[1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
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[1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Il allait falloir le lui dire. Oh, il serait soulagé et n'avait aucune raison de s'en fâcher, mais il fallait quand même le lui dire. Ce n'était pas rien ! Il allait falloir le lui dire même s'il ne restait pas, afin d'être sûre qu'il ait l'esprit tranquille. Elle préférait qu'il reste après le contrecoup qu'elle s'était pris, mais elle ne pouvait pas lui en demander tant. C'avait déjà tenu du rêve de s'endormir tous les soirs à ses côtés jusqu'ici. C'était… inespéré. Presque inquiétant, à vrai dire, quoiqu'elle ne s'en plaigne pour rien au monde et n'ait trouvé que du bonheur à l'avoir vu rester soir après soir.
À défaut de trouver plus intelligent à faire, Éléonore jouait avec son poignard depuis son retour de la salle d'armes - et s'être émerveillée autant qu'elle avait culpabilisé de la présence du parfum sur sa table de nuit. Il aurait fallu qu'elle puisse le lancer. Elle n'était plus sûre de viser aussi juste, et c'avait quelque chose de particulièrement frustrant.
La porte eut à peine le temps de s'ouvrir qu'elle se rattrapa fermement l'arme, et le temps de vérifier qu'il s'agissait bien de son amant, elle avait déjà posé l'arme et sautait dans ses bras.
— Coldris ! s'écria-t-elle joyeusement en s'accrochant à lui. Vous y avez pensé ! Vous y avez pensé ! se réjouit-elle. C'est tout juste la bonne odeur ! Merci… il ne fallait pas mais… mais vous y avez pensé.
Elle soupira en laissant ses pieds retrouver le sol. Elle n'avait compris ce qui lui manquait que ce matin, après trois jours à se demander ce qui pouvait bien dénoter. Un geste oublié, un problème dans l'air. Mais il faut bien avouer que même si elle se sentait toute drôle sans, elle n'aurait jamais attendu qu'il compense son oubli. Après tout, si c'avait été indispensable, elle aurait emporté le sien..
— Et vous avez encore réussi à le remarquer avant moi...
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Dimanche. Le jour où il se rendait d’ordinaire à la chasse et non la messe quoique les deux termes présentent quelques similitudes orthographiques. Dimanche, qu’il avait passé à travailler à cause de cette foutue délégation japonaise et de la réception à venir qui l’ennuyait déjà. C’est que, quel que fût le pays tout était toujours aussi plat, ronflant et insipide. Le genre d’évènements où il se devait de tenir son rôle austère et froid sans pouvoir profiter de la moindre distraction. Premier à arriver, dernier à devoir partir. L’une des facettes de son rang qui lui déplaisait le plus. Ses pieds fourmillaient de l’inaction forcée au cours de cette journée. Ah ce qu’il aurait aimé être dehors ! À sentir le vent gifler son visage, à humer l’air glacial qui lui brulait les narines, à écouter l’air expulsé bruyamment par les naseaux de son cheval, à être grisé par la vitesse, à poursuivre un gibier débusqué… Mais non. Il avait dû demeurer à son bureau à signer un tas de paperasse concernant la décoration de la salle requise par der Ragascorn. Un vulgaire travail de maitresse de maison.
Si le jour n’était pas en train de décliner furieusement, il aurait sans doute pris la direction des écuries après avoir fait prévenir sa douce et belle. Seulement voilà, la lumière grisâtre annonçait clairement la couleur du lavis qui peindrait bientôt le ciel. Il se résigna donc à reporter sa sortie pour d’autres réjouissances pas moins agréables bien loin de là.
Il avait également eu vent de la mésaventure de Cassandre qui avait fini jetée dans la mare par Valmar puis habillée par Éléonore à l’aide des fripes de son père. Il avait hésité entre souffler de rire ou d’exaspération, tant il comprenait son garde du corps. Il y avait des limites à ne pas franchir. Qu’importe le jeu. Léonilde lui avait également confirmé ce qu’il soupçonnait déjà au sujet de sa douce brebis qui voulait se faire oublier… Ce n’était pourtant pas faute d’avoir insisté pour qu’elle fasse comme chez elle, de toute évidence, elle ne devait pas faire grand-chose chez elle non plus…
Comme chaque soir, il la trouva sans surprise dans sa chambre. Mais cette fois-ci, à peine la porte ouverte, une étoile fila droit dans ses bras au point de la soulever avec légèreté dans les airs. C’était idiot, mais il était toujours aussi heureux de la retrouver quand bien même il la voyait tous les soirs ou même tous les jours. Il la serrait toujours avec autant de bonheur contre lui et son cœur se réchauffait toujours autant lorsqu’elle prononçait avec tant de joie dans sa voix son prénom.
Pensé ? À quoi avait-il donc pensé qui la mette dans un tel état ? Ah ! Son parfum ! Bien sûr qu’il y avait pensé. Il aimait tant son odeur de romarin, qu’il n’avait pas manqué de remarquer qu’elle déclinait furieusement au grès des jours. Il l’aimait parce que c’était la sienne et qu’en inspirer les vapeurs suffisait à lui faire tourner la tête. Mais il l’aimait aussi – il fallait l’avouer – car il y avait comme une réminiscence d’un paisible souvenir à arpenter la garrigue aussevielloise de bon matin en compagnie de son meilleur ami. Son parfumeur avait trouvé sa requête étrange, étant donné que lui-même en portait agrémenté d’autres fragrances, mais une fois certain de la commande, il s’était exécuté avec brio comme toujours. C’était Léonilde qui avait réceptionné le flacon de cristal finement ciselé de lierre et qui l’avait déposé en toute discrétion dans sa chambre. Coldris ne s’imaginait pas un seul instant que cela aurait pu susciter un tel élan de gratitude chez elle, quand il s’agissait pour sa part d’une simple attention des plus évidentes.
Il embrassa sa joue et la laissa glisser entre ses bras jusqu’à ce que ses pieds touchent le sol.
— Evidemment ! Quel amant ferais-je si j’étais incapable de vous surprendre, ma luciole ? rétorqua-t-il avec son habituelle arrogance.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Elle sourit à son baiser, puis à sa remarque en posa la tête contre son épaule.
— Un bien piètre sans doute, après un mois seulement... répondit-elle.
Un mois. Un mois et demi selon le point de repère choisi... C'était difficile à imaginer tant le monde semblait avoir changé au cours de ce mois… tant ils semblaient proches, et tant il leur restait pourtant à apprendre l'un de l'autre. Plus rien de grave de son côté : ils y étaient déjà passés et elle l'avait toujours su.
— C'est idiot… ce parfum me suit depuis toujours et je n'y ai jamais pensé… autant les vêtements j'avais conscience de les laisser, autant cela…
Elle n'aurait jamais cru être aussi attachée au parfum de sa mère. Sa mère qui ne lui manquait plus depuis longtemps. Bien sûr, son sort l'effrayait, mais cela ne comptait pas, pas vraiment. Cela n'avait jamais compté, parce qu'elle avait Ariste et donc rien besoin d'autre. Et pourtant, cette fragrance était restée un repère année après année…
— Moi qui pensais avoir au moins le mérite d'être une personne prévoyante…
Eh bien même à cela elle ne pouvait plus prétendre. Elle avait du mal à comprendre ce qui pouvait bien lui rester qui s'apparente à une qualité si par dessus le marché, elle ne savait plus rien anticiper.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Eh bien il n’aurait pas songé que ce parfum qu’il n’osait qualifier de présent tant cela lui semblait naturel, aurait pu lui faire autant plaisir. Il la serra avec plaisir dans ses bras.
— Voilà qui serait déplorable pour quelqu’un qui ne sait se complaire dans la médiocrité. Puissé-je vous surprendre chaque jour jusqu’au dernier, ma scintillante étoile.
Il caressa paisiblement ses boucles d’un brun sombre, réalisant lui-même qu’il n’avait jamais changé de parfum depuis toutes ses années. Cela remontait à sa rencontre avec Virgil. Son premier séjour à Aussevielle, c’était de là que lui venait ce parfum : il fallait dire que ses gens n’avaient pas leur pareil pour extraire les fragrances et les assembler. Et la fille du parfumeur avait été absolument délicieuse sous ce concert de cigales. Enfin. Tout cela semblait remonter à une autre vie.
Il embrassa son front avec douceur.
— Ne soyez pas si dure avec vous-même. Le diable se cache dans les détails et vous ne devez vos égarements qu’à celui qui vous tente.
Il esquissa un sourire. Il savait ce qu’il disait : il avait bien du mal à ne pas perdre la raison lorsqu’il la voyait, mais c’était si délicieux qu’il ne pouvait s’empêcher de revenir s’abreuver à cette fontaine de folie.
— Votre plus grand mérite est de me rendre heureux et croyez-moi, vous pourriez demander la canonisation rien que pour ce miracle !
