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[13 Janvier 1598] - Interprète pour coeurs aveugles [Terminé]

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Message par Éléonore de Fromart Dim 28 Mar - 21:33

Elle gâchait tout, absolument tout ! Elle ne savait faire que jouer les rabat-joie. Coldris avait déjà assez de difficultés sans qu’elle n’en rajoute. Et pourtant, il ne l’accablait pas. Elle l’ennuyait gratuitement avec des chagrins dont il n’aurait pas dû avoir à se soucier, et lui, il ne lui reprochait rien et tentait seulement de la rassurer. Et il le faisait sincèrement.

Elle le serrait fort. Il ne voudrait sans doute bientôt plus d’elle. Et… Et elle n’avait plus envie de se battre toute seule. Elle aurait été heureuse, voilà, ce serait fait et ce serait terminé. Et le mur tomberait : elle pourrait arrêter. Elle n’avait plus envie de penser. Plus envie de vivre. Juste que la souffrance cesse de la harceler. Et il n’y avait qu’une manière de la faire cesser si elle devait être seule - ou avec des gens qui la considéraient seulement comme un poids.

Lorsque le plus gros de la crise de larme fut passé, elle s’excusa d’avoir tout gâché. Elle ne voulait pas le conserver uniquement parce qu’il avait pitié d’elle, surtout pas… Mais elle était vraiment désolée. Et elle ferait un effort la prochaine fois, c’était promis. Elle allait essayer d’être au plus proche du joli soleil qu’il voulait et de dissiper ses ténèbres comme il en avait besoin. Elle allait essayer de ne plus lui causer de tourments inutiles, mais elle ne voulait pas qu’il l’abandonne. Pas tout de suite. Bien sûr, cela arriverait, parce qu’il finirait par se rendre compte que toute seule, elle était juste un déchet mais… Mais qu’il reste encore un peu : elle se sentait tellement mieux avec lui. Mieux qu’elle l’eut cru possible. Et elle était moins… un poids. Sauf maintenant.

Elle leva vers lui ses yeux gonflés par les larmes - elle devait vraiment être affreuse, Eltinne lui avait dit qu’elle était affreuse quand elle pleurait et qu’elle en avait assez de la voir pleurnicher pour rien. Il souriait, et un sanglot remonta dans la gorge de la jeune femme tandis qu’il essayait de rire de la situation.

Bien sûr que non, il n’était pas vraiment responsable de son dérapage de la dernière fois. Il n’avait pas le droit de dire ça, elle le lui interdisait. Il avait tant souffert, comment aurait-elle pu lui reprocher de céder une fois à ses fantômes qu’il combattait si vaillement - qu’il s’aide ou non de certains produits - et depuis si longtemps ?

Elle garda ses yeux plantés dans les siens. Non ! Non ! Non ! Non ! Il n’y était pour rien du tout. Et elle, elle n’aurait rien pu lui reprocher parce qu’elle était faible et seulement faible. Et puis, lui, il n’abusait pas du temps d’une personne qui valait tellement mieux que lui avec des simagrées - ce mot ne quittait plus ses pensées depuis qu’Eltinne l’avait de nouveau employé : elle faisait des simagrées.

Un frisson de panique la saisit lorsqu’il la lâcha. Pendant un instant - même si son regard ne disait rien de ce genre - elle crut qu’il en avait assez. Là, maintenant, tout de suite. Et que c’était terminé. Qu’il avait fait sa part, et que si ça ne suffisait pas à l’apaiser, tant pis pour elle parce que lui, il avait mieux à faire. C’était ce qu’il avaient tous fait, de toute façon. Mais elle était la seule fautive : c’était elle qui faisait des simagrées.

Mais ce n’était pas ça. Il prenait simplement son visage entre ses mains pour lui parler. Pour lui dire que c’était fini et qu’il en avait marre de son attitude ? Non, pour lui dire que les faiblesses devaient être partagées pour s’adoucir. Elle sourit tristement : oui, ça elle le savait, c’était bien pour cela qu’Ariste avait su la rendre si forte : il compensait toutes ses faiblesses et il portait avec elle toutes ses peines, si bien que tout semblait accessoire. Mais Ariste était bien le seul qui aurait pu avoir une telle patience et une telle compréhension vis-à-vis d’elle. Parce qu’elle ne valait rien du tout sans lui. Personne n’aurait pu prendre cette peine pour elle.

Et pourtant, Coldris - qui savait déjà, après moins d’un mois, l’apaiser si sûrement - restait. Il était encore plus formidable qu’elle ne l’eut pensé. Il l’embrassait même tendrement, comme si elle avait mérité son attention. Comme s’il l’avait… Enfin, comme s’il tenait vraiment à elle. Comme si elle valait la peine qu’il prenne du temps pour elle. Comme si d’une certaine manière, il était content d’être là pour elle.

Et il disait qu’il ne la blâmerait pas. C’était ce qu’ils avaient tous dit, au début. Que ce n’était pas grave, que c’était normal. Puis, après à peine trois jours, ils s’étaient remis. Après une semaine, ils avaient décidé que la vie continuait tout simplement, comme si la chose était possible. Après deux semaines, ils avaient commencé à trouver qu’elle faisait des simagrées - le mot n’avait pas été employé, mais ce devait déjà être le cas.

Parce que quand Ariste était partis au combat, ils s’étaient “habitués à l’idée” qu’il puisse ne pas en revenir. Qu’elle aurait dû s’y préparer aussi, selon eux. Comment pouvait-on s’habituer à un tel non-sens ? Comment aurait-elle pu, elle, envisager un seul instant qu’il puisse arriver quoi que ce soit à son tout sans que le monde ne cesse de tourner ? Sans qu’elle ne le suive aussitôt dans la mort ? Oui, c’était pour cela qu’il valait mieux qu’elle disparaisse : ils la pleureraient quelques jours, et puis la vie reprendrait son cours. C’était mieux que de leur imposer son existence pesante.

— Cela vaut peut-être mieux que de gâcher la vie de tout le monde, sanglota-t-elle. Et il n'était pas lâche. Elle lui interdisait de dire cela aussi.

Elle resserra son étreinte. Elle n’avait pas voulu dire ça. Elle ne voulait pas qu’il sache combien elle était détruite. Combien elle ne servait à rien et combien elle deviendrait vite un fardeau pour lui s’il décidait de la revoir. Elle se détestait. Elle se détestait. Elle se détestait tellement. Elle allait lui faire du mal. Elle aurait dû partir.

Elle aurait dû, mais il le lui avait interdit. Elle ne devait plus le laisser. C’était ce qu’il avait dit. Sinon elle allait le tuer, et même si elle doutait de pouvoir à ce point blesser un homme si formidable par son absence, elle s’y tiendrait et attendrait qu’il la rejette de lui-même. En attendant, il voulait comprendre. Alors, elle allait essayer de lui expliquer. Mais pas tout non plus : s’il savait combien elle était faible, lâche, inutile, stupide, ridicule, pitoyable, incapable… S’il savait, il ne voudrait plus d’elle.

— Il n’est pas une faiblesse, commença-t-elle d’une voix troublée par sa détresse. Il n’a jamais été une faiblesse et n’en sera jamais une. Il est parfait. Juste parfait. Il est tout, a toujours été absolument tout ce qui comptait. Le seul qui comptait vraiment. Et j’ai toujours été la seule qui comptait vraiment. Les autres… Les autres, ce n’étaient que des amourettes et on en riait bien. Les autres… Personne n’aurait pu nous séparer. Nous étions trop… trop indissociables. Vous m’avez demandé si je l’aimais toujours…

Elle étouffa un sanglot contre l’épaule de Coldris.

