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[10-18 février] À l'ombre, une jeune fille en fleur

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Message par Le Cent-Visages Sam 29 Jan - 16:17

[10-18 février] À l'ombre, une jeune fille en fleur Agent_10

Agents du guet royal

Ils arrivaient au sous-sol, celui des cellules. Le trousseau cliquetait à la ceinture du geôlier, dont les grandes enjambées ralentissaient régulièrement pour ne pas distancier la jeune prisonnière qui le suivait. Deux autres gardes l'entouraient de toute façon. Apparemment, cette gamine s'était déjà illustrée quelques temps plus tôt - assez en tout cas pour que le Premier Conseiller en personne ordonne à la prévôté d'envoyer un courrier de mise en demeure à la propriétaire de l'esclave.
Ils avaient bien en tête les consignes données par le vicomte de Fromart - dont Cassandre ne saurait rien. Il ouvrit la porte et la poussa sans un mot dans l'étroite cellule. Étroite certes, mais au moins elle y était seule : mettre une gosse - surtout une fille - avec d'autres malfrats et des rudes gaillards ne serait pas l'idée du siècle. La porte se referma dans son dos.
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Message par Cassandre Velasquez Sam 29 Jan - 18:09

La porte de la cellule venait de se refermer.

En pénétrant calmement dans la petite pièce, Cassandre s'installa en tailleur,  le dos détaché du mur, et conserva une attitude calme et digne. Son visage ne montrait aucun signe d’insolence ou de dureté, mais il ne renvoyait pas non plus une image de faiblesse.

Les murs grisâtres et humides n’avaient pas changé en trois ans. Pas plus que les dalles glacées. A cette époque, elle était entrée sans comprendre, portée par un garde, bien trop faible pour marcher seule. Elle ne se rappelait que de manière brumeuse son arrivée à la prévôté. Lorsque ce soldat avait saisi son bras au moment où la fillette affamée dérobait la pomme interdite, elle s’était figée et avait perdu connaissance dans les minutes qui avaient suivies. Plusieurs heures s’étaient écoulées sans lui apporter le moindre indice. De toute manière, elle avait alors bien trop faim pour être en état de raisonner. Elle était restée étendue au sol, incapable du moindre mouvement. Seule l’arrivée d’un homme pour déposer une écuelle l’avait réanimé à la vie. Elle était cependant restée interdite devant cet apport mystérieux de nourriture et y avait touché timidement, semblable à un animal craintif.

Aujourd’hui, ce n’était pas pareil.

Elle se trouvait à nouveau dans cette cellule de sa seule faute. Par la faute de ses propres actions. Ce n'était pas non plus comme pour Hyriel ou Louise qui avaient été arrêtés alors qu'ils s'efforçaient pourtant de bien agir et d'aider les gens.  En réalité, elle partageait bien plus le sort de son père. Pendant toutes ces années, Cassandre s'était aigrie contre la justice et le créancier qui lui avait dérobé sa famille. Elle s'emportait même contre ceux qui avaient racheté leur ferme et jalousait les petits enfants qui jouaient dans la cour où elle s'amusait autrefois à leur place. Sylvère lui avait permis de comprendre que ce n'était pas juste comme manière de penser. Son père avait emprunté de l'argent : il devait le rembourser. Sinon, c'était du vol. Le créancier n'avait pas été gentil de la chasser, ça, c'était vrai, mais elle ne pouvait pas en faire un démon non plus. En pensant de cette manière, on finissait par ressembler à oncle Matthieu et à détester tout le monde.  Or depuis la nuit de la naissance des jumeaux, Cassandre s'était résolue à abandonner la colère et l'intransigeance. Elle ne souhaitait pas devenir aussi intolérante qu'avait pu être l'oncle Matthieu.

"Même à toi, Achille, je te pardonne. Puis, tu es mort maintenant.

Sa famille avait disparu dans un bête accident de vie. C'était ainsi. Comme de nombreuses autres familles disparaissaient lors des famines ou des épidémies. Elle n'était pas visée personnellement. C'était uniquement la faute à un manque de chance. Achille avait plus que mal agi, mais cela ne lui servira à rien de continuer à le blâmer. Il avait sûrement beaucoup souffert depuis. Avec la paresse qui le caractérisait, son frère avait dû regretter sa fugue dès les premières semaines.

Son regard impassible se releva pour fixer le mur sombre face à elle.

Combien de temps allait-elle attendre ? Personne ne pourrait le dire. La prévôté fixait ses règles en fonction de ses priorités du moment. Cela ne servirait à rien de s’impatienter. Au contraire, les soldats en déduiraient des informations peu flatteuses et elle aurait bien plus d’ennuis. Son délit n’était pas si grave. La prévôté avait sûrement d’autres cas à gérer plus délicats qu’une gamine ayant simplement insulté une noble. Des vols, des trafics, des meurtres, les propos hérétiques... Les affaires sordides ou complexes ne manquaient pas. Ils viendraient la chercher pour la mener au pilori lorsque la situation le permettrait. D’ici là, cela se révélait logique de la retirer tout de suite à Irène et de l’isoler. Ce serait envoyer un mauvais message que de permettre à un délinquant de continuer à vivre normalement. Ce ne serait pas juste non plus pour ceux qui étaient immédiatement arrêtés dès l’instant même de leur infraction.

Irène…

Irène devait être dans un tel état par sa faute.

Ne pense pas à ça !"

Elle ne devait pas y penser.
Elle ne devait sûrement pas y penser.
Dans une telle solitude, de telles pensées la tourmenteraient et menaceraient de la rendre folle. Son esprit préféra se tourner vers les maigres souvenirs qui lui restaient de sa rencontre tumultueuse avec Bérénice. A ce moment où elle avait été insolente et provocante. Puis…Cassandre se rappela avec douleur que celle-ci lui avait dit qu’il n’était normal que personne ne veuille la croire car elle n’était qu’une gamine mal élevée.

Elle n’était qu’une gamine mal élevée.

“Tu n’es qu’une gamine et une esclave.”