Un discret rire s’échappa puis il l’entraîna sur le lit pour… s’y asseoir simplement à ses côtés. Il fallait absolument qu’il lui parle de ce que Léonilde et lui-même avaient remarqué, c’était impératif. Il refusait qu’elle ne vive ici que comme une prisonnière.
— Lorsque vous êtes arrivé ici, je vous ai demandé de faire comme chez vous et je le pense sincèrement. Peut-être… Peut-être est-ce vraiment ainsi lorsque vous êtes Tidrien ou à Tianidre, je l’ignore pour tout vous dire, cependant… si c’est le cas, eh bien, j’aimerais que vous puissiez vous sentir bien plus libre ici que chez vous. Et… Enfin… ne vous sentez pas gêner de demander quoi que ce soit ou de vous rendre où bon vous semble. C’est juste que… vous êtes plus qu’une simple invitée ici, vous comprenez ?
En réalité, il ne savait pas vraiment comme lui expliquer. C’était bien la première fois qu’il devait inciter quelqu’un prendre ses aises chez lui. D’une part, c’était rarement quelque chose qu’il proposait et d’autre part, il n’a pas besoin de le redire deux fois. Il avait quelque peu l’impression de marcher sur des œufs, alors il caressa l’une de ses mèches brunes qui encadraient son visage.
— Je ne veux pas que vous soyez ma prisonnière, je veux juste que vous… Soyez ma femme ? Restiez ici à jamais ? Vous vous sentiez bien ici, conclut-il en ravalant le reste que ses yeux trahissaient sans doute.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
— Tant que vous privilégiez les surprises agréables.
Telles que d'apprendre soir après soir que finalement il restait. Oui, surprenant, cela l'était, mais c'était un tel bonheur qu'elle avait trouvé chaque fois qu'elle s'endormait auprès de lui. Oui, la veille, elle avait pleuré quand même pendant la nuit, c'était vrai - et la journée, parfois, cela la rattrapait encore -, mais c'était bien moins agressif après être restée avec lui. Il repoussait tous ses maux, rien ne pouvait l'atteindre… alors si en contrepartie elle devenait un peu étourdie, qu'importe, elle le préférait mille fois. Mais tout de même, elle se serait crue plus prévoyante.
Elle l'étreignit vivement au commentaire suivant :
— Si c'est vrai, ma plus belle récompense est d'en voir le résultat, répliqua-t-elle. Mais j'ai encore plus que cela : vous en faites autant.
Et ce n'était pas mieux parti, vraiment pas. Et nul autre que lui n'aurait pu en faire autant après qu'elle ait perdu la plus grande et meilleure partie d'elle-même. Elle n'aurait su lui dire à quel point ce qu'il avait fait était inespéré et combien elle l'aimait, et combien ces deux idées - l'amour qu'elle lui portait et l'apaisement qu'il lui procurait - ne cessaient de croître l'un par l'autre sans qu'elle ne puisse comprendre exactement par quoi cela avait commencé.
Il la fit asseoir sur le lit quand elle relâcha son étreinte, et elle chercha instinctivement à retrouver sa place tout contre lui, posant sa tête contre son épaule. Elle la releva toutefois bien vite. Elle… avait fait quelque chose de mal ? Elle ne comprenait pas… elle essayait d'éviter, pourtant. Était-ce parce qu'elle avait aidé la petite à s'infiltrer ? Parce qu'elle n'avait pas voulu jouer aux échecs alors qu'il lui avait demandé de les lui enseigner ? Quand on commençait par "j'ai effectivement dit de faire comme chez vous", c'était toujours pour en revenir à "en revanche n'oubliez pas que vous êtes quand même chez moi". Et elle avait peur d'entendre cela parce qu'elle ne voulait vraiment pas lui causer d'ennuis.
Oui, il devinait que chez elle, elle dépassait un peu les limites et jouait au-delà des interdits… Il savait aussi qu'elle s'en cachait, mais promis, promis elle n'avait rien fait de tel ici. Pas vraiment. Elle… Plus libre ? Qu'il avoue que c'était un peu beaucoup demander quand il se croyait en droit d'exiger qu'elle ne sorte pas seule alors même qu'en dehors du domaine, ce n'était plus son territoire et qu'elle n'était plus tenue d'écouter quoi que ce soit.
Elle fronça les sourcils à la suite… tout cela ne tenait pas ensemble, elle n'y comprenait plus rien. Ah, alors c'était… parce qu'elle faisait son lit en le quittant, c'était cela ? Ne pas demander. Pouvoir aller où bon lui semblait… oui, mais l'ennui était qu'ils n'avaient pas convenu les limites de ceci et… et pour le reste, c'était ce qu'elle faisait : elle était encore allée dans la salle d'armes dans l'après midi, et aussi dans les jardins ce matin, et… et elle n'allait pas déranger tout le monde si elle n'avait besoin de rien, si ? C'était idiot…
Elle s'apprêtait à acquiescer, mais c'eût été un mensonge : non, elle ne voyait pas où il voulait en venir. Elle remua la tête en signe de négation. Plus qu'une simple invitée dans quel sens ? Avait-elle fait une chose qu'il ne fallait pas ?
Pas prisonnière. Elle acquiesça. Elle savait, sinon elle n'aurait pas su se tenir tranquille. Il n'était pas près d'arriver, le jour où elle tolèrerait qu'on aille l'enfermer dans une cage ! Se sentir bien ici. Parce qu'elle pouvait toujours rester. Parce qu'elle risquait de rester d'autant plus longtemps qu'elle avait arrêté sa décision.
— Mais je suis bien ici... protesta-t-elle en se blotissant contre lui. Il n'y a pas de falaise et les murs sont moches, reconnut-elle, mais on ne peut pas les faire pousser et de toute manière, je ne peux plus grimper. Mais il y a vous, et Alduis, et... Si… si c'est à cause de tout à l'heure… je ne comptais pas vous le cacher, vous savez… c'est… je n'ai pas fait exprès. Ce… ce n'est pas parce que je me sentais prisonnière, c'est… c'est juste plus fort que moi. Mais ce n'est pas pour m'enfuir, pas du tout…
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Les surprises agréables disait-elle ? Il ferait son possible. Le propre d’une surprise étant que l’on ne découvrait son effet que lorsqu’elle était dévoilée. Toutefois il n’avait pas pour ambition de la rendre malheureuse, bien au contraire. Rien n’avait plus de valeur à ses yeux que son regard pétillant d’émotion et son sourire qui aurait fait pâlir Hélios lui-même. Et pourtant tout cela n’était rien à côté du miracle qu’elle avait accompli en lui rendant la vie alors même qu’il en était à compter avec une appréhension mêlée d’impatience que la faucheuse vienne le cueillir.
Il était touché de savoir qu’il parvenait à en faire autant et en même temps il peinait toujours à croire que cela puisse être le cas. Lui. Égoïste, arrogant, manipulateur, séducteur, cruel à ses heures perdues, cynique, mesquin, dépourvu d’empathie et de morale… Comment pouvait-il réussir cet exploit alors même que tout jouait en sa défaveur ? Il aurait bien affirmé qu’il rendait l’impossible, possible, mais cela aurait été prétentieux. Quoi que. Au fond, ce n’était peut-être pas si faux, non ?
Il l’embrassa tendrement en guise de réponse avant de la mener finalement vers le lit pour évoquer un sujet plus sérieux : cette gêne qu’elle semblait éprouver à demander à quoi que ce soit ici. Sa tête bascula contre son épaule et il passa un bras autour de ses épaules. Comme toujours dans ce genre de cas, il se trouvait être un idiot fini incapable d’expliquer quoi que ce soit. Il voyait bien qu’au lieu de la rassurer, il ne faisait que l’inquiéter encore plus. Quel idiot ! Comment pouvait-on être capable d’écrire des discours fédérateurs et incapable de faire passer un message aussi simple. Il passa distraitement une main entre ses courts cheveux poivre et sel. C’était… Et merde… Quoiqu’elle puisse penser ce n’était certainement pas ce qu’il tentait de lui dire, il en avait l’intime conviction. Il lui aurait bien ordonné de faire tout ce qu’elle voulait et de demander tout ce qu’elle souhaitait, seulement il ne pouvait rien exiger d’elle… Alors comment était-il censé l’inciter à s’épanouir ici dans ce château qui n’était pas le sien ? Il ne pourrait jamais souffrir de la savoir ainsi mal à l’aise si elle venait à accepter sa proposition et à demeurer ici. Bien entendu, il avait déjà envisagé la chose tout à l’heure lorsque Léonilde était venu lui en parlait et après discussion entre eux, il était tombé d’accord sur la nécessité de lui affecter une camériste personnelle en qui elle aurait suffisamment confiance pour ne pas se sentir le moins du monde gênée.
