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[8 janvier 1598] - "Griefs of mine own lie heavy in my breast" [Terminé]

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Message par Éléonore de Fromart Mer 3 Fév - 22:57

Eléonore s’en voulait de médire ainsi d’Eltinne. Elle savait toute l’affection que sa gouvernante lui portait. Elle savait le désespoir qu’elle lui avait causé au cours de l’année précédente. Mais il fallait dire qu’elle était fort envahissante, et qu’elle n’aurait guère été d’une grande aide pour tout ce qui relevait de l’amusement et de la folie - et la traitait encore comme une enfant à bientôt vingt-deux ans, ce qui était particulièrement pénible. Aussi se permit-elle de s’en plaindre à demi-mots. Une plainte nuancée, parce qu’au fond, sa sévérité ne faisait qu’accentuer le frisson de la désobéissance.

— Parfois, c’est amusant. Parfois, c’est seulement dommage, commenta simplement Eléonore. Certaines relations ne devraient pas avoir à s’envenimer, ni à être entravées.

Si ses paroles rappelaient quelques évènements récents, c’était bien sûr pûrement fortuit. De toute manière, le premier exemple qu’elle en avait était inconnu de son interlocuteur. Il concernait un obstacle particulièrement désagréable dont le nom écorchait encore les oreilles de la jeune femme quand, par hasard, il était prononcé. Il y avait aussi, plus simplement, les difficultés qu’elle avait connues avec Gabriel, et qui ne s’estompaient pas tout à fait.

Pour le reste, il y avait une vérité qu’elle ne pouvait nier :

— Parfois, alors, cela mérite vraiment que l’on se batte pour arranger les choses. Parce qu’au fond, c’est cela, le plus important. Que les difficultés soient dépassées et, qu’au lieu de creuser le fossé, elles permettent finalement de le combler.

Paroles qu’elle prononça bien entendu tout à fait innocemment. Et encore plus innocemment :

— Ce sont bien les défis les plus valorisants, même s’ils demandent plus d’efforts que les autres.

Et, le laissant méditer là-dessus - ou effacer ses paroles, elle n’en savait rien -, elle reporta son attention sur la scène. Elle qui était pourtant si empathique ne parviendrait pas à s’en laisser réellement émouvoir, mais il fallait admettre que c’était divertissant.

Bientôt, le jeu fit place à un nouvel entracte, et Coldris annonça qu’il souhaitait sortir. Elle hésita un moment. Elle avait besoin de… de pouvoir pleurer. Elle ne savait pas pourquoi, elle avait juste envie de pleurer, et de faire le décompte de toutes les erreurs qu’elle avait déjà commises ce soir. De mesurer combien elle l’avait déjà dégouté de l’idée de sa compagnie…

Mais… Elle ne pouvait pas lui montrer qu’elle avait peur des gens. Cela n’aurait fait que multiplier les dégats. Elle devait faire comme si cela ne l’affectait pas, elle s’y était préparée.

— Si vous me le proposez, répondit-elle en se levant.

Elle attrapa son manteau sur le dossier et le remit prestement, puis suivit Coldris dehors. Un pas, deux pas, cinq pas. Elle se tendit légèrement. Quelque chose clochait. A force, elle n’avait même plus besoin de se retourner pour savoir si elle était suivie. Oh, évidemment, ce n’était peut-être qu’une coincidence mais… Oh, et puis, elle devait se faire des idées, comme d’habitude.

Oui, oui, comme d’habitude. Tout à fait... la taquina le plus doux des souvenirs, sans la convaincre pour autant.

Elle prit le bras du ministre, tentant d’oublier cette hypothèse qui ne servait à rien. C’était vraiment énervant ! Tout ce qu’elle aurait pu mettre en oeuvre pour vérifier par elle même s’ils étaient effectivement suivis aurait réduit à néant toute discrétion s’il s’agissait d’un allié. Et puis, de toute façon, cela n’avait pas fort d’importance. Que ce soit le cas de celui-là ou non, elle pouvait être sûre qu’il y en avait. Il aurait fallu être inconscient pour ne pas prendre de précautions quand on occupait un tel poste. Et si ce n’était pas le cas et que tout cela s’achevait par du sang, eh bien… Non, elle ne devait pas penser ainsi. Elle devait avoir confiance, c’était tout.

— Dites… Il y a une chose qui me pose question… Vous pourriez peut-être m’expliquer ce que vous avez bien pu raconter pour qu’un certain individu vienne me dire que de toute façon, mon amant ne pouvait rien contre lui...

Merde ! Mauvaise formulation ! Pourquoi laissait-elle parler cette rancune qu’elle était certaine de ne plus porter ? Elle déglutit avec difficulté. Il n'allait pas relever. Il avait l'habitude de l'entendre dire n'importe quoi, désormais.

— Enfin, je veux dire, pour qu’on me parle de mon amant.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 4 Fév - 22:38



Les difficultés c’était ce qui avait fait sa vie ce qu’elle était aujourd’hui. Aussi bien les aspects positifs que négatifs. À bien y réfléchir, il ne changerait pas grand-chose s’il devait recommencer sa vie aujourd’hui.

Ce que répondit Éléonore le tendit instantanément. Il était sûr: ce n’était pas des paroles aussi innocentes qu’elle le laissait entendre. Non, c’était choisi pour faire écho aux derniers évènements. Il détestait par-dessus tout que l’on essaye de prendre le contrôle de sa vie. C’était viscéral. Et ces seuls mots pseudoanonymes qui lui étaient en réalité subtilement destinés suffisaient à lui faire serrer les mâchoires. Il ne dut son salut -pour une fois- qu’à sa mémoire qui lui rappela les pleins et déliés emplis de douceurs et d’empathie qu’elle lui avait écrits. Des mots qui n’accusaient personnes, et où… elle ne l’avait pas pris pour un monstre. Elle avait même compris et vu qu’il prenait sur lui-même et qu’il aurait pu dire ô combien de plus terribles paroles encore. Il se rappela également des excuses Alduis, mais c’était surtout ses mots à elle qui continuaient de danser sur les parois de son esprit.

- Vous êtes admirable, Éléonore. avoua-t-il avec cette déroutante sincérité dont il faisait parfois preuve de manière spontanée.

Lorsque le rideau tomba, il annonça sa volonté de prendre l’air. Cela faisait plus d’une heure qu’il était enfermé et son esprit autant que ses jambes réclamaient de l’activité sous peine de relâcher cette nuée d’étourneaux qui saccagerait les moindres recoins de sa raison jusqu’à ce qu’il ne puisse plus s’entendre penser. Sa petite luciole à son bras, il descendit l’escalier sans prêter attention à la présence de Valmar. Depuis le temps, il avait l’habitude de se faire suivre par ses hommes. Mais toujours discrètement. Après trois tentatives d’assassinats, on finissait par accepter de bon gré des yeux supplémentaires. C’était ça, ou vivre enfermé chez soi avec les rideaux tirés. Autant dire qu’il valait mieux mourir à ce niveau.

Coldris inspira l’air frais, se perdant dans une vague contemplation des jeux de lumière dorée du soleil d’hiver déclinant sur l’horizon lorsqu’elle décida finalement de rompre le silence qui s’était installé entre eux. Il fronça les sourcils en tâchant de remettre les choses dans l’ordre puis de leur donner un sens.

- Vous parlez de Thierry ? Vous l’avez revu ? s’étonna-t-il tout en étant sûr de sa déduction.

Il arrêta de marcher le temps de lui fournir les explications. Du moins, ce qu’il pensait être la réponse à sa question.

- J’ai simplement dit que je vous connaissais et que nous avions diné ensemble. Rien de plus, rien de moins. Le reste n’est que déduction de sa part. Mais… Vous êtes sûr qu’il ne vous a pas plutôt que je ne pouvais rien pour lui ?

Il reprit sa promenade l’air de rien. L’activité physique l’aidait à se concentrer et puisque le sujet de Thierry était sur la table, autant l’essorer jusqu’au bout.

- D’ailleurs… Ce n’est pas vous qui avez insisté pour que rien ne soit divulgué de cette affaire ? Les nouvelles vont décidément bien vite jusqu’aux oreilles de notre bon baron.

Son sourire narquois solidement arrimé sur ses lèvres, il l’observait avec amusement. Non pas qu’il lui en veuille loin de là, seulement… Il ne pouvait pas ne pas lui en faire la remarque !


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Message par Éléonore de Fromart Ven 5 Fév - 18:06

Éléonore ne fut pas surprise. Évidemment que ce genre de recommandations n'allait pas plaire à son interlocuteur. Elle l'avait planté là sans une explication et elle se permettait encore de lui faire la leçon... C'était bien facile, pour elle, de dire qu'il y avait des efforts à faire. Elle n'en avait jamais eu besoin, dans sa jolie petite vie facile... Mais elle ne jugeait pas, elle ne faisait qu'encourager. C'était beaucoup trop dommage de se déchirer ainsi, et ils ne parviendraient qu'à se blesser mutuellement en s'obstinant sur cette voie. Elle ne voulait pas ça. Ni pour l'un, ni pour l'autre, ni pour personne. Mais surtout pas pour eux. Alors si ses mots avait une seule chance d'atteindre leur destinataire, quoi que cela lui coûte, la jeune femme estimerait que c'en valait la peine.

— Vous êtes admirable, Éléonore.

Elle se figea. Elle s'était préparée à encaisser une réplique sèche ou un silence pesant, mais ça... Elle glissa un regard vers Coldris, hébétée, les lèvres tremblantes. Une syllabe étouffée craqua dans sa gorge. Non, elle avait mal entendu. Ou bien, le sarcasme lui avait échappé... Mais non, il n'y en avait pas. Ça ne pouvait pas lui échapper. Il était… sincère. Elle percevait toujours ces choses-là. Même pas lui. C'était insensé…

Admirable... Admirablement stupide, oui. Admirablement insupportable, admirablement fatigante, admirablement indécente, admirablement lâche ; tout cela, oui, avec une pointe d'aigreur dans la voix. Mais admirable tout seul, c'était absurde.

Elle reporta ses yeux vers la scène, réprimant toutes les objections pathétiques qui demandaient à être exprimées. Admirable parce qu'elle se permettait de demander aux autres des efforts qu'elle n'aurait probablement pas eu la force de fournir elle-même ? Parce qu'elle parlait a tort et à travers ? Parce qu'elle mélangeait tout au point de lui parler de son fils alors qu'ils étaient supposés partager un bon moment ? Elle n'avait rien qui puisse être trouvé admirable. C'était Ariste, qui était admirable. Toute la partie admirable d'eux était morte avec lui.

Elle s'était à peine remise quand le rideau se baissa et que Coldris lui proposa de l'accompagner dehors, ce qu'elle s'empressa d'accepter. De toute manière, elle ne devait pas paniquer. Elle s'était préparée, et... Et s'ils devaient vraiment croiser quelqu'un, le ministre avait assez d'aisance pour eux deux. Elle ne voulait pas encore perdre ses moyens devant lui.

Elle s'efforçait d'éluder la surveillance si aisément repérée. Elle n'osait pas l'évoquer. Si c'était un de ses gardes, il trouverait ridicule qu'elle relève sa présence. Si ce n'était pas le cas, il la jugerait paranoïaque. Mieux valait se taire. Dans le pire des cas, elle se sentirait assez coupable pour en finir une bonne fois pour toute. Ariste comprendrait.

Elle évoqua plutôt – bien que ce ne fut guère plus malin – les informations qu'un certain curé n'auraient pas dû détenir.

Thierry… En plus il l'appelait par son prénom, comme s'ils évoquaient un ami commun. Ne pouvait-il pas éviter de lui rappeler qu'il avait ce type de fréquentations ?

— Ne faites pas comme si je vous l'apprenais. Votre... Comment était-ce, encore ? …Léonilde vous l'aura certainement dit, fit-elle remarquer d'un faux ton de reproche. Alors ?

Et il répondit. Alors, il avait mentionné ça. Et à combien d'autres ? Sauf que...

— Vous êtes sûre qu'il ne vous a pas plutôt dit que je ne pouvais rien pour lui ?

Éléonore fronça les sourcils. S'ils n'étaient pas déjà arrêtés, son pas se seraient stoppé net.

— Si j'avais à douter de mes oreilles, il me resterait pour preuve son mépris et sa suffisance, argua-t-elle.

Elle hésita à se reprendre. Elle ouvrit la bouche pour préciser au vicomte qu'il le disait contre elle, pas contre lui. Qu'il était mêlé à cela par un malheureux concours de circonstances. Elle aurait même pu ajouter qu'elle avait été la première à le mentionner. Oui, voilà, même si c'était faux, elle dirait que c'était elle qui l'avait invoqué. Il n'avait vraiment pas besoin qu'elle le charge.

Sauf qu'elle n'y parvint pas. Elle s'empressa de revenir à sa question initiale pour s'empêcher d'enfoncer gratuitement le prêtre. Elle avait fait ce qu'elle avait a faire, son sort ne la concernait plus. Elle n'avait pas le droit de nourrir de rancoeur à son égard : il ne lui avait rien fait. C'était un être abject, mais qui ne lui avait rien fait. Ce n'était pas à elle de lui en vouloir.

— Dois-je craindre que vous en informiez tout Braktenn avant la fin du mois ? demanda-t-elle, taquine.

Mais la réponse lui importait tout de même un peu… D'accord, elle était assez sotte pour le voir en public mais... C'était différent ! Et... Et puis, tant pis si tout le monde devait être au courant, mais qu'il le lui dise, au moins.

Il imposait son rythme, elle adaptait le sien. Parler de ce prêtre ravivait des émotions désagréables. Elle était faible, beaucoup trop faible. Trop faible pour maîtriser tout à fait ses paroles.

— Je... J'ai fait ce que j'avais à faire. Et... Que vous le vouliez ou non, c'est vous qui m'en avez donné la force...

Elle déglutit. Elle était sotte, tellement sotte. Elle disait n'importe quoi. Il allait voir, il allait se souvenir. Il se rappeler de quelle idiote incontrôlable elle était. L'idée ne fit que m'angoisser davantage. Non, elle ne voulait pas qu'il la rejette tout de suite. Pas pour quelque chose d'aussi stupide.

— Enfin je... Je... Je veux dire que... C'est... J'avais lâchement enterré cette histoire, et j'ai réalisé que...

Elle marchait toujours, fuyant son regard. Pourtant, son regard... Non, il ne voudrait plus d'elle. Il allait comprendre, maintenant. Qu'elle était vraiment aussi fragile que ce qu'il avait vu d'elle lors de leur première rencontre.

— Que je devais le faire, articula-t-elle, la mâchoire crispée. Quelle idiote orgueilleuse elle avait été de n'emporter aucun de ses talismans.
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Message par Coldris de Fromart Ven 5 Fév - 22:35



Son compliment -parce qu’il fallait se rendre à l’évidence, c’en était un-, la laissa circonspecte. Pourtant ce n’était que la plus humble des vérités : elle était admirable de bien des façons. Elle lui disait toujours ce qu’elle pensait sans jamais avoir la volonté de le blesser. Non mieux que cela encore : elle ne le blessait jamais. Dire qu’il n’avait jamais été piqué par ses propos aurait été mentir, mais blesser non. Elle était la douceur et la bienveillance incarnée. Elle comblait chacun de ses innombrables défauts à la perfection. Sous son manque de confiance et ses maladresses, se cachait en réalité une femme forte. Forte et admirable. Soyons honnêtes : si l’on exceptait son pouvoir ou son argent, il n’avait en réalité pas grand-chose à offrir, mais s’il pouvait lui donner l’assurance qu’elle méritait en la débarrassant de ses entraves, alors il irait les briser une à une avec un profond plaisir. Il la laissa à ses pensées jusqu’à la chute du rideau.

Une fois à l’air libre, le sujet épineux refit surface comme une épave de navire sortit tout droit des abysses. Oh, il avait bien vu cet infime mouvement oculaire lorsqu’il avait prononcé le nom de « Thierry », qu’importe ! Ses relations étaient ce qu’elles étaient et personne n’y changerait quoi que ce soit.

- Vous vous trompez. Léonilde s’en tient aux faits. Il vous a rencontré sur le parvis de Saint-Eustache. Vous auriez pu ne pas entrer et surtout ne pas lui parler. Alors, oui, j’étais surpris de l’apprendre d’une autre connaissance commune. Il faut croire que le monde des Grands est petit, n’est-ce pas ?

Il eut un petit regard malicieux avant de reprendre tout son sérieux pour lui répondre au sujet de cette dénomination. « Amant », non, il ne l’était pas malheureusement. Il devait oublier à quel point, il était délicat de mettre dans son lit une femme qui n’était pas mariée, surtout lorsque l’on était veuf. La dernière chose qu’il voulait c’était de se retrouver obliger à choisir entre un mariage ou un duel. Il avait toujours été terriblement médiocre à l’escrime et l’âge avançant n’avait rien arrangé. Il ignora ses paroles amères -l’affaire était close-, gardant pour lui un sourire à l’évocation des qualificatifs « mépris » et « suffisance » : aucun doute, on parlait bien de son lointain cousin. De toute façon, elle-même semblait passer à autre chose en le taquinant. Ce fut donc dans la même veine qui lui répondit en accrochant son regard :

- Je ne sais pas. Est-ce que vous avez prévu de m’épouser ?

S’il n’y avait eu personne aux alentours, il l’aurait embrassé sur le champ. Malheureusement, ce n’était pas le cas. Ce serait partie remise. Peut-être que le début de l’acte III passerait à la trappe, qui savait ?

Il repartit aussitôt d’un pas alerte, pensant le sujet clos. La seconde vague arriva. Il ralentit quelque peu alors qu’il sentait ses doigts se refermer autour de son bras. Comment aurait-il pu passer à côté ? Il avait envie de la prendre dans ses bras, comme dans sa voiture. Il avait envie de la bercer et de lui dire qu’elle n’avait rien à se reprocher.

- J’ai envie de vous enlacer, ma petite luciole et même plus encore, mais vous voyez je sais être raisonnable. Parfois. Vous avez fait ce que vous jugiez être juste, faites-vous confiance, c’était une sage décision. Loin de moi l’idée de vous blâmer.

