[Flashback - Printemps 1594] Un autre Augustin
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Re: [Flashback - Printemps 1594] Un autre Augustin
par Sylvère d'Aiguemorte Lun 26 Juil - 10:33
La remarque de son interlocuteur à propos de son nom le fit sourire et il haussa des épaules. Ysengrin, Sylvère… Qu’importe ! Il n’attachait qu’une moindre importance aux noms, cela n’avait jamais changé fondamentalement l’identité d’une personne. Ce n’était pas parce qu’on l’appelerait Ysengrin plutôt que Sylvère - ou l’inverse - que son caractère changerait pour un sou. Certes, parfois une particule s’accompagnait de certains privilèges, mais privilège n’avait jamais été synonyme de bonheur.
— Libre à toi, répondit-il. Appelle-moi comme tu veux, un nom n’est jamais moins bien qu’un autre.
Et il savait ce qu’il disait, lui qui utilisait différentes identités à tout va, pour les uns ou pour les autres. Si son nom, par ailleurs, pouvait servir à faire sourire son ami, eh bien… Il s’en acquitait volontiers ! Il n’y avait pas cadeau plus magnifique à ses yeux que le rire d’un homme.
Ce ne serait pas lui qui se serait vexé d’une telle chose, bien sûr. Pas rancunier le moins du monde, il accepta le sachet que lui tendit son interlocuteur et y piocha quelques noisettes. Il le remercia d’un hochement de tête en se léchant les doigts pour ne pas en perdre une miette.
Si Stelian avait eu besoin, il se serait senti prêt à l’aider pour retrouver ses appuis sur la branche mais heureusement, il trouva son équilibre seul après ce faux mouvement qui avait failli l’entraîner en arrière. Après ce léger incident, ils ré-abordèrent la question de Sylvère posée plus tôt. L’amour.
Était-il déjà tombé amoureux ? De sa tranquillité. Bon. Sylvère comprenait bien ! Il ouvrait à peine la bouche pour répondre à son tour qu’il s’agissait maintenant de deviner. Un sourire en coin, il appuya ses mains sur la branche et balança ses jambes dans le vide, en attendant des suggestions.
— Oui ! Même si tu sais, en vrai, je suis tombé amoureux mille fois. Des certains yeux, de certaines voix, d’une démarche au coin d’une rue, d’un reflet de soleil dans des cheveux…
Des gens qu’il n’avait vu qu’une seule fois et qu’il ne rencontrerait plus jamais. Finalement, il eut un sourire amusé en ajoutant :
— Mais c’était facile à deviner ! Attends, plus dur maintenant. Essaye de savoir, hmm voyons voir… Ce que je voulais faire quand j’étais enfant. Je suis sûr que tu me connais assez pour trouver !
— Libre à toi, répondit-il. Appelle-moi comme tu veux, un nom n’est jamais moins bien qu’un autre.
Et il savait ce qu’il disait, lui qui utilisait différentes identités à tout va, pour les uns ou pour les autres. Si son nom, par ailleurs, pouvait servir à faire sourire son ami, eh bien… Il s’en acquitait volontiers ! Il n’y avait pas cadeau plus magnifique à ses yeux que le rire d’un homme.
Ce ne serait pas lui qui se serait vexé d’une telle chose, bien sûr. Pas rancunier le moins du monde, il accepta le sachet que lui tendit son interlocuteur et y piocha quelques noisettes. Il le remercia d’un hochement de tête en se léchant les doigts pour ne pas en perdre une miette.
Si Stelian avait eu besoin, il se serait senti prêt à l’aider pour retrouver ses appuis sur la branche mais heureusement, il trouva son équilibre seul après ce faux mouvement qui avait failli l’entraîner en arrière. Après ce léger incident, ils ré-abordèrent la question de Sylvère posée plus tôt. L’amour.
Était-il déjà tombé amoureux ? De sa tranquillité. Bon. Sylvère comprenait bien ! Il ouvrait à peine la bouche pour répondre à son tour qu’il s’agissait maintenant de deviner. Un sourire en coin, il appuya ses mains sur la branche et balança ses jambes dans le vide, en attendant des suggestions.
— Oui ! Même si tu sais, en vrai, je suis tombé amoureux mille fois. Des certains yeux, de certaines voix, d’une démarche au coin d’une rue, d’un reflet de soleil dans des cheveux…
Des gens qu’il n’avait vu qu’une seule fois et qu’il ne rencontrerait plus jamais. Finalement, il eut un sourire amusé en ajoutant :
— Mais c’était facile à deviner ! Attends, plus dur maintenant. Essaye de savoir, hmm voyons voir… Ce que je voulais faire quand j’étais enfant. Je suis sûr que tu me connais assez pour trouver !