— Comment aurais-je pu ne plus l’aimer ? Il a toujours été ma seule raison de vivre... Je l’aime, évidemment que je l’aime. Et cela ne cessera jamais. Il est la seule partie de moi qui ait en vaille la peine. La seule que je puisse vraiment aimer. Avec lui, pour lui, je me sentais capable de tout affronter. Le monde entier aurait pu s’opposer à nous que cela n’aurait pas revêtu la moindre importance. Mon Ariste…

Je suis morte, vous savez ? Comment peut-on survivre à ça ? Comment avez-vous fait ? Comment… Comment a-t-il pu m’imposer ça ? Comment a-t-il pu m’obliger à vivre sans lui, je le déteste. Je le déteste. Je le déteste.


C’était la première fois qu’elle utilisait ces mots-là. Son sanglot se mua en un hurlement. Elle n’avait pas le droit de le détester. Elle l’aimait. Elle l’aimait tellement. Il serait toujours son grand frère à elle, rien qu’à elle. Elle ne cesserait jamais de l’aimer. Etait-ce vrai ? Le détestait-elle vraiment ?

— Je… Je l’aime. Je l’aime trop, mais il ne pouvait pas me faire ça. Il pouvait pas. Alduis n’y peut rien, il n’a fait que transmettre son fichu message… Mais mon Ariste, il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas. Il savait, pourtant, que j’étais incapable de m’opposer à sa volonté. Elle est bien plus forte que la mienne, il le sait. Mais il m’a quand même obligée. Il voulait que je vive. Comment a-t-il pu s’imaginer un seul instant que je supporterais ça ? J’aurais dû mourir. J’aurais dû. Le jour même où on me l’a annoncé. Non : celui ou j’ai senti que c’était finir. Parce qu’il ne reste plus rien. Plus rien. Juste du vide.

Que vous seul savez apaiser.

— Juste de la souffrance.

Que vous seul savez adoucir.

— Juste...

Sa voix se brisa en un nouveau hurlement. Elle enfouit son visage dans son cou et le serra comme si elle craignait qu’il ne s’éloigne.

Juste ce que vous m’avez rendu. Juste votre soutien. Juste vous. Et je vais vous perdre. Je sais que je vais vous perdre, et j’en souffre déjà. Je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi et ça n’a pas le moindre sens mais je vous aime. D’un amour différent, un amour que je n’ai jamais connu et que je ne comprends pas, mais je vous aime.

Oui, c’était cela. Ce ne pouvait être que cela, aussi insensé que ce fut. Elle n’avait pas tenu dix ans. Elle ne tiendrait jamais dix ans. Il avait aggripé son coeur en quelques regards, comme si son coeur avait tout simplement choisi au delà de toute raison que c’était lui qui pouvait l’apaiser. Et son coeur cruel avait choisi un homme qui ne pourrait jamais lui rendre la force de ce qu’elle éprouvait. Mais elle ne pouvait pas se plaindre. Elle ne pouvait pas : elle ne méritait même pas de seconde chance. Alors ce bonheur, si éphémère s’annonce-t-il, demeurait inespéré.
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Message par Coldris de Fromart Dim 28 Mar - 23:53



Il faisait de son mieux pour éponger tant sa peine que ses doutes, mais la vérité c’est qu’il n’avait jamais vraiment été doué pour cela contrairement à certaines personnes de son entourage.

— Cela tombe bien, je ne suis pas tout le monde. rétorqua-t-il avec son arrogance légendaire qu’accompagné son discret sourire plein de malice.

Et pour lui prouver qu’il n’était pas effrayé de ses ombres, il lui offrit la possibilité de les partager. Il était de toute façon bien le dernier à pouvoir la juger de quoi que ce soit à ce sujet. Cela aurait été fort malvenu le cas échéant. Il passa un bras autour de ses épaules et l’autre dans le creux de ses reins. C’était d’une toute petite voix éraillée qu’elle débuta sa confession. Le fait était qu’elle parlait toujours de lui au présent quand bien même il appartenait désormais au passé. Quoi qu’elle en dise, il était une faiblesse, car l’amour rendait faible. Mais accepter et reconnaitre cette faiblesse pour ce qu’elle était et tout ce qu’elle apportait, c’était faire preuve de courage, et cela il avait bien des années à le comprendre. Coldris acquiesça sans un son avant de caresser sa tête dans une vaine tentative pour apaiser ce sanglot qui refaisait surface. Il comprenait mieux désormais, il comprenait qu’elle n’avait toujours vécu que pour lui et jamais pour elle. Savait-elle seulement qui elle était vraiment ?

— Comment aurais-je pu ne plus l’aimer ? Il a toujours été ma seule raison de vivre... Je l’aime, évidemment que je l’aime. Et cela ne cessera jamais.

Il n’attendait rien en retour, parce que ce n’était pas ainsi qu’il concevait l’amour, mais tout de même, il ne put s’empêcher de ressentir une fine couche de givre se déposer. Celle-ci, comme ces paroles suivantes, parce qu’il se sentait soudainement terriblement impuissant face à ce fantôme. Il ravala un soupir et secoua la tête pour chasser ses idées et tous les piaillements qui s’éveillaient. Ce n’était qu’un fantôme. Qu’elle le veuille ou non, il n’était plus là désormais. Elle aussi finirait par l’accepter comme lui l’avait fait.

Je suis morte, vous savez ?

Oh oui, il savait. Il savait parfaitement. Il l’avait vécu lui aussi, ce délabrement, ce vide que rien ne pouvait combler, cette amputation et ce puits de désespoir sans fond, ce sentiment d’injustice profond et cette envie de la régler une bonne fois pour toutes. Comment avait-il fait ? S’il fallait être complètement honnête, il avait simplement échoué cinq fois. On pouvait remercier Léonilde, pour lui avoir fait vomir tout son whisky et son opium ou encore pour l’avoir assommé et attaché à son lit. Et on pouvait remercier Virgil pour avoir remué terre et mer à la recherche du seul espoir susceptible de raviver la fébrile étincelle de vie qui demeurait encore au fond de son âme. Est-ce qu’il les avait détestés tous les deux ? Non. Il les avait pourris. Il les avait haïs. Il les avait maudits.

Il la serra un peu plus fort contre lui tout en continuant de passer cette main sur ses cheveux si doux. Il aurait eu plein de choses à dire mais il préféra lui laisser ce silence pour lui permettre de s’exprimer. Il écouta tout le reste jusqu’au bout. Sans dire un seul mot. Il savait ce que c’était. Il avait pensé et prononcé ces mêmes paroles un nombre incalculable de fois. Si seulement Virgil avait pu être là, il lui aurait dit lui, combien il avait été odieux et détruit. Ses bras l’enserrèrent un peu plus fort contre lui.

— Je sais. Je sais ce que c’est, Éléonore. Vous voulez savoir comment j’ai fait ? Un jour j’ai fini par trouver une raison de vivre. Et un autre jour encore, j’ai fini par accepter d’en chérir les souvenirs heureux plus que ceux qui me voulaient du mal. Et puis un autre jour encore, vous apercevrez entre les cendres, un petit regain verdoyant d’espoir, vous verrez.

Il embrassa le sommet de son crâne et après quelques secondes de silence déclara :

— Cela ne fait rien si vous êtes morte, Eurydice, je vous ramènerai, et vous n’avez rien à craindre, je ne regarde jamais en arrière.

Orphée était un idiot. Lui n’était pas si faible. Selon ses propres principes, l’essentiel même de la vie reposait sur le fait d’aller de l’avant. S’il avait calculé, Oprhée aurait su qu’il avait tout à perdre à chercher son passé au lieu de poursuivre son avenir.

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Message par Éléonore de Fromart Lun 29 Mar - 14:11

Coldris de Fromart n'était pas tout le monde. Il énonçait l'évidence même. Mais surtout : il n'était pas n'importe qui. Il était celui qui savait la réconforter. Il était celui devant qui elle avait formulé un aveu qu'elle n'avait même pas osé se faire à elle-même : une part d'elle détestait Ariste pour ce qu'il lui avait imposé. Même si c'était pour son bien. Même si c'était par amour. Même s'il avait vraiment confiance en elle… Même tout cela ne justifiait pas qu'il lui eut imposé ces mois de souffrances incessantes.