Son pas actif ne parvenait pas à calmer sa conscience. Le sujet n’était pas encore clos. Pas vraiment. Il n’avait pas besoin de lui dire. Il n’avait pas envie de lui dissimuler, c’était différent.

- Puisque l’on parle de Thierry… Je préfère vous informer qu’il est venu hier à Fromart. Je sais que vous allez être en colère et que je vous avais dit que je n’interviendrais pas… Seulement, il m’a fait part d’informations capitales qui devraient lui permettre d’obtenir une peine différente.  Je tenais à vous le dire.
quand bien même je n’y suis pas tenu.

Il inspira péniblement. Il ne voulait pas gâcher cette soirée à cause de ce maudit prêtre incapable de se contenir. Il soupira à nouveau et se sentit obligé de détailler ses propos sans savoir par où commencer.

- N’allez pas croire que je me suis incliné aussi facilement. Je pense qu’il ne risque plus d’abuser une femme de si tôt et qu’il a désormais pris la pleine mesure du terme « consentement ». La leçon était claire. D’autre part, j’ai exigé des excuses publiques et je tiens à ce que vous soyez présente.

Cette fois, il devait avoir fait le tour de la question. Les informations en question ne la concernaient nullement. Il cligna brièvement des paupières. Et ne put s’empêcher d’ajouter avec un air facétieux pour changer de sujet :

- Finalement vous n’avez pas l’air si honteuse à mes côtés, ma douce petite luciole !.

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Message par Éléonore de Fromart Sam 6 Fév - 12:10

Léonilde s'en tenait au fait… N'empêche que pour le reste, il pouvait très bien l'avoir deviné... Quant à l'autre connaissance qui avait pu le lui apprendre... Eh bien elle aurait autant aimé oublier son existence. Elle préférait vérifier, non sans une touche d'humour, qu'il n'aille pas raconter leur dîner partout non plus. Elle laissa échapper un rire léger à sa réponse.

— À peu près autant que vous, je dirais.

Ce qui voulait clairement dire "absolument pas". Mais il n'était pas nécessaire de se marier pour se perdre dans sa compagnie, ni se noyer dans son regard. Ni pour l'embrasser éperdument. Ni pour dépasser les limites du raisonnable. Ni pour avoir passé la nuit à penser à lui. Mais cela ne voulait rien dire : juste qu'elle était impatiente d'aller au théâtre. Avait-elle vraiment envisagé de reporter ou avait-elle écrit ce mot juste pour se laisser croire qu'elle était capable de lui résister ?

Malheureusement, la conversation s'alourdit de nouveau, et elle se crispa légèrement sur son bras. Elle se justifia maladroitement. La confiance lui manquait. L'angoisse montait. Lui, c'était lui qui l'y avait poussée. Elle n'aurait jamais su affronter ça toute seule, sans Ariste. Mais elle l'avait vu, et ensuite, c'avait été réalisable. Et elle n'avait plus eu le choix.

Elle craignit que le ministre n'y voie une faiblesse. Qu'il la trouve absolument ridicule, d'autant qu'elle s'était un peu fort accrochée à son bras. Mais non.

— J'ai envie de vous enlacer, ma petite luciole…

Et elle aurait tant aimé qu'il puisse le faire. Elle rêvait de se blottir contre lui et de se laisser bercer, entourée par ses bras rassurants. Depuis quand ne s'était-elle pas sentie tout simplement bien, comme c'avait été le cas alors ? Oh, bien sûr, cela ne voulait rien dire mais c'était ainsi.

Rien que d'être à son bras et d'écouter sa voix la calmait. Il ne lui en voulait pas. Il l'acceptait toujours…

—… et même plus encore...

Son sourire revint, espiègle. Il ne perdait pas le Nord... Mais il avait raison : il fallait parfois être raisonnable. Chaque chose en son temps. Là, c'était promenade dans les jardins, à respirer l'air hivernal. Elle se rendit compte alors qu'elle avait oublié ses gants. C'était malin ! Il faudrait juste que personne ne voie ses mains.

Et pour ce qui était de se faire confiance… Ce n'était pas une chose qu'elle savait faire seule. Mais si lui ne lui en voulait pas, s'il estimait que c'était une sage décision… Elle trouva dans cette idée le réconfort qu'il lui fallait. Oui, elle avait pris la bonne décision. C'était nécessaire. Et maintenant, ça allait s'arranger. Elle acquiesça simplement, soucieuse de ne pas relancer le sujet.

—… je préfère vous informer qu'il est venu hier à Fromart...

Elle se crispa de nouveau. C'est là qu'elle se rendit compte qu'elle s'était presque parfaitement détendue. Elle allait être en colère, elle ?  Mais qu'est-ce que… Elle mordilla sa joue pour encaisser cette révélation.

Était-elle en colère ? Oui, il avait dit qu'il n'aiderait pas ce monstre, il l'avait dit ! Mais de toute façon, arrivait-on à son poste en étant toujours honnête ? Elle aurait dû s'y attendre. Oncle Eineld le lui avait assez rappelé. Ces gens-là n'avaient aucune morale, aucune parole. Ces gens-là pouvaient faire n'importe quelle concession sur leurs résidus de conscience pour peu que ça leur rapporte.

Non ! Non, c'était faux, elle le savait. Oncle Eineld dramatisait. De plus, ce n'était pas la question. Coldris se montrait franc avec elle, elle n'avait donc rien le droit de lui reprocher. Et puis, de toute manière, ce qui comptait, ce n'était pas que l'autre animal prenne cher. Ce n'était pas ce qu'elle voulait, elle n'était pas comme ça. Il fallait seulement l'empêcher de nuire. Elle voulut le lui dire. Dire qu'il fallait se méfier. Qu'il fallait s'assurer tout de même qu'il n'y ait pas de récidives. C'était tout ce qu'elle voulait… Mais après tout, elle n'avait pas son mot à dire. Elle n'avait aucunement le droit de remettre en cause des choix qui l'a dépassaient très certainement. D'ailleurs... Le sens de "informations capitales" était assez clair pour qu'elle ne l'interroge pas plus.

— Merci, articula-t-elle.

C'était la seule chose qu'elle savait dire. Merci, au moins, de m'avoir prévenue. Parce qu'au fond, il aurait très bien pu le taire, et qu'elle ne l'apprenne que bien plus tard.

Et le voilà qui se justifiait. Pourquoi se justifiait-il devant elle ? Elle n'était rien, n'avait rien à dire et... Quoi qu'en dise le baron de Frenn, elle n'avait fait que se mêler des affaires des autres dans cette histoire.

— Des excuses contraintes ne seront jamais sincères, je n'ai pas besoin d'écouter cela.

Et encore moins de croiser son regard triomphant qui lui dirait "vous voyez, je m'en sors toujours" pour mieux recommencer ensuite. Mais elle ne voulait pas en vouloir à Coldris. Il était vraiment convaincu qu'il n'y aurait pas de récidives, elle en était sûre. Elle avait bien vu qu'il était sincère, l'autre jour. Qu'il n'avait vraiment pas l'intention de couvrir ça.

Le problème, c'était elle. Seulement elle. Elle devait simplement oublier cette rancune pernicieuse qui la rongeait encore. Elle se détestait tellement d'être incapable de s'en débarrasser. Mais... Ce monstre n'avait pas le droit de gâcher son après-midi. Alduis en avait le droit, ça oui. Parce qu'Alduis méritait qu'elle fasse ce sacrifice. Mais pas cet espèce de rat répugnant. Elle ne le laisserait pas gagner.

— Finalement vous n’avez pas l’air si honteuse à mes côtés, ma douce petite luciole !

— Je...

… suis inconsciente, stupide, ridicule, pathétique et d'une faiblesse de caractère inégalable.

— J'aurai tout le temps de regretter plus tard, non ?

Elle esquissa un sourire. En attendant, il fallait qu'elle en profite.
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Message par Coldris de Fromart Sam 6 Fév - 21:48



Elle ne comptait pas l’épouser et il n’avait pas vraiment besoin de poser la question pour s’en assurer. C’était plus pour la taquiner qu’autre chose. Au moins, les choses avaient le mérite d’être claires entre eux, ce qui n’en rendait que plus agréable chacune de leurs rencontres, qu’importe si les sujets abordés n’étaient pas toujours des plus frivoles ou réjouissants, il n’en appréciait pas moins sa compagnie. C’était comme cet instant où elle évoqua de nouveau Thierry en s’arrimant à son bras. Il ignorait comment cela était possible, mais ses mots, comme de délicates petites mésanges parvenaient toujours à se frayer un chemin dans l’enchevêtrement de branches que constituait son âme. Il avait alors envie de la prendre dans ses bras, de la serrer contre lui, de l’embrasser sur les lèvres et partout ailleurs. Il avait envie de la rassurer et plus encore de lui donner cette confiance qu’elle méritait. Elle avait raison de croire qu’il ne perdait pas le nord : comment aurait-il pu alors qu’elle était une tentation de chaque instant ?
Il s’en voulut presque de rompre ce qui annonçait un moment léger en lui avouant qui était venu à Fromart, la veille. Une nouvelle fois, son bras s’enroula autour du sien et toute sa tension de se déversa. Elle pouvait être en colère, il ne l’en blâmerait pas. A la place, elle le remercia. Il haussa un sourcil, surpris. Il ne s’était pas attendu à ça. Il hocha la tête en silence. Merci de lui avoir dit ? C’était tout ? Elle ne lui en voulait pas ?

- Vous avez raison. Et c’est pour ça que je veux que vous soyez présente. Si vous jugez que ses excuses ne sont pas sincères, je ne les accepterai pas. Je veux que vous puissiez aussi… Tourner la page.

Coldris croisa son regard et cela fut suffisant pour lui faire oublier tout le reste. Il n’en retenait que cette main toujours solidement accrochée à son bras. Cette main qui lui rappelait qu’elle craignait d’être vue en sa compagnie. Éléonore lui répondit hésitante, il attrapa sa main libre, glacée par l’absence de gants et la porta à ses lèvres. Il avait envie de tellement plus… La simple vision de ces lèvres inaccessibles suffisait à déclencher une onde de désir qui traversait son corps de part en part.

- Vous aurez surtout tout le temps de regretter tout ce que vous n’avez pu faire. réussit-il à répondre avec un sourire taquin.

Celui qui allait regretter quelque chose en l’état c’était lui. Il allait regretter de s’être laissé emporter par le courant vers cet affluent où il ne maitrisait plus rien. À la fois trop connu et terriblement inconnu. Car il y avait un problème : elle prenait bien trop de place dans son esprit. Il n’y avait qu’une seule femme qui avait su s’immiscer dans ses pensées alors que ses doigts couraient sur la chaude porcelaine d’une autre. Maintenant, elles étaient deux et cela le terrifiait autant que cela l’attirait.

- Si vous ne pouvez pas m’accompagner au bal, cela ne fait rien. il marqua une pause ce n’est pas ce qui m’empêchera de vous dérober à ses bras. Qui plus est, vous n’avez rien à craindre des ragots puisque c’est un bal masqué.

Il n’abandonnait pas l’idée de la faire danser ce soir et là, et plus encore. S’il ne parvenait pas à la convaincre, alors il trouverait le moyen d’y parvenir.

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Message par Éléonore de Fromart Dim 7 Fév - 11:59

— Vous avez raison. Et c’est pour ça que je veux que vous soyez présente. Si vous jugez que ses excuses ne sont pas sincères, je ne les accepterai pas.

Éléonore eut un instant de panique. Non, elle ne pouvait pas déterminer cela. Et que se passait-il s'il n'acceptait pas ? Il faudrait recommencer ? Ce n'était pas en demandant à quelqu'un de recommencer qu'il serait plus sincère. D'ailleurs, pour être sincèrement désolé, c'était la faute qu'il fallait regretter, pas les conséquences fâcheuses pour soi.

Il était hors de question qu'on lui impose une telle responsabilité. Tout simplement parce qu'elle savait d'avance qu'elle ne saurait pas être convaincue. Il y avait trop de duplicité chez cet individu pour que ce soit possible. Elle n'avait pas envie de l'enfoncer elles-même. Elle était bien trop lâche pour ça. Mais elle n'aurait pas non plus voulu le laisser s'en tirer à trop bon compte. Fichue rancune persistante.

De toute façon… elle se rassura : de toute façon, c'était juste une façon de parler : on ne lui demanderait jamais son avis. C'était bien mieux ainsi.

— Je veux que vous puissiez aussi… Tourner la page.

Elle chercha son regard, et secoua imperceptiblement la tête.

— Tourner la page. Vous dites ça comme si... Comme s'il m'était arrivé quelque chose.

Or, il ne lui était rien arrivé. Pas à elle. Elle était troublée parce qu'elle était trop faible, c'était tout. Elle exagérait pour faire son intéressante, c'est ce qu'on dirait. Parce que l'empathie, c'était bien joli, mais à un moment il fallait cesser de se comporter comme une enfant de cinq ans. Personne ne pouvait comprendre, voilà tout. Elle devait cesser de jouer les victimes en permanence, c'était vraiment pitoyable.

— Il ne m'est rien arrivé, rappela-t-elle. Ce n'est pas à moi d'être traumatisée par ce qu'il s'est passé.

Traumatisée, le mot était dit. Même pour dire qu'elle ne l'était pas, c'était un terme trop fort. Elle ne savait faire que se plaindre, de toute manière. Se plaindre et s'accrocher bêtement à son bras. À force de la voir se lamenter comme ça, il allait la rejetter très vite. Une gamine lâche, stupide et pleurnicharde n'avait rien à faire au bras d'un homme comme lui. Elle lui faisait honte, ridicule qu'elle était.

Et pourtant, ce fut elle qui fut interrogée à ce sujet. Sans doute parce que les ragots l'accableraient elle – et à juste titre. Elle tenta de répondre le moins bêtement possible mais... Le doute perçait dans sa voix. Comment la supportait-il encore ? Elle n'avait rien de son charisme, ni de sa force, ni de son esprit, de... Enfin bref, elle n'avait rien qui put justifier qu'il perde son temps avec elle – parce que de jolies femmes, il pouvait certainement obtenir toutes celles qu'il voulait, et PS seulement les insupportables idiotes trop sensibles comme elle.  

Et pourtant, dans son regard, elle aurait presque pu oublier toute sa souffrance. Dans son regard, elle lisait de l'estime, de l'affection et du désir. Pas de dégoût, pas d'agacement, pas de pitié. Et pourtant, il devait bien voir l'étendue de sa médiocrité. Il était bien trop intelligent pour ne pas avoir remarqué ses hésitations, ou cette faiblesse qui la forçait à se retenir à son bras. Cette faiblesse pour laquelle elle s'était laissée bercer sur la route de Fromart. Il avait certainement bien mieux à faire que de gérer les chagrins de ses maîtresses – encore moins de celles qui ne l'étaient pas encore – et pourtant, il faisait cet effort.

Là encore, au lieu de rouler des yeux pour lui signifier qu'elle était vraiment pathétique et lassante, il prit sa main sur laquelle il posa un baiser. Ses lèvres tiède semblaient brûlante sur sa peau glacée, et cette chaleur se répandit dans tout son corps. Pourquoi ne pouvaient-ils pas s'embrasser librement. Au fond, cela n'avait rien de mal. Elle comprenait mieux Alduis, qui devait, pour sa sécurité, se cacher encore plus qu'elle. Ce devait vraiment être pénible.

Quant à regretter ce qu'elle n'aurait pas pu faire, cela l'aurait beaucoup étonnée. Elle regretterait peut-être ce qu'elle aurait fait, mais certainement pas l'inverse.

— Vous croyez ? défia-t-elle avec un sourire en coin. Et moi qui comptais sur vous pour vous assurer que cela n'arrive pas.

Sa main caressa doucement la sienne avant de s'en échapper. Ils devaient faire attention. Surtout elle. Même si le simple fait de marcher avec lui était bien assez compromettant.

Elle se détacha de son regard pour admirer les jardins enneigés. Non, elle n'aurait rien à regretter. À part peut-être une chose qui n'était vraiment pas réalisable… Et il fallut que Coldris la mentionne maintenant.

D'abord pour dire que cela ne faisait rien. Comment ça, rien ? Il s'en fichait, finalement ? Oooh, elle aurait dû s'en douter. Après tout, il n'avait pas besoin d'elle. Au fond, cela ne servait à rien de lui inventer un intérêt particulier pour sa personne. Non, il devait toujours s'adapter à la personne en face, voilà tout. S'il ne renonçait pas encore, c'était simplement parce qu'on n'abandonnait pas une partie en cours. Et s'il avait voulu l'inviter tout à l'heure,ce n'était que pour la flatter. Il s'en...

— …ce n’est pas ce qui m’empêchera de vous dérober à ses bras.

Se mordre la joue pour tenter vainement son sourire. Se rendre compte que son coeur s'était serré en le sentant se libérer de son étau de déception. Avoir les yeux plus pétillants que jamais. C'était insensé. Pourquoi cette obstination la rendait-elle si heureuse ? Mais s'il s'obstinait, cela voulait dire qu'il valait la peine d'en jouer un peu. Après tout, il l'avait dit : il n'y voyait aucun intérêt s'il avait déjà gagné. Et même si son esprit foisonnait d'ébauches de plans pour le retrouver ce jour-là, il fallait qu'elle tienne.

— Alors vous croyez pouvoir m'arracher au meilleur danseur que je connaisse ? Vous êtes borné, mais cela ne suffira pas. Il est plus difficile à tromper que mon cerbère. De plus, il faudrait encore que je sois d'accord. Et puis il faudrait aussi me reconnaître, et me retrouver. Comment espérez-vous me reconnaître masquée, dites-moi ?
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Message par Coldris de Fromart Dim 7 Fév - 22:57



Qu’avait-il dit qui puisse la mettre dans un tel état de panique ? C’était parfaitement normal qu’elle ait voix au chapitre comme chaque personne présente et concernée par cette affaire, et son avis à elle était particulièrement important pour lui, parce qu’il avait bien vu dans quel état cela la mettait. Et qu’il voulait qu’elle entende Thierry faire repentance et jurer que cela n’arriverait plus jamais. Elle en était même à nier que cette agression l’avait touché personnellement.

- Ah oui? Alors pourquoi vous vous agrippez désespérément mon bras chaque fois vous en reparlez ? demanda-t-il innocemment avant de reprendre quelques secondes plus tard vous avez parfaitement le droit de garder des blessures et même des traumatismes. Vous savez, je ne vous en ai… apprécierai pas moins.