Elle était bien ici. Ici entre ses bras. Pas ici à Fromart quand il n’était pas à ses côtés. Il ne lui en voulait pas. Il avait tellement détesté venir s’installer ici. Il préférait de loin Cervigny et sa proximité avec Saint Éloi et toutes les commodités de la capitale impériale. Il avait fini par trouver cela acceptable à la mort d’Asoana et maintenant que Virgil était parti, il ne voyait pas l’intérêt de s’installer à Cervigny, quand bien même son hôtel resterait à jamais un refuge cher à son cœur. Il sourit néanmoins à sa remarque sur les murs. Oh si ce n’était que cela… En revanche, il ne comprenait pas du tout où elle venait en venir pour le reste. Si c’était à propos de Cassandre, cela lui était parfaitement égal. Elle était libre de faire ce qu’elle voulait tant qu’elle ne s’opposait pas à ses règles.
— S’il n’y a que des murs pour vous rendre heureuse, je ferai bâtir les plus beaux qui soient pour vous, vous verrez. Je construirai une tour plus haute que l’ancien donjon qui vous sera dédié. il pencha légèrement la tête pour parvenir à capter son regard : vous pourrez remonter lorsque vous le désirerez réellement. Il n’y a rien en ce bas monde qui soit inaccessible aux âmes qui s’en donnent les moyens. Il la serra finalement contre lui avant de rebondir sur ses activités : j’ignore ce que vous avez fait et en fait je ne pense pas que cela me regarde, mais si vous craignez que je ne m’effraie à l’idée de votre fuite, alors je vous le redis : vous êtes libre. Il n’y a de fuite que pour les reclus.
Il soupira. Comment pouvait-il dire cela plus clairement ?
— Je sais que vous ne demandez rien. Je sais que vous aimeriez vous faire faire oublier, peut-être même devenir invisible. Peut-être même craignez-vous de quelconques paroles déplacées de mes gens ou que sais-je encore. Sachez qu’il n’en est rien et que vous ne dérangez personne. Certainement pas moi, pour qui c’est un plaisir de vous avoir, pas plus que les autres habitants de ce château. Je ne veux plus… J’aimerais, corrigea-t-il que vous laissiez toutes vos inquiétudes de côté. Agissez comme s’ils s’agissaient de vos propres gens. Je sais que vous n’abuserez jamais de la situation, alors faites-moi ce plaisir je vous prie…
Ce n’était sans doute pas mieux que la première fois au fond, mais vraiment, il ne savait pas comment s’exprimer mieux que cela quand il ne voyait pas réellement pourquoi elle avait cette espèce d’obsession timide…
— Oh je dois tout de même vous confesser, qu’ils ne comprennent vraiment pas pourquoi vous vous obstiner à faire votre lit ou à alimenter votre feu, plaisanta-t-il, mais il n’y a là qu’un étonnement de leur part et nulle vilénie, bien loin de là. Peut-être… Peut-être que Léonilde pourrait vous les présenter si vous le désirez ? Si cela peut vous permettre de les apprivoiser.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Elle remua doucement la tête. Bien sûr que non, il ne fallait pas construire de tour et ce n'était pas là qu'elle voulait en venir. De toute façon, elle ne pouvait plus grimper - quoique si elle se sentait mieux, peut-être pourrait-elle se permettre de revenir sur cette résolution… Elle ne savait plus : cela lui manquait énormément, mais peut-être était-ce fait pour appartenir à une autre vie ? Sur cette logique, elle devait renoncer à tant de choses...
Alors il… ne savait pas ? Oui, elle savait qu'elle était libre, mais cela ne changeait rien à la tentation. Juste pour la beauté de l'art. Elle secoua encore la tête.
— Non… ça reste tentant même lorsque l'on a le droit de sortir… Je… cherchais les failles de sécurité. Mais ce n'était pas pour vraiment partir, vous comprenez ? C'était… par principe.
Et aussi un peu parce qu'elle s'ennuyait. Elle se dit qu'il serait plutôt judicieux de préciser que sa défense était assez lacunaire pour une demeure de ministre mais il reprit sans lui en laisser l'occasion.
Être invisible… c'était plus facile. Et en même temps, elle n'allait pas demander des choses dont elle n'avait pas besoin. Quant aux paroles déplacées, finalement elle s'en moquait : qu'ils la prennent donc pour une traînée, ça ne changeait plus grand chose. Toutefois, elle n'était pas certaine de ne vraiment plus déranger personne si elle se comportait autrement… Quant à faire comme si c'étaient ses gens… elle n'était pas vraiment sûre de savoir ce qu'il entendait par là mais justement : où plaçait-il "abuser de la situation" ? Non, parce que selon la définition que l'on en avait, avec les caprices idiots qui lui venaient quand elle oubliait de se montrer discrète. Mais s'il y tenait vraiment, elle ferait un effort pour ne pas avoir l'air d'essayer de s'effacer.
— Il n'y a qu'une personne qui ait su pourquoi je faisais mon lit, répondit-elle avec un sourire énigmatique - bien que tout à fait consciente que ce n'était pas la question. Une autre qui me connait assez pour trouver cela plutôt commode mais si je suis toute disposée à en mettre une troisième dans la confidence, j'aime autant que le monde entier croie à une simple manie de princesse gâtée. Sans autres exceptions.
Elle laissa retomber sa tête contre son épaule. Outre l'aspect parfaitement pratique et instinctif, cela découlait d'une décision parfaitement rationnelle.
— Mais je ferai un effort et si vous pensez que les rencontrer puisse être utile, je le ferai... Seulement… si je me mets à demander des choses dont je n'ai pas besoin, cela risque de tourner au caprice et je ne veux pas vous faire de caprices, moins encore si je reste… Vous comprenez ?
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Alors comme ça, son idée ne lui plaisait pas ? Pourtant il l’aurait fait. Il aurait bâti la tour de la luciole, rien que pour elle s’il n’y avait que cela pour la rendre heureuse. Et peut-être bien qu’il le ferait un jour. Il ne savait juste pas encore avec suffisamment de précision en quoi pouvait bien constituer ses critères de bon ou mauvais mur, mais il apprendrait avec le temps. Il ne voyait pas pourquoi elle ne pourrait jamais escalader de nouveau. Il suffisait qu’elle le veuille suffisamment pour le faire et même s’il ne pouvait s’empêcher de craindre le pire, il ne la retiendrait pas si c’était ce qu’elle voulait réellement.
Tout comme il ne la retenait pas à Fromart, alors il ne voyait pas bien en quoi il aurait pu songer à imaginer qu’elle puisse s’enfuir, puisque de fait, cela était contraire à l’idée même de sa présence ici. Elle ne manqua pas de l’éclairer sur le sujet. Cela rester tentant ? Non, il ne voyait pas trop l’idée. Excepté si l’on rapprochait cela de l’idée de continuer à la séduire et à la surprendre y compris s’ils étaient mariés. Peut-être aurait-il dû dire d’ailleurs « surtout s’ils étaient mariés », ce qui était nettement plus juste. Quant aux failles de sécurité, eh bien pour tout dire, elle n’avait sans doute pas été déçue, car Coldris savait parfaitement que le domaine était un gruyère qu’un gros chat du nom de Valmar tentait comme il pouvait de protéger des petites souris.
— Je vous l’ai dit : vous êtes libre, répéta-t-il finalement en guise de commentaire.
Et cela impliquait qu’elle puisse demander ce qu’elle voulait, quand elle le voulait à son personnel. Et surtout qu’elle ne reste pas à attendre en se disant qu’elle pourrait déranger qui que ce soit ici, car après tout, il les payait suffisamment cher pour obtenir tant leur discrétion que leur efficacité. Quant à savoir pourquoi elle faisait son lit, il haussa les épaules.
— Cela m’importe peu en réalité, ce n’était qu’un exemple. Si cela vous plait tant que cela alors faites-donc.
Et ce qu’ils en diraient tous lui était parfaitement égal en réalité. Il embrassa le sommet de son crâne, puis réalisant qu’il avait peut-être été un peu abrupt, ajouta :
— Cependant si vous y tenez, je vous écouterai avec joie.
A vrai dire, il n’en pensait rien du tout. Ce n’était qu’une idée parmi d’autres pour résoudre ce problème. Il s’était simplement dit qu’en apprenant à les connaitre, elle se sentirait plus à son aise, voilà tout.
— Je ne veux pas vous imposer cette rencontre. Si vous pensez que cela peut vous aider à apprivoiser mes sauvages domestiques alors faites, et si vous n’en éprouvez aucune envie alors ne faites pas. Il est inutile de vous y plier pour me faire plaisir. Après un temps il reprit : vous pouvez demander ce que vous voulez. Vous n’êtes pas le genre de personne à demander ce dont vous n’avez pas besoin, alors oubliez donc cela, voulez-vous. Le jour où vous taperez du pied en me demandant une licorne pour sauter par-dessus les arcs-en-ciel, nous en reparlerons. Ou peut-être simplement vérifierais-je que mon opium est toujours intouché, taquina-t-il avec malice.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Bien, on s'en fichait. Et de la suite aussi, merci. Le laissait-elle déjà ? - à noter qu'il aurait franchement fallu d'attendre à ce que cela ne tarde pas avec une personne comme elle. Non, non, s'il le prenait sur ce ton, elle n'y tenait pas… Si ça ne l'intéressait pas elle ne disait pas. Tant pis. Inutile et lassante.