Évidemment qu'il savait ce que c'était... Elle n'aurait jamais dû craquer ainsi devant lui et remuer dans ses mauvais souvenirs. Égoïste qu'elle était.

Trouver une raison de vivre... Un ordre sur un bout de papier qui refusait de disparaître qui était plutôt une interdiction de mourir. Il voulait qu'elle se reconstruise, qu'elle soit de nouveau heureuse. Moins d'un mois plus tôt, cette idée était un non-sens. Il aurait fallu des siècles pour retrouver même un semblant d'apaisement, un semblant de sens dans ce monde que la seule âme qui comptait avait déserté... Et ces neuf derniers mois avaient dans conteste duré des siècles. Et son cœur s'emballait déraisonnablement. Le seul ennui était qu'il ne trouverait jamais l'écho dont il avait besoin pour s'épanouir complètement...

Pour le reste... Elle chérissait déjà les bons souvenirs – avec Ariste, tous les souvenirs étaient teintés de bonheur parce qu'avec lui, même les pires moments de neutralisaient – et l'espoir... Elle s'en remit plus encore aux bras qui la serraient. L'espoir était une notion bien vague. Était-ce de l'espoir si elle savait qu'il serait bientôt lassé d'elle ? Le seul point positif qu'elle voyait à cela était que cela pourrait bien l'achever.

Parce qu'elle était déjà morte. Pas d'avoir fui un dieu, mais de l'avoir aimé trop fort. Elle mourrait qu'on lui eût arraché la perfection même. Celui sans qui elle n'avait jamais vécu. Celui sans qui elle n'avait jamais voulu vivre. Pouvait-on vraiment la ramener ? De l'enfer même, elle l'ignorait... Mais elle était déjà plus calme. Et elle lui faisait confiance.

— Alors vous saurez ne plus me regarder jusqu'à ce que je cesse d'être hideuse ? demanda-t-elle d'une petite voix.

Parce qu'elle ne devait vraiment ressembler à rien, le visage ainsi ravagé par les larmes. Elle prenait trente ans et une laideur atroce. Il n'aurait pas dû la voir dans cet état. Elle n'allait pas disparaître, non, ce serait lui qui choisirait de la laisser là. Lui qui comprendrait qu'elle n'était qu'une carcasse encombrante dont il valait mieux se débarrasser. Et ce même si ses sanglots s'étaient tus. Mais quitter l'enfer sans son regard auquel s'ancrer, elle ne pouvait pas.
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Message par Coldris de Fromart Lun 29 Mar - 16:23



Éléonore semblait s’apaiser peu à peu entre ses bras. Oh, bien sûr il n’avait pas la prétention d’avoir cautérisé ses plaies, et pour cause, elle seule le pourrait. Elle trébucherait encore bon nombre de fois avant de pouvoir quitter les ténèbres pour la lumière, mais il serait là pour la rattraper et l’aider à se relever aussi souvent qu’il le faudrait.

— Bien sûr! s’exclama-t-il avec cette pointe d’ironie caractéristique Mais cela implique que vous soyez hideuse. Or, nous savons tous deux que je n’embrasse que les jolies fleurs.

Sur ce, il en profita pour lui voler un baiser. À moins que ce ne soit qu’une manière supplémentaire d’appuyer son argumentation. La frontière était parfois bien ténue.

— Et quand bien même cela serait discutable, encore faudrait-il que je puisse ne serait-ce que vous trouver hideuse, ce qui me semble fort compliqué malgré tous mes talents.

Un petit rire s’étouffa dans son sourire lorsque Léonilde décida de s’approcher d’eux. Un garde venait à l’instant de l’avertir qu’un homme en livrée s’était présenté aux grilles cherchant à savoir si Mademoiselle de Tianidre était toujours là. Il avait donc appliqué le protocole à la lettre en répondant aller se renseigner. Le valet se racla la gorge puis déclara :

— Messire, un domestique s’enquiert de la présence de Mademoiselle en ces murs. Que dois-je lui répondre ?

Coldris soupira bruyamment en roulant des yeux. « Dites-lui qu’il n’y a personne de ce nom ici et qu’il n’a qu’à venir vérifier entre mes draps » fut-il tenté de répondre avec son acidité habituelle. Il allait d’ailleurs ouvrir la bouche lorsqu’il surprit le regard d’Éléonore.

— Que souhaitez-vous que réponde Léonilde ?

… Vous n’avez qu’une phrase à dire et vous pourrez rester ici.
Dites-lui que vous êtes parti, qu’il n’y a personne de ce nom ici.
Dites-lui…

Mais il savait déjà qu’elle n’oserait pas rester ici, elle avait été claire à ce sujet et il doutait de pouvoir la faire flancher aussi facilement.

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Message par Éléonore de Fromart Lun 29 Mar - 22:31

Non ! Il devait arrêter de la regarder. Pas dans cet état. Les mains affreuses, ça passait encore mais…  Non, elle ne ressemblait à rien, comme ça. Elle était hideuse et atrocement négligée… Elle n’était pas comme il fallait. Elle n’était jamais comme il fallait…

Coldris lui vola un nouveau baiser plein de mauvaise foi. Car quoi qu’il puisse dire, ses yeux gonflés et sa mine déprimée n’avaient rien d’attirant… Et c’était bien cet espèce d’ombre lasse et inconsolable, inutile, pesante et même désagréable qu’elle était réellement. C’était cela, son vrai visage depuis que son tout l’avait abandonnée.

— Votre mauvaise foi à toute épreuve en tête de liste, tenta-t-elle de plaisanter juste avant que Léonilde ne fasse irruption dans leur bulle.

Elle s’accordait volontiers au profond soupir de Coldris. Mais au fond, elle savait qu’elle était l’unique responsable de cette interruption.

Que devait-on répondre ? La marge était grande entre ce qu’elle voulait répondre et ce qu’elle devait répondre, mais le début était le même :

— À Jean Sargnan, cocher, vingt-neuf ans, brun, yeux sombres, environ un mètre septante-cinq, répondez que je suis là, que je me porte bien et que...

Je reste ici ce soir.

— Je ne vais pas tarder.

La fin aussi était la même :

— Pour n’importe qui d’autre : je ne suis jamais venue ici. Si on insiste : la dernière fois que vous avez entendu parler de moi, c’était hier lorsque je suis venue voir Madame de Kergemont à Fromart et vous ne savez rien d'autre. S’il vous plait.

Elle aimait flirter avec la folie et le danger, mais on ne s’en sortait pas dans ladite folie sans être un minimum consciencieuse… Ariste et Gabriel avaient beau la blâmer pour sa prudence excessive, c’était quelque chose d’essentiel lorsque l’on voulait protéger quelqu’un ou quelque chose. Lorsque l’on voulait conserver l’opportunité de faire des folies ou, en l’occurence, de revoir cet homme dont elle ne pensait plus pouvoir se passer.

Elle revint d’ailleurs vers son si doux phénix, parce qu’elle savait qu’elle n’avait plus beaucoup de temps à passer avec lui. Elle aurait aimé pouvoir demeurer dans ses bras et attendre que ses maux s’effacent tout à fait, même pour peu de temps... Mais ils se reverraient bientôt.

— Oh, à ce propos : j’ai rencontré votre fille et… Je crois qu’elle m’apprécie.

