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[23 décembre 1597, soirée] Dans les couloirs du roi collectionneur [Terminé]

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Message par Le Cent-Visages Dim 4 Avr - 19:18

[23 décembre 1597, soirée] Dans les couloirs du roi collectionneur [Terminé] Th?id=OIP

L'administration avait quelque chose d'un kraken. Ses arcanes tentaculaires vous appelaient, vous tenaient, étonnaient, maintenaient, retenaient. À peine arrivé au palais royal avec son prisonnier, le Cardinal Matthieu aura dû sacrifier temps et énergie à l'implacable créature qui l'engloutissait derrière la porte de quelque bureau. Il fallait dire qu'on ne rentrait pas chez Sa Majesté comme dans le dernier des moulins. Se présenter. Justifier de sa venue. Demander audience – à plus forte raison quand elle était urgente comme celle du jour. Et grave : amener à Gérald Der Ragascorn un sorcier dans le but de le convaincre enfin de la vilenie de ces infirmes qu'il chérissait tant. Cela impliquait bien quelques procédures extraordinaires avant la grande rencontre.
Pendant, donc, que Son Éminence expliquait tout ce qu'il y avait à expliquer et signait tout ce qu'il y avait à signer, son prisonnier aura été casé dans le petit coin d'un corridor lui-même discret. Étroit, assez peu éclairé. Le genre d'espace où fort peu de monde passait. Oh, un habile homme pourrait cependant toujours s'y faufiler, en souris joueuse, si l'envie le prenait d'un peu d'errance au hasard des membres désarticulés qu'étaient les multiples couloirs de ce corps de pierre.

C'était là que des gardes auront traîné Hyriel, vidé de ses forces par les tortures endurées le matin même. Qu'il l'auront assis sur un austère tabouret. Et solidement rivé au mur par le bout de la chaîne reliée aux menottes qui lui enserraient les poignets. Bah, il ne risquait pas non plus de s'envoler. Deux vigiles restaient bien aux alentours pas acquis de conscience, cependant leur attention se relâcha vite : ils avaient avec eux la clé de ses entraves, le prisonnier n'était pas en capacité de tenter quoi que ce fût, fort peu de monde – voire personne – n'approcherait. Les soldats se préoccupaient plutôt de la sûreté du bureau dans lequel Son Éminence Matthieu Cassin poursuivait ses formalités. Lesquelles pouvaient parfois être longues. Très longues.
Quasi aucun passage. Une simple torche au mur froissait l'allée de son crépitement sinistre. Il ne s'égarait dans ce trou, de temps à autres, que de rares lorgnades de curiosité malsaine décochés au détenu. À ses jambes si maigres et arquées qui en temps normal avaient besoin du secours de béquilles. Au haut de son corps étrangement si bien bâti et large d'épaules en comparaison. À ses vieux habits sur lesquels avaient transpercé de petites taches de sang – malgré les bandages entre le vêtement et la peau torturée. Aux marques de sangles à son cou et ses poignets. Sans parler de ses yeux excessivement bleus – bleus jusque sur le blanc des globes – qui arrêtaient toujours l'attention et faisaient crier « Au démon » aux plus crédules.

– Vise-moi un peu ce qu'y amènent. C't'à croire que Sa Majesté aime s'entourer de démons.
– Oh tais-toi donc ! Ça nous r'garde pas ! Et le roi doit savoir c'qu'il fait !
– N'empêche que ça m'rassure point toute sa cour de monstres. Ou même c'grand sifflet tout noir...
– Sssh, allez va. On file.

Les deux vigiles s'éloignèrent sur ces commentaires chuchotés au détour du petit couloir, sans même se soucier d'avoir pu être entendus par le sorcier, ou par qui que ce fut d'autre.

@Eymar Sartyre @Hyriel Radgery
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Message par Hyriel Radgery Dim 4 Avr - 20:05


Hyriel était donc au palais. Franchement, pour un roi, il aurait pu investir dans un éclairage plus soutenu : on se serait cru dans la salle de torture que l’herboriste avait visité le matin même et dont il conservait de cuisants souvenirs. Tout à son observation néanmoins émerveillée des lieux, si différents de sa chaumière, ou même de Torienel et Monthoux, Hyriel ne put s’empêcher de se demander pourquoi un homme qui possédait tout cela avait besoin d’envahir ses voisins. En voulait-il toujours plus ? Pourquoi ? Il avait déjà tout… Ne disait-on pas que la gourmandise était un très vilain défaut, voire un péché ? Ou alors c’était par orgueil. Vouloir tout contrôler. Péché aussi. Par envie ? L’herbe est plus verte ailleurs ? Péché. Par colère alors ? Parce que les autres pays avaient cassé un de ses jouets ? Puéril péché. Ce n’était pas une attitude très religieuse alors, que celle de la conquête. Il pourrait demander au roi, tiens, si le sujet venait sur le tapis… Puisque, de toute manière, il flamberait dans les jours à venir, autant demander des réponses sur les sujets sensibles…

On le sépara du cardinal. Dommage. Non pas qu’il s’en plaignît, loin de là, mais Hyriel aurait bien aimé le voir se dépatouiller avec les secrétaires. On racontait qu’ils étaient particulièrement embêtants et ç’aurait été amusant à voir ! Et puis il aurait pu se moquer… Tant pis ! Il regarderait un mur à la place. Moins amusant mais possiblement intéressant. Et peut-être croiserait-il Lénius au hasard d’un couloir…
Il se laissa asseoir et attacher sans résister. Après ces longues journées en prison, puis la torture, être attaché était presque devenu pour lui une seconde nature. Il n’y faisait plus attention. Il était simplement content d’être assis et de pouvoir reposer ses membres douloureux. Lentement, l’herboriste s’adossa au mur. Ses paupières se fermèrent. Inspirer, expirer. Oublier la douleur. Oublier cette journée. Oublier le bûcher.

Bien sûr, les gardes choisirent précisément ce moment pour papoter sur lui. Hyriel rouvrit un œil, haussa un sourcil et les fixa sans aucune sympathie dans le regard. Ils n’étaient pas contents ? Ils allaient voir ailleurs. Lui n’avait pas choisi d’être ici, ils ne pourraient pas les renseigner. Qu’ils aillent plutôt voir les fameux secrétaires, au lieu de faire les malins. Il fut tout de même intrigué par leurs mots et y songea en observant le plafond. Lénius lui en avait raconté de belles sur les « favoris » du roi. Il serait ravi d’en rencontrer, si l’un d’eux venait à passer. Discuter au moins une dernière fois avec une personne censée ne lui ferait sans doute pas de mal…



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Message par Eymar Sartyre Mer 7 Avr - 11:23

On lui avait rapporté qu’un procès avait eu lieu, mais les opinions des uns et des autres étaient si enflammées qu’elles en devenaient confuses. Telle jeune dame évanescente avait manqué défaillir en évoquant la beauté du prévenu, et le gâchis que c’était de brûler de la bonne viande -  elle ne l’avait pas dit ainsi, mais Eymar l’avait entendu dans sa voix. Tel grand capitaine s’était émerveillé qu’un simple herboriste endure ainsi la torture ; il avait vu de ses soldats mourir de douleur sous l’amputation, et aurait bien voulu qu’ils soient aussi solides. Il se demandait, en grand philosophe, si cet homme était plus résistant parce qu’il était infirme. Eymar se demandait si cet homme était un peu idiot parce qu’il était capitaine. Enfin, il y avait ceux qui s’intéressaient réellement aux termes de loi et aux étapes du procès ; et ceux-là étaient aussi ennuyeux que des huissiers de justice, impossible de suivre leurs raisonnements sans bâiller.

Quand l’ennemi déshonorait
A coups de bâton son missel,
Je me suis changé en forêt
En levant mes bras vers le ciel.