Pour un peu sa langue fourchait idiotement. Que se serait-elle imaginé après ? Heureusement qu’il s’était repris à temps. Il devait absolument être plus attentif à ses paroles, mais chaque fois qu’il croisait son regard ou sentait les effluves de romarin, son esprit se dissipait. C’était idiot. C’était complètement idiot. Le pire c’est qu’elle en aurait ri en s’imaginant que c’était encore l’un de ses stratagèmes. Non vraiment, il ne pouvait pas se permettre ce genre d’erreur. Mais plus le temps passait, plus cela devenait compliqué. Il n’arrêtait pas de repenser à sa soirée au lupanar et à comment il n’avait cessé d’entendre sa voix ou de voir son visage. Le pire était sans doute l’envie absolue qu’il avait de transformer ses rêves en réalité. Elle était toujours là. Où qu’il aille, elle était là. Elle prenait trop de place. Beaucoup trop de place. Il ne pouvait pas se permettre de la laisser gagner du terrain parce qu’il n’avait plus vingt ans, lui, et que tout cela ne mènerait nulle part. Ce n’était qu’un jeu partagé et cela ne pouvait que le rester. Il avait beau être ministre et tout ce que l’on voulait, elle n’avait rien à faire avec lui si ce n’était pour passer un agréable le moment. Le seul problème -et il était de taille- c’est que malgré toutes ses résolutions, il était irrémédiablement attiré comme un papillon par la lumière qu’elle générait. Et… il en était presque à préférer idiotement s’y bruler définitivement les ailes que de renoncer à la chaleur que générait sa présence. C’était idiot. Parfaitement idiot. Mais c’était ce qu’il était non ? Rien que pour cette raison, il l’aurait cherchée et dérobée au bal. Juste pour entendre sa voix. Juste pour lui voler un baiser. Juste pour sentir sa main dans la sienne au cours d’une danse. Juste pour sentir son cœur battre et se sentir vivant.

- Meilleur danseur ? Mais ? Comment pouvez-vous dire une chose pareille alors que nous n’avons pas eu le plaisir de danser ensemble ?! Non, vraiment Éléonore, je suis terriblement vexé. bougonna-t-il

Quant à la reconnaitre. Il était à peu près sûr de la reconnaitre dans le noir complet. Il aurait pu lui dire qu’il se fierait aux battements de son cœur, mais il s’était promis de tenir sa langue. Quoi que… Comme elle ne le croirait pas, il n’y avait pas de risque non ?

- Mais mon coeur vous trouvera ma luciole, ne vous en faites pas. répondit-il en cachant le sérieux de ses propos sous sa taquinerie habituelle. - Et sinon, je me fierai à mes autres sens. Mon odorat, pour retrouver votre parfum envoutant de romarin. Mon ouïe, pour surprendre les intonations familières de votre voix et, en dernier recours le toucher de votre peau sous mes mains.

Il caressa sa main et ajouta soucieux :

- Rassurez-moi, vous n’allez pas porter de gants ? Je n’ai pas envie de devoir embrasser toutes les femmes de ce bal pour être sûr qu’il s’agit bien de vous : ce serait fâcheux et je risquerai de finir avec un duel sur les bras avant la fin du jour. Mais dites-moi, puis-je vous retourner la question ?




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Message par Éléonore de Fromart Lun 8 Fév - 11:59

— Ah oui? Alors pourquoi vous vous agrippez désespérément mon bras chaque fois vous en reparlez ?

Éléonore déglutit, prête à nier comme une gamine prise en faute. Prête à lâcher son bras et croiser les siens derrière son dos pour ne plus chercher à s'y rattraper. Mais Coldris avait certainement bien mieux à faire que de subir ses enfantillages. Il ne fallait pas abuser des concessions auxquelles il consentait. Il n'était pas là pour compenser sa faiblesse déplorable.

Il poursuivit, rassurant. Une part d'elle avait honte d'avoir besoin d'être rassurée. Même Lavinia faisait moins de simagrées qu'elle – bien que dans son cas, c'eût été légitime. Pitoyable Éléonore. Ridicule Éléonore.

Il ne... quoi ? Elle crut un moment qu'il allait se reprendre. Sa phrase avait eu un accroc. De ses accrocs après lesquels on se corrigeait par "en fait, si : honnêtement, ça devient pénible". Mais non, il acheva sa phrase dans la lignée de son commencement. Il n'empêchait que maintenant, il lui faudrait limiter ce genre de démonstration de faiblesse. Pour un peu, il s'imaginerait qu'elle n'avait pas compris ce qu'était leur relation. Pourtant, c'était très clair. Juste un jeu partagé. Juste passager. Elle ne s'imaginait rien du tout et n'en demandait pas davantage. Si son cœur oubliait les règles, elle l'assumerait toute seule et ne l'en tiendrait pas pour responsable. Mais… mais son coeur ne s'impliquait pas. C'était fort, oui, mais c'était seulement parce que c'était la première fois. Et pour le reste... Et si elle se sentait si bien avec lui, ce n'était que parce que ça lui permettait de se changer les idées. C'était le but, non ?

Non, il ne fallait surtout pas qu'il croie qu'elle attendait plus de lui. Parce que lui, il n'aurait jamais cette faiblesse. Il ne voudrait plus d'elle. Et ça, c'était inconcevable. C'était trop tôt. Elle voulait encore le voir, encore se perdre dans son regard, quitte à se noyer, ne plus jamais retrouver l'air libre. Quitte à ce que cela finisse très mal, si cela devait mal finir. Mais pas le perdre maintenant.

— Oh mais je n'en doute pas ! mentit-elle. Mais si je me retiens à vous, c'est parce que le sol est glissant de neige et que j'aurais l'air bien bête de tomber.

À part ça, s'il y avait une chose qu'elle avait toujours su faire, c'était bien tenir sur ses jambes. Et la neige ne changeait pas ça. Mais bon... Quitte à faire preuve d'un peu de mauvaise foi…

— Vous ne voudriez pas que je me blesse ici, quand même ?! Vos baisers ne pourraient même pas me consoler.

Et elle n'en rajoutait que peu. Elle aurait vite oublié une cheville foulée dans ses bras. Elle aurait même pu être assez bête pour danser avec lui au lieu de la ménager, si c'avait été le seul moyen de le voir.

Et pourtant, elle refusait encore son invitation. Parce que c'était impossible. Et qu'il soit d'accord ou non, Gabriel était un excellent danseur. Elle ne put s'empêcher de sourire tandis qu'il jouait à s'offusquer.

— Soyez vexé, alors, rit-elle. Vous n'avez aucun don pour feindre l'indifférence, de toute manière, remarqua-t-elle.

Elle s'était inquiétée toute seule tout à l'heure mais au fond, il était évident qu'il était juste jaloux. Il avait quand même du culot ! Non mais ! Ils ne se devaient rien ! Mais... Mais c'était bien pour ça que c'était si amusant de le voir insister. Et s'il le fallait, elle attendrait d'y être pour lui céder une danse. De toute façon, elle savait bien qu'elle ne pourrait pas lui refuser.

Mais encore fallait-il qu'il la reconnaisse.

— Votre cœur, rien que ça ? releva-t-elle, incrédule.

Heureusement que les choses étaient claires entre eux. Pour un peu, elle se serait mise à espérer qu'il y ait là une part de vérité. C'était ridicule. Son cœur, elle ne l'aurait jamais. Elle n'en voulait pas. Elle n'en voulait pas, n'est-ce pas ? Non, elle n'en voulait pas. Elle ne savait rien faire sinon détruire son entourage. Elle ne voulait pas être en mesure de le blesser. De toute façon, la question ne se posait pas.

Mais il n'en restait pas moins agréable de l'écouter. Il aurait pu dire n'importe quoi, elle n'aurait pas perdu en attention. Son regard l'avait envoûtée. C'était trop tard, maintenant. Il la tenait. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était gagner du temps. Du temps avec lui.

Lui qu'elle aurait pu reconnaître entre tous. Parce qu'aucun masque n'aurait pu voiler l'intensité de son regard, qu'aucune foule n'aurait su faire pâlir sa prestance, qu'aucun tissus n'aurait su l'empêcher de s'embraser à son contact, et que jamais lèvres ne l'avaient transportée si loin. Son souffle même n'avait pas la même chaleur que les autres. Que les seuls bras qui auraient pu lui apporter un tel réconforts ne lui reviendraient jamais. Mais tout cela n'avait aucune signification particulière, bien sûr .

— Oh... Eh bien je tendrai l'oreille, et si un coeur bat trop fort, je saurai que c'est le vôtre, plaisanta-t-elle avec ce regard qui disait "non, bien sûr que je n'y crois pas, mais c'est vous qui avez commencé à dire des bêtises !"

Ce dont elle ne doutait pas, en revanche, c'était de sentir alors le sien s'emballer. Comment avait-elle tenu douze jours sans le voir, déjà ? Ah oui, c'est vrai : elle en avait passé la moitié à trépigner et l'autre à pleurer, morte d'inquiétude et de culpabilité pour Alduis. Elle aimait autant éviter de revivre ça.
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Message par Coldris de Fromart Lun 8 Fév - 22:59



Un instant d’inattention et sa langue avait failli fourcher. Malencontreusement. Il avait évité le pire. Même s’il se doutait qu’elle aurait sans doute pris cela comme une plaisanterie. Il ne pouvait pas. Il ne pouvait simplement pas. Elle invoqua la neige en guise d’excuse. Eh bah voyons donc ! N’était-ce pas elle qui courrait quelques jours plus tôt comme un lapin dans la cour de Fromart ? Il afficha un sourire moqueur.

- C’est simplement que nous marchons trop lentement pour votre équilibre de biche sur terrain enneigé ! argua-t-il provocateur.

Il avait presque envie de l’entrainer dans une cavalcade, mais ce n’était clairement pas convenable ici. Il se devait de se tenir en public, qui plus est au théâtre où il pouvait rencontrer des têtes connues. En revanche, il n’avait aucune honte à se promenait à ses côtés, mais les choses n’étaient pas équivalentes pour elle et pour lui, c’était inévitable. Éléonore se moquait de ses bouderies, mais elle n’avait pas tort, il ne pouvait feindre l’indifférence face à elle. La simple idée de voler quelques minutes en sa compagnie suffisait à l’émoustiller et il savait que ce plaisir était partagé. Ils étaient deux âmes brisées qui se reconstituaient lorsqu’elles étaient ensemble. Il fallait être fou pour fuir un tel sentiment de légèreté. Il se laissa même aller à lui avouer qu’il écouterait son cœur pour la retrouver ? Tout simplement parce que c’était la vérité. Il l’aurait retrouvé les yeux bandés, il en était persuadé. Il l’avait avoué par provocation, pour voir sa réaction et… parce qu’elle ne le croirait pas et qu’il n’y avait donc aucun risque de malentendu.

- Oui, j’ai encore un cœur. Cela vous étonne ? un petit sourire s’esquissa alors qu’il ajoutait malicieusement vous ne l’avez pas entendu ?

Mais il devait admettre que juste -et parce qu’il en avait un- cette remarque lui laissait tout de même une sensation diffuse de pincement dont il parvenait difficilement à se défaire. Il ne pouvait pas céder si facilement face à elle. Il n’y avait rien et il n’y aurait rien. Et même s’il y avait eu quelque chose cela ne resterait qu’un jeu. Il ne pouvait pas lui imposer ses obsessions. Tout simplement, car si elle savait, elle fuirait aussitôt. Il ne pouvait que continuer à être celui qu’elle voulait qu’il soit : séducteur et joueur. Elle renchérissait avec humour sur la façon dont elle le retrouverait. L’espace d’un fragment de seconde, il se demanda si elle aussi dissimulait autre chose derrière sa plaisanterie. C’était idiot, parfaitement idiot. Alors il rentra dans son jeu, comme si personne n’avait jamais cessé de jouer. Il tira sur son bras et l’enroula entre les siens, la tête posée contre sa poitrine, sa main dans ses cheveux si soyeux.
- Vous l’entendez, ma luciole ? Écoutez-le bien pour être sûr de retenir sa mélopée.

Il battait sereinement, aussi paisiblement qu’il était possible, car c’était ainsi qu’il se sentait lorsqu’elle était blottie contre lui. Tous ses tourments se volatilisaient. Toute la noirceur se dissipait. Et l’instant d’après, il avait subitement envie de l’embrasser de toute son âme. Son cœur s’emballait et ses sens s’agitaient chaotiquement. Il recula d’un coup, plongea son regard dans le sien, quasi hagard avant de proposer :

- Il serait peut-être judicieux de rentrer si nous ne voulons pas manquer le début.

Non, non, non… Il était venu… S’aérer l’esprit et non l’embourber un peu plus qu’il ne l’était. Que se passait-il ? Son passé grattait, grattait, grattait et des bribes de paroles tentaient de s’extirper de son emprise. Il ne voulait pas les entendre. Il ne voulait pas voir. Il ne voulait pas savoir. Il voulait rester ignorant et innocent. Ne blesser personne. Ne surtout pas se blesser. Il ne pouvait pas se le permettre.

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Message par Éléonore de Fromart Mar 9 Fév - 18:03

Éléonore ne put s'empêcher de sourire. Après sa dernière démonstration, elle pouvait difficilement prétendre qu'elle ne supportait pas la neige mais... Il était à noter que la dernière fois, elle avait quand même fini allongée dedans.

Elle savait courir dans la neige, et aussi tenir sur ses pieds lorsqu'il s'agissait de danser. Ni l'un ni l'autre n'était raisonnable avec lui en public – dommage. Et tandis qu'ils discouraient sur le moyen de se retrouver, comme des enfants follement épris, il en vint à évoquer son cœur. Évidemment, elle n'en croyait rien. Il ne mêlait pas son cœur à ça. Pas lui.

Quant à savoir s'il lui en restait un... Elle même n'était pas tout à fait certaine d'avoir conservé le sien. Il était mort à Mornoy, d'une infâme maladie. La partie qui demeurait dans sa poitrine, si le choc ne l'avait laissé moribond, l'incomplétude en rongeait les vestiges. Elle se plongea dans le regard de l'homme. On pouvait se reconstruire seul, y mettre les moyens qu'on voulait, elle n'était pas certaine que cet organe-là put se reconstituer. Elle ne donnerait plus jamais à personne l'amour qu'elle avait voué à Ariste. Quant aux autres formes… Chez lui, elles devaient avoir disparu avec sa fameuse déesse.

Mais elle ne put toutefois s'empêcher de renchérir sur cette affaire de coeur. Ce cœur contre lequel elle avait manqué de s'endormir. Peut-être était-elle un brin arrogante, mais elle était certaine de de pouvoir le reconnaître à ce seul détail. Mais ça ne voulait rien dire de particulier.

Éléonore perçut la traction sur son bras avant que celle-ci ne la déséquilibre. Elle lâcha un hoquet de surprise en se retrouvant plaquée contre son cœur. Avait-il perdu la raison ? D'accord, au point où il en était, cela ne pouvait plus lui nuire outre mesure... Mais à elle ? Elle, elle ne pouvait pas se le permettre.

Pourtant, dans un premier temps, elle ne protesta pas davantage. Son cœur avait manqué un battement, et elle écouta le sien qui pulsait sereinement. Elle acquiesça doucement, il le sentirait. Elle entendait. Elle aurait pu l'écouter des heures durant. Combien de temps aurait-elle put demeurer dans ses bras si une étincelle de bon sens n'avait pas persisté ? Si entendre son coeur s'emballer ne lui avait pas rappelé que tout ça ne tenait à rien ?

— Coldris... parvint-elle à dire, d'un ton plus autoritaire – réprobateur ? – qu'elle ne l'aurait voulu.

Il fallait qu'il la lâche. Comme Ariste le disait, certains risques en valaient la peine et d'autres étaient des périls gratuits, et ceux-là n'avaient pas de saveur. Et comme elle l'avait toujours précisé, rajouter des risques là où ils ne pouvaient que nuire n'apportait rien. Philosophie qu'elle oubliait trop souvent ces derniers temps... Mais elle devait se reprendre. Même si ce n'était que pour profiter de ses deux derniers mois de liberté. Pour pouvoir le voir encore. Sa compagnie lui faisait tant de bien.

Elle chercha le regard du vicomte, pour lui faire comprendre qu'elle n'était ni fâchée, ni agacée, ni quoi que ce soit de ce genre. Quelque chose clochait. Elle était trop stupide. Il devait la trouver ridicule de ce soucier encore de ce genre de détails au point où elle en était. Si cela la rendait trop prudente pour lui, cela n'en valait pas la peine. Si c'était ça, alors elle serait imprudente, et tant pis pour le reste. Tant pis pour le reste. Un peu, c'était mieux que rien du tout.

— Si vous voulez vraiment détruire ma réputation, il paraît qu'un baiser c'est plus efficace, ne plaisanta-t-elle qu'à moitié. Mais si c'est un adieu, qu'il soit à la hauteur de toute une vie s... submergée par le poids des médisances, compléta-t-elle.

Elle n'avait pas failli dire "sans vous". Il aurait été capable de mal comprendre et de la rejetter immédiatement, par crainte qu'elle s'attache idiotement et ne lui fiche plus jamais la paix. Mieux valait qu'il imagine qu'il lui restait encore un brin trop de réserve.

Mais en effet, mieux valait retourner à l'intérieur. Dans ses bras, elle l'avait oublié, mais elle commençait à avoir froid. Comme quoi, les gants avaient d'autres avantages que celui de dissimuler ses horribles mains.

— En effet, ce serait dommage. Vous qui suiviez la pièce avec une telle assiduité !

Parce que s'il passait son temps à la déconcentrer – ce dont elle ne se plaignait pas, loin de là, après tout elle venait plus pour lui que pour la pièce en elle-même – il avait aussi dû en manquer une bonne partie.
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Message par Coldris de Fromart Mar 9 Fév - 23:00



Il n’aurait jamais dû l’attirer contre lui de la sorte en public, c’était trop tendancieux. Pour elle surtout. Lui, on le connaissait. Sa réputation était faite. Avec un peu de chance, elle était si faite que personne ne prêterait attention à la femme qu’il enlaçait tendrement. Il aurait pu rester des heures ainsi s’il n’avait pas eu cette envie impérieuse de l’embrasser qui avait fait s’emballer son cœur. Elle avait sans doute déjà dû le percevoir ainsi, mais sans savoir pourquoi il se recula d’un coup comme ramener à la réalité par une piquante brulure.

