[30 Décembre 1597] Récidives ?
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[30 Décembre 1597] Récidives ?
Durant de longues journées, Thierry s'était comporté sagement et n'avait en rien accompli aucun acte qui le sortait des prérogatives de sa fonction. Avant-hier, quatre pères, accompagnés de leurs familles respectives, étaient venus présenter leur enfant nés dans la nuit ou la veille pour que le prêtre le baptise. C'était bien là l'un des rares rites qu'il aimait accomplir. Tenir un de ces bébés, emplis d'innocence, qui riaient, incapables de comprendre ce qui se passait, l'attendrissait, et il veillait à ne pas trop les effrayer en enduisant leur front de la crème bénite, puis en versant l'eau sur le front.
Dans l'après-midi, le prêtre s'était employé à dire directement deux messes. Grâce à ces efforts, il avait eu la chance de dormir ans la cellule, encore enfermé, comme si la garce n'avait aucune confiance en lui, mais sans le moindre rongeur. La journée du lendemain se déroula de manière similaire sauf qu'il redit dans la matinée à des malades. Lucinde le suivit. Comme les deux gardes. Un sacré cortège ! Il se souvenait des rires et moqueries sur leur passage. Dans la chambre de la vieille Madame Midoux, qui dormait, il pensait pouvoir fuir mais la garce l'attendait derrière la fenêtre. A chacun de ses arrêts, il essaya. En vain. De retour à l'église, elle lui fit un long sermon que lui entendit à peine.
Il avait eu cependant la surprise affreuse de dormir avec cinq souris la nuit dernière.
Du nombre de fois où il avait essayé de s'enfuir.
Quelle garce !
Aujourd'hui, Thierry comptait la jouer plus finement.
Après le déjeuner, le prêtre appela sa tortionnaire d'une voix autoritaire :
"Luncinde !"
Dans l'après-midi, le prêtre s'était employé à dire directement deux messes. Grâce à ces efforts, il avait eu la chance de dormir ans la cellule, encore enfermé, comme si la garce n'avait aucune confiance en lui, mais sans le moindre rongeur. La journée du lendemain se déroula de manière similaire sauf qu'il redit dans la matinée à des malades. Lucinde le suivit. Comme les deux gardes. Un sacré cortège ! Il se souvenait des rires et moqueries sur leur passage. Dans la chambre de la vieille Madame Midoux, qui dormait, il pensait pouvoir fuir mais la garce l'attendait derrière la fenêtre. A chacun de ses arrêts, il essaya. En vain. De retour à l'église, elle lui fit un long sermon que lui entendit à peine.
Il avait eu cependant la surprise affreuse de dormir avec cinq souris la nuit dernière.
Du nombre de fois où il avait essayé de s'enfuir.
Quelle garce !
Aujourd'hui, Thierry comptait la jouer plus finement.
Après le déjeuner, le prêtre appela sa tortionnaire d'une voix autoritaire :
"Luncinde !"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Lucinde prenait l'air devant l'église, jetant de temps à autre un regard vers le chantier. Le vent était frais, revigorant, mais pas violent. Il glissait sur son visage, la laissant se perdre dans ses souvenir. Dans le rire de deux fillettes rousses qui croyaient, à l'automne dernier, pouvoir se laisser porter comme les feuilles rouges qu'elles se lançaient à la figure.
À l'appel de son nom, elle serra les dents. Qu'était-ce que ce ton ? Pour la peine, elle ne se presserait pas.
Elle était lasse. Lasse de cet imbécile dont la surveillance lui incombait, lasse de son manque de coopération, lasse de sa mauvaise volonté… Elle aurait vraiment pu lui permettre de dépasser sa peur des rongeurs, et elle l'aurait fait s'il avait mérité son soutien… Seulement voilà, rien n'y faisait. Dès qu'elle avait l'impression qu'il allait faire un pas en avant, il en faisait trois en arrière... Quelle plaie ! Et elle avait passé l'époque de la naïveté, ou son soutien était gratuit.
Alors, elle restait. Elle se raccrochait à sa résolution. Si elle ne tenait pas ici, il n'était même pas la peine d'espérer atteindre ses objectifs. Non, elle y arriverait ! Pas à pas. Jour par jour. Heure par heure. Même minute par minute s'il le fallait, elle tiendrait.
En parlant de minutes… Elle en laissa passer quelques unes avant de rentrer, sans faire mine de prêter au rat une attention particulière.
À l'appel de son nom, elle serra les dents. Qu'était-ce que ce ton ? Pour la peine, elle ne se presserait pas.
Elle était lasse. Lasse de cet imbécile dont la surveillance lui incombait, lasse de son manque de coopération, lasse de sa mauvaise volonté… Elle aurait vraiment pu lui permettre de dépasser sa peur des rongeurs, et elle l'aurait fait s'il avait mérité son soutien… Seulement voilà, rien n'y faisait. Dès qu'elle avait l'impression qu'il allait faire un pas en avant, il en faisait trois en arrière... Quelle plaie ! Et elle avait passé l'époque de la naïveté, ou son soutien était gratuit.
Alors, elle restait. Elle se raccrochait à sa résolution. Si elle ne tenait pas ici, il n'était même pas la peine d'espérer atteindre ses objectifs. Non, elle y arriverait ! Pas à pas. Jour par jour. Heure par heure. Même minute par minute s'il le fallait, elle tiendrait.
En parlant de minutes… Elle en laissa passer quelques unes avant de rentrer, sans faire mine de prêter au rat une attention particulière.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
"Lucinde !!!"
Il cria le prénom maudit une seconde fois.
Elle n'apparaissait nulle part.
Où se trouvait cette foutue femme qui, d'ordinaire surgissait dans son dos au pire moment ? Des jours qu'il devait la supporter et elle disparaissait quand il réclamait sa présence.
Quel culot !
"Lucinde !"
Au troisième appel, elle ne ne venait toujours pas.
Quelle peste !
Quelle garce !
Les mains croisées contre la poitrine, son pied tapait avec agacement contre le dallage en pierre. Il s'impatientait et s'agaçait. Ce n'était pas possible de manquer de respect à ce point. Quand on entendait son nom, on venait. Il s'agissait d'une règle capitale de toute bonne éducation. Cette sotte avait dû élevée dans une étable pour ne pas la connaître.
Soudain, il l'aperçut, enfin, pousser les portes de l'église. Ce n'était pas trop tôt. Et elle traînait encore. Il cria pour la quatrième fois, excédé :
"Lucinde !"
Thierry la regarder s'avancer, sans se presser toujours, de plus en plus agacé par cette attitude nonchalante. Quand elle fut enfin devant lui, il tempêta :
"Ne pouviez pas marcher plus lentement ? J'ai des responsabilités à assurer et j'ai besoin d'en discuter avec vous ! Vous retardez tout mon emploi du temps !"
Il cria le prénom maudit une seconde fois.
Elle n'apparaissait nulle part.
Où se trouvait cette foutue femme qui, d'ordinaire surgissait dans son dos au pire moment ? Des jours qu'il devait la supporter et elle disparaissait quand il réclamait sa présence.
Quel culot !
"Lucinde !"
Au troisième appel, elle ne ne venait toujours pas.
Quelle peste !
Quelle garce !
Les mains croisées contre la poitrine, son pied tapait avec agacement contre le dallage en pierre. Il s'impatientait et s'agaçait. Ce n'était pas possible de manquer de respect à ce point. Quand on entendait son nom, on venait. Il s'agissait d'une règle capitale de toute bonne éducation. Cette sotte avait dû élevée dans une étable pour ne pas la connaître.
Soudain, il l'aperçut, enfin, pousser les portes de l'église. Ce n'était pas trop tôt. Et elle traînait encore. Il cria pour la quatrième fois, excédé :
"Lucinde !"
Thierry la regarder s'avancer, sans se presser toujours, de plus en plus agacé par cette attitude nonchalante. Quand elle fut enfin devant lui, il tempêta :
"Ne pouviez pas marcher plus lentement ? J'ai des responsabilités à assurer et j'ai besoin d'en discuter avec vous ! Vous retardez tout mon emploi du temps !"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Au plus il criait son nom, au moins Lucinde avait envie de retourner à l'intérieur. Une part d'elle aurait presque eu envie de se rouler en boule sous son lit, au ton qu'il employait… Il fallait croire que les derniers événements ne s'étaient pas manqué de faire ressurgir ses vieux maux. Sa fuite faisait curieusement écho à celle d'une certaine enfants, trimballée d'un bout à l'autre du pays dix-huit ans plus tôt. Une enfant passive, contre une femme déterminée, là résidait la différence.
Alors, il voulait la pousser à affronter ses plus vieux démons aujourd'hui ? Bien, parfait. Elle y était préparée. Depuis longtemps. Elle n'avait plus peur.
Elle traversa la nef sans un seul regard l'infâme qui gueulait encore son nom. Elle attendrait qu'il daigne s'adresser à elle poliment. Il pouvait bien taper du pied s'il le désirait, et croiser les bras comme un enfant coléreux. Les enfants coléreux, on les ignorait.
Elle perturbait son emploi du temps ? Pourquoi, parce qu'elle ne le laissait plus boire jusqu'à pas d'heure et cuver toute la matinée ? Tant pis pour lui.
Elle le dépassa sans prêter ralentir – notons qu'elle ne se pressait déjà pas.
— Ah oui ? C'est fâcheux, répondit-elle comme elle aurait dit "je n'en ai fichtrement rien à faire".
Ils discuteraient quand il s'adresserait à elle différemment.
Alors, il voulait la pousser à affronter ses plus vieux démons aujourd'hui ? Bien, parfait. Elle y était préparée. Depuis longtemps. Elle n'avait plus peur.
Elle traversa la nef sans un seul regard l'infâme qui gueulait encore son nom. Elle attendrait qu'il daigne s'adresser à elle poliment. Il pouvait bien taper du pied s'il le désirait, et croiser les bras comme un enfant coléreux. Les enfants coléreux, on les ignorait.
Elle perturbait son emploi du temps ? Pourquoi, parce qu'elle ne le laissait plus boire jusqu'à pas d'heure et cuver toute la matinée ? Tant pis pour lui.
Elle le dépassa sans prêter ralentir – notons qu'elle ne se pressait déjà pas.
— Ah oui ? C'est fâcheux, répondit-elle comme elle aurait dit "je n'en ai fichtrement rien à faire".
Ils discuteraient quand il s'adresserait à elle différemment.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Elle prenait un malin plaisir à ne pas le calculer. Elle le provoquait.
Quelle garce !
Quelle affreuse garce !
Thierry canalisa sa colère et répliqua d'un ton glacial quand celle-ci l'eut dépassé :
"Puis-je vous rappeler que vous est censé veiller à ce que je remplisse bien mes fonctions de prêtre ?"
Il la fixa d'un regard mauvais, puis marcha vers elle.
"Je dois entendre aujourd'hui les confessions de fidèles qui viennent soulager leur âme. Cela est u moment intime. Personnel. Il serait souhaitable, pour eux, que vous restiez éloignée, comprenez-vous ? Les confidences sont souvent difficiles, prennent du temps... et si on vous voit proches, ils n'oseront rien dire."
Le prêtre se composa un visage soucieux, visiblement véritablement impliqué dans la question. En son for intérieur, il songea tirer grâce à cela à quelques heures de libertés. Pourvu que ce ne soit pas que des enfants qui viennent... Il avait envie plutôt de belle femmes, en proie aux doutes, peinées de l'absence d'un mari;.. Quelle bonne chose ce serait !