Les quelques lignes tracées contre l’appui d’un mur, Eymar rangea le parchemin dans le revers de son pourpoint ; tout en arpentant les couloirs, il réfléchissait à une petite pièce qu’il écrivait, rien de bien folichon, mais elle apparaîtrait dans sa prochaine publication. Et les aventures en cours dans ces geôles en alimenteraient également les lignes. Tout était lié. Le sang des uns coulait dans les veines des autres, et dans leurs encriers, depuis la nuit des temps. Il réfléchit encore un peu puis écrivit, devant le nez d’un garde qui se demandait quelle était cette étrange visite :

Quand l’ennemi voulut jeter
Mon corps brisé dans la rivière
En poisson je me suis changé
Dans une gerbe de lumière.

Puis il se relut à voix haute, eut une moue insatisfaite, décida que ça ferait l’affaire et que la spontanéité était la clé, et s’adressa au brave homme : il voulait rendre visite au prisonnier. La négociation ne dura pas longtemps. C’était un mort en sursis, on pouvait aussi bien le voir. Autant réclamer de voir un ours en cage qui va être jeté aux chiens. Eymar le remercia pour son amabilité, en lui glissant une pièce au passage. Il fallait toujours se faire des amis, si piètres soient-ils, tant qu’on en avait le luxe. Passé de l’autre côté des lourdes grilles, il frissonna. Cet endroit respirait le danger, bien davantage que les champs de bataille qu’il avait pu fréquenter. Il resta près de la porte un temps, pour s’imprégner de cette atmosphère délétère et écrire encore un paragraphe de sa petite chanson.

Quand l’ennemi m’a lapidé,
Ma peau s’est transformée en celle
D’un tambour de fête endiablée
Et de guerre inconditionnelle.

Puis il se mit en chemin.
Il voyait vaguement qui était Hyriel. Ils s’étaient croisés dans des tavernes, alors qu’il s’encanaillait et que les défis de boisson volaient haut sous les charpentes de bois brut. Ce n’était pas un mauvais bougre, mais bien sûr, ce n’était pas sur ce point que la justice rendait ses décisions. Il était herboriste après tout, ce qui faisait de lui quelque chose comme une sorcière, et la limite fatidique était vite franchie. Et puis, il pouvait avoir une langue bien pendue ; pour sa part, il s’était sans doute fait un ennemi de trop. La vie était ainsi faite. La silhouette longiligne d’Eymar disparut au hasard des soupiraux obscurs, et il songea : soupirail, voilà un mot qui mérite plus d’intérêt. Voilà un mot qui sera le ressort d’une énigme, sur une page prochaine. Pour l’heure, il complétait de loin en loin sa petite ballade.

Quand l’ennemi m’a enterré,
Je me suis transformé en graine
Et de mon tombeau a germé
L’écho des rébellions prochaines.

Enfin, il arriva à la grille qui renfermait le fauve recherché. Le mot « soupir » restait ancré dans son esprit. Il fallait que la ballade se termine ainsi : sur un dernier soupir. C’était logique. Une tristesse poignante s’emparait de son cœur d’artiste. Il considéra l’homme enchaîné, songeant qu’il ne fallait pas tant de précautions pour le tenir immobile, dans l’état où il était. Mais la justice en faisait toujours trop, plutôt trop que pas assez, pas vrai ? En guise de salutation, il reprit sa ballade depuis le début, et la lut à voix haute, terminant par un dernier couplet qui lui vint en tête spontanément, et qu’il ne nota qu’ensuite :

Quand l’ennemi sur le bûcher
M’a enchaîné pour me détruire
En feu grégeois j’ai su changer
Mon sang et mes derniers soupirs.

Il releva le visage et sourit, son regard automatiquement illuminé de cette lueur d'intelligence qu'il adoptait face à un potentiel complice de frasques. Hyriel le reconnaissait-il ? Eymar se détachait des fréquentations de tavernes que l’on rencontrait souvent, à la fois activement et passivement. Il savait qu’il allait s’en détacher, aussi il y travaillait d’arrache-pied pour que cet effet semble forgé de sa propre main, plutôt qu’imposé par les aléas de la vie. Ayant attiré l’attention du captif, il lui adressa une profonde révérence. Et il ne sut pas quoi ajouter. Après tout, ce n’était pas le genre de visite où l’on apporte des roses, des remarques sur le climat, ou des rumeurs mondaines.
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Message par Hyriel Radgery Jeu 8 Avr - 15:54


Des pas, légers, tranquilles – dansants, même ! – résonnèrent dans le sombre couloir. Étranges, pour qui n’avait entendu que des pas de cardinal ou de gardes, ces derniers temps. Avec une lenteur calme, bien plus que lasse, Hyriel tourna la tête dans leur direction, dirigé par la même curiosité qui plissa subtilement ses yeux. Une silhouette en parfait accord avec son pas se détacha peu à peu et, plus elle s’approchait, plus un infime sourire malin se dessinait sur la figure de l’herboriste. Il connaissait l’homme qui approchait, même si le contexte de leurs rencontres était d’ordinaire tout à fait différent et nettement plus joyeux. Il aurait toutefois été bien incapable d’en dire beaucoup à son sujet, outre qu’il parlait bien et animait merveilleusement les tavernes quand il y passait. Et qu’il cachait une histoire au niveau de sa jambe plus frêle que l’autre, détail que le médecin aux échasses squelettiques n’avait pas manqué de noter.
Ainsi donc, il venait pour lui ? Voilà qui était fort intéressant et promettait de faire agréablement passer le temps.

Quand ils furent assez proches, Hyriel croisa le regard triste de l’homme et haussa les épaules, fataliste. C’était ainsi… Il dut toutefois se mordre la lèvre pour réprimer une grimace. Une journée était somme toute bien peu pour se remettre de la torture.
Alors la voix du marcheur dansant résonna dans le sombre couloir, donnant l’envol à ses paroles et aux pensées d’Hyriel, qui se laissa bercer par cette ballade un tantinet dissidente, pour le mieux. Même s’il n’avait pas été éduqué aux Lettres, comme son visiteur l’était visiblement, l’herboriste savait reconnaître la beauté des mots, ainsi que leur force. La malice de son sourire s’étira des deux côtés au fil de la ballade, surtout quand il entendit la fin. À ce moment, la figure de l’herboriste s’égayait jusqu’à ses oreilles, l’expression similaire qu’il lut dans les yeux du poète n’y étant pas pour rien.

À sa révérence, Hyriel inclina la tête, sans se départir de son sourire.

« Voici une entrée en matière des plus plaisantes ! Je pense que je ne me lasserai pas de l’écouter encore et encore, tant les mots, vers et phrases y sont charmants ! »
Il prit alors une moue faussement innocente.
« Quant aux derniers vers, je suis certain que si je croise un jour un condamné au bûcher, je ne me priverai pas pour lui en transmettre l’idée. Certains aiment les feux, autant ne pas les en priver… »
Il ne fallut pas longtemps pour qu’une malice joueuse revienne tirer les traits du sorcier.
« J’espère que vous ne m’en voudrez pas de ne pas me lever pour vous rendre votre gracieux salut, j’ai quelques difficultés à me mouvoir, ces derniers temps. »
Un tintement de chaînes, agitées à la manière des pièces d’une danseuse djerdanne, ponctua son excuse.
« Mais puis-je vous demander ce qui vous amène en ces lieux ? J’imagine que vous cherchez autre chose que la douceur d’une infusion contre le mal de gorge… »

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Message par Eymar Sartyre Dim 11 Avr - 14:29

