[RP Flashback solo – 1577 - 1597] "Tout est poison, rien n'est poison ; c'est la dose qui fait le poison."
[RP Flashback solo – 1577 - 1597] "Tout est poison, rien n'est poison ; c'est la dose qui fait le poison."
Hyriel Radgery, 10 ans
Cet après-midi-là, le ciel était clair et la température agréable. Les petits oiseaux de printemps chantaient pour accompagner les jeux des enfants du village, sur la Grand’place. Ils couraient en tout sens, riaient et s’amusaient, observés par une ombre depuis une ruelle.
Hyriel aurait bien voulu s’amuser avec eux, lui aussi, mais il ne le pourrait jamais. Quel intérêt y a-t-il à jouer avec un enfant qui ne peut ni sauter, ni courir, ni utiliser ses mains en se déplaçant ? Aucun… On le lui avait assez fait comprendre durant ses premières années d’autonomie pour qu’il n’essaye même plus de se joindre aux autres. On s’amusait mieux seul.
Quand il en eut assez vu, il porta de nouveau les mains aux roues de sa chariote et s’enfonça dans la ruelle. Morose, il gagna la sortie du village et longea le chemin, en direction de la forêt. Il observait les plantes, de temps en temps. Elles étaient si belles… Il en connaissait quelques-unes mais pas toutes. En même temps, pouvait-on toutes les connaître ? Il y en avait tellement…
« Alors, d’mi-corps, tu comptes les brins d’herbes ? »
Ils l’avaient suivi…
« En même temps, y peut rien faire d’autres… »
Les saletés…
« Y’en a combien ? On dit qu’tu sais y faire, avec les chiffres, toi, pour remplacer les jambes.
— Taisez-vous !
— Alors pars, tu nous entendras plus ! On était là avant.
— N’importe quoi ! C’est moi qui étais là et vous qui êtes venus !
— C’est curieux, on n’a pas la même version, nous… Allez, dégage, serpent ! »
Et la première pierre atterrit sur l’épaule d’Hyriel. Il dressa ses bras en protection devant son visage. Une autre atteignit justement ses bras. Une autre son dos.
« ‘Ttendez, y peut plus rouler sans ces bras, arrêtez-vous ! »
Dès qu’il baisserait les bras pour filer, ils recommenceraient, il le savait. Il s’était laissé avoir une seule fois. Une seule fois, il y avait cru. Il n’avait jamais oublié la leçon. Il prit une grande inspiration avant de se pencher en avant. La tête dans les bras, il prit un bâton qui restait au fond de sa chariote et il s’en servit comme d’une rame pour se propulser en avant.
« Rêve pas à être mat’lot, le serpent ! Y voudront pas de toi !
— Personne ne voudra de toi ! »
C’était faux, complétement faux ! Ils ne pouvaient pas avoir raison, pas eux ! Ils étaient idiots !
Un craquement.
Une pierre avait heurté sa rame de fortune.
Emporté par son élan, il fut déséquilibré et tomba sur le côté.
Il ne pouvait plus se relever, les autres approchaient. Et il avait mal à l’épaule… Et des pierres, des coups, des insultes… Serpent ! Demi-homme ! Ta mère, c’est la pute du Diable ! La douleur et les cris se brouillaient dans sa tête. Maudit ! Même les loups voudraient pas t’bouffer ! Sale éclopé ! Des larmes coulaient de ses yeux, il voulait que ça s’arrête, qu’ils partent, qu’ils le laissent… Désossé ! Ver de terre ! Tu ferais mieux d’mourir !
Laissez-moi…
Il avait mal…
Tout son corps n’était que douleur.
Chaleur, aussi. Une chaleur agréable, apaisante.
Un gémissement. Le sien ? Peut-être…
Il ouvrit lentement les yeux. Il était allongé… dans un lit ? C’était confortable… Un lit… Où ? Où était-il ? Une maison, des herbes, un feu, une marmite, on allait le manger ?
Une main, sur son épaule, douce.
« Ne t’affole pas, petit, je ne te ferai aucun mal. »
Une dame. Cheveux cuivrés striés d’argent, visage sec, regard pénétrant. C’était la dame de la forêt. Une brise le fit frissonner. Il était torse nu ! Il s’affola de nouveau.
« Ne me mangez pas, je vous en supplie ! Je ne suis pas comestible ! Je suis venimeux ! Je vous rendrai malade et… et… »
Il s’interrompit de lui-même en se rendant compte que la femme entre deux âges le regardait par en-dessous, nullement convaincue. Hyriel grimaça alors.
« Vous n’allez pas me manger, c’est ça ? »
Il pouvait toujours essayer… Elle sourit en se retournant vers une table pour prendre un bol.
« On dit vénéneux, pas venimeux. »
Hyriel la regarda sans comprendre et elle se détourna de lui pour mélanger le contenu du bol.
« Tu as avancé comme argument que tu étais venimeux mais tu pensais plutôt aux champignons, non ? On dit vénéneux. Venimeux, c’est comme les serpents qui injectent leur venin dans leurs victimes. »
Le jeune garçon acquiesça mais frissonna.
Toutes les insultes lui revinrent en mémoire, toute la scène. Il baissa les yeux et vit son torse parsemé de rougeurs, de bleus et même… de sang, à certains endroits. Pourquoi ? La femme se rapprocha et entreprit d’apposer des compresses sur plusieurs plaies. Elle le soignait. Hyriel inspira pour parler mais la femme l’interrompit d’un doigt impératif.
« Si c’est pour me remercier, ce n’est pas la peine. »
— P…Pourquoi ?
— Parce que tu n’as pas à le faire : je fais ce que j’ai à faire en te soignant car tu en as besoin, que j’en suis capable et que tu n’as pas mérité ce qui t’est arrivé. »
Le jeune garçon hocha timidement la tête. Cette femme n’avait pas l’air d’une méchante sorcière, comme certains le disaient… Peut-être qu’ils la disaient méchante sorcière comme lui était un serpent. C’était faux… Il reporta son attention sur les compresses qu’elle lui appliquait et la regarda faire en silence.
« Tu es le petit Radgery, n’est-ce pas ? Le fils de l’écrivain et crieur public ?
— Oui…
— Oh, alors je crois comprendre pourquoi ces vauriens t’attaquaient. Ils sont vraiment idiots…
— Oui mais comment vous savez ?
— Parce que je connais l’état de tes jambes et que je me doute que cela ne fait pas l’unanimité parmi les autres enfants. »
Hyriel ne répondit rien. Elle avait deviné juste. Il se rappela alors les mots de sa mère qui disait avoir tout essayé pour qu’il ait des jambes normales. Tout, ça voulait dire aussi aller voir la sorcière des bois ? Sans doute…
« Vous faites vraiment de la magie en discutant avec le Diable ?
— Et toi ?
— Non…
— Alors moi non plus. »
Il parvint à retrouver le sourire. Il était assez grand pour comprendre que ce n’étaient que des racontars, comme sur lui. Il s’en sentait rassuré et plus proche d’elle.
« Je soigne et aide à donner la vie, simplement, et je suis une femme qui connaît des choses sur la nature. Forcément, ça fait peur… »
Elle lui adressa un sourire complice qui l’amusa. Il se mordit alors la lèvre et désigna du menton le bol où elle trempait ses compresses.
« Il y a du thym dans votre mélange ? »
La femme ne masqua pas son étonnement.
« En effet. Tu connais les vertus de cette plante ? »
Le jeune garçon bomba le torse, fier de lui.
« Oui ! Elle sert à soulager la gorge pendant la mauvaise saison !
— Entre autres, oui, et pour aider les plaies à cicatriser. Toutefois, savais-tuqu’il peut être aussi dangereux si un petit enfant comme toi en prend plus de deux grands gobelets par jour ? »
Hyriel ouvrit de grands yeux étonnés pour toute réponse et avala difficilement sa salive. Il ne savait pas, non… La femme s’éloigna alors et il se redressa.
« Pourquoi c’est dangereux ? C’est pourtant un remède…
— Tout remède est un poison à un certain dosage.
— Mais comment le sait-on ?
— Des lignes renseignent sur la chose.
— Vous pouvez m’apprendre ? »
La guérisseuse l’observa un instant, d’un regard que le jeune garçon ne parvint pas à déchiffrer. Mais il voulait savoir… Avec un sourire énigmatique, elle prit un gros livre d’une étagère.
« Après tout, nous avons un peu de temps avec tes plaies qui doivent se reposer. Au fait, appelle-moi Lif. »
Elle revint s’asseoir à côté de lui qui ne cachait pas sa joie. Elle haussa alors un sourcil très sérieux, la figure grave.
« Alors, Hyriel, prêt à apprendre les secrets de la vie et de la mort ? »
Le cœur gonflé de fierté, Hyriel hocha la tête avant de se pencher, captivé, sur l’herbier qu’elle ouvrait devant lui.
Hyriel Radgery- Sorcier, herboriste, écrivain public ~ Pharmakós de service
- Fiche perso : ¤ Diable ? Médecin ? Sorcier ? À voir...
¤ Les trois comparses
Liens et RPs : ¤ L'herbier de l'herboriste
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