- Coldris… prononça une voix réprobatrice.

Coldris…
Je crois que je t’aime Coldris de Fromart.
Je ne sais pas ce que veut dire aimer, mais si c’est avoir envie de l’étreindre alors qu’il est juste devant nous alors je crois que je suis fou amoureux de toi

Non non non non… Non. Non. Non. Cela n’avait rien à voir. Cela ne ressemblait pas à ce qu’il avait ressenti trente ans plus tôt. Il n’avait plus l’impression de se faire dévorer par les flammes ou d’avoir son sang transformé en lave. Il… Oui, il pensait souvent à elle, mais ça ne faisait pas tout. Il ne voulait pas. Il ne devait pas. Son cœur battait à la chamade. Ses souvenirs commençaient à fuiter pour se mélanger au présent. Il inspira pour emplir ses poumons d’air lorsqu’elle reprit la parole le ramenant à leur promenade. Un baiser. Oh oui, il en mourrait d’envie. L’entendre de sa bouche de faisait frétiller ses lèvres. Mais cette dernière phrase… Cette dernière phrase n’avait pas de sens, surtout la fin. Avait-elle eu des remarques ? Il fronça les sourcils, intrigué.

- Ne me tentez pas en me parlant de quelque chose que je rêve de faire. C’est cruel et…
… Et ce ne serait pas un baiser d’adieu. Jamais. Ne dites plus une telle chose

Mais à la place, il ne put que lui proposer de rentrer à leur loge. Ses doigts étaient gelés et l’idée qu’il lui traversa l’esprit était parfaitement indécente. Il accéléra le pas pour la faire rentrer au plus vite dans la bâtisse.

- Je n’y peux rien si vous me déconcentrez sans arrêt. J’aurais dû vous inviter à diner en fait !

Il esquissa un sourire et l’entraina aussi vite que possible jusqu’à la petite porte familière que Valmar retournerait garder farouchement. Il referma lentement la porte et l’embrassa aussitôt de ce baiser qui l’avait tant chatouillé quelques minutes plus tôt. Ses mains glissèrent le long de ses bras jusqu’à trouver les siennes transies de froid qu’il glissa sous sa chemise. Pour les réchauffer bien sûr. Il détacha à nouveau son manteau qui s’étala sur le sol dans un froissement sourd, alors que ses lèvres s’attardaient désormais sur son cou. Il y avait bien trop de vêtements. Pourquoi ne l’avait-il pas invité à diner comme la fois ? Du coin de l’œil, il vit le rideau se lever et s’interrompit immédiatement. Sa poitrine se soulevait chaotiquement. Il n’entendit pas les premières répliques. Son regard perdu dans le sien, il était à deux doigts d’oublier le théâtre pour poursuivre la suite chez lui à Cervigny, bien au chaud. C’était terriblement tentant alors qu’il sentait un doux feu s’écouler dans chacune de ses veines.


Si c’est se consumer quand il est juste à côté et vivre dans le noir lorsqu’il est absent, alors je crois que je suis fou amoureux de toi

Il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas. Il déglutit péniblement. Les acteurs continuaient de déclamer leurs vers sans qu’il ne comprenne de quoi il retournait.
Il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas.
S’il s’avouait vaincu, il perdrait tout.

Certains amours sont heureux. Il vaut mieux tenter de parvenir à quelque chose plutôt que de renoncer par crainte d'un échec et d'une douleur à l'âme.

Certains. Mais pas les siens. Ce n’était pas une douleur, c’était une amputation. Il ne pouvait pas laisser cela arriver de nouveau. Il suffisait de fermer les yeux et de ranger son cœur hors de portée. Bientôt, elle rentrerait chez elle, il ne la reverrait plus. Elle se marierait et l’oublierait aussitôt comme l’amusement de jeune fille qu’il avait été. Il retournerait dans le noir absolu de ses ténèbres, à affronter seuls ses démons et c’était déjà bien assez difficiles à envisager pour ne pas en rajouter, parce qu’il n’avait pas qu’elle le quitte. Mais bien sûr, elle ne le croirait jamais. C’était impossible. Elle rirait à une bonne plaisanterie. Ou elle partirait encore plus vite encore plus loin. C’était inévitable.

- J’imagine que nous sommes censés écouter la suite, n’est-ce pas ? finit-il par dire sans grand enthousiasme

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Message par Éléonore de Fromart Mer 10 Fév - 14:51

Coldris avait une attitude étrange. Il était comme… perdu. Cela n’avait pas de sens. L’avait-elle vexé ? Vraiment vexé ? Elle s’expliqua, à mi-chemin entre la gravité et la plaisanterie. Ou bien tournait-elle simplement le sérieux du problème en dérision ? La réputation, cela semblait bien dérisoire après avoir perdu la plus grande partie de soi-même. Bien dérisoire face au réconfort que sa simple présence apportait.

Alors le tenter était cruel ? Oh, eh bien elle espérait que c’était cruel ! Aussi cruellement obsédant que de le voir sans cesse s’imposer dans son esprit depuis leur rencontre. Aussi cruellement délicat que les efforts qu’elle devait elle-même fournir pour ne pas céder à l’appel de ses lèvres là, maintenant, à la vue de tous.

Alors oui, il fallait rentrer. Rien à voir avec la pièce. D’ailleurs, ils n’étaient même pas obligés d’y retourner. Peut-être valait-il carrément mieux qu’il l’emmène ailleurs. Au moins, pour une fois, sa faiblesse de caractère aurait des conséquences agréables. Elle n’était pas une femme convenable. Au fond, cela lui importait peu. Tant qu’elle demeurait discrète. De toute façon, elle avait toujours eu l’intention de céder, à bien y songer. L’enjeu pour elle n’était pas là.

Son regard l’avait envoûtée. Qu’avait-elle dit, déjà ? Que lorsqu’on en prenait conscience, c’était trop tard ? N’avait-elle pas prédit qu’elle serait entièrement à sa merci avant d’être capable de réagir ? Mais n’était-ce pas déjà trop tard, ce jour-là ? Elle était prisonnière, et il ne tenait qu’à lui de porter le coup de grâce. Prisonnière de son évasion, si ce n’était pas ironique ! Il détruisait sa volonté jusque chez elle. Chez elle où elle se trouvait prisonnière de son absence. Prisonnière jusque dans les songes qu’il avait infiltrés, et dont elle n’aurait pas pu vouloir le chasser, car il la détournait ainsi de ses cauchemars les plus pénibles. Tout cela avait décuplé ces quatre derniers jours.

Mais cela ne voulait rien dire. Rien dire du tout. C’était seulement parce que c’était distrayant. Seulement parce qu’elle devait trouver un moyen d’échapper aux pensées pernicieuses qui la harcelaient, et que lui avait le don de l’en tirer. Comme il avait le don de l’empêcher de se concentrer !

— Moi ?! s’offusqua-t-elle presque.

Non mais il n’était pas gêné ! C’était lui qui n’arrêtait pas de parler ! Qui lui broyait presque la main ! Et il lui reprochait à elle de le déconcentrer ?!

— Vous y penserez la prochaine fois, commenta-t-elle innocemment.

Parce qu’au fond… Cela semblait ridicule, mais au plus elle passait du temps avec lui, au plus elle se persuadait que ce n’était pas une question d’orgueil. Et qu’il appréciait vraiment sa compagnie. Même si c’était insensé. Après tout, il n’était pas le seul. Et s’il appréciait vraiment le temps qu’ils passaient ensemble, il n’y avait aucune raison pour qu’en cédant, elle le perde. Tant que ça n’avait pas besoin de devenir plus sérieux que ça… Peut-être était-ce cela qu’Ariste décrivait quand il disait qu’il n’y avait pas d’amour, mais qu’il y avait quelque chose quand même. Même si la dernière fois qu’il lui avait dit ça… Non, ça n’arriverait pas, ça ne pouvait pas arriver. Et quand bien même, ce n’était pas cela qu’il cherchait avec elle. Ce n’était pas ce qu’elle cherchait non plus, d’ailleurs. Elle ne pouvait pas.

A peine la porte refermée, et avant qu’elle n’ait pu en prendre l’initiative, il l’embrassa. Folie, que de folie. Mais elle s’y laissa emporter. Il attrapa ses mains gelées pour les glisser sous sa chemise, et elle sentit ses lèvres lui échapper. Elle eut un instant de doute : qu’attendait-il d’elle ? Ses mains étaient froides, si froides… et sa peau sembla brûlante. Et cette chemise sembla superflue. Pourquoi faisait-il ça ? Pour qu’elle n’ait pas le temps de l’intercepter si lui même glissait ses mains dans ses vêtements ? Aurait-il seulement eu envie de l’arrêter s’il tentait de dégager de la peau pour ses lèvres ? Elle ne savait pas, elle ne savait plus. Et la seule chose qu’elle put faire de ses mains engourdies, ce fut les passer derrière lui pour le rapprocher. Trop engourdies pour croire ses sens quant au manque de régularité qu'elle croyait y percevoir, d'autant qu'aucune de explications qui lui venaient n'avaient de sens. Son esprit était totalement accaparé, déjà, par une autre préoccupation.

Il fallait qu’elle l’arrête. Elle ne savait ni comment l’arrêter, ni comment lui montrer qu’il pouvait aller plus loin. Elle ne savait pas ce qu’elle voulait. Elle ne savait plus. Pas ici. Ce n’était ni le moment, ni l’endroit. Mais si “ici” ne convenait pas, il suffisait d’aller ailleurs, et le temps d’arriver ailleurs, le moment si prêterait sans doute. Mais… Et s’il se rendait compte qu’elle ne savait pas du tout comment s’y prendre ? Si elle faisait quelque chose qu’il ne fallait pas ? Et si…

Il s’arrêta, et d’instinct, elle chercha son regard. Qu’avait-elle fait ? Avait-elle commis une erreur, pour qu’il s’interrompe si soudainement ? Elle récupéra ses mains inutiles pour les glisser dans les siennes et d’entrelacer leurs doigts. Il y avait une chose dans son regard qui lui échappait. Quelque chose d’important, mais qu’elle était incapable de déterminer. Elle ne parvenait pas à déterminer s’il s’agissait ou non d’une nuance négative, mais en tout cas, ce n’était pas un reproche.

— J’imagine que nous sommes censés écouter la suite, n’est-ce pas ?

— Vous croyez ? laissa-t-elle échapper.

Elle n’avait même pas réalisé que la pièce avait repris. Elle se moquait éperdument de la pièce. De toute façon, ils n’en suivaient rien. Et elle ne pouvait même pas rester dans ses bras s’ils retournaient s’installer.

Sans lui laisser le temps de répondre, elle attrapa ses lèvres. Brièvement, très brièvement, puis elle laissa tomber sa tête sur son épaule.

— Vous avez sans doute raison, déplora-t-elle. Pourquoi n’avez vous rien prévu qui me permette de suivre la représentation et d’écouter votre coeur en même temps ?

Et sans avoir les côtes broyées par cette saleté d’accoudoir. Elle se redressa précipitamment. Elle disait n’importe quoi !

— Juste pour être sûre de le reconnaître à l’oreille, mentit-elle avant de rejoindre son siège.
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Message par Coldris de Fromart Mer 10 Fév - 22:46



Mais oui parfaitement ! Elle le déconcentrait avec sa simple présence, son odeur de romarin, sa main qui ne manquait jamais de s’approcher de la sienne, avec ses réponses à ses questions qui ne soulevaient que d’autres interrogations. Oh oui la prochaine fois il y penserait. Il l’inviterait à diner plutôt ! Que pouvait-il répondre de plus qu’un sourire malicieux avant de la raccompagner à l’abri des éléments dans sa loge. Dans cette loge à laquelle il pouvait s’adonner à l’embrasser sans retenue. Dans cette loge où il glissa ses mains sous sa chemise. Où il tressaillit lorsque ses doigts glacés rencontrèrent sa peau chaude. Où il sursauta légèrement lorsque ses mains glissèrent dans son dos, parce qu’elles étaient si peu nombreuses à l’avoir fait. En serait-elle effrayée ? Dégoutée ? Comme à chaque fois, sa simple question explosait et se fragmentait en multiples petites sœurs qui rebondissaient et s’égaraient dans les limbes dans son esprit. Peut-être aurait-il dû abandonner le théâtre. Rien ne l’obligeait à assister à la représentation dans son intégralité. Et il n’était plus vraiment sûr d’en avoir réellement envie. D’autant plus qu’il avait de plus en plus de mal à écouter quoi que ce soit avec ses maudits étourneaux qui s’éveillaient et piaillaient à tue-tête.
Il s’arrêta subitement, comme noyé sous les évidences qui sautaient à ses yeux, mais qu’il refusait aveuglément de voir. Il sentit ses doigts s’entrelacer entre les siens et le ramener à ses côtés. Il n’avait rien de plus. Il avait parfois l’impression qu’elle était tout à la fois son poison et son remède. Poison, car elle occupait son esprit à longueur de temps en images aussi bien qu’en interrogations. Poison, car il savait que viendrait inéluctablement la fin qui gangrènerait le peu de cœur qu’il avait réussi à reconstruire en quelques semaines. Mais malgré tout remède, car il n’y avait que lorsqu’elle était là qu’il se sentait aussi bien et qu’il entrevoyait presque une forme d’espoir et de guérison à toutes ses blessures. Qui pouvait l’apaiser aussi bien qu’elle ? Personne.

Il avait vaguement conscience de l’affrontement qui se jouait sur scène, mais son regard était rivé dans le sien.

- Vous croyez ?

Il eut un sourire moqueur. Si elle commençait à le tenter ainsi, il risquait effectivement de lui avouer que cela n’avait pas la moindre importance. Surtout lorsqu’elle le gratifiait -et le frustrait tout autant !- d’un si fugace baiser avant de s’abandonner entre ses bras. Il passa une main sur sa chevelure brune.

- La prochaine fois, je leur commanderai de mettre un canapé, ma douce luciole. C’est promis.
Elle se corrigea et il étouffa un petit rire en approchant autant que possible sa chaise de la sienne.

- Vous n’aurez qu’à l’écouter à l’entracte. Ou sur le chemin du retour. proposa-t-il avec malice.  En attendant, je peux vous suggérer de vous reposer sur mon épaule.

Il dirigea vainement ses yeux vers l’estrade -car c’est là qu’ils auraient dû se retrouver et non à couler le long de sa charmante invitée- Tybalt venait de mourir de la main de Roméo. Coldris ne comprenait pas. Pas plus que la mort de Mercutio qui avait sans doute dû avoir lieu alors qu’il tergiverser sur la meilleure suite à donner à ce rendez-vous. Cervigny ou le théâtre ? L’ennui était qu’il commençait toujours ce qu’il venait de débuter. Sauf qu’il se retrouvait là avec deux choses à achever sans réellement pouvoir s’abstenir de choisir l’une ou l’autre. Voilà qui était fort fâcheux songea Coldris alors que la nourrice tentait d’expliquer la situation à Juliette. Ces cordes… Était-ce vraiment pour aider Roméo à gravir ce mur afin qu’il puisse consommer son mariage ? Il arqua un sourcil et garda ses commentaires pour lui. Il avait bien compris qu’il ne devait plus distraire sa jeune amie. Enfin… Presque. Ses lèvres se posèrent brièvement dans son cou avant de reporter innocemment son attention sur les deux femmes. Ah les cousins ! Un élément familial toujours bien compliqué à appréhender lorsqu’on était l’amant. Aurélia n’aurait sans doute pas apprécié qu’il tue Alan non plus. Roméo se lamentait sur son sort. Coldris soupira.

- Ne peut-il donc pas l’emmener avec lui en exil ? Après tout, elle est désormais sa femme. À quoi bon se morfondre lorsqu’il existe des solutions. râla-t-il presque pour lui-même.

Non vraiment, si le jour de son mariage, il s’était fait bannir pour avoir tué Alan, il ne serait jamais parti sans sa femme. L’aurait-elle suivi ? Sans doute, mais non sans l’avoir sermonné sur sa bêtise. Il aurait fait profil bas sans pour autant réussir à se départir de son sourire. Parce que comme lorsqu’il était avec Éléonore, il se sentait entier et heureux en sa compagnie, y compris lorsque les reproches pleuvaient.







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Message par Éléonore de Fromart Jeu 11 Fév - 15:03

Elle aurait voulu rester simplement dans ses bras. Même juste comme ça. Mais elle ne pouvait s’empêcher de dire des âneries et il était hors de question qu’il s’imagine des choses stupides.

Elle s’était redressée un peu vite, mais sa réponse l’avait rassurée. Elle lui souriait toujours en revenant s’asseoir, mais ne put, toutefois, s’empêcher de préciser sa pensée - d’une manière légèrement mensongère pour ne pas qu’il s’imagine des choses stupides qui auraient terni leur relation. Il parvenait à occulter sa profonde bêtise, elle ne voulait pas gâcher ça. Elle ne voulait pas qu’il la voie comme une enfant naïve qui n’avait rien compris à la situation.

Qu’il rie, qu’il rie. Et qu’il se rapproche autant qu’il le voudrait. Son épaule plutôt que son coeur ? Oh, eh bien elle s’en contenterait pour l’instant. Elle y appuya ses doigts entrelacés pour s’approcher de son oreilles et en rajouter quant à ses propositions précédentes.

— Ou cette nuit, pour peu que vous me laissiez la passer dans vos bras, souffla-t-elle.

Beaucoup moins subtil, elle devait l’admettre. Mais… Après tout, ce n’était certainement pas lui qu’elle choquerait avec ces propos. Il savait déjà qu’elle n’avait rien d’une jeune fille convenable. Certes, elle n’avait encore jamais poussé l’indécence si loin, mais il fallait bien commencer quelque part, non ?

Eléonore laissa tomber sa tête contre la fameuse épaule, puisque c’était tout ce qu’elle pouvait se permettre pour le moment. Elle posa sa paume sur le coeur qu’elle ne pouvait écouter, pour au moins sentir ses battements. Si Coldris la trouvait trop envahissante, après tout, il était assez grand pour le lui signaler.