Tout n’avait pas l’air d’aller si mal. Le captif était alerte, son œil sautait d’un détail à l’autre avec l’acuité d’un animal qui cherche à se déplacer dans un lieu sauvage et menaçant. Sa diction était claire, signe que son délabrement physique n’avait aucune prise sur les facultés de son intellect. C’était plaisant à constater. Eymar répondit avec un large sourire de circonstance :

« Eh bien, nous nous connaissons. Je viens prendre de vos nouvelles, il paraît que vous êtes soudain devenu quelqu’un d’important, et toutes les rumeurs en circulation me peignent de vos agissements un portrait différent. »

Le courtisan haussa les épaules, ses cils battirent et ses prunelles se détournèrent. Il avait pris place contre un mur auquel il appuyait son dos vêtu d’un délicat brocart, avec la prudence qui s’impose. Ses bras croisés donnaient l’impression qu’il partageait une conversation philosophique lors d’un déjeuner sur l’herbe ; mais il était pleinement conscient des conditions quelque peu rustiques du lieu. En fait, il aurait agi de même lors d’un déjeuner sur l’herbe. Il aurait pris garde à la rugosité de l’écorce, aux fourmis, aux oiseaux, aux chiens, à la boue, bref : il aurait passé un bon moment. La moitié de son cerveau veillait toujours à l’image qu’il donnait, tandis que l’autre faisait usage des capacités physiques de cet image. Et comme son interlocuteur y faisait allusion, il salua cette capacité, avec tout le respect qu’elle méritait :

« Laissez ma grâce où elle est, nous savons tous deux qu’elle n’est due qu’au hasard. »

La conversation philosophique commençait. Oui, ils se connaissaient, et c’était d’une habitude des mêmes tavernes ; lieu parfait s’il en est pour la philosophie. Mais étant donné le risque mortel qui pesait au moins sur l’un des deux concernés, d’autres directions plus pressantes existaient sans doute. Par courtoisie, il convenait de s’en enquérir.

« Je pourrais être à votre place, et vous à la mienne. Les méandres de cette vaste rivière nous ont rejetés sur les rivages où nous sommes. Comment vous sentez-vous ? Avez-vous une requête ? Je suis en position de les transmettre et, pour une certaine part, de les exaucer. Profitons-en. »

D’un coup d’œil en direction du couloir, il s’assura que les gardes ne les écoutaient pas. Pour que la parole soit libre, il convenait qu’elle reste confidentielle. Et venir se coller à cette maudite grille pour chuchoter comme un manant effarouché lui aurait désagréablement chatouillé l’ego. Il aurait pu s’y résoudre, en cas de besoin criant, mais pas de gaieté de coeur.
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Message par Hyriel Radgery Lun 12 Avr - 11:50


Prendre de ses nouvelles, quelqu’un d’important, eh bien ! L’herboriste en fut flatté et ne manqua pas de le montrer par un mouvement de la tête et une expression de même.

« Vous m’en voyez honoré ! Il semble qu’en effet, l’on s’arrache pour m’avoir… sans manquer de m’arracher au passage mais je suppose que c’est le prix à payer pour la célébrité. »
Puisque c’était du passé, autant en rire qu’en pleurer… Mais inutile de s’y attarder.
« Mais que vous a-t-on dit de moi ? Je suis curieux ! »
Vu son chef d’accusation principal, ces rumeurs devaient être fort créatives !

L’aisance avec laquelle son interlocuteur prenait son pied dans ces lieux était impressionnante. À croire qu’il n’était pas dans un couloir sombre – royal, certes, mais sombre quand même – mais dans quelque salon. Quand l’on avait en tête ces salauds de gardes de la prévôté, c’était rafraîchissant ! Avoir une vraie discussion avec quelqu’un d’intelligent lui avait manqué…
Un soubresaut de rire douloureux aux côtés, presque un souffle, réagit à la remarque du courtisan sur la grâce. Due au hasard, en effet, comme ses jambes à lui. Certains avaient plus de chances aux dés de la Création que d’autres, pour le meilleur comme pour le pire. Que penserait le cardinal de cela ? Les grâces étaient dues au hasard et les défauts, au péché ? Il n’en serait même pas étonné. Il lui poserait la question, à tout hasard. La réponse promettait d’être éclairante…
Les paroles du joyeux poète réchauffèrent le cœur du sorcier. Du bon sens, de la lucidité et de la générosité. Cela semblait si rare… Après avoir secoué la tête pour rassurer son interlocuteur quant aux gardes partis loin, ce fut cette fois un sourire des plus sincères qui étira les lèvres de l’herboriste, assorti d’un regard de même.

« C’est très gentil à vous… »

Mais le cynisme, seconde nature du lucide Iswylan, ne tarde pas à refaire surface.

« Pour vous répondre, je me sens libéré : je vais mourir, c’est certain à cause de ce que cette torture maudite m’a fait dire, alors c’est comme si toute crainte de la punition s’était envolée. Ce n’est pas pour autant que je vais voler ou tuer mais quant à dire enfin ma façon de penser, même devant le roi, je ne vais pas me priver. Quant à votre offre si généreuse… à moins que votre influence vous permette d’aller contre une condamnation au bûcher pour sorcellerie avec aveux à l’appui, je crains ne pas voir ce que je pourrais vous dire, à part vous remercier pour l’intention… »

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Message par Eymar Sartyre Lun 12 Avr - 12:45


"A en croire tous vos admirateurs à la fois, vous êtes un démon incarné dans un infirme – quel mauvais calcul, mon cher ! - qui séduit de jeunes vierges à l'aide d'incantations méphitiques, et les découpe dans de sombres arrières-cours pour revendre leurs organes à vos semblables, les uns en toute franchise, les autres en toute ignorance. Par ce biais, vous récupérez en retour, tout ou partie de leur âme immortelle, et vous en faites commerce dans le monde souterrain."

Au cours de sa tirade, qui tentait de coudre ensemble tous les bruits de couloir qui s'étaient murmurés autour de lui lorsqu'il avait demandé un résumé du procès, Eymar s'était mis à rire silencieusement à son tour. Sa main vint instinctivement cacher ses dents, alors que sur la fin, le petit ricanement involontaire se transformant en franc fou rire. Elles n'avaient rien de particulier à se reprocher, mais il ne riait pas en montrant les dents. Il était trop bien élevé pour cela.

"Je veux bien croire à la séduction, quant au reste... Beaucoup d'efforts et de risques pour pas grand-chose, n'est-ce pas ?"

Si Eymar avait dû inventer une telle histoire, et il en avait envie, juste pour en faire la démonstration, il aurait au moins eu la décence de prêter à son protagoniste démoniaque des intentions construites et articulées. Il en était vraiment tenté, mais ce n'était pas le moment. Plus tard, un jour où cette histoire serait devenue souvenir, et où il s'en rappellerait avec un petit sourire qui serait l'ombre de ses moqueries actuelles. Tant que l'ombre était encore chair solide, il convenait de la prendre à bras le corps.

Il changea de visage et fixa son regard dans celui du prisonnier. Il espérait que ce dernier ne le considérait pas comme un simple libertin en promenade, quelqu'un qui se divertit dans les taverne, qui se divertit dans les prisons, et qui se divertit dans la salle du trône. Il prenait assez de peine à se composer cette apparence, auprès des personnes qui sans ça, l'auraient trouvé dangereux ; mais il ne voulait pas qu'elle lui colle à la peau dans les contextes où elle ne lui était pas utile.

"Soyons sérieux, quoique l'heure le soit déjà pour nous. Je peux demander une grâce, c'est dans mes cordes. Il est regrettable que votre procès soit déjà derrière vous : cela rend les choses plus complexes, politiquement parlant. Mais vous auriez le profil pour rejoindre la ménagerie royale, vous savez ?"