Et toujours aussi incapable de se faire comprendre ! Idiote. Elle secoua la tête : ce n'était pas ce qu'elle voulait dire.
— C'est seulement parce que je ne sais pas, mais je veux bien essayer puisque vous le proposez. Et je tâcherai de faire un effort pour le reste, essaya-t-elle d'expliquer.
Quant à demander des choses dont on n'avait pas besoin… n'était-ce pas l'essence de ce qu'il l'incitait à faire. Non, elle laisserait les licornes tranquilles, elle préférait les phénix - avec un léger sourire à l'attention de Coldris -, quand même. Seulement, elle se connaissait : il y avait tant de choses qu'elle pouvait vouloir et dont elle n'avait pas réellement besoin. Et on ne parlait pas seulement de petit-déjeuner ou de papier à lettre.
— Ce qui voudrait dire que soit c'est un caprice, soit c'est toujours un caprice mais qu'en plus j'aurais volé dans vos affaires, fit-elle remarquer. J'aurais déjà une faveur assez gênante à vous demander sans que mes lubies n'aient besoin d'intervenir, à vrai dire...
Quelque chose qui ne la concernait pas directement et c'était sans doute en cela qu'elle était si nécessaire… Mais en amenant cela, il allait également falloir lui faire part de sa décision.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Un exercice intellectuel ? Cela il pouvait l’entendre et mieux encore le comprendre. Quant au niveau, la remarque le fit sourire : ce n’était qu’un domaine de noble et non la forteresse d’un poste-frontière. Elle se doutait bien du nombre de failles qu’elle avait pu y trouver. Il faisait pour sa part confiance au capitaine des gardes.
Tout comme au reste de son personnel, quant à savoir pourquoi elle faisait son lit, il n’en avait pas besoin. Il décrypta rapidement qu’il venait de faire une erreur dans sa réponse. Ce n’était pas ce qui était attendu. Il aurait dû répondre « Avec grand plaisir, dites-moi tout », elle pensait désormais qu’il n’éprouvait aucun intérêt pour elle quand il souhaitait simplement lui dire qu’elle n’avait pas à se sentir obligé de partager cela avec lui et puis si elle tenait tant à lui dire pourquoi ne le faisait-elle pas tout simplement ? Il hésita un court instant avant d’envoyer paitre l’idée de se corriger. Mieux valait se concentrer sur une solution possible à son problème. Pourquoi pas une présentation de ses domestiques et rares esclaves ? Il ne savait pas trop encore si l’idée lui plaisait ou si ce n’était que pour lui faire plaisir qu’elle acceptait cela. Comme il ne pourrait sans doute jamais démêler le vrai du faux, il en abandonna même l’idée et se contenta d’opiner à son acceptation.
— Entendu, je ferai prévenir Léonilde.
Et pour ce qui était des caprices, il ne l’imaginait pas réclamer des choses farfelues comme des roses bleues ou encore des licornes. Coldris plissa les yeux dans un sourire à sa remarque sur le vol. Il ne l’imaginait pas capable de voler dans ses affaires.
— Je m’en voudrais surtout de vous laisser sombrer dans une telle dépendance en laissant trainer mes effets personnels. Dites-moi donc ce que je puis faire pour vous.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
En attendant, elle s'efforcerait de ne pas faire de caprices. Et elle ne volerait pas ses affaires. D'un point de vue purement pratique, c'eût pu être un exercice amusant mais elle ne pouvait pas se montrer indigne de sa confiance, et surtout pas volontairement.
— Sauf pour les effets personnels que vous ne savez garder dans vos chausses, je suppose ? commenta-t-elle dans un sourire provocateur.
Bon, « dépendance » était un grand mot mais il fallait dire que la volonté d'y résister était souvent bien futile. Ou peut-être était-ce juste que son accablante faiblesse qui n'avait en rien évolué à cet égard malgré toute la force que son amour lui procurait. En réalité : cela n'avait fait que s'aggraver depuis qu'elle savait pour de vrai et depuis que des sentiments si intenses s'en étaient mêlés.
Mais un peu de sérieux. L'affaire était importante et ce n'était pas le moment de laisser la situation déraper - ni de la fuir. Et d'ailleurs… mieux valait commencer par le début :
— Coldris… Il y a une chose importante dont il faut que je vous parle. J'ai beaucoup réfléchi ces derniers jours et… Tianidre est le plus joli nom du monde, la plus belle des villes et le comté des plus belles falaises forestières. Le lieu depuis lequel rien ne me tentait plus que le danger et l'interdit et je crois que l'amour a toujours eu pour moi cette idée de frisson. Mais un morceau de papier ne saurait nous priver à lui seul de cette folie et le risque est finalement une notion que je n'ai jamais aimé laisser au hasard et je sais que vous ne vous en servirez jamais pour me nuire. Alors… Je n'aurais jamais cru qu'un mariage pourrait être une preuve d'amour et j'imagine ce que cela peut représenter pour vous alors si vous êtes toujours prêt à m'épouser… eh bien… Je… J'ac… Je… Vous le voulez toujours ? demanda-t-elle d'une voix bien trop inquiète de sa réponse pour quelque chose qui aurait dû être une pure formalité administrative, en s'accrochant désespérément à son regard si bleu qui l'avait envoûtée.
Son estomac se tordit à l'idée si c'était toujours un jeu et qu'il l'avait manipulée - si elle s'était à ce point trompée - il venait d'abattre sa dernière barrière. Il aurait gagné. Il n'aurait plus besoin d'elle. Tout serait fini… Il n'y aurait plus jamais de lumière. au fond, elle ne pensait même pas être capable de lui en vouloir.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Il ne l’imaginait pas trahir sa confiance et c’était bien pour cela qu’il la lui donnait. D’ailleurs si c’était de l’opium qu’elle cherchait, il lui en aurait donné sans discuter. Ou si peu. Car il ne savait que trop bien à quoi l’on s’exposait en se laissant tenter par l’élixir de pavot. Pour une fois qu’il ne mettait aucun sous-entendu graveleux, il fallait que ce soit elle qui s’en charge ! Ah ce qu’il l’aimait ! Son sourire s’étira infiniment jusqu’à faire scintiller de malice ses prunelles de glace comme la neige cristallisée sous le soleil d’hiver.
— Qu'y puis-je si mes bijoux préfèrent un autre écrin que celui dont je les dote ?
Et qu’elle ne le tente pas plus où il déclinerait toute responsabilité si la discussion ne parvenait pas à son terme sans qu’il ne les range dans leur coffret de velours. Il en avait suffisamment d’images à l’instant pour nourrir son désir dont elle pouvait se targuer de l’avoir éveillé d’une simple phrase. Maintenant, il peinait à retenir ses lèvres de combler le fourmillement qui s’invitait dans leur pulpe. Et ce regard, ce regard qui l’embrasait instantanément.
— Qu'y puis-je également si vous m’obligez à les déplacer dans un endroit où ils se trouvent plus à leur aise ? s’entêta-t-il avec ce petit air faussement innocent.
Heureusement tout de même que le sujet vira a plus de sérieux avant qu’il n’ait le temps de déraper complètement. Mais qui pouvait-il si elle était irrésistible ? Ensorcelante, même. Il se suspendit à ses lèvres pour oublier son corps qui l’appelait. Ah Tianidre… Mieux valait qu’elle n’en vienne pas à débattre de ce sujet avec son gendre, la discussion promettait d’être sans fin et il n’avait pas envie de prendre parti pour l’un ou pour l’autre. Il trancherait en optant pour la sublime et grouillante Braktenn objet de tous ses fantasmes. Il l’aimait jusque dans la fange entre ses pavés qui révélait l’or éclatant des grilles qu’il franchissait toujours avec autant de fierté. Braktenn. Ce nom le faisait toujours frémir de plaisir et d’envie. Braktenn. Braktenn. Pour ce qui était de l’amour en revanche, il comprenait pour l’avoir prêché. Un papier n’était qu’un papier, ce qui était important c’était ce que l’on faisait, et l’énergie que l’on déployait à le faire ou le défaire. Il prendrait toujours un plaisir infini à jouer avec elle, que ce soit à table avec d’autres convives ou dans les coursives du palais en pleine réception barbante qu’il égayerait… C’était la plus belle preuve d’amour qu’il pouvait lui offrir, du moins le pensait-il. Celle qui lui disait qu’il l’aimait suffisamment pour prendre le risque de la garder auprès de lui jusqu’à son dernier souffle. Ses yeux s’écarquillèrent néanmoins à ses paroles. S’il était toujours prêt ? Alors elle acceptait ? Elle acceptait d’être sa femme ? Son sourire s’étira à nouveau irrépressiblement. Comment pouvait-elle douter qu’il n’ait changé d’avis entre temps. Il secoua lentement la tête pour calmer la douce folie qui s’emparait de lui. Les mots lui manquaient. Non, il devait d’abord rattraper quelque chose. Enfin essayer. Il prit ses mains entre les siennes et plongea son regard dans le sien :
— Éléonore de Tianidre… Accepteriez-vous de devenir la femme du plus humble débauché de tout Braktenn… il n’avait pas pu s’en empêcher. Il ne savait pas faire comme tout le monde. C’était si ennuyeux. Et de demeurer sa belle étoile jusqu’à la fin de ses jours ? Celle qui fera étinceler sa vie comme une nuée de lucioles un soir d’été, celle qui adoucira son cœur ? Éléonore de Tianidre acceptez-vous de supporter ses pires travers jusqu’à la fin de ses jours simplement car cet imbécile vous aime ?