De la première scène, elle n’avait absolument rien suivi. Deux morts, un bannissement… Les circonstances en demeureraient particulièrement brumeuses.  

Peu après le changement de scène, elle se décida à se redresser. Il était grand temps qu’elle suive un peu ! Mais elle y parvenait à peine, et le passage, qui n’était pas des plus joyeux, ne l’aida pas.

Elle contint un frisson au baiser qui s’imprima dans son cou. Et, puisque finalement elle ne suivait pas mieux la représentation en étant installée correctement - elle n’avait jamais été aussi peu concentrée, pas même quand elle devait se demander où Ariste avait disparu, parce qu’elle savait alors qu’il lui faudrait résumer ce qu’il avait manqué et s’appliquait à tout retenir - elle posa de nouveau sa tête contre l’épaule de Coldris, les bras enroulés autour du sien pour se stabiliser..

Elle n’aurait pas dû. Qu’allait-il en penser ? Qu’elle n’était encore qu’une de ces idiotes sentimentales qui ne parvenaient pas à comprendre l’essence de leur relation ? Juste quelque chose d’envahissant ? Une enfant fragile qui cherchait l’affection et non le jeu ? Au fond… Les limites étaient restées très claires jusqu’à ce qu’il l’attire dans ses bras l’autre jour. Maintenant, elle ne savait plus ce qu’elle pouvait ou non se permettre sans qu’il ne se figure qu’elle attendait de lui davantage que ces moments d’évasion. Et pourtant, cela elle en était certaine : elle n’attendait rien de lui. Elle ne se serait jamais permis d’en attendre quoi que ce soit, parce qu’elle savait d’avance dans quoi elle s’était embarquée etque même si elle ne parvenait pas à s’y tenir, il était hors de question qu’elle l’ennuie avec son maudit emportement sentimental et sa faiblesse de caractère.  

Elle reporta son attention sur la représentation, et ne parvint pas à s’accorder avec les mots de Juliette. Accepter de perdre un cousin pour sauver un mari ? Dans son cas, Eléonore savait que c’aurait été inenvisageable. Mais après tout, tous les cousins ne pouvaient pas être l’incarnation de la perfection. Tous ne pouvaient pas être votre unique raison de vivre, tout ce qu’il aurait pu y avoir de bien en vous, celui pour lequel vous auriez sacrifié n’importe quoi, et trahi n’importe qui, même vous-même. Tous ne pouvaient pas faire hiverner votre bonheur en leur absence, lui fournissant à peine assez de lettres pour subsister, et vous maintenir en vie ensuite par leur seule volonté alors que vous auriez mille fois bien préféré en finir.

Elle se rendit compte qu’elle s’était crispée. Restait à espérer qu’il ne remarque rien. Le ministre devait trouver lassant de la voir toujours en train de pleunicher et de se lamenter, même sans rien en dire. Sa remarque sur l’attitude de Roméo était d’ailleurs la preuve de son opinion sur la question. Qu’aurait-il pensé d’elle s’il avait été informé de la moitié du temps qu’elle avait passé à pleurer ? Sans doute la vérité : qu’elle était d’une faiblesse déplorable et qu’elle aurait mieux fait, alors, d’en finir au lieu de s’imposer comme un fardeau pour les siens.

— Et si c’est impossible et qu’il tient tant à mourir, il lui suffit de rester, cela règlera la question, compléta-t-elle, bien que ce ne fut probablement pas ce qu’il voulait entendre.

Et il n’aurait même pas eu besoin de salir ses mains avec son propre sang. Et rien n’aurait pu le couper de cette douce libération, même pas un manque de volonté. Mais son aimée se portait bien et n’attendait que lui ! Pourquoi faire alors tant d’histoires pour si peu ? Enfin, il finissait par entendre raison.

CAPULET : Seigneur Paris, je veux prendre le risque de vous offrir l’amour de mon enfant. Car je crois qu’elle entend sur toutes choses se laisser gouverner par mes avis. Que dis-je ? Je ne puis en douter.
Acte III-4


Eléonore soupira. Même les parents qui prétendaient ne jamais vous y soumettre finissaient par le faire. Et même si elle ne voulait pas, elle savait qu’elle serait incapable de s’y opposer. Au fond, peut-être était-ce plus facile comme ça. De toute manière, elle était trop faible pour espérer prendre des décisions concrètes pour elle-même. Sans Ariste, elle n’était plus bonne à rien.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 11 Fév - 22:32



A défaut d’avoir un canapé pour qu’elle puisse se lover dans ses bras, il pouvait toujours lui proposer son épaule. Maigre consolation, il fallait en convenir, mais consolation tout de même. En revanche, il ne s’était pas attendu à la phrase qui s’échappa de ses lèvres et le fit se raidir de surprise. Cette nuit ? Dans ses bras ? Il posa un regard interrogateur. Elle n’était pas sérieuse, elle… La simple image de son corps nu contre le sien suffisait à lancer son cœur au galop et à égarer ses pensées dans cette cavalcade.

- Vous savez, à me provoquer ainsi, mon adorable brebis, la nuit risque de commencer de fort bonne heure.

Il lui adressa un sourire entendu. Elle ne pourrait sans doute pas passer la nuit avec lui, il ne se faisait pas trop d’illusions, c’était bien trop indécent et il risquerait de la perdre définitivement. Il n’arrivait plus à la quitter des yeux. Comment aurait-il pu après une pareille invitation ? Et… qui était sincère en plus. C’était à se demander ce qui le retenait dans cette loge alors qu’il n’avait désormais plus qu’une seule idée en tête. Il avait beau reporter son attention sur l’estrade, c’était peine perdue, une nouvelle obsession venait de s’installer dans son esprit et quoi qu’il fasse, elle revenait toujours si implanter comme le reflux sur cette grève qui bordait son âme. Et cette main tiède dont il pouvait sentir la chaleur se diffusait sur son cœur malgré les épaisseurs de tissu ne l’aidait pas vraiment à se concentrer. Il s’autorisa un baiser dans son cou lorsqu’elle se redressa momentanément. Juste pour tenter de contrôler cet envahissant désir qu’elle avait attisé.

Il ne fallut guère plus que quelques minutes, pour qu’elle revienne s’arrimer à son bras et pour tout dire c’était mieux ainsi. Plus apaisant. Il déposa sa tête contre la sienne et ferma les yeux momentanément. Il écoutait, c’était suffisant. Juliette, le cousin mort et Roméo. Il sentit sa main se crisper autour de son bras. Qu’avait-elle entendu ? S’identifiait-elle à Juliette ? Était-elle en accord ou non ? Il ressortit aussitôt ses hypothèses émises un peu plus tôt : quelqu’un proche d’elle ou qui n’aimait pas les femmes. Un cousin ? Cette idée revint de nouveau comme une évidence. Avait-elle aimé son cousin ? Il chercherait en ce sens et le lui demanderait plus tard. Il rouvrit les yeux sur les lamentations de Roméo.

- Qui voudrait d’un mari si lâche qu’il n’oserait pas tenter l’impossible pour sauver son amour ?répliqua-t-il en acquiesçant tout de même à ses propos.

Il aurait traversé le détroit de Lodmé en pleine tempête si cela avait pu la sauver. Il aurait remué Braktenn et Monbrina. Il était même prêt à fuir avec elle et à tout abandonner. Car tout ce qu’il avait, il ne le devait qu’à lui-même. S’il l’avait obtenu une première fois, il pouvait l’obtenir une seconde. Ailleurs. Lorsqu’on aimait vraiment quelqu’un, on était prêt à toutes les folies. De nouveau, la scène changea pour apercevoir Capulet offrir la main de sa fille à Paris. Coldris ne pouvait s’empêcher de refaire le lien avec sa propre existence. Il revoyait sa belle Aurélia promise à ce gourdiflot de Quentin. Certes, Paris était, semble-t-il plus respectueux, mais qui pouvait prédire quel mari il deviendrait ? Éléonore soupira à ses côtés. Il prit sa main et en caressa le dos de son pouce. Se reconnaissait-elle dans ce mariage imposé ? Il secoua lentement la tête en expirant à son tour avant de passer une main sur sa joue.

- Qui est donc ce fiancé pour qui vous ne nourrissez pas d’amour, mais avec qui vous allez vous marier autant par amour que par dépit?

Il ne savait pas pourquoi il posait cette question. Au fond, cela n’avait aucune importance, si ce n’était celle de rassasier sa curiosité et de combler son esprit d’analyse qui s’efforçait de reconstituer morceau après morceau l’immense fresque de sa personne. Et puis… Et puis la vérité, au fond, c’est qu’il avait vu trop de mariages se finir dramatiquement pour ne pas s’inquiéter de celle dont la douceur enveloppait si bien âme son âme ténébreuse de sa chaude lumière ocre.


JULIETTE: Là il ne fera pas de moi sa joyeuse épouse !(…)
Je vous en prie dites à mon seigneur et père
Que je ne veux pas me marier ;
Et si je le fais, j’assure que ce serait plutôt,
Avec Roméo, que je hais vous le savez,
Qu’avec Paris. En vérité voilà des nouvelles !  

Acte III - 5



Coldris secoua à nouveau la tête avant de déclarer pensivement :

- Si j’étais Roméo, je provoquerais Paris en duel pour sauver Juliette de ce mariage qu’elle réprouve.

Car jamais, ô grand jamais il n’aurait dû laisser sa bien-aimée épouser cet homme qui la méritait encore moins que lui-même et qui par-dessus tout lui manquait de respect.

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Message par Éléonore de Fromart Ven 12 Fév - 13:06

Éléonore ne put réprimer un sourire en voyant Coldris si surpris. Combien en avait-il déjà fait céder ? Certainement bien trop, mais ce n'était pas la question. La question, c'était de savoir comment il pouvait encore être surpris. Quoi ? C'était trop facile pour lui ? Elle n'y pouvait rien si elle n'avait pas de grands arguments moraux pour la retenir, ni d'orgueil démesuré. Par dessus le marché, elle avait toujours été d'une faiblesse de caractère déplorable.

— Vous savez, à me provoquer ainsi, mon adorable brebis, la nuit risque de commencer de fort bonne heure.

— Oh, mais ce n'est rien : nous sommes en plein hiver. Le soleil se couche tôt.

Éléonore admit pour elle-même que c'était parfaitement déraisonnable d'envisager de s'absenter la nuit entière. Mais elle inventerait quelque chose. Elle était douée pour couvrir les autres. Persuadée qu'Ariste l'aurait soutenue, elle trouverait une excuse tout à fait acceptable. C'en valait la peine.

Elle tenta de se redresser, mais elle résista pas longtemps à revenir contre son épaule, moins encore alors qu'un baiser dans son cou lui rappelait combien il l'avait envoûtée. Combien le moindre contact l'enflammait. Ou bien, plus simplement, apaisait ses tourments, comme quand, loin de la chasser, il appya sa tête contre la sienne.

Apaisement qui fut en outre salvateur quand cette maudite pièce la ramena dans ses rudes pensées. Sans se douter de rien, il avait empêché une crise de larmes qui aurait été longue et pénible. De toute façon, seule, elle ne savait faire que ça : pleurnicher et ressasser ses idées noires, et maudire l'interdiction d'en finir sans avoir le cran de désobéir. Parce qu'elle n'était que ça : lâche, sotte, inutile, pitoyable. Lâche, terriblement lâche. Désespérément lâche. Roméo aurait fait figure de modèle de courage, à côté.

— Juliette, visiblement. Mais, noterez-vous, elle ne tente pas grand chose non plus.

Elle non plus, n'avait rien fait pour retenir son coeur. Elle l'avait même encouragé à partir. Il en avait besoin. Tout ce qu'elle pouvait faire pour lui, c'était de le soutenir quoi qu'il veuille. À l'époque, elle ne le croyait tout simplement pas capable de mourir. Il serait revenu, et le monde aurait retrouvé ses couleurs. Autant de couleur qu'elle n'en voyait de nouveau dès qu'elle lisait ses lettres. Des lettres qui suffisaient à transmettre tous leurs sentiments. Ils étaient tellement proches qu'aucune distance n'aurait pu rompre leur lien. Oh, Ariste, que n'aurait-elle pas enduré pour le retrouver indemne ? Mais la force, Éléonore ne l'a possédait pas seule : c'était lui qui la lui aurait donnée. C'était lui, sa force. C'était lui, toutes les qualités qu'elle n'avait plus. Il était tout, et sans lui, il n'y avait rien.

Sa question la prit au dépourvu, si bien que sa réponse fut parfaitement spontanée. Trop spontanée.

— Un homme que j’aime énormément, mais pas d’un amour qui tolère le mariage, avoua-t-elle.

A supposer que les deux notions soient compatibles... Puis, sans savoir pourquoi - sans doute simplement parce qu’elle ne pouvait pas s’empêcher de toujours trop parler - elle se sentit obligée de développer :

— Vous disiez que parfois, c’était le seul moyen pour un homme de protéger la femme qu’il aimait. Pour lui, ce sera seulement le meilleur moyen de finir par me détester. Parce qu’il s’obstine à croire que ce mariage devra changer notre relation. Il est mon... meilleur ami, j’ai passé ces huit dernières années à couvrir ses amourettes et… Il ne comprend pas que pour moi, un contrat entre mon oncle et lui n’aura pas besoin de changer ça. Mais bon… Que voulez-vous ? On ne se comprend plus. Il a changé. Il dit qu’il a juste mûri et qu’il est grand temps que je fasse de même. Mais… Notre relation n’a jamais été de nous empêcher de vivre mutuellement, et je ne veux pas que ça commence maintenant pour des affaires de paperasserie et de conventions sociales.

Elle déglutit. Elle disait n’importe quoi. Pourquoi racontait-elle des choses pareilles ? Ca ne le regardait pas. Elle se moquait bien de ses préoccupations ridicules. D’ailleurs, ce n’était même pas vrai. Ce n’était pas la faute de Gabriel. C’était vraiment à elle de mûrir et de se rendre compte que le monde ne pouvait pas fonctionner comme elle voulait. Si Ariste était mort et que Gabriel rejetait les idées qu’il soutenait jusqu’alors, elle devait s’y conformer. Elle se blessait pour rien en refusant l’inévitable.

Enfin… Gabriel s’était terriblement inquiété, ces derniers temps. Il s’apaiserait quand il se rendrait compte qu’ils n’étaient pas obligés de finir par se détester. Elle ferait tous les efforts nécessaires pour cela, tous les sacrifices, parce qu’un jour, elle n’aurait plus que lui. Parce que ce jour-là, il faudrait que leur relation ne se soit pas dégradée, elle avait besoin de pouvoir compter sur quelqu’un.

— Désolée, je ne sais pas pourquoi je vous embête avec ça. C’est… Désolée.

Comme s’il avait besoin de preuves pour confirmer qu’elle n’était pas une femme convenable. Pour confirmer qu’elle n’était qu’une gamine immature qui préférait songer à escalader des falaises plutôt que de se bien tenir en société, et qui inventait des amis souffrant pour échapper à son cerbère. Indécente au point de fréquenter un homme comme lui en toute connaissance de cause. Le pire était qu’au plus son état s’améliorait, au moins elle réprouvait sa propre attitude. Après tout, si c’était ce qu’elle voulait et que cela ne nuisait à personne…

Elle ne parvint pas à récupérer le fil de la pièce. Elle aurait dû se redresser, se tenir correctement, mais elle ne parvenait pas à renoncer à cette épaule, et regrettait qu’il ne puisse pas carrément la bercer entre ses bras. Mais il n’était pas là pour la consoler, après tout. Elle lui en demandait trop. Notons… C’était lui qui avait commencé ! C’était de sa faute si maintenant, elle se montrait envahissante.

Provoquer Paris en duel ? C’était une idée comme une autre. Mais Eléonore réprouvait la violence gratuite. Surtout envers quelqu’un qui n’avait d’autre tort que d’entraver involontairement leurs desseins secrets. Toutefois… Si elle trahissait ses mystères, elle pouvait toujours poursuivre la récolte d’indices sur les siens.

— Cela a-t-il été nécessaire pour votre déesse ? s’enquit-elle.

Immédiatement, elle regretta de l’avoir interrogé à ce sujet probablement sensible. N’avait-elle vraiment rien de mieux à faire que de jouer ainsi les indiscrètes ?

Par pudeur, et par respect, aussi, pour la mémoire de celle que son interlocuteur avait aimée - car si elle était certaine d’une chose, c’était bien qu’elle était morte - Eléonore se redressa sur son siège.
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Message par Coldris de Fromart Ven 12 Fév - 23:22



Il fallait bien des avantages à l’hiver et aux longues nuits ! Bien sûr qu’il n’avait pas manqué de remarquer que le soleil se coucherait prochainement. Il ferait nuit avant la fin de la pièce. Il étouffa un petit rire face à cette détermination qui semblait l'animer. Avait-elle peur de changer d’avis pour être si empressée ?

Il eut tout le loisir d’essayer de se reconcentrer sur la pièce. Sans grand succès, il devait le dire, tant ses pensées continuaient de vagabonder sauvagement. Qui plus est, Roméo le timoré l’agaçait. Même Virgil aurait été plus vindicatif que cela, lui au moins été déterminé. Il lui adressa un sourire amusé : elle avait entièrement raison, il avait connu plus hardi à la tâche.

- Et vous ma luciole : quelle Juliette seriez-vous ?

Une question parfaitement spontanée qui avait jailli de ses lèvres. Il se demandait quelle amoureuse elle était, ou à défaut, si elle n’avait jamais connu cela, celle qu’elle aimerait être ou qu’elle se verrait être. Une question qui entraina une autre, appelée par les paroles de Juliette justement, au sujet du mariage.
Il écouta sa réponse – étrange pour commencer- avec attention, avant qu’elle ne développe sa pensée. De temps à autre il secouait la tête. C’était toujours la même histoire et c’était bien pour cela au fond qu’il détestait les mariages. Quitte à se marier, il valait mieux parfois que ce soit avec un parfait inconnu qu’avec un homme aussi proche. Il détestait cela et il l’avait imposé à chacun de ses enfants -ou presque- parce que c’était nécessaire pour sa lignée ou parce qu’il connaissait son gendre depuis sa naissance… C’était aussi un moyen de les mettre à l’abri -surtout Bérénice, qui d’ailleurs n’était pas malheureuse-, et malgré tout…

- Vous ne devriez pas l’épouser. Il n’en ressortira rien de bon et vous n’avez pas envie de passer le reste de votre vie à supporter cela. Vous n’imaginez même pas ce que cela peut être.