Le ton de sa voix était léger, insouciant. Oui, il aurait pu être un simple courtisan qui plaisante de tout et ne s'aperçoit plus des conséquences de ses mots. Si quelqu'un s'était approché à cet instant pour les écouter, il aurait endossé ce rôle immédiatement. Lâcheté ? Peut-être, mais cette grille était faite exactement de la même manière en ces deux côtés, et face à cet homme qui se prétendait libre, il pouvait tout à fait s'imaginer être en cage. Et puis, lâcheté était mère de toutes ces vertus cérébrales auxquelles la bravoure, en revanche, ne contribue généralement guère. A ce propos, il y avait dans cette proposition un cerveau dont il allait falloir tenir compte, et il n'était pas dans ces murs. Mais il ne fallait pas l'oublier. Sa présence pesait sur leurs destins à tous. Particulièrement celui d'Eymar, il fallait bien l'avouer.

"On ne trompe pas la vigilance du monarque que nous avons. Je ne peux pas lui mentir sur la marchandise. Il me connaît trop bien. Nous devrions donc argumenter sur la base de vos réels mérites, de son point de vue, naturellement. Et sans doute, vous faire passer pour mort."

Ce n'était pas si compliqué à imaginer, et il en savait suffisamment sur le fonctionnement interne des cours royales pour savoir que ce genre de mystères était souvent passé sous silence ; une somme intéressante dans une patte, un mensonge habile dans une oreille là où la corruption n'aurait pas suffi ; c'était du travail, pour extraire un vulgaire manant d'un prédicament où une malchance sans doute un peu démoniaque l'avait jeté ; mais il avait du respect pour son compagnon de tavernes, et il ne voyait pas pourquoi il n'aurait pas employé son temps libre à le maintenir sur la surface de cette Terre, surtout en se rappelant les intentions de ceux qui cherchaient à l'en soustraire. Les ennemis de mes ennemis, et ainsi de suite.

"Mais bien sûr, votre sentiment de libération s'évanouirait alors : vous seriez en cage. Une bien jolie cage. Celle du secret et du service royal. Je m'accommode de la seconde, il faut dire que je m'en échappe parfois, comme vous n'êtes pas sans le savoir..."

Avec un clin d'oeil, il franchit les derniers centimètres qui le séparaient de cette odieuse grille, y replia ses longs doigts fins aux ongles soigneusement taillés, et posa dessus son menton en inclinant la tête sur le côté, comme le font les chats qui considèrent une petite chose flottante, en se demandant s'ils vont se contenter de la regarder passer paresseusement, ou se jeter dessus au galop.

"Tout dépend de votre caractère, avant même de réfléchir sérieusement à la chose. Jusqu'à quelles génuflexions seriez-vous prêt à vous résoudre, par exemple ? Disons que pour l'heure, c'est une question complètement hypothétique."
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Message par Hyriel Radgery Mar 13 Avr - 12:33


Quel portrait ! Hyriel s’en délecta, une mine rieuse au visage et même quelques souffles de rire de temps en temps. L’humain était tout de même sacrément créatif pour inventer des histoires à faire peur. À dormir debout aussi. Parce qu’on avait tellement peur qu’on dormît debout ? Dans ce cas précis, ça semblait se tenir. Le geste de son interlocuteur intrigua Hyriel, qui comprit alors qu’il riait avant même de terminer. Il n’en fallut pas plus à Hyriel pour se laisser aller à rire plus franchement avant suivre complétement son interlocuteur dans l’hilarité, malgré les douleurs de ses côtes. C’était si libérateur, mine de rien, de rire avec sincérité ! Et si entraînant ! Tellement, même, qu’il eut bien du mal à s’apaiser pour répondre à la question. Il prit une grande inspiration avant de concéder ce point…

« En effet… Il faut croire que je me suis lancé dans une si grande entreprise sans avoir le sens du commerce qui m’y aurait aidé… »

Mais la conversation redevenait sérieuse, bien que toujours aussi malicieuse. La première fois qu’Hyriel avait rencontré cet homme, il l’avait pris pour un fanfaron plaisantin qui riait de tout et sans doute n’était-il pas le seul. Toutefois, en discutant plus avant, il en était venu à se dire qu’il avait plutôt affaire à un homme profondément lucide et cynique derrière le masque. Un homme qui se cachait. Comme lui-même. Oh, ils ne cachaient pas les mêmes choses mais tout de même. Le principe général demeurait le même.
Hyriel écouta donc la proposition. En effet, elle s’étudiait. Une grâce royale le sauverait, en effet, et mourir n’était pas dans ses objectifs du mois… La question de la fin le fit sourire à demi, voire au quart. Un léger petit sourire malicieux assorti d’un malin plissement des yeux.

« On me l’a dit, en effet… »

Dans ce qui pourrait presque être une autre vie… Et après tout, peut-être aurait-il pu l’être depuis plusieurs années ? À la ménagerie, on rassemblait les animaux exotiques ramenés des pays conquis, entre autres, non ? Alors un infirme iswylan avec de bonnes connaissances en médecine et trop de fierté pour se laisser marcher dessus y aurait toute sa place. Les yeux d’Hyriel s’étrécirent davantage à la suite, signe qu’il réfléchissait à toute allure et que la proposition lui plaisait.

« En effet… J’imagine qu’une partie de l’argumentaire aura lieu quand il verra mes jambes. Pour le reste, je peux m’enorgueillir de pouvoir jouer à ma fantaisie avec les plantes, pour soigner généralement, et d’avoir énervé assez le cardinal en lui disant la vérité en face pour me ramasser tant de claques que j’en ai perdu le compte. Oh et j’ai travaillé comme jardinier pour un comte. Si donc le roi a besoin d’un jardinier pour lui faire une jolie serre… Si donc cela peut plaire à Sa Majesté, ce sont là mes compétences. »
Son sourire s’étira la suite, innocemment malin.
« Tant que vous pouvez me ressusciter après… »

Après tout, il était déjà mort pendant le sac de son village, en théorie. Mais se faire passer pour mort… Une de ses pensées alla à Kalisha. Avait-elle utilisé son poison ? Avait-il été trouvé chez elle ? Il n’espérait pas. Il ne voulait pas qu’elle ait d’ennuis. Elle en avait trop subi à cause de la politique et de choses qui n’étaient pas de son fait.
C’était en tout cas fort rassurant de se savoir un potentiel appui haut placé. Il avait toute confiance en ses trois amis, bien sûr mais il savait bien qu’eux ne pourraient rien faire contre un cardinal et un roi. Comme les autres fois, il chassa cette pensée pour ne pas s’embarquer dans une cascade d’inquiétude dont il n’a pas besoin puisqu’impuissant. Il en revint plutôt aux propos du courtisan. Effectivement, sous la coupe du roi, il ne serait plus libre mais un oiseau dans une cage en or… Toutefois… Il y aurait aussi des avantages, outre celui d’être vivant : revoir Lénius, s’amuser dans ce monde de fou, faire un magistral pied de nez à Monbrina et à la religion qui voulait le brûler… Et puis, en effet, on pouvait s’en échapper de temps en temps. Hyriel ne manqua pas de retourner un ris amusé au clin d’œil. Il suivit alors du regard son interlocuteur tandis qu’il s’avançait, parcouru d’un frisson d’excitation : les complots avaient cela de stimulants et d’affriolant, ce qui n’était pas pour déplaire à l’herboriste. La question qui suivit accentua encore davantage, si c’était possible, les traits astucieux du prisonnier qui regarda le plafond en réfléchissant à voix haute.