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Elle n'y pouvait rien, Tianidre était la plus belle des villes et c'était bien pour cela qu'aussi éprise de liberté qu'elle puisse être, elle n'avait jamais songé à la quitter. Elle avait cru qu'elle y vivrait toujours… Tant pis. C'était sans la moindre importance si elle était avec lui. C'était aussi un nom aux sonorités magnifiques, et pas seulement parce que c'était celui qu'Ariste et elle avaient toujours porté. Non, elle le trouvait joli, tout simplement. Plus agréable à prononcer que celui de Coldris, mais cela non plus n'avait aucune importance parce que tout ce qu'elle voulait c'était lui. Pour le plus longtemps possible. Sans ou même avec contrat. Elle n'avait pas besoin de maintenir ce dernier mur. Elle lui faisait entièrement confiance. Ils s'aimeraient toujours autant et… et à vrai dire, elle s'était habituée, maintenant, au plaisir si doux de vivre auprès de lui. Même si c'était un rêve de le garder aussi longtemps et que la vraie vie reprendrait bientôt ses droits. Ce serait une vraie vie à ses côtés.
À le voir s'illuminer ainsi, un soupir de soulagement lui échappa, chassant des inquiétudes qui n'avaient pas lieu d'être. Elle sourit en miroir, jusque dans ses prunelles. Pas tant pour le bout de papier que pour le bonheur infini qu'elle tirait du sien. Elle serra ses mains, complètement prise dans son regard. Alors… Alors s'il était content, c'était qu'il voulait toujours l'épouser, pas vrai ?
Son sourire s'élargit lorsqu'il prononça son nom. Et pas parce qu'il était joli à entendre. Elle releva même pas l'emploi culotté du mot « humble », trop prise - qui l'eut cru - dans l'émotion du moment. Oh, le papier, c'était un détail. Mais oui. Oui, elle voulait être présente pour lui jusqu'à la fin - la fin pour tous les deux, car il était inconcevable qu'elle demeure ici seule. Oui, elle voulait être à ses côtés et le rendre heureux. Elle voulait par dessus tout le rendre heureux. Il s'il l'en croyait toujours capable c'était tout ce qui comptait parce que lui, il la rendait follement heureuse et déchaînait son cœur reconstruit autant qu'il apaisait son âme. Tous les défauts qu'il pouvait avoir n'étaient rien à côté de cela.
— Non, avoua-t-elle. Si j'accepte, c'est en grande partie parce que moi, j'aime cet imbécile. Éperdument. Et que cela ne changera jamais, promit-elle avant dE prendre son visage dans ses mains récupérées et d'emporter ses lèvres dans un profond baiser. Parce qu'elle n'arrivait à rien dire et que de toute manière, aucun mot n'exprimerait jamais assez bien ni l'étendue ni la puissance de ses sentiments.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Avait-elle réellement songé qu’il puisse être revenu sur sa décision ? Pour la peine, elle aurait le droit de l’écouter proposer une seconde fois qu’il espérait peut-être un peu plus conventionnelle et adaptée à la situation. Cette fois-ci, il ne voulait pas lui demander de l’épouser, car il était inutile de remettre ce pénible papier à ratifier sur le dessus. Non, cette fois-ci, il espérait simplement lui demander d’être sa femme parce qu’il l’aimait, car au fond c’était l’unique raison valable à ce mariage. Et ils devaient sans doute ressembler à deux imbéciles de l’un de ces mauvais romans pour femme sans amant à sourire bêtement en se regardant dans le blanc lumineux de leurs yeux. Il chassa toutefois rapidement cette idée de sa tête : quelle importance !
Il allait se marier.
Il allait se marier.
Il allait se marier et elle allait être sa femme.
Il allait vraiment se remarier.
Avec elle.
Il passa son bras autour de ses épaules et la bascula avec douceur sur le lit sans interrompre leur baiser.
Il allait se marier.
Et il n’aurait jamais songé que cette idée puisse de nouveau le rendre si heureux.
Il se sentait si fier et si chanceux de l’avoir pour femme.
— Je suis désolé, j’aurais voulu vous montrer que je savais me tenir et qu’il était possible de discuter avec moi sans finir dans un lit, mais, il embrassa son cou,
le fait est que j’ai encore beaucoup de choses à vous dire…puis son épaule qu’il avait dénudé, et que je suis de toute manière incorrigible, avant de descendre jusqu’à sa gorge…et qu’il semblerait que je dispose désormais de toute ma vie pour vous le prouver… pour finalement retourner à ses si désirables lèvres.
Il était des discussions qui ne nécessitaient pas de mots pour échanger, comme celle qui venait de s’échanger dans les soupirs de sa chambre. Il en avait encore l’esprit tout embrumé de cette légèreté absolue. Sa tête posée contre son cœur, il embrassa le sommet de son crâne sans dire un mot. Elle était si bien entre ses bras et la simple d’idée de savoir qu’il n’y aurait jamais de fin à cela suffisait à l’inonder de bonheur et à lui faire oublier toutes ses craintes. Il trouverait. Il trouverait comment la reconquérir chaque jour qui passerait.
Il resta de longues minutes ainsi, à songer et profiter en silence de la plénitude si rare dans laquelle il se trouvait avant que l’infatigable machinerie de son esprit ne se remette définitivement en branle. Désormais que leur décision était arrêtée, il n’avait guère beaucoup de temps pour l’exécuter. Le plus tôt serait le mieux avant que quiconque ne décide de s’y opposer. Il aurait aimé lui offrir un vrai mariage officiel, mais le fait était qu’il ne pouvait prendre le risque d’un refus familial ou Diable savait quoi. Il était certain de pouvoir compter sur le soutien du Roi en pareilles circonstances, néanmoins ce serait là de nouvelles procédures à mettre en place, alors pourquoi compliquer les choses ? D’autre part, cela aurait également signifié inviter le Tout-Braktenn et il n’aurait jamais pu se résigner à lui imposer cette épreuve pour le simple plaisir d’échanger des alliances. Sans parler du fait que son propre fils devait se marier prochainement et qu’il ne voulait pas lui faire d’ombrage sur ce point.
— J’irai voir le Roi demain à la première heure pour obtenir son accord, entama-t-il en embrassant ce front qu’il venait de libérer de ses cheveux. Il n’a aucune raison de s’y opposer – j’ose l’espérer – et je pense que même l’idée lui plaira assez, mais je me dois d’avoir son approbation et ce, d’autant plus que nous entretenons de bons rapports.
Ensuite il irait trouver un évêque apte à célébrer leur union. Un évêque rien de moins, car il était hors de question que l’on remette en cause la légalité de la chose.
— Et je l’annoncerai à mes enfants également au déjeuner. Il marqua une petite pause avant de reprendre : souhaiteriez-vous convier quelques personnes pour votre part ? demanda-t-il tout de même en ayant une idée de la réponse.
Question subsidiaire : avez-vous songé à celui qui sera votre témoin ? Car il ne voyait pas bien qui pourrait endosser la responsabilité de son côté sans s’opposer à leur union. Pour sa part, c’était tout vu.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Il était bien la seule personne vivante auprès de laquelle elle savait être simplement en paix sans ne penser à rien. Étourdie encore du pur bonheur qu'elle trouvait dans ses bras, à écouter leurs cœurs battre en écho l'un de l'autre. Hors du temps. Sans tourments, sans vide douloureux, sans milliers de pensées anarchiques, sans préoccupations envahissantes et même sans projections. Juste leurs coeurs. Juste leurs respirations. Juste le contact de leurs peaux nues, le sourire dont ses lèvres se parèrent en sentant les siennes dans ses cheveux. Juste la pleine confiance et la sécurité de son âme et de son cœur.
— Noooooooooooooon-oooon-ooon, fit-elle d'un ton plaintif malgré son baiser. Pourquoi faut-il que vous en parliez jusque dans notre liiiiit ? On était tranquiiiille !
Elle poussa un profond soupir avant d'étirer ses jambes et de se hisser sur son coude pour attraper son regard. Elle ne lui en voulait pas mais… la réalité n'aurait-elle pas pu attendre quelques minutes de plus ? Enfin, c'était trop tard, maintenant.
— Mais je sais, je sais. De toute façon, le faire dans son dos empesterait la trahison… Ne reste plus qu'à espérer que ses bonnes dispositions envers vous et le retour à la capitale de la nièce du comte de Tianidre suffise à le convaincre… Et si cela ne tient pas on trouvera un autre moyen de rester ensemble, pas vrai ? C'aura valu la peine que je passe cinq jours à y réfléchir.