Sylvère d'Aiguemorte- Brigand et roi de la forêt
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Re: [Flashback - Printemps 1594] Un autre Augustin
par Augustin Carpentier Mer 29 Sep - 12:48
« Ce que tu voulais faire, plus tard ? Comme un fils de seigneur rêve d’entrer dans les ordres, dans l’armée ou dans la diplomatie ? »
Le regard de Stelian se promena avec curiosité sur la physionomie mobile de son voisin d’escalade. Il n’était pas difficile de l’imaginer enfant. Ce qu’on appelle communément un enfant difficile, sans doute, voire un enfant terrible, mais doté du charme du diable et impossible à disputer sérieusement pendant plus de quelques secondes. Un volcan d’imagination subversive, et naturellement, une bonne nature qui ne voulait au fond aucun mal à personne. Ce mélange subtil devait faire l’admiration des adultes de son entourage, à moins qu’ils soient pour leur part incapables de déceler le potentiel prometteur d’une telle alchimie. Mais Stelian cherchait surtout à plaisanter. Il ne voyait pas l’intérêt de jouer le jeu strictement selon les règles, pour une fois que celles-ci n’étaient qu’un vague filet de brume, flou et inconsistant, et que les dépassements semblaient sans conséquence.
« Voyons… Toi, tu voulais devenir vieux. »
Il se composa une expression sérieuse, plongé dans la contemplation de la stratégie énoncée, qui pour imaginaire n’en était pas moins construite. Les détails apparaissaient avec clarté dans son esprit errant. Il voyait le gamin malicieux décrire cet avenir espéré en se languissant d’en être si éloigné, et en le peuplant, pour patienter, de mille péripéties joyeuses.
« Mais tu sais, ce genre de vieux qui fait semblant d’être un sorcier, et qui fait peur aux gamins du quartier. Celui qui s’appuie sur une canne à tête de serpent, et qui garde un œil fermé pour lancer des rumeurs sur son passé de pirate… Et qui a une haie très haute autour de son parc, en arbres noirs et tordus, pour cacher ce qui se passe chez lui… Et quand on l’entend ricaner au coin de la rue, on sursaute. C’est tout un métier en soi. Un métier de comédie. Et le monde entier est ton public ! »
Peu importait que ce soit la bonne réponse. C’était amusant à se représenter. Stelian aurait aimé devenir vieux, juste pour pouvoir se dire qu’il avait tenu le coup malgré l’adversité du sort, et c’était plus ou moins la direction vers laquelle il se dirigeait. Surtout si sa place actuelle lui ouvrait de nouvelles portes, l’extrayant de sa condition de servant pour s’acheminer vers le statut d’apprenti artisan. Il rencontrerait du beau monde, et on le regarderait dans les yeux cette fois, on retiendrait le nom qu’il donnerait, et on ne lui en imposerait point d’autre… Cette idée lui donnait de la force ; la fantaisie brillait dans son regard éveillé, et son verbe flamboyait d'univers entiers qu'il se permettait de façonner, pour le plaisir du moment.
Alors qu’il songeait à tout cela, un cri retentit au loin, derrière le détour de la route. Une manifestation de rage et de frustration, de la part de l’architecte qui menait sa bête en direction de terrains plus civilisés, et qui avait probablement rencontré quelque obstacle.
Stelian plissa les yeux avec anxiété, en réalisant que c’était son nom que l’on maudissait ainsi dans le lointain de la forêt. Il y avait soudain une ambiance inquiétante dans cette scène irréelle. Il se mordit la lèvre, et tout son corps exprima la crainte qui s’emparait de son être, celle d’avoir démérité, d’être châtié, de tout perdre encore une fois. Il avait goûté, ne serait-ce qu’en espoir, à la dignité d’homme, et revenir en arrière lui aurait été trop douloureux. Pour éviter cela, son instinct l’entraînait à répondre présent à la moindre sollicitation de son nouveau maître. Il ne pouvait pas plus résister que n’en aurait été capable un chien bien dressé.
« Tu entends… C’est Augustin qui m’appelle. Je ne peux pas rester. Et puis, imagine qu’il soit mangé par les loups, » ajouta-t-il avec un faux sourire en guise d’excuse, « je me retrouverais gros-jean comme devant, parti pour retrouver de l’embauche où la route m’emportera… Mieux vaut me reposer sur mes certitudes. »
Mais il ne fila pas tout de suite. Son regard s’était attaché à l’être sylvestre et avenant qui lui avait ouvert, pour de bien agréables minutes, les portails invisibles de son palais. Il n’hésitait pas à s’attarder ; il sentait que, sa vie eût-elle été toute autre, il aurait hésité. C’était différent. Parfois, il lui arrivait de percevoir ainsi les réminiscences d’une autre vie qu’il n’avait pas vécue, qui lui resterait interdite, mais qui aurait pu être réelle, à quelques changements près.
