[le 24 novembre 1597] - Prudence est mère de sûreté [Terminé]

Les dangers de l'amour. Comment pouvait-on faire en sorte que de si doux sentiments puissent représenter un danger? Quel Dieu assez fourbe avait bien pu inventer cela en même temps que les règles qui régissent leur vie? Dieu était amour non? Alors pourquoi ? Pourquoi? Elle ne trompait personne, elle n'aimait que lui. Son mariage... Ce n'était qu'une alliance politique. Rien de plus qu'un vulgaire traité commercial. Et quoi, pour cela on l'enverrait en Enfer? Qu'ils le fassent donc. Le seul supplice qu'elle redoutait était son absence.

- Et bien je vous garderai à mes côtés pour l'éternité. son sourire malicieux disparut alors qu'elle frottait le bout de son nez contre le sien Mais... N'est-ce pas déjà le cas, mon beau Roi?

Puisque c'était bien pour cette raison qu'il était en train d'endurer une pénible scéance d'habillage: pour être à ses côtés. Il n'y aurait qu'une petite porte pour les séparer. Une seule petite porte à pousser pour avoir le privilège de le voir à son réveil. Elle avait conscience que tout ne serait pas si beau, et si simple une fois sur place mais pour l'heure, il n'était pas question de s'en inquiéter.

Elle préférait de loin, réfléchir à comment faire pour obtenir une démonstration d'acrobatie ainsi qu'une leçon en bonne et dû forme. Son Roi était décidément plein de ressources. Elle a ait l'impression qu'elle ne pourrait jamais parvenir à le connaître entièrement tant il recelait de petits secrets. Sa vie semblait bien insignifiante en comparaison.

Elle eut tout le loisir de méditer sur l'importance des mots et sur le silence.


L'interlude prenait fin. Mais sa motivation n'avait de motivation que son nom. Ils étaient là, enlacés sur le lit. Si bien, l'un contre l'autre. Qu'aurait donc pensé leurs deux amis s'ils les avaient ainsi surpris? Elle n'osait y penser.
Sylvère la serrait toujours plus fort contre lui. Il avait beau rejeté la faute sur elle, il ne semblait pas plus déterminé qu'elle. Alors elle l'embrassa, pour emporter le goût de ses lèvres avec elle, jusqu'à la malle.

Elle l'aida à enfiler les bas puis noua les jaretières alors qu'il commentait d'un ton badin ses propres compétences d'habilleuse.

Elle était déjà en train de rougir, plus à la scène qui s'imposait dans son esprit qu'à ses paroles lorsque prise de surprise, il en profita pour lui voler un baiser qu'elle lui rendit.
Avec les intérêts, bien évidemment.

Elle éclata de rire à sa remarque avant de déposer un rapide petite baiser de papillon sur ses lèvres.

-Ne vous en faites pas pour cela, mon charmant Roi, ces robes sont si serrées que cela ne choquera absolument personne ainsi. Surtout en plein hiver où les gorges sont soigneusement cachées. En revanche, Elle fouilla dans sa poche pour en extraire un médaillon de la Sainte Vierge Prudence ne saurait se passer de ceci.

Elle lui attacha autour du cou. Il était fin prêt si l'on exceptait le manteau et les chaussures.

-Vous allez bientôt pouvoir ajouter un nouveau talent à votre belle collection : celui d'effectuer une parfaite révérence.

Elle lui montra l'exemple, s'inclinant avec grâce et délicatesse dans un geste parfaitement fluide.

- A votre tour, mon Roi.

Kalisha frottait son petit nez contre le sien. Oui, bien sûr, il ne pouvait déjà plus se passer d'elle. Néanmoins, à chaque seconde qui passait, à chaque petit détail qu'il découvrait, il l'aimait un peu plus. Et c'était tellement merveilleux qu'il espérait que cela ne s'arrête plus jamais.

Une chose était sûre : elle semblait décidée à en apprendre davantage sur ce qu'il avait pu apprendre en traînant dans la rue. Marcher sur les mains n'était qu'une chose parmi tant d'autres, qu'il se ferait un plaisir de lui apprendre si elle lui en donnait les moyens. Ce dont il ne doutait pas une seule seconde. Après tout, elle détenait autant de ressources qu'elle pouvait le vouloir.

Reprendre s'avérait plus difficile que prévu. Il avait eu la certitude que s'arrêter était une erreur, que recommencer la séance de mode serait une torture après quelques instants de répis, mais il l'avait fait quand même. Non pas qu'il regrettait de pouvoir l'embrasser encore une nouvelle fois, avant qu'elle ne se relève, loin de là. Mais à présent, il n'était plus de se languir.

Alors elle l'aida à enfiler bas et jarretières – ce qu'il aurait été bien incapable de faire seul. Il n'y avait pas de doute à avoir : sans elle, il aurait été bien perdu pour se vêtir. Mais enlever des vêtements était toujours une tâche plus aisée que les enfiler et de cela au moins, il se sentait capable. Et sans lui laisser le temps de rougir, il était déjà sur elle pour l'embrasser. Chose qu'elle lui rendit largement.

Quand elle finit par reculer, ce ne fut que pour éclater de rire au problème qu'il soulevait – problème dont il se souciait vraiment, soit dit en passant – et déposer un nouveau baiser sur ses lèvres, si rapide qu'elle le toucha à peine.