La voix glaciale de l’oncle Matthieu résonnait en même temps que les paroles de Bérénice. Elle avait été si en colère qu’il la traite aussi mal et l’insulte. Elle s’était sentie si blessée. Mais elle… Elle blessait aussi les autres. Est-ce qu’elle avait blessé à ce point l’oncle Matthieu pour qu’il lâche cette phrase ? Cassandre ne voulait pas être une gamine. Elle voulait au contraire que les adultes puissent l’entendre et acceptent de l’écouter. Néanmoins, pour qu'ils aient envie de l('écouter, elle ne devait pas donner l'impression d'essayer d'avoir toujours raison.

"T'as toujours raison, Cassandre, surtout quand t'as tort."

Combien de fois avait-elle agacé Nico pour que celui-ci lui dise ces paroles si sévèrement ? Elle ne s'était jamais rendu compte d'avoir pu le blesser un jour. Comme elle n'imaginait que c'était si gênant de faire ces allusions sur les couples. Sylvère, Kalisha, Guillaume, Béryl... Les avait-elle réellement embêté avec ses paroles ? En y repensant, la fillette se rappela de l'embarras de son grand frère ou des visages agacés que Kalisha pouvait parfois avoir. Cassandre baissa la tête, honteuse. Quand elle recouvrerait la liberté, elle irait s'excuser pour son comportement et promettrait de ne plus recommencer.

Cassandre releva la tête pour fixer à nouveau le mur de ce même regard impassable.

J'ai besoin d'aide pour apprendre à avoir de meilleures manières.

C'était si étrange cette idée à demander de l'aider elle qui s'était si longuement évertuée à se débrouiller seule. Pendant toutes ces années, cela avait été même sa fierté. Elle atteignait aujourd'hui sa limite. Elle ne pouvait plus évoluer seule. Si elle continuait telle qu'elle était, elle resterait une gamine. Or, elle ne voulait plus être considérée comme une gamine. Elle voulait que les adultes l'écoutent et considèrent ses opinions. Comme quand elle avait parlé l’autre jour avec Coldris. Ou même quand elle avait réussi à s’excuser à Alexandre pour ses farces stupides. Ou quand elle apprenait à Ingrid comment parler en monbrinien. Peu à peu, son fil de réflexion l'amena à cette douloureuse conversation avec Irène. Cassandre se figea et baissa la tête.

Est-ce que j'ai encore dit de mauvaises paroles ?

Depuis une semaine, elle avait repassé plusieurs fois cette discussion, mais la fillette n'arrivait pas à saisir ce qui s'était passé. Où s'était mal comportée ? Qu'avait-elle pu dire de mal ? Suite à cette proposition faite par Coldris et ses réflexions sur le sujet, elle souhaitait discuter avec Irène de ce projet d’apprentissage et tentait d’être le plus honnête que possible en lui montrant qu’elle lui accordait sa confiance. Depuis son arrivée à la Rosa Azul, Irène lui répétait qu'elle pouvait venir lui parler de n'importe quoi. Où ça avait dérapé alors ? Et pourquoi Irène lui avait-elle dit avoir vu à dix ans plus de choses qu’elle ? Ce n’était pas de ça qu’elle voulait lui parler. Elle ne voulait pas non plus douter des intentions de Coldris. Elle ne voulait parler que du projet d’apprentissage, de l’avenir… Est-ce qu’Irène avait pu être jalouse ? Jalouse de quoi ? Non, c’était une mauvaise déduction, ça. Elle était sûrement plus inquiète vis-à-vis de Coldris. Il possédait sa réputation. Mais pourquoi Irène ne lui avait pas fait confiance à elle ? Est-ce qu’elle avait montré être le genre de personne qui prenait une décision à la légère ? Dans tout ce qu’elle entreprenait, elle planifiait tout et s’efforçait de trouver un minimum de garanties et de certitudes.

Irène... Elle ne me fait pas confiance.

Cassandre ressentit une pointe de tristesse, mais sans colère en établissant cette déduction douloureuse. La phrase lui faisait beaucoup plus mal que de se savoir enfermée dans une cellule ou d’être liée au pilori. Irène lui avait répété pendant des mois de lui faire confiance, mais quand elle s’était décidée à s’ouvrir à elle de ses projets, celle-ci ne lui avait pas accordé sa confiance. Elle avait jugé l'affaire en entendant uniquement le nom de Coldris, sans chercher à comprendre ses sentiments. Sans chercher à comprendre sa motivation à elle.

Irène...

La gorge de Cassandre se serra.

Qu'est-ce que je vais faire maintenant, moi ?

Cassandre fixait avec impassibilité le mur sombre devant elle. L’avenir devenait incertain et le retour à la Rosa Azul serait difficile. Finalement, cette période de réclusion n’était pas une si mauvaise chose. Au moins, pendant quelques jours, elle soufflerait.

On affronte une épreuve à la fois.
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Message par Le Cent-Visages Jeu 3 Fév - 14:47

[10-18 février] À l'ombre, une jeune fille en fleur Agent_10

Agents du guet royal

10 février ~ le soir

La nuit jetait son dais sur la ville. L'ombre portée des barreaux quadrillait la cellule et le visage de la jeune prisonnière. Quand la porte s'ouvrir après un claquement sec, le geôlier la découvrit tranquille. Profondément pensive. Bien, elle ne ferait pas d'histoire. Sa silhouette ventrue et ses pas lourds avancèrent. Il déposa à sa gauche l'écuelle pleine d'un épais brouet de légumes, une tranche de pain et une cruche d'eau. Demain, un collègue passerait changer le pot à pisser. Après un bref regard au visage de la gosse, il ressortit.
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Message par Cassandre Velasquez Jeu 3 Fév - 23:05

Une journée entière venait de s'écouler et le soir tombait.

Pendant toutes ces heures, Cassandre resta installée en tailleur, sans bouger, pas même pour dégourdir ses membres. Elle devait montrer qu'elle savait calme et garder le contrôle de ses émotions. Autrement, si elle manifestait quelques signes d'impatience, ils pourraient faire des déductions embarrassantes à son sujet. Or, elle avait suffisamment d'ennuis pour s'en rajouter inutilement. Afin de passer le temps, elle se perdit dans les souvenirs d'autrefois, dans ceux heureux avec sa famille, de sa vie à la campagne. La fillette se rappelait de ses jeux insouciants avec les autres enfants du village. A son étonnement, il lui revint que ses amis étaient toujours plus âgés. Jamais d'autres enfants de son âge. Encore moins des plus jeunes. Elle se remémora passer en réalité bien plus de temps à essayer de passer du temps avec les adultes et à tenter de comprendre leur monde. Mais eux voulaient rarement d'elle. sauf son père. Est-ce qu'ils pensaient qu'elle se comportait mal ? Avait-elle déjà de mauvaises manières ? Avait-elle été insolente ? Pourtant, Agathe l'éduquait et lui apprenait les règles de la politesse. Mais ça l'empêchait pas non plus de faire des bêtises. Elle aimait aussi jouer beaucoup de tours. Non, elle n'était pas sage du tout.

"Agathe... J'ai été si méchante avec toi."

Agathe n'avait pas eu du tout de chance. Elle n'aurait jamais dû se retrouver à élever une enfant aussi difficile aussi jeune. Tout ça parce que leur mère était décédée. Mais c'était réellement le rôle de sa grande sœur de reprendre celui de leur mère ? Elle n'avait que seize ans. Est-ce qu'on était réellement adulte à seize ans ? Quoique.. Peut-être. Beaucoup entraient en apprentissage entre quatorze et seize ans. Si on était assez âgé pour travailler, l'était-on également pour élever un enfant ? Cassandre n'arrivait pas le savoir.

"Mais si j'étais méchante, moi, c'était rien à côté de l'autre."

Pourquoi se montrait-elle encore si rancunière envers Achille ? Elle s'était promise de lui pardonner. Sa tête se coupa; Non, elle n'y arrivait pas. La faute de son frère était bien trop grande. Bien plus que sa simple paresse. S'enfuir de sa famille, c'était une chose, mais dérober une majeure partie de ses économies, c'était... Ce n'était pas pardonnable. C'était du vol et de la trahison. Si son cas passait en justice, il serait certainement pendu. Personne ne saurait défendre un garçon qui avait dépouillé les siens et les avait conduit à la ruine.

"Non, Achille, je ne peux pas te pardonner finalement. Je suis désolée."

Soudain, la porte de la cellule s'ouvrit et al sortit de ses pensées. Cassandre observa le garde qui lui apportait le repas. Elle le laissa venir en réfléchissant à la bonne parole à dire. la fillette murmura ensuite d'une voix toute polie !

"Bonsoir, monsieur."

Elle lui sourit quand il déposa le plateau.

"Merci beaucoup. Bonne soirée à vous."

Cassandre l'observa repartir, incertaine de savoir ce qu'il avait pu penser de ses interventions. Pensait-il qu'elle cherchait à manipuler peut-être ? Ou à bien se faire voir ? ce serait probable. Elle baissa la tête pour fixer le contenu du plateau mais n'eut pas de faim. Son esprit songeait à ce qu'Eléonore avait pu lui apprendre. Les gardes avaient tous des familles à nourrir et ses mauvais tours avaient pu leur attirer des ennuis. des renvois peut-être. Son ventre était noué. Elle n'avait pas faim. Sa conscience la tiraillait trop.

Désireuse de se libérer de ce poids, Cassandre se leva et marcha lentement vers la porte. Elle s'adossa contre le panneau de bois et frappa doucement du poing dessus. La fillette attendit un instant et une murmura :

"Je... Je suis désolée. Vous ne pouvez pas vous souvenir, mais il y a quelques années, quand je vivais dans les rues, avec des copains, je m'amusais à vous jouer des tours. Je pensais que c'était drôle. Je suis désolée. Et je suis désolée si j'ai pu vous attirer des ennuis."

Cassandre resta quelques instants dans cette position, silencieuse, et savoura la libération qui l'envahit d'avoir su présenter ses excuses. Elle retourna ensuite s'asseoir et commença à manger. sa main tartina du brouet sur sa tartine de pain afin de mieux arranger le goût. Ce n'était pas fameux, mais c'était malgré tout bon quand même. Il y avait bien pire. Elle but ensuite quelques gorgées d'eau.

Après ce souper, une cloche sonna et indiqua dix-neuf heures. Cassandre hésita, puis se décida à se coucher. Si demain, elle partait au pilori, c'était plus sage de prendre des forces et d'être bien reposée. La fillette s'allongea ainsi dans un recoin de la pièce et s'enroula sur elle-même pour se tenir chaud. Quelques instants plus, elle dormait.
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Message par Le Cent-Visages Mar 8 Fév - 19:45

[10-18 février] À l'ombre, une jeune fille en fleur Agent_10

Agents du guet royal

C’était assez rare, les détenus polis quand on leur apportait à manger. La plupart ne disaient rien, trop inquiets de leur sort. Bon, le geôlier jugea donc plutôt rassurant d’entendre la gosse faire ces remerciements : elle n’avait pas grand-chose d’une criminelle. Sûrement juste une ânerie typique de son âge. Et la chance d’avoir eu des supérieurs assez charitables pour ne la condamner qu’au pilori alors qu’elle était esclave. S’efforçant de conserver sa neutralité professionnelle, il se retira sans un mot.
Plus tard, le vigile à la porte fut surpris par la petite voix de la prisonnière. Des farces aux gardes ? Il haussa un sourcil : bah, ça ne devait pas être lui, il s’en souviendrait. Probablement des collègues. Il fallait bien avouer qu’ils affrontaient tous les jours des affrontements beaucoup plus graves que les effronteries d’une bande de mioches, mais enfin, c’était quant même charmant de sa part. Le portier répondit de trois petits coups sympathiques de sa lance contre la paroi, comme un « bien reçu ».

11 février ~ matinée

L’équipe avait changé, des collègues avaient pris la relève et ceux-ci étaient de bien moins bonne composition que ceux de la veille. Et pour couronner le tout, ils devaient honorer un ordre franchement bizarre reçu de la part du ministre de la guerre : changer régulièrement la mioche de cellule. Mais quelle idée. Et comme s’ils n’avaient que ça à foutre.

En plus, cette fois-ci ils n’avaient pas la possibilité d’au moins compenser leur tâche chiante comme la pluie… par un peu de jeux sur une catin ou un jeune béquilleux. Ou sur un sorcier éclopé à faire ramper, comme ils avaient pu le faire en décembre. Il n’y avait même plus de loukoums.

Non, les incarcérations de ces semaines-ci étaient infiniment plus mornes.
Ce fut donc sur la gamine dans sa petite cellule que tomba leur frustrations quand les deux bourrus enterrèrent. L’un d’eux resta à la porte qu’il avait fait claquer. L’autre saisit brusquement le bras de l’esclave pour la faire presser :

— Debout, magne-toi.