Elle aurait bien dit "otage", pour être parfaitement lucide, mais deux choses l'en empêchaient. La première étant qu'elle ne pouvait pas considérer que Coldris l'exposait volontairement, la seconde étant qu'employer ce mot les plaçait malgré eux du côté des ennemis de Monbrina. Or quelles que soient les opinions intimes de son oncle - et les siennes, d'ailleurs -, il n'avait jamais rien fait de plus que de se désintéresser de la politique qui n'avait jamais été sa tasse de thé. On aurait déjà vu plus dangereux et plus hostile.
Elle lui fit sa plus belle tête de chien battu lorsqu'il annonça qu'il préviendrait ses enfants le lendemain.
— Je pourrai venir ? S'il vous plait ? Il faut absolument que je voie leurs têtes quand ils l'apprendront.
Bon, il n'était pas obligé d'accepter mais… Elle avait quand même vraiment envie de voir ça. D'autant que de son côté, ce ne serait pas de la surprise mais de la colère quand on l'apprendrait.
— Au mariage ? Je… Personne chez moi n'accepterait que cela se fasse en cachette, vous vous en doutez… En réalité, c'est capricieux de ma part, cela aussi… Je veux dire : il faudrait peut-être essayer d'attendre son accord...
Et comme ça tout irait bien pour tout le monde... Tant pis si ce devait être public... Ce serait un mauvais moment à passer mais elle aurait tout le temps de s'y préparer et ne trahirait personne...
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
De toute évidence, il avait parlé trop tôt. Mais plus tard n’aurait-il pas été toujours trop tôt à son goût ? Qu'y pouvait-il si son esprit ne s’arrêtait que pour mieux repartir ? Comment était-il censé savoir à quel moment il pouvait rappeler la réalité terrestre bien loin de la bulle dans laquelle ils flottaient ? Il fronça tout de même les sourcils lorsqu’elle lui reprocha de parler du Roi. Il n’avait pas souvenir d’en parler tant que cela, bien au contraire, il évitait soigneusement ce sujet, ne se contentant que de le mentionner lorsque cela devenait inévitable. Après tout, il le servait plus qu’un simple courtisan et il demeurait son souverain – le sien aussi d’ailleurs –. Il laissa échapper un léger soupir contrit, ne voyant pas réellement le problème à régler ces points une bonne fois pour toutes.
— Et l’on ne trahit pas ses amis, surtout lorsqu’ils sont rois. Je ne lui vois pas de raison de s’y opposer et il me doit de toute façon une faveur. Il ne s’agira que d’une pure formalité.
Quant à sa parenté avec le douteux comte de Tianidre, il était évident qu’aux yeux de der Ragascorn, cette union ne pouvait que servir l’Empire en ramenant cette famille dans le giron de l’Empire. C’était d’ailleurs bien l’une des raisons qui feraient qu’il ne s’y opposerait certainement pas. Sans parler du fait – qu’heureusement pour lui – un ministre des Affaires étrangères n’était pas bon à marier politiquement. Oh ils avaient bien ri une soirée entière tous deux des velléités de mariage de la Reine espagnole... Et oui, il en était sûr et certain : il aimait mieux encore la décapitation pour trahison que de baiser une Espagnole pour le plaisir de son roi. Et puis il devait conserver sa neutralité, allons !
Il porta sa main à ses lèvres, elle n’avait pas à s’inquiéter, ses longs jours de réflexion seraient amplement rétribués et oui, le cas échéant, il chercherait une autre solution. Pour ce qui était de prévenir, il était navré, mais son regard suppliant n’y changerait rien. Il esquissa un sourire puis secoua la tête.
— Je souhaite le faire en privé. Vous n’aurez qu’à vous régaler de la tête du baron de Frenn lorsque je l’inviterai à diner, proposa-t-il pour le change.
Et c’était non négociable. C’était quelque chose de très sérieux pour lui et il tenait à le faire entre eux. Certainement que l’étonnement d’Alduis vaudrait le détour – Bérénice sans doute moins, mais il l’imaginait déjà sautiller sur sa chaise comme un petit pinson – toutefois il n’était pas question de profiter de l’occasion pour quoi que ce soit. Il ne se l’expliquait pas, mais il tenait à la solennité de son annonce. C’était ainsi.
— J’y ai déjà songé, vous pensez bien et ce n’est pas possible. Votre phrase est inexacte en réalité : personne n’accepterait tout court. Nous ne pouvons pas prendre le risque d’une contestation à la publication des bans ou lors de l’une des cérémonies. Et quand bien même il donnerait son accord, je ne pourrais lui faire totalement confiance. Nous resterons deux animaux méfiants, c’est ainsi, je suis désolé. Et j’ose espérer que vous prendrez plus de plaisir à cette cérémonie intime qu’à une célébration en grande pompe avec le troisième homme de l’Empire.
Car c’était de cela qu’il s’agirait en cas de mariage public : on assistera aux épousailles du ministre des Affaires étrangères. Viendrait en second le qualificatif de célèbre débauché notoire, puis celui de vicomte et enfin pour le cercle plus intime celui de Coldris de Fromart. Il préférait s’en tenir au dernier pour elle et au fond ce mariage lui allait parfaitement pour cette raison : c’était bien l’homme qu’elle épousait et non sa fonction dont tous deux savaient bien ce qu’il en était.
— Et… je sais qu’il manquera une certaine personne pour ce jour important, alors à défaut de l’avoir pour témoin, peut-être cela vous ferait-il plaisir que l’évêque puisse l’inclure malgré tout d'une façon ou d'une autre ?
Il espérait sincèrement qu’elle accepte, car il aurait aimé en faire de même pour Virgil. C’était si important pour lui… Son meilleur ami avait été son témoin à deux reprises et il l’aurait de nouveau été, si… Songer qu’il ne serait pas présent lui laissait un profond vide. Il savait déjà qu’il lui manquerait terriblement ce jour-là. Il secoua légèrement la tête pour chasser sa peine.
— Qui sera votre témoin, ma luciole ? Y avez-vous réfléchi ?
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Il la fit taire. Sans doute parce qu'elle n'avait pas envie de connaître la réponse. Ce n'était pas grave. Ce n'était pas grave. Elle ne lui en voudrait pas. Elle savait qu'elle ne pouvait rien contre les exigences de ses véritables amours et jamais elle ne saurait le lui reprocher. C'était déjà beaucoup. Beaucoup le temps qu'elle avait pu passer dans ses bras. Beaucoup l'affection qu'elle recevait sans mérite. Beaucoup cette parenthèse à l'enfer, ce dernier jour pour eux.
Autant oublier ces idées douloureuses. Elle eut un sourire déçu mais compréhensif quand il refusa sa requête. D'accord : elle arrêtait ses caprices. Elle n'aurait pas dû demander. Mais… mais tout de même, ce n'était pas si important. Elle aurait même dit : cela ne changeait rien, au fond. Son regard se fit bien plus intrigué par la proposition suivante. Ce n'était pas bien de se moquer du Premier Conseiller de l'Empire, voyons... C'était pour quand ?
— Alors dites à Alduis qu'on ne lui sera jamais assez reconnaissants d'avoir dormi un certain quatorze décembre. Et pour ce qui est de ce dîner... vous n'avez pas intérêt à vendre la mèche avant que je ne sois là, alors ! Cela vous coûterait très cher ! Non, parce que j'envisage bien d'effacer votre dette en cadeau de mariage mais ne vous méprenez pas, mon beau phénix, ce n'est que pour mieux reprendre les comptes et s'il n'a pas un visage assez ahuri à mon goût, pensez bien que ce sera pour votre ardoise.
Bon… À vrai dire, l'idée de revoir le baron l'angoissait un peu, c'était plus fort qu'elle… Mais il allait bien falloir s'habituer à fréquenter ce genre de personnes et ce serait un bon exercice pour toutes ces saletés d'événements que la vie à Braktenn et ce mariage, surtout, exigeraient… Quelque part, c'était peut-être l'effort le plus pénible que leur union lui demanderait… Parce qu'épouser le troisième homme de l'Empire, comme il le rappelait si bien, cela ne se résumait pas à une cérémonie, bien malheureusement - point sur lequel elle ne manquerait pas de revenir.
— Évidemment, mais je l'aurais fait. Je veux que vous le sachiez : pour vous je l'aurais fait. Et je suppose que ce ne seront pas les occasions de vous le prouver qui manqueront...
Sur le reste, elle n'avait pas envie de revenir. Elle ne voulait pas y penser. Lâche… Tellement lâche… Et indigne, et ingrate, et… Pourtant épouser Coldris, c'était la solution la moins pire pour lui aussi, elle le croyait. La moins dangereuse dans la mesure où elle était la plus stable et la plus raisonnable.