Elle pourrait dire que c’était facile à dire de la place où il se situait, et elle aurait raison. Il n’avait aucune légitimité et surtout rien de mieux à lui proposer, parce qu’il le savait : on ne la laisserait pas en paix tant qu’elle n’aurait pas signé ces foutus papiers qui l’enchaineraient jusqu’à ce que la Mort vienne l’en délivrer.

- Vous ne pouvez pas m’embêter si c’est moi qui pose la question. Et puis, je serai toujours ravi de vous consoler et de vous offrir un petit havre de paix quand ce sera nécessaire. conclut-il avec plus de légèreté lorsqu’il retrouva sa malice habituelle.

Il l’avait toujours dit : s’il avait eu autant d’amantes dans sa vie et que celles-ci étaient pour l’immense majorité mariées, cela signifiait bien que leur mariage ne les comblait pas. Mais le pire dans tout ça, ce n’était pas d’être délaissé par son époux, car ce manque pouvait toujours être comblé ailleurs, c’était au contraire de subir son envahissante présence. Et ça aussi, il était bien placé pour le savoir. À tel point qu’il laissa échapper cette remarque sur Paris et s’en mordit instantanément la langue. Il se figea et plongea son regard dans le sien durant ce qui lui parut une éternité. Ses entrailles se nouèrent et il chercha machinalement quelque chose à quoi se raccrocher, un accoudoir, une main. Son cœur se rappela à lui tandis que cette voix familière tentait de l’apaiser de là où elle était.

Même si tu crains de les laisser t'envahir,
Tes souvenirs peuvent devenir des Sybile.

Il la sentait, cette vague, menaçant de l’emporter et de le noyer. Depuis toutes ces années, il arrivait au moins à reconnaitre ces moments pour fuir sur les hauteurs avant que le ressac ne fasse son œuvre. Il voulait lui dire, il voulait tout lui raconter, pour la mettre en garde et parce qu’il l’appréciait, mais en même temps il ne pouvait s’empêcher de se méfier et de vouloir hérisser ses défenses pour s’y terrer à l’abri.

Et ne crains pas; ils ne m'entraîneront pas loin :
L'abri où je me cache, c'est toi, Jupiter.

Il eut un frémissement, elle ne croyait pas si bien dire ce jour-là. Elle l’habiterait pour toujours. Quoi qu’il arrive, elle aurait toujours une place dans son cœur. Parfois, parfois il avait même l’impression de la sentir percher au-dessus de son épaule ou l’envelopper de sa présence. Il se retournait machinalement pour la chercher, mais bien évidemment, il n’y avait personne. Il avait beau le savoir, il continuait de répéter ce même geste parfaitement insensé.

Toujours hypnotisé par son regard ténébreux, il avait presque oublié cette question qui l’avait emportée bien loin de là où il aurait dû être. Il secoua la tête. Il ne pouvait pas se laisser trainer par ses souvenirs. C’était le passé. Il l’interrogea du regard. Il pouvait sans doute lui dire. Peut-être. Vraisemblablement. Ce n’était pas le pire de ses secrets, mais c’en était la porte d’entrée. Avait-il tué son Paris ? C’était la question initiale. À force de laisser s’étirer ce silence oppressant, ses lèvres asséchées avaient fini par se coller ensemble, doublant l’effort nécessaire à son aveu.

- Je l’ai tué. avoua-t-il froidement

Sauvagement tué.

- Je l’ai épousé en secret, vous l’aurez peut-être compris. Mais je n’ai pas eu la chance ou l’opportunité de Roméo, appelez cela comme vous voudrez. Parfois tout ne se passe pas comme on l’avait prévu. Il a fini par l’épouser et moi me marier avec une autre.
…Parce que je n’ai pas eu le courage de dire « Non », lorsque l’on m’a incité à choisir ma carrière plutôt que mon cœur.

- Mais ce n’était pas un papier qui pouvait tuer un amour. Elle a bien essayé durant un temps qui m’a semblé une éternité alors que j’essayais moi-même de faire annuler mon mariage… Et puis un jour… Un jour, j’ai remarqué des marques sur son corps.

Même après toutes ces années, ces images provoquaient toujours une montée de colère à travers ses veines. Il inspira profondément.

… Je l’ai provoqué en duel, je l’ai tué. il détourna le regard vers la fausse voute céleste qui les surplombait … j’aurais dû le faire bien plus tôt. Je n’aurais jamais dû laisser cela se produite. il reporta ses prunelles aux reflets de glace sur son visage empreint de douceur. … vous comprenez pourquoi vous ne pouvez pas l’épouser ?

Petit à petit, son cœur retrouva son rythme placide. C’était la première fois qu’il confiait ce souvenir à une oreille qui ne l’avait pas connue. La première fois depuis des dizaines d’années qu’il en parlait à quelqu’un, voix haute, comme d’une chose presque normale. Il ne savait même pas pourquoi c’était à elle qu’il venait de lui raconter. Sans doute car il n’y avait qu’elle pour transformer ses nuits sombres et froides en belles journées ensoleillées. Il aurait tant voulu pouvoir entendre Virgil ou Solange à ce sujet. Et même Aurélia. Pourquoi ne pouvait-elle pas lui dire ce qu’elle pensait de cette situation ? Il n’avait plus que lui-même pour partager ses propres doutes. Lui et ses fantômes.

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Message par Éléonore de Fromart Sam 13 Fév - 14:20

— Et vous, ma luciole, quelle Juliette seriez-vous ?

Eléonore dodelina de la tête, se fendant d'un soupir. Elle pouvait presque entendre Ariste décrire quelle amoureuse formidable elle ferait, pour celui qui serait prêt à accepter de n'être malgré tout que le deuxième dans son cœur. Oh, mais dans un coeur comme le sien, avec une telle capacité d'affection, tant que l'homme qui aurait pris son cœur n'aurait pas cherché à évincer Ariste, tout ce serait bien passé. Ariste en était persuadé. Parce qu'elle était bien trop formidable pour qu'il retienne son cœur pour lui seul. Quant au temps... Les journées étaient assez longues pour les partager, et lui aussi avait d'autres fréquentations.

Maintenant qu'il n'était plus là... Il demeurait sa seule raison de vivre, à jamais le premier. Mais si, dans la reconstruction qu'il exigeait d'elle – il n'aurait jamais rien exigé qui ne fut entièrement dans son intérêt à elle, même si cela semblait d'abord insurmontable – elle tombait amoureuse… Son aimé n'aurait plus à souffrir d'aucune concurrence, car elle pourrait les lui accorder, tous les sacrifices qu'elle aurait auparavant réservé à Ariste. Tout, pourvu qu'il soit prêt à lui en donner autant – quand bien même ne ferait-elle jamais l'affront de lui en demander le moindre. Et surtout, qu'il l'aime. Qu'il l'aime avec toute la sincérité de son coeur et la soutienne.

C'était ce qu'Ariste voulait pour elle : quelqu'un qui sache la soutenir, la réconforter et lui permettre d'être forte à nouveau. Quelqu'un qui, s'il ne pourrait jamais le remplacer, l'aimerait vraiment et lui permette d'être heureuse, et pas seulement de survivre.

— Je l'ignore, mentit-elle.

D'abord parce qu'il aurait trouvé son opinion franchement niaise, et, surtout, parce qu'elle ne serait jamais amoureuse. Au fond, elle ne se faisait pas d'illusions. Elle ne laisserait jamais son coeur se blesser pour un homme qui ne l'aimerait pas. Et aucune homme ne saurait jamais l'aimer de cette manière. Elle était un coeur en ruine. Qui aurait voulu de cette ruine ? Et puis, elle était inutile, lassante, lâche, ridicule, pathétique, faible, stupide, égoïste et ennuyeuse. Incapable de faire quoi que ce fut toute seule. Personne ne voudrait de ça,

Même Gabriel, c'était surtout parce qu'il ne pouvait rien refuser à son oncle et parce qu'il avait promis à Ariste de la protéger en son absence qu'il allait accepter de l'épouser. Qu'il lui laissait son amitié qu'elle ne méritait pas. Il était son meilleur ami, et pourtant, il ne parvenait plus à l'apaiser réellement. Elle avait trouvé plus de réconfort avec un inconnu qu'avec lui. Elle en avait honte. Elle était vraiment la pire des amies. Elle savait, pourtant, que lui aussi portait le deuil d'Ariste. Elle savait qu'il souffrait, qu'ils en souffraient tous. Mais non : elle n'était qu'une petite égocentrique qui avait passé huit mois à pleurnicher dans son lit comme si elle était la seule qui ait perdu Ariste. Elle n'avait fait que les accabler de plus de chagrin encore, minable qu'elle était. Sans son Ariste, elle ne savait vraiment plus rien faire de bien.

Alors, certes, ce mariage avec Gabriel n'était pas ce qu'elle voulait – ce n'était pas ce qu'il voulait non plus, mais il n'aurait pas non plus accepté qu'elle quitte Tianidre, il fallait savoir – mais elle ferait des efforts. Des efforts pour être absolument parfaite et lui faire oublier la situation. Elle lui ferait même oublier qu'elle existait si cela pouvait l'aider. Elle accepterait de mûrir et de se tenir tranquille. Elle ferait tout et n'importe quoi pour que lui, au moins lui soit heureux s'ils ne pouvaient pas l'être tous les deux. Et elle ne se plaindrait plus jamais, c'était promis. Tout ce qu'il voulait. Vraiment tout ce qu'il voulait.

Coldris se trompait. Elle imaginait très bien ce que ce serait. Mais elle saurait le supporter, parce que c'était nécessaire. Parce que malgré tout, Gabriel serait ce qui se rapprocherait le plus de ce dont elle avait besoin. Ni son Ariste, ni un amoureux, mais un ami solide. Il avait sauvé Ariste, elle ne l'oublierait jamais. Il avait permis à son tout de s'accepter, et elle lui devait, pour cela, une reconnaissance éternelle. Il ne l'avait pas abandonnée quand elle était au plus bas, et encore maintenant, il la soutenait. Elle lui devait jusqu'à l'autorisation de se retrouver au théâtre ce soir. Elle lui rendrait la pareille. Pour lui, pour son oncle, pour Ariste. Elle ne lui laisserait voir, après leur union, que les avantages qu'il en avait tiré. Sa position moins précaires, les moyens retrouvés, et une amie fidèle qui ne l'empêcherait jamais de vivre pour lui.

— Ce n'est qu'un document, ça ne changera rien, tenta-t-elle de se persuader.

Pourrait-elle alors se permettre de passer la nuit avec un autre ? Oh, Gabriel ne le lui interdirait jamais, parce qu'il tenait à son bonheur. Mais il vaudrait sans doute mieux faire semblant de ne pas en avoir besoin. Le laisser voir ses amants comme avant, mais ne pas déraper elle-même. Qu'il sache que son amitié suffisait amplement à son épanouissement même si ce n'était pas tout à fait exact. Ou bien, justement, devrait-elle en profiter, pour être certaine qu'il ne culpabilise pas. Elle aviserait en temps voulu, elle verrait bien ce qui serait le mieux pour lui. De toute façon, elle ne tomberait jamais amoureuse. Ariste, lui, aurait toujours su qu'il était le premier. Gabriel, lui, en douterait. Elle ne pouvait pas se le permettre. Pas si elle craignait de le blesser. Il devrait passer avant elle-même.

— Vous ne pensez tout de même pas que je vous intéresserai toujours, si ? elle se serra davantage contre son épaule pour chasser ce mariage de ses pensées. C'était pénible. Ne vous inquiétez pas pour moi. Je ne suis peut-être pas aussi habile que vous pour séduire, mais n'aurai aucun mal à trouver un autre amant quand nous nous serons lassés l'un de l'autre.

C'était un énorme mensonge, débordant d'orgueil. D'abord parce qu'elle savait bien qu'elle ne pourrait plus jamais retrouver un homme aussi intéressant. Un amant, oui, mais avec son esprit, son charme, et qui puisse l'apaiser rien qu'en l'entourant de ses bras ? Non, il était le seul qui puisse faire cela. Ce qui menait à l'autre part du mensonge : sa formulation. Il n'y aurait pas de "lassé l'un de l'autre", elle le savait. Elle cesserait bientôt de l'intéresser et devrait le laisser partir. Elle n'avait dit cela que pour rattraper l'unilatéralité de sa première déclaration. Il la rendait parfois terriblement orgueilleuse : elle refusait qu'il devine ses larmes intarissables quand il ne voudrait plus d'elle. Parce que ces larmes n'avaient pas lieu d'être. Ce n'était qu'un jeu.

Mais il fallut que la conversation dévie. Dévie sur son grand amour. Juste parce qu'elle ne savait pas tenir sa langue.

Elle regretta sa question en devinant à quels genre de souvenirs elle le ramenait. Ils n'étaient pas là pour ça. Ils se fréquentaient pour s'éloigner de leurs tourments, pas pour se les rappeler mutuellement. Quel boulet elle faisait.

Le silence s'installa, mais un silence pesant, désagréable. Elle aurait voulu lui dire qu'il n'avait pas besoin de répondre. Ses secrets étaient à lui, rien ne l'obligeait à les lui confier. S'il avait besoin d'alléger son coeur, elle pouvait entendre n'importe quoi, mais elle n'avait pas l'oreille inquisitrice. Qu'il ne lui parle que si cela pouvait le soulager. Elle essaya de communiquer cette idée à travers son regard. Elle avait eu trop l'habitude, avec Ariste, qu'un simple regard suffise à faire comprendre n'importe quoi, de "J'ai faim, tu m'accompagnes aux cuisines ?" à "J'ai mal, tellement mal, ne me laisse pas seule".

Finalement, Coldris parla. Au plus la soirée passait, au plus elle percevait chez lui de sensibilité. Une part d'elle en avait peur – peur d'être capable de lui faire du mal si sa carapace n'était pas si impénétrable qu'elle ne l'avait d'abord cru – et l'autre ne lui en accordait que davantage d'affection. Et d'estime, aussi, car il avait la force de dépasser ses blessures. Et de reconnaissance, parce qu'il lui accordait, pour de tels aveux, une confiance sincère dont elle aurait tout fait pour être digne.

Il fallait qu'elle le soie. Qu'elle le soie le plus possible ! Elle n'avait pas le droit de faillir si on lui faisait confiance. Que ce soit Coldris, Alduis, Gabriel, Lavinia... N'importe qui. Elle devait s'en montrer aussi digne que de celle d'Ariste. Et en faire le même usage : ne toujours s'en servir que pour le bien de celui qui la lui confiait. Même si elle ne valait rien et était inutile, même si elle était d'une faiblesse et d'une lâcheté pitoyable, le simple fait qu'on place de la confiance en elle l'obligeait à faire plus que ce dont elle était capable pour la mériter. Pas comme l'autre jour, avec Lavinia, qui lui laissait le goût d'un échec et d'une trahison.

Aujourd'hui, avec Coldris devait même accepter de quitter le cadre de ce jeu futile, et de redevenir aussi sincère qu'elle l'était toujours. D'accepter de lui montrer qu'elle était d'abord fragile et pleine d'empathie, quitte à ce qu'après coup, il la trouve ennuyeuse et niaise et la rejette. Cela ne comptait pas. Elle ne comptait pas.

Elle voyait qu'il souffrait de nouveau. Comme tout à l'heure. Elle l'écouta. S'il parlait, c'était parce qu'il en avait besoin, parce qu'elle ne lui en avait pas tant demandé. S'il avait voulu, il aurait tout à fait pu répondre par une pirouette, elle l'en savait capable. Pourquoi se confier à elle ? Pourquoi.

Son visage affichait un sourire triste, compatissant. Ces hommes pleins d'orgueil pouvaient toujours prétendre qu'ils n'avaient pas besoin qu'on les plaigne, accepter une compassion sincère faisait toujours du bien. Accepter de ne pas affronter seul une douleur qui aurait pu être apaisée était salvateur. Elle aurait aimé, elle, avoir encore quelqu'un pour ça. Quelqu'un qui voudrait vraiment l'écouter et la comprendre – quelle égocentrique elle faisait de songer à cela maintenant.

— Et puis un jour... Un jour, j'ai remarqué des marques sur son corps.

Sans le quitter ses yeux, elle saisit ses mains qu'elle massa doucement pour l'apaiser.

Oui, après cela, il l'avait tué. Elle ne jugeait pas – d'ailleurs, un homme dans sa position devait être à l'origine de morts bien moins légitime, et cela ne comptait pas – et ce n'était d'ailleurs pas la question, elle le savait. Ce qui avait de l'importance, ce n'était pas ce qu'il avait fait… c'était ce qu'il regrettait aujourd'hui. Il regrettait de n'avoir pas agi plus vite.

Elle secoua presque imperceptiblement la tête, conservant ses mains. Était-il seulement conscient de cette culpabilité qui le rongeait encore ?

— Vous n'avez rien à vous reprocher, vous le savez, n'est-ce pas ? Vous ne pouvez pas vous reprocher l'attitude qu'il a eue avec elle. Le seul à devoir se le reprocher, c'était lui. Ne le laissez pas vous hanter encore. Il ne mérite pas de vous tourmenter, vous valez bien mieux que la douleur que ramène son souvenir. Cessez de ressasser cela, il n'est plus là, ça ne blesse que vous. Votre déesse... Elle n'aurait pas voulu que vous vous fassiez du mal en y songeant. C'est ce qu'il aurait voulu, lui. Vous ne pouvez pas lui céder ça, vous comprenez ?