« Merci pour tout. Je repasserai. Si tu es encore là... »
Le regard de Stelian se promena avec curiosité sur la physionomie mobile de son voisin d’escalade. Il n’était pas difficile de l’imaginer enfant. Ce qu’on appelle communément un enfant difficile, sans doute, voire un enfant terrible, mais doté du charme du diable et impossible à disputer sérieusement pendant plus de quelques secondes. Un volcan d’imagination subversive, et naturellement, une bonne nature qui ne voulait au fond aucun mal à personne. Ce mélange subtil devait faire l’admiration des adultes de son entourage, à moins qu’ils soient pour leur part incapables de déceler le potentiel prometteur d’une telle alchimie. Mais Stelian cherchait surtout à plaisanter. Il ne voyait pas l’intérêt de jouer le jeu strictement selon les règles, pour une fois que celles-ci n’étaient qu’un vague filet de brume, flou et inconsistant, et que les dépassements semblaient sans conséquence.
« Voyons… Toi, tu voulais devenir vieux. »
Il se composa une expression sérieuse, plongé dans la contemplation de la stratégie énoncée, qui pour imaginaire n’en était pas moins construite. Les détails apparaissaient avec clarté dans son esprit errant. Il voyait le gamin malicieux décrire cet avenir espéré en se languissant d’en être si éloigné, et en le peuplant, pour patienter, de mille péripéties joyeuses.
« Mais tu sais, ce genre de vieux qui fait semblant d’être un sorcier, et qui fait peur aux gamins du quartier. Celui qui s’appuie sur une canne à tête de serpent, et qui garde un œil fermé pour lancer des rumeurs sur son passé de pirate… Et qui a une haie très haute autour de son parc, en arbres noirs et tordus, pour cacher ce qui se passe chez lui… Et quand on l’entend ricaner au coin de la rue, on sursaute. C’est tout un métier en soi. Un métier de comédie. Et le monde entier est ton public ! »
Peu importait que ce soit la bonne réponse. C’était amusant à se représenter. Stelian aurait aimé devenir vieux, juste pour pouvoir se dire qu’il avait tenu le coup malgré l’adversité du sort, et c’était plus ou moins la direction vers laquelle il se dirigeait. Surtout si sa place actuelle lui ouvrait de nouvelles portes, l’extrayant de sa condition de servant pour s’acheminer vers le statut d’apprenti artisan. Il rencontrerait du beau monde, et on le regarderait dans les yeux cette fois, on retiendrait le nom qu’il donnerait, et on ne lui en imposerait point d’autre… Cette idée lui donnait de la force ; la fantaisie brillait dans son regard éveillé, et son verbe flamboyait d'univers entiers qu'il se permettait de façonner, pour le plaisir du moment.
Alors qu’il songeait à tout cela, un cri retentit au loin, derrière le détour de la route. Une manifestation de rage et de frustration, de la part de l’architecte qui menait sa bête en direction de terrains plus civilisés, et qui avait probablement rencontré quelque obstacle.
Stelian plissa les yeux avec anxiété, en réalisant que c’était son nom que l’on maudissait ainsi dans le lointain de la forêt. Il y avait soudain une ambiance inquiétante dans cette scène irréelle. Il se mordit la lèvre, et tout son corps exprima la crainte qui s’emparait de son être, celle d’avoir démérité, d’être châtié, de tout perdre encore une fois. Il avait goûté, ne serait-ce qu’en espoir, à la dignité d’homme, et revenir en arrière lui aurait été trop douloureux. Pour éviter cela, son instinct l’entraînait à répondre présent à la moindre sollicitation de son nouveau maître. Il ne pouvait pas plus résister que n’en aurait été capable un chien bien dressé.
« Tu entends… C’est Augustin qui m’appelle. Je ne peux pas rester. Et puis, imagine qu’il soit mangé par les loups, » ajouta-t-il avec un faux sourire en guise d’excuse, « je me retrouverais gros-jean comme devant, parti pour retrouver de l’embauche où la route m’emportera… Mieux vaut me reposer sur mes certitudes. »
Mais il ne fila pas tout de suite. Son regard s’était attaché à l’être sylvestre et avenant qui lui avait ouvert, pour de bien agréables minutes, les portails invisibles de son palais. Il n’hésitait pas à s’attarder ; il sentait que, sa vie eût-elle été toute autre, il aurait hésité. C’était différent. Parfois, il lui arrivait de percevoir ainsi les réminiscences d’une autre vie qu’il n’avait pas vécue, qui lui resterait interdite, mais qui aurait pu être réelle, à quelques changements près.