Et d’ailleurs, elle aussi avait immédiatement apprécié Bérénice. Elle évita toutefois de préciser combien celle-ci fondait d’espoirs impossibles sur leur relation... Elle ne savait même pas pourquoi elle racontait cela. Grapiller quelques instants de plus, peut-être ?
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Message par Coldris de Fromart Mar 30 Mar - 16:12



Eh bien quoi ? Ce n’était pas quelques larmes qui allaient changer quoi que ce soit. Qu’est-ce qu’elle s’imaginait ? Elle l’avait vu s’enfiler une fiole entière de Laudanum dans un état larvaire des plus pitoyable et elle était toujours là, alors pourquoi irait-il faire grand cas de quelques larmes ? Quant à sa mauvaise foi, il arqua un sourcil circonspect.

— Etes-vous sûre que ce n’est pas la vôtre qui est en tête de liste, ma luciole ? Je n’ai pas pour habitude de me voiler la face. déclara-t-il en la dévorant de ses yeux polaires.

Il allait justement lui prouver à quel point, il était sincère lorsque son valet se signala suspendant toute réjouissance. Ou aurait-il du plutôt dire ajournant toutes réjouissances. . Coldris se tourna vers son Eurydice sans grand espoir.

— Je ne vais pas tarder.

Ses prunelles admirèrent un temps le plafond finement sculpté puis le parquet noueux parfaitement lustré. Elle rentrait donc. Qu’il en soit en ainsi. Parce qu’il doutait sincèrement que quiconque d’autre que son cocher n’ait eu l’idée de venir ici.

— Bien Madamemoiselle. répondit Léonilde en s’inclinant avant de disparaitre.

Coldris avait fait quelques pas vers la fenêtre, il pouvait sentir un mince filet d’air froid lui caresser le visage. Derrière lui, le pas léger de sa petite luciole se rapprocha.

— Oh, à ce propos : j’ai rencontré votre fille et… Je crois qu’elle m’apprécie.

Oh elle avait donc rencontré Bérénice ? Il esquissa un sourire à l’idée alors même que ses yeux s’étaient arrondis de surprise. A l’évocation de sa fille d’une part et d’autre part parce qu’il cherchait où elle voulait en venir.

— Et vous, avez-vous apprécié ma petite nymphe ? demanda-t-il innocemment.

Il n’était pas étonné que Bérénice ait pu l’apprécier. Quant à savoir quand elles avaient pu se rencontrer cela éveilla une autre question…

— Vous êtes venu à Fromart pendant mon absence ?

Il regrettait presque d’avoir fui à Bramevert… Cela lui ressemblait si peu de préférer la fuite. Il aurait dû lui écrire ou trouver un moyen de la voir plutôt que de se morfondre idiotement sur son sort. Sur ce, il la prit par la main et quitta la salle à manger sans même attendre sa réponse qui pourrait toujours avoir lieu sur le trajet vers son bureau. Il n’était pas question qu’elle reparte sans les précieuses indications qui lui permettraient de se rendre au Manoir du Moulin. Et il savait qu’il ne resterait guère qu’une poignée de minutes avant qu’elle ne disparaisse.

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Message par Éléonore de Fromart Mer 31 Mar - 12:52

Malgré son visage silloné de larmes et ses yeux toujours aussi gonflés, Coldris arrivait à la regarder avec… cette lueur au fond des yeux. Il la taquinait un peu.

Elle ? De mauvaise foi ? Ses lèvres se pincèrent. Elle avait des montagnes de défauts, elle était loin de le nier mais… De la mauvaise foi en plus du reste ? Mauvaise foi. Mauvaise foi. Elle pensait avoir au moins conscience de ses faiblesses, justement… Elle en oubliait certainement. De toute façon, sans Ariste, elle ne savait vraiment rien faire correctement. Méprisable petite enfant gâtée capricieuse qui ne savait faire que des simagrées. Elle aurait mieux fait d’obéir au lieu de se croire au dessus de tout. D’apprendre à se tenir tranquille comme une jeune femme convenable, puisque maintenant, plus personne ne la soutenait - ou presque.

Alors qu’elle s’apprêtait à répliquer, Léonilde les interrompit. Les retrouvailles s’achevaient. Jean était sans doute le seul à savoir où elle se trouvait, et si ce n’était pas lui, il devait être sacrément temps de le rejoindre.

Oh, elle voyait bien que Coldris était déçu. Il l’aurait sans doute aimée plus téméraire… Aurait-elle dû être plus téméraire ? Il aurait plutôt dit “audacieuse”, d’ailleurs… Mais elle n’était rien de tout ça. Juste lâche, horriblement lâche. Et lassante. Et stupide. Et cloîtrée dans sa prudence. Se croyait-elle maligne à toujours vouloir être prudente pour tout le monde ? Oh, il fallait qu’il comprenne : elle n’avait pas le choix, elle devait faire attention. Pour pouvoir le revoir. Comme elle devait demeurer discrète car elle ne pouvait pas se permettre de nuire à sa famille. Au fond d’elle, elle savait qu’elle avait raison… Mais elle aurait eu tort si elle le perdait à cause de ses précautions.

Pour ne pas trop s’embourber dans ses doutes, elle évoqua un évènement plus joyeux que son départ imminent : sa rencontre avec Bérénice. Il semblait surpris. Surpris qu’elle l’ait appréciée ? Oui, ce devait être ça. Elle non plus ne comprenait pas ce qu’ils avaient tous… Quoique de la part de Coldris, cet étonnement n’avait pas tant de sens... Elle ne comprenait plus rien, de toute façon.

— Oh, non ! Une femme détestable, vraiment ! Hautaine, stupide et rabat-joie ! Non, vraiment, nous n’avions rien à nous dire, répondit-elle d’un ton supérieur exagérant bien ses mimiques dégoutées.

Elle sourit et haussa les sourcils, comme pour lui faire remarquer que sa question était un peu stupide.

— Il a suffit que je demande de vos nouvelles pour qu’elle comprenne que tout était de ma faute, admit Eléonore. J’étais persuadée qu’après ce qu’il s’était passé, vous ne voudriez plus jamais entendre parler de moi. Elle a essayé de me convaincre que vous deviez pensez la même chose… Léonilde aussi… Je ne comprends pas...

Quant à savoir si elle s’était rendue chez lui… Elle se laissa entrainer sur quelques pas.

— Heureuse de constater que vous écoutez ce que je dis ! répondit-elle, taquine. Hier, en venant voir Lavinia de Kergemont… Mais si cela vous dérange, j'arrêterai.
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Message par Coldris de Fromart Mer 31 Mar - 16:46



Bérénice, une femme détestable ? Allons bon ! Il n’avait même pas besoin de voir son sourire ou ses yeux, pour savoir que ce n’était là qu’une profonde ironie. Elle était de toute façon si charmante et si admirable qu’il était tout bonnement impossible de ne pas l’apprécier. Elle savait être douce lorsqu’il le fallait, mais sans jamais se faire marcher sur les pieds. Si seulement elle avait pu naitre homme !

— Vous m’en voyez navré ! répondit-il sur le même ton moqueur alors qu’elle haussait les épaules.

Bien sûr que Bérénice était formidable ! Il avait tout de même le droit de vouloir l’entendre de sa propre bouche, non ? De sa faute ? Non, non, non, non… Il l’entraina par la main à l’étage, là où se trouver son ancien bureau. L’escalier de bois sombre grinçait toujours autant, une mélodie chantante qu’il aimait tout particulièrement. Quant à Léonilde, oh le fourbe ! Fallait-il donc que tout le monde se mêle de ses affaires sur cette planète ? Ah il ne perdait rien pour attendre ! Passé son étonnement, il devait bien reconnaitre qu’il lui en était tout de même reconnaissant. C’en était presque agaçant de le voir toujours anticiper aussi bien ses besoins. Et chacune de ses initiatives était toujours immanquablement juste. Il avait surement entendu Éléonore vendre la mèche et il imaginait sans mal arborait ce petit sourire satisfait, mais dépourvu d’arrogance. Il ouvrit la porte.

