[29 Novembre 1597] Une rencontre du destin

Je marchais d'un pas rapide, mon panier pressé contre moi. C'est haletante que j'arrivais dans l'église vide et m'appuyais contre l'une des colonnes en essayant de récupérer mon souffle. Tremblante je m'adossais à la pierre et me laissais glisser au sol.

J'étais partie faire quelque courses au marché quand, pour une raison inconnu, il y avait eu un afflux de personnes. Mes cauchemars ayant fait un retour en fanfare j'étais constamment fatigué et donc plus émotive. Mon agression d'il y a quelque jours n'avait pas quitté mon esprit et un sentiment de terreur m'avait pris à la gorge résultant en ma personne fuyant pour trouver me trouver un endroit où je serais seule. Et j'en avais trouvé un. Je profitais du silence pour me calmer, ma respiration saccadée résonnant dans mes tympans. Je m’en voulais d’avoir fuis comme une lâche. C’était toujours la même chose : mes instincts de protection me poussais à décamper et je ne tentais même pas d’y résister.

Je me mis à faire plus attention à mon entourage, prenant en compte les chandeliers éteints, le plafond qui s’élevait à plusieurs mètres de hauteurs et les diverses statues des saints. Mes yeux finirent par se poser sur une petite fille. L’église était moins vide que ce que je pensais. Un maigre sourire me vint alors que je la voyais prier avec tant de ferveur. Cela faisait longtemps que je ne croyais plus en un quelconque dieu. S’il y en avait réellement un, pourquoi laisserait-il tant de malheur nous arriver ? J’avais fini par perdre toute foi et maintenant je n’avais qu’un seul but : survivre.

A la toute fin de sa prière, Cassandre releva la tête vers la statue de Sainte Zita puis se signa. Elle se remit debout et s'apprêta à sortir quand une présence proche l'alerta. Un ennemi ? Elle secoua la tête. Les églises étaient un territoires tranquilles. Neutres. On n'attaquait personne ici. Plus confiante, Cassandre s'avança et découvrit dans la demi-obscurité une jeune femme.

"Bonjour."

Elle était fébrile. Agitée. Quelque chose n'allait pas. Elle remarqua ensuite sa tenue et comprit que c'était elle aussi une esclave. La fillette s'avança aussitôt et lui prit la main.

"Tu as des ennuis ? C'est en rapport avec ton maître ?"

J’avais toujours les yeux fixés sur la gamine quand elle se releva. Elle finit par me remarquer et me salua. Un maigre sourire éclaira mon visage et je lui répondis d’un simple hochement de tête. J’en aurais bien dis un peu plus mais… disons que je n’étais pas au meilleur de ma forme et puis j’avais une réputation à tenir après tout !

Je me crispais légèrement alors que la petite se précipitait vers moi pour me prendre la main. Bon. Les gestes brusques n’étaient pas la meilleure des idée mais je finis par me détendre, mon corps se rendant bien compte que, déjà, cette fillette ne serait pas vraiment capable de me faire du mal et ensuite, elle ne faisait évidemment pas partie des membres de sexe masculin.

-Tu as des ennuis ? C'est en rapport avec ton maître ?

Je récupérais ma main délicatement. Je comprenais que l’enfant se voulait réconfortante mais je n’avais pas vraiment envie d’être touchée en cet instant. J'étais tout de même reconnaissante et appréciais sa présence qui m'apportais un soutien dont j'avais désespérément besoin. Je lui adressais un nouveau sourire.

-Non

Bon. Simple, net, précis et je répondais à ça question. Mais je me doutais bien qu’elle ne se satisferait pas de ça.

-J’ai, disons, quelque problème à me trouver au milieu d’une foule…

J’omettais, bien sûr, quelle partie de la foule me dérangeais tant que ça. J’espérais que ça lui suffirait car, après tout, je n’allais pas déballer ma vie à une inconnue. Et ce n’était pas vraiment quelque chose qu’une petite fille devait entendre. Elle me semblait être une paysanne, peut-être même une esclave mais dans tout les cas, mon histoire était bien trop sanglante pour d’aussi jeunes oreilles.

L’inconnue retira sa main rapidement et Cassandre respecta son désir d'intimité. Elle recula même de quelques pas pour montrer l'avoir compris. Elle l'entendit alors évoquer son problèmes. Des difficultés à être dans une foule ? La fillette nota son visage tendu et sa réserve. Elle sentait que celle-ci disait pas toute la vérité. La foule... Elle devinait ce qui l'effrayait dans la foule.

"Tu as peur des hommes méchants ?"

Cassandre baissa la tête, se rappelant des regards de certains clients du Lupanar pour les prostituées ou certains hommes en ville pour les femmes. Elle s'exprima avec franchise, sans détour. Un chat se nommait un chat. Pourquoi perdre du temps à des raccourcis ?

"J'ai travaillé dans un Lupanar. Comme servante. Je sais que les hommes sont méchants quand une femme ne veut pas d'eux."

Afin de mettre la jeune femme en confiance, elle releva un instant la manche de sa robe, dévoilant la marque.

"Je suis esclave moi aussi. Depuis plusieurs années, j'ai vécu des choses dures. Mais à force de prières et d'efforts, Sainte-Zita m'a récompensé ! Il y a une arrestation au Lupanar et la nouvelle patronne m'a confié à une gentille femme qui ne me considère pas en esclave mais comme sa fille."

Cassandre tourna la tête vers la statue de sa chère patronne et sourit.

"Les miracles, ça existe dans ce monde. Parfois. Quand on croit assez fort pour les mériter."