Et ne vous inquiétez pas pour moi, Gabriel ne me ferait jamais de mal, ajouta-t-elle pour elle-même avant de libérer ses mains, et d'entourer de ses bras les épaules de son interlocuteur, se penchant de manière à ce que ce ne soit inconfortable que pour elle.
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Message par Coldris de Fromart Sam 13 Fév - 21:24



Il aurait sans doute dû s’abstenir de lui poser cette question. A bien y réfléchir aurait-il pu lui aussi y répondre ? Audacieux et déterminé ? Follement idiot ? Embrasé ? Coldris lui laissa le temps de réfléchir à sa question. Sa réponse le déstabilisa. « Je l’ignore ». Devait-il comprendre qu’elle n’avait jamais été amoureuse ? Ou alors qu’elle avait toujours fermé les yeux dessus ? Il eut un signe de la tête et s’empêcha de creuser le sujet plus que de raison, parce qu’il avait des raisons de croire que son amour avait tout pour être interdit.

- Je vous souhaite d’être amoureuse un jour. De connaitre des nuits hantées de son image, de vous embraser à la simple vue d’un regard ou même de rêver de l’étreindre alors qu’il sera juste devant vous, simplement parce que ces quelques centimètres de vide seront déjà bien trop conséquents.

Et ses propres paroles rencontraient un écho bien étrange aussi bien dans son cœur qui se manifestait dans sa poitrine que de son esprit où des réminiscences s’agitaient à son bon souvenir. Combien de temps pourrait-il garder les yeux et les oreilles fermés ? Tant qu’il ne décrétait pas que cela existait, alors il n’aurait rien à craindre. Il avait bien réussi jusqu’à présent, il pouvait sans doute continuer. Il pouvait bien nier ses poils qui se hérissaient et le brasier qui tentait de prendre naissance dans le creux de son abdomen à chaque regard. Il pouvait bien nier qu’il n’avait que son nom au bord des lèvres même lorsqu’il était avec une autre.

- Les documents font et défont un empire. Imaginez donc leur pouvoir sur une simple vie. Ne sous-estimez pas une signature sur un bout de parchemin, Éléonore.

Quel autre conseil pouvait-il lui donner ? Elle n’écouterait pas. C’était ainsi, il fallait expérimenter avant de se dire que « oui c’était bien le cas ».

- Si vous changez d’avis, vous pourrez toujours venir à Fromart, je vous protègerai aussi longtemps que vous le voudrez. ajouta-t-il en penchant légèrement la tête.

Il pouvait au moins lui acheter le temps nécessaire à trouver le mari qui lui conviendrait. Qui oserait venir s’opposer à lui ? Il aurait fallu être fou ou inconscient. Coldris afficha un sourire charmeur en réponse à son affirmation.
- Et pourquoi pas dites-moi ? Laissez-moi au moins vous transmettre mes enseignements et vous n’aurez plus qu’à choisir l’amant -ou les amants- de votre choix. Quand nous serons lassés l’un de l’autre. Ou même avant si le cœur vous en dit. Ce n’est pas moi qui vous ferai la moindre remarque à ce sujet.

Il eut un petit rire. Oh oui, si elle le voulait, il lui donnerait tous les conseils dont il disposait pour lui permettre d’avoir tous les hommes qu’elle souhaiterait à ses pieds. D’un autre côté, si elle pouvait l’hypnotiser à ce point, elle pourrait sans doute le faire avec n’importe quel autre homme. Elle avait déjà pris une place si importante dans son esprit en quelques semaines… Il pouvait bien choisir de démentir bon nombre d'évidences au sujet de leur relation, mais il ne pouvait décemment pas contester l’emprise qu’elle avait désormais sur lui. Elle était si palpable qu’il en arrivait même à se confier à elle sur un sujet ô combien personnel et secret. L’idée qu’il puisse l’ennuyer avec son histoire ne lui effleura même pas l’esprit. Les mots continuaient d’affleurer au bord de ses lèvres sans qu’il ne puisse désormais plus les contenir. Le simple contact de ses mains suffisait à l’apaiser et à lui donner la force de poursuivre.

Tranquille. Elle était tranquille alors qu’il lui racontait une bribe de son passé. Mais Coldris ne s’en voulait pas pour cela. Ce pourceau en courte-botte n'avait pas de place dans son esprit encombré.

- Je n’ai pas de regret le concernant. Mais vous avez tort, j’aurais pu empêcher cela. J’aurais pu fuir avec elle. Abandonner ma place, ma carrière. Je l’aurais fait. J’étais prêt à le faire. Ils m’ont tous convaincu du contraire. Je ne sais pas si vous vous rendez-compte de tout ce qui découle de cette bête décision ? Bien sûr, elle n’aurait jamais eu à subir l’emprise d’un mari violent et jaloux qui plutôt que de m’attaquer moi, préférait blesser celle qu’il prétendait aimer. Elle serait même peut-être toujours en vie. Mais ce n’est pas tout… Monbrina aurait sans doute été bien différent.

L’empire n’existerait peut-être même pas puisque Gérald n’aurait peut-être pas accédé au pouvoir dans ses conditions. Qui pouvait savoir ? En revanche, il devait reconnaitre que tous avaient eu raison : il était devenu une figure incontournable de la politique et son nom marquerait désormais l’histoire. Elle relâcha ses mains pour saisir ses épaules et Coldris plongea de nouveau dans son regard. Il connaissait ce regard pour l’avoir déjà observé chez Bérénice. C’était ces yeux qui disaient « Ca ne m’arrive pas à moi. ». Il n’eut que sa réponse habituelle à lui transmettre « N’allez pas croire que cela n’arrive qu’aux autres. » On croit parfois connaitre les personnes, avant de les découvrir sous un jour nouveau.

- Je ne laisserai personne vous faire du mal. avoua-t-il sans réellement s’en rendre compte, hypnotisé par l’encre de ses prunelles qui étincelaient des multiples lueurs des chandeliers.

Il caressa son visage tendrement. De nouveau, le rideau se baissait, signant la fin du troisième acte qu’il avait encore moins suivi que les deux précédents.

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Message par Éléonore de Fromart Dim 14 Fév - 6:24

Il espérait qu'elle tombe amoureuse ? Elle, elle ne voulait pas. Elle ne pourrait jamais. D'autant que ce qu'il décrivait ressemblait furieusement à ce qu'elle éprouvait pour lui... alors qu'elle ne l'aimait pas. Ça n'avait pas de sens.

Oui, elle le voyait en rêves. Il y en avait où le trajet en voiture était si long qu'elle s'endormait, blottie contre lui, et ne le quittait plus jamais. Il y en avait où ils se jetaient tant de neige à la figure que lorsqu'il la rattrapait, il n'y en avait plus un seul flocon. Où il ne s'arrêtait pas à l'embrasser, et qu'elle se réveillait dans ses bras et ouvrait les yeux sur un ballet de lucioles. Celui-là remontait à la nuit précédente. Et il y en avait bien d'autres encore, portant tant de cette incohérence propre aux délires oniriques qu'elle n'aurait su les conter, mais dont elle savait qu'il les peuplait. Dommage que cela doive encore subir la concurrence de ses incessants cauchemars, aux thèmes desquels s'était ajouté le jour où il l'a rejeterait définitivement.

Et son regard… Son regard, elle s'y noyait sans cesse. Son regard l'avait envoûtée. S'y plonger était autant trouver la paix que d'être assaillie par la folie. Cela apaisait une part de ce vide qu'elle était devenue, et vrillait sa raison d'une tornade d'un désir jusqu'alors insoupçonné. Cela n'avait décidément rien de commun avec ce qu'elle avait cru éprouver par le passé. Une vague attirance d'adolescente, rien de plus. Lui, il était parvenu à lui faire perdre tout bon sens.

Mais cela ne voulait rien dire. Rien sinon qu'il avait un charme fou, des yeux magnifiques, des lèvres irrésistibles, et elle, besoin de penser à autre chose que le mal qui l'a rongeait. Ça ne pouvait rien vouloir dire d'autre, ce n'était pas acceptable. Enfin... Rien d'autre, à part le fait qu'elle ne lui résisterait pas beaucoup plus longtemps.

Elle ne sut répondre. Elle ne quitta pas son épaule, ne lâcha pas son bras. Ce fut lui qui relança la conversation en sentant, alors que les acteurs arrangeaient un mariage, que ses tourments la reprenaient. Parce qu'elle n'en doutait plus : il l'avait senti, et il touchait juste.

Prise au dépourvu, elle lui confia tout. Enfin, l'essentiel. C'était gentil de sa part de faire mine de se soucier de son bonheur futur. Sans doute, sur le moment, avait-il dû sincèrement trouver ça dommage. Comme n'importe qui trouverait cela dommage, au fond.

— Je vais finir par croire que vous voulez vraiment me voir emménager chez vous, le railla-t-elle gentiment.

Mais Éléonore ne se faisait aucune illusion. Il n'allait pas réellement l'accueillir ni jouer les sauveurs. Il n'avait vraiment pas que ça à faire. Son avenir ne le préoccupait pas plus que ça... à moins, visiblement, qu'il ne puisse profiter des lacunes de son mariage pour l'attirer encore dans son lit.

Honnêtement ? Elle ne lui en voulait pas d'émettre cette suggestion qui, si elle était parfaitement indécente, n'était pas moins attirante. D'ici-là, elle aurait largement eu le temps de juger si c'en valait la peine et... Oui, si elle lui plaisait encore – et qu'elle estimait que ça ne nuirait pas à son amitié avec Gabriel – elle se laisserait tenter.

C'était qu'il ne doutait pas lui ! N'empêche, avant de répondre quoi que ce soit d'autre, il y avait une chose qu'elle devait lui rappeler – sans agressivité, juste une pointe de taquinerie faussement offusquée :

— Oh mais je n'attendais pas votre autorisation. Pas plus que vous ne demandiez la mienne, d'ailleurs. Parce qu'après tout, ils ne se devaient absolument rien. Mais... Dites-moi, selon vous, est-ce l'équitation ou plutôt le perfectionnement linguistique qui fera tant d'effet à ces messieurs ? ajouta-t-elle en sachant pertinemment qu'il ne faisait référence à rien de tout ça.

Qu'il rie, elle riait aussi, légèrement, à toutes les âneries qu'elle laissait échapper. Elle était stupide, vraiment stupide… mais parfois, elle se disait qu'avec lui ce n'était pas grave. Qu'il ne le prenait pas comme ça. C'avait quelque chose de libérateur et permettait de retrouver une légèreté lointaine.

En revanche, si elle n'hésitait plus à plaisanter avec lui, elle ne pouvait pas moins en redevenir sérieuse quand la tournure de la conversation le nécessitait. Un commentaire qui l'avait interpellée, un question échappée… Elle ne s'était pas attendue à ce qu'il réponde si sincèrement. Pas attendue à ce qu'il lui confie quelque chose d'aussi personnel.

Cela la troubla quelque peu, mais elle n'en montra rien. Elle devait être forte pour lui, pour mériter la confiance qu'il lui accordait. Quoi qu'il lui dise, elle ne faillirait pas. Elle aurait pu encaisser n'importe quoi par... Enfin, pour soutenir quelqu'un qu'elle appréciait. Et ce qu'elle ne pouvait pas nier, c'était qu'elle avait sincèrement de l'affection pour Coldris. Mais... Mais cela ne voulait rien dire : c'était seulement quelqu'un de fort bonne compagnie qui se révélait être d'un certain soutien et porter des blessures que la jeune femme n'avait pas tout de suite remarquées... et qui lui faisait confiance. Enfin, bref, elle était présente, et ne l'aurait pas abandonné.

Oh, il pouvait bien nier ses regrets, il en portait tout de même : la preuve en était dans la phrase suivante. Mais Éléonore n'avait pas pour priorité de pointer les incohérences de ce discours, loin de là.

L'homme dont il parlait... Éléonore en ignorait tout, et n'avait pas besoin de le connaître pour réprouver ce qu'on en disait. On ne pouvait pas se servir d'une personne pour en blesser une autre. On ne pouvait pas chercher à blesser quelqu'un. Elle chassa le souvenir que son interlocuteur était ministre et ne devait pas être du genre à en faire un cas de conscience quand ça ne le touchait pas personnellement, ce n'était pas une pensée productive. Elle n'aiderait personne en lui jetant à la figure ses probables torts. Elle n'agissait ainsi avec personne, les gens avaient bien trop de blessures pour qu'on puisse s'amuser à les accabler. Elle ne prolongerait pas cette chaîne de violence ou tout le monde attaquait tout le monde en ayant toujours aussi mal. Elle ne pouvait pas avoir ce tort-là en plus de tous les autres.

— Non, j'ai raison. Vous vous accusez de choses pour lesquelles vous n'avez rien à vous reprocher. Ne me dites pas qu'un homme comme vous, qui saurait convaincre n'importe qui de n'importe quoi, ne me dites pas que cet homme-là doute du pouvoir qu'ont les mots. Ne me dites pas que cet homme là ignore combien il peut être aisé d'instiller le doute, d'empoisonner les esprits. Les mots sont comme ça : insidieux. Ils vous perdent et vous vous trompez. Cela arrive même aux meilleurs, vous n'y êtes pour rien. Vous avez oublié vers quoi tendait votre cœur, et vous l'avez certainement déjà payé bien trop cher.

Elle l'étreignit avant de poursuivre :

— Et oui, cela a changé des choses. Cela a engendré de fâcheuses conséquences – elle s'efforça de ne pas penser que sans lui, on aurait peut-être su éviter cette politique coloniale absolument ridicule. Elle parlait à l'homme, non au ministre – comme cela vous a certainement apporté d'excellentes choses. L'important est que vous utilisiez cette force que vous possédez indéniablement pour rebondir sur vos erreurs, n'en garder que les effets favorables et les enseignements qui vous empêcheront de les réitérer, et apaiser vos blessures, car vous ne méritez pas de souffrir.

Personne ne méritait de souffrir, d'ailleurs. Mais, sans qu'elle ne puisse en admettre la cause, le cas de Coldris de Fromart affectait particulièrement la jeune femme. Elle souhaitait de l'apaisement a tout le monde, mais à lui plus qu'à la majorité. Même si elle le savait responsable – en partie, du moins – de bon nombre d'horreurs. Elle s'en fichait éperdument. Elle s'arrimait à son regard, et elle savait. Elle ne ignorait ce qu'elle savait, mais elle ne l'en savait pas moins. Et elle voulait par dessus tout qu'il cesse de souffrir. Elle en avait les larmes aux yeux, mais les retenait courageusement. Pour lui.

— Je ne laisserai personne vous faire du mal.

Elle esquissa un sourire. Elle savait. Mais lui... Lui... Oh, s'il savait ! S'il savait qu'il combattait son pire ennemi à chaque fois elle le voyait. S'il savait qu'il en avait déjà triomphé plusieurs fois. Si cet ennemi n'était pas si bien implanté en elle, il l'aurait déjà vaincu. Ce pire ennemi, au fond, c'était elle-même. Cette part d'elle-même qui lui l'accablait de tant de maux, et cette part manquante qui laissait un gouffre atrocement douloureux. S'il savait quel réconfort il lui procurait, rien qu'avec ses attentions douces. S'il savait que dans ses bras, même en plein enfer, elle se serait sentie parfaitement en sécurité. S'il savait ! Oh, s'il savait...

Mais mieux valait qu'il n'en sache rien. Mieux valait qu'ils l'ignorent tous deux, ça ne voulait rien dire. Et s'il se figurait qu'elle imaginait que c'avait une quelconque signification… Oh, eh bien ce serait cette affection qu'il lui portait malgré tout qui le pousserait a la rejeter. Ce quelque chose, mais qui n'était pas ça. Ou bien, si elle se fourvoyait assez pour lui inventer cette certaine affection alors qu'il ne lui portait pas. S'il en avait, en réalité, aussi peu à faire d'elle que le jour de leur rencontre et qu'elle n'était toujours qu'un jouet tombé entre ses mains, un jouet qu'il se moquait éperdument de briser... Eh bien elle préférait profiter encore un peu de l'illusion qu'il l'apprécie, car le mal était fait et elle en souffrirait de toute façon.

À l'ouïe, elle comprit que la pièce s'interrompait de nouveau. Il ne faudrait pas qu'on l'interroge sur son contenu en rentrant, elle n'aurait vraiment rien à en dire.

— Évidemment que personne ne me fera de mal, enfin ! répondit-elle alors que la main de l'homme atteignait son visage.

Personne sauf vous quand vous me laisserez. Mais de cela, je ne saurez jamais rien.

Tant qu'ils en étaient aux sujets désagréables, il y avait une chose qu'elle voulait savoir. Une seule avant qu'ils ne puissent mettre tout ça derrière eux. Une seule question qui la tourmentait encore.

— Coldris... Cela va vous sembler stupide, comme question... Ça n'a rien à voir, mais... Il y a une chose qu'il faut que je sache. Et quelle que soit votre réponse, cela ne changera rien par rapport à nous mais... Mais vous êtes certainement le seul qui puisse vraiment me répondre.

Ce n'était pas faute d'avoir essayé d'interroger Eltinne. D'abord en tentant de se montrer subtile, puis en mettant carrément les pieds dans le plat. C'était tout de même triste de devoir compter sur un inconnu pour clarifier ce sur quoi votre mère de lait restait si évasive.
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Message par Coldris de Fromart Dim 14 Fév - 23:26



Coldris s’amusa de sa remarque qui faisait écho à sa taquinerie quelques jours plutôt. Il ne répondit rien. Il n’y avait rien à ajouter. Quoique pour la forme, il aurait bien essayé d’avoir le dernier mot. Quant à l’accueillir à Fromart, si elle s’y retrouvait confronter, il était sincère : il lui offrirait l’asile matrimonial avec plaisir, pour aussi longtemps qu’elle le souhaiterait. Et pour une fois, il n’avait aucune arrière-pensée derrière cette proposition d’apparence indécente. Ce qui n’était pas le cas lorsque son regard s’illumina subitement à sa répartie sur les apprentissages qu’il lui proposait.

- Vous n’y êtes pas du tout, ma luciole. Vous voyez que mes conseils avisés ne seront pas de trop. Le perfectionnement linguistique permet de les attirer dans votre lit et l’équitation de les conserver.

Son sourire s’étira avant qu’il ne puisse définitivement retenir ce petit rire malicieux qui le secouait avec une profonde légèreté. Pour se faire pardonner de sa boutade, il posa ses lèvres avec une lente douceur sur les siennes. Toutes les excuses étaient bonnes pour y revenir. Surtout quand il n’y avait pas besoin d’excuses.