— Oh mais Léonilde n’était pas là hier puisqu’il était en ma compagnie en train de serrer les mâchoires sur cet affreux chemin caillouteux qu’il abhorre, alors voyez-vous, le reste aurait très bien pu être tout aussi faux. Même si cela dit, j’aurais préféré être l’objet de votre visite avoua-t-il en toute honnêteté et avec douceur.

Coldris prit ses mains entre les siennes et plongea son regard dans le sien et c’était largement suffisant pour mettre en ébullition ses sens au point d’en oublier quasiment ce qu’il comptait lui dire. Il n’y avait plus que cette bouche qui l’appelait irrésistiblement et… il inspira profondément pour se détacher de toutes ses pensées qui parasitaient si agréablement son esprit.

— Vous n’y êtes absolument pour rien dans ce qu’il s’est passé. C’est un simple concours de circonstances malheureuses. Je… Ma journée ne s’était pas vraiment déroulée comme prévu. Je…
Il marqua une pause. Il voulait lui donner l’explication exacte, qu’elle puisse comprendre, vraiment comprendre qu’elle n’était pas en cause. Son regard s’échappa un court instant avant de revenir plus grave que jamais.


— J’ai dû achever un homme que l’on avait torturé.

Vous voyez, ce n’est que moi.
Et certainement pas de votre fait.

Il lui suffisait d’en parler, même à demi-mots pour que jaillissent les souvenirs encore frais de cette journée.

Les couleurs.
Les odeurs.
Les coups.
Les articulations.
Les lacérations.
La déclaration solennelle.
Ses yeux verts.
La lame.
Le sang.
Comme une rivière pourpre.

Un frisson glacé remonta le long de son échine.

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Message par Éléonore de Fromart Jeu 1 Avr - 17:18

Evidemment, Coldris ne fut pas dupe de ses sarcasme. A vrai dire, Eléonore ne savait pas quoi penser de tout cela. Il était à la fois rassurant de savoir que quelqu’un tenait vraiment à lui et… vraiment dommage de savoir qu’ils ne se soutenaient pas assez. Chacun de son côté trop soucieux de paraître fort pour partager ses difficultés… Et pourtant, ils auraient peut-être pu, s’ils avaient été moins…

Eléonore chassa cette pensée pour lui faire remarquer que sa seconde question était encore plus absurde que la première. Et pour cause, elle venait d’y répondre. Elle marqua un temps d’arrêt au pied de l’escalier. Curieusement, dans son souvenir, la sortie ne se trouvait pas à l’étage… Soit, tant pis ! Elle le suivit.

Oui, c’aurait pu être faux Seulement, les meilleurs mensonges contenaient une part de vérité. Et, fut une époque où elle s’y sentait beaucoup plus légitime, elle était particulièrement douée pour manipuler cette part de vérité, ou simplement énoncer la vérité comme elle l’arrangeait. C’était souvent plus efficace que de devoir monter une histoire de toutes pièces.

En entrant dans le bureau - toujours sans comprendre ce qui avait bien pu le pousser à l’amener ici - Eléonore essaya de trouver une réponse qui ne semble pas trop désespérée… Elle serait venue pour lui si elle avait pensé un seul instant qu’il ne la détesterait pas.

Il avait beau lui prendre les mains et lui assurer qu’elle n’était coupable de rien, elle en doutait. Un concours de circonstances malheureuses, oui, mais elle avait porté les coups de trop avec sa profonde bêtise.

Elle soutenait son regard grave avec toute la sérénité donc elle était capable, sans pour autant comprendre. Achever un homme ? C’était ce qui l’avait mis dans cet état, lui ? Elle qui était particulièrement fragile, évidemment qu’elle aurait été affectée d’avoir à donner la mort, même pour libérer, mais lui ? Et puis, comment se faisait-il qu’il se soit retrouvé dans cette situation ? Si c’était venu de lui, ça ne l’aurait pas affecté… Non, cela n’avait pas de sens, quelque chose lui échappait...

— Qu’avait-il de particulier pour... Elle s’interrompit d’elle-même. Non, désolée, je sais que cela ne me regarde pas.

Elle aurait dû savoir quoi faire pour chasser ce mauvais souvenir au lieu d’essayer de lui extorquer des détails qu’elle n’avait pas à connaître. C’était sa vie, et elle, elle était déjà bien trop envahissante. Elle ne cessait de poser des questions à propos de choses qui la dépassaient. Gamine sotte et inutile qu’elle était. Incapable de faire quoi que ce fut correctement.

Devant cette détresse qu’elle sentait bouillir sous la surface, elle ne put résister au besoin de le serrer dans ses bras. Il restait seulement une chose qu’elle avait vraiment besoin de comprendre.

— Mais comment… Qu’ai-je fait pour vous laisser croire que je ne voudrais plus vous voir ?

Quelle erreur avait-elle commise pour le laisser dans un tel état ? Elle ne voulait plus jamais le faire souffrir.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 1 Avr - 22:39


Elle doutait toujours. Il pouvait le voir au fond de ses yeux. Quoi qu’il dise, elle douterait toujours. Pourrait-elle le croire s’il avouait toute la vérité ? Pourrait-elle croire qu’il tenait vraiment à elle plus que toutes les autres ? Qu’il n’y avait pas de stratégie derrière ? Le croyait-elle seulement capable d’avoir de tels sentiments ? Au fond, la réponse n’avait que peu d’importance puisqu’elle n’en saurait jamais rien. Il ne voyait même pas comme elle pouvait lui effleurer l’esprit avec autant de vigueur jusqu’à griffer un sillon de feu au travers de ses pensées.

Il en était même à lui avouer qu’il avait achevé Édouard le matin même. Quoi qu’il réponde, cela ne serait que la pâle copie de ce qu’il avait ressenti ce jour-là. Comment pouvait-il espérer lui faire comprendre. De l’extérieur, ce n’était rien de plus qu’un homme de plus sur une liste au fond. Et pourtant, il ne parvenait pas à oublier cet ultime regard. Ni le gargouillis. Ni le départ de son corps.

— C’était notre guide à l’hôpital général. Nous sommes venus le sortir de là le 8. Une visite surprise, deux jours après. Il… était mourant dans un endroit que votre esprit  vous interdirait d’imaginer.

Son regard s’échappa, bien vite rattrapé par ses fantômes.

— Roué de coups.
Os brisés.
Articulations pulvérisées.
Torse lacéré d’inscriptions.
Il n’y avait plus que ses yeux d'encore vivants.


Ses prunelles bleues retournèrent à la rencontre des siennes lorsque ses bras l’entourèrent spontanément lui arrachant un sourire malgré les horreurs qu’il débitait. A son tour, il passa ses bras dans son dos.

— Il était nu.
Déposé sur son manteau.


Les phrases ne se connectaient pas entre elles et il n’arrivait pas à les développer mais il ne pouvait empêcher les mots de s’écouler comme un inarrêtable torrent. Il inspira les effluves de romarin, bien loin de celles âcres et nauséabondes de la mort.

— Un ancien soldat. Je lui ai rendu les honneurs… Et...

De grands yeux verts…
Suppliants…
Reconnaissants…
Honorés…
Vivants…
… Et prêts à mourir.


— J’ai enfoncé ma dague dans son cœur jusqu’à la garde.
Jusqu’à son ultime expiration.
Et je l’ai recouvert de mon manteau.


Il n’avait pas parlé du sang qu’il voyait encore remplir les lacérations comme de morbides canaux pourpres. Ni de sa sauvagerie à l’encontre de l’un de ses bourreaux. Il la serra aussi fort qu’il put contre lui, ravalant les larmes qui tentaient de se frayer un chemin sur le rebord de ses paupières.

— Tout est de ma faute. Je l’ai tué deux fois et j’en ai bien conscience.

Il embrassa le sommet de son crâne et se recula légèrement.

— Il sera inhumé aux Champs-Élysées le 20 janvier prochain. déclara-t-il avec détachement.

Il devait toujours écrire son discours. Éléonore ne l’apprécierait sans doute pas. C’était idiot de lui en avoir parlé, et il ne pouvait même plus lui dire de ne pas venir désormais, cette simple demande la pousserait au contraire à y assister.

— Vous n’aimerez pas ce que vous entendrez là-bas, je présume, mais c’est ainsi.

Elle était au moins prévenue désormais de l’effroyable discours qui serait le sien, à la gloire de l’Empire et de leurs héros. Oh non… Il n’était pas encore écrit mais il savait déjà qu’elle détesterait chaque parole prononcée. Peut-être même qu’elle réaliserait que leurs convictions politiques n’avaient rien à faire ensemble…

Il embrassa son front une dernière fois comme pour se faire pardonner de ce qui n’avait pas encore eu lieu et la relâcha pour s’asseoir à son bureau. Il prit une feuille, ouvrit l’encrier, sa plume et commença à faire un schéma succinct des environs.


— Mais comment… Qu’ai-je fait pour vous laisser croire que je ne voudrais plus vous voir ?

Il releva la tête, surpris par sa demande. Quasi gêné même, tant cela lui paraissait désormais idiot de sa part. La plume suspendue en l’air, il en oublia l’encre qui goutta sur le papier. Il ne savait pas quoi lui répondre qui ne la fasse pas culpabiliser car il était au moins aussi fautif qu’elle dans ce malentendu et il ne lui en voulait pas un brin.

— Je pensais vous avoir effrayé quand… quand vous m’avez ramassé.

Oui « ramassé » comme un vieux bois flotté échoué sur la plage. En plus pitoyable encore. Un cadavre de mouette décharné au duvet gorgé d’eau c’était sans doute plus proche de la réalité…

— Quand je me suis réveillée, j’ai demandé à Léonilde où vous étiez. Il m’a indiqué que vous étiez partie le soir même. Comme il n’y avait aucun message de vous, ni ce jour, ni même le lendemain et que vous aviez toujours répondu immédiatement, j’en ai tiré les conclusions qui s’imposaient.

Que j’étais bien trop loin de celui que vous imaginiez que j’étais.
Que je vous avais déçu autant que je me suis déçu moi-même

— Je suis sincèrement désolé pour ce qu’il s’est passé, Eléonore. Cela faisait des années que ça ne m’était pas arrivé.

Presque trois très précisément.
Trois ans qu’il était seul.
La plume gouttait toujours.
Son schéma était bon pour être recommencé.
Quel idiot.
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Message par Éléonore de Fromart Ven 2 Avr - 16:30

Demander de quoi il s’agissait. Revenir sur sa question : elle n’avait pas le droit de lui poser ce genre de questions.

Seulement, il avait décidé d’y répondre tout de même. Et il semblait évident que cette affaire l’avait marqué plus qu’il n’était raisonnable. S’il avait envie de le lui dire, qu’il lui dise.

Hôpital général… Donc travail - elle doutait qu’il visite ce genre d’endroits par plaisir. Sortir leur guide… Un endroit que son esprit lui interdirait d’imaginer… Elle ne voulait pas imaginer, non, à moins que ça n’ait pu l’aider et elle en doutait. Elle ne voulait pas voir, parce qu’il lui suffisait de voir la souffrance de quelqu’un pour la ressentir - elle s’efforça donc de ne pas se laisser happer par la cruelle réalité de ses descriptions.

Mais lui, manifestement, il ne pouvait pas s’en empêcher. Elle venait de perdre son regard. Le voyait-il encore, cet endroit ? Non, il ne fallait pas qu’il voie ça. Pas si cet endroit le replongeait dans ses cauchemars. Non. Non. Mais elle ne s’affolait pas en surface. Elle devait demeurer sereine pour lui, même si elle sentait sa détresse monter.  

Elle était là, oui. Elle était là. Et tout ça, c’était fini. Elle se détachait assez bien de la cruelle réalité de ce ses précisions. De combien d’horreurs de ce genre avait-elle été dépositaire ? Il fallait dire qu’Ariste ne mettait aucune limite dans ses descriptions des champs de batailles mornoïtes. Elle avait eut droit à tous les détails les plus glauques, des fresques de bains de sang à l’expression des instincts les plus primitifs et bas de l’humanité. Alors ce n’était pas ça qui allait l’effrayer ou lui faire rendre ses tripes. Parce qu’elle avait besoin d’être sereine pour l’apaiser.  

Il la serrait. Cela, elle le ressentait. Et même sans les explications décousues qu’il laissait filer, elle aurait senti que cela l’affectait.

Un ancien soldat. Un vrai. Qu’il avait vu. Dans une saleté d’Hopital général… Oncle Eineld avait raison  : ces guerres étaient une gangrène… Mais elle refusa d’y penser. Elle s’y refusa, parce qu’elle savait trop bien qui les provocait, et qu’elle n’avait pas le droit d’y penser.

Elle sentait Coldris la serrer - peut-être un peu trop fort, mais elle n’en dit rien. Si cela, ce n’était pas la preuve qu’il était aussi humain que n’importe qui et qu’il méritait tout autant de bienveillance, d’espoir et de bonheur, elle ne savait pas ce que c’était. Quoi qu’on en dise, et quoi qu’il fasse. C’était facile de se laisser dépasser par les chiffres. Par des listes de morts que l’on parvenait à classer en ressource perdue sans difficultés si on ne voyait que ça. On ne voyait plus que des statistiques, c’était normal. C’était un mécanisme de défense. Parce que voir tout dans sa sensibilité, aucun humain n’aurait pu le supporter. Certains avaient seulement davantage cultivé ce détachement.

Et pourtant, tout dans ce que Coldris expliquait respirait la culpabilité. La volonté de faire mieux. Parce que comme tout humain, il était faillible, et n’avait pas su tout réussir. Il s’amusant à provoquer des guerres pour accroître un pouvoir vain. Mais elle comprenait. Cela aussi, c’était une faille humaine : le pouvoir - et tous les dommages collatéraux que l’on semait dans sa quête. Il était plus que cela.

Il avait tué cet homme deux fois. D’abord en lui vendant du rêve, et ensuite ? Juste en le laissant dans son cauchemar ? Etait-il responsable ? Oui et non. Il était responsable des colonnes de chiffres, mais on ne pouvait pas l’accabler pour les tragédies individuelles. Quoi qu’on en dise, c’était différent. Et quoi qu’on en dise, ce n’était pas cela qui le définissait. Pas seulement, en tout cas. D’autant que si cela n’avait pas été lui, quelqu’un d’autre l’aurait fait.

Elle sourit légèrement lorsqu’il détendit son étreinte.

— C’est faux. Mais vous ferez mieux la prochaine fois, affirma-t-elle.

Et elle en était certaine. Parce que s’il voulait faire quelque chose, avec sa volonté, il ne pouvait que l’obtenir. S’il voulait un mieux, il l’aurait. Quoi que soit précisément ce mieux qu’il visait.

— Mardi prochain, traduit-elle simplement, juste pour montrer qu’elle suivait.

Si cela devait commencer par des funérailles en grandes pompes dont on ne manquerait pas de se servir pour encenser la morale coloniale… cela ne signifiait pas forcément que c’était mal, quand bien même elle n’y croyait pas. Elle comprenait trop toutes les positions à la fois pour se permettre de juger l’une d’entre elles.

— J’ai horreur des éloges funèbres, confirma-t-elle. Et c’était parfaitement vrai. Des funérailles en général, et des rassemblements. Autant avouer tout de suite que vous ne m’y verrez pas.

Les funérailles de militaires, c’était bien le pire. Il y avait beaucoup de gens, et on se retrouvait pris au milieu d’un tel nid de fausseté qu’on avait juste envie de se rouler en boule et de ne plus jamais voir personne. Surtout pas des adultes, surtout pas des gens importants. Et on ne disait que des bêtises parce qu’on ne savait pas parler d’un homme qu’on ne connaissait pas. Et on ne savait même pas ce qu’on faisait là, d’ailleurs. Et ce monde, tout ce monde…

Soit, le sujet était clos. Il la lâcha complètement après un baiser porteur d’une drôle d’émotion, et entreprit de noircir un morceau de papier. Il lui fallut bien quelques seconde pour comprendre ce qu’il avait en tête.

Elle se rendit seulement compte de ce qu’elle venait d’avouer : qu’elle avait peur. Elle ne l’avait pas dit, bien sûr… Mais il avait dû comprendre qu’elle n’était qu’un lapereaux effrayé dès qu’il y avait un peu de monde. Il allait faire le rapprochement avec son attitude au théâtre, et la trouver absolument ridicule. Et de fil en aiguille, il allait comprendre qu’elle ne méritait vraiment pas de rester avec lui.

L’inverse, en revanche, avait toujours aussi peu de sens pour elle. Et elle ne put s’empêcher de l’interroger à ce sujet. Effrayée. Il pensait l’avoir effrayée. Idiote, elle aurait dû faire plus attention. Ramassé. Non : elle l’avait retrouvé. Parce qu’il était hors de question de le laisser seul avec sa détresse. Elle n’était pas capable de faire ça - elle ne serait jamais partie si elle avait pu penser qu’il s’en sentirait mal.

Oui, elle était partie… Parce qu’elle ne se sentait pas légitime à rester. Mais si cela n’avait tenu qu’à elle, elle aurait pu rester là des heures, même toute la nuit, assise sur le bord de ce lit à le regarder dormir. Juste pour rester avec lui, juste pour ne pas le laisser.

Elle fit quelques pas pour le rejoindre, et posa une main sur son épaule tandis qu’il continuait d’expliquer.  

Elle aurait dû lui écrire. C’était de sa faute, elle aurait dû. Sa lettre aurait été un appel désespéré, sans doute, et il l’aurait rejeté de lui même tant il l’en aurait trouvée stupide, envahissante et inutile… Mais au moins, il n’aurait pas souffert. La prochaine fois, elle serait moins lâche. Elle se confronterait à lui quelle que soit la réponse qu’elle puisse craindre. Elle le lui devait.

De l’épaule par dessus laquelle elle se penchait pour regarder, son bras s’enroula dans sa nuque.

— Alors nous avons été idiots tous les deux..., soupira-t-elle. La prochaine fois, je vous écrirai, promit-elle.

Mais en ce qui la concernait elle, cela avait du sens, parce qu’un homme comme lui avait bien mieux à faire… Et pour lui, c’était juste parce qu’elle avait eu une réaction stupide. Sa faute.

Elle avait eu une réaction stupide, mais c’était encore lui qui s’excusait. Sincèrement, elle le sentait. De cette sincérité qui prouvait qu’il y avait bien plus en lui qu’un homme d’état.

Eléonore caressa sa joue. Plus arrivé depuis des années. Elle sourit. C’avait quelque chose de rassurant de savoir que les chocs trop violents ne se faisaient pas trop fréquents… Quoique, cela signifiait aussi que bons nombre de souffrances étaient devenues tellement communes… Mais il tenait malgré tout.

— Vous n’avez aucune raison d’être désolé si c’est vous qui en avez souffert. Souffert ce jour-là… Puis ceux d’après... Elle aussi elle avait souffert. Terriblement souffert de le perdre. Mais lui n’y pouvait rien. Et après ça et ce que vous m’avez dit, je devrais vous en vouloir pour m’avoir privé de la fin d’une représentation que vous ne me laissiez de toute façon pas regarder et d’avoir tempéré la profonde inconscience qui aurait pu éveiller la vigilance de mes cerbères ? elle vola un bref baiser sur ses lèvres trop proches. Votre compagnie m’est bien trop agréable pour qu’un si petit détail me décide à l’éviter. Il faudra inventer mieux pour me faire fuir, charmant phénix.

En fait, il n’en existe qu’un moyen, je crois : que vous le vouliez vraiment. Parce que chaque instant passé avec vous est un instant magnifié, et que mon coeur vous a déjà cédé.
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Message par Coldris de Fromart Ven 2 Avr - 22:48


C’était vrai. C’était gentil de sa part bien sûr, mais c’était vrai. Simplement, il ne lui avait pas précisé qu’il avait menacé le Directeur et qu’il l’avait poussé dans ses retranchements ni qu’il avait hésité à l’emmener le jour même. Il serait toujours en vie. Mais bien sûr les regrets étaient inutiles en l’état, ce n’était pas ce qui effacerait sa mort. Ferait-il mieux la prochaine fois ? Peut-être. Il n’avait pas particulièrement envie de réitérer l’expérience. Il garda donc le silence, la laissant à ses espérances pour ne pas la décevoir.

L’inhumation, son discours et toute la démonstration qui l’accompagnerait auraient lieu mardi. Il acquiesça. Il fut soulagé de savoir qu’elle ne viendrait pas. Elle n’aurait pas à voir l’homme d’État à l’œuvre. Elle n’aurait pas à le voir utiliser la mort d’un homme pour servir les intérêts de l’Empire. Il avait beau repenser régulièrement à cette funeste matinée, cela n’empêchait pas son pragmatisme politique d’y voir les avantages qui en découlaient. Quasi froidement. Froid comme la mort. Ce qu’il était : un simple cadavre. Autant qu’il serve de plus grands projets et pourquoi pas le plus grand bien ? La simple idée de la savoir ailleurs que dans la foule suffisait à l’apaiser. Il allait pouvoir se concentrer sur ce qu’il devait dire ce jour-là. Sur ce qui serait dit et répété aux quatre coins de l’Empire.
Cette cérémonie devait être mémorable.

Un exemple d’unité.
Une glorification de l’Empire.
Une démonstration du pouvoir.
Un projet d’avenir.

Mais ce n’était pas l’heure de penser à la politique impériale. Il n’avait pas énormément de temps de disponible avant son départ et il devait lui fournir les indications nécessaires à sa venue au manoir du moulin. Son interrogation le déstabilisa au point d’en oublier de reposer la plume ce qu’il ne manquait pourtant jamais de faire.

Coldris bascula sa tête contre sa poitrine et attrapa cette main qui trainait aux abords de son cou pour l’embrasser. Des mains affreuses ? Que racontait-elle donc encore ! Si elles étaient si laides qu’elle le prétendait il voyait mal dans ce cas comment définir son dos, plus labouré qu’un champ avant les semis. Aurait-il dû être rassuré par ses paroles ? Là non plus il ne voulait pas de prochaine fois. Il ne voulait plus sombrer dans les méandres fumeux du laudanum entre passé et présent, dans ce monde qui connaissait aucune douleur où tout n’était que légèreté. Il maudissait ce laudanum autant qu’il le chérissait.
Il voulait en fracasser la fiole contre les murs et finissait inlassablement par en ouvrir le flacon.


Juste une dernière fois.

Juste parce qu’il voulait dormir.

Juste parce qu’il voulait oublier.

Juste parce qu’il voulait arrêter de penser.

Juste parce que la tentation était bien trop forte pour ne pas y succomber.



Elle l’appelait, une douce voix comme un souffle qui caressait son épiderme autant que son esprit. Enjôleuse et attirante comme une femme allongée langoureusement sur son divan et dans ses bras il finissait par se laisser aller complètement.

Sa tête bascula dans cette main qui se promenait le long de sa joue. C’était si simple et si réconfortant à la fois. Elle ne parlait que de lui mais elle, en avait-elle souffert ? Peut-être. Sans doute même si elle était là. Oh oui certainement si elle avait eu si peur de le revoir tout à l’heure.