Et oui : quelqu'un manquerait. Cruellement. Elle cacha son visage contre Coldris à sa seule évocation. C'était… C'était bien heureusement un jour qu'elle n'avait jamais projeté que celui de son mariage, mais Ariste aurait sans aucun doute dû être à ses côtés. C'était tellement irréel de penser à tout ce qui savait quand même arriver en son absence. C'était irréel d'être en vie sans lui. C'était… la plus grande partie d'elle-même qui avait disparu. Il n'y avait que son beau phénix pour rendre cette idée supportable.
— Tout ce qu'il reste de lui sera déjà là, vous savez… répondit-elle d'une petite voix, les larmes aux yeux parce que… Parce que même sans mariage, l'absence d'Ariste était douloureuse. Mais vous… à quoi pensiez-vous exactement ?
Elle resta blottie contre son amant, cherchant à retrouver le sens. Elle se raccrocha à lui, pas bien certaine de savoir ce qu'il pouvait trouver à ce que l'absence d'Ariste laissait d'elle. Comment ce miracle avait-il pu se produire ? Comment son coeur pouvait-il s'apaiser autant ? Comment, avec lui, n'y avait-il plus ce fond constamment sombre, cette douleur sourde dont elle n'avait su se départir nulle part ailleurs, comment savait-il l'effacer pour qu'il existe des moments de paix ?
Elle secoua la tête pour ce qui était du témoin.
— Pas vraiment... Je ne sais pas… la personne ici dont je me sens la plus proche - en dehors de vous… enfin… Il mérite mieux.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Elle était visiblement déçue de ne pas assister au repas, mais c’était ainsi et il ne changerait pas d’avis. Elle aurait de fait, bien assez du dîner avec le baron de Frenn pour satisfaire sa malicieuse curiosité. L’idée sembla éveiller son intérêt. C’était du moins ce que laissait songer ses prunelles scintillantes que confirmèrent rapidement ses propos qui lui étirèrent un sourire absolu.
Les remerciements à Alduis de la part de sa fiancée et de lui-même, oui c’était noté, il n’y manquerait pas. Quant au dîner, mais c’était précisément pour le plaisir de se repaître de sa tête qu’il le conviait ! Et oh les dettes, ce n’était bon qu’à s’accumuler lorsqu’elles étaient si agréables de toute façon…
— Croyez bien ma luciole que j’apprécie bien trop notre Premier Conseiller pour ne pas me jouer de lui une nouvelle fois. D’ailleurs c’est lui-même qui me disait la veille des funérailles que qui aimait bien châtiait bien. Le fait est, qu’il ne songeait pas que l’ironie voulut qu’il soit en réalité directement concerné… Ce fut merveilleux. Imaginez-le croyant se rendre à une réunion de travail sur des questions sociales quand…
Il lui laissa le soin de déduire à ce petit rictus madré ce dont il était question ? Peut-être lui en dirait-il plus sur ce qui avait pu sur passer ce soir-là éventuellement. C’était à voir.
— Pour ce qui est de mon ardoise, je compte sur vous pour jouer votre partition comme il se doit dans ce cas : je refuse de porter seul le chapeau de sa mine trop peu ahuri pour satisfaire à vos exigences.
Bien sûr qu’elle aurait réussi à traverser la nef de la cathédrale de Braktenn au bras de son père sous la myriade d’yeux s’il avait fallu. Il n’en avait pas le moindre doute. Elle était bien plus forte qu’elle ne se le disait. Cependant était-ce nécessaire de s’infliger un tel supplice lorsqu’elle aurait d’autres raisons contraintes d’apparaitre en public à son bras ?
— Vous n’avez rien à me prouver, je sais déjà tout cela.
C’était le revers de la médaille à épouser une personnalité publique comme il pouvait l’être. Il n’avait que trop conscience de tout ce à quoi il l’exposerait en lui passant la bague au doigt, mais il avait entièrement confiance en elle. Sans parler du fait que si lui pouvait l’admirer, le reste du monde ne pourrait qu’en faire autant, il suffisait qu’elle parvienne à s’en convaincre. Elle était la femme qui avait fait ployer Coldris de Fromart, celle à qui il avait offert son cœur, c’était déjà un exploit digne d’un mythe antique.
À l’évocation d’Ariste elle se cacha contre lui, comme si cela aurait pu lui faire oublier l’effroyable réalité. Il caressa tendrement son dos pour l’apaiser comme il pouvait. Il ne voulait pas la faire pleurer, surtout pas. Oh ce n’était sans doute qu'une idée dont il aurait dû s’abstenir au bout du compte. Il aurait bien pu survivre sans cela. Il n’aurait qu’à penser à lui pendant que l’évêque les assommerait de sermons interminables… Il ne savait même pas à quoi il pensait précisément et cela ne fit que renforçait le sentiment qu’il aurait mieux fait de se taire plutôt que de suggérer cette bête idée. Toujours aussi adroit politiquement et toujours aussi maladroit dans l’intimité. Il soupira.
— Je ne sais pas… En réalité, je ne sais pas s’il existe quoi que ce soit après la mort. J’ose parfois espérer que les âmes flottent autour des vivants et que d’une façon ou d’une autre, elles sont là, aussi proche qu’il leur soit possible d’être… Il garda le silence un bon moment pensivement, les yeux rivés vers le plafond avant de finalement confesser : et je crains parfois que tous ces curés ne puissent avoir raison. Quelle torture plus grande pourrait-il y avoir de découvrir que je resterai seul pour l’éternité lorsque vous serez tous de l’autre côté ? Il ferma brièvement les paupières et inspira pour chasser sa mélancolie. Pardonnez-moi je m’égare. Je songeais que l’évêque aurait pu rappeler qu’ils étaient présents d’une certaine façon quand bien même ce ne serait que dans les souvenirs que nous nous nourrissons, mais c’était sans doute une piètre idée au fond.
Il réalisa trop tard, le pluriel qui s’était invité dans sa phrase à cause de sa trop grande déconcentration. Il n’était plus à cela près. Après tout, lui aussi aurait « tout ce qu’il reste de lui » ce jour-là. De quoi le ramener à cette histoire de témoin à laquelle il imaginait bien qu’elle n’avait personne de son côté qui pourrait endosser le rôle. Il avait eu le temps d’y songer ces derniers jours dans l’éventualité où elle aurait accepté : c’est qu’ils ne disposaient pas énormément de temps pour régler ces questions cruciales, alors autant anticiper.
— Que direz-vous que je demande à Alduis – si cela vous convient– ? proposa-t-il. C’est la personne la plus proche de vous. Il secoua la tête en anticipant sa réaction : Ne vous en faites pas pour moi, je sais déjà qui se chargera de témoigner du bon déroulé de notre union de mon côté.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
— Oh, je suis sûre qu'en analysant bien la situation on peut prouver qu'il y avait de ça, commenta-t-elle - on pouvait toujours trouver un moyen de présenter les choses.
Quant à la situation en question… Oh, elle n'aurait pas pu savoir précisément - à vrai dire ce n'était pas très important et elle s'abstiendrait de toute indiscrétion - mais en tout cas c'avait dû être fameux.
Et pour ce qui était de son rôle dans leur propre projet... Un sourire complice s'étira sur ses lèvres.
— Oh, eh bien nous négocierons tout cela selon la part de responsabilité de chacun mais vous êtes le seul de nous à pouvoir gaffer avant.
Pour le reste, elle ne s'en voulait pas trop. Après tout, ce n'était pas bien méchant et d'ailleurs, cela lui éviterait même de s'en étonner en l'apprenant en public ! Et puis ce n'était pas comme si elle était toute seule.
Et en parlant de public... Pour être honnête, cela faisait bien partie des choses qui l'avaient rebutée à ce mariage. Non seulement se montrer, mais avec lui, en plus ! De quoi aurait-il l'air avec une femme comme elle ? Son image ne souffrirait-elle pas du fait qu'il y ait une femme tout court ? Une femme qu'il juge assez importante alors que l'on savait comment il était… Alors si cette femme, en plus, lui faisait honte…
— Je vous aime, murmura-t-elle.
Et elle irait au delà de tout ce qu'elle pouvait réussir à faire pour ne pas causer de catastrophes. Pour que l'épouse du ministre ressemble précisément à ce qu'il voulait en montrer même si finalement, ce n'était qu'une jeune idiote tout juste bonne à pleurer dans ses bras, à lui qui était le seul qui savait réellement apaiser son âme.
Elle tourna son visage vers lui pour l'écouter. Elle ne savait pas, elle, s'il y avait ce qu'on y décrivait mais dans n'importe quelle configuration, elle retrouverait son Ariste et… et Coldris son véritable amour avec lequel sa présence serait incompatible et… et elle ne voulait pas y penser parce que l'idée de se séparer lui faisait trop de mal, avec ou sans Ariste pour la consoler.
À vrai dire, cette idée qu'ils soient là, proches, lui plaisait. Et oui, l’idée de solitude sans fin était sans doute la plus douloureuse que l’on puisse envisager mais... elle remua la tête. Non...