« C’est là une question difficile… »
Jusqu’où pourrait-il aller au service de l’homme qui lui avait pris sa famille et ses rares amis ? son pays ? sa maison ? celle de tant d’autres ? L’homme qui avait fait tomber les parents de Lénius, réduit en esclavage et arraché à leur pays Phaïdée et Jérémie ? forcé Kalisha à se marier au porc de Monthoux ? massacré des pays entiers ?
« Je pense que je ferais comme mes genoux sont capables : tout ou rien. Je dois bien reconnaître que j’ai l’habitude de dissimuler ma pensée et que j’aime m’amuser. Vivre aussi, est une occupation fort sympathique. »
Et même s’il s’était résolu à sa condamnation, il partirait amèrement s’il devait ainsi marquer la victoire de l’Église. Ses yeux revinrent au courtisan.
« De plus, je ne suis pas un expert dans l’art de la guerre mais un feu grégeois n’est-il pas plus efficace quand il a de quoi l’alimenter ? Et quel meilleur aliment que sa source première ? »

Car au fond, une place aussi proche du roi, malgré tous les inconvénients que cela poserait, ne lui permettrait-elle pas de réchauffer le projet de vengeance qui lui trotte dans la tête depuis son départ d’Iswyliz ?

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Message par Eymar Sartyre Dim 18 Avr - 16:27

De l’intérêt, c’était un début. De l’intelligence, ce serait nécessaire ; car le jeune courtisan lui aussi jouerait sa vie dans cette affaire, une tête comme la sienne était aussi facile à faire rouler à terre que n’importe laquelle, et ses attaches n’étaient pas plus solides. A cela, la complexion ne changeait rien. Il considéra les qualifications qui lui étaient listées, en se peignant un portrait assez complet du camarade qui figurerait un jour à ses côtés dans la ménagerie royale. Un oiseau exotique de plus. Il n’y aurait rien de bien étonnant en soi, mis à part le fait qu’il aurait participé à l’arracher aux flammes de l’enfer. Jardinier donc, soit… Il le voyait assez bien dans une serre, parmi les plantes et les créatures importées d’autres latitudes.

Tiens, une dette ? Il n’était pas sûr de vouloir en imposer une, comme il n’aurait pas aimé en avoir une. C’était bien trop contraignant, tout ça. C’était une forme de mariage. Tout son être se révulsait à cette idée. Il respectait trop ses principes pour contracter un tel engagement de bon gré. S’il n’y était pas forcé, il l’éviterait.

« Vous vous demandez sans doute quel intérêt j’aurai dans toute cette entreprise ? Mis à part satisfaire les principes du gentilhomme, et l’ennui du courtisan. Je ne cherche pas à vous imposer et vous rappeler une dette. Après tout, si vous aviez vu ma vie en danger, vous l’auriez sauvée de toute façon, n’est-ce pas ? Même sans me la devoir. »

N’était-il pas herboriste ? Et surtout, il avait un esprit de contradiction bien développé ; assez pour ne pas vouloir qu’une vie qui n’aurait jamais dû échouer sur ces rivages s’éteigne et en disparaisse devant ses yeux. Il aurait tenté quelque chose, ne serait-ce que pour s’opposer aux badauds qui auraient trouvé un certain soulagement à voir le courtisan succomber. Mais enfin, il fallait bien donner une explication à cette décision qui était la sienne, ce pacte qu’il tissait, pour le temps d’un plan à accomplir.

« Vous allez rire – et vous avez un joli rire, ne vous en privez donc pas – mais je suis une sorte de roi, moi aussi. Je collectionne les gens à leur insu, les esprits sont mes monstres et j’ai fini par m’attacher au plus tordu de tous. Je reste conscient qu’il est dangereux, mais esthétiquement, vous savez ce qu’il en est ; on ne contrôle pas les élans de sa nature.
Devenu malgré moi cet ours qui, sans esprit,
Défendrait de ses crocs la main qui l’asservit,
etc. Vous connaissez la Complainte de Libert, comme tout un chacun. Bref… Nous ne sommes pas là pour parler de moi, ni de mon monstre. »
Son sourire s’étira, teinté d’une compréhension qu’il espérait trouver également chez son interlocuteur. « Je lui rends service, en lui évitant de perdre stupidement une occasion de faire ce qu’il aime le plus au monde : apprendre. Disons, pour l’heure, que c’est ce service qui me motive. Je lui dois mes armes, de ma rapière jusqu’à ma langue. Et je les lui dois d’autant plus qu’il se fourvoie, sans doute. »

Que cette explication lui suffise. Eymar ne pourrait guère s’attarder dans ces lieux gênants pour sa réputation, et désagréables à sa gorge, qui en éprouvait déjà le froid. Il avait gardé de ses jardins de naissance une certaine sensibilité à ce sujet.

« Bien, ceci étant posé, parlons affaires, vous et moi. Je ne pourrai œuvrer seul, il faudra que je me gagne quelques appuis, et si vous en avez déjà que vous pourriez me prêter, ce serait d’autant plus rapide. Nous n’avons guère de temps devant nous, et ce n’est pas Sa Majesté qui se chargera de la réalisation physique du plan, quelle que soit sa nouvelle bienveillance à votre égard. Je pourrais m’adresser à mes amis les plus proches, bien sûr, et supposer qu’ils prendraient le risque pour moi... »

Il se tut, les lèvres entrouvertes, interrompu dans son discours par ses propres pensées, qu’il suivit un temps en considérant dans l’espace vide quelques visages possibles. Qui pourrait-il convoquer ? Quels atouts risquerait-il dans la partie ? Aucun sans crainte. Aucun sans danger.
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Message par Hyriel Radgery Lun 19 Avr - 18:25


L'expression de son interlocuteur laissait deviner à Hyriel qu'il songeait aux éventuelles possibilités que ses compétences ouvraient. Hormis en herboristerie, elles n’étaient pas bien folles, surtout comparées à celles dont d’autres faisaient preuve, mais tout était bon à prendre. Vint ensuite la question du retour qui, effectivement, se posait. Contre une vie, on pouvait tout demander, surtout quand on se mettait en danger en la sauvant. Toutefois, le courtisan annonça ne rien vouloir. Hyriel ne cacha pas sa surprise : voilà qui n’était pas commun ! Il concéda toutefois le dernier point.

« En effet, vous avez raison. Dans tous les cas, votre bonté d’âme vous honore, d’autant plus qu’elle semble être une denrée rare entre ces murs. »

Il était toutefois toujours autant intrigué par ses raisons car, au fond, sans contrepartie, pourquoi se mettrait-il en danger pour lui ? Il le laissa donc exposer ses raisons, sans manquer de sourire et même rire doucement au compliment. Alors comme cela, il avait devant lui une sorte de double de leur souverain, même si tout semblait les opposer. Un double qui collectionnait les esprits, là où le roi regardait apparemment plus aux corps. Voilà qui était déjà plus intéressant, surtout qu’il avait donc dans sa collection son propre collectionneur ! Voilà effectivement qui était fort amusant et qui ne manqua pas de faire rire Hyriel, comme annoncé.
Son sourire se cala ensuite sur celui du courtisan, comprenant de mieux en mieux ses intentions, même si quelque chose semblait demeurer caché. Hyriel aura hocher la tête mais sans insister : il était déjà bien assez généreux de lui offrir une porte de sortie intéressante sans contrepartie, il n’allait pas cracher sur sa chance en risquant de le froisser. Et puis apprendre… c’était là quelque chose qui lui plaisait tout particulièrement, à lui aussi, alors il ne pouvait que comprendre.

Vinrent alors des considérations plus pratiques et Hyriel écouta attentivement. Effectivement, seul, ce serait malaisé. Quant à quelques appuis qu’il connaîtrait… Il y en aurait : Guillaume, Eugène, Florentin, Sylvère, Jérémie… mais ils ne pourraient pas influer sur les décisions du roi et il ne souhaitait donc pas les mettre en danger inutilement, eux qu’il avait épargné par son absence d’aveux. En revanche, un nom lui vint à l’esprit, une personne qui pourrait aider Eymar, qui le connaissait sûrement et qui, de toute manière, était déjà trempée dans l’affaire. L’herboriste aura pris soin de regarder autour de lui par principe avant de se pencher en avant pour ne pas parler trop fort.

« Vous qui hantez les couloirs de ce palais, vous devez connaître Lénius, j’imagine, l’homme qui m’a défendu à mon procès. C’est un très bon ami, cultivé en tout point, qui pourra sans doute vous aider. Pour être utile dans un si court laps de temps, je crains qu’il n’y ait que lui… »

Et, si jamais c’était réellement nécessaire, il connaissait ses trois compagnons, même s’il espérait qu’il n’y ait pas besoin de les mettre en danger.

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Message par Eymar Sartyre Mer 21 Avr - 17:39

Lénius. Bien sûr qu’il le connaissait, ils étaient même frères, dans cette ménagerie dont ils étaient des joyaux particuliers, chacun à sa façon. « Les joyeux de la couronne, » comme il disait parfois en fin de soirée, avec un petit sourire. C’était avec plaisir qu’ils échangeaient des bruits de couloirs et autres confidences, et que parfois, Eymar lui confiait des textes à répéter en ville l’air de rien, pour que les rumeurs aient l’air de venir de nulle part et de partout à la fois. C’était un plaisir rare que de s’entendre répéter quelque chose qui « se disait en ville », et qu’il avait lui-même lancé, comme une flèche magique, par l’intermédiaire du petit bonhomme.

Eymar avait une autre fantaisie. Il laissait courir le bruit que l’infirme pouvait être l’auteur réel des complaintes de Libert. Tant qu’on l’en soupçonnait, le soupçon ne revenait pas se poser sur lui. Étrangement, ça ne paraissait pas plausible. N’avait-il pas une tête à tenir la plume ? Ou à l’aiguiser sur la réputation de ses semblables ? Allons, il valait mieux ne pas se poser la question. Le fait est qu’il pouvait rire aux dépens de la Cour, plus souvent qu’à son tour, et il en était radieux. Et si vraiment il arrivait à empêcher un odieux abus judiciaire en cette occasion, grâce à ces petits talents inutiles, il en serait plus que radieux. Pour une fois, en toute sincérité, il serait heureux d’être au monde.

« Cultivé, on peut le dire en effet. Je le rencontrerai dès que je sortirai d’ici. Personne ne s’étonnera que les bêtes curieuses de Sa Majesté aient des choses à se dire. »

Les rouages de son esprit fonctionnaient toujours. Quelle image voulait-on donner du futur mort en puissance, afin de préparer sa disparition ? Un authentique sorcier qui serait enlevé par les forces maléfiques, traîné au fond des enfers par une faille qui s’ouvrirait dans le pavé même, révélant les flammes au dessous ?

D’une part, cette idée le gênait parce qu’il ne lui trouvait pas la tête de l’emploi, à ce joli garçon si vilainement lié en face de lui. Enfin, ces liens auraient pu avoir leur esthétique en d’autres lieux, mais bref, là n’était pas la question. D’autre part il ne voulait pas soustraire son bûcher à la foule pour lui en donner une effigie. Il trouvait cette perspective odieuse, cet appétit immonde. Il aurait aimé les en frustrer, faire naître parmi la foule le débat désagréables des raisons pour lesquelles cette pulsion se développait.

Il en demandait peut-être beaucoup. C’est ce que lui disait inlassablement la jolie Vanina, qui dansait sur la place. Il espérait beaucoup de ce grand spectacle qu’était son passage sur terre, et il oubliait parfois que les artistes, lui le premier, n’étaient que des humains.

« Vous allez passer pour mort. Sans quoi vous seriez recherché. Il faut donc que votre décès soit crédible. Pour ce résultat, des signes doivent avoir lieu, qui laisseront penser au quidam moyen que votre vie est en danger. Ainsi, le jour où l’annonce en sera faite, personne ne sera surpris. Voyons… un problème de santé... »

Hyriel était condamné au bûcher, certes, c’est un problème de santé comme un autre ; mais cela mis à part ? Il avait ces soucis de jambes qui pouvaient être incriminés de toutes sortes de dangers, la gangrène pour commencer. Il pouvait être empoisonné dans sa cellule, par un autre sorcier qui voudrait éviter des révélations de dernière minute… Il pouvait avoir une faiblesse de poitrine, et qu’on évoque une mauvaise toux que la cellule aurait aggravée. Il pouvait recevoir une morsure pernicieuse de la part d’un des chiens de garde… Tout pouvait être imaginé, et répété en ville avec la componction faussement sainte de ceux qui attendent avec avidité le déclin et la mort d’une célébrité, tout en paraissant la plaindre. Tout préparerait l’opinion publique à accepter d’être privée de ses grillades de chair humaine.
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Message par Hyriel Radgery Sam 24 Avr - 21:18


Vu l’expression de son visage, il savait qui c’était et ses paroles le lui confirmaient. Le contraire l’aurait étonné, à vrai dire. Entre bouffons et autres « objets de collections », ils devaient tous se connaître. Hyriel ne put qu’acquiescer de nouveau à la mention de la culture de Lénius. Bagage dangereux mais ô combien glorieux ! Et ils allaient donc entrer en contact, c’était parfait. Un rictus ironique tordit un instant les lèvres de l’herboriste à la mention des « bêtes curieuses » de Sa Majesté. En effet… Un des avantages du métier, sans doute.

« Et c’est tout à votre avantage. J’espère que votre entreprise sera couronnée de succès ! »

Réfléchir à un plan semblait gêner le courtisan, ou plutôt quelque chose dans ce plan mais impossible pour l’herboriste de savoir quoi. Il le laissa donc cogiter, prêt à répondre à toute question qui pourrait l’aider tout en demeurant à l’affût des gardes qui reviendraient, puis écouta le compte-rendu de sa réflexion. Des signes de la mort, des maladies, un problème de santé. C’était une bonne idée, en effet, et aisée à feindre, surtout pour un médecin. Il se mit alors à réfléchir, jetant les idées comme elles venaient.

« Je pourrais souffrir des suites de mes blessures de torture… Ce me semble assez logique… Ou avancer que mes jambes me font souffrir plus que de coutume, comme si mon mal progressait. Ce sera aisé à feindre vu la douleur que j’y ressens grâce aux brodequins. Après, je préférerais éviter qu’on me les coupe afin de me garder en vie… Sinon… une bonne maladie hivernale, à la suite des plongeons de ce matin ou du vent dans la cellule, ce serait tout à fait crédible… »

Ces trois-là lui semblaient les plus évidents et il relevait de temps en temps la tête pour voir les réactions de son interlocuteur, prêt à en trouver d’autres si besoin, en fonction de ce qui semblerait le plus évident à gérer de l’extérieur, car c’était ce qui comptait.

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Message par Eymar Sartyre Ven 7 Mai - 11:10

Eymar se mit à marcher de long en large, tel un professeur qui expose, d’une voix lente destinée à l’attention des profanes, ses dernières découvertes. Il commençait à vraiment y croire, et de ce fait, à vraiment s’amuser.

« Nous allons additionner toutes ces idées, et les jeter de par le peuple à des endroits différents du champ, pour qu’elles germent et se rencontrent, forment débat, et semblent naturelles. »

Il imagina le manège des bonnes gens qui devraient sortir le corps de la prison, ce qu’ils devraient voir, pourraient savoir, et décida que moins les petites mains en sauraient, mieux ce serait pour les nobles commanditaires. Car il aurait officiellement le rôle de commanditaire, dans le scénario qu’il prévoyait.

« Je prétendrai acheter votre cadavre pour les collections royales, en grand secret bien sûr ; si celui-là s’ébruite, ce ne sera jamais qu’une rumeur étrange de plus, pas de quoi choquer les foules. Au final, pour que votre corps soit enlevé avec réalisme, et assez rapidement, je suggère de privilégier les jambes. Un homme de votre condition sociale est censé tenir quelques mois avec une infection pulmonaire. »

Il s’arrêta et passa machinalement la main sur sa propre jambe boiteuse. Il pouvait en limiter les signes, presque jusqu’à passer inaperçu, mais sans doute pas auprès d’un praticien qui avait déjà vu boiter bien des congénères ; sa propre situation l’entraînait peut-être à choisir le scénario de la jambe tueuse, il n’était pas maître de tous les rouages de son âme. Mais il lui paraissait crédible et fonctionnel. Il expliqua :

« Ce qu’ont vos jambes, nul n’y comprend rien. Notre imagination peut donc s’exprimer. Les brodequins sont de notoriété publique, nous laisserons bavarder nos chers concitoyens quant à la cause exacte de votre déclin. »

Il éclata de rire en imaginant les braves gens de la ville, se demander avec componction si la torture avait réveillé le démon qui couvait dans les jambes de l’infirme, et élaborer toutes sortes de théories fumeuses à ce sujet. Ils étaient impayables, ces clowns, dommage qu’ils n’aient même pas conscience de leur talent.

« Et de fait, nous arguerons que vous refusez l’amputation. Étant condamné, on ne s’en étonnera pas. Donc, vos jambes se sont brusquement paralysées, le lendemain ce sera jusqu’à la taille, et le surlendemain cela gagnera la poitrine, gênant votre respiration. Je le décrirai comme les symptômes d’une morsure de serpent, l’aspect diabolique sera donc présent en filigrane, pour le plus grand bonheur de nos lecteurs. »

Il n’expliqua pas davantage ; les latitudes qui l’avaient vu naître, et qu’il avait reconquises à la pointe de l’épée pour le nouveau souverain auquel elles l’avaient elles-mêmes condamnées, tel un héros de mythe ancien, étaient fertiles en animaux venimeux – ou vénéneux, il y en avait pour tous les goûts – et ils devaient avoir connaissance des mêmes effets. Et puis, Monbrina ne manquait pas de vipères.

L’essentiel étant posé, il se prépara à prendre congé. Mais il ne pouvait pas serrer la main de son interlocuteur. Ce léger tracas lui était désagréable. Il était plus coutumier des saluts à distance, plus gracieux et moins poisseux, par délicatesse personnelle, surtout dans ses relations avec les quasi inconnus. Mais dans un cas comme celui ci, où la mort était partout, une étreinte même minime lui aurait paru appropriée. Il se contenta donc de revenir fixer son regard à travers les barreaux, animé d’une sympathie qui le rendait lumineux.

« C’est ce que j’imagine pour l’instant, mais vous imaginez bien que le plan pourra être modifié après conversation avec mes complices. Je vais donc les trouver, et quant à vous, n’hésitez pas à vous plaindre de votre santé, dans le cas où nous conserverions ce plan de base. D’ici là, je vais simplement vous souhaiter bon courage, et foi en votre frère humain, fût-il fort isolé sur un océan de vilaines bêtes… Nous savons tous deux que leur bonne ou mauvaise nature n’est jamais qu’une question de circonstances, » ajouta-t-il avec indulgence. Quitte à sortir de prison un condamné, il préférait ne condamner personne trop légèrement.

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Message par Hyriel Radgery Lun 10 Mai - 18:51


Les yeux d’Hyriel suivirent les mouvements de son interlocuteur, tandis que son esprit demeurait tout à leur plan, réfléchissant de lui-même aux manières par lesquelles il pourrait amener ces maladies. Un sourire joueur étira de nouveau ses lèvres à l’idée du poète.

« Voilà effectivement qui formerait un mélange intéressant. Et puis après tout, les rumeurs ont toujours plusieurs visages… »

N’était-il pas lui-même tantôt démon, tantôt sorcier, quand ce n’était pas idole de culte et ogre à mi-temps ?
Mais l’idée ne s’arrêtait pas là. Acheter son cadavre, donc. Voilà qui serait pour le moins amusant… Hyriel acquiesça à cette idée, de même qu’à la suivante. Privilégier les jambes serait le plus facile et, comme il le soulevait, les autres risqueraient de faire douter, en effet. Il suivit sa main du regard et observa sa jambe en continuant d’écouter. En effet, pour tout un chacun, leurs jambes à tous deux devaient exciter bien des questions et ils pourraient en tirer profit. Hyriel souffla de rire avec lui.

« Je sens que cette affaire va me faire gagner un pouvoir démoniaque supplémentaire ! »

Il hocha bien volontiers la tête à la suite. Oh oui, pour refuser l’amputation, en effet, autant aller mourir entier. Jambes paralysées, ce ne serait pas un problème, il faudrait simplement se concentrer pour lutter contre les réflexes. Et puis ça les reposerait, tiens. Il nota dans sa tête les étapes pour qu’ils s’en tiennent à la même version et Hyriel sourit de nouveau à la fin. Comme s’ils prévoyaient d’écrire un de ces romans d’aventure en épisodes !

« Je vous fais confiance. De mon côté, vous pouvez compter sur moi : je jouerai mon rôle. »

Il crut déceler une hésitation chez son interlocuteur mais ne s’attarda pas sur cette hésitation en voyant son visage radieux, à qui il retourna une expression de même. Ce qu’il disait était juste, bien sûr, et il hocha la tête avant de sourire à la foi dans son frère humain. Oui, foi en certains, pourquoi pas ? Mais avec la suite, sa pensée prenait tout son sens et intrigua l’herboriste. Était-ce simplement une pensée optimiste ou savait-il quelque chose sur l’un de leurs frères humains un peu emportés dans leur genre ? Il y réfléchirait plus tard, au cas où les gardes revenaient. Pour le moment, il jugea bon d’acquiescer et de le saluer également.

« Je vous remercie de tout cœur et vous souhaite également une bonne chance dans vos projet, ainsi que du succès à votre plume pour ce merveilleux roman qu’elle va écrire. Quant à moi, je suivrai vos sages conseils mais… » (son visage se trouva soudain précieusement affecté) « ... oh ! Je sens déjà mes jambes faiblir… Quel curieux mal est-ce là ? »

Il ne put retenir un léger sourire – entre complices, après tout… – même si ses yeux tentaient de conserver leur masque de théâtre.

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Message par Eymar Sartyre Mar 11 Mai - 12:24

L’idée de collectionner les pouvoirs maléfiques était séduisante, et si l’on avait pu y accéder par la seule comédie, Eymar s’y serait peut-être risqué, juste pour le plaisir de l’exercice. Mais le temps n’était pas au jeu. Il pouvait maintenant être assuré d’avoir chez le prisonnier un allié solide, ce qui était plutôt plaisant, puisque sa vie courait maintenant un risque aussi élevé, quoique plus éloigné.

« Ma plume ne demande qu’à se dégourdir les ailes, si je puis dire. Bien… Mon secret est à vous, comme le vôtre est à moi. Au revoir, monsieur, nous nous reverrons pour fêter votre liberté. »

Car il le quittait en effet. Il sourit largement et soudain, son sourire s’effaça. Son visage devint un masque impénétrable. Eymar, le joyeux compagnon embarqué dans une nouvelle aventure insouciante pour l’amour de l’art, avait disparu. Ne restait plus qu’un aristocrate hautain et glacial, qui considérait le blessé devant lui avec une moue dégoûtée. Un pas en arrière, puis un autre. Et la seule réaction qu’un tel homme aurait pu avoir : se dédouaner immédiatement de la crise, entre les mains de simples manœuvres qui étaient là pour ça. Placés sur la Terre pour accomplir les basses besognes sur son ordre.

« Je vais prévenir vos gardes. Peut-être pourront-ils faire quelque chose. »

Il n’y avait plus la moindre compassion, le moindre pétillement dans le regard d’Eymar. Il s’était muré derrière le personnage de l’odieux courtisan, détaché de la plèbe au point de pouvoir la regarder se faire écarteler sans plus de réaction que n’en aurait un vautour, regardant une meute de loups déchirer un cerfs. Pourrait-il en retirer quelque chose à long terme ? C’était la seule question qui se posait.

Il fit approcher les gardes, leur désigna le problème comme il aurait jeté un objet sale, et se mit en retrait, pour que ces braves lourdauds constatent la situation sans avoir à faire des efforts d’éloquence ; on ne jette pas des perles aux cochons.

« Prévenez-moi s’il meurt. Il y aura une bonne récompense pour vous. Service du Roi, » ajouta-t-il, comme on jette une aumône, dédaigneux envers le lieu et ses occupants en bloc. Il tira un petit mouchoir parfumé de sa manche et le porta à son nez, en s’éloignant comme s’il ne pouvait tolérer une minute de plus les miasmes de cet endroit lugubre.

Ne serait-il pas soupçonné de l'avoir empoisonné ? Bah, ce ne serait pas la première fois.
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Message par Le Cent-Visages Mer 12 Mai - 13:00

Jusque là, les sentinelles n'avaient suivi que de loin la rencontre entre le courtisan de Mornoy et le sorcier prisonnier. C'était singulier à voir. Ils auraient quelque chose d'atypique à conter aux équipes de relève. Oh certes, les gardes n'auront pu entendre rien de ce qui venait de se dire entre les deux phénomènes, concentrés qu'ils devaient rester sur l'entrée du couloir - et surtout, sur le moment où allait revenir Son Éminence une fois réglées ses affres administratives. Mais la seule vue de la pantomime menée par les deux silhouettes singulières, cette grande perche ébène à la démarche dansante et cet ensorceleur aux jambes squelettes empêtré dans ses chaînes, suffit à leur appétit.
Ils ne s'attendirent donc pas vraiment à ce qu'Eymar Sartyre se tourne vers eux et les fasse approcher, plein de la hautesse de sa condition par rapport à la leur... ou même à celle du prisonnier. Il n'y avait d'ailleurs qu'à voir le désinvolte mépris - teinté d'une pointe de dégoût - avec lequel le Mornoïte désignait l'éclopé ligoté. C'était oublier un peu vite que lui-même pourrait un jour, si Sa Majesté le souhaitait, se retrouver à sa place... mais soit, puisque pour l'instant la Fortune lui était favorable, il pouvait se piquer de la prétentieuse liberté de ses pairs. Hm. Bon. Tous ces courtisans étaient ainsi, à ne jeter que des miettes d'orgueilleuse considération aux subalternes qui faisaient tourner ce palais. Les vigiles avaient appris à s'en accommoder. Ils étaient les pions de l'échiquier, à la disposition des plus importantes pièces. Ils ne cachèrent pas toutefois des haussements de sourcils surpris à la demande que le Sartyre leur formula.

-- Entendu, Monsieur, répondit l'un des soldats en toute sobriété, avec un hochement de tête déférent et en carrant les épaules.

Leurs bottes claquèrent dans un salut protocolaire. Reprise de leur marche vers le sorcier, une fois que le courtisan se sera un peu éloigné. Demeurés neutres devant le Mornoïte, les vigiles n'en comprenaient pas moins entre les lignes plusieurs choses ayant de quoi les surprendre autant que les réjouir. Les surprendre d'abord, en cela que le grand funambule chanteur de rumeurs se mettait donc maintenant à réclamer des corps de condamnés pour Sa Majesté ?! Quelle nouvelle fantaisie était-ce là ? Par Dieu ! Décidément, ces gens des pays sauvages étaient autant à redouter que tous ces phénomènes humains aux corps déglingués que chérissait le souverain. Tout cela était-il bon ? Bah... ce n'étaient pas leurs oignons. Les réjouir ensuite, et surtout, quand ils comprirent qu'ils auraient tout intérêt à ce que cette créature captive leur claque entre les mains plutôt que sur un bûcher à la Grand' Place. Ils en recevraient une coquette somme ? Intéressant. Les prunelles luisantes des deux collègues s'échangèrent des lorgnades entendues. Une juteuse récompense leur allait - le reste ne les regarderait pas.

Pour l'heure, il fallait jauger l'état de l'animal. Les massives ombres des gardes tombèrent sur l'infirme attaché à son mur. Leurs yeux l'inspectèrent sans gêne. Présentait-il déjà quelque signe de faiblesse, pour que le courtisan soit venu formuler pareille requête ? Ou bien... n'y avait-il rien du tout - encore - et le Sartyre, jamais à cours d'idées aussi chaloupées que son corps, prévoyait-il de faire sous peu le nécessaire ? Ils se posaient ces questions tout en dessinant de petits cercles rapaces autour du prisonnier soumis à leur dissection.
Il guettaient quelque indice - un geste, une grimace de douleur, un soupir, un soubresaut... - ou cherchaient à discerner sur sa peau quelque marque de bonne-mauvaise augure... quand soudain le grincement de la porte au bout du corridor attira leur attention : l'on venait. Le Cardinal, enfin délivré du kraken administratif à en croire le claquement sec de ses pas et les froissement de sa robe parvenant à leurs oreilles. Les sentinelles ne purent s'attarder davantage sur l'éclopé. Ils regagnèrent leur poste, comme si de rien n'était. Mais déjà, plus d'une hypothèse croustillante était semée en leurs esprit. Elles ne tarderaient pas à égrener leurs miettes ici et là au sein du palais.
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Message par Hyriel Radgery Mer 12 Mai - 18:55


L’herboriste aura été incapable de masquer un instant de surprise à l’appellation « monsieur ». Pour lui ? Quel honneur ! Il salua d’un hochement de tête son complice avant d’endosser son rôle et lui, le sien. Le visage d’Hyriel se ternit en même temps que celui du courtisan. Ses lèvres se tordirent comme lorsqu’une légère crampe vient à saisir un membre. Et comme à chaque fois qu’il n’avait pas l’avantage mais qu’il souhaitait garder la face, il réagit à la parole de son interlocuteur avec un brin d’insolence.

« Sa Seigneurerie est trop bonne… »

Il garda son visage mutin le temps que le courtisan s’éloigne, et il reprit alors un visage plus sombre, comme si la cordialité s’était envolée de son côté également. Les gardes arrivèrent et la situation leur fut présentée. Hyriel ne put retenir un souffle de rire amer à la mention de l’achat de son cadavre et regarda s’éloigner son complice, les lèvres toujours pincées de gêne douloureuse. C’était triste à dire mais la feinte n’était pas difficile : ses jambes et son dos lui faisaient toujours mal malgré les soins qu’on lui avait prodigués ce jour. Il releva la tête à l’approche des gardes et haussa un sourcil en les voyant l’inspecter. Il leva les yeux au ciel et grimaça en se redressant.

« Ce n’est pas parce que mes jambes me font plus mal que d’habitude que je suis déjà mort, vous savez, chers vautours. Ce n’est sans doute qu’une conséquence de la torture, ce n’est pas non plus une peste fulgurante. »

Des pas résonnèrent alors dans le couloir et Hyriel soupira, toujours grimaçant, avant de murmurer, comme pour lui-même :

« Mais revoilà le choléra… »

La détente était finie… mais sa vie, peut-être pas, même s’ils n’étaient encore que deux à l’envisager.

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