« Merci pour tout. Je repasserai. Si tu es encore là... »
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Re: [Flashback - Printemps 1594] Un autre Augustin
par Sylvère d'Aiguemorte Sam 6 Nov - 12:39
Cette conversation, en haut d’un arbre, là où personne ne pouvait les entendre, avait quelque chose de déconnecté de la réalité. Et il était plaisant de voir que Stelian se prêtait à ce petit jeu de devinettes improvisées.
Devenir vieux… Oui, pourquoi pas ! Ou bien, plus exactement, il voulait vivre le plus longtemps possible. Si devenir vieux devait l’empêcher de profiter de ses jeunes années comme il l’entendait, eh bien… Il ne voulait pas d’un grand âge vénérable, mais d’une existence qui lui plaisait. L’imaginait-il vraiment en grand-père sage et respectable ? Mais Stelian avait raison : il aimait la comédie. Il aimait avoir un public, à qui il pouvait faire ses meilleures facéties !
— Oui, confirma-t-il après quelques instants, ... mais non ! Moi, je voulais devenir acrobate !
Et d’une certaine façon, il l’était devenu. Chaque jour, il montait en haut des arbres, pour y observer son domaine, et redescendait à l’aide de galipettes et autres acrobaties.
Mais un cri retentit dans le lointain et cela brisa aussitôt cette fragile bulle qui les avait entourés. En quelques instants, une certaine nervosité revint se nouer autour des épaules de Stelian. Ah, les certitudes ! Certains s’y accrochaient avec toute la force de leur volonté. Sylvère, lui, n’avait qu’un seul projet : n’en avoir jamais aucun. Et pour le moment, il se débrouillait plutôt bien. Il laissait aller la vie, sans se poser de questions, en résolvant les problèmes quand ils arrivaient et en prenant les opportunités qui se présentaient.
En entendant le remerciement de Stelian, il se dressa sur ses pieds, joyeusement. Sans se soucier du danger que cela représentait, Sylvère sauta pour se mettre debout sur la branche et s’inclina comiquement en se retenant aux branches d’une main.
— Mais tout le plaisir a été pour moi, mon loyal ami !
Quant à être présent la prochaine fois qu’il viendrait, eh bien… Il lui adressa un sourire et lui fit un clin d'œil.
— Je vais devenir vieux, tu te rappelles ? Au moins quatre-vingt dix ans ! Alors à moins que tu ne reviennes pas avant, eh bien… Je serais là !
Devenir vieux… Oui, pourquoi pas ! Ou bien, plus exactement, il voulait vivre le plus longtemps possible. Si devenir vieux devait l’empêcher de profiter de ses jeunes années comme il l’entendait, eh bien… Il ne voulait pas d’un grand âge vénérable, mais d’une existence qui lui plaisait. L’imaginait-il vraiment en grand-père sage et respectable ? Mais Stelian avait raison : il aimait la comédie. Il aimait avoir un public, à qui il pouvait faire ses meilleures facéties !
— Oui, confirma-t-il après quelques instants, ... mais non ! Moi, je voulais devenir acrobate !
Et d’une certaine façon, il l’était devenu. Chaque jour, il montait en haut des arbres, pour y observer son domaine, et redescendait à l’aide de galipettes et autres acrobaties.
Mais un cri retentit dans le lointain et cela brisa aussitôt cette fragile bulle qui les avait entourés. En quelques instants, une certaine nervosité revint se nouer autour des épaules de Stelian. Ah, les certitudes ! Certains s’y accrochaient avec toute la force de leur volonté. Sylvère, lui, n’avait qu’un seul projet : n’en avoir jamais aucun. Et pour le moment, il se débrouillait plutôt bien. Il laissait aller la vie, sans se poser de questions, en résolvant les problèmes quand ils arrivaient et en prenant les opportunités qui se présentaient.
En entendant le remerciement de Stelian, il se dressa sur ses pieds, joyeusement. Sans se soucier du danger que cela représentait, Sylvère sauta pour se mettre debout sur la branche et s’inclina comiquement en se retenant aux branches d’une main.
— Mais tout le plaisir a été pour moi, mon loyal ami !
Quant à être présent la prochaine fois qu’il viendrait, eh bien… Il lui adressa un sourire et lui fit un clin d'œil.
— Je vais devenir vieux, tu te rappelles ? Au moins quatre-vingt dix ans ! Alors à moins que tu ne reviennes pas avant, eh bien… Je serais là !
Sylvère d'Aiguemorte- Brigand et roi de la forêt
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