— Comment “seul” ? glapit-elle presque en l’étreingnant instinctivement, comme s’il avait menacé de disparaître dans l’instant.
Il en vint bientôt à son idée, dont l’importance se justifia aussitôt. Elle remua la tête.
— Bien sûr que non… C’était même une bonne idée… Simplement, il me manque… Et je ne veux pas que cela vous donne l’impression de… Enfin, c’est d’accord.
Il était bien la seule personne vis-à-vis de laquelle elle se souciait de la place qu’Ariste pouvait prendre. Ariste serait toujours Ariste. Il serait toujours tout ce qu’il avait pu être. Il serait toujours la plus importante moitié d’elle-même. Mais cela n’avait absolument aucune influence sur ce qu’elle pouvait ressentir pour lui. Sur cet amour d’une forme inconnue qui avait reconstruit son coeur.
— Alduis est votre fils… Et c’est grâce à lui que je suis là. Qui mérite plus que lui que vous lui fassiez cet honneur ? Qui plus que lui a besoin de sentir qu’il en est digne ? Vous… vous ne pouvez pas penser que quelqu’un le mérite plus que lui… ce n’est pas juste...
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Alors qu’ils évoquaient ses méfaits passés et celui à venir, Coldris affichait un sourire qui mélangeait admiration, amour et excitation de ce nouveau projet. Qu’est-ce qu’il pouvait aimer l’entendre parler ainsi ! Savoir qu’il avait retrouvé un complice – et quel complice ! – le mettait en joie. Il avait tant hâte de s’y mettre ! Pourquoi fallait-il attendre tout ce temps ?
— Ce serait oublier que j’ai conservé des secrets bien plus longtemps que celui-ci, rappela-t-il avec cette inimitable pointe d'arrogance.
Lui aussi l’aimait comme il ne manqua pas de lui rappeler. Il l’aimait et c’était si incongru qu’elle ne pouvait douter un seul instant de ses qualités exceptionnelles. Et si lui l’aimait, l’Empire tout entier en ferait de même.
Pourquoi fallut-il qu’il se mette à étaler ses réflexions spirituelles ainsi… ce n’était ni le lieu, ni l’endroit, ni le moment. Et voilà qu’il l’inquiétait inutilement… Il la frictionna doucement. Ah mais quel idiot il pouvait faire parfois tout de même !
— J’ai passé l’âge des contes. Je doute que l’on me pardonne la liste interminable de mes crimes et qu’on me laisse le revoir… Si l’on voulait vraiment me châtier de ma conduite terrestre, il suffirait de me laisser loin de tous pour l’éternité. Imaginez donc ce que ce serait sans pouvoir s’en extraire, pas même par la mort…
Cette simple idée lui glaçait le sang. Cette année… Il avait l’âge de Virgil quand… Ça ne voulait rien dire bien sûr, mais il y pensait en boucle. A ce qu’il perdrait, celle qu’il emporterait et à ce qu’il y aurait après ou non… Il réussit malgré tout à afficher un petit sourire pour conclure sur quelque chose de plus léger.
— Ou alors on jugera peut-être que supporter les sermons de Virgil pour l’éternité constitue une punition suffisante… un petit souffle de rire s’échappa entre ses narines.
Enfin bref, si elle jugeait que son idée était à éviter alors il en serait ainsi. Mais a priori ce n’était pas vraiment ce qu’elle avait voulu dire. Il fronça légèrement les sourcils. De quoi parlait-elle ?
— L’impression de ? Passer après lui ? Si c’est cela vous n’avez pas à vous en inquiéter.
Car le fait était que les morts eh bien… étaient bien morts. Et qu’il ne souffrait d’aucune jalousie envers le souvenir d’un être cher qui de là où il était ne pouvait sans doute pas faire grand-chose. Ce qui comptait c’était qu’elle acceptait sa proposition et cela le soulagea étrangement. Enfin… Il n’aurait pas dû accorder tant d’importance aux paroles d’un curé, il en était conscient, mais malgré tout il ne pouvait s’en empêcher. Ce qui était encore plus idiot c’était de se demander si les deux là avaient pu se rencontrer de l’autre côté et quel genre de commérages ils pouvaient bien partager. L’image le fit sourire et il embrassa ses cheveux. Il fallait tout de même admettre que partager son meilleur ami ne l’enchantait guère ceci dit…
Pour ce qui était des témoins à leur mariage, il s’était attendu à ce refus, aussi fit-il abstraction de cette dernière remarque qui aurait eu de quoi lui faire grincer des dents…
— C’est justement pour cette raison que je vous le propose et que ce sera moi qui émettrait cette requête. En réalité, vous ne voyez pas les choses sous le bon angle, ma luciole, c’est grâce à lui que nous nous sommes rencontrés et c’est à notre mariage qu’il sera témoin. Que ce soit de votre côté ou du mien n’y changera rien en réalité. Après un temps, il reprit : si vous voulez tout savoir cette autre personne n’est autre que mon filleul.
Le digne héritier de son père à plus d’un titre. Et puisqu’il avait hérité de ses prérogatives, il espérait qu’il accepte la charge qui lui serait proposé. Certes il ne risquait pas d’approuver totalement ce mariage clandestin, mais c’était mieux que rien non ?
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
... beaucoup trop pour pouvoir admettre qu'il pourrait souffrir pour toujours. C'était… non. Non. Non. Non. Elle resta accrochée à lui alors qu'il s'expliquait, les larmes débordants de ses yeux. N'être que l'être avec lequel il attendait la fin, elle pouvait l'admettre, mais pas ça… Pas cela parce qu'elle ne pouvait rien imaginer de plus cruel et qu'elle n'aurait rien souhaité de tel à son pire ennemi. En mois, en année, elle pouvait encore le concevoir, mais sans fin… Oh, pour des années elle aurait déjà mieux aimé mourir, mais là… Là… Il pouvait bien faire de l'humour, cette seule idée était bien trop atroce à envisager.
— Eh bien moi je ne suis pas d'accord, sanglota-t-elle. Vous ne méritez pas cela. Quoi que vous ayez pu faire. Personne ne peut mériter cela.
Quoi qu'il ait fait. Ça ne pouvait pas exister. Ça ne pouvait pas. C'était… Non, bien sûr que ça ne pouvait pas.
— Je ne suis pas d'accord… on ne peut pas vous faire ça. On ne peut pas. On ne peut pas. Je ne suis pas d'accord. Je ne le supporterais jamais, Coldris. Vous voyez : ce n'est pas possible, Il ne pourrait pas. On ne pourrait pas. Ce serait trop horrible. Je… ne pourrais jamais supporter ça… Même s'il existait vraiment une chose assez horrible que vous auriez pu faire… moi je… moi je n'ai rien fait qui puisse valoir qu'on laisse faire ça. Les autres n'ont rien fait qui puisse mériter ça. De savoir que vous… Vous… Qu'on pourrait vous infliger une chose pareille. Je ne pourrais jamais supporter de vous laisser souffrir. Ça me ferait trop mal… Beaucoup trop mal...
Pour n'importe qui à qui elle tenait, ce serait atroce, mais pour lui… Pour lui… Non, elle ne pourrait jamais. Et si elle n'était jamais en paix, Ariste ne le serait pas non plus. Or s'il y avait bien une chose qui rendait leur éloignement supportable, c'était bien cette certitude qu'il ne souffrait pas - ou du moins qu'il ne souffrirait plus quand elle irait mieux - et que d'une manière où d'une autre, ils se retrouveraient. Quoi qu'il arrive. Ce n'était pas une question de contes mais d'eux.
— Cela ne peut pas… Cela ne peut pas... répéta-t-elle entre deux sanglots.
Mais pour Coldris… pour Coldris, si elle n'avait même pas ça… même retrouver Ariste ne pourrait pas lui faire tolérer une telle horreur. Ça n'existait pas. Elle aurait pu faire n'importe quoi pour lui épargner ça. N'importe quoi tant que cela n'impactait pas Ariste. N'importe quoi mais pas ça.
— Vous… Je ne pourrais pas laisser faire ça. Je… Je sais que là-bas vous la retrouverez et que c'est elle que vous aimez et que ce sera fini parce que… Et ça ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave parce que je sais que vous devez retrouver ceux que vous aimez et je veux que vous soyez heureux donc ce n'est pas grave. Vous me manquerez mais ce n'est pas grave, et je sais que c'est comme ça mais… Mais je ne suis pas d'accord. Je ne veux pas que vous soyez seul. Je ne peux pas vous laisser souffrir, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Je vous aime… je vous interdis de souffrir et d'être tout seul. Je vous l'interdis. Je ne pourrai jamais le supporter. Et si c'est vraiment ce qu'il y a de l'autre côté eh bien je vous interdis de mourir, voilà. Je vous l'interdis pour toujours et on reste ici, tant pis, au moins on sera ensemble. Et vous ne serez peut-être jamais avec elle ou avec votre ami mais vous ne serez pas tout seul je ne suis pas d'accord. Je vous aime trop.
Elle le serra fort. Elