmenez la dans une bijouterie et elle passera plus son temps à regarder le paysage par la vitrine que les parures présentées dans la boutique.

- Je vous remercie pour votre proposition. Ce serait un pur plaisir. - elle lâcha un léger rire un peu gêné - Pour être honnête, je ne parfaitement étrangère au domaine de la bijouterie. Par contre, ma mère serait certainement intéressée par ce projet. Je pourrais abordé de cela avec elle.

William but une nouvelle gorgée de chocolat chaud qui coula lentement dans sa gorge tout en tournant la tête vers une armure, près de la cheminée. Son regard observait l'épée de taille dans les mains de l'ancien guerrier dont la lame était fort émoussée et qui risquerait de ne produire que peu d'effets si on essayait de l'utiliser. Quel dommage de ne pas entretenir une aussi belle arme même si celle-ci ne servait plus que décoration. Elles appartenaient désormais à un autre temps et les rapières modernes se révélaient plus légères et bien plus maniables.

il entendit Leyria répondre à son invitation et il adressa un sourire bienveillant.

"Madame Kergemont saurait vous divertir avec sujets qui sauraient vous être agréable. Elle vient de revenir à la capitale et n'a que peu d'amies. Votre compagnie lui ferait rand plaisir.

En son for intérieur, dès qu'il serait de retour à Frenn, William se promit de discuter avec son employeur de cette possibilité de proposer à sa fille de l'accompagner lors de ce duel amical avec la jeune héritière. Ce serait une rencontre parfaitement convenable et une amitié sincère se nouerait sans le moindre doute entre elles.