"Alors... Qu'en pensez-vous ? pouvons-nous conclure un arrangement ?"
Quelle garce !
Quelle affreuse garce !
Thierry canalisa sa colère et répliqua d'un ton glacial quand celle-ci l'eut dépassé :
"Puis-je vous rappeler que vous est censé veiller à ce que je remplisse bien mes fonctions de prêtre ?"
Il la fixa d'un regard mauvais, puis marcha vers elle.
"Je dois entendre aujourd'hui les confessions de fidèles qui viennent soulager leur âme. Cela est u moment intime. Personnel. Il serait souhaitable, pour eux, que vous restiez éloignée, comprenez-vous ? Les confidences sont souvent difficiles, prennent du temps... et si on vous voit proches, ils n'oseront rien dire."
Le prêtre se composa un visage soucieux, visiblement véritablement impliqué dans la question. En son for intérieur, il songea tirer grâce à cela à quelques heures de libertés. Pourvu que ce ne soit pas que des enfants qui viennent... Il avait envie plutôt de belle femmes, en proie aux doutes, peinées de l'absence d'un mari;.. Quelle bonne chose ce serait !
"Alors... Qu'en pensez-vous ? pouvons-nous conclure un arrangement ?"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Le ton du prêtre était toujours désagréable. Lucinde soupira. Elle continuait sa route en l'écoutant distraitement. Oui, elle savait ce qu'elle avait à faire. Et elle remplissait parfaitement ses fonctions.
Elle le laissa poursuivre. Sans se soucier ni de son regard mauvais, ni de la mine fausse affectée qu'il lui servir ensuite. Elle acquiesça, sans être le moins du monde trompée par son attitude. Avec ce qu'Alexandre lui avait raconté sur ce fameux confessionnal...
— Évidemment… Je suis certaine que vous respectez les confidences de vos fidèles autant que le reste de vos devoirs, répondit-elle d'un ton aigre.
Toutefois, elle ne pouvait pas nier qu'il n'avait pas tout à fait tort...
— Faites ce que vous avez à faire, répondit-elle simplement.
Elle surveillerait d'un peu plus loin, voilà tout. Qu'il ne s'avise pas de tenter quelque chose de stupide ou de la prendre pour une demeurée. Rien ne lui échapperait.
Elle le laissa poursuivre. Sans se soucier ni de son regard mauvais, ni de la mine fausse affectée qu'il lui servir ensuite. Elle acquiesça, sans être le moins du monde trompée par son attitude. Avec ce qu'Alexandre lui avait raconté sur ce fameux confessionnal...
— Évidemment… Je suis certaine que vous respectez les confidences de vos fidèles autant que le reste de vos devoirs, répondit-elle d'un ton aigre.
Toutefois, elle ne pouvait pas nier qu'il n'avait pas tout à fait tort...
— Faites ce que vous avez à faire, répondit-elle simplement.
Elle surveillerait d'un peu plus loin, voilà tout. Qu'il ne s'avise pas de tenter quelque chose de stupide ou de la prendre pour une demeurée. Rien ne lui échapperait.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
La négociation avec Lucinde avait été pénible mais il avait réussi à obtenir ce qu'il espérait d'elle. Enfin, un peu de liberté. Une fois la jeune femme éloignée, le prêtre s'engagea dans la partie gauche du confessionnal et attendit que ses paroissiens viennent lui rendre visite. La première heure, personne ne se présenta. il resta seul, assis sur le banc, à lire un roman. Par bonheur, le religieux dissimulait dans cette partie différents ouvrages pour s'occuper, autant pendant les moments d'oisiveté que ceux pour les confessions. Les chapelets de stupidités des fidèles se révélaient si fades que bien souvent, caché derrière la grille, un livre sur ses genoux, il les écoutait d'une oreille distraite, l'esprit plus attentif aux pages qu'aux paroles culpabilisante, et répondait quand il sentait le moment.
Puis, il vint quelques enfants venus se confesser pour de petites bêtises. Quelle cruauté que les envoyer ! Ils s'accusaient d'avoir menti pour avoir un dessert de plus, pour s'être chamaillé avec un frère, avoir mal parlé à leur mère... Le prêtre en fut rapidement lassé et ne les entendit que comme un bruit de fond, bien plus absorbé par sa lecture que le bavardage stérile. Vers la fin de la confession, il rappelait les absurdités habituelles pour les sermonner, puis leur ordonnait de réciter toutes leurs prières qu'ils connaissaient, agenouillés sur les marches de l'autel. Le prêtre les observait tristement s'éloigner et lui obéir, le cœur serré. Quelle religion ridicule et barbare. Mais il n'avait malheureusement pas un autre choix que de faire respecter ces règles absurdes qui opprimaient des enfants qui ne faisaient qu'expérimenter et qui avaient déjà été punis par leurs parents pour leurs petites bêtises.
Peu après, quelques jeunes filles s'avancèrent pour aborder leurs pensées impures, qu'elles ne devraient pas avoir, étant censés rester pures jusqu'au jour de leur mariage. Le prêtre se replongea dans sa lecture, sans les écouter véritablement. Il s'agissait là de paroles creuses encore pire que les bêtises rapportées par les enfants. Néanmoins, par jeu, vers le milieu des confessions, le religieux assurait que rien de mal ne se cachait dans ces pensées et glissait subtilement une allusion qu'elles pourraient coucher avec leur prétendant avant leurs noces. Pourquoi bon se retenir de profiter des bienfaits de l'amour sous prétexte de ne pas avoir prononcé un bête oui devant un curé ? Toutes ces dogmes et ces croyances étaient d'une lourdeur écrasante. Quand viendrait la réforme envisagée par Coldris ? la société avait besoin de se libérer de ce carcan infernal.
Finalement, il y eut un homme d'une quarantaine d'années qui vint s'installer avec beaucoup de mal sur le banc de al parte droite. Il serrait sa canne en tremblant et ses jambes semblaient bien faibles. Encore plus que celles d'Alex. Comment trouvaient-elles la force de le porter encore ? Par respect, Thierry releva la tête et l'entendit le saluer, puis commencer à exposer ses inquiétudes de sa fin prochaine. Il se sentait de plus en plus faible et redoutait le jugement de Saint-Pierre qui l'attendrait bientôt.
"Vous avez vécu moralement ? Avez-vous tant de pêchés sur votre conscience ?"
Le prêtre s'adressa à lui d'une voix douce, qui ne lui ressemblait pas, mais l'attitude de cet homme et ses faiblesses ne lui rappelaient que trop ses deux enfants. Alex... Claire.. Quand eux auraient atteint l'âge de ce malheureux, souffriraient-ils autant ? Il suppliait que non. Qu'ils aient une vie longue, heureuse... Il fixa le fidèle derrière la grille et le remarqua chanceler. Sa respiration était sifflante. Son sang ne fit qu'un tour. Ferait-il un malaise ? Il ne réfléchit pas plus longtemps et s'empressa de quitter la confessionnal. Sa main se porta sur la porte de droite, prêt à secourir celui qui attendait derrière.
Puis, il vint quelques enfants venus se confesser pour de petites bêtises. Quelle cruauté que les envoyer ! Ils s'accusaient d'avoir menti pour avoir un dessert de plus, pour s'être chamaillé avec un frère, avoir mal parlé à leur mère... Le prêtre en fut rapidement lassé et ne les entendit que comme un bruit de fond, bien plus absorbé par sa lecture que le bavardage stérile. Vers la fin de la confession, il rappelait les absurdités habituelles pour les sermonner, puis leur ordonnait de réciter toutes leurs prières qu'ils connaissaient, agenouillés sur les marches de l'autel. Le prêtre les observait tristement s'éloigner et lui obéir, le cœur serré. Quelle religion ridicule et barbare. Mais il n'avait malheureusement pas un autre choix que de faire respecter ces règles absurdes qui opprimaient des enfants qui ne faisaient qu'expérimenter et qui avaient déjà été punis par leurs parents pour leurs petites bêtises.
Peu après, quelques jeunes filles s'avancèrent pour aborder leurs pensées impures, qu'elles ne devraient pas avoir, étant censés rester pures jusqu'au jour de leur mariage. Le prêtre se replongea dans sa lecture, sans les écouter véritablement. Il s'agissait là de paroles creuses encore pire que les bêtises rapportées par les enfants. Néanmoins, par jeu, vers le milieu des confessions, le religieux assurait que rien de mal ne se cachait dans ces pensées et glissait subtilement une allusion qu'elles pourraient coucher avec leur prétendant avant leurs noces. Pourquoi bon se retenir de profiter des bienfaits de l'amour sous prétexte de ne pas avoir prononcé un bête oui devant un curé ? Toutes ces dogmes et ces croyances étaient d'une lourdeur écrasante. Quand viendrait la réforme envisagée par Coldris ? la société avait besoin de se libérer de ce carcan infernal.
Finalement, il y eut un homme d'une quarantaine d'années qui vint s'installer avec beaucoup de mal sur le banc de al parte droite. Il serrait sa canne en tremblant et ses jambes semblaient bien faibles. Encore plus que celles d'Alex. Comment trouvaient-elles la force de le porter encore ? Par respect, Thierry releva la tête et l'entendit le saluer, puis commencer à exposer ses inquiétudes de sa fin prochaine. Il se sentait de plus en plus faible et redoutait le jugement de Saint-Pierre qui l'attendrait bientôt.
"Vous avez vécu moralement ? Avez-vous tant de pêchés sur votre conscience ?"
Le prêtre s'adressa à lui d'une voix douce, qui ne lui ressemblait pas, mais l'attitude de cet homme et ses faiblesses ne lui rappelaient que trop ses deux enfants. Alex... Claire.. Quand eux auraient atteint l'âge de ce malheureux, souffriraient-ils autant ? Il suppliait que non. Qu'ils aient une vie longue, heureuse... Il fixa le fidèle derrière la grille et le remarqua chanceler. Sa respiration était sifflante. Son sang ne fit qu'un tour. Ferait-il un malaise ? Il ne réfléchit pas plus longtemps et s'empressa de quitter la confessionnal. Sa main se porta sur la porte de droite, prêt à secourir celui qui attendait derrière.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Lucinde avait donc laissé le prêtre s’installer dans son confessional, lui laissant croire qu’elle ne le surveillerait pas plus que ça. Ce qui, bien entendu, était faux. Il était hors de question de lui laisser le champs libre pour déraper.
De temps en temps, elle s’éloignait un peu. Plusieurs fois, elle était allée jeter un oeil dehors. La plupart du temps, elle restait assise et surveillait de loin, laissant vagabonder ses pensées comme elle ne se le permettait que rarement.
Elle pensait beaucoup, évidemment, à ses deux adorables petites renardes. Ce qu’elles pouvaient lui manquer ! Jamais déracinement n’avait été si douloureux. Fuir son père ? Au fond, elle n’avait fait que se laisser tirer par le bras dans la nuit, vers une autre maison où elle ne l’avait plus jamais vu. Quitter Coutrenielle ? C’avait été difficile, assurément, plus encore si elle y ajoutait le décès de sa mère, trop récent alors. Mais voir ses petites renardes dans un tel état… Voir son époux -- quand bien même elle ne lui portait plus de réel amour -- dans un tel état. Et sa belle-mère, aussi. Cette sainte femme qui lui avait permis déjà de se reprendre en main. Non, tout cela était bien trop dur. Bien trop injuste.
Tout cela parce qu’un coup du sort avait voulu qu’une femme accouche d’un mort-né ! Elle concevait parfaitement que ce ne fut pas chose agréable, mais de là à détruire la vie de quelqu’un ?
Soit. Tout se payerait en temps voulu. Elle avait eu besoin de prendre l’air. De se promener un peu, de s’éloigner de cette église. Elle croisa en entrant une jeune fille qui sortait et la salua. Elle lui semblait étonnament… étrange. Saisie d’un mauvais pressentiment, Lucinde se dépêcha d’entrer. Après quelques pas à l’intérieur, elle vit le prêtre sortir du confessionnal et se diriger vers l’autre partie…
Elle n’eut pas le temps de se dire que quelque chose dans son attitude -- notamment cet empressement alarmé -- dénotait avec ce dont elle le soupçonnait.
— Thierry ! Je peux savoir ce que vous faites ?!
Ce n’était pas la première fois qu’elle l’appelait par son prénom. C’était d’ailleurs venu assez naturellement. Elle ne voyait pas l’intérêt de lui trouver un sobriquet dégradant, et ne pouvait pas non plus se résoudre à s’adresser à lui comme à un prêtre. C’était donc le plus simple. Ni révérence, ni animosité. Sauf quand l’animosité venait dans son ton à cause de l’attitude de cet imbécile !
De temps en temps, elle s’éloignait un peu. Plusieurs fois, elle était allée jeter un oeil dehors. La plupart du temps, elle restait assise et surveillait de loin, laissant vagabonder ses pensées comme elle ne se le permettait que rarement.
Elle pensait beaucoup, évidemment, à ses deux adorables petites renardes. Ce qu’elles pouvaient lui manquer ! Jamais déracinement n’avait été si douloureux. Fuir son père ? Au fond, elle n’avait fait que se laisser tirer par le bras dans la nuit, vers une autre maison où elle ne l’avait plus jamais vu. Quitter Coutrenielle ? C’avait été difficile, assurément, plus encore si elle y ajoutait le décès de sa mère, trop récent alors. Mais voir ses petites renardes dans un tel état… Voir son époux -- quand bien même elle ne lui portait plus de réel amour -- dans un tel état. Et sa belle-mère, aussi. Cette sainte femme qui lui avait permis déjà de se reprendre en main. Non, tout cela était bien trop dur. Bien trop injuste.
Tout cela parce qu’un coup du sort avait voulu qu’une femme accouche d’un mort-né ! Elle concevait parfaitement que ce ne fut pas chose agréable, mais de là à détruire la vie de quelqu’un ?
Soit. Tout se payerait en temps voulu. Elle avait eu besoin de prendre l’air. De se promener un peu, de s’éloigner de cette église. Elle croisa en entrant une jeune fille qui sortait et la salua. Elle lui semblait étonnament… étrange. Saisie d’un mauvais pressentiment, Lucinde se dépêcha d’entrer. Après quelques pas à l’intérieur, elle vit le prêtre sortir du confessionnal et se diriger vers l’autre partie…
Elle n’eut pas le temps de se dire que quelque chose dans son attitude -- notamment cet empressement alarmé -- dénotait avec ce dont elle le soupçonnait.
— Thierry ! Je peux savoir ce que vous faites ?!
Ce n’était pas la première fois qu’elle l’appelait par son prénom. C’était d’ailleurs venu assez naturellement. Elle ne voyait pas l’intérêt de lui trouver un sobriquet dégradant, et ne pouvait pas non plus se résoudre à s’adresser à lui comme à un prêtre. C’était donc le plus simple. Ni révérence, ni animosité. Sauf quand l’animosité venait dans son ton à cause de l’attitude de cet imbécile !
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Qu'était-il en train d'arriver à l'homme qui se trouvait faible dans le confessionnal ? Un simple malaise ? Ou les signes de quelque chose de plus profond ? Une maladie ? Ou l'épuisement de ses jambes ? parfois, Alex s'écroulait quand il était trop fastigié pour tenir debout. il s'apprêtait à le rejoindre pour lui porter assistance quand une voix l'interpela en l'appelant par son seul prénom.
Lucinde.
Elle ne pouvait pas venir.
Pas maintenant.
La vie d'un homme s trouvait peut-être en jeu. Ils ne pouvaient perdre de précieuses secondes.
"Lucinde, non."
Il laissait apparaître de la lassitude, sans tenir compte une énième fois que celle-ci le nommait de son prénom et non par son titre. Cela lui convenait et il le relevait à peine. De toute manière, ce n'était pas sa préoccupation actuelle. Il y avait une urgente et parler s'avérait parfaitement utile.
"Lucinde... Il y a un homme qui semble avoir fait un malaise. Laissez-moi."
En prononçant ces mots, le prêtre comprit qu'elle ne le croirait jamais. sa réputation le précédait. Personne ne saurait imaginer que derrière la porte du confessionnal attendait réellement un vieil homme et non une femme à séduire. Il était coincé.
'"Je vous jure que je suis sincère."
Sa voix trahissait le désespoir. Les serments n'engageaient que ceux qui y croyaient et lui avait passé son existence à ne jamais dire la vérité.
"Lucinde..."
Toute sa détresse s'entendait dans l'intonation de sa voix. Il suppliait. mais il ne serait pas cru. Il le savait. Il allait seulement récolter une énième gifle.
Lucinde.
Elle ne pouvait pas venir.
Pas maintenant.
La vie d'un homme s trouvait peut-être en jeu. Ils ne pouvaient perdre de précieuses secondes.
"Lucinde, non."
Il laissait apparaître de la lassitude, sans tenir compte une énième fois que celle-ci le nommait de son prénom et non par son titre. Cela lui convenait et il le relevait à peine. De toute manière, ce n'était pas sa préoccupation actuelle. Il y avait une urgente et parler s'avérait parfaitement utile.
"Lucinde... Il y a un homme qui semble avoir fait un malaise. Laissez-moi."
En prononçant ces mots, le prêtre comprit qu'elle ne le croirait jamais. sa réputation le précédait. Personne ne saurait imaginer que derrière la porte du confessionnal attendait réellement un vieil homme et non une femme à séduire. Il était coincé.
'"Je vous jure que je suis sincère."
Sa voix trahissait le désespoir. Les serments n'engageaient que ceux qui y croyaient et lui avait passé son existence à ne jamais dire la vérité.
"Lucinde..."
Toute sa détresse s'entendait dans l'intonation de sa voix. Il suppliait. mais il ne serait pas cru. Il le savait. Il allait seulement récolter une énième gifle.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Pris sur le fait ! Voilà ce imbécile de curé qui la regardait comme un gosse pris en faute. Qu’espérait-il ? Echapper à sa vigilance ? Si c’était cela, il se méprenait gravement !
— Non ? répéta la jeune femme. Vous êtes sûr de ça ?
Comment ça, non ? Elle ne pouvait pas savoir ? Ben voyons ! Elle avança dans sa direction sans se précipiter. Ce n’était pas nécéssaire, il n’allait pas s’envoler.
— Oui, un malaise, bien sûr.
Si quelqu’un avait vraiment été en train de faire un malaise dans ce confessional et qu’il s’en souciait réellement, il ne se serait pas arrêté lorsqu’elle l’avait interpelé. Il restait planté là comme un idiot, tandis qu’elle le dévisageait, sévère.
Il jurait. Pourquoi jurer quand il aurait suffi d’ouvrir pour lui prouver ? Ca ne collait pas. Il maintenait cette porte fermée comme s’il avait quelque chose à cacher. S’il avait quelque chose à cacher…
— Tout à fait, grinça-t-elle, toujours pas convaincue. C’en était ridicule.
Mais tandis qu’il répétait son prénom de cette voix pitoyable, Lucinde leva les yeux au ciel. Et fut tout de même prise d’un doute. Son attitude n’avait rien de logique. Il ne se comportait pas comme quelqu’un qui disait la vérité, mais elle ne voyait pas non plus à quoi
— Si vous dites vrai, pourquoi me restez-vous planté là à me fixer bêtement ? s'enquit-elle avec humeur.
Elle laisserait sa réaction déterminer la sienne. Prête à réagir s’il maintenait sa version -- ou maitriser son agacement s’il persistait à mentir.
— Non ? répéta la jeune femme. Vous êtes sûr de ça ?
Comment ça, non ? Elle ne pouvait pas savoir ? Ben voyons ! Elle avança dans sa direction sans se précipiter. Ce n’était pas nécéssaire, il n’allait pas s’envoler.
— Oui, un malaise, bien sûr.
Si quelqu’un avait vraiment été en train de faire un malaise dans ce confessional et qu’il s’en souciait réellement, il ne se serait pas arrêté lorsqu’elle l’avait interpelé. Il restait planté là comme un idiot, tandis qu’elle le dévisageait, sévère.
Il jurait. Pourquoi jurer quand il aurait suffi d’ouvrir pour lui prouver ? Ca ne collait pas. Il maintenait cette porte fermée comme s’il avait quelque chose à cacher. S’il avait quelque chose à cacher…
— Tout à fait, grinça-t-elle, toujours pas convaincue. C’en était ridicule.
Mais tandis qu’il répétait son prénom de cette voix pitoyable, Lucinde leva les yeux au ciel. Et fut tout de même prise d’un doute. Son attitude n’avait rien de logique. Il ne se comportait pas comme quelqu’un qui disait la vérité, mais elle ne voyait pas non plus à quoi
— Si vous dites vrai, pourquoi me restez-vous planté là à me fixer bêtement ? s'enquit-elle avec humeur.
Elle laisserait sa réaction déterminer la sienne. Prête à réagir s’il maintenait sa version -- ou maitriser son agacement s’il persistait à mentir.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Thierry se sentait face à Lucinde comme un enfant pris en faute, mas sans avoir commis la moindre bêtise, et était désemparé. Il savait qu'aucun argument ne saurait la persuader. Son corps tremblait et les anciennes sensations, remontaient à son enfance, revenaient. Il entrevoyait, à la place de sa nourrice, sa mère, sévère qui l'aurait surprise dans un couloir e soupçonné d'une mauvaise action. Ou quand il lui volait sa bourse, un peu avant d'aller à l'église, pour offrir des pièces aux mendiants. Elle méprisait sa générosité. Ils étaient désargentés et ne pouvaient se permettre le luxe de la charité. Pourtant, de son point de vue, il se rappelait avoir pensé qu'ils n'étaient pas non plus miséreux : ils avaient un château, en délabrement, pour les abriter, de nombreux livres, quelques beaux meubles et surtout de la nourriture. Mais sa mère ne le comprenait pas.
Il n'avait jamais su la convaincre.
Comme il ne convaincrait pas Lucinde.
Ses bonnes actions n'étaient jamais récompensées.
"Je...."
Il baissait la tête, indiquant de plus en plus sa culpabilité, incapable de songer à un bon argument.
'"Je vous jure. Je vous jure, il y a vraiment un homme là-dedans."
"Je vous jure, mère, ils avaient besoin de cet argent ! La mère est malade ! Et ils n'ont rien à manger !"
"Silence, Thierry !"
Le jeune garçon baissa la tête, misérable, face à la femme, sévère, qui le toisait avec agacement.
"Vous descendez d'une lignée prestigieuse. Vous n'avez pas à frayer avec... de vulgaires membres de la plèbe. Ils sont malades ? Ils ont faim ? Cela n'est pas une raison. Ignorez-les ! Ne songez qu'à votre sang et votre rang !"
"Mais mère..."
"Cela suffit, Thierry !"
Le prêtre tremblait au rappel de ce souvenir. L'histoire se répéterait-elle, inlassablement ? Quoique... A cette époque lointaine, il réussissait ses bonnes actions en volant l'argent de ses parents pour l'offrir aux démunis. Aujourd'hui, cela ne fonctionnait même plus. Il était sermonné et puni avant même de pouvoir essayer.
'"Je vous jure... je vous jure, mère."
Le mot de mère était sorti seul de sa bouche tant son esprit associait cette scène avec celles de son enfance. Il eut ensuite un sursaut quand Lucinde lui demanda pourquoi il restait planté là bêtement. Il l'observa, confus, et revint enfin au présent. Le prêtre secoua la tête et réalisa que cette femme n'était en aucune sorte sa mère cruelle et autoritaire et se rappela enfin de l'urgence de la situation. L'homme... Le malaise...
"Je... je n'ai pas pensé.."
Thierry se tourna enfin et ouvrit la porte du confessionnal : un homme d'une quarantaine d'années gisait sur le sol. Ses bras s'agitaient faiblement, le corps inondé de sueur. Le prêtre se précipita pour s'agenouiller et prendre le pouls, tâtant en même temps une possible fièvre.
"'Il vit ! Il semble cependant en grande faiblesse."
Il n'avait jamais su la convaincre.
Comme il ne convaincrait pas Lucinde.
Ses bonnes actions n'étaient jamais récompensées.
"Je...."
Il baissait la tête, indiquant de plus en plus sa culpabilité, incapable de songer à un bon argument.
'"Je vous jure. Je vous jure, il y a vraiment un homme là-dedans."
***
"Je vous jure, mère, ils avaient besoin de cet argent ! La mère est malade ! Et ils n'ont rien à manger !"
"Silence, Thierry !"
Le jeune garçon baissa la tête, misérable, face à la femme, sévère, qui le toisait avec agacement.
"Vous descendez d'une lignée prestigieuse. Vous n'avez pas à frayer avec... de vulgaires membres de la plèbe. Ils sont malades ? Ils ont faim ? Cela n'est pas une raison. Ignorez-les ! Ne songez qu'à votre sang et votre rang !"
"Mais mère..."
"Cela suffit, Thierry !"
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Le prêtre tremblait au rappel de ce souvenir. L'histoire se répéterait-elle, inlassablement ? Quoique... A cette époque lointaine, il réussissait ses bonnes actions en volant l'argent de ses parents pour l'offrir aux démunis. Aujourd'hui, cela ne fonctionnait même plus. Il était sermonné et puni avant même de pouvoir essayer.
'"Je vous jure... je vous jure, mère."
Le mot de mère était sorti seul de sa bouche tant son esprit associait cette scène avec celles de son enfance. Il eut ensuite un sursaut quand Lucinde lui demanda pourquoi il restait planté là bêtement. Il l'observa, confus, et revint enfin au présent. Le prêtre secoua la tête et réalisa que cette femme n'était en aucune sorte sa mère cruelle et autoritaire et se rappela enfin de l'urgence de la situation. L'homme... Le malaise...
"Je... je n'ai pas pensé.."
Thierry se tourna enfin et ouvrit la porte du confessionnal : un homme d'une quarantaine d'années gisait sur le sol. Ses bras s'agitaient faiblement, le corps inondé de sueur. Le prêtre se précipita pour s'agenouiller et prendre le pouls, tâtant en même temps une possible fièvre.
"'Il vit ! Il semble cependant en grande faiblesse."
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Thierry bafouillait, s’entêtait, jurait… Mais n’agissait toujours pas, ce qui était tout bonnement insensé. S’il y avait, comme il le prétendait, en homme en difficulté -- s’il suffisait d’ouvrir cette fichue porte pour le prouver et qu’il n’avait rien à cacher -- pourquoi restait-il planté là comme le dernier des abrutis.
— Je vous jure, mère.
Lucinde arqua un sourcil, assez désapointée. Mais ce n’était pas la priorité. Elle fit remarquer son inaction au curé, et le peu de crédibilité qu’elle lui conférait. Sa réponse, elle, l’éleva carrément au rang de roi des abrutis. C’en était désespérant.
Soit, il agissait, maintenant. Ce qui prouvait surtout qu’il avait dit vrai. Soit. Sa gardienne admettrait volontiers son erreur - non sans ajouter que s’il avait réagi moins bêtement, il n’y aurait pas eu de place pour un malentendu.
Elle accourut tandis que le père Thierry l’informait de l’état de l’homme. Comme il ne servait à rien de s’approcher et d’entraver leur mouvement, Lucinde entreprit de rapprocher un banc.
— Le sortir, expliqua-t-elle.
Mais elle ne devait pas donner l’impression de trop savoir ce qu’elle faisait. Elle devait se souvenir d’une chose : les bons sentiments, ça ne menait à rien. Elle ne se mettrait plus en péril pour autrui, ce temps-là était révolu. Du moins, pas si elle pouvait l’éviter.
Alors, elle misa sur le fait que le prêtre turbulent saurait comment réagir - d’autant qu’il était mieux placé pour savoir ce dont il retournait -, et s’enquit :
— Besoin de quelque chose ?
— Je vous jure, mère.
Lucinde arqua un sourcil, assez désapointée. Mais ce n’était pas la priorité. Elle fit remarquer son inaction au curé, et le peu de crédibilité qu’elle lui conférait. Sa réponse, elle, l’éleva carrément au rang de roi des abrutis. C’en était désespérant.
Soit, il agissait, maintenant. Ce qui prouvait surtout qu’il avait dit vrai. Soit. Sa gardienne admettrait volontiers son erreur - non sans ajouter que s’il avait réagi moins bêtement, il n’y aurait pas eu de place pour un malentendu.
Elle accourut tandis que le père Thierry l’informait de l’état de l’homme. Comme il ne servait à rien de s’approcher et d’entraver leur mouvement, Lucinde entreprit de rapprocher un banc.
— Le sortir, expliqua-t-elle.
Mais elle ne devait pas donner l’impression de trop savoir ce qu’elle faisait. Elle devait se souvenir d’une chose : les bons sentiments, ça ne menait à rien. Elle ne se mettrait plus en péril pour autrui, ce temps-là était révolu. Du moins, pas si elle pouvait l’éviter.
Alors, elle misa sur le fait que le prêtre turbulent saurait comment réagir - d’autant qu’il était mieux placé pour savoir ce dont il retournait -, et s’enquit :
— Besoin de quelque chose ?
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Le moment de stupidité, qui émanait de ses traumatismes d'enfance, était enfin passé et Thierry s'était ressaisi pour ouvrir la porte du confessionnal. Pendant que sa gardienne demeurait dans son dos, sans relarquer que celle-ci s'était en réalité reculée, le prêtre s'agenouilla pour examiner l'homme affaissé sur le sol. Sa main s'enroulait autour du poignet. Le pouls battait encore.
"M'entendez-vous, monsieur ?"
Son interlocuteur murmura un oui plus que faible, dans un râle d'épuisement. Il serait mieux allongé quelque part, qu'à rester sur un sol aussi confortable. Thierry le souleva dans ses bras et faillit perde l'équilibre en se relevant. C'était qu'il pesait lourd l'animal ! Visiblement, la faim ne pouvait être la cause de son malaise. Il attendit de se stabiliser et d'avoir bien la charge dans les bras afin de se retourner. Son regard découvrit à cet instant al bonne surprise de Lucinde qui venait de pousser le banc le plus proche jusqu''au confessionnal. Elle ne manquait ainsi pas de force. Il inclina la tête, lui adressant un sourire reconnaissant.
"Merci. Il pèse une tonne celui-là !"
Avec prudence, le prêtre déposa l'homme sur le banc et l'étendit soigneusement. Il prit ensuite le temps de poser les bras bien le long du corps. Sa main toucha le front.
"Il semble fiévreux. Mais pas comme un malade. Le teint, lui, est frais. Ce doit être la fatigue."
A la question de Lucinde, il redressa la tête et répondit :
"Devons-nous appeler un médecin ? Si ce n'est que de la fatigue, ce n'st peut-être pas utile. Quoique... si je me rappeler, en entrant, il trainait la jambe."
Soucieux de confirmer l'information, il se déplaça pour toucher les jambes de la victime. A celle de gauche, elle ne dit rien. En revanche, à peine sa main effleura la cuisse de la seconde qu'un hurlement retendit. Thierry poursuivit l'examen avec prudence et grimaça n percevant le gonflement au travers du tissu.
"Je crains qu'elle ne soit cassée. Mais enfin pourquoi a t-il venu ici dans cet état ? Quand on se casse la jambe, on reste au lit !"
Le ton était monté malgré lui, irrité par ce manque de bon sens. Il ne comprenait décidément que l'on ne prenne pas soin de son corps et que l'on puisse sciemment le saborder même. L'homme sur le banc gémit et murmura, misérable :
"Le patron.. Le patron, y dit qu'il me virera si je venais pas. Puis, sur le chantier, je m'ai senti mal. Je m'ai dit que mon heure était venue, alors je suis venu vous voir avant de me présenter à Dieu.."
A ces explications, le prêtre demeurait silencieux et s'écartait. Son visage dissimulait la colère qui grondait en lui à l'encontre de cet entrepreneur qui abusait de sa position pour traiter ses ouvriers pires que des des esclaves. extérieurement, seule la main sur la hanche, dont les doigts battaient nerveusement la mesure, pouvaient indiquer son irratation.
"M'entendez-vous, monsieur ?"
Son interlocuteur murmura un oui plus que faible, dans un râle d'épuisement. Il serait mieux allongé quelque part, qu'à rester sur un sol aussi confortable. Thierry le souleva dans ses bras et faillit perde l'équilibre en se relevant. C'était qu'il pesait lourd l'animal ! Visiblement, la faim ne pouvait être la cause de son malaise. Il attendit de se stabiliser et d'avoir bien la charge dans les bras afin de se retourner. Son regard découvrit à cet instant al bonne surprise de Lucinde qui venait de pousser le banc le plus proche jusqu''au confessionnal. Elle ne manquait ainsi pas de force. Il inclina la tête, lui adressant un sourire reconnaissant.
"Merci. Il pèse une tonne celui-là !"
Avec prudence, le prêtre déposa l'homme sur le banc et l'étendit soigneusement. Il prit ensuite le temps de poser les bras bien le long du corps. Sa main toucha le front.
"Il semble fiévreux. Mais pas comme un malade. Le teint, lui, est frais. Ce doit être la fatigue."
A la question de Lucinde, il redressa la tête et répondit :
"Devons-nous appeler un médecin ? Si ce n'est que de la fatigue, ce n'st peut-être pas utile. Quoique... si je me rappeler, en entrant, il trainait la jambe."
Soucieux de confirmer l'information, il se déplaça pour toucher les jambes de la victime. A celle de gauche, elle ne dit rien. En revanche, à peine sa main effleura la cuisse de la seconde qu'un hurlement retendit. Thierry poursuivit l'examen avec prudence et grimaça n percevant le gonflement au travers du tissu.
"Je crains qu'elle ne soit cassée. Mais enfin pourquoi a t-il venu ici dans cet état ? Quand on se casse la jambe, on reste au lit !"
Le ton était monté malgré lui, irrité par ce manque de bon sens. Il ne comprenait décidément que l'on ne prenne pas soin de son corps et que l'on puisse sciemment le saborder même. L'homme sur le banc gémit et murmura, misérable :
"Le patron.. Le patron, y dit qu'il me virera si je venais pas. Puis, sur le chantier, je m'ai senti mal. Je m'ai dit que mon heure était venue, alors je suis venu vous voir avant de me présenter à Dieu.."
A ces explications, le prêtre demeurait silencieux et s'écartait. Son visage dissimulait la colère qui grondait en lui à l'encontre de cet entrepreneur qui abusait de sa position pour traiter ses ouvriers pires que des des esclaves. extérieurement, seule la main sur la hanche, dont les doigts battaient nerveusement la mesure, pouvaient indiquer son irratation.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Lucinde hocha la tête simplement la tête aux remerciements du prêtres. Ne sachant pas s’il critiquait le poids de l’homme ou celui du banc, elle s’abstint de tout commentaire. De toute façon, elle avait mieux à penser.
Appeler un médecin ? Elle hésitait. Dans le doute, c’eut certainement été oui. Mais dans la situation présente, cela n’était peut-être pas nécessaire. Pourquoi n’était-elle plus si sûre ? Pas pour un simple mort né, tout de même ?! Il fallait qu’elle se ressaisisse. Elle n’avait rien raté, rien ! Dieu n’avait pas accordé la vie à cet enfant, et elle n’en était pas responsable. C’était fou de voir les idées stupides qu’on pouvait mettre dans la tête des gens en leur arrachant leurs repères. Mais il ne fallait pas qu’elle se laisse déstabiliser.
Non ! Non ! Non ! Elle secoua involontairement la tête, désemparée. Non ! Non ! Non ! Mais qu’est-ce qui la prenait ? N’était-ce pas vraiment de sa faute, après tout, si les choses avaient à ce point dégénéré ? Si ses petites renardes n’étaient plus ? Non ! Non ! Non !
— Je ne sais pas... laissa-t-elle échapper sans savoir si elle parlait du médecin, de son attitude ou de sa culpabilité.
Mais elle se reprit. Jambe cassée ? Sans doute pas en fort bon état, à en croire le hurlement que la toucher provoqua. Hurlement qui ne fit en outre pas sourciller l’ancienne sage-femme, dont les tympans s’étaient accoutumés à ce genre de bruits.
Alors que le prêtre sermonnait le blessé, elle s’efforçait de rester tranquille. Elle ne savait plus. Elle ne savait plus quelles compétences elle pouvait ou non montrer. Elle ne savait plus chasser l’odeur âcre du sang qui envahissait ses narines.
Réfléchir dans l’ordre. Réfléchir dans l’ordre. Réfléchir dans l’ordre. Elle dormait de nouveau si peu… Ce n’était qu’une jambe cassée, il n’y avait aucune raison que ça la perturbe… Mais l’accumulation…
Oublier ce qu’elle devait faire. Perdre le contrôle. Ne plus savoir réfléchir dans l’ordre. C’était affreux. L’idée lui en donnait mal au coeur. Tout cela la dépassait. Les images. Que d’images qui la rendaient malade par leur seule évoquation.
— Je reviens… son coeur se souleva. Laissez-moi deux minutes.
Elle fit quelques pas pour s’éloigner, mais c’était trop tard. Tout remonta, et elle rendit son déjeuner sur le banc face auquel elle s’était écroulée. Visiblement, elle n’avait pas si mal mangé… Mais ce n’était pas elle. Elle ne perdait jamais pieds ! Jamais ! Jamais ! Et certainement pas devant cet imbécile de curé !
Elle sorti son mouchoir pour s’essuyer la bouche, mais dut le retirer pour ne pas que la suite le souille. Au moins, se laissa à songer une partie de son esprit, on ne pourrait jamais la soupçonner d’avoir occupé ses anciennes fonctions eut égard à cette soudaine sensibilité. Dire qu’on s’imaginerait qu’elle faisait tout ce cirque pour une jambe cassée.
— Je crois que vous allez devoir vous passer de mon aide, commenta-t-elle d’un ton aussi aigre que le goût qui lui restait en bouche. Il faut que je boive, déclara-t-elle en se redressant. Vous aussi ? s’enquit-elle innocemment auprès de l’ouvrier.
Appeler un médecin ? Elle hésitait. Dans le doute, c’eut certainement été oui. Mais dans la situation présente, cela n’était peut-être pas nécessaire. Pourquoi n’était-elle plus si sûre ? Pas pour un simple mort né, tout de même ?! Il fallait qu’elle se ressaisisse. Elle n’avait rien raté, rien ! Dieu n’avait pas accordé la vie à cet enfant, et elle n’en était pas responsable. C’était fou de voir les idées stupides qu’on pouvait mettre dans la tête des gens en leur arrachant leurs repères. Mais il ne fallait pas qu’elle se laisse déstabiliser.
Non ! Non ! Non ! Elle secoua involontairement la tête, désemparée. Non ! Non ! Non ! Mais qu’est-ce qui la prenait ? N’était-ce pas vraiment de sa faute, après tout, si les choses avaient à ce point dégénéré ? Si ses petites renardes n’étaient plus ? Non ! Non ! Non !
— Je ne sais pas... laissa-t-elle échapper sans savoir si elle parlait du médecin, de son attitude ou de sa culpabilité.
Mais elle se reprit. Jambe cassée ? Sans doute pas en fort bon état, à en croire le hurlement que la toucher provoqua. Hurlement qui ne fit en outre pas sourciller l’ancienne sage-femme, dont les tympans s’étaient accoutumés à ce genre de bruits.
Alors que le prêtre sermonnait le blessé, elle s’efforçait de rester tranquille. Elle ne savait plus. Elle ne savait plus quelles compétences elle pouvait ou non montrer. Elle ne savait plus chasser l’odeur âcre du sang qui envahissait ses narines.
Réfléchir dans l’ordre. Réfléchir dans l’ordre. Réfléchir dans l’ordre. Elle dormait de nouveau si peu… Ce n’était qu’une jambe cassée, il n’y avait aucune raison que ça la perturbe… Mais l’accumulation…
Oublier ce qu’elle devait faire. Perdre le contrôle. Ne plus savoir réfléchir dans l’ordre. C’était affreux. L’idée lui en donnait mal au coeur. Tout cela la dépassait. Les images. Que d’images qui la rendaient malade par leur seule évoquation.
— Je reviens… son coeur se souleva. Laissez-moi deux minutes.
Elle fit quelques pas pour s’éloigner, mais c’était trop tard. Tout remonta, et elle rendit son déjeuner sur le banc face auquel elle s’était écroulée. Visiblement, elle n’avait pas si mal mangé… Mais ce n’était pas elle. Elle ne perdait jamais pieds ! Jamais ! Jamais ! Et certainement pas devant cet imbécile de curé !
Elle sorti son mouchoir pour s’essuyer la bouche, mais dut le retirer pour ne pas que la suite le souille. Au moins, se laissa à songer une partie de son esprit, on ne pourrait jamais la soupçonner d’avoir occupé ses anciennes fonctions eut égard à cette soudaine sensibilité. Dire qu’on s’imaginerait qu’elle faisait tout ce cirque pour une jambe cassée.
— Je crois que vous allez devoir vous passer de mon aide, commenta-t-elle d’un ton aussi aigre que le goût qui lui restait en bouche. Il faut que je boive, déclara-t-elle en se redressant. Vous aussi ? s’enquit-elle innocemment auprès de l’ouvrier.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Thierry méditait à cette situation et estima que l'urgence immédiate serait de recourir à un médecin qui examinerait le pauvre homme. Il le ferait ensuite reconduire à son domicile, avec une somme tirée des bonnes œuvres pour la paroisse qui permettrait à sa famille de vivre le temps de la convalescence. Il s'en irait ensuite longuement sermonner l'irresponsable chef de chantier quia avait osé se croire assez supérieur pour ordonner à l'un de ses ouvriers de poursuivre le travail dans des conditions aussi drastiques. En voilà un qui allait passer une mauvaise journée. Et il ferait bien d'accorder pour son employé et sa famille sa générosité ou son nm se retrouverait dès demain cité en chaire pendant une bonne semaine. Une publicité que son entreprise devrait normalement vouloir se passer.
Il allait se diriger vers un fidèle qui priait dans une chapelle quand son regard fut attirée par Lucinde. Son visage pâle indiquait un malaise. La contemplation d'un homme blessé l'horrifiait ? pourtant, ce n'était qu'une jambe cassée. Qu'aurait-t-elle dit dans al chambre d'un mourant, en proie à une mauvaise fièvre, le visage défiguré par les boutons de la variole, une mauvaise haleine s'échappant de sa bouche ? Ces premières années de prêtre, à côtoyer la souffrance, la misère et al mort avaient été si difficiles à vivre. Il ne se rappelait que trop aussi la peine lue dans les yeux des enfants, impuissants, dans al pièce voisine, et des mots ridicule qu'il essayait de prononcer pour tenter de le réconforter. Lucinde avait beau être un Cerbère détestable, il ne la blâmerait pas pour son trouble.
Thierry s'avança vers elle pour poser la main sur son épaule, sans la moindre ambiguïté.
"Allez donc prendre l'air frais, Lucinde. Cela vous redonnera des couleurs."
Il se tourna vers la chapelle et héla celui qui priait devant la statue de Saint-Michel.
"Vous ! Allez me chercher un médecin !"
La requête de Lucinde résonna ensuite. De l'eau. Cela était effectivement une bonne idée. De al nourriture aussi. Le corps affaibli devait reconstituer des forces. Le prêtre marcha d'un pas rapide vers la cellule et revint avec un plateau sur lequel tenait une carafe d'eau, deux verres et la moitié d'une miche de pain. Il le posa sur un banc libre pour remplir les deux verres puis repartit vers l'homme couché vers le banc.
"Je vais essayer de vous asseoir. restez calme, je vous prie."
Saisissant le corps de l'homme, le prêtre le redressa tant bien que mal pour l'installer en position assise. Il lui offrit le verre et veilla à ce que le malheureux ne le boive pas trop.
"Quel est votre nom, au fait ?"
"Albert.... Albert Fadas. merci. merci, mon père."
"Bien, bien, vous resterez ici le temps que le médecin vienne vous examiner et nous vous ramènerons à votre famille. Ne vous tracassez plus et détends-vous. Je vais prendre les choses à partir de là."
Il allait se diriger vers un fidèle qui priait dans une chapelle quand son regard fut attirée par Lucinde. Son visage pâle indiquait un malaise. La contemplation d'un homme blessé l'horrifiait ? pourtant, ce n'était qu'une jambe cassée. Qu'aurait-t-elle dit dans al chambre d'un mourant, en proie à une mauvaise fièvre, le visage défiguré par les boutons de la variole, une mauvaise haleine s'échappant de sa bouche ? Ces premières années de prêtre, à côtoyer la souffrance, la misère et al mort avaient été si difficiles à vivre. Il ne se rappelait que trop aussi la peine lue dans les yeux des enfants, impuissants, dans al pièce voisine, et des mots ridicule qu'il essayait de prononcer pour tenter de le réconforter. Lucinde avait beau être un Cerbère détestable, il ne la blâmerait pas pour son trouble.
Thierry s'avança vers elle pour poser la main sur son épaule, sans la moindre ambiguïté.
"Allez donc prendre l'air frais, Lucinde. Cela vous redonnera des couleurs."
Il se tourna vers la chapelle et héla celui qui priait devant la statue de Saint-Michel.
"Vous ! Allez me chercher un médecin !"
La requête de Lucinde résonna ensuite. De l'eau. Cela était effectivement une bonne idée. De al nourriture aussi. Le corps affaibli devait reconstituer des forces. Le prêtre marcha d'un pas rapide vers la cellule et revint avec un plateau sur lequel tenait une carafe d'eau, deux verres et la moitié d'une miche de pain. Il le posa sur un banc libre pour remplir les deux verres puis repartit vers l'homme couché vers le banc.
"Je vais essayer de vous asseoir. restez calme, je vous prie."
Saisissant le corps de l'homme, le prêtre le redressa tant bien que mal pour l'installer en position assise. Il lui offrit le verre et veilla à ce que le malheureux ne le boive pas trop.
"Quel est votre nom, au fait ?"
"Albert.... Albert Fadas. merci. merci, mon père."
"Bien, bien, vous resterez ici le temps que le médecin vienne vous examiner et nous vous ramènerons à votre famille. Ne vous tracassez plus et détends-vous. Je vais prendre les choses à partir de là."
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Lucinde se sentait humiliée par sa propre réaction. Pourquoi avait-elle à ce point dérapé alors que la marche à suivre lui semblait désormais limpide ? Ce n’était rien qu’une jambe cassée, non de dieu !
Elle avait beau se le répéter, elle savait bien que ce n’était pas cela qui l’avait tant troublée. Des blessures, elle en avait vues. Autant par son métier que via d’autres expériences de sa vie. Les jambes cassées, justement…
Mais elle ne devait pas se laisser submerger par ces souvenirs-là non plus. C’était hors de question ! Elle contrôlait la situation, et ne perdrait plus jamais pieds comme cela venait d’arriver. Elle transmuta les souvenirs encombrants en carburant pour la résolution. Etape par etape, elle triompherait. Et plus encore si on s’acharnait à parsemer sa route d’obstacles !
Elle acquiesça légèrement à la marque de soutien du prêtre. Et comme elle s’était reprise, comme les idées s’enchainaient de nouveau correctement, elle pensa deux choses. La premières était que finalement, il n’était peut-être pas aussi pourri qu’elle s’était plue à l’imaginer. La seconde : cela ne changeait fichtrement rien à la situation et elle ne devait pas laisser son jugement en être affecté. C’était fini le temps où elle s’efforçait de voir du bien en chacun. Fini ! Fini ! Fini ! Maintenant elle pensait à elle, se battait pour elle, n’avait confiance qu’en elle et surtout : s’était départie de tout ce qui pouvait être associé à de bons sentiments.
Elle accepta toutefois l’eau qu’on ne lui avait pas laissé le temps d’aller chercher seule, et apprécia la réactivité de Thierry. Elle devait reconnaitre - et cela sans que ça ne doive passer pour la moindre sympathie de sa part - qu’il savait se montrer efficace. C’était bon à savoir. Elle aurait une base pour le…
Pour rendre leur cohabitation moins pénible. Parce qu’elle avait perdu cette gentille naiveté ridicule. Elle ne pouvait rien faire pour lui et ne s’encombrerait plus jamais d’aider qui que ce soit.
Elle l’écouta interroger l’homme, et ne put, en le voyant boire avidement, retenir un commentaire :
— Buvez moins vite, ou cela ne vous apportera rien.
Qu’il boive comme elle : par petites gorgées. Ce n’était pourtant pas si difficile à faire ! Si elle était parvenue à s’y tenir même après son périple, avec la gorge horriblement sèche, ce devait être abordable. Ne pouvant se montrer, pour l’heure, plus utile, elle se contenterait ne remédier aux conséquences de son trouble. En silence.
Elle avait beau se le répéter, elle savait bien que ce n’était pas cela qui l’avait tant troublée. Des blessures, elle en avait vues. Autant par son métier que via d’autres expériences de sa vie. Les jambes cassées, justement…
Mais elle ne devait pas se laisser submerger par ces souvenirs-là non plus. C’était hors de question ! Elle contrôlait la situation, et ne perdrait plus jamais pieds comme cela venait d’arriver. Elle transmuta les souvenirs encombrants en carburant pour la résolution. Etape par etape, elle triompherait. Et plus encore si on s’acharnait à parsemer sa route d’obstacles !
Elle acquiesça légèrement à la marque de soutien du prêtre. Et comme elle s’était reprise, comme les idées s’enchainaient de nouveau correctement, elle pensa deux choses. La premières était que finalement, il n’était peut-être pas aussi pourri qu’elle s’était plue à l’imaginer. La seconde : cela ne changeait fichtrement rien à la situation et elle ne devait pas laisser son jugement en être affecté. C’était fini le temps où elle s’efforçait de voir du bien en chacun. Fini ! Fini ! Fini ! Maintenant elle pensait à elle, se battait pour elle, n’avait confiance qu’en elle et surtout : s’était départie de tout ce qui pouvait être associé à de bons sentiments.
Elle accepta toutefois l’eau qu’on ne lui avait pas laissé le temps d’aller chercher seule, et apprécia la réactivité de Thierry. Elle devait reconnaitre - et cela sans que ça ne doive passer pour la moindre sympathie de sa part - qu’il savait se montrer efficace. C’était bon à savoir. Elle aurait une base pour le…
Pour rendre leur cohabitation moins pénible. Parce qu’elle avait perdu cette gentille naiveté ridicule. Elle ne pouvait rien faire pour lui et ne s’encombrerait plus jamais d’aider qui que ce soit.
Elle l’écouta interroger l’homme, et ne put, en le voyant boire avidement, retenir un commentaire :
— Buvez moins vite, ou cela ne vous apportera rien.
Qu’il boive comme elle : par petites gorgées. Ce n’était pourtant pas si difficile à faire ! Si elle était parvenue à s’y tenir même après son périple, avec la gorge horriblement sèche, ce devait être abordable. Ne pouvant se montrer, pour l’heure, plus utile, elle se contenterait ne remédier aux conséquences de son trouble. En silence.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Thierry avait vu que Lucinde semblait s'être reprise en supervisant comment l'homme buvait et lui ordonnait sèchement de ne pas avaler l'eau aussi vite. Au moins, cela prouvait que celle-ci aimait jouer les chefs avec tout le monde, pas seulement avec lui. Il se décida à la laisser gérer et sortit à l'extérieur. Le vent glacial le fit frissonner. Il se pressa de se diriger vers les soldats postés devant l'escalier, qui s'ennuyaient et se gelaient en se réchauffant comme ils le pouvaient. Le prêtre les informa du malaise d'un homme, victime d'une jambe cassée, pendant un entretien et leur demanda d'organiser un transport pour ramener le malheureux dans sa famille. Un des gardes tiqua de la requête, redoutant de se faire manipuler, mais le second se rappela avoir vu effectivement un individu boitillant, très essoufflé, entrer quelques minutes plus tôt. Il allait s'apprêter à s'éloigner pour obéir aux ordres du curé lorsque le troisième soldat l'arrêta. par souci de précaution, il monta rapidement l'escalier et alla vérifier qu'un blessé se trouvait bien dans l'église.
Thierry soupira.
Pourquoi personne ne le croyait quand il réalisait une bonne action ?
Peu après qu'un médecin soit passé pour confirmer la jambe cassée, qui se révélait dans un sale état, pour avoir été utilisé trois jours durant après l'accident, deux hommes se présentèrent pour emporter le blessé sur une charrette et le ramener à sa maison. Thierry supervisa chacune des opérations, la mine sévère, aimant à donner des conseils et des recommandations même si chacun accomplissait parfaitement ce qu'il avait à faire.
Après leur départ, l'église retrouva sa tranquillité et Thierry se rappela la présence de Lucinde. Où avait-elle disparu ? Il se rappela sa pâleur à la découverte du blessé. Serait-elle encore sous le coup de sa défaillance ? Malgré son agacement pour ce bourreau pénible, il ne put ne pas s'inquiéter. Le prêtre chercha dans la nef , puis finit par apercevoir une silhouette vers le clocher.
"Lucinde.. ?"
Thierry soupira.
Pourquoi personne ne le croyait quand il réalisait une bonne action ?
***
Peu après qu'un médecin soit passé pour confirmer la jambe cassée, qui se révélait dans un sale état, pour avoir été utilisé trois jours durant après l'accident, deux hommes se présentèrent pour emporter le blessé sur une charrette et le ramener à sa maison. Thierry supervisa chacune des opérations, la mine sévère, aimant à donner des conseils et des recommandations même si chacun accomplissait parfaitement ce qu'il avait à faire.
Après leur départ, l'église retrouva sa tranquillité et Thierry se rappela la présence de Lucinde. Où avait-elle disparu ? Il se rappela sa pâleur à la découverte du blessé. Serait-elle encore sous le coup de sa défaillance ? Malgré son agacement pour ce bourreau pénible, il ne put ne pas s'inquiéter. Le prêtre chercha dans la nef , puis finit par apercevoir une silhouette vers le clocher.
"Lucinde.. ?"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Le médecin était passé, le blessé emporté. Lucinde avait passé un certain temps assise, inutile. L'oisiveté l'agaçait, mais sa tâche était celle-là : surveiller le curé. Elle avait de la patience à revendre, pourtant...
Elle en avait finalement eu assez, et avait décidé que la carafe et les verres devaient être ramenés là d'où ils venaient : toujours ranger les choses dès que l'on en avait terminé avec. C'était ainsi que l'on maintenait un environnement propre et organisé, favorable à la productivité.
Elle avait aussi envisagé de retourner inspection le clocher. De tout inspecter, afin de s'assurer que Thierry n'avait pas profité de ses brèves absences pour ramener de l'alcool dans l'église. Mais elle avait renoncé : c'était un prétexte pour se laisser distraire, or, elle ne se laissait pas distraire. Ce n'était pas nécessaire, alors, elle s'en passerait !
C'est justement ce moment que l'homme choisit pour revenir vers elle.
— Lucinde... ?
Elle se retourna sans précipitation. Son ton n'était pas agressif, elle n'avait pas de raison de l'être non plus. Générer de l'agressivité était une perte de temps et d'énergie. Autrement dit : elle avait mieux à faire.
— Thierry ?
Elle en avait finalement eu assez, et avait décidé que la carafe et les verres devaient être ramenés là d'où ils venaient : toujours ranger les choses dès que l'on en avait terminé avec. C'était ainsi que l'on maintenait un environnement propre et organisé, favorable à la productivité.
Elle avait aussi envisagé de retourner inspection le clocher. De tout inspecter, afin de s'assurer que Thierry n'avait pas profité de ses brèves absences pour ramener de l'alcool dans l'église. Mais elle avait renoncé : c'était un prétexte pour se laisser distraire, or, elle ne se laissait pas distraire. Ce n'était pas nécessaire, alors, elle s'en passerait !
C'est justement ce moment que l'homme choisit pour revenir vers elle.
— Lucinde... ?
Elle se retourna sans précipitation. Son ton n'était pas agressif, elle n'avait pas de raison de l'être non plus. Générer de l'agressivité était une perte de temps et d'énergie. Autrement dit : elle avait mieux à faire.
— Thierry ?
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Dans l'entrée du cocher, cette partie la plus étroite de l'église, par là où pouvait rentrer le vent et le froid si on oubliait de bien refermer la porte, le prêtre observa la jeune femme qui lui faisait face. Elle semblait être remise de ses émotions et il se décida ainsi à jouer un peu avec elle. Un air espiègle, semblable à celui d'un enfant facétieux, se peignit sur son visage
"Dites donc, ma chère Lucinde, vous ne me devriez pas quelques excuses, non ?"
Il rit en même temps.
"Après tout, je faisais réellement mon devoir. Je portais bien secours à un pauvre homme. Et vous ne m'avez pas cru ! Alors ? Alors ? Qu'est-ce qu'on dit ?"
Les yeux de Thierry étaient moqueurs, animés par cette seule envie de jouer. Allait-elle s'énerver ? Elle ne pouvait pas lui reprocher, en tous les cas, quelque chose qui n'était pas dans leurs accords. Il reprit, toujours plus amusé :
"Alors, on dit quoi, Lucinde ? Allez, je vous aide, c'est en un seul mot, de six lettres. Et si on faisait un pendu ? Attendez ! "
Sans le moindre souci pour les murs, le prêtre sortit un fusain d'une de ses poches et traça rapidement six tirets pour symboliser les lettres du mot à deviner.
"Alors, Lucinde, on joue ? Vous me dites quelle lettre ?"
"Dites donc, ma chère Lucinde, vous ne me devriez pas quelques excuses, non ?"
Il rit en même temps.
"Après tout, je faisais réellement mon devoir. Je portais bien secours à un pauvre homme. Et vous ne m'avez pas cru ! Alors ? Alors ? Qu'est-ce qu'on dit ?"
Les yeux de Thierry étaient moqueurs, animés par cette seule envie de jouer. Allait-elle s'énerver ? Elle ne pouvait pas lui reprocher, en tous les cas, quelque chose qui n'était pas dans leurs accords. Il reprit, toujours plus amusé :
"Alors, on dit quoi, Lucinde ? Allez, je vous aide, c'est en un seul mot, de six lettres. Et si on faisait un pendu ? Attendez ! "
Sans le moindre souci pour les murs, le prêtre sortit un fusain d'une de ses poches et traça rapidement six tirets pour symboliser les lettres du mot à deviner.
"Alors, Lucinde, on joue ? Vous me dites quelle lettre ?"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Lui devait-elle des excuses ? Certainement pas. Elle avait été soupçonneuse, c'est vrai. Mais pour le reste, c'était lui qui l'avait induite en erreur.
— Je ne crois pas, non, répondit-elle donc avec une certaine fermeté.
— Après tout, je faisais réellement mon devoir. Je portais bien secours à un pauvre homme. Et vous ne m'avez pas cru ! Alors ? Alors ? Qu'est-ce qu'on dit ?
Elle hocha la tête. Effectivement, il n'avait rien fait de répréhensible. Il fallait le reconnaître. Cela ne l'empêchait pas d'avoir eu une attitude stupide, et les doutes de sa gardienne demeureraient parfaitement fondés. Après tout, c'était le cas cette fois-ci, mais c'était bien un coup de chance.
— On dit que maintenant, vous savez que je vous ai à l'oeil. Vous y penserez quand il vous viendra une mauvaise idée.
Elle demeurait parfaitement calme, son visage ne laissait transparaître qu'un brin de lassitude. Vraiment, cela n'avait rien d'amusant. Voir un homme adulte fanfaronner comme un enfant de huit ans était juste parfaitement ridicule.
Son histoire de pendu ne lui évoquait rien, mais elle comprit bien vite ce qu'il lui voulait. Et encore cette hésitation, cette décision qu'elle n'arrivait pas à prendre : qu'elle part de son instruction avait-elle le droit de laisser paraître.
Mieux valait commencer par feindre l'ignorance, sans doute. Au moins, dans ce sens-là, elle pourrait changer d'avis. Et si on lui posait des questions, elle n'aurait qu'à dire qu'elle l'avait fait pour que le curé lui fiche la paix. Ce qui n'était même pas faux, à bien y penser. Sinon... Elle n'était même pas obligée de donner la moindre information.
Et le voilà qui sortait un fusain pour griffonner sur les murs. Lucinde retint un juron. Dessiner sur les murs ! Quelle idée !
— Alors, Lucinde, on joue ? Vous me dites quelle lettre ?
— Non. Vous n'avez pas mieux à faire ? Effacez-moi ça tout de suite ! commanda-t-elle sans pouvoir réprimer l'agacement qui perçait dans sa voix.
— Je ne crois pas, non, répondit-elle donc avec une certaine fermeté.
— Après tout, je faisais réellement mon devoir. Je portais bien secours à un pauvre homme. Et vous ne m'avez pas cru ! Alors ? Alors ? Qu'est-ce qu'on dit ?
Elle hocha la tête. Effectivement, il n'avait rien fait de répréhensible. Il fallait le reconnaître. Cela ne l'empêchait pas d'avoir eu une attitude stupide, et les doutes de sa gardienne demeureraient parfaitement fondés. Après tout, c'était le cas cette fois-ci, mais c'était bien un coup de chance.
— On dit que maintenant, vous savez que je vous ai à l'oeil. Vous y penserez quand il vous viendra une mauvaise idée.
Elle demeurait parfaitement calme, son visage ne laissait transparaître qu'un brin de lassitude. Vraiment, cela n'avait rien d'amusant. Voir un homme adulte fanfaronner comme un enfant de huit ans était juste parfaitement ridicule.
Son histoire de pendu ne lui évoquait rien, mais elle comprit bien vite ce qu'il lui voulait. Et encore cette hésitation, cette décision qu'elle n'arrivait pas à prendre : qu'elle part de son instruction avait-elle le droit de laisser paraître.
Mieux valait commencer par feindre l'ignorance, sans doute. Au moins, dans ce sens-là, elle pourrait changer d'avis. Et si on lui posait des questions, elle n'aurait qu'à dire qu'elle l'avait fait pour que le curé lui fiche la paix. Ce qui n'était même pas faux, à bien y penser. Sinon... Elle n'était même pas obligée de donner la moindre information.
Et le voilà qui sortait un fusain pour griffonner sur les murs. Lucinde retint un juron. Dessiner sur les murs ! Quelle idée !
— Alors, Lucinde, on joue ? Vous me dites quelle lettre ?
— Non. Vous n'avez pas mieux à faire ? Effacez-moi ça tout de suite ! commanda-t-elle sans pouvoir réprimer l'agacement qui perçait dans sa voix.
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Thierry s'amusait énormément de la mine réprobatrice qui venait de se peindre sur le visage de Lucinde. Elle ne souhaitait pas reconnaître son erreur. Il le comprenait cela. Lui-même détestait cela. Mais que c'était drôle quand on se trouvait du bon côté ! Il éclata de rire face à sa résolution.
"Bien sûr que si vous me devez des excuses ! Vous ne m'avez pas cru, vous avez douté de moi, et en ça vous m'avez retardé dans une opération qui aurait pu avoir de graves conséquences ! Alors vous demandez me demander pardon !"
Il étouffa un rire, difficilement, puis ajouta :
"C'est comme ça qu'on éduque les enfants ! On leur demande de s'excuser après une bêtise ou une erreur !"
Il s'amusa ensuite à le lui faire deviner ce fameux mot de pardon en proposant un pendu, traçant les tirets sur la paroi du clocher. Lucinde demeurait rigide, refusant toute idée de jouer. Son air sérieux ne lui donna que trop envie de jouer un peu plus avec elle. Il fit mine d'obéir et effaça les signes de la manche de sa soutane, puis se remit à tracer d'autres choses. Des dessins un peu plus grivois, dont les formes se révélaient grossières mais qui laissaient entrevoir ce que les postures signifiaient. Fier de son œuvre, le prêtre se tourna vers sa gardienne, un sourire insolent aux lèvres.
"Alors ? Vous ne voulez pas que j'écrive sur le mur, mais vous n'avez rien dit au sujet de dessiner !"
"Bien sûr que si vous me devez des excuses ! Vous ne m'avez pas cru, vous avez douté de moi, et en ça vous m'avez retardé dans une opération qui aurait pu avoir de graves conséquences ! Alors vous demandez me demander pardon !"
Il étouffa un rire, difficilement, puis ajouta :
"C'est comme ça qu'on éduque les enfants ! On leur demande de s'excuser après une bêtise ou une erreur !"
Il s'amusa ensuite à le lui faire deviner ce fameux mot de pardon en proposant un pendu, traçant les tirets sur la paroi du clocher. Lucinde demeurait rigide, refusant toute idée de jouer. Son air sérieux ne lui donna que trop envie de jouer un peu plus avec elle. Il fit mine d'obéir et effaça les signes de la manche de sa soutane, puis se remit à tracer d'autres choses. Des dessins un peu plus grivois, dont les formes se révélaient grossières mais qui laissaient entrevoir ce que les postures signifiaient. Fier de son œuvre, le prêtre se tourna vers sa gardienne, un sourire insolent aux lèvres.
"Alors ? Vous ne voulez pas que j'écrive sur le mur, mais vous n'avez rien dit au sujet de dessiner !"
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
— Vous vous êtes retardé tout seul, démentit Lucinde.
Elle ne l’avait pas cru, certes, mais ne l’avait pas empêché d’agir. La question s’arrêtait là. Et des deux, ce n’était certainement pas elle l’enfant. Mais elle devait reconnaitre que l’entendre donner cet exemple la rassurait sur sa personne. Certains ne demandaient pas aux enfants de s’excuser. Certains entraient dans des colères monstrueuses et… elle ne se comporterait jamais ainsi avec un enfant.
En revanche, si ce maudit curé s’obstinait à souiller les murs, elle risquait de perdre patience. Non, vraiment, c’était pénible. Et le voir remplacer ses traits par de gribouillages obscènes n’était évidemment pas plus plaisant. Toutefois, il en aurait fallu bien davantage pour la mettre dans l’embarras, et cela ne suffisait pas à déclencher sa colère.
— Effacez-moi ça tout de suite. A moins que vous ne vouliez m’expliquer pourquoi le mot “mère” vous a échappé ?
Elle ne l’avait pas cru, certes, mais ne l’avait pas empêché d’agir. La question s’arrêtait là. Et des deux, ce n’était certainement pas elle l’enfant. Mais elle devait reconnaitre que l’entendre donner cet exemple la rassurait sur sa personne. Certains ne demandaient pas aux enfants de s’excuser. Certains entraient dans des colères monstrueuses et… elle ne se comporterait jamais ainsi avec un enfant.
En revanche, si ce maudit curé s’obstinait à souiller les murs, elle risquait de perdre patience. Non, vraiment, c’était pénible. Et le voir remplacer ses traits par de gribouillages obscènes n’était évidemment pas plus plaisant. Toutefois, il en aurait fallu bien davantage pour la mettre dans l’embarras, et cela ne suffisait pas à déclencher sa colère.
— Effacez-moi ça tout de suite. A moins que vous ne vouliez m’expliquer pourquoi le mot “mère” vous a échappé ?
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Le prêtre s'amusait bien à dessiner ces gribouillis vulgaires sur la paroi du clocher. Dans un lieu saint, cela avait un côté grisant, comme la bêtise qu'un enfant aurait adoré réaliser par simple défi, pour tester la réaction de ses parents ou de l'adulte qui le surveillait. Sa main continuait à tracer de nouvelles figures lorsque Lucinde rappela cette phrase malheureuse lâchée tout à l'heure dans un afflux de mauvais souvenirs. Il se figea.
Le fusain tomba sur le sol.
"Je..."
Son corps trembla, légèrement, presque imperceptiblement. Par réflexe, il tourna la tête, comme pour vérifier que sa mère n'était pas là. Quel idiot ! Elle était morte. En sautant bêtement par la fenêtre pour échapper à l'humiliation d'assister aux créanciers vider le château familial.
"Elle me détestait."
Il observa Lucinde, face à lui, sans réellement la voir, son esprit revoyait à la place l'image austère de sa mère.
"Elle ne voulait jamais me croire. Et elle ne voulait jamais faire une bonne action. Nourrir un mendiant, lui donner de l'argent, pour elle, c'était du gaspillage."
Qu'est-ce qui lui prenait de raconter tout ceci ? Quel idiot ! Thierry secoua la tête se reprit.
"Pardon. Je le suis.. égaré."
Le fusain tomba sur le sol.
"Je..."
Son corps trembla, légèrement, presque imperceptiblement. Par réflexe, il tourna la tête, comme pour vérifier que sa mère n'était pas là. Quel idiot ! Elle était morte. En sautant bêtement par la fenêtre pour échapper à l'humiliation d'assister aux créanciers vider le château familial.
"Elle me détestait."
Il observa Lucinde, face à lui, sans réellement la voir, son esprit revoyait à la place l'image austère de sa mère.
"Elle ne voulait jamais me croire. Et elle ne voulait jamais faire une bonne action. Nourrir un mendiant, lui donner de l'argent, pour elle, c'était du gaspillage."
Qu'est-ce qui lui prenait de raconter tout ceci ? Quel idiot ! Thierry secoua la tête se reprit.
"Pardon. Je le suis.. égaré."
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Il fallut une fraction de seconde pour que le prêtre change drastiquement d’attitude. Elle avait frappé juste, et il était hors de question d’avoir des remords. C’était efficace, et c’était tout ce qui comptait, non ? Si, bien sûr que si.
Ses réflexions devenaient plus limpides que d’habitude quand elles n’étaient pas troublées par la morale et les bons sentiments qui l’avaient bridée jusque là. Elle arriverait à s’en acquitter tôt où tard. La gratitude, la bonté d’âme, la générosité, la compassion, et tous les autres freins de ce type ne seraient bientôt plus un problème. Sa détermination les dissoudrait, parce que se mettre au service des autres, elle savait désormais à quoi cela menait. Désormais, seul son intérêt devait compter. Avec cette priorité parfaitement définie et sa rigueur naturelle, elle obtiendrait tout ce qu’elle voudrait.
Et pourtant, lorsque Thierry lâcha son fusain, lorsqu’elle le vit trembler, se décomposer, lorsqu’elle sut qu’elle avait réellement touché un point sensible, une pointe de culpabilité vint la titiller. Ce n’était pas grave : elle apprendrait à accepter son attitude telle qu’elle devait être.
Elle parvint, avec toute les peines du monde, à demeurer absolument impassible. Neutre. Parce que non, même si elle ne devait pas se reprocher son efficacité, elle ne prenait pas plaisir à rappeler au gens leurs mauvais souvenirs. Elle n’en éprouverait jamais de plaisir. Elle cultiverait la plus profonde des indifférence, et pourrait vivre en paix.
Elle ne se laissa pas - du moins en apparence - attendrir par les lamentations du prêtre. Eh bien oui, sa mère était désagréable. Elle, son père hurlait et donnait des coups pour un oui ou pour un non. Elle, elle venait de trouver ses filles - ses petites renardes adorées - égorgées dans leur maison, où elles auraient dû être en sécurité, entre leur père et leur grand-mère qui n’étaient pas en meilleur état.
Elle avait assez de problème toute seule. Elle n’allait pas en plus s’encombrer de compassion - ni même de pitié - pour un homme qui ne le méritait pas. Qui, s’il repérait la moindre faille dans son armure, s’y engouffrerait pour retourner le rapport de force. C’était vrai : la générosité, ça ne servait à rien. Les bonnes actions, ça ne menait qu’à être détruit. Et la sensibilité, c’était un défaut dont elle se libererait bientôt. Il ne parviendrait pas à jouer avec elle, pas à se faire passer pour un pauvre gamin traumatisé, car même s’il en était un, cela ne justifiait rien.
Quand il se rendit compte qu’il s’était égaré - à vrai dire, elle n’avait pas attendu de réponse, juste qu’il cesse de dessiner sur les murs - elle acquiesça sans rien laisser paraitre de son trouble. Elle avait suffisament perdu pied tout à l’heure.
— Je ne suis pas votre mère et je ne vous déteste pas, affirma-t-elle seulement.
Si la première affirmation était l’évidence même, la seconde n’en était pas moins une certitude. Il était trop insignifiant pour mériter sa haine. Elle la réservait à d’autres. L’enfoncer gratuitement ne lui aurait rien apporté, alors, elle ne le fit pas. Elle réfléchissait correctement et agissait en conséquence. Toujours. Avec toujours la même rigoureuse discipline qui la rendait si résistante. Son dernier repère.
— Je vous aurais cru si vous n’aviez pas agi comme un coupable. Vous le saurez la prochaine fois. Mais maintenant, vous allez effacer ces gribouillis obscènes de ce mur et arrêter de vous comporter bêtement. Ai-je été claire ?
Ses réflexions devenaient plus limpides que d’habitude quand elles n’étaient pas troublées par la morale et les bons sentiments qui l’avaient bridée jusque là. Elle arriverait à s’en acquitter tôt où tard. La gratitude, la bonté d’âme, la générosité, la compassion, et tous les autres freins de ce type ne seraient bientôt plus un problème. Sa détermination les dissoudrait, parce que se mettre au service des autres, elle savait désormais à quoi cela menait. Désormais, seul son intérêt devait compter. Avec cette priorité parfaitement définie et sa rigueur naturelle, elle obtiendrait tout ce qu’elle voudrait.
Et pourtant, lorsque Thierry lâcha son fusain, lorsqu’elle le vit trembler, se décomposer, lorsqu’elle sut qu’elle avait réellement touché un point sensible, une pointe de culpabilité vint la titiller. Ce n’était pas grave : elle apprendrait à accepter son attitude telle qu’elle devait être.
Elle parvint, avec toute les peines du monde, à demeurer absolument impassible. Neutre. Parce que non, même si elle ne devait pas se reprocher son efficacité, elle ne prenait pas plaisir à rappeler au gens leurs mauvais souvenirs. Elle n’en éprouverait jamais de plaisir. Elle cultiverait la plus profonde des indifférence, et pourrait vivre en paix.
Elle ne se laissa pas - du moins en apparence - attendrir par les lamentations du prêtre. Eh bien oui, sa mère était désagréable. Elle, son père hurlait et donnait des coups pour un oui ou pour un non. Elle, elle venait de trouver ses filles - ses petites renardes adorées - égorgées dans leur maison, où elles auraient dû être en sécurité, entre leur père et leur grand-mère qui n’étaient pas en meilleur état.
Elle avait assez de problème toute seule. Elle n’allait pas en plus s’encombrer de compassion - ni même de pitié - pour un homme qui ne le méritait pas. Qui, s’il repérait la moindre faille dans son armure, s’y engouffrerait pour retourner le rapport de force. C’était vrai : la générosité, ça ne servait à rien. Les bonnes actions, ça ne menait qu’à être détruit. Et la sensibilité, c’était un défaut dont elle se libererait bientôt. Il ne parviendrait pas à jouer avec elle, pas à se faire passer pour un pauvre gamin traumatisé, car même s’il en était un, cela ne justifiait rien.
Quand il se rendit compte qu’il s’était égaré - à vrai dire, elle n’avait pas attendu de réponse, juste qu’il cesse de dessiner sur les murs - elle acquiesça sans rien laisser paraitre de son trouble. Elle avait suffisament perdu pied tout à l’heure.
— Je ne suis pas votre mère et je ne vous déteste pas, affirma-t-elle seulement.
Si la première affirmation était l’évidence même, la seconde n’en était pas moins une certitude. Il était trop insignifiant pour mériter sa haine. Elle la réservait à d’autres. L’enfoncer gratuitement ne lui aurait rien apporté, alors, elle ne le fit pas. Elle réfléchissait correctement et agissait en conséquence. Toujours. Avec toujours la même rigoureuse discipline qui la rendait si résistante. Son dernier repère.
— Je vous aurais cru si vous n’aviez pas agi comme un coupable. Vous le saurez la prochaine fois. Mais maintenant, vous allez effacer ces gribouillis obscènes de ce mur et arrêter de vous comporter bêtement. Ai-je été claire ?
Re: [30 Décembre 1597] Récidives ?
Pourquoi avait-il ressenti le besoin de s'épancher sur son enfance misérable à une inconnue ? Une inconnue qui consacrait son temps à restreindre ses libertés. Il éprouvait un embarras terrible et n'osait la regarder. Que pourrait-il faire ? Comment la forcer à le laisser ? Le prêtre fit quelques pas pour jeter un œil dans l'église. Des fidèles venaient d'entrer et s'asseyaient sur un banc. Quelle ironie ! Pour une fois, ses fonctions, que le prêtre abhorrai, allait lui sauver la vie.
"Excusez-moi, Lucinde, mais le devoir m'appelle !"
Sans lui laisser le temps de le retenir, il se précipita rapidement pour traverser l'église et rejoignit un autre petit groupe de fidèles qui entraient. Le religieux les accueillit, bras ouverts, avec beaucoup de bienveillance, commençant à les entretenir de leur famille et prenant des nouvelles de chacun de leurs membres. De temps en temps, son regard se tourna vers la porte entrouverte du clocher. Allait-elle le rejoindre ? Un léger sourire s'étira sur son visage. Non, bien sûr que non, elle ne pouvait surgir et provoquer un scandale. Autrement, il demanderait aux soldats d'intervenir en proclamant que celle-ci perturbait son office. Tout en continuant à discourir avec une mère qui se plaignait des bêtises de ses fils, Thierry rit intérieurement. Il avait gagné !
"Excusez-moi, Lucinde, mais le devoir m'appelle !"
Sans lui laisser le temps de le retenir, il se précipita rapidement pour traverser l'église et rejoignit un autre petit groupe de fidèles qui entraient. Le religieux les accueillit, bras ouverts, avec beaucoup de bienveillance, commençant à les entretenir de leur famille et prenant des nouvelles de chacun de leurs membres. De temps en temps, son regard se tourna vers la porte entrouverte du clocher. Allait-elle le rejoindre ? Un léger sourire s'étira sur son visage. Non, bien sûr que non, elle ne pouvait surgir et provoquer un scandale. Autrement, il demanderait aux soldats d'intervenir en proclamant que celle-ci perturbait son office. Tout en continuant à discourir avec une mère qui se plaignait des bêtises de ses fils, Thierry rit intérieurement. Il avait gagné !
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