[24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
[24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Kalisha et Florentyna avaient suivi leur plan réglé comme du papier à musique. Leur sortie du domaine n'avait pas trop attiré l'attention du paternel, occupé à faire entretenir ses fusils de chasse pour quand reviendraient des températures acceptables en vue de l'exercice de son loisir. Elles s'étaient éclipsées avec chacune un panier au bras. Et dans ceux-ci : des oranges, une bouteille de jus de fruits, de bonnes pâtisseries au miel et au chocolat, un vêtement chaud. A l'intendante et à deux vigiles qui n'avaient pas manqué de les interroger, la demoiselle avait répondu qu'elles sortaient faire des dévotions qui ne les préparerait que mieux à la Grand' Messe. Sans oublier de souligner qu'elles allumeraient des cierges pour confier aux bons soins du Seigneur les êtres chers à leur cœur autant qu'en l'honneur de la réconciliation des foyers.
Chose qu'elles avaient faite ensuite - afin que nul ne risque de contredire leur version. Oui, une poignée de dévotes habituées à faire le pied de grue dans les églises les auront vues entrer dans l'édifice, prier un moment en face de deux bougies érigées par leurs soins. Deux flammèches au milieu de toutes les autres, en cette forêt dansante de lumières chargées de porter les prières les plus intimes. Enfin, les deux jeunes femmes n'avaient pas traîné à rejoindre la Prévôté.
Jamais Florentyna n'aurait imaginé mettre un jour les pieds dans ce lieu sordide. Oh le bâtiment en lui-même présentait bien : un fronton, d'épaisses pierres blanchâtres, une rangée de colonnes aussi droites et impérieuses que la Justice. Mais précisément, l'endroit portait toute la lourdeur de sa charge et dégageait - de son ombre écrasante sur les visiteurs - l'immense poids prêt à s'abattre sur quiconque désobéissait à l'Empire. Et c'était sans parler des cachots, dans l'un desquels se trouvait sans doute actuellement leur ami. Là encore, la fille de Monthoux n'en avait jamais vus de ses yeux - toutefois elle pouvait déjà s'en faire une vague idée. Idée qui la terrifia. Aussi, en arrivant au pied de la Prévôté, un frisson lui galopa l'échine. Sa main fébrile alla par réflexe chercher celle de Kalisha. Elles devaient se préparer psychologiquement.
Se préparer également à trouver le guérisseur dans un triste état. La veille, au repas, Prosper leur avait expliqué - certes avec des mots précautionneux dans lesquels on sentait qu'il faisait attention à ne pas les heurter - qu'à l'issue de la première session du procès, Hyriel avait déjà été reconnu coupable d'une bonne partie des chefs d'accusation. Que ne restaient plus à démontrer que la sorcellerie et la provocation à l'idolâtrie. Qu'il allait être torturé pour ce faire. A ce seul souvenir, Florentyna déglutit. Par le Ciel ! Comment s'était déroulée la question ? Aurait-il dit des choses sous la douleur ? C'était épouvantable ! Et dire qu'il leur avait fallu, à Kalisha et elle, faire semblant devant le comte de se montrer soulagées de ces atroces nouvelles concernant le sorcier ! Hyriel... Qu'importait le délabrement dans lequel elles allaient trouver leur ami, Florentyna se promit d'être forte.
Son bras autour de celui de Kalisha, elles grimpèrent les marches de la prévôté et se présentèrent aux gardes. Elles allaient évidemment être fouillées. Malgré tout, il était hors de question de se laisser faire et qu'on leur interdise d'apporter leurs cadeaux à Hyriel - ou pire encore : de ne même pas recevoir l'autorisation de le voir. Non. Elles allaient s'imposer. Son regard se tourna vers son amie, affermi dans cette décision et qu'elle espérait trouver partagée à la vue des soldats.
D'ailleurs, Florentyna jugea qu'il serait préférable que ce soit Kalisha qui prenne en premier la parole devant ces Messieurs. La comtesse, c'était elle. Sa parole et ses demandes n'en auraient que davantage de poids. Sa belle-fille comptait donc sur elle quand les militaires croisèrent leurs lances à leur approche et que le chef de brigade engagea :
-- Mesdames, bonjour. Il me faut vous demander ce qui vous amène ici.
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À tout hasard, Kalisha tenta de prier. D’abord pour Hyriel qui était le plus danger, puis pour Sylvère qui était seul avec ses arbres, puis pour Florentyna qui devait rencontrer son fiancé ce soir, puis finalement pour tous les autres. C’était beaucoup demandé certes, mais il fallait admettre que les temps étaient durs et que décembre ne semblait vouloir épargner personne.
Elles se dirigèrent ensuite vers la Prévôté, impressionnant bâtiment, cathédrale de la justice, tout aussi écrasante que celle de la capitale. Toutes deux s’immobilisèrent devant la silhouette sévère de l’édifice qui semblait déjà juger leurs actes de toute sa grandeur. Kalisha leva les yeux vers la Justice armée de sa balance et se rappela ce conte qui l’avait toujours effrayée où l’on pesait la pureté du cœur du défunt à l’aide d’une simple plume. Elle n’avait jamais compris qui pouvait ne pas finir dévorer. Ironiquement, elle avait l’impression que c’était là le procès que l’on réservait aux accusés de sorcellerie. La main de Florentyna se glissa dans la sienne et elles se serrèrent mutuellement pour se donner du courage. Ce n’était pas le genre d’endroit où deux jeunes femmes de leur condition étaient amenées à mettre les pieds un jour. En théorie.
Kalisha se remémora le diner de la veille où Prosper les avait informées en marchant sur des escargots des suites du procès. Elle avait gardé un visage neutre, s’efforçant de se détacher du contexte. Puis lorsque son époux avait parlé de question, elle n’avait pas compris. « La question ? Quelle question ? » avait-elle demandé naïvement « ne lui a-t-on pas déjà posé la question ? » tout cela avant de comprendre que ce n’était qu’en réalité un euphémisme pour torture et interrogatoire. Elle avait dégluti, blêmi, s’était signée -par réflexe sociétal- et avait englouti son verre. Était-ce vraiment chrétien de torturer son prochain ? Elle avait gardé cette réflexion pour elle, se contentant d’un laconique « Oh. Je vois. Très bien.»
Elle inspira profondément. Dans quel état se trouver Hyriel aujourd’hui ? Les pires images lui vinrent à l’esprit. Elle serra les dents, frissonnante puis grimpa les marches en compagnie de son amie. Elles seraient fortes. Elles pouvaient y arriver.
Bien évidemment, les gardes refusèrent de les laisser entrer sans « question ».
Kalisha abaissa sa capuche bourgogne richement brodée d’or afin de découvrir son visage puis salue d’une inclinaison de la tête le chef de brigade.
— Monsieur, bonjour. Kalisha de Monthoux, Comtesse de Monthoux et ma belle-fille, Florentyna de Monthoux les présenta-t-elle.
C’était maintenant qu’elle allait devoir se montrer convaincante.
— En cette veille de la nativité, nous sommes venus porter quelques pâtisseries à vos agents pour les remercier de leur travail.
D’un geste élégant, elle découvrit le panier encore bien garni malgré les offrandes déjà effectuées.
— Avez-vous déjà eu le plaisir de déguster des loukoums ? lui demanda-t-elle avec espièglerie avant de reprendre plus sérieuse mais toujours avec le sourire Nous souhaiterions également nous confronter au sorcier dans l’espoir que ce jour si spécial lui permettra de réaliser son erreur en constatant la pureté de notre foi. Et qui sait ? Peut-être que notre charité saura le ramena dans le droit chemin.
Elle effectua une révérence, en guise de salut, préparant déjà mentalement la suite de ses arguments. Oh Florentyna saurait surement développer l’aspect religieux bien mieux qu’elle. Elle n’en doutait pas.
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Kalisha paraissait elle aussi satisfaite du déroulement des choses jusqu'à ce point. Et elle pouvait l'être ! Le passage à l'église où elles avaient distribué de pieuses salutations, les aumônes octroyées sur le chemin, et même la veille quand elle avait reçu avec un calme admirable l'épouvantable nouvelle de la torture d'Hyriel. Prosper n'y avait vu que du feu.
L'une et l'autre à présent devant les gardes, son amie fut parfaite et Florentyna la laissa jouer sa partition. Les deux femmes arboraient leurs mines dévotes, engoncées dans leurs capuches et cols montants, petite voilette autour de leurs coiffes entre les plis desquelles jouait le vent d'hiver. La demoiselle inclina de peu la tête quand elle fut présentée, en essayant de garder une mine quelque part entre la digne distance de rang - de quoi impressionner la soldatesque - et la bienveillance de toute chrétienne. Surtout en cette période de fêtes et au moment où Kalisha offrait ses gâteaux. Elles avaient bien fait de remplir autant leurs paniers. La gourmandise était parfois salutaire ! Et la fille de Monthoux espérait qu'en l'occurrence elle le serait : des gâteaux pour rendre les soldats presque aussi tendres. Elle aura acquiescé à la remarque de son amie - façon de compatir : oh oui, pauvres vigiles, l'on ne devait pas beaucoup penser à eux.
D'ailleurs, les deux agents furent étonnés de la proposition. Le plus imposant du tandem s'en racla la gorge sous l'effet de la surprise, gardant toutefois sa raide posture professionnelle. Un plus jeune soldat à côté rosissait de se voir proposer des loukoums par une si noble et jolie Dame. Oh ça non, il n'avait jamais goûté de pareilles pâtisseries.
-- Oh, c'est très aimable de votre part, Mesdames. Voilà qui fera plaisir à notre équipe. Je vous remercie déjà en leur nom. répondit le premier, détendant enfin ses gestes et la prise de sa main autour de sa lance. Il approcha, curieux, et dut avouer en essayant de prononcer comme il fallait : Non, je ne connais pas les... loukoums. Un sourire maladroit lui vint.
Une fois les premiers remparts attaqués avec les appâts du miel, tandis que Kalisha exposait habilement leur véritable et importante demande, Florentyna se joignit à ses œillades attendrissantes. Et surtout, prompte à porter un second coup dans la muraille, elle sortit déjà deux pâtisseries d'un des paniers. Quelle chance ! Elles étaient encore un petit peu tièdes : bien à l'abri les mets avaient gardé longtemps leur chaleur. Ses délicates mains gantées les proposèrent aux soldats, non sans garder quelques miettes au bout de ses doigts dans leur velours azur. D'abord hésitants, les vigiles s'entre-regardèrent. Puis ils prirent les gâteaux qu'ils dégusteront à petites bouchées - aussi polies que possible devant les nobles femmes.
-- Charge à vous bien sûr de répartir le reste avec vos collègues, déclara Florentyna en présentant le reste du paquet après un coup d'œil quêtant la permission complice de Kalisha.
-- Pour sûr ! Euh... encore merci, Mesdames. reprit l'homme après avoir soigneusement avalé. Pour ce qui est de votre demande au sujet du sorcier... euh... je dois vous avouer que là, il faut que j'aille demander à notre chef. C'est pas que je doute de votre piété, Mesdames. Oh pas du tout. Mais faut que la hiérarchie donne son accord 'voyez. Surtout que c'est un homme insolent et dangereux que vous voulez voir là.
Floentyna retint un soupir aux derniers mots. Elle acquiesça avec sérieux. Oui, il fallait continuer dans l'image des deux bonnes âmes, bonnes mais fortes dans leur foi, venant essayer de faire se repentir un vilain ensorceleur. C'était du reste le moment de faire une prière pour que leur souhait se réalise, se dit-elle tout en adressant un petit coup d'œil à sa complice. Le soldat pour sa part prit avec soin la boîte qu'elles offraient si généreusement. Il allait monter avec, voir le chef : si la chance le voulait, cela contribuerait à l'aboutissement de la requête.
-- Si vous permettez, Mesdames, je me retire pour transmettre votre demande. Si jamais c'est accepté, quoi qu'il en soit n'ayez aucune crainte : des collègues resteront pas bien loin, au cas où le sorcier essaye quoi que ce soit. dit le garde, prenant ses dispositions pour se retirer tandis que les deux Dames allaient patienter - le moins longtemps possible, espéra-t-il - ici en compagnie du jeune confrère.
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Les gardes eurent l’air étonnés de sa proposition. Ce n’était surement pas tous les jours que l’on tentait de les attendrir avec quelques pâtisseries. Qui pensait à eux au final ? On avait tendance à les confondre avec les cariatides d’albâtre qui s’élançaient vers le plafond massif, et c’était bien de ce constat que lui était venu cette idée. Si de sa vie à Monthoux elle ne devait retenir qu’une seule chose ce serait sans doute cela : ne jamais oublier les petites gens qui travaillaient dans l’ombre et à qui l’on devait tout. Car ces petites mains, elles, se souvenaient éternellement des attentions reçues.
Florentyna fit la distribution et la princesse les encouragea à accepter d’un discret signe de son visage souriant. Ils n’oublieraient pas de si tôt leur réveillon aux loukoums ! Elle laissa l’homme se régalait puis leur faire part d’une nouvelle difficulté : la hiérarchie. Évidemment. Ce ne pouvait pas être si simple. La comtesse reprit une mine grave à ses dernières paroles. Si la situation n’avait pas été telle, elle en aurait surement ri d’entendre Hyriel être qualifié de dangereux. Croyaient-ils vraiment avoir capturé une sorte démon sauvage à la botte du Diable. Pour un peu, elle aurait roulé des yeux, mais elle devait garder son rôle.
— Bien entendu, cela est parfaitement normal et j’ai conscience de l’individu que nous souhaitons rencontré, mais c’est bien parce qu’il s’est si éloigné du chemin de Dieu que nous désirons nous entretenir avec lui. Et puis avec des hommes comme vous, nous ne risquons rien : n’a-t-il pas été brisé par la question ? osa-t-elle demander avec détachement alors qu’elle réprimait un haut-le-cœur.Je vous en prie mon brave, faites donc. Si Dieu le veut, votre chef nous donnera l’accord.
Elle inclina la tête pieusement et patienta jusqu’à son retour, stoïquement.
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Florentyna s'amusa et se sentit attendrie de voir les soldats - surtout le jeune - si en émoi du fait de leur présent. Tout à fait intéressé évidemment. Touchant néanmoins : il était bon de donner du respect et un peu de joie aux petites mains. Or ces deux-là ne semblaient ni bourrus ni abusifs. Oh certes, cela ne devait pas être le cas de tous leurs collègues, mais qu'importait. Pour l'heure, le plan allait à merveille.
Elle s'attendit à ce qui suivit : devoir consulter un supérieur. Ses traits demeurèrent aussi sérieux que ceux de son amie. Elle appuya ses paroles d'un air dévot et ferme à la fois - bout des doigts effleurant la petite croix pendant à son cou. Kalisha joua stratégique en posant cette question que la demoiselle devina pénible mais écoutera gravement la réponse.
-- Vrai qu'entre les tortures et notre surveillance, il ne devrait plus être bien menaçant. Mais à ce qui paraît, il aurait encore fait des siennes hier. Alors on a reçu des ordres. Et des collègues resteront en guet.
Avec l'autorisation des deux dames, il se retirera après un claquement de botte. Le temps s'écoula. Un clocher des environs sonna ses seize coups. Plusieurs grappes de badauds passèrent dans la rue où Kalisha et Florentyna patientaient en présence de l'autre vigile. On ôta son feutre devant elles sur le chemin. Quelques hauts de buste s'inclinèrent. De légers "Mesdames" au bout des lèvres. La fille de Monthoux s'appliquait à rendre un sourire tranquille à chaque fois.
Enfin le premier garde reparut. Sans la boîte de loukoums - laissée à la disposition de tous les collègues sur quelque table de l'office d'équipe. Un léger sourire sous sa moustache put déjà laisser deviner la réponse à ces Dames, toutefois il formula d'une voix un peu plus enjouée que le ton monocorde du protocole, content de satisfaire leurs requête :
-- Le chef a donné son accord. Si Mesdames veulent bien me suivre.
Il les conduisit à travers les couloirs. Puis leur indiqua le chemin à emprunter, avant de laisser un confrère prendre le relai comme guide. Plus sévère et renfermé, celui-là. Plus elles avançaient vers les cachots, plus les murs devenaient pelés telle une chair martyrisée et les flammes réduites à quelques larmes de clarté. La température fraîchissait. Heureusement, elles s'étaient bien habillées. Moins de froid que d'effroi, Florentyna resserra encore le col fourré de son manteau autour de sa gorge. On arriva dans un parloir - lui, un peu mieux chauffé et illuminé. Le garde approcha, se racla la gorge et exposa :
-- Le protocole m'oblige à une vérification de vos paniers. S'il vous plaît.
Elles n'y avaient rien mis de suspect. Sur un regard à son amie, la demoiselle tendit le nécessaire au soldat qui fit son office, efficace, sans commentaire. Un habit chaud, d'autres loukoums, des bouchées au chocolat, une orange, un jus de fruits. Bien. Il haussa tout de même un sourcil : c'était généreux pour une créature dite maléfique. Il rendit le tout et donna l'ordre que l'on introduise le sorcier, que des collèges étaient allés chercher pendant ce temps - sans lui adresser la parole. Kalisha et Florentyna furent invitées à s'asseoir sur deux sièges à peu près confortables. Une table pouvait recevoir leurs paniers. Pour Hyriel, ce serait un tabouret en face d'elles - au pied duquel se trouvait un cadenas et un anneau rivé aux dalles. La demoiselle déglutit : elle comprit qu'ils servaient à fixer le prisonnier sur place. Profitant des plis de leurs manteaux à toutes deux, sa main revint autour de celle de son amie.
Un glaçant cliquetis de chaînes annonça Hyriel... que l'on traînait par les dessous de bras... tel un vulgaire sac encombrant. Même des animaux blessés étaient mieux traités ! Florentyna prit une longue inspiration. Se calmer. Rester ferme comme une bonne âme venue tenter d'obtenir le repentir de ce démon. C'était si dur ! Ses yeux effarés s'accrochèrent au collier de fer que portait le guérisseur. Tombèrent le long de la chaîne qui y était fixée et descendait autour de ses poignets attachés, puis jusqu'au sol où le soldat cadenassait. Par tous les Saints, pourquoi ? Qu'avait-on encore mis à son compte pour qu'il soit ligoté tel un esclave ou un criminel ? Le fille de Monthoux vit aussi ses habits bien sales après huit jours de cachot. Elle ne put plus se contenir quand elle découvrit, enfin, ses plaies. Des bleus, des croûtes autour de son cou et ses poignets. Plusieurs hématomes au visage. Dans le col ouvert de sa tunique elle crut deviner des bandages... C'en fut trop. Malgré ses efforts, les larmes arrivèrent. Main à la bouche puis mouchoir aux yeux, elle lutta. Elle les dissimula. Aux gardes mais surtout à leur ami. Elle poussa d'abord un sanglot qui s'entendit, puis renifla et avala péniblement un glaire. Enfin, elle se calma. Son mouchoir essuya ses joues humides. Elle n'osa pas observer Kalisha. Ni Hyriel. Pas tout de suite... Pas tant que les vigiles ne se furent éloignés. Et justement, elle demanda à celui qui attendait encore au coin de la petite pièce :
-- N'est-il pas possible de lui retirer tout de même ces chaînes ? (Essaie de se rendre neutre) Il paraît fatigué. Et calme. Nous voudrions qu'il puisse manger sans trop de difficultés ce que nous avons amené : il n'en réfléchira que mieux à nos enseignements. Et... votre surveillance sera efficace.
-- Je regrette, Mademoiselle. Le Cardinal Cassin a donné des directives strictes.
Il inclina le haut du buste puis se retira. Florentyna se doutait bien que des agents demeureraient derrière la porte. Mais tout de même ce ne fut pas trop tôt ! Les yeux gros de chagrin, en avançant la main tremblante pour prendre tant bien que mal celle du guérisseur. En essayant de ne pas lui faire mal, avec ces maudites chaînes si serrées. Elle murmura :
-- Hyriel... (Que dire ? Que demander ? Comment il allait serait parfaitement stupide. Elle n'avait pas le cœur non plus à se renseigner quant à la Question. Elle songea surtout à ces cruelles attaches infligées à leur ami et les premiers mots qui vinrent furent) Tout cela... Seigneur, mais qu'est-il arrivé ?
Elle tenta de sourire. Elle cueillit un brin de courage en se retournant vers Kalisha, accrochant son regard, avant de désigner leurs deux paniers gourmands d'un mouvement de tête.
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Retour à la prison. Et dire qu’à peine la veille au soir, il était au palais. Devant le Roi et la Reine d’Espagne, rien que ça ! Et là, il était de nouveau en prison, enfermé. Ses dangereuses pattes d’araignées – au nombre de deux actives, pour deux loques – étaient ramenées proches de son corps, sans grande marge de mouvement. Tout ça parce qu’il avait eu le malheur de s’ennuyer pendant que les autres baragouinaient un truc pour que Sa Très Catholique Majesté comprenne quelque chose à la visite. Et parce qu’il avait fait l’oiseau. Et l’idiot. Il n’en avait pas honte. Quitte à aller devant le roi avant de brûler de mille feux, autant en profiter, non ? Et puis tout n’était pas mauvais : le roi avait tout de même semblé intéressé, puis il y avait Eymar. Le Roi voulait un bûcher mais peut-être que ce ne serait pas lui qui flamberait, finalement…
Mais bon. En attendant, il passait Noël dans sa prison, seul. C’était peu joyeux… Mais bon, c’était une bonne nouvelle, après tout : les autres étaient en liberté. Il espérait que Louise, notamment, ait pu s’en sortir sans trop de mal…
Au gré de ses pensées pour ses amis et pour sa maladie à feindre, qui le rendait « apathique », il faisait cliqueter ses poignets dans la faible liberté qu’il avait, pour passer le temps.
Des bruits vinrent interrompre son occupation et il releva la tête, juste quand il vit arriver les gardes, étonné. Qu’est-ce que c’était encore ? Il le chopa sous le bras, il ne résista pas. Il demeurait toutefois fermé, prêt à bander ses muscles au moindre coup, même s’il souffrait encore à chaque mouvement du torse. Après, il fallait bien reconnaître que la prison avait l’avantage de reposer ses muscles et ses os, ce qui n’était pas plus mal, tout compte fait.
Mais il vit alors deux visages qu’il n’aurait pas pensé revoir. Des visages tristes et effrayés. Lui-même fut sous le choc en découvrant ses deux amies et ne put le cacher. Il ne sentit même pas quand on l’assit. Il vit le regard de la demoiselle de Monthoux, si douce et si gentille, parcourir son corps meurtri. Il aurait eu envie de baisser une manche ou remonter son col pour en cacher mais, d’une part, il n’avait pas la capacité de mouvement pour et, d’autre part, cacher une marque en révélerait une autre. Autant se cacher tout entier sous un drap. Et il songea sérieusement à le demander en voyant les larmes de la demoiselle briller à la lueur des torches, même si elle tentait de les cacher. Et puis son sanglot ne trompa pas. La gorge d’Hyriel se serra et il ne put rien dire, seulement baisser les yeux, éviter le regard des deux femmes, aussi accablées l’une que l’autre.
Dans sa grande bonté, elle demanda qu’on enlève ses chaînes. Manger ? Alors elles lui avaient même apporté de la nourriture ? Mais… c’était si touchant… Ne se mettraient-elles pas en danger ? Heureusement, quand elle évoqua « nos enseignements », il comprit. La comédie. Bien. C’était le mieux. Sans surprise, on leur refusa de le déligoter. Tant pis… Il s’y habituait, à ces chaînes…
Au moins, les soldats les laissèrent. Hyriel déglutit difficilement en osant relever les yeux vers ses amies, même si c’était dur de supporter leur regard affligé. Il vit la main de la jeune femme approcher et arrangea la sienne comme il pouvait pour refermer en douceur ses doigts sur les siens, en espérant la rassurer, même s’il doutait que ce soit très efficace. Il espérait que l’intention suffirait… et elle posa sa question. Il déglutit difficilement et s’essaya à un sourire, lui aussi, même si c’était sans doute une grimace un peu enjouée…
« Je… »
Comment expliquer la veille au soir ?
« Il se peut que les tintements de chaîne de mes mouvements et le fait que j’ai fait l’oiseau avec mes mains n’ait pas plu à certaines personnes haut-placées… »
Cette fois, son sourire fut plus franc, le genre de sourire gêné mais qui essaye de plaisanter, pour détendre l'atmosphère. Bien sûr qu’il se doutait que la question portait également sur ses blessures mais il préférait éviter ce sujet, pour elles, en faisant comme s’il n’avait pas bien compris.
Il avala de nouveau sa salive, plus sérieux mais toujours en s’efforçant de conserver un visage doux.
« Je vous remercie en tout cas d’être venues, cela me fait très chaud au cœur. »
Et il était des plus sincères, surtout qu’il avait ainsi la confirmation qu’elles étaient libres.
Hyriel Radgery- Sorcier, herboriste, écrivain public ~ Pharmakós de service
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Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Elle se concentrait pour tenir son rôle, mais elle devait bien admettre qu’évoquait la torture commençait déjà à lui retourner l’estomac. Qu’avaient-ils pu le faire subir ? Et si jamais des noms étaient sortis dans un cri de douleur ? Non. Non. Non. Non. Hyriel n’aurait jamais fait cela. Mais c’était tout de même de torture que l’on parlait. Les questions et les craintes se bousculaient dans son esprit tandis qu’elle attendait en compagnie de Florentyna le verdict. Elle tentait tant bien que mal de juguler le flot de pensées mais c’était une hémorragie à peine contrôlable.
Finalement c’est un garde ravi -pour autant que pouvait l’être un garde- qui leur donna accès aux cachots. Elle le remercia d’une révérence polie et s’engouffra à sa suite. Il faisait froid. Était-ce vraiment l’air des cachots qui la fit frémir ou l’angoisse qui montait ? Elle n’en savait trop rien. Tout était si sordide. Il y avait une vague odeur d’humidité et d’autres… bien moins ragoutantes qui secouaient son estomac comme une barque en pleine tempête.
Le panier fut examiné. C’était bien pour cela que la fiole se trouvait dans un revers de sa cape. Elle se félicita pour une fois d’avoir été si clairvoyante. Son amie ne savait rien du contenu du flacon mais Hyriel ne manquerait pas de le reconnaitre.
Il y avait cette petite table qui faisait office de frontière entre leurs deux mondes impénétrables. Elle sentit la main de Florentyna s’enrouler autour de la sienne. Aurait-elle pu venir ici seule ? Sans doute pas. Elle n’en aurait jamais eu le courage. Elle n’aurait pas pu affronter toutes ces épreuves seule.
Un peu plus loin une grille grinçait sinistrement et des chaines cliquetaient. Elle serra les dents pour gagner toute dignité. Puis Hyriel apparut, trainait par les gardes.
Les fers.
Les chaines.
Le collier.
Les bleus. Un peu partout.
Du sang séché dans son cou et à divers autres endroits.
Elle se mordit les joues. Elle tenta de se fixer dans son regard mais tout ce qu’elle voyait c’était les ecchymoses tout autour qui le marquaient. Comment pouvait-on faire une chose pareille ? Sous sa tunique vieillie par les jours passaient au cachot, elle devina la blancheur des bandelettes qui contrastait avec la crasse. Elle se mordit encore plus fort les joues. Florentyna demanda à ce qu’on le libère des chaines. Elle ne pouvait pas même acquiescer. Alors c’était cela ? Il le soignait pour mieux pouvoir le bruler ensuite ? L’on refusa et cette fois-ci, elle mordit si fort qu’elle sentit un léger goût ferreux. Elle ne voulait pas pleurer devant eux, ni même devant lui. Kalisha restait immobile. Écoutant vaguement son amie lui poser une question et la réponse qui s’en suivit. Réponse qu’elle ne comprit pas vraiment car elle ne parvenait pas à quitter des yeux ce collier de fer sombre entouré de taches de diverses couleurs qui s’estompèrent derrière les larmes qui embuèrent finalement ses yeux.
Elle savait que les deux gardes avaient déserté la cellule, elle avait vaguement entendu la porte se fermer dans un bruit de fond. Elle contourna la table et enroula ses bras autour de ses épaules. Elle aurait tellement voulu le serrer fort contre elle, mais elle avait bien trop peur de lui faire mal.
Et toute la pression accumulée ces derniers jours à jouer à la parfaite comédie se vida par ses paupières en deux belles cascades silencieuses.
— Comment ont-il pu vous faire de pareilles choses ? chuchota-t-elle presque pour elle-même en passant une main entre ses cheveux.
— Je suis tellement désolée d’avoir manqué à mes devoirs de Reine et de ne pas avoir su vous protéger de tout cela…
Ses mains entrelacées dans son dos, elle fouilla sa manche pour en extraire le petit flacon et le cacher dans sa paume.
— Je l’ai apporté. Mais je ne sais pas encore comment vous récupérer. Elle ne sait rien.
Elle se baissa, glissa le petit flacon discrètement contre sa jambe et prit ses mains entre les siennes. Florentyna ne devait pas savoir. Ce n’était pas de gaieté de cœur qu’elle gardait ce secret pour elle, seulement si quelqu’un devait par malheur tomber, ce serait elle. On ne devait pas pouvoir soupçonner son amie d’une quelconque complicité dans cette affaire.
Son regard charbonneux devait désormais s’étendre jusqu’à ses joues finalement taries des larmes noires de khôl qui les avait parcourues quelques instants plus tôt. Elle croisa son regard. Oh si elle avait pu lui donner tout le peu de courage dont elle disposait, elle l’aurait fait ! Si seulement cela était possible. Elle lui aurait bien dit que le pire était désormais derrière mais c’était faux. La seule chose qu’elle venait de lui offrir c’était une fausse mort, pas la liberté.
Elle essuya ses larmes qui commençaient à revenir en songeant à ce qui l’attendait avec une quasi-inéluctabilité.
— Je suis si heureuse de vous revoir. Vous êtes si fort et si brave Hyriel.
Elle se redressa et retourna sagement à sa place
— Vous avez sans doute faim? dit-elle avec un petit sourire en poussant le panier vers lui. Les gardes ont beaucoup apprécié!
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Dès l'entrée d'Hyriel, Florentyna vit son étonnement de les découvrir toutes deux ici. Au moins serait-il rassuré quant à leur libération. Le guérisseur baissa les yeux : il cherchait à éviter leurs prunelles embuées, à amoindrir leur peine. Cela fut vain et les sanglots vinrent à la demoiselle - quand bien même elle les bâillonna au mieux. Elle aurait aimé se contenir pour ne pas en rajouter aux douleurs de leur ami. Impossible... Le spectacle de ce qu'il avait souffert avait été plus fort. Puis à la brève expression rassurée d'Hyriel, Florentyna comprit qu'il avait compris : elles étaient entrées sous prétexte de piété. Le dernier acte de cette comédie qu'elles tenaient depuis deux jours.
Sa main demeura un moment dans celle du guérisseur, qui en retour recouvrait d'affection les doigts de la jeune femme. Elle se pinça les lèvres, se retint de trembler afin que leur ami ne s'inquiète pas davantage - lui qui faisait déjà ce qu'il pouvait, empêtré dans ses chaînes que l'on refusait de lui retirer. Quelle cruauté... Ne fallait-il pas être borné pour ne pas voir que l'homme en face d'elles n'avait rien d'un démon ?
Elle écouta sa réponse - dite en un début de sourire, faible mais qui sut tout de même réchauffer le cœur de Florentyna. Deux fossettes sceptiques se creusèrent aux coins de sa bouche. Faire l'oiseau ? Des personnes haut-placées ? Devait-elle comprendre que le guérisseur avait fait montre d'insolence, comme devant son père et le cardinal au moment de son arrestation ? Ce n'était pas impossible : il ne manquait pas de caractère. Mais tout cela pour un simple petit mime ! Ce n'était clairement que l'envie de lui infliger davantage de souffrance et de montrer son pouvoir.
Kalisha n'était pas moins horrifiée qu'elle. L'entrée d'Hyriel l'avait laissée stupéfaite, clouée. Maintenant, elle aussi pleurait sans parvenir à quitter du regard l'horrible collier de fer. Tout son maquillage ravinait ses joues à mesure que les larmes descendaient en serpent. L'affliction de son amie risqua même de ramener une deuxième vague de pleurs à Florentyna mais elle fit tout pour la renvoyer au fin fond de sa gorge. Elle tendit un bras, l'enroula aux épaules de la princesse pour une étreinte - mais celle-ci fut brève : Kalisha se leva et tandis qu'elle faisait le tour de la table pour rejoindre Hyriel, la fille de Monthoux osa enfin rebondir à ce qu'elle venait d'entendre.
-- Quelles personnes haut-placées ? Qui vous a-t-on donc encore fait rencontrer ? murmura-t-elle, après un petit rire à peine soufflé alors qu'Hyriel souriait - à se l'imaginer faire la pantomime devant des Grands, au moins pour le soutenir dans son effort qu'elle devinait de détendre l'ambiance.
Elle vit Kalisha enlacer leur ami. Longuement. Elle-même demeurait trop timorée pour cela alors que tout son cœur y serait. Seule ses doigts étaient noués à ceux du guérisseur. La main de la princesse eut l'air de bricoler quelque chose dans son dos mais sans doute ne faisait-elle que s'arranger au mieux pour offrir son étreinte à Hyriel sans lui faire mal. Florentyna déglutit : c'était bien cela... On l'avait battu. Et sûrement pire encore.
-- C'est la moindre des choses, poursuivit-elle, alors que les deux femmes s'entendaient remerciées d'être venues. Nous ne pouvions plus rester ainsi, sans vous voir... sans savoir et... sans tenter de faire pour vous ce qui est en notre pouvoir... (puis dans un soupir et luttant contre une nouvelle montée de larmes) même si ce n'est pas grand chose.
Elle aurait tout donné pour le sauver si elle avait eu une piste. Mais elles ne pouvaient qu'amener ces paniers. Leur amitié. Et... cette suggestion juridique qui attendait en un coin de son esprit. Florentyna approuva d'un lent hochement de tête, plein d'émoi, les paroles de Kalisha et ce qu'elle disait de leur ami. Il était courageux. Et digne. Elle retint un soupir en entendant la Reine de la forêt se culpabiliser de n'avoir pas su protéger son médecin royal. La nostalgie l'envahit : elle ferait tout pour revenir deux semaines en arrières, quand ils étaient ensemble et si complices au domaine - Kalisha, Hyriel, ses trois amis, Sylvère alias Dame Prudence... Que devenaient-ils ? Florentyna voulut répondre quelque chose susceptible de rassurer son amie : non, elle n'avait pas à se reprocher d'avoir offert un asile au guérisseur. Que cet acharné de cardinal l'aurait retrouvé où que ce fut, en remontant la piste du Lupanar... Néanmoins comme ce n'était pas à elle que la princesse s'adressait, elle ne dit rien et laissera répondre Hyriel qu'elle regarda.
-- Vous nous manquez beaucoup, souffla-t-elle, sans oser continuer sur les autres personnes que cette horrible affaire avait éloignées : les trois camarades du guérisseur.
Elles ne savaient pas ce qu'ils étaient devenus après que son père les ait chassés. Ciel, pourvu qu'ils ne traînent pas dans les rues à risquer l'accusation de parasitisme ! Pourvu qu'ils retrouvent toit et emploi ! Qu'ils ne se mettent pas non plus en danger à tenter quoi que ce soit d'inconsidéré pour leur comparse enjôlé. Et pourvu... qu'ils le retrouvent vivant une fois cette affaire terminée. Florentyna aimerait les aider. Comment retrouver leur trace au milieu de tout Braktenn ?
Elle rit - sans doute autant de relâchement qu'à la remarque de Kalisha quant aux gardes - et approcha encore mieux les paniers vers Hyriel tandis que la princesse introduisait leurs présents. Elle plaisanta à voix très basse :
-- Oh je confirme ! Vous vous rendez compte ! Ils auront célébré cette année la Nativité de Notre Seigneur avec d'excellents péchés mignons de notre voisin Mahométan. (Puis voulant rassurer leur ami par de jolies nouvelles) Vous voyez, nous avons eu le temps pour les cadeaux. Les choses se sont arrangées pour nous : Père s'est calmé, nous sommes déclarées pures et repenties, nous voilà ré-autorisées à aller comme bon nous semble.
Et me voilà promise en fiançailles... garda-t-elle à part soi pour l'instant. Elle redouta aussi ce qu'allait dire Hyriel - ou au contraire ce qu'il allait dissimuler - à la question révoltée de Kalisha. Oui... Comment pouvait-on commettre de tels supplices au nom de la Justice d'une part, et d'un dieu d'amour d'autre part. En attendant la réponse de leur ami quant à se rassasier, elle se prépara à se redresser pour piocher une première bouchée au chocolat dans le panier. Il faudrait les mettre directement dans la main d'Hyriel, qui n'aurait pas l'amplitude de mouvement pour se servir lui-même. Seulement de porter en bouche - et encore, sans trop de difficulté, espéra-t-elle.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Tenter de dérober son regard aux yeux de ses amies, dans le but de ne pas les attrister, était une veine entreprise, Hyriel le comprit bien vite. Ce n’était pas uniquement son regard : tout en lui trahissait son état lamentable. Il ne lui restait donc plus qu’à détendre l’atmosphère en plaisantant. Les deux femmes ne comprirent pas ses mots ; il s’y attendait. Au moins, il semblait les avoir rassurées, c’était le principal, puis elles étaient là l’une pour l’autre.
Intrigué, il suivit du regard le mouvement de Kalisha et se mordit la lèvre à la question de Florentyna. Avait-il le droit de le dire ? Bah, il était déjà condamné et on ne le lui avait pas interdit alors…
« Eh bien… croyez-le ou non mais le cardinal a décidé de m’emmener voir le Roi – pour lui prouver je ne sais quelle diablerie en moi – et la Reine d’Espagne elle-même s’est jointe à la fête… Je n’ai pas vraiment compris ce qu’elle disait vu qu’elle ne parlait pas notre langue mais Sa Majesté m’a posé des questions et… j’y ai répondu avec… sincérité, dirons-nous. »
Une sincérité toute insolente, même. Une fois cette confession faite, Hyriel sourit, comme gêné, ne sachant vraiment quoi faire d’autre.
Il s’étonna alors du geste de Kalisha. Celui-ci réveilla quelques douleurs mais rien de bien méchant. Et son inquiétude occupait trop son esprit pour qu’il y pense. Il ne répondit pas à sa question, préférant fermer les yeux, la gorge serrée. Il n’y avait pas de réponse, après tout, ou du moins pas que l’on disait à une amie qui pleurait contre soi. À la suite, cependant, il secoua la tête.
« Vous ne l’auriez pas pu de toute manière, vous n’avez donc pas à vous en vouloir… » (Un sourire se voulant rassurant, à Florentyna.) « Vous me manquez aussi, tous. »
Peut-être pas son père et leur intendante mais elle comprendrait sans doute.
Il sentit un mouvement dans son dos et comprit à son murmure de quoi il s’agissait. L’élixir de mort temporaire. Mais sans plan pour le récupérer, ce serait… hasardeux. Toutefois, si cela pouvait l’aider dans l’évasion due à sa « maladie »… ou alors pour ne pas souffrir lors du bûcher, si on le laissait le prendre… Il chassa aussitôt cette option de son esprit et serra les mains de sa reine en souriant, comme s’il n’avait pas senti la fiole glisser.
Aux mots de Florentyna, il serra sa main, toujours dans la sienne, pour la rassurer, pressentant le retour des larmes.
« Vous en avez l’impression mais pour moi, c’est déjà beaucoup. Vous revoir toutes les deux et savoir que vous allez bien est la meilleure chose qui me soit arrivée depuis plusieurs jours. Je vous en suis d’autant plus reconnaissant. »
Les traînées de noir chagrin du visage de la Reine de la Forêt n’échappèrent pas à Hyriel qui se mordit la lèvre, attristé lui-même. Pauvres enfants, toutes les deux… Elles étaient trop jeunes pour subir tout cela. Elles se reprenaient, Hyriel fit comme si de rien n’était, par respect et par politesse. Le compliment de Kalisha l’émut et il sourit sincèrement.
« Votre compliment me va droit au cœur. »
Il la suivit de nouveau du regard avant de poser celui-ci sur le panier. Oh oui, il avait faim… Il n’avait rien mangé depuis la veille au soir… Son ventre se rappela à lui et Hyriel se mordit les lèvres, gêné.
« Pardonnez-moi… Mais oui, ce serait mentir de le nier… Et je les comprends, tout cela semble délicieux ! »
Il écouta la suite et souffla de rire à la plaisanterie de Florentyna, avant de sourire sincèrement aux bonnes nouvelles qu’elle annonçait ensuite.
« Voilà qui me remplit de joie ! J’espère que vous passerez ainsi d’excellentes fêtes de Noël ! »
Il releva alors les bras pour essayer de prendre quelque chose mais ne put aller bien loin, arrêté dans son élan par les chaînes claquantes. De nouveau son visage se tordit en une grimace gênée.
« Je crains toutefois avoir besoin de votre aide pour prendre ces bonnes choses en main ; si cela ne vous dérange pas bien sûr. »
Il présenta ainsi timidement ses mains pour recueillir la bouchée que lui choisirait Florentyna.
Hyriel Radgery- Sorcier, herboriste, écrivain public ~ Pharmakós de service
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Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Alors qu’elle se relevait pour aller enlacer son ami, elle écouta la question puis la réponse au sujet de ses fameuses personnes haut placées. Elle voulait presque rire de ses paroles mais la situation transforma les flammes d’amusement en épaisse fumée soufflée de ses narines. Kalisha se souvenait de sa toute première rencontre avec le roi. C’était le jour de son mariage. Ils avaient parlé des infirmes et le souverain n’avait pas manqué de manifester sa curiosité. Une étincelle se raviva soudainement dans son regard.
— Pensez-vous l’avoir intéressé, Hyriel ? C’est peut-être là la clé de vos chaines. Si quelqu’un a le pouvoir d’agir, c’est bien cet homme, et je le sais curieux de toutes les bizarreries qui effraient d’ordinaire.
Elle passa ses bras autour de son buste, ravi de pouvoir le serrer entre ses bras quand bien même elle pouvait sentir l’odeur âpre du sang sécher en se penchant dans son cou. Il essaya de la rassurer tant bien que mal, mais elle ne pouvait s’empêcher de se dire qu’elle aurait pu faire bien mieux que cela. D’ailleurs, elle n’avait rien pu faire pour ses frères.
— Je n’ai pas de nouvelles d’eux depuis qu’ils ont été renvoyés. J’espère qu’ils se portent bien et qu’ils sont à l’abri. répondit-elle à une question qui n’avait pas été posée mais qui devait le tarauder.
Sur ce elle en profita pour récupérer la fiole et la lui glisser contre sa jambe. Si elle devait être utile à quelqu’un ce serait sans doute à lui. Florentyna émit une étonnante plaisanterie qui la fit même se retourner pour sourire de concert. Elle ne l’avait jamais entendu plaisanter ainsi de la religion, elle qui était si pieuse et sage !
Pures et repenties ! Exactement ! La princesse hocha la tête pour bien faire comprendre à son ami qu’elles avaient légèrement abusé de la naïveté de cette adorable bonne sœur afin de pouvoir lui rendre visite.
Quant aux fêtes de Noël, elle ne put que se pincer les lèvres : elle allait se retrouvait en tête à tête avec son mari à jouer la comédie tandis qu’il dévorerait cuisseau de faisan sur cailles farcies et daube de cerf. Pendant ce temps, Florentyna serait à Fromart en compagnie de sa future belle-famille. Pourvu que tout se passe bien, elle aurait enduré cent repas pas de plus avec Prosper si cela avait pu aider son amie.
Elle se sentit terriblement bête lorsqu’Hyriel leur rappela avec tact que les gardes avaient refusé de le détacher. Elle sourit à son complice et poussa le panier vers elle avec malice.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Elle fut estomaquée par la réponse du guérisseur : le roi ! Et la reine d'Espagne. Rien que cela. Florentyna se pinça la lèvre et s'interdit un regard de gêne vers Kalisha, en se remémorant cette rencontre entre Alma et la princesse. Désagréable souvenir pour son amie. La demoiselle plissa les yeux : autant le chasser. D'autant que là n'était pas la question. Deux autres points la retenaient. D'abord le fait que la souveraine n'ait pas daigné parler Monbrinien en présence d'Hyriel. C'était... absurde ! Ou d'un mépris consommé. Soit... Mais surtout : Der Ragascorn. Ainsi que le soulignait Kalisha, oui, il était connu dans la noblesse que Sa Majesté nourrissait pour les phénomènes humains cet attrait que d'autres avaient pour les trophées de chasse. Elle grimaça. Toutefois son amie n'avait pas tort : et si, loin de convaincre le roi du caractère démoniaque de son prisonnier, le cardinal lui avait malgré lui présenté une nouvelle perle rare ? Florentyna déglutit : servir de fétiche... même au roi... Il serait heureux qu'Hyriel l'ait assez intrigué pour qu'il veuille le sauver... mais ensuite ?
La demoiselle avait elle aussi en tête une solution, cependant elle ne serait guère plus digne que de finir jouet du souverain. Quoi que. Elle eut l'impression de s'apprêter à demander à leur ami de choisir entre la peste et le choléra. Aussi n'en eut-elle pas le courage immédiat et écoutera plutôt les pronostics du guérisseur quant aux impressions laissées à Sa Majesté. Elle répondit d'un pâle sourire aux remerciements d'Hyriel. Oh, pourvu que ce cauchemar prenne fin et que tous puissent se retrouver comme si rien n'avait été ! Kalisha, Hyriel, ses trois amis, Sylvère, Phaïdée... Si Florentyna avait pu donner quoi que ce fut pour effacer toutes ces séparations, elle le ferait en cet instant.
Ses joues rosirent. La meilleure chose. Pas difficile au milieu de ces tortures, mais le compliment la mit en émoi. Certes, moins qu'il l'aurait fait une dizaine de jours auparavant. Ce bref égarement devait disparaître. Elle allait se fiancer. Il n'était plus temps de se perdre en sentimentalisme sans lendemain. Les femmes n'avaient pas le choix : souvent - et plus vite que ces Messieurs - elles devaient se faire une raison. Au milieu de ces auto-injonctions, elle entendit Kalisha anticiper l'inquiétude d'Hyriel et donner les tristes nouvelles de ses camarades. Mis à la rue. Par son père. Elle détourna le regard de honte alors qu'elle se savait n'être pas responsable. Non, elle n'y était pour rien. N'y pouvait rien. Comme en ce moment, pour leur ami elle ne pouvait rien. L'amertume pulsa dans sa gorge. Quant à Noël, elle souffla un las :
-- Ces fêtes de Noël pourraient être meilleures. (Sans un bûcher en perspective. Sans un mariage arrangé si précipitamment.) Mais nous allons essayer. Il le faudra pour ma part : alors que nous étions encore toutes deux sous verrou, Père m... m'a donnée en fiançailles. Je vais le rencontrer pas plus tard qu'en sortant d'ici. (à Kalisha, la voix tendre et tremblotante dans sa tentative de promesse) Vous êtes passée par là, vous aviez donné le change, il faut que je sois capable de faire de même.
Toutes ces nouvelles la chamboulaient. Tant et si bien qu'elle s'abandonna à cette plaisanterie, qui aura eu le mérite de faire rire Hyriel. Mais même Kalisha s'en retourna, étonnée. Et pour cause ! Florentyna était d'ordinaire si correcte dans sa conversation, si peu encline à la pointe - encore moins au sujet des choses saintes. Cependant cette journée et les précédentes n'avaient rien d'ordinaire. Les émotions de la demoiselle étaient en vrac et elle avait eu le déplaisir de constater les dérives de la foi que pourtant elle chérissait. Toute croyante qu'elle était, les absurdités résiduelles méritaient bien un petit dard. Elle rendit leurs sourires à ses deux amis : Florentyna savait qu'avec eux, elles pouvait se permettre un peu de relâchement. Et quelques mots que ô Dieu jamais elle ne prononcerait en société.
Comme elle le craignait, Hyriel ne put piocher au panier. Pas assez de mou autorisé par ses chaînes. Ses mâchoires se crispèrent à l'indigne spectacle. Il n'était toutefois plus temps de déplorer la situation. Simplement de profiter autant que possible du moment qui leur était laissé. Ses mains quittèrent celles du guérisseur. Elle remercia Kalisha quand elle lui approcha les victuailles, puis piocha une petite pièce au chocolat qu'elle déposa délicatement au creux du panier que formaient les paumes de leur ami. Elle se mordit la joue, gênée, puis s'efforça de sourire.
-- Nous avons aussi des oranges. Voulez-vous que nous vous en préparions ?
Dépiauter les fruits. Les serviteurs faisaient ce genre de choses d'ordinaire et elles autres, nobles, n'avaient qu'à déguster... sans trop songer aux mains invisibles qui confectionnaient. Pas aujourd'hui. En l'occurrence, Kalisha et elle allaient faire le nécessaire. Ce singulier goûter en prison allait la marquer à plus d'un égard. Quelques instants passèrent. Florentyna laissa au guérisseur le temps de manger. Ce gâteau d'abord. Puis les autres qu'il voudrait. Ainsi que des fruits. Après quelques bouchées avalées, elle inspira et se jeta à l'eau :
-- J'ai... pensé à autre chose, Hyriel. Il y a le roi, bien sûr. Kalisha a raison : souhaitons une grâce ou que sais-je de son côté, mais... dans le doute... (Elle rassembla ses mots et énonça la suite avec davantage de maintien. Elle devait être persuasive.) Vous savez, la loi exige qu'au moment de clore votre procès, le verdict soit accompagné d'une proposition de repentir. Ils vont vous inviter à signer un document. Qui atteste vos regrets, qui promet que vous allez revenir dans le droit chemin (elle peina à dire ces derniers mots) et vous consacrer à vous racheter, ce genre de choses. Je sais que tout cela est injuste. Ce sera très dur, oui. Mais je vous en supplie, Hyriel, il ne faut pas qu'ils vous condamnent à mort. Si vous signez cela, il y a une chance pour que vous écopiez de l'enfermement ou... deveniez esclave. (Un tremblement la prit) Dans les deux cas, bien des choses seront encore envisageables. Nous ne vous abandonnerons pas. Dites-moi que vous ferez tout pour éviter l... le...
Elle se tritura les doigts, craignant d'avoir dit et proposé d'énormes bêtises. Comment Hyriel allait-il prendre une telle suggestion ? Florentyna évita son regard. Elle chercha plutôt celui de Kalisha, même si ce fut rapidement avec appréhension : son amie... elle aussi, qu'allait-elle penser d'une idée de cette nature ? Une idée qui reviendrait à se soumettre - mais à ce stade toutes les portes étaient à considérer. Florentyna pencha la tête, nerveuse : elle-même, que ferait-elle à la place du guérisseur ?
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
L’étonnement de ses amies ne le surprit pas mais la question, en revanche… à croire qu’elle en connaissait plus sur le roi que ce qu’il montrait en présence de la reine d’Espagne. Le sourire d’Hyriel se fit plus malicieux.
« Difficile à dire car nous n’étions pas entre nous, mais je pense que ce n’est pas inenvisageable… »
Ne lui avait-il pas parlé, avant de le faire au cardinal ? Et sa question sur la recette… Oui, il avait ses chances, et il avait confiance en ses deux curieux amis. Mais naturellement, cette solution dérangea Florentyna. Alors elle aussi savait. Hyriel s’efforça de lui adresser un visage apaisé, afin de la rassurer. C’était toujours mieux que le bûcher alors l’hypothétique reste ne le dérangeait pas trop. Le compliment l’aida à en revenir, heureusement, et aida Hyriel à sourire plus sincèrement.
Kalisha évoqua alors « eux », et il comprit. Et fort heureusement, il savait qu’ils allaient bien, au moins aux dernières nouvelles, grâce à Cassandre. Il sourit donc avec calme, espérant la rassurer aussi.
« Je pense que oui. »
Il n’en dit pas non plus trop, au cas où, mais elle comprendrait sans doute qu’ils avaient trouvé un refuge et qu’on le lui avait fait savoir…
Quand il évoqua les fêtes de Noël, il vit que les deux femmes ne semblaient pas s’en réjouir. Il espérait ne pas avoir commis d’impair… Il afficha une mine soucieuse en écoutant Florentyna avant d’écarquiller les yeux sous la surprise. Il… Son père l’avait fiancée en quelques jours ? Sans la tenir au courant ? Il savait déjà que cela se faisait dans la noblesse mais… tout de même ! Ce n’était pas parce que c’était l’usage que ce n’était pas révoltant ! Pauvre enfant… elle était à peine plus âgée que Guillaume, comme Kalisha… Aucune d’elles ne méritait ça… Et en plus, c’était fait pendant qu’elle traversait une période difficile, en plus, à cause de son arrestation à lui… Hyriel déglutit quand l’idée s’insinua en lui. Et si son père voulait s’en débarrasser en la mariant au plus vite, avant qu’on ne se pose de questions à propos de son comportement « répréhensible » pour l’aider, lui ? Il secoua la tête en cherchant ses mots et prit une main de la jeune femme entre les siennes pour lui donner du courage.
« Je… Je vous avoue que… je ne sais pas quoi vous dire hormis que… que je suis désolé si je suis impliqué et, surtout, que je sais que vous serez forte dans cette épreuve. Vous êtes une jeune femme accomplie, cultivée, vous connaissez la société, vous surmonterez sans doute cela. Et votre gentillesse, ainsi que votre générosité, auront raison de n’importe quel mari, j’en suis certain. »
Il sourit pour appuyer ses derniers propos, espérant qu’ils fassent effet. Et puis elle aurait toujours Kalisha, elles pourraient sans doute se voir et se soutenir…
La conversation changea de sujet et Hyriel s’en réjouit. Une blague, rien de mieux pour détendre l’atmosphère. Et ils se souriaient, tous plus détendus. Comme si leur environnement avait disparu. Il se rappela toutefois à eux assez vite, quand Hyriel fut handicapé par ses chaînes. Il se sentit affreusement gêné de devoir dépendre de ses amies pour quelque chose d’aussi simple que se nourrir. Il avait l’habitude d’être parfois dépendant, notamment dans ses déplacements, mais il n’en était jamais fier et l’évitait au maximum. Mais là… il n’avait pas le choix. Et son ventre lui faisait savoir qu’il n’en avait rien à faire de sa dignité et de ses états d’âme, alors il se résolut à se laisser faire. Après avoir remercié Florentyna d’un signe de tête reconnaissant, il regarda avec curiosité le chocolat et le porta à sa bouche. Il fut stupéfait par son goût, amer et doux à la fois, et cela se vit sur son visage. Quand il eut avalé sa première bouchée, il ne revint pas tout de suite de son étonnement et se permit de demander :
« Qu’est-ce donc, si ce n’est pas indiscret ? Je n’en ai jamais goûté auparavant… »
La question suivante le laissa un instant muet, en lutte contre lui-même. Des oranges aussi, c’était si rare pour lui. Il se mordit la lèvre avant d’acquiescer timidement, comme un enfant.
« Je vous avoue que vu le peu que j’ai mangé depuis hier… » À savoir rien… « je ne dirai pas non et je vous en serai extrêmement reconnaissant, bien que je sois désolé de vous embêter ainsi… »
Mais il fallait bien reconnaître qu’avec ses mains meurtries si étroitement liées, il n’irait pas loin contre une écorce.
Il continua en attendant de déguster son petit gâteau, sans rien dire, et releva la tête quand Florentyna inspira. Il la regarda formuler sa demande difficile, impuissant, car il ne savait de nouveau quoi dire. Une proposition de repentir… une reconnaissance écrite qu’il avait bien pactisé avec le diable. Une traîtrise de plus pour le condamner au bûcher afin de le purger. N’était-il pas parjure de facto ? Un serment signé de sa main n’avait aucune valeur. Mais ça, il ne le dirait pas à Florentyna. Elle, toujours aussi altruiste, elle voulait juste le sauver. Et elle avait besoin d’espoir. Alors, quand elle hésita, il prit la suite avec calme – ou du moins l’espérait-il – pour lui éviter de formuler le mot honni et pour la rassurer.
« Je vais y réfléchir. »
Il déglutit, en profitant pour chercher ses mots.
« Je vous suis très reconnaissant pour l’intérêt que vous portez à… à ma survie mais ce n’est pas une décision sans conséquence pour moi. Mais je vous promets d’y songer sérieusement. »
Il sourit de nouveau, ou plutôt s’y efforça, pour l’aider à accepter cela. Et puis il y réfléchirait, oui, sans doute, mais il avait déjà fait son choix : privilégier l’évasion. Et sinon, peut-être qu’il pourrait y songer… même si le résultat reviendrait sans doute au même, dans les faits. Mais ce serait plier à la toute fin… ça pas sûr qu’il l’accepte. C’était sans doute idiot mais il ne voulait pas accorder la victoire à ses ennemis. Ce n’était pas ainsi qu’il aiderait à fragiliser ceux qui se croyaient maîtres du monde.
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Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Kalisha fut soulagée d’entendre que l’option royale n’était pas complètement fermée. Certes ce n’était pas forcément très glorieux, mais c’était toujours mieux que de mourir bruler vif -du moins c’était ainsi qu’elle envisageait les choses-. Elle poussa donc un léger soupir de soulagement. Peut-être interviendrait-il in extremis pour lui accorder une grâce royale ? Elle adressa un petit sourire à Florentyna qui semblait bien mal à l’aise avec cette idée.
Soulagement encore accentué par les nouvelles que lui apporta Hyriel au sujet de ses trois comparses. Il n’avait pas besoin d’en dire plus pour qu’elle comprenne qu’il avait eu des nouvelles d’une façon ou d’une autre et qu’ils étaient en sécurité. Elle porta la main à son cœur et acquiesça. Il était exclu de développer ce sujet parmi d’indiscrètes oreilles, car elle doutait fort que les loukoums ne leur ait servi de bouchons auriculaires.
Aux explications de son amie sur les fêtes de Noël et le rappel de ses fiançailles, elle lui serra la main.
— Tout va bien se passer Florentyna. Vous avez la chance de le rencontrer avant vos noces et Hyriel a raison, vous êtes la femme la plus formidable que je connaisse, comment pourrait-on ne pas vous apprécier ? Cela m’est inconcevable, vous feriez ployer les ramures du plus solide des chênes, j’en ai l’intime conviction.
L’atmosphère s’allégea à la pointe d’humour de son amie et elle lui laissa l’honneur de proposer à Hyriel les gourmandises de son choix. À voir son expression changer du tout au tout, il n’avait jamais gouté cela ! C’est qu’elle en aurait presque oublié qu’il vivait dans les bois à force de le fréquenter.
— Il s’agit de chocolat, Hyriel. Cela vient du Nouveau Monde. Si j’avais pu, je vous aurais rapporté du chocolat chaud ! Malheureusement c’était compliqué à transporter.
En attendant, elle prit d’elle-même une orange qu’elle commença à éplucher avec soin.
— Avez-vous déjà gouté des oranges à la cannelle ? C’est si bon ! On les tailles si fines que l’on peut voir à travers puis l’on saupoudre de cannelle.
Dans le même temps, Florentyna prit son courage à deux mains et avança la proposition qu’elle était venue lui faire. Elle appuya d’un hochement de tête ferme ses propos. Elle la rassura tant bien que mal en posant une main sur son épaule puis prit la parole à son tour.
— Elle a raison… Il faut parfois mettre sa fierté de côté. Si vous êtes mis en esclavage, j’intercèderai auprès du Premier Conseiller pour qu’il vous accueille en son domaine. Nous sommes en bon terme et vous y serez bien là-bas. C’est un homme respectueux et juste. Il prendra soin de vous...
Pourtant son médecin semblait dubitatif, la princesse ne se démonta pas pour autant, bien au contraire, elle se redressa tout à fait sérieusement.
— Je suis votre reine, Hyriel et je vous interdis de périr sur un bucher ! ordonna-t-elle.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Kalisha comme Hyriel souhaitaient croire en cette issue que représentait le roi. Florentyna avait davantage de mal à s'en convaincre - ce serait si... fou ! - et l'idée de ce que Sa Majesté pourrait s'amuser à faire du guérisseur la gênait. Toutefois elle choisit de s'aligner sur les espoirs de ses amis et sourit avec eux, car c'était en effet mieux que de mourir brûlé. Son sourire s'étira, plus franc, quand elle comprit entre les lignes que Florentin, Guillaume et Eugène avaient trouvé une solution. Oh, Seigneur, merci ! Elle en poussa un petit soupir d'aise, haussant les yeux au ciel, avant d'acquiescer en direction d'Hyriel pour lui faire comprendre qu'elle avait saisi.
L'annonce de ses fiançailles étonna le guérisseur. Elle vit l'effarement dans son regard et ne pouvait qu'être d'accord. Comment son père avait-il pu conclure une telle chose si vite et dans de pareilles circonstances ? Peut-être, précisément, pour faire oublier l'affaire de l'affreux sorcier et ramener les honneurs sur la maison de Monthoux. Elle se mordit la lèvre devant la tristesse d'Hyriel mais parvint à se détendre aussitôt que Kalisha lui serra la main. La demoiselle eut à peine le temps de réagir que tous deux l'inondèrent de compliments qu'elle n'était pas sûre de mériter. Elle... ne faisait que son devoir. Et laissait parler sa sensibilité envers les artistes qu'elle mécénait, envers ses amis et quiconque l'émouvait. Florentyna rougit jusqu'aux oreilles. Elle entrouvrit les lèvres mais rien ne sortit. Ses yeux brillaient.
Suivant son premier élan, elle se leva, s'avança entre Hyriel et Kalisha pour les rapprocher l'un et l'autre dans une tendre accolade à trois. Ses bras s'enroulèrent autour d'eux, le plus doucement possible afin de ne pas faire mal au guérisseur. Sa tête était logée au creux de l'épaule de la princesse. Profitant d'avoir le visage dans son dos, elle laissa couler en silence une larme en repensant à leurs si aimables paroles. Kalisha aussi était un ange de bonté, une femme curieuse, douce, inventive... et pourtant... jamais son père n'avait été ému de sa personnalité. Alors qu'en serait-il pour elle avec son futur époux ? L'on faisait certes difficilement plus inconséquent que le comte de Monthoux... mais si son promis était fruste ? Renfrogné ? Peu porté sur les arts ou la charité ? S'il l'ignorait ? Reprenez-vous Florentyna, s'ordonna-t-elle en secouant la tête. Elle devait croire Hyriel et Kalisha. Elle se défit lentement d'eux après ce long câlin et reprit place sur son siège, troublée. Il n'aurait plus manqué qu'un vigile entre à ce moment-là ! songea-t-elle en un début de sourire.
-- Merci... Comme j'ai de la chance d'avoir des amis tels que vous. Oui, je... je prie de toute mon âme pour que les choses se déroulent bien avec ce jeune homme. Peut-être même saurais-je oublier qu'il est de la maison de Fromart.
La précision était sortie toute seule dans la spontanéité de la confidence. Elle regarda Kalisha, cette fois-ci sereine : elles en avaient parlé, elle savait que son amie saurait oublier, pour venir la visiter, tout ce que ce nom représentait pour elle de tragédie. Et même à son père, Florentyna pardonnait d'avoir fait ce choix qui à première vue avait tout d'une plaisanterie de fort mauvais goût.
Mais il était temps de changer de sujet : la demoiselle jugerait odieux de continuer sur cette ligne et de donner l'impression de se plaindre, en face de la princesse qui avait eu un si mauvais mariage... et d'un homme qu'on avait torturé et qui risquait le bûcher. Non. Elle ne serait ni capricieuse ni geignarde. Aussi se recomposa-t-elle un visage lisse de sérénité, clair de la joie à être avec ses amis. Vint d'ailleurs le moment de faire goûter à Hyriel tous ces mets ! Florentyna vit à quel point il était gêné de sa situation. Lui qu'elle avait connu si indépendant - travailleur et débrouillard à en faire oublier son infirmité... Elle ne se départit pas de son expression de lumière afin de lui faire comprendre que cela ne la dérangeait pas le moins du monde. Elle se réjouit de le voir apprécier le chocolat - non sans une surprise bien naturelle, quand on savait qu'une telle friandise était réservée aux Grands de ce monde. Elle écouta Kalisha lui expliquer l'origine de la gourmandise, puis la vit proposer à son tour quelque chose : une orange qu'elle dépiautait avec soin. La bonne odeur acidulée parfuma l'austère parloir. Elle put imaginer d'ici la cannelle, alors que la princesse comme à son habitude savait si bien parler des délices de chez elle.
Quand Hyriel se fut un peu régalé de ces premiers mets, Florentyna se jeta à l'eau en avançant cette option judiciaire. Heureusement, elle eut le soutien de son amie. Sa paume vont recouvrir la main de Kalisha sur son épaule. Et ce qu'elle disait pour compléter était des plus rassurant. Elle sourit à la princesse. Puis à Hyriel, avant de rebondir :
-- Bien sûr, ce ne serait pas anodin... je peux imaginer ce que cela vous coûterait... (Plier le genou. Donner raison, au moins en apparence, à ceux qui l'avaient condamné. Leur tendre un bel exemple dont ils pourraient se vanter, affichant comme un trophée le cas d'un prétendu sorcier venu au repentir - quand bien même ils douteraient de sa sincérité s'ils avaient un minimum de bon sens... Mais seul comptait le mythe donné en public.) Cependant rien n'est irréversible que la mort. Tant que l'on a la vie, Dieu seul sait ce que vous pourrez faire d'heureux. Préservez-la. (Un temps) D'autant que je ne peux que me ranger à l'avis de Kalisha : à plus d'une reprise, le seigneur de Frenn a été fort bon avec nous et on le dit soucieux de ses gens, y compris de ses esclaves. (dans un petit rire) Croyez-moi, Père a pesté des semaines après un dîner chez le Premier Conseiller ! Il ne s'est jamais remis de l'avoir vu prendre, devant lui, la défense d'un esclave que mon adroit géniteur avait sans aucun doute provoqué avec la finesse que vous lui connaissez.
Elle se pinça la lèvre et rosit. Il fallait en rester là. Aller plus loin sur le sujet serait peu chrétien. D'autant qu'elle s'était promis, après la visite de Sœur Cécilia, de tenter de recoller les morceaux avec son père et d'avoir de sérieuses discussions - les plus sereines possible.
-- Pardon... Cela pour dire que vous ne serez pas laissé à votre sort, si le Tribunal penchant pour cette option.
Aller demander à une amie d'acquérir Hyriel, Florentyna y avait déjà pensé. Pas question de laisser son père l'avoir : ce ne serait que pour le plaisir de se venger de ses prétendus méfaits. Sans compter Marthe, à qui il faudrait moins d'un mois pour l'éreinter. Pas question non plus de voir leur ami expédié sur une galère en tant qu'invendu. Le seigneur de Frenn paraissait une bonne option. Le pire serait sans doute de subir le marquage et de passer entre les mains du trafiquant Greeglocks, mais une fois cela fait... Oui, le baron accueillerait la proposition. Il avait aimablement reçu Kalisha au début du mois. Il avait levé les charges contre Sylvère. Au Triomphe déjà, il s'était soucié de la princesse alors qu'elle avait perdu connaissance à l'annonce de la trahison de Djerdan. Accepterait-il cette fois encore de faire cela pour elles ?
Elle sourit, pleine de tendresse, à l'ordre formulé par la Reine de la Forêt à son médecin et obéissant sujet. Il ne résisterait pas à cette belle prestance ! Cela faisait du bien, même dans ces circonstances, de rappeler les contours de leur merveilleux royaume où il faisait bon se réfugier. Même si c'était un rôle. Même si cela n'existait que dans leur cœur, rien ne devait être pris plus au sérieux parfois que certains jeux.
-- Sa Majesté a parlé - et elle, en Monbrinien pour son humble vassal - souffla Florentyna avec une légère révérence comme en ferait une zélée dame de parage.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Hyriel fut aussi ravi que soulagé d’avoir pu rassurer les deux jeunes femmes à propos de ses compagnons. Au moins, elles ne s’inquiéteraient plus pour eux, c’était un poids de moins. Kalisha s’alliait également à lui pour rassurer Florentyna, et Hyriel approuva ses paroles par un hochement de tête souriant. La pauvre était si émue… Son geste surprit Hyriel mais le fit sourire. Il ne put pas les enlacer également, à cause de ses mains, et une caresse de la tête serait déplacée, aussi se contenta-t-il de sourire en profitant de l’étreinte dans laquelle il mettait tout son cœur, à défaut d’y mettre ses bras. Il se redressa quand elle s’écarta et continua de sourire pour la rassurer. Il hocha doucement la tête à ses bons mots. En plus il était jeune, c’était déjà une bonne chose.
Et c’était un Fromart. Comme le Ministre des Affaires étrangères. Celui qui avait ruiné son pays. Celui qui avait… Oui, sa présence à leur côté le lui faisait réaliser : celui qui avait marié Kalisha. Celui qui était venu rechercher la loque de son fils. Une idée fusa un instant dans l’esprit d’Hyriel. Son fils… serait-ce lui, le fiancé ? Non, c’était idiot de supposer cela sur de si faibles bases, il y avait sans doute d’autres fils Fromart, ou d’autres branches. Hyriel ne dit de toute manière rien et se contenta d’acquiescer en souriant. Il ne dirait rien et n’embêterait pas son amie avec ses hypothèses, surtout qu’il valait mieux qu’elle l’ignore.
Après avoir goûter cette étonnante friandise, Hyriel écouta avec étonnement les explications. Du Nouveau Monde ? Eh bien ! Il ne put masquer son étonnement.
« Merci mais… c’est déjà immense, je ne vous en demandais pas tant ! Je n’imaginais même pas que cela puisse exister, alors en manger un jour, surtout dans ma situation… Votre gentillesse vous honore toutes les deux ! »
Il la regarda ensuite éplucher l’orange en écoutant sa description, impressionné.
« Tout cela semble très bon ! Mais malheureusement, je n’ai jamais goûté de cannelle non plus, je connais seulement quelques-unes de ses vertus. »
Vint alors la proposition de Florentyna et l’avis de Kalisha, ferme. Mettre sa fierté de côté, oui, mais… tout de même… Il ne savait pas vraiment quoi faire… Il inclina toutefois la tête en remerciement à sa proposition.
« Je vous en serais très reconnaissant. »
De ce qu’il en avait vu au procès, servir chez lui ne serait probablement pas si horrible, si l’occasion se présentait. Tout sauf Monthoux, en tout cas. Il écouta la suite des paroles de Florentyna. Elle était consciente de ce que cela représenterait pour lui et il baissa les yeux pour approuver avant de se mordre la lèvre à la suite. En effet… Il souffla de rire à l’anecdote qu’elle raconta sur le dîner avec le Premier Conseiller et sourit à sa pique osée à son père. Il la sentit mal à l’aise avec cela, aussi ne releva-t-il pas, mais tout de même, c’était assez satisfaisant. Il hocha la tête, considérant de nouveau la question. Pas longtemps, car la réaction de Kalisha le laissa sans voix un instant, surtout quand son amie l’appuya. Une fois la surprise passée, Hyriel sourit, souffla de nouveau de rire, même, en hochant la tête.
« Si Sa Majesté l’ordonne… »
Il n’y avait plus qu’à espérer que le plan d’évasion fonctionne, pour qu’il n’ait pas à signer ce maudit document pour obéir sa reine – la seule qu'il reconnaissait comme telle.
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Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Touchée, Florentyna, les serra dans ses bras. Une étreinte qu’elle rendit autant que possible à ses deux amis qui devaient chacun d’entre eux à leur niveau affronter de terribles épreuves. C’était si agréable de se sentir si bien entouré en ces périodes de tourments, quand bien même ce n’était qu’éphémère… Il fallait apprécier le peu que l’on pouvait avoir et l’engranger pour les moments de solitudes à venir.
A la mention du nom de Fromart, Kalisha se mordit les lèvres. Plus vis-à-vis de son amie que d’elle-même. Et puis peut-être que cela inquièterait Hyriel ? Qui n’avait pas entendu le nom de Fromart dans le pays et plus encore à la capitale ?
Hyriel n’avait jamais rien goûté de cela. Au fond ce n’était pas étonnant. Elle lui adressa un sourire :
— Je vous en apporterai dès que tout sera fini ! Et vous m’expliquerez tout ce que vous savez de ce drôle de petit bâton.
Elle ne voulait pas imaginer ne plus jamais le revoir. C’était proscrit. D’ailleurs son amie en profita pour lui proposer une solution qu’elle ne pouvait qu’approuver, à défaut de mieux, ce que Florentyna à son tour, en évoquant la rencontre de son époux avec le Premier Conseiller. Elle aussi s’en souvenait encore. Une semaine à entendre parler à chaque repas ! Ce qui ne faisait que plus de vingt fois en y songeant bien. Et encore, il suffisait d’évoquer le baron de Frenn ou Zakros pour que le sujet revienne sur la table plus surement que le cochon de lait rôti. Pourtant, Hyriel semblait toujours aussi dubitatif, ne lui laissant aucun autre choix que d’utiliser le maigre pouvoir dont elle disposait pour le contraindre à ranger sa fierté au placard.
Il parut étonné -et le contraire aurait été étrange- mais accepta non sans ce petit rire qu’elle aimait bien trop et qui lui étira un sourire faisant voler en éclat le peu de sérieux qu’elle avait réussi à rassembler.
Elle acquiesça comme elle put, se mordant les joues pour ne pas se laisser emporter par un fou rire absurde. Les spasmes commençaient à secouer ses côtes et plus elle regardait Hyriel et Florentyna, plus ses commissures s’étiraient, laissant quelques souffles amusés s’échapper de ses narines, lorsque… elle explosa définitivement de rire, relâchant toutes les tensions accumulées depuis des jours. Elle riait tant et si bien que son ventre en était douloureux et que ses yeux se remirent à pleurer. Oh elle allait attirer les gardes qui n’allaient pas comprendre. Elle devait se reprendre, mais elle n’y arrivait pas.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
La longue étreinte fut partagée. Florentyna put y sentir tant de vive émotion ! Une larme en roula le long de sa joue. Son regard brillant cueillit celui de Kalisha tout comme celui d'Hyriel, alors qu'elle profitait pleinement de leur présence. Et dire que ce soir, elle dînerait chez sa belle-famille, sans son amie. Et que d'ici un moment qui ne se rapprochait que trop... elle quitterait le guérisseur sans rien savoir de ce qui allait lui arriver. Elle ne voulut pas envisager de ne jamais le revoir, tout comme elle se refusait à abandonner la princesse seule avec son géniteur. Le sourire persistant d'Hyriel la rassura. La demoiselle voulut accorder son optimisme à cette image qu'il lui renvoyait en cet instant. Dans les mots de Kalisha du reste, Florentyna entendit qu'elle aussi rejetait vivement l'idée de voir leur ami exécuté. Non. Cela n'arriverait pas. Comme le disait la princesse, bientôt tout cela serait terminé. Ils se retrouveraient. Hyriel goûterait la cannelle, approuva-t-elle dans un demi sourire. Autant d'espoirs auxquels la fille de Monthoux hocha la tête après la promesse de son amie.
Une promesse où perça une drôle et attendrissante façon d'évoquer ce mets et ses vertus... à laquelle la demoiselle rosit. Seigneur, si ces messieurs gardes entendaient tout cela ! Alors que l'évocation du savoir d'Hyriel quant à ce petit bâton entamait déjà le sérieux que Florentyna tentait de conserver, toute gravité voler définitivement en éclats avec cette solennelle promesse à la Reine de la Forêt suivie d'un fou-rire. Amusement du guérisseur d'abord, aussitôt secondé par l'hilarité que Kalisha ne retenait plus. C'était une situation si absurde et troublante. Rire ainsi était libérateur, émouvant, complice... et triste à la fois tant cela venait de toute cette pression expulsée d'un coup. Le rire de son amie fut si communicatif - et la tension à déverser si partagée - que Florentyna ne tarda pas non plus à se sentir traversée de soubresauts mal contenus. Regard plissé, main à sa bouche, les hoquets tintèrent malgré tout et finirent per devenir aussi un vibrato que les murs du parloir répercuteraient. Oh Seigneur, qu'allait-on penser en les trouvant ainsi ? La fille de Monthoux en rougit alors que ses yeux pétillants allaient d'Hyriel à Kalisha. Quelle équipe ne faisaient-ils pas !
La demoiselle parvint à se calmer, ravalant les tressautements de sa gorge. Un sourire encore accroché à ses lèvres, elle allait passer un bras autour des épaules de son amie quand, ainsi qu'elle le redoutait, une lourde clé se fit entendre dans la serrure. La porte grinça. Les bottes des soldats sur le retour approchaient. Retrouver son sérieux... Vite... Florentyna se pinça la lèvre et se tourna vers la sentinelle.
Les gardes arrondirent les yeux devant ce spectacle... singulier. Pour les friandises partagées, ils étaient informés. Mais ils ne s'attendaient pas à retrouver la comtesse de Monthoux encore en proie à ce qui semblait être un reste de rire. Encore moins, par dessus le marché, à relever la cascade charbonneuse de son maquillage le long de ses joues. Les deux vigiles s'échangèrent des œillades circonspectes. Avaient-elles sangloté ? Avaient-elles ri ? Qu'était-ce encore là que cette affaire... Le premier fit un pas et demanda avec sérieux :
-- Mesdames ? Tout s'est-il correctement déroulé ?
-- Ne vous a-t-il fait aucun problème ? s'enquit son collègue avec une lorgnade sévère en direction du sorcier. Regard plein de doutes inquiets davantage encore que de rigueur : il s'était Diable passé quelque chose d'anormal pour retrouver ces deux pieuses femmes dans ce drôle d'état en face du prisonnier. Sa mine soucieuse elle aussi les interrogeait.
-- J... Je vous remercie, Messieurs, mais je vous assure que tout va bien, répondit Florentyna qui retrouvait contenance, mains croisées devant elle. Ciel... il ne manquerait plus que ceci concourt à l'accusation d'envoûtement. Cet homme n'a rien à se reprocher, prit-elle soin d'ajouter avant de regarder vers Kalisha avec un air entendu, et compléta : De fil en aiguille, en conversant, la comtesse et moi nous sommes laissées prendre par un plaisant souvenir.
-- Quoi qu'il en soit, reprit le vigile, protocolaire, nous devons maintenant ramener le prisonnier en cellule. Le temps de visite arrive à son terme.
-- Si Mesdames veulent bien nous suivre, ajouta son collègue, au visage brièvement traversé par un sourire aussitôt ravalé, au souvenir du don de loukoums qui avait sans doute contribué à leur autorisation d'entrée.
-- Au revoir, Hyriel. Bon courage. Puisse la conversation que nous venons d'avoir vous être profitable, salua la demoiselle, s'efforçant de remettre le masque de piété avec lequel elles étaient entrées - même si elle luttait contre une furieuse envie de rire... et de pleurer à la fois. Pleurer, car elle aurait préféré quitter le guérisseur sur une dernière accolade ou un ultime sourire, plutôt qu'engoncée dans un tel rôle. Mais il le fallait.
Florentyna se leva, reprit d'une main son panier, et invita son amie à l'accompagner en chemin retour, à la suite des soldats. Elle proposa à Kalisha de passer son bras au sien, pour affronter ensemble cette sortie les faisant retraverser les boyaux de la prévôté. Discrètement, elle sourit à la princesse. Comme un encouragement et une dernière note d'optimisme : elles devaient garder de ce moment le souvenir de leurs rires, de leurs bons mots, de ces gourmandises offertes, du sourire d'Hyriel en attendant de le retrouver en vie. Elles pouvaient être optimistes : tous trois avaient envisagé assez de portes de sortie pour croire en une bonne issue pour le guérisseur.
Tandis que les deux femmes partaient, déjà les poignes vigoureuses des sentinelles se refermaient aux bras du sorcier pour le ramener dans son cachot. Quelle curieuse entrevue, tout de même. Mais une gourmande soirée de Noël en perspective dans les bureaux de la Prévôté.
Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
L’étreinte avait cela de magique que, bien qu’étant en soit très simple, elle fut plus salutaire que le plus puissant des remèdes. Encore plus que la « potion de bonne santé » qu’il avait conseillé au roi la veille. Parfois, il n’y avait pas besoin de beaucoup pour être efficace. Hyriel rendit un sourire à ses deux amies, et pas que pour les rassurer elles : aussi parce que lui-même était heureux, en cet instant précis, d’être avec ses deux amies. Bien entendu, il savait, tout comme elles, sans doute, que cela ne durerait pas et qu’on les séparerait, mais tout de même. Toutes les bonnes choses avaient une fin, de toute manière, et mieux valait chérir des souvenirs joyeux comme celui-ci, et s’y raccrocher, que courir après eux alors qu’ils s’éloignaient. Il profita donc de tout cœur, autant pour lui que pour elles, avant de s’écarter.
Il écouta avec intérêt les descriptions culinaires de Kalisha et sourit de nouveau à sa proposition. Quand tout serait fini. L’avenir donnerait sans doute raison à ses espoirs. La blague ensuite l’étonna. Il la comprit, bien sûr, mais pensa tout d’abord que c’était le hasard. Toutefois, son sourire, sa métaphore, la réaction de Florentyna… non, ce n’en était pas un. Hyriel laissa échapper quelques soubresauts de rire.
« Avec plaisir ! »
Il prêta ensuite serment devant sa reine très respectée et ne put s’empêcher de sourire, lui aussi, en la voyant se mordre les joues. Ajouté à la bonne humeur déjà présente, il n’en fallut pas non plus longtemps à Hyriel pour se laisser aller à de nouveaux soubresauts d’hilarité. Et Florentyna les rejoignit. Qui aurait cru qu’une visite à un prisonnier serait si amusante ? Toutefois, Hyriel se doutait bien qu’il n’y avait pas que cet amusement était d’autant plus grand que les derniers jours étaient tendus, pour eux trois. Mais il chassa cette pensée quelques instants, pour qu’elle n’obscurcisse pas ce moment de rires et de regards partagés entre amis.
Il fallut toutefois reprendre son sérieux quand la clef tourna dans la serrure. Pourtant, le rire continuait de taper dans la poitrine d’Hyriel et il ne put le maintenir dans laisser un léger sourire sur son visage, bien qu’il se mordît l’intérieur des joues et des lèvres. Bien évidemment, les gardes s’inquiétèrent et la pensée que ses amies puissent avoir des ennuis d’envoûtement à cause de cela le fit déchanter. Il laissa Florentyna répondre et ne rajouta rien. Hors de question qu’il se prenne une claque devant elles, ni qu’il les mette dans l’embarras. Il ne put toutefois retenir une grimace de tristesse quand le garde les invita à sortir mais se recomposa un masque neutre. Au salut de Florentyna, il s’autorisa toutefois un léger sourire, qui pourrait passer pour une expression calme, afin de la rassurer.
« Je ne doute pas qu’elle le soit. Je vous salue également toutes les deux, Mesdames. »
Il adressa un signe te tête de même à Kalisha pour la rassurer avant de soupirer pour accueillir les gardes. Il profita du départ de ses amies pour reprendre ses grimaces de douleur, aussi naturelles que feintes, qu’il avait pu contenir devant elles par la joie de les voir.
Et il se laissa ramener dans sa cellule, redevenant le démon condamné au bûcher, même si le mal de ses jambes l’emporterait peut-être avant…
Hyriel Radgery- Sorcier, herboriste, écrivain public ~ Pharmakós de service
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Re: [24 décembre 1597, après-midi] Oranges et parfum pour le guérisseur [Terminé]
Kalisha riait à en avoir mal aux joues et aux côtes, si bien que ses yeux se remirent à perler. Il lui suffisait d’entendre ses deux amis rire pour que ses soubresauts reprennent de plus belle comme un feu attisé par un vigoureux coup de soufflet.
Et il y eut ce cliquetis dans la serrure. Et ce grincement sinistre qui étouffa subitement toute joie. Les gardes. Les gardes entraient. Qu’allaient-ils penser en découvrant ce spectacle. Elle croisa le regard de Florentyna alors qu’ils approchaient d’un claquement de bottes. Qu’allait-elle dire ? Il ne faudrait pas que l’on croie qu’elles fussent de nouveau envoutées par le terrible sorcier des bois. Elle se redressa pour le faire face et réalisa à leurs œillades circonspectes que tout son maquillage avait dû couler. Quel piètre spectacle elle devait donner ! Elle chercha rapidement son mouchoir dans sa poche et essuya ses joues en rougissant telle une enfant prise en faute.
Les questions fusèrent et Kalisha était bien incapable de répondre. L’hilarité venait de faire place à une profonde nervosité. Il fallait absolument qu’elle prenne la parole à son tour pour les rassurer quant à son état. Elle se concentra donc pour afficher un visage de circonstance et entrelaça pieusement ses doigts.
— Je vous remercie pour votre sollicitude Messieurs, dont le Seigneur ne manquera pas de vous rendre grâce j’en suis certaine. Je m’excuse de vous avoir inquiété de la sorte, simplement, devant le refus spontané du prisonnier à vouloir se repentir, j’ai soudainement trouvé cela fort ridicule de m’être emportée de la sorte à son arrestation, si bien que j’en ai ri de moi-même. elle releva la tête Or, vous savez combien cela peut-être contagieux parfois.
Il était l’heure de faire des adieux et la Comtesse se contenta d’un bref regard appuyé accompagné d’un discret signe de la tête pour lui rappeler leur accord. Il ne pouvait pas périr sur le bucher. C’était impossible. Alors, elle ressortit confiante de cette cellule. Quoi que l’avenir leur réserve, Hyriel vivrait, elle voulait y croire avec tout l’optimisme dont son roi pouvait faire preuve.
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