Et sans la lâcher, il la sortit de la geôle pour l’entraîner dans l’étroit corridor éclairé à la torche. Bon, où la flanquer à présent ? Il était marrant, le Fromart, mais c’était déjà tout une logistique si complexe que de caser tous ces détenus, en évitant de mettre certains ensemble pour des raisons évidentes ! Oh, et puis merde. Le geôlier finit par envoyer Cassandre dans un geôle assez proche, et tant pis s’il y avait d’autres tôlards dedans. Un ivrogne, deux voleurs. À moitié dans le cirage. Heureusement, ils étaient tous les trois bien ferrés à leur mur. Si la gamine n’approchait pas d’eux et restait dans son petit coin, tout devrait bien se passer.
Le bourru la lâcha toujours avec autant de rudesse et les deux molosses vidèrent les lieux. Dans un sec claquement, la porte fut refermée et verrouillée.
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Message par Cassandre Velasquez Mer 9 Fév - 14:53

Cassandre dormait profondément lorsque la porte de la cellule grinça et que deux soldats se présentèrent pour la tirer du sommeil. De manière plus que brutale. L'un d'eux la tira par le bras et la fillette se retint péniblement de répliquer. Son esprit se concentra sur sa capacité à rester aimable. Elle se leva et leur adressant un sourire poli en déclarant :

"Bonjour, messieurs."

Tout en les suivant dans le couloir, elle comprit que le moment était venu. Ils venaient l’emmener au pilori. Le supplice commencerait bientôt. Elle s'étonna cependant de ne pas les voir emprunter les escaliers. Ils manifestaient même beaucoup d'agacement. Elle résolut de ne pas poser de questions et d’attendre en silence. Les réponses viendraient bientôt. Peut-être allait-elle passer un jugement ? Même si tout avait déjà été décidé par Coldris, Légalement, la procédure impliquait peut-être de passer devant une cour du justice. C’était ridicule et de la perte de temps. Mais bon, si cela pouvait leur faire plaisir. Elle avouerait les faits, s’excuserait et avouer regretter. Cela ne changerait rien au châtiment. Tout était été déjà planifié.

Ils s’arrêtèrent au beau milieu du couloir et l’un des gardes , toujours excédé, ouvrit une cellule. Cassandre comprit à cet instant les raisons du détour : ils venaient chercher une autre personne condamnée le même jour. C’était évidemment bien plus logique de les emmener tous en même temps que de retourner les chercher un à un. La fillette attendit que le détenu sorte et entendit le soldat le plus proche d’elle la pousse violemment à l'intérieur.  La porte se referma derrière elle et la clé tourna dans la sserrure. Elle était à nouveau enfermée.

“Pourquoi ?”

Contrairement à l'autre cellule, elle ne se trouvait pas seule. Trois individus peu fréquentables étaient attachés au mur. Sa prudence lui souffla de ne surtout pas approcher. Les adultes enfermés à la prévôté se révélaient rarement de bonnes personnes. Elle continua à réfléchir aux raisons de ce changement inexplicable. La question tournait dans son esprit sans parvenir à trouver la moindre réponse. Pourquoi la changer de cellule ? La nouvelle ne présentait aucune différence avec la précédente. Normalement, ils auraient dû la sortir pour la mener au pilori. Pourquoi la déplacer ? Cassandre marcha lentement jusqu’au soupirail tout en méditant à l’interrogation. Elle se hissa sur la pointe des pieds et contempla la Grande Place quasiment déserte. Il n’y aurait aucune application d’une peine judiciaire aujourd’hui, c’était certain. Elle resterait là pour une journée encore. Cassandre soupira et se laissa tomber le long du mur pour s’asseoir sur les dalles glacées.

“Combien de temps je vais attendre ?”

Lasse, la fillette cogna légèrement sa tête contre le mur. Elle ne savait pas quoi penser. Ses yeux se fermèrent. L’ennui commençait déjà à s’installer. Ce n’était pourtant que le début. Elle avait toute une journée à supporter. Seule. Sans personne avec qui discuter. Sans aucune activité pour occuper ses mains ou son esprit. Si seulement elle avait pu emmener un mouchoir ou une serviette à broder… Et si elle demandait aux gardes de recoudre leurs vêtements ? La fillette secoua la tête. Ce serait idiot. Elle n’allait quand même pas devenir aussi servile que cet imbécile d’Alexandre ! Alexandre… Alexandre, lui, il nettoyait les latrines depuis deux semaines. En comparaison, c’était mieux l’enfermement. L’idée de passer des heures les mains dans la merde, très peu pour elle ! Cela lui arrivait autrefois de nettoyer les gerbes que les clients laissaient au lupanar. C’était absolument répugnant. Enfin, le pire, ça restait quand certains s'oubliaient et pissaient ou défèquaient à même le sol. Ce n’était même pas si rare que cela. Et souvent, en plus, c’étaient des stupides curés qui venaient rompre leurs vœux et perdre toute bonne éducation.

En pensant au lupanar, son esprit songea immédiatement à Louise. Aujourd’hui, c’était son jour de repos. Elle aurait dû la visiter avec un panier de victuailles et elle aurait profité pour raconter sa semaine tout lui demandant de lui expliquer certains mots de sa lecture de Gargantua. pour beaucoup, elle n’aurait pas su. Cassandre les gardait d’ailleurs consigné dans un carnet et attendait de revoir Coldris pour l’interroger à ce sujet. Son cœur se serra à cette pensée. Elle ne pourrait sûrement plus s'entretenir avec lui de littérature. C’était déjà un miracle qu’il ne lui ait pas réclamé le livre. C’était Nico qui le détenait, comme l’ouvrage que lui avait offert Kalisha, sa dague et quelques autres affaires. Par prudence, la fillette avait confié ses affaires à son ami au cas où la prévôté décide de la retirer à Irène. Après ses actes, ce ne serait pas impossible. Et il y avait eu ce courrier d’avertissement du Premier Conseiller. Non, c’était loin d’être impossible.

Cassandre se sentait gelée à cette éventualité de changer de propriétaire. En passant par la prévôté, cela signifiait de retourner sur l’estrade. De sentir à nouveau tous ces regards hautains sur sa personne, de les entendre négocier un prix. De se faire examiner dans l’espoir de déceler un défaut. Sa poitrine la brûla au fil que ses souvenirs remontèrent à sa mémoire. Elle suffoquait.

Passée la crise de panique, Cassandre gisait au sol, les yeux grands ouverts à fixer le plafond sinistre. Sa respiration sifflait encore un peu. Des larmes embuaient les yeux et ruisselaient sur son visage.

“Ne pense pas à ça.”

Elle devait songer à une chose agréable. Comme Sylvère ferait.

“Pense de manière positive. Pense positivement.”

Mais son esprit n’y arrivait pas. Elle ne voyait que les ténèbres. Comme lorsqu’elle avait rencontré Bérénice. Les ténèbres.. Les ténèbres essayaient encore de l’emporter.Elle serra les poings. Elle ne devait pas céder. Nico… Nico !

“Nico… Montre-moi le monde de tes yeux.”

Cassandre ferma les yeux et imagina son ami courir dans les rues pour offrir en riant doucement quelques pièces aux mendiants qu’il rencontrait en chemin. Il aiderait ensuite une personne âgée qui avait du mal à faire ses courses et lui porterait jusqu’à son domicile. Le garçon repartirait ensuite en sifflotant vers la forêt pour préparer le souper et accueillerait l’hôte de Sylvère à son retour du travail. ils mangeraient joyeusement ensemble et plaisanteraient, puis ils se coucheraient, prêts à recommencer une belle journée le lendemain. La fillette ouvrit à nouveau les yeux, lentement, et se sentit apaisée. Elle se redressa et sourit doucement.

“Merci, Nico.”

Lentement, Cassandre s’adossa contre le mur de la cellule et réfléchit à une activité susceptible d’occuper son esprit. Mais quoi ? Elle ne possédait rien. Quoique… Dans les rues, elle retenait à l’abri les jeunes enfants en leur racontant des histoires.

“Est-ce que je peux me raconter une histoire ? Quelle histoire ?”

Il n’y avait qu’une histoire en ce moment qui l'intéressait, c’était celle dont elle lisait un chapitre chaque jour depuis que Coldris lui avait prêté son beau livre. Elle en avait actuellement lu quinze et ses capacités de lecture s’amélioraient un petit peu. C’était assez minutes et la fillette devait encore prendre le temps de déchiffre chaque syllabe avant de pouvoir lire la phrase dans sa globalité, mais elle sentait que peu à peu cela devenait un peu plus naturel. Cassandre se souvenait du tout dernier chapitre lu, lorsque GrandGousier décidait d’envoyer son fils Gargantua à Paris pour y poursuivre ses études et découvrir comment les jeunes gens de ce pays se formaient. Elle avait si hâte de connaître la suite et les choses qu’apprendraient Gargantua. Sa mémoire se rappela une phrase du texte. L’un des personnages mentionnait que le garçon avait douze ans. C’était ce qui décidait le voyage. Elle, elle en avait treize ans. Elle avait besoin aussi d’éducation. De posséder de bonnes manières. Et puis, elle souhaitait pouvoir lire encore plus de livres. Et puis, apprendre le latin aussi afin de savoir ce que les curés disaient vraiment et ce qui était écrit dans la Bible. Elle brûlait d’apprendre.

Le texte lui revenait à la mémoire. A force de le répéter pour le déchiffrer, les phrases étaient entrées dans son esprit. Elle n’avait de toute manière jamais eu à forcer pour retenir des informations. Autrefois, Agathe s’étonnait de la voir retenir si facilement ses prières, rien qu’en les entendant une ou deux fois. Elle affirmait que ce n’était pas normal, que les enfants mettaient bien plus de temps à retenir leurs prières et leurs psaumes. Cassandre n’avait jamais su quoi penser.  Pour elle, c’était seulement naturel, comme de respirer ou de marcher. Au village, les autres enfants la trouvaient parfois étranges eux aussi à pouvoir se remémorer avec précision des événements qui leur semblaient à eux flous et qui remontaient à une année, voire deux. La fillette haussa les épaules. C’était comme ça. Et puis, avoir une aussi bonne mémoire, cela rendait bien des services, surtout quand elle savait ni lire ni écrire. Au milieu de ses pensées, une idée lui vint.

“Et si.. ?”

Elle hésita, le regard tourné vers la porte de la cellule. Ses compagnons, eux, semblaient pour leur part trop lointains pour y prêter attention.

“Ce n’est pas interdit de réciter.... Oh puis tant pis !”

Cassandre ferma un instant les yeux, puis récita d’une petite voix hésitante.

“Amis lecteurs, qui ce livre lisez,
Despouillez vous de toute affection;
Et, le lisant, ne vous scandalisez “


Après la troisième phrase, sa voix devint plus naturelle et enchaina plus fluidement sa récitation.

“Il ne contient mal ne infection.
Vray est qu'icy peu de perfection
Vous apprendrez, si non en cas de rire;
Aultre argument ne peut mon cueur elire,
Voyant le dueil qui vous mine et consomme :
Mieulx est de ris que de larmes escripre,
Pour ce que rire est le propre de l'homme.”


Cassandre sourit, grisée d’avoir su réciter si facilement tout le texte de l'introduction. C’était même amusant. Stimulée par le défi, la fillette consacra sa journée à énoncer une à une les phrases du récit. Elle en était au milieu du neuvième chapitre lorsque la porte s’ouvrit et qu’un garde entra pour lui apporter le repas.

Relevant la tête Cassandre lui sourit poliment en s’amusant intérieurement de sa surprise de l’avoir entendu déclamer et le salua. Il déposa le plateau et elle l’en remercia, comme elle l’avait fait la veille avec son collègue. Tout en commençant à manger, la fillette l'observa distribuer les rations aux autres prisonniers. Peu après son départ, elle se décida à se coucher. Si demain elle partait au pilori, elle aurait besoin de forces.

***

12 Février 1598


Les rayons timides du soleil qui passaient au travers du soupirail réveillèrent Cassandre. Elle se redressa en s’étirant avant de se relever pour observer l’extérieur. La position de l’astre indiquait neuf heures. Sur la Grande Place, aucune installation n’avait été déployée. Ce ne serait pas non plus aujourd’hui le pilori. La fillette alla s’asseoir au milieu de la cellule, sans tenir compte des gémissements de l'ivrogne qui chuintait encore,  et décida de retourner à ses exercices de récitations. Cette fois, elle s’appliqua à dire plusieurs fois le premier chapitre en variant les intonations.

Dans l’après-midi, la porte s’ouvrit et les soldats lui demandèrent de la suivre. Cassandre le fixa avec étonnement tout en dissimulant son émotion. Ce n’était pas une heure pour être menée au pilori. A moins que le supplice ne débute en début de soirée afin de lui faire passer la nuit dans des conditions difficiles ? Ce ne serait pas si improbable. Elle marcha en silence derrière les gardes et ceux-ci s’arrêtèrent devant une cellule après avoir remonté un couloir. L’un d’eux ouvrit et l’autre lui ordonna d’entrer. Encore ? Cassandre ne contesta pas et obéit. La porte se referma aussitôt derrière elle et la clé tourna dans la cellule. Au moins, cette fois, elle était seule. Pas de chuintement pénibles pour l'agacer.

Tout en marchant dans la petite pièce, Cassandre médita à l’absence de logique de ce traitement. Pourquoi la changeait-on chaque jour de cellule ? Qu’attendait-on pour la mener au pilori ? Elle comprenait que la prévôté soit venue la chercher même si le supplice n’était pas encore prêt. Ce n’était pas juste envers d’autres personnes arrêtées au moment de leur délit de rester à la maison, à jouir d’une liberté insolente. Néanmoins, ces changements de cellules restaient mystérieux. Qui avait pu les décider ? Le commandant de la prévôté ? Non, il préférait assurer l’ordre, pas les irrégularités. Il fallait chercher une personne qui tirerait un avantage de la situation. La réponse ne fut pas longue à lui venir. Quelle personne possédait assez de pouvoir pour influer sur la prévôté et serait désireuse de jouer avec elle ? Cassandre esquissa un léger sourire en dénouant enfin les raisons de ce manque de logique.

“Bien joué, messire. Vous auriez presque failli m’avoir.”

Qu’avait-il en tête avec de tels ordres ? Qu’espérait-il ? Est-ce que le pilori viendrait ? Ou comptait-il la laisser moisir en prison, les journées rythmées par le changement quotidien de cellule ? Quel était son objectif ? Coldris n’agissait pas sans une excellente raison. Ses actions et ses décisions reposaient sur une logique. Une logique toujours intelligente mais souvent subtile. Qu’espérait-il ? La testait-il ? Cherchait-il à éprouver son caractère ? Il la savait manquer de patience, être colérique et ressentir le constant besoin d’avoir une activité. Cherchait-il à la pousser à la faute ? Envisageait-il de la laisser s’impatienter dans l’espoir qu’elle s’énerve et se rebelle contre les gardes de la prévôté ? Un sourire narquois se dessina sur son visage. Coldris voulait jouer ? Parfait !

“Je regrette, messire, mais je ne perdrai pas.”

Sur cette pensée, Cassandre s’installa en tailleur et fixa avec fermeté le mur devant elle.

“Je ne céderai pas à la colère, messire. Et je ne pleurerai pas non plus.”

Ses poings se serrèrent dans les jupons de sa robe, imprégnés de sa résolution.

“Vous ne me briserez pas, messire.”

Dans des conditions à peu près similaires, Louise avait attendu longtemps dans une cellule et avait peu à peu cédé au désespoir. Peu après, Hyriel l’avait rejoint, mais s’était laissé emporter à paraître insolent face à l’oncle Matthieu. Tous les deux avaient perdu ce combat. Pas elle. Non, elle ne désarmerait pas. Elle ne laisserait pas Coldris la vaincre.

“J’ai été insolente envers votre fille, messire, j’en ai conscience, et je mérite d’être punie pour ça, mais en revanche, vous ne me verrai pas faiblir.Je gagnerai. Même si je dois rester ici un mois, je ne faiblirai pas !”

C’était une lutte de volonté entre et Coldris. Ce n’était rien d’autre que cela. Elle lui prouverait que son caractère était aussi fort que le sien. Ne lui avait-il pas dit qu’elle était comme une mauvaise herbe qui repoussait ailleurs, même quand on essayait de l’arracher ? Son sourire narquois s'accentua.

“Non, messire je ne vais pas que repousser. Quand on essaie de m’arracher, je me renforce.”

Durant les dernières heures de l’après-midi, Cassandre demeura tranquille à fixer le mur, imprégnée de sa forte résolution. Lorsque la porte s’ouvrit à l’heure du repas, elle releva la tête pour saluer le garde et le remercier poliment une fois que celui-ci eut déposé le plateau. La fillette mangea ensuite sa tartine avec le brouet de légumes et se coucha.

***

13 Février 1598


Cassandre se réveilla vers neuf heures, tirée du sommeil par la cloche de l’église proche. Elle but une gorgée d’eau pour passer une sensation de bouche pâteuse, puis s’installa en tailleur pour fixer le mur. Le pilori ne viendrait pas aujourd’hui. Ni demain. Peut-être même pas la semaine. Elle se trouvait ici pour expier son mauvais caractère. La fillette entendait bien rester calme tout le long de son enfermement. Peut-être qu’à force Coldris pousserait le vice à inventer d’autres tortures ? Peut-être, demanderait-il aux gardes de la traiter plus durement ? Tant pis pour lui. Elle résisterait et resterait docile. Elle ne s’énerverait pas. Ce n’était pas elle qui perdrait.

Dans l’heure qui précédait l’office de Sexte, les soldats vinrent la chercher et Cassandre se releva avant qu’ils ne lui donnent l’ordre de la suivre. Dans leur attitude, ils se montraient sévères, agacée même. Les consignes du ministrzs commençaient sans doute à les ennuyer. Malgré l'impertinence qui lui venait à l’esprit de leur demander si c’était le prochain déménagement, la fillette se contint et leur emboîta docilement le pas. Elle se retrouva dans une nouvelle cellule, avec un ivrogne et un second homme dont la mine ne lui inspirait aucune confiance. Rien ne changeait dans ce programme. Sauf une chose. Maintenant elle avait compris les règles du jeu.

Pendant le reste de la journée, quand l’ennui commença à se manifester, Cassandre le trompa en invoquant le texte de Gargantua. Elle récita deux chapitres au hasard en les répétant plusieurs fois pour varier les intonations. Le repas vint à l’heure habituelle, puis elle se coucha.

***

15 Février 1598

Le pilori ne viendrait pas.

Cette fois, c’était une certitude. Son enfermement n’était qu’une épreuve de patience et un moyen de corriger son caractère. Elle se trouvait aujourd’hui au début de sa sixième journée de réclusion. Chaque jour se répétait la routine du changement de cellule. Cassandre avait noté que les heures n’étaient jamais les mêmes. Hier, les soldats étaient venus la chercher au début de l’après-midi. Elle avait pitié d’eux que Coldris leur impose de telles conditions. Dans le fond, c’étaient eux qu’il punissait, Pas elle. Elle, elle s’accoutumait assez bien de cette existence. Qu’existait-il de pire que le lupanar, être exposée sur l’estrade du marchand d’esclaves ou la potence ? Elle ne voyait pas. Reposer dans cette cellule, c’était presque des vacances. Et si l’ennui se manifestait, il lui suffisait de réciter des passages de Gargantua.

“Messire, vous vous lasserez avant moi.”

Tout à sa réflexion narquoise, l’esprit de Cassandre s’orienta soudain vers une autre voie. Elle se mit à songer que son épreuve ressemblait un peu au parcours de Zita. Zita… Elle avait oublié cette Sainte et la patronne des servantes. Sa patronne. Zita… Zita, dont l’histoire l’avait soutenu toutes ces années passées au lupanar à subir des conditions difficiles à supporter les remarques vexantes. Zita… Zita avait passé une partie de sa vie blâmée par les autres, moquée par ses patrons, humiliée par des employés… Néanmoins, elle n’en avait jamais perdu sa gentillesse et son désir d’aider ceux qui se trouvaient plus démunis qu’elle. Au point de les ramener dans son lit et de coucher, elle, au sol. C’était par ailleurs la seule histoire de Saint à bien finir. Certes, Zita mourrait à la toute fin, mais après avoir obtenu justice. Ses patrons et son entourage avaient reconnu ses mérites. Elle était morte heureuse, appréciée de tous. Zita…

“Zita… Zita, j’aimerais te ressembler.”

Ses mains se croisèrent automatiquement l’une sur l’autre, retrouvant l’habitude intériorisée depuis des années.

“Zita… Je suis désolée de t’avoir oubliée. J’étais en colère.”

Ce n’était pas de colère. Non, elle débordait de rage pour tout ce qui représentait la religion. Elle avait même haï profondément l’oncle Matthieu pour avoir refusé de comprendre qu’un guérisseur qui soignait des gens, même infirme, ne pouvait être une mauvaise personne. Depuis cette semaine, en y repensant, Cassandre songeait à contrecœur que Hyriel avait quelques torts de son côté. S’il ne se montrait si agressif parfois, les gens l’accepteraient mieux. C’était ce que Sylvère lui avait appris : si on se mettait tout de suite en position de défense, prêt à mordre, l’autre en face se sentait forcée de se mettre lui aussi sur la défensive.

“Avec ce procès, avec cette utilisation qui était faite bêtement de la religion, je me suis mise à détester la religion et tous ces prêtres qui l’utilisent pour manipuler les gens. Je la déteste toujours. Je ne veux plus croire en Dieu. Ni en Jésus. Ni en marie. Ce ne sont que des figures inutiles. Elles ne servent qu’à porter un message pour mieux manipuler les gens. Mais toi, Zita, toi, ton histoire est belle. Et positive. Je... Je veux croire en toi !”

Pendant toutes ces années, Cassandre se rappelait avoir fantasmé sur les récits héroïques des Saints qui acceptaient avec bravoure leur martyre ou les récits des héros mythologiques toujours si dignes. Sauf qu’avec eux, on n’apprenait pas à vivre. On y apprenait à mourir.

“Je veux vivre, Zita. Je veux vivre et être heureuse. Inspire-moi. Aide-moi à devenir une meilleure personne. Inspire-moi pour que je te ressemble.”

Durant le reste de la journée, Cassandre pria avec une ferveur intense et confia à Zita toutes ses craintes et ses espérances. Elle revint sur la manière douloureuse dont le procès de Hyriel et Louise l’avait profondément affectée et de sa colère pour les autorités religieuses et même civiles. Elle parla de son désir suite à cela de refouler sa colère et de cesser d’être trop intransigeante pour ne jamais ressembler à l’oncle Matthieu. Elle évoqua aussi le reproche d’Eldred de prendre les adultes de haut tout en avouant ne pas savoir comment se comporter avec eux. Elle voulait qu’ils puissent l’écouter, qu’ils cessent de la prendre pour une gamine… mais elle n’arrivait pas à déterminer comment se comporter. Elle s’attarda ensuite sur sa relation avec Coldris, de sa découverte à que point la lecture pouvait être enivrante depuis qu’il lui avait prêté Gargantua et exprima à quel point elle regrettait de l’avoir déçu avec cette insolence stupide dont la fillette avait fait preuve avec Bérénice. Bien plus que toutes les opportunités que le ministre aurait pu lui offrir, ce qu’elle regrettait le plus, c’était de ne plus pouvoir discuter avec lui.

“Je veux encore discuter avec Coldris, Zita. Puis, avec Eléonore aussi”

Des larmes perlèrent à cet instant à cette pensée et Cassandre les refoula péniblement. Sa gorge se serra. A cause de cette bêtise, elle avait perdu ses liens avec des gens qu’elle aimait. Des gens qui ne voudraient plus la voir.

“Maintenant, même Eleonore sait à quel point je peux être méchante….”

Et c’était pourtant la dernière qu’elle aurait voulu décevoir. Elle était si douce et si gentille. Cassandre se remémorait d’un sourire triste de leur première rencontre quand celle-ci était alitée ou de la manière dont elle lui avait appris que c’était mal d’embêter les gardes, sans montrer que celle-ci la jugeait, sans paraître la gronder.

Cassandre avait tant consacré sa journée à la prière et à ses réflexions que celle-ci ne vit pas le crépuscule tomber. Au moment du repas, les soldats entrèrent et la tirèrent de la transe dans laquelle elle était tombée. La fillette revint lentement à la réalité et les entendit ordonner de les suivre. Elle obéit docilement et changea une fois encore de cellule. En pénétrant dans la nouvelle cellule, un garde la précéda et déposa son plateau. Cassandre le remercia poliment et s’installa pour manger, puis elle se coucha.

***

17 Février 1598


Deux nouvelles journées venaient de s’écouler et rien n’avait changé. Hier, les soldats étaient venus la chercher dans le milieu de l’après-midi pour la changer de cellule Aujourd’hui, cela avait été une heure après son réveil. La veille, Cassandre avait un peu prié Zita, puis elle s’était occupée en récitant des chapitres de Gargantua. Aujourd’hui, le programme n’avait pas été modifié. C’était un peu frustrant de répéter les mêmes choses, sans apporter la moindre variation, mais il y avait pire. Elle pourrait se trouver au lupanar à frotter quotidiennement le plancher ou à apporter des boissons aux clients toute la nuit. Cela ne servait à rien de s'impatienter. Elle menait une lutte et devait rester calme. Ce ne serait pas Coldris qui l’emporterait pas. Il ne lui ferait pas perdre sa résolution.

Sur ces pensées, peu après avoir consommé son repas, Cassandre se coucha. De nombreuses journées l’attendaient encore avant de quitter définitivement cette cellule. En fermant les yeux, la fillette estima que Coldris ne la laisserait pas repartir avant un minimum d’un mois. Elle tiendrait. Elle résisterait. Il ne l’emporterait pas. Sur cette résolution, Cassandre se laissa emporter par le sommeil.
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Message par Le Cent-Visages Sam 19 Fév - 18:16

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18 février

Si certains gardes trouvaient surprenant et plutôt agréable d'entendre la gamine les saluer, d'autres n'en avaient rien à fiche - voire pensaient que c'était une manière de tenter de les amadouer. Perdu. Ils continuaient à faire leur travail, conformément aux ordres reçus qu'ils estimaient toujours aussi bizarres. Peut-être l'envie de mettre les nerfs de la gosse en pelote ?
Mais vint enfin le jour J et ce serait somme toute une libération pour la petiote qui avait passé là tant de matins incertains. La porte s'ouvrit. Et cette fois-ci, ce ne fut pas dans le couloir des cellules que les gardes trimballèrent Cassandre, mais bien vers celui qui remontait à la surface. Dans l'embrasure de la porte, le soleil reviendrait l'entourer au moment de repasser le seuil, de retrouver les pavés de la rue. Quatre soldats allaient l'entourer pendant sa marche vers la Grand' Place. Tant pour la protéger que pour prévenir toute possible bêtise de sa part.
Bien entendu, des regards de badauds curieux tombèrent sur le petit groupe qui quittait la prévôté et s'engageait dans les venelles. Certains attendris, d'autres simplement intrigués, d'autres encore simplement indifférents et qui continuaient leurs chemins. Après tout, c'était si fréquent de voir des gredins, des gosses des rues et autres chapardeurs aller et venir autour du bâtiment judiciaire.
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Message par Cassandre Velasquez Sam 19 Fév - 19:10

Cassandre se réveilla lentement avec l'aube naissante. Aujourd'hui serait une journée habituelle, rythmée par la visite quotidienne pour la changer de cellule. Coldris manquait d'originalité s'il estimait que ce traitement serait suffisant à la faire plier. Elle ne pleurait pas pour si peu. Et elle ne se mettrait pas en colère. Les gardes se lasseraient bien avant elle de ce petit jeu.

La porte de la cellule s'ouvrit. Elle se releva, prête à sortir. Ils étaient tôt aujourd'hui. Au moins, cela lui donnerait tout son temps pour poursuivre ses récitations. Hier, elle n'avait pas été entièrement satisfaite de ses intonations prises pour le jeune Gargantua du chapitre huit. Cela mériterait de le refaire jusqu'à être satisfaite du résultat. Elle salua poliment les soldats en esquissant une révérence.

"Bonjour, messieurs."

Sur cela, elle les suivit dans le couloir, attendant de pouvoir regagner sa nouvelle cellule. A son étonnement, ils empruntèrent les escaliers pour remonter vers la surface. Son visage cacha cependant sa surprise alors que son esprit cherchait à comprendre la nouvelle stratégie du ministre. Qu'avait-il imaginé ? Avait-il été déçu de la savoir si résistance ? La déplaçait dans un lieu plus isolé ? Elle doutait que ce soit pour être relâchée. Non, elle n'avait pas subi assez de désagrément au goût de Coldris. Il avait forcément prévu quelque chose de tordu, susceptible de la briser. Une intuition lui vint et lui noua les entrailles. Ses amis.. Irène... Il devait avoir eu l'idée de menacer ses proches pour mieux la torturer. Cassandre serra les dents. Que pouvait-elle ? Serrer les dents et ne rien dire ? Ou accepter de paraître faible pour protéger ceux qu'elle aimait ? Quel chien ! Elle se résolut à ne pas songer tout de suite à ce qui allait se passer. Pour le moment, le mieux était d'observer et de glaner la moindre information.

Ils sortirent finalement de la prévôté et Cassandre ferma instinctivement les yeux pour se réhabituera la lumière agressive du soleil. par ailleurs, en cette maison, avec la réverbération de la neige sur les toits, les rayons étaient encore plus néfastes. Elle distingua ensuite le pilori installé. Alors, finalement, c'était ce qui l'attendait ? Elle laissa échapper un soupir au souvenir de tout ce qu'elle avait pu imaginer.

"Finalement, vous n'êtes pas si méchant, messire. Vous n'avez même chercher à boire mon sang de jeune vierge."

Ces rumeurs sottes qui circulaient lui avaient toujours fait rouler ait les yeux. Comme si un ministre pourrait impunément se livrer à telles pratiques... Cassandre se laissa mener vers le pilori, stoïque, lorsque son regard surprit non loin deux petites silhouettes connues.

"Nico... Mésange... par pitié, ne me dites pas que ces idiots ont attendu tout ce temps que je sorte."

Pourquoi se posait-elle la question ? Elle savait que c'était exactement ce qu'ils avait fait et qu'ils resteraient jusqu'à la fin de son châtiment. Elle fit semblant de ne pas les apercevoir et poursuivit sa route de son allure toujours stoïque sans prêter attention à ceux qui la dévisageaient.
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