Et cet instant avait été le bienvenu avant d’affronter ses confessions autour de la mort de Quentin, mais surtout du mariage qu’avait subie Aurélia avant cela. Il écouta attentivement ce qu’elle avait à lui dire avant de succomber à l’appel de ses bras. Le pouvoir des mots, il le connaissait parfaitement, il en usait jour après jour. Même ce soir, il en avait joué. Oh pas à de viles pratiques, c’était juste plus fort que lui. Il en avait tellement conscience, qu’il faisait tout en permanence pour conserver son libre arbitre et fuyait ou se battait dès qu’il perdait le contrôle de la situation, quelle qu’elle soit. Alors non, c’était faux. Il avait fait son choix en son âme et conscience. Il avait accepté de privilégier son désir de pouvoir à son cœur et ce ne serait jamais ni pardonnable ni acceptable. Elle serait peut-être morte quand même, mais elle serait morte dans ses bras et non sur un bateau en pleine mer. Il aurait élevé son fils et ne l’aurait pas cru mort pendant des années. Pourtant il ne répondit rien et se laissa aller à l’enveloppement douceur de ses bras, à la chaleur qui émanait de son cou pulsant régulièrement.

- C’est l’histoire de ma vie que vous décrivez-là avoua-t-il, mais je suis fatigué de me battre. Certaines blessures cicatrisent, mais ne disparaissent jamais. Certaines paroles venimeuses restent encrées pour l’éternité comme un sempiternel écho dont les racines s’étendent au plus profond de votre esprit.

Instinctivement, il la serra un peu plus fort contre lui, malgré la position inconfortable et l’effroyable présence de ses accoudoirs. Tout cela n’avait aucune importance, tout comme les lointains dialogues qui lui parvenaient. Il ferma les yeux. Il pouvait fermer les yeux sur bon nombre de choses, mais pas sur l’une d’entre elles : il ne laisserait personne lui faire de mal. De cela, il en était absolument certain. Elle était bien trop douce, bien trop merveilleuse pour que quiconque ne la blesse. S’il ne devait et ne pouvait lui offrir qu’une seule chose, ce serait la sécurité. Tandis qu’il plongea une énième fois son regard dans le sien, il sentit que quelque chose lui échappait et lui filait entre les doigts. Quoi donc ? Derrière ce rideau de velours noir se trouvait quelque chose, mais il n’avait pas le courage de le soulever. Pas maintenant. Il caressa son visage avec cette étrange impression qu’il ne parvenait pas à identifier lorsqu’elle aborda un nouveau sujet visiblement délicat. Il se redressa d’un coup, quittant la torpeur qui s’installait lentement. Que voulait-elle lui demander ? Il ne put réprimer un frisson. Elle avait beau affirmer que cela ne changerait rien qui pouvait en être aussi sûr sans savoir ? En même temps, il n’y avait rien d’autre qu’un jeu partagé alors de quoi aurait-il pu avoir peur ? Tout finissait un jour. Qu’elle parte aujourd’hui ou demain qu’est-ce que cela pourrait changer ? La fin était la même.

- Je vous écoute, dites-moi. Si je peux, je vous répondrai.

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Message par Éléonore de Fromart Lun 15 Fév - 13:40

Elle aurait dû s'attendre à ce qu'il détourne ses propos. Elle n'avait pas anticipé, et c'était bien là son erreur.  

Elle lui lança un regard faussement vexé – mais pas mal à l'aise pour un sou, ils n'en étaient plus là. Plusieurs répliques lui venaient, mais le rire de Coldris la déconcentrait. Puis, un doux baiser vint couper court à toute pulsion vindicative. Les conserver ? Il n'y en avait qu'un qu'elle voudrait conserver. Malheureusement, celui-là avait confirmé qu'il finirait par se lasser de sa compagnie. Ce qui, en soi, était tout à fait compréhensible tant celle-ci était pénible – Éléonore en jugeait en connaissance de cause.

Et pourtant, malgré le fait que ce ne fut qu'un jeu, il lui faisait assez confiance pour lui confier ses noirs souvenirs – elle ne le soupçonna pas un seul instant de lui mentir, elle l'aurait senti s'il inventait des histoires.

Il souffrait. Il souffrait terriblement, et Éléonore le sentait. Ce masque, ce regard qui ne laissait entrevoir que ce qu'il voulait, cette maîtrise parfaite... Quand tout cela tombait, on découvrait un homme atrocement blessé. Et incontestablement touchant, quoi qu'il ait pu faire d'autre. Pour s'en tenir au jeu, l'acteur émérite était plus commode… Mais le séducteur infaillible n'aurait pas su gagner autant de son affection.

Soit. Quitte à briser le jeu, quitte à ce qu'il ne veuille plus d'elle après, c'était de son empathie qu'il avait désormais besoin. Une empathie décuplée par le lien inavouable – car certainement unilatéral – qui la rattachait à lui. Il avait besoin d'un réconfort simple. Oh, elle savait qu'elle ne pouvait pas vraiment l'aider. Qu'elle était trop faible, trop inutile, trop stupide pour cela. Mais si son étreinte pouvait ne fusse qu'un peu l'apaiser, même si c'était éphémère, elle ne pouvait la lui refuser. Puis – elle se méprisait pour cet égoïsme – elle aimait le serrer dans ses bras.

Elle l'écouta. Son attention n'était que pour lui. Pas pour la salle qui se vidait, pas pour les pas dans le couloir. Juste pour lui. Pour chacun de ses mots. Et chaque mot, sans qu'elle ne lui en montre rien, lui faisait mal.

Il souffrait. Elle arrivait à se plaindre de cette douleur constante qui l'a poursuivait depuis la mi-avril... Mais lui, depuis combien de temps devait-il porter cela ? Quelle force fallait-il pour passer chaque journée avec ce poids ? Elle ne serait jamais aussi fort que lui. Elle passait son temps à pleurnicher, elle n'était plus bonne à rien. Elle ne méritait même pas de croiser son regard.

Il était las de lutter ? Cela n'avait rien d'étonnant. Aujourd'hui, il avait eu un moment de faiblesse ? Cela n'avait rien d'une faiblesse. Il avait besoin de parler, et même si elle était une gamine incapable, stupide et faible qui ne saurait pas le rassurer, elle était sans doute l'une des rares personnes qui n'auraient jamais utilisé cela contre lui, ni ne l'auraient jugé. Pas même lorsque ses paroles lui laissèrent comprendre qu'il entendait des voix, lui aussi. Comme Alduis ? Ou bien extrapolait-elle ? Quoi qu'il en soit, ce n'était pas grave. Rien n'aurait pu l'effrayer, rien n'aurait pu la rebuter.

Ce qu'il y avait d'affreux, c'était qu'il s'impose de le porter seul. Il aurait dû avoir... Quelqu'un. Quelqu'un comme elle avait eu Ariste, et avec le soutien duquel tous les tourments sembleraient dérisoires. Ou du moins s'estomperaient suffisamment pour qu'il puisse être heureux. Il devait… cette barrière qu'il avait accepté de laisser tomber devant elle, il ne devait pas la maintenir auprès de ceux qui l'aimaient. Il devait trouver quelqu'un pour porter cela avec lui. À plusieurs, c'était toujours plus facile. Elle s'en voulait tellement de ne rien savoir faire pour lui alors qu'il l'apaisait tellement. Ingrate et inutile qu'elle était.

Oh, qu'il la serre, quitte à lui broyer les côtes sur ce maudit accoudoir si ça pouvait l'aider. Qu'il promette que personne ne lui ferait de mal, qu'il caresse tendrement son visage. Qu'il continue : cela compensait mille fois la douleur dont il l'accablait pas ses propres maux. Mais... Mais ça ne signifiait rien de particulier.

Et quant à ressasser des détails insignifiants... Il y en avait un qui la tracassait depuis quelques temps. Oh, ce n'était qu'une broutille. Quoi qu'il ait pu se passer, c'était il y a trop longtemps pour qu'elle lui en tienne rigueur. Elle devait juste savoir.

— Il y a un peu moins de vingt-trois ans, vers mai 1575, vous avez... comment formuler cela ? ... engendré un enfant. Pour la subtilité, on repasserait. Un petit garçon, s'empressa-t-elle de préciser pour éviter tout malentendu, sachant fort bien qu'elle avait dû être conçue à la même période.

Elle était ridicule. Vraiment ridicule. Elle ne savait même plus pourquoi elle venait l'ennuyer avec cette affaire. Elle allait tout gâcher. Elle avait soudain la gorge bien sèche, mais il lui fallait continuer.

— Ce que je veux savoir… Sa mère considère que vous avez détruit sa vie. Elle vous tient pour l'être le plus monstrueux de ce monde et...

Non, elle ne craignait pas qu'il l'ait forcée à quoi que ce soit. Elle avait confiance en lui, et puis... Et puis, même si Eltinne restait fort évasive – pour ne pas dire qu'elle ne lâchait rien – on sentait bien que le problème n'était pas là. Que le problème, c'étaient les conséquences.

N'empêche, il devait la trouver sotte de se risquer en sa compagnie après tout ce qu'elle avait dû entendre de lui.

— J'ai essayé de reconstituer les évènements. Apparemment, elle a dû partir de chez elle à cause de cela. Éléonore n'avait pas su déterminer si elle avait fui, si ses parents l'avaient chassé, ou si c'était encore autre chose. N'empêche… elle regrettait amèrement d'avoir abordé un sujet si peu intéressant. À l'en croire, elle s'est donc retrouvée dans une situation des plus précaires par votre faute. Ce que je veux savoir, c'est seulement… seulement si elle... Vous le saviez ?

La prochaine fois, elle y réfléchirait à deux fois avant de le lancer sur un sujet qui n'apportait rien.
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Message par Coldris de Fromart Lun 15 Fév - 23:25



Enveloppé par ses bras, il s’est laissé aller à se confesser sur ses états d’âme. C’était sans doute, la plus grande faille dont il disposait. Celle qui menaçait à tout instant de céder et de désagréger le géant d’argile qu’il était. Il avait ouvert chacune de ses côtes pour lui laisser apercevoir ce qu’il se cachait dans le secret de sa cage thoracique : c’est-à-dire plus grand-chose. Il aurait pu laisser ses mains parcourir son dos zébré pour illustrer ses propos, mais jamais il n’aurait pu lui faire écouter le brouhaha constant qui régnait dans son esprit. On aurait pu comparer ça au reflux de la mer, mais il n’avait rien d’apaisant. C’était plus… Le vrombissement pénible d’une ruche où chaque abeille aurait espéré avoir voix au chapitre. Est-ce que… est-ce qu’elle savait qu’Alduis les entendait aussi ? Et Sarkeris ? Et Bérénice ? Est-ce que aussi étaient possédés par ces présences ?

Il n’avait plus envie de la quitter. Enfin de la relâcher. Il aurait dû la remercier et lui dire combien il appréciait sa présence réconfortante. Il aurait dû lui dire qu’elle était son phare en pleine tempête, sa luciole des sombres nuits, son soleil des jours pluvieux, la couleur de ses tableaux d’encre, le feu de ses froides soirées d’hiver. Il aurait dû lui dire qu’elle était tout simplement la lumière pleine d’espoir du sombre boyau où il s’était égaré depuis deux ans maintenant. Mais une douce langueur l’envahissait et l’empêcher d’émettre le moindre commentaire. Il ne pouvait pas briser cet instant avec quelques mots, alors il préféra en profiter tout simplement.

Jusqu’à ce que quelques instants plus tard, un sujet on ne peut plus sérieux refasse surface. Il hocha lentement la tête : ce n’était pas impossible en effet, mais où était le problème ? Après tout, elle devait savoir qu’il en avait effectivement.

— Ce que je veux savoir… Sa mère considère que vous avez détruit sa vie.

C’était donc ça. Il soupira et se laissa tomber dans son fauteuil. En tout cas, ce n’était pas sa mère à elle vu les dates. Heureusement ! Alors qui ? Il chercha et se rappela subitement son cerbère. Eltinne. Il devait regarder dans ses carnets en rentrant, mais entre sa dispute avec Alduis et la fin inopinée de son rendez-vous, cela le lui était complètement passé au-dessus de la tête. Il fallait dire qu’après sa longue sortie équestre, il s’était aussitôt attelé à ses habituels rapports bien plus urgents que ce nom. De fil en aiguille, l’idée avait fini par quitter son esprit, ou plus exactement s’y enterrer profondément sous toutes les nouvelles qui avaient fini par germer entre temps. Il avait fort à dire sur le sujet, mais s’efforça de la laisser finir. Bien évidemment, c’était encore lui le méchant de l’histoire, ce n’est pourtant pas ce qu’elles disaient sur le moment.

- Je pourrais aisément vous dire si c’est effectivement de ma faute. Ou possiblement du moins. Mais non je n’en ai pas eu connaissance. Vous savez ma luciole, quand on ne me le dit pas, je ne le sais pas.

Après tout pourquoi est-ce que cela devrait être uniquement de sa faute ? Quarante-six. Il en avait eu à sa connaissance quarante-six. Combien y’en avait-il d’autres ? Il l’ignorait. De ces quarante-six, il n’en demeurait que onze en vie. Maladie, accident, guerre…

- Si cela vous inquiète tant que cela, sachez que je n’ai jamais laissé quiconque dans le besoin. Si vous doutez de moi, vous pouvez vous rendre au lupanar et demander à la gérante, vous jugerez par vous-même.

Parce que quoi qu’il puisse dire, on remettrait toujours en doute sa parole dès que le sujet venait sur le tapis. Il prit sa main dans la sienne et la caressa tendrement.

- Je ne vous abandonnerai pas Éléonore, ni vous ni nos éventuels enfants, si c’est ce qui vous effraie. Vous avez ma parole, là-dessus.


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Message par Éléonore de Fromart Mar 16 Fév - 12:27

Éléonore n'avait pas pu s'en empêcher. Il fallait qu'elle tâche de comprendre comment Eltinne pouvait le diaboliser a ce point. Parce qu'elle, quand elle le regardait, elle était bien incapable de voir cette personne en lui.

Elle secoua doucement la tête en entendant les mots qu'il employait.

— Oui... En revanche, l'enfant est de vous, je n'ai plus aucun doute là-dessus.

L'attitude d'Eltinne avait été plus que claire. D'abord cette façon d'accabler le ministre de tous les maux de l'humanité, et de la mettre en garde avec une telle conviction qu'elle n'aurait pas pu ne pas être personnellement concernée. Ensuite ses détours brumeux à chaque fois qu'Éléonore lui avait posé la question. Les réprimandes qu'elle avait essuyées après avoir invoqué le nom de Louis devant Coldris... Et puis il y avait aussi ce souvenir d'enfance. Un matin d'été, quand elle avait sept ans. Cette conversation qu'elle avait surprise entre son oncle et sa gouvernante. "Non, messire, il est parfait. Ce qui me dérange, c'est qu'il ait ses yeux." Cette phrase l'avait toujours interrogée. Des années plus tard, en y réfléchissant avec Ariste, ils avaient inventé un époux violent qu'elle avait dû fuir... Mais à la lumière des nouveaux éléments qu'elle avait recueillis... Non, ça ne pouvait être que ça.

Elle cru tout de même bon de compléter :

— Je n'accuse de rien, je veux seulement essayer de comprendre. Je suis désolée de vous embêter avec mes problèmes domestiques, mais il faut que je comprenne si elle a une vraie raison de vous détester. Et si elle était venue vous demander de l'aide et que vous la lui aviez refusée, ça expliquerait peut-être son attitude...

Mais il avait dit qu'il l'ignorait, et elle voulait bien le croire. Et s'il l'ignorait, c'était qu'Eltinne ne lui avait rien demandé… À moins qu'il ait oublié… Cela remontait à longtemps, après tout... N'empêche, la suite lui laissa à entendre que le problème ne venait pas de la mémoire. Il affirmait que cela n'avait pas pu arriver, et elle voulait bien le croire... Parce qu'elle l'aurait senti s'il avait menti. Et... Non, il était hors de question qu'elle approche de tels lieux pour s'en assurer. En revanche, savoir qu'il y passait du temps n'était pas franchement une révélation. Elle ne jugeait pas, et de toute façon, ce n'étaient pas ses affaires.

Elle eut un léger sourire quand il prit sa main. Avec lui, un simple contact avait quelque chose de rassurant comme c'avait été le cas avec peu de monde. Elle se mit à secouer la tête, assez pour faire remuer ses boucles sombres.

Non, non, non ! Elle ne s'inquiétait pas pour ça. D'ailleurs, bien qu'elle se ait déjà plusieurs fois fait le tour de la question, elle n'y avait pas pensé une seule seconde maintenant qu'elle l'interrogeait. Lancer cette conversation était un pire désastre qu'elle ne l'avait cru ! Maintenant, il allait croire qu'elle avait demandé parce qu'elle redoutait les conséquences. Non, non, non. Sotte Éléonore qui ne savait jamais se taire. Pourquoi n'était-elle pas restée bien sagement contre lui au lieu de dire des âneries.

Ça y était, ça revenait. C'était de sa faute. Quelle idiote ! Maintenant il allait la rejeter parce qu'elle n'était qu'une gamine inutile et lassante, qui gâchait son après-midi avec ses préoccupations ridicules. Désolée. Désolée. Désolée.

Elle secouait encore la tête.

— Non... Non. Non, ce n'est pas ça. Ce n'est pas ça du tout. Vous savez, j'ai largement de quoi m'en sortir. Je voulais juste savoir ce qu'il en était. Désolée de vous avoir mêlé à cela.

Ses pensées se perdant dans les raisons qui l'avaient poussée à aborder le sujet, Éléonore fut saisir par un détail qui la fit aussitôt sourire. Elle tenait le moyen de détourner – du moins elle l'espérait – la conversation.

— Attendez un peu... Mais c'est à cause de vous que j'ai dû la supporter pendant presque vingt-deux ans !

Éléonore aimait beaucoup Eltinne, au fond... Mais il fallait reconnaître qu'elle était fameusement exaspérante quand elle s'y mettait. Particulièrement depuis qu'elle l'avait rejointe en ville.

— Je crains que vous ne me deviez un sérieux dédommagement, poursuivit-elle malicieusement.

Visiblement, leurs dettes s'inversaient...
Éléonore de Fromart
Éléonore de Fromart
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