En tout cas, elle semblait confiante, ce qui le rassurait. Si personne ne s'en rendrait compte, alors il n'y avait pas à s'en occuper. Il n'allait pas s'en plaindre non plus, d'ailleurs. Elle fit jaillir à ce moment-là un médaillon au motif religieux en ajoutant cependant :

- En revanche, Prudence ne saurait se passer de ceci.

Elle le lui mit autour du cou et Sylvère le prit entre ses doigts pour l'observer plus attentivement. Le tout avec un air mi-figue, mi-raisin. Avant de pousser un soupir et de le laisser retomber au creux de son sternum.

- Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire, je vous le demande, conclut-il avec un air ronchon, qui n'avait strictement rien à voir avec son état de pensée actuelle.

Vient ensuite la seconde étape, tout aussi que la première : le travail du rôle. Toutes les robes du monde n'y feraient rien s'il ne se comportait pas parfaitement comme une dame de compagnie. Tandis qu'elle lui montrait l'exemple, avec son mouvement maîtrisé à la perfection et si fluide, Sylvère se perdit quelques secondes dans ses pensées.

Jusqu'à ce que Kalisha reprenne à voix haute, le tirant de ses réflexions qui l'avaient mené loin, très loin, de cette révérence.

- A votre tour, mon Roi.

Il eut un sourire mi-contrit, mi-amusé, sans même chercher à cacher qu'il n'avait ni regardé, ni écouté pour répondre :

- Excusez-moi, un papillon m'a distrait.

Un sourire équivoque avant d'ajouter aussitôt :

- Recommencez, cette fois, je suis tout à vous, ma reine.

Tout à elle.
Comme les minutes précédentes.
Et celles qui suivraient.

Alors, il rectifia :

- Ou devrais-je dire : tout à votre révérence.

De toutes les choses dont elle avait dû le vêtir, ce ne fut ni le vertugadin, ni le corset, ni même les jarretières qui le dérangèrent le plus, mais un simple médaillon. Il observa attentivement avant de pousser un soupir agacé. C'était pourtant bien lui qui était déguisé en curé deux jours plus tôt avec un chapelet autour du cou? Quelle différence y avait-il ? Ce n'était qu'un costume de plus.


Et ce qui importait était le soin apporté aux détails tel que celui-ci.

Qu'aurait été une pieuse dame de compagnie sans médaillon ?

- Ce n'est ni plus ni moins qu'un ornement.

A croire qu'il risquait de finir calciner si l'effigie avait le malheur de toucher sa peau.

- La foi est la meilleure couverture qui soit je vous assure. Qu'importe ce que l'on en pense. Les gens pieux sont Insoupçonnables.

Kalisha lui fit ensuite une démonstration de la révérence qu'il allait devoir effectuer, mais lorsqu'elle se releva, elle nota non sans froncer les sourcils que son esprit semblait parti bien loin

- Vous allez devoir vous concentrer, mon beau Roi. Nous n'avons pas beaucoup de temps pour achever votre préparation. Et...

Un sourire malicieux s'invita sur son visage où pétillaient déjà ses jolies yeux bruns.

... Plus vite nous pourrons nous amuser!

Elle posa.un rapide baiser sur sa joue pour le motiver et se remit en place, soulevant sa robe afin qu'il puisse bien voir le mouvement de ses pieds.

- Vous voyez? Il faut reculer votre jambe gauche comme ceci tout en vous abaissant légèrement. Allez-y, montrez-moi.


Elle se plaça en face de lui et attendit qu'il s'exécute. Même ainsi vêtu, il restait le plus beau des brigands, le plus beau des rois et le plus beau des curés. Et même la plus belle des dames de compagnie qu'elle n'aurait jamais.

Le déguisement, bien que très encombrant, ne le gênait pas vraiment. Pas plus que le médaillon. Tout cela faisait partie du costume. Il fallait que tout soit parfait, et pour que tout soit parfait, les petits détails étaient les plus importants. Ceux qui faisaient que sa couverture tiendrait face aux yeux inquisiteurs. Et puis, il n'était plus à un médaillon près...

Non, ce qui le faisait réellement soupirer, bien au-delà de toute les tenues possibles et imaginables, était une toute autre chose. Cette perspective de revenir – et cela pour un temps indeterminé – à tout ce qu'il détestait, purement et simplement.


Tout cela.

C'était pour le protéger, il l'entendait bien. Si c'était demandé par Kalisha par ailleurs, il le faisait volontiers. Mais il ne pouvait faire taire cette petite voix dans le fond de son esprit qui regrettait déjà sa forêt, alors qu'il ne l'avait même pas encore quittée. Cette petite voix qu'il lui rappelait qu'il serait peut-être pris avant de pouvoir y revenir. Il serait peut-être imprenable dans son déguisement de dame de compagnie, le danger demeurerait là.

Elle refit la démonstration de la révérence en lui intimant de se concentrer. Cette fois-ci, il fit attention à en noter chaque détail. Elle avait tout juste relevé sa robe pour laisser voir le mouvement de ses jambes – chose sur laquelle il s'arrêta une seconde de trop – mais hocha la tête.