— Vous avez raison je vous ai rendu service. Vous trouviez même cela parfaitement inconfortable. La prochaine fois vous serez mieux installée, mais je vous défie de suivre plus la pièce que la première fois. Une tragédie grecque. Je vous consolerai cette fois-ci.

Ses lèvres s’approchèrent des siennes dans un bien trop chaste baiser.

Votre compagnie m’est bien trop agréable pour qu’un si petit détail me décide à l’éviter. Il faudra inventer mieux pour me faire fuir, charmant phénix.

Il tira sur son bras, recula légèrement sa chaise et la bascula sur ses genoux. Voilà qui était nettement mieux.

— Je préfère inventer de quoi vous garder à mes côtés.

Mains sur sa taille, il prit ce qu’il n’avait pas reçu quelques secondes plus tôt et l’embrassa du feu ardent qui brulait en lui. Etait-ce pour cela qu’il était un phénix ? Vulcain, phénix. Il fallait croire que son élément était le feu. Protecteur et destructeur à la fois. Réconfortant et pourtant brulant. Pensait-elle qu’il renaissait de ses cendres ? Allait-il renaitre du tas fumant qui restait au fond de son âme ? Peut-être. Peut-être qu’elle le pourrait, elle qui parvenait si bien à l’embraser de sa simple présence. Ses doigts vagabondaient et il ne quitta ses lèvres que pour dévorer ses joues, son cou, sa gorge, là dans son bureau de Cervigny. Ironie d’y être venu avec les deux femmes qu’il aimait, lui qui avait fait de cette pièce son sanctuaire. Et il aurait certainement continué à parcourir indéfiniment son corps s’il n’avait pas été rappelé au présent par le tintement du capuchon de porcelaine de l’encrier. Il croisa son regard et soupira. Jean ou peu importe son nom n’aurait qu’à attendre un peu non ? Non. Bon. Il reprit une feuille et recommença son schéma un bras enroulé autour de sa taille.

— Le fleuve. Son affluent sud. Vous le suivez jusqu’aux Arômes puis vous piquez sur l’est en longeant le ruisseau vers le moulin. Votre cocher trouvera le manoir un peu plus loin. Montrez-lui le plan, il saura vous y mener. Je ne veux pas vous compromettre en vous donnant l’adresse. Personne ne saura ce que représente ce dessin sans contexte. Et il n’y a pas mes armoiries là-bas.

Il passa une main sur sa joue avant de déposer un gourmand baiser en croisant son regard

— Eléonore, je vous…. Attendrai. A 14h. Ne soyez pas en retard.

Ce n’était pas ce qui avait failli s’échapper. Il s’était rattrapé de justesse. Il ne pouvait pas lui dire. Il ne pouvait pas. Il en avait déjà trop montré. Coldris demeura un instant interdit à la fixer sans dire un seul mot.

Prenez donc mon Coeur et conservez-le précieusement.
Vous le méritez amplement et il ne bat plus que pour vous.


Si tu existes vraiment foutu Dieu de malheur, garde-moi encore en vie.
Encore un peu.


Dis-lui de m’oublier Virgil.
Dis-lui que je suis pénible à souhait.
Dis-lui que l’éternité est trop longue pour me supporter.
Dis-lui que j’ai tous envie de vous revoir mais que c’est ici que je préfère demeurer.


Coldris de Fromart
Coldris de Fromart
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Message par Éléonore de Fromart Dim 4 Avr - 18:00

Coldris ne semblait pas convaincu par sa promesse de lui écrire s’ils devaient encore se séparer sur une incertitude… Mieux valait certes qu’il n’y ait plus de malentendus mais ce pouvait toujours arriver. Et si ça arrivait, elle ne le laisserait pas, cette fois. Elle ferait plus attention, c’était promis.

Il n’avait pas à être désolé, surtout pas. Heureusement, il acceptait sa diversion. Qui était assez sincère, en réalité. C’étaient bien les seules choses dont on ait pu le tenir pour responsable. Et ce n’était rien du tout. Ils s’étaient retrouvés, maintenant. Elle allait pouvoir rester encore avec lui. Retourneraient-ils au théâtre ensemble ? Oh, c’était bien possible. Ce ne serait pas elle qui refuserait, pour peu qu’on la laisse se blottir dans ses bras. Et s’il voulait jouer à la déconcentrer, eh bien… elle venait pour lui, de toute façon.

Après avoir capturé très brièvement ses lèvres, elle lui assura que cela ne suffirait pas à la chasser. Ni l’incapacité de se concentrer, ni les dérapages qui l’expédiaient dans un lourd sommeil, ni tous les autres défauts qu’il pourrait bien s’inventer. Tout imparfait qu’il fut, elle l’aimait. Même si elle n’avait pas le droit de lui dire, même si elle savait que ce ne serait jamais réciproque et qu’il manquerait toujours cet écho pour la conforter. Elle ne voulait plus le quitter. Elle voulait que ce dernier jour ne s’achève pas trop tôt. Elle voulait continuer à disperser ses ténèbres et à l’apaiser, s’il était vrai que sa présence avait un tel effet, parce que même si ce n’était rien qu’un tout petit peu, il le méritait mille fois.

Susaut lorsqu’il l’attira sur ses genoux. C’était la qu’il voulait qu’elle soit. Elle se serait bien levée juste pour qu’il n’ait pas le dernier mot si facilement. L’ennui, c’était qu’elle était bien là. Et, attendrie par ses paroles, elle ne trouva pas la force de s’échapper avant d’être submergée par la fougue de son baiser.

Fougue toute rendue malgré les rappels à l’ordre qui tintaient dans son esprit. C’était déraisonnable, furieusement déraisonnable. Se rendait-il compte qu’il la mettait au supplice ? Comment était-elle censée conserver ses esprits ? Il savait qu’elle ne voulait que rester, et il ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. S’il tenait tant à la garder qu’il le prétendait, il aurait dû comprendre qu’elle ne pouvait pas non plus faire n’importe quoi et qu’elle prenait déjà tous les risques. Mais elle n’avait pas le droit de lui reprocher ça. Sa volonté n’avait qu’à être moinds friable.

Son regard se teinta d’une pointe de sévérité lorsque celui de son irrésistible phénix l’appela à rester. Oui, elle était horriblement rabat-joie, et ennuyeuse, et désespérément agaçante, elle le savait. Elle le serait moins samedi, lorsque les détails triviaux de type précautions malheureusement indispensables seraient réglés… Et puis, d’une certaine manière - un sourire espiègle se dessina tout seul - cela avait quelque chose d’amusant de le faire languir encore un peu.

Alors qu’elle écoutait avec attention les informations qu’il lui fournissait sur le lieu de leur prochain rendez-vous, elle se demanda s’il ne risquait pas d’être le dernier… Il y comprendrait surement qu’elle ne lui servait à rien. Cette fois, ou celle d’après peut-être… De toute façon, elle ne comprenait rien à ce qu’il se passait.

— Je m’en souviendrai, confirma-t-elle avant qu’il ne l’embrasse une nouvelle fois, plus sage tout de même. Elle le trouverait bien son fameux manoir.

— Eléonore, je vous...

Elle soutenait son regard. Il… ? Elle acquiesça. Quatorze heures, c’était parfait. Elle n’avait pas pensé qu’il la convierait si tôt, mais elle y serait. Elle sourit, plongée dans ses yeux si bleus, si hypnotiques qu’il semblait impossible de les quitter.

— J’y serai, promit-elle.

Un dernier baiser. Juste de quoi se donner la force de tenir jusqu’à samedi. Elle décompta silencieusement à partir de trois. Ceci fait, elle se leva. Un pas pour s’éloigner, puis… Elle revint et saisit sa main pour qu'il la suive :

— N'aviez-vous pas gagné le droit de me raccompagner à ma voiture ?

Encore quelques instants, rien que quelques instants à grapiller avec lui. Il lui manquait déjà tant. Samedi pour la prochaine éclaircie. Ce serait si loin...
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