Finalement, elle se plaça devant lui, signe que c'était à son tour. Alors il se redressa, se bataillant quelques secondes avec toutes les couches de tissus puis reproduisit l'élégante révérence qu'elle avait fait. Certainement avec plus de maladresse qu'elle, mais il jugeait cela pas trop mal pour une toute première. Il redressa les yeux pour quêter sa réaction.


L'idée de passer les derniers jours de sa vie loin des arbres faisait peser un poids dont il n'avait pas l'habitude sur ses épaules. Il faisait entièrement confiance à Kalisha. Plus que cela même. Il mettait sa vie – littéralement – entre ses mains. Mais avant de le faire totalement, avant de sauter dans le vide, il avait une dernière demande à faire. Ce qu'il fit d'un ton très sérieux :

- Kalisha. Je vous suivrais partout sans hésitation mais avant... faites-moi une promesse, s'il vous plaît.

Il releva les yeux vers elle, glissa ses mains dans les siennes et demanda :

- Promettez-moi que je reviendrai.


Il avait besoin d'en être sûr, avant de délaisser cette vie qu'il aimait pour quatre murs, un toit qui cachait les étoiles et des murailles.

Elle avait bien senti que ce médaillon avait réveillé quelque chose en lui, mais quoi? Détestait-il à ce point la religion ? Elle ne connaissait finalement que peu de choses de lui. Certes bien plus que la vieille, mais toujours moins que demain.
Elle n'avait fait qu'effleurer une minuscule feuille de l'arbre majestueux qui le composait.

Avait-elle pu avoir des paroles malheureuses ? Elle repassa ces derniers mots sans pouvoir noter quoi que ce soit.

Pouvait-il avoir peur, être inquiet?


Elle effectua une révérence mais il n'avait rien suivi, ce qui était pour le moins étrange. Cela commençait presque à l'effrayer alors elle tenta de se raccrocher à la légèreté habituelle pour lui faire oublier le temps d'un instant ses pensées.

Cela pouvait paraître futile d'apprendre à faire une révérence mais toute femme digne de ce nom apprenait cela dans sa jeunesse. Tout comme le médaillon, il en allait de sa couverture.  Elle recommença donc en y ajoutant des explications puis ce fût à son tour. Il n'était pas à l'aise avec toutes les couches de tissus mais pour une première fois c'était plutôt encourageant. Elle ne doutait pas qu'il maîtriserait rapidement le geste. Elle acquiesça de la tête d'un sourire. Mais son regard... Son regard ne pétillait pas comme d'habitude. Il était perdu, distant.

Elle baissa les yeux ne sachant quoi faire en cet instant si étrange, lorsqu'il prit ses mains entre les siennes. Naturellement, son regard chercha le sien pour s'y accrocher.

- Kalisha. Je vous suivrais partout sans hésitation mais avant... faites-moi une promesse, s'il vous plaît.

Elle aussi, lui suivrait partout. Elle lui faisait entièrement confiance. Elle aurait pu traverser l'un de ces ponts suspendus au dessus du vide les yeux bandés si Sylvère le lui avait demandé. Car elle le savait : jamais il ne la mettrait en danger.

- Promettez-moi que je reviendrai.

Ses paroles sonnèrent comme le glas dans son âme.
Une désagréable impression s'empara d'elle.
Ses entrailles se nouèrent.
Sa bouche devenait sèche.
L'air semblait disparaître.

Bien sûr qu'elle avait conscience du danger qui rôdait mais l'entendre ainsi de sa bouche. Lui demander de lui promettre une telle chose...

C'était comme tomber dans un abysse sans fond.

Comment pouvait-elle le regarder dans les yeux et lui promettre sa sécurité absolue? C'était chose impossible. Il y avait tellement de paramètres, tellement de choses qui pouvaient mal tourner. Elle détailla la grotte tout autour d'eux, puis la forêt.
Elle ne pouvait s'imaginer qu'il n'y reviendrait pas.
Qu'ils n'y reviendraient pas.

Elle passa ses bras autour de son cou et déposa sa tête contre son épaule. La perspective d'une telle fin... Elle ne pouvait pas l'envisager.


Puis après quelques instants, elle se recula pour poser son regard dans le sien. Les promesses ne pouvaient être faîtes que comme ça:

- Je vous promets de faire tout mon possible et plus encore pour que vous puissiez revenir dans votre Royaume.

Elle aurait pu lui promettre qu'il reviendrait... Qu'elle apporterait sa dépouille pour qu'elle repose au pied du grand chêne aux cloportes pour l'éternité. Elle aurait pu. Car c'était ce qu'elle ferait si..

Mais cette issue restait obstinément hors de sa portée.
Il ne pouvait pas mourir.
Pas lui.

C'était beaucoup demandé. Le danger était présent et les meilleurs plans du monde n'aurait su l'anéantir totalement. Il en resterait toujours un peu, caché à un coin de rue. Si peu qu'on l'oubliait presque, mais il était bel et bien là.

A vrai dire, la vie était entourée de dangers et les imprévus qui la constituaient, pouvaient tout faire basculer du tout au tout. Il suffisait d'une chute, d'un coup sur la tête un peu trop fort ou même d'un mauvais rhume. L'existence tenait à peu de choses, en fin de compte. Même la personne la plus prudente n'était pas à l'abri d'un croche-pied du destin.

C'était bien pour cela qu'il fallait prendre chaque jour comme s'il était le dernier. Pour cela également, parce qu'il pouvait se passer tout et n'importe quoi, n'importe quand, qu'il fallait profiter du temps qui était offert – même quand il semblait infini. Pourtant, il y avait des instants où il fallait aussi prendre le temps de réfléchir, de réaliser le danger qui guettait pour mieux l'appréhender, pour mieux se recentrer.

Ce moment-là était venu pour lui. Pour eux. Le moment des promesses avant le grand saut.

Alors, certes, il lui demandait l'impossible – sauf que rien n'était impossible. Si les choses tournaient mal, qu'importe dans quel état il revenait. Tant qu'il revenait. Même s'il était alors en petits morceaux. C'était aussi cela qu'il lui demandait à demi-mots : de ne pas le laisser pourrir ailleurs que dans le sol de sa forêt. Et il savait qu'elle l'avait compris, à la manière dont le vide se fit sur son visage.

Elle posa sa tête contre son épaule, en enlaçant son cou. Il la serra contre lui. En guise d'excuses. Mais il fallait qu'elle promette, qu'il l'entende de sa bouche. Ils restèrent quelques instants ainsi, dans les bras l'un de l'autre, avant qu'elle ne recule et que leurs regards se croisent.

C'était ainsi que l'on faisait les promesses. Les yeux dans les yeux.

- Je vous promets de faire tout mon possible et plus encore pour que vous puissiez revenir dans votre Royaume.

Sylvère hocha la tête. C'était tout ce qu'il avait besoin d'entendre. Il lui faisait aveuglément confiance. Et si elle le disait, alors il la croyait. Il laissa un doigt glissé contre sa joue et répondit alors doucement :

- Ce n'est pas mon Royaume, ma belle reine. C'est le nôtre.


Il lui sourit. Il posa son front contre le sein, avant de reculer et de reprendre, avec son air taquin revenu.

- J'ai une autre demande à vous faire avant de vous laisser tranquille.

Une petite pause, à peine plus de quelques secondes. Finalement, son sourire revint définitivement sur son visage, chassant toute trace d'inquiétude ou de doute. Il n'avait plus lieu d'en avoir, puisqu'elle avait promis. Et qu'il savait qu'elle tiendrait sa promesse à tout prix.

- Est-ce que je pourrais vous coiffer ?

Il eut un immense sourire. Il ne savait pas faire, non, mais toute chose s'apprenait et pour avoir les mains dans ses cheveux en toute impunité, en tant que dame de compagnie, il était prêt à tout.

Hyriel avait suivi Cassandre en alternant soupirs amusés et fausses réprimandes, au moins durant la première partie. Mais cette petite, vraiment. Elle était adorable mais heureusement qu’elle ne faisait ça que pour s’amuser et qu’elle savait être sérieuse. Un peu comme le Sylvère, à ce que la légende racontait. Finalement, Cassandre se lassa et Hyriel put tranquillement continuer son chemin. Ses trois amis en profitèrent pour se rapprocher, ne craignant plus d’avoir la petite sautillant dans leurs jambes. Puis c’est toujours plus facile de charrier quelqu’un quand il est là, ce qu’Hyriel expérimenta avec le sourire.
Il s’arrêta toutefois et s’affliegea en voyant Cassandre triste puis en larme. Il se précipita auprès d’elle, s’assit et la prit dans ses bras pendant que ses compagnons venaient s’agenouiller autour d’eux. Il ne savait pas pourquoi elle pleurait et il ne voulait pas demander, pour peu qu’elle ne veuille pas en parler, alors il se contenta de la bercer en lui chuchotant de temps en temps des mots réconfortants.

Kalisha entend du bruit à l'entrée de la grotte de Sylvère.

Le membre 'Kalisha de Monthoux' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

---

'Audace' :

La promesse qu'elle venait de faire à Sylvère jeta un froid sur son âme. Elle avait désormais promis, elle devrait s'y tenir. Coute que coute.
Elle le ramènerait vivant... Ou mort. Dans leur royaume. Elle esquissa un sourire malgré tout.

Il y avait toujours une solution à chaque problème. Toujours. Et déjà son esprit commençait à se mettre en branle pour trouver celles qui pourraient l'aider à tenir cette promesse.

Alors qu'elle avait son regard perdu dans le sien, la première évidence lui sauta aux yeux: elle ne les laisserait jamais torturé Sylvère.
Jamais
Et la solution à cela était fort simple: si tout était perdu, alors elle le tuerait pour qu'il n'ait pas à souffrir. Elle tiendrait ensuite sa promesse, et le ramènerait au pied de l'Arbre aux cloportes. Avant d'aller le rejoindre à son tour.

Subitement il recula avec ce sourire... Quoi? Qu'est-ce qu'il allait encore inventé? Elle le savait déjà: ce serait incongru... Et effectivement... C'était le cas.

Elle éclata d'un rire cristallin, oubliant immédiatement la profonde tristesse de ces dernières minutes.

- Me coiffer?! Et bien... C'est d'accord! Mais seulement si vous me promettez de ne pas emmêler le peigne dans mes cheveux! Vous prendrez quelques cours avec Phaïdée avant tout de même!

Des branches qui avait craqué dans les buissons précédemment, elle n'avait rien entendu, bien trop prisonnière de la bulle qu'ils avaient créé autour d'eux.

Elle lui avait promis. Elle lui avait dit ce qu'il avait besoin d'entendre, et maintenant que cela était fait, alors il n'y avait plus de raison de s'y attarder. Son sourire revint invariablement sur ses lèvres, et il recula.

Aurait-il le droit de la coiffer ? Voilà une question vraiment importante ! Et elle eut le mérite de la faire rire de bon coeur. Et qu'est-ce qu'il aimait ce rire cristallin qui était le sein ! Toute la joie était revenue dans la petite grotte, comme si elle n'en était jamais partie. Et c'était, avant tout, ce qui était fantastique quand il était avec elle.

Il leva les mains, comme pour prouver son innocence en répondant d'un air faussement offusqué :

- Mais enfin, ma reine ! Je ferai très attention !

D'un autre côté, il n'avait effectivement jamais coiffé les cheveux de personne et hormis couper les siens durant les cinq dernières années, avec le même couteau qui lui servait à égorger les lapins, c'était là les seules compétences qu'il avait en matière de cheveux.

Ce fut d'un air malicieux qu'il lui fit la promesse qu'elle demandait :

- Je vous promets, noble reine, de ne pas emmêler le peigne dans vos cheveux... – son sourire s'aggrandit encore – Ou alors de le faire avec la plus grande douceur possible !

Ce fut sur ces propos qu'il lui adressa un sourire... et que du mouvement attira son attention en dehors des parois humides, la ramenant au monde présent. Il eut un infime froncement de sourcils. Un animal ? Ça ne ressemblait pas aux bruits que pouvait faire les animaux. On aurait plus dit... des murmures humains. Alors quoi ? Il s'approcha pour escalader discrètement – ce qui n'était pas très simple en robe, soit dit en passant.

Là, dehors, se tenait Cassandre. Et Hyriel. Il se détendit immédiatement, soulagé, et s'extirpa définitivement de la robe, sans grande dignité entravé qu'il était dans les couches de vêtements. Il aperçut alors les petites larmes qui glissaient sur les joues de Cassandre. Et ne put retenir un soupire pour lui-même.

Il savait bien ce qu'il se passait. Ce qu'elle avait entendu. Et il comprenait bien ce qui l'inquiétait. Elle n'aurait pas dû entendre cela. Il resta en retrait, sans intervenir, pour leur laisser l'espace dont il avait besoin. Il tendit la main à Kalisha pour l'aider à monter.

La poitrine de Cassandre étouffait sous le poids de l'angoisse et de la culpabilité que cette situation lui faisait vivre : Sylvère, Hyriel et ses amis, ils allaient tous avoir la douleur d'abandonner leurs bois, leurs cachettes, leur cabane. Pour essayer d'échapper à des dangers et pour combien de temps ? Maintenant, ils étaient des fugitifs. Ils devaient être si tristes et inquiets. Est-ce qu'elle arriverait à les protéger ? Elle sanglotait en silence, dissimulée dans sa cachette, lorsque des bras vinrent brusquement l'envelopper. Dans un réflexe instinctif, l'enfant se cambra et s'apprêta à décocher un coup de poing ou de pied, selon ce qui serait le plus adapté. Elle se détendit cependant en découvrant Hyriel.

"Faut pas venir comme ça. C'est dangereux de surprendre les gens."

Elle eut conscience que le guérisseur avait dit quelques mots. Des paroles de réconfort. Elle était gênée d'avoir été surpris dans un moment de faiblesse et se releva aussitôt. A ce moment apparaissait, en plus, Sylvère qui aidait Kalisha à sortir de la grotte. Pour ne pas se laisser voir en position vulnérable, Cassandre appela :

"Eh bien, il faut se dépêcher, quoi ! Hein grande sœur ? La grosse garce doit pas aimer le retard !"

Elle croisa un instant le regard de son grand frère et baissa la tête.

"Et c'est pas un gros mot, garce ! Et puis, c'est la vérité ! Je l'ai vue deux fois ! Elle dispute sans arrêt ses esclaves et aussi les domestiques comme du poisson pourri ! Elle est méchante et cruelle !"

La fillette releva la tête et eut un fou rire à découvrir Sylvère habillé avec une robe. Son regard se tourna vers Hyriel.

"C'est encore mieux que les couronnes ! Je sais que c'est pour as survie mais quand même il a l'air bête, hein  ?"

Hyriel esquissa un sourire à la remarque de Cassandre.

« Je sais mais je savais aussi que tu ne me ferais pas de mal. »

Il la laissa se dégager, comprenant qu’elle ne devait pas aimer être vue en train de pleurer, ce qu’il pouvait comprendre. Il se releva avec l’aide de ses compagnons et sourit en voyant arriver Sylvère, ou plutôt Sylvia ? Il était si jolie… Il s’amusa aussi de la justification de Cassandre avant de soupirer à la description. Voilà qui était engageant… Il resta un instant figé à la remarque finale de Cassandre avant d’éclater de rire, de même que ses compagnons.

« Disons que c’est déjà mieux apprêté que quand il était la douce Sylvia. Je trouve, pour ma part, que cela lui va à ravir ! »

Il assortit le tout d’un immense sourire à l’intention de cette chère Sylvia.

Il avait beau promettre d’user de la plus grande douceur, elle n’était pas totalement sûr de lui faire confiance avec un peigne entre ses doigts. Cela ne l’empêcha cependant pas de rire à ce serment solennel (ou presque). Après l’émotion qui l’avait saisie quelques minutes plus tôt, c’était une bénédiction que de pouvoir rire ainsi.

Sylvère se tourna subitement vers l’entrée de la grotte. Avait-il entendu quelque chose ? Elle lui emboita silencieusement le pas. Une chose était certaine, il n’avait pas la même agilité engoncé dans les lourds tissus. Une fois hissé sur les rochers se trouvant au bord de la grotte, il lui tendit la main afin de l'aider à s’extirper du gouffre.

Ce fut là qu'elle aperçut Hyriel -doté d'une charmante couleur-, ses trois comparses et la petite Cassandre. Elle n’entendit pas leurs remarques sur Prudence et courut se jeter dans les bras d’Hyriel pour le saluer. Elle ne l'avait pas revu depuis son départ. Il avait beau être taquin, il n'en demeurait pas moins attachant.  Alors qu'elle était suspendu à son cou, elle en profita pour lui demander dans le creux de l'oreille :

- Vous pourriez me fournir un poison fulgurant et indolore n'est-ce pas ?

Elle se recula et croisa son regard avant d'ajouter :

- Je vois que vous êtes prêt. J'irai ranger votre masure avant notre départ. Vous n'aurez qu’à me dire ce que vous voulez emporter et les garçons viendront m’aider.

Garçons qu'elle n’avait pas salué et qu'elle s’empressa de faire tout en s'excusant de sa maladresse.

Bien sûr, Cassandre ne voulait surtout pas donner l’air de se trouver en position de faiblesse. Quelques secondes plus tard, elle était de nouveau debout, toute émotion négative effacée du regard. Sylvère ne fit pas la moindre remarque, et il fit même précisément comme s’il n’avait rien remarqué. Ce n’était pas une honte, de pleurer, pourtant. Mais il avait bien compris que pour la petite princesse forestière, c’était la pire des faiblesses possibles.

Il soupira imperceptiblement… avant d’ouvrir de grands yeux. La grosse… quoi ?! Il allait s’en offusquer, mais Cassandre savait très bien ce qu’elle avait dit, de toute évidence, car elle s’exclama aussitôt :

- Et c’est pas un gros mot, garce !

Sylvère eut un geste d’impuissance et répondit aussitôt, d’un air offusqué :

- Mais bien sûr que si, c’est un gros mot ! Je… (Comme il ne trouvait pas ses mots, il eut un geste de main désespéré.) Cassandre ! Mais c’est pas la question ! Que ce soit la vérité ou non, je m’en fiche ! Ça pourrait très bien être la chose la plus vraie qui soit, ça reviendrait exactement au même !

C’était une question de respect. De respect des autres, de soi-même, des mots. Les hommes ne parlaient pas pour s’insulter. Les mots étaient précieux. Ils avaient un pouvoir, un pouvoir sans doute plus puissant que n’importe quelle force physique. Quand Cassandre comprendrait-elle que ce qu’elle disait avait des incidences ? qu’elle ne pouvait pas lancer des phrases ainsi, au petit bonheur la chance, en pensant que cela n’aurait aucune conséquence ? Il secoua la tête, sans insister.

La conversation dériva vers sa nouvelle tenue. Il avait l’air bête ? Hum, oui, peut-être un peu. Il n’allait pas le nier. D’autant que son aisance de mouvement n’était pas encore au point. Hyriel lui adressa un immense sourire, en commentant à son tour. Ce en réponse de quoi, Sylvère bougonna :

- J’aimerais bien t’y voir, toi. Et nos couronnes étaient très bien.

Néanmoins, il leur adressa une petite courbette, digne d’une vraie dame de compagnie, comme Kalisha lui avait montré quelques temps plus tôt dans la grotte.

Sur ce, Kalisha se précipita soudainement dans les bras de Hyriel pour le saluer. Finalement, elle recula et concluant que tout le monde était prêt, que le temps de partir était arrivé. Une brève seconde, il se tourna vers les arbres. Avant de revenir vers Kalisha :

- Juste encore dix minutes, s’il vous plaît, demanda-t-il. Venez me chercher quand il sera l’heure.

Et sans attendre la réponse, il fila vers la rivière où il s’était baigné quelque temps plus tôt. Il avait besoin d’être un peu seul, juste le temps d’une poignée de minutes, le temps de profiter une dernière fois du calme de la forêt. Pour lui dire adieu.

Quand il fut assez loin pour ne plus les entendre, il prit appui sur un rocher, pour atteindre la première branche d’un arbre et se hissa dessus à la force des bras. Il ne chercha pas à monter plus haut, avec les épais tissus, il n’aurait pas pris ce risque.

Il s’assit juste ici, face au courant de la rivière, et ferma les yeux, les paumes posées contre l’écorce rugueuse. Il avait beau faire confiance à Kalisha, une confiance aveugle, il ne pouvait totalement faire taire cette petite voix au fond de sa tête.

Peu après les éclats de rire et les moqueries qui lui étaient venus à sa découverte de al tenue improbable de Sylvère, Cassandre attendait à présent l'opinion de Hyriel pour mieux s'y raccorder. Sylvère, mis à part les gros mots et quelques attitudes provocatrices, rien ne pouvait le blesser et il pardonnait tout. En revanche, elle ne savait que peu de choses au sujet de Hyriel et il semblait quand même exigeant. Et lui, elle ne voulait surtout pas le vexer.

"Ah oui... C'est vrai maintenant que tu le dis ça ne lui va pas si mal."

A son étonnement, Kalisha jaillit pour prendre Hyriel dans ses bras. sa spontanéité affective lui semblait étrange. Et puis, de la part d'une adulte, c'était un peu déplacé. Engin, elle était amoureuse de Sylvère. Donc elle n'était pas complètement adulte. En revanche, Cassandre tiqua sur le mot Masure. Comment ça la maison de Hyriel serait une masure. Elle fronça les sourcils, sévère.

"La maison de Hyriel, c'est pas parce que c'est pas un château que c'est une masure ! Elle est très bien et très confortable ! Et même que c'est la meilleure maison du monde ! Et puis, il ne doit rien rester, voyons ! Hyriel est trop doué pour laisser des traces qui pourraient l'accuser !"

Elle n'eut pas le temps de développer davantage sur l'habilité du guérisseur. elle aurait pourtant pu vanter ses talents et ses aptitudes une bonne heure. Sylvère venait de prendre la parole et la réprimandait su l'utilisation du mot garce. Elle se retint de lever les yeux. Tout ça pour une grosse truie qui n'avait absolument aucun respect pour les esclaves et même ses employés.On devait le respect à tout le monde ? Pour elle, le respect se méritait et les gens comme cette Marthe ne l'aurait jamais. A part, un respect de façade si elle devait s'adresser directement à elle, pour éviter de se faire prendre. Mais dans sa tête, elle continuerait à l'insulter de tous les noms possibles. Sylvère et tous ces beaux discours n'y changeraient. Cassandre fit cependant semblant de comprendre la leçon que lui adressait Sylvère et baissait la tête, comme si elle aurait été vraiment soucieuse de l'entendre.

"Pardon, Sylvère. Ça m'a échappé sous le coup de l'émotion. C'est quand en allant voir hier grande sœur, je l'ai aperçu disputer un esclave comme si c'était une crotte. Et elle l'a puni sans preuve à un jeûne de deux jours. alors ça m'est resté en travers de al gorgé. Je suis désolée."

Elle garda les yeux baissées en murmurant ce mensonge. Sylvère devrait se laisser prendre et comprendre qu'elle avait lâché ce gros mot sous une émotion momentanée.

"J'essaie de plus en dire, comme j'ai promis, grand frère, mais dès ça échappe."

Peu après, Sylvère demanda à se retirer jusqu'au moment où il lui faudrait partir et Cassandre sentit brusquement toute as tristesse à l'idée de quitter as précieuse forêt. Malgré sa requête, la fillette le suivit et sentit mal à contempler sa souffrance. Il était assis sur cette branche basse, le regard abattu. Que pourrait-elle faire pour le faire sourire à nouveau ? une idée lui vint. Elle se mit à ramasser des feuilles colorées tombées ici et là puis grimpa pour rejoindre son grand frère. La fillette se colla à lui et serra un bras autour de as taille.

"Faut pas être triste, grand frère, la forêt elle sera toujours là quand tu reviendras."

S'il revenait.. Mais Cassandre comprenait que son pessimisme n'aiderait pas dans cette situation. Alors elle faisait taire ses pensées sombres pour trouver des idées qui sauraient remonter le moral. Elle sortit la collection de feuilles ramassé"es un peu plus tôt.

"Et tu pourrais apporter ça à Monthoux. Comme ça tu auras toujours avec toi la forêt d'Aiguemorte !"

Elle se mordit les lèvres puis ajouta timidement, la tête posée contre son bras.

"Je t'aime grand frère. Et c'est pas ce stupide baron qui va nous séparer, hein ! Toi, tu vas vivre longtemps ! Très longtemps !"

Ce n'était pas logique comme paroles mais elle les pensait. Et elle ne voulait pas voir Sylvère mourir. Jamais.

"De toute façon, je t'interdis de mourir ! Alors t'es obligé de revenir et donc de revenir ici un jour !"

Hyriel et ses amis sourirent et rirent sous cape en voyant Sylvère s’emporter contre le langage de Cassandre. Le pauvre, s’il croyait pouvoir raisonner cette petite… Il pouffa à sa répartie et à sa petite révérence, à laquelle il répondit par une révérence lui-même, appuyé sur une béquille. Il secoua la tête avec douceur à la correction de Cassandre. Elle était adorable, cette petite. Il ouvrit ensuite de grands yeux en voyant Kalisha se jeter dans ses bras. Certes, il était heureux de la revoir mais… elle était noble ! Les nobles ne se jetaient pas au cou des gens, en général, surtout des médecins éclopés et clandestins… Il referma un bras autour de son dos en une timide accolade et se retint d’écarquiller davantage les yeux à sa question. Il le mettrait sur le compte de sa surprise à l’accolade. Quand elle se recula, il acquiesça en souriant, inquiet tout de même, il acquiesça ensuite plus franchement, sans se formaliser du « masure ».

« C’est fort gentil à vous. »

Les trois autres, tout aussi étonnés que leur ami, lui sourirent en la saluant, maladroits quant à la manière de faire, et Guillaume osa même baiser la main de Kalisha, comme cela se faisait apparemment. Il se retourna alors vers Cassandre qui prenait la défense de sa cabane et ne put rien dire, abasourdi. Eh bien, il lui avait vraiment fait grande impression… Il hocha distraitement la tête à Sylvère et le regarda partir, inquiet. Le pauvre devait être aussi mal qu’eux à l’idée de quitter cette forêt… Il préféra ne pas retenir Cassandre et la laissa aller.

« Nous vous attendons. »

Elle pouvait lire la surprise d'Hyriel dans son regard. Était-ce par rapport à cette étreinte spontanée ou parce qu'elle lui avait demandé quelque chose de particulier? Elle n'aurait su le dire. Mais lorsqu'elle se recula, elle croisa le regard de Sylvère et son cœur se serra.

Était-ce vraiment une si bonne idée de les cacher à Monthoux ? Elle commençait à en douter. Les paroles de son beau roi firent écho à leur discussion et elle regarda disparaître impuissante, Cassandre sur ses talons.

Elle avait promis. Elle avait promis de le ramener dans sa forêt.

Lorsqu'il ne resta plus que le médecin et ses comparses à portée d'oreilles, elle put enfin s'expliquer sur son étrange demande.

- Si les choses tournent mal... Je ne veux pas qu'il souffre. Je ne veux pas qu'on l'expose en spectacle et qu'on le torture. Il ne mérite pas ça. Et personne ne le mérite. elle plongea son regard dans celui du guérisseur C'est valable pour vous aussi, Hyriel.

Elle baissa les yeux au sol. A imaginer le pire, les larmes commençaient à monter au bord de ses paupières et à menacer de déborder.

Elle laissa passer quelques minutes et le départ fut prononcé.

Il savait bien que Cassandre ne s’excusait pas vraiment. Parce que dire des gros mots était plus fort qu’elle, et qu’elle n’était pas le genre à regretter. Elle était comme cela. Se lancer dans ce débat maintenant n’aurait eu aucun intérêt, surtout maintenant où le départ approchait à grands pas et qu’il préférait profiter une dernière fois de la forêt avant de la quitter pour un temps indéfini.

Peut-être à jamais.

Comment savoir ce qui pourrait se passer, une fois qu’il serait à Monthoux ? Et si les choses ne se déroulaient pas si bien que prévu ? Après tout, il restait un homme déguisé en dame de compagnie. Si on s’en rendait compte, il pouvait se passer mille et une choses.

Ce n’était pas dans sa nature de penser que les choses se passeraient mal mais s’il ne pouvait pas le faire aujourd’hui, alors il n’aurait plus l’occasion avant un bon moment. C’était le dernier moment de nostalgie avant de retourner à la civilisation qu’il avait quittée cinq ans plutôt. Il aurait aimé penser que la compagnie de Kalisha suffirait à l’occuper entre ces murs de pierre mais il savait bien que non. Ce n’était pas de sa faute, à elle, mais il n’avait jamais trouvé quoi que ce soit d’intéressant à être dans une pièce fermée.

Assis sur la branche de l’arbre, il regardait le cours d’eau couler doucement. Soudain, une petite silhouette se glissa à côté de lui et vint s’appuyer contre son bras, en passant une main autour de sa taille. Cassandre. Il eut un demi-sourire en l’entendant. Il savait bien qu’ils pensaient tous les deux à la même chose : oui, la forêt serait toujours là… même s’il ne reviendrait plus.

Elle lui tendit soudain des feuilles qu’il prit, surpris. Il les regarda, dans ses mains. Ce n’était pas grand chose, quelques mots, quelques feuilles, mais cela suffit. Elle avait raison !

La forêt serait toujours là, quoi qu’il arrive ! Les cloportes et les arbres ne pourraient pas disparaître, le monde ne cesserait pas de tourner s’il lui arrivait quelque chose et c’était le principal. Il pourrait bien mourir que cela n’y changerait rien et que la grande ombre viendrait toujours couvrir l’humus du sol. Étrangement, cela le rassura. Le printemps reviendrait !

Il se redressa vivement, en glissant les feuilles des arbres dans ses vêtements.

- Tu as raison, petite princesse ! Quand je serai vieux, je te ferai toujours peur en descendant des arbres !

Il eut un sourire amusé et la prit dans ses bras affectueusement.

- Merci, Cassy. Merci beaucoup.

Il lui sourit encore et redescendit, avant de conclure :

- Viens, allons-y. Les autres doivent nous attendre.

Il serra une des feuilles qu’il avait gardé dans sa main en rejoignant Kalisha et Hyriel. La jeune comtesse annonça le départ.

Hyriel nota le regard de la dame de Monthoux quand elle regarda son amant s’éloigner. Il écouta alors son explication et hocha sobrement la tête.

« Je comprends. »

Il regarda ses compagnons qui affichaient tous les trois des mines sombres et soupira. En effet, ces trois là étaient trop bons et avaient trop lutté avec lui pour mériter la mort qui les attendait sûrement. Il sourit à Cassandre et Sylvère en les voyant revenir et attendit que Kalisha donne le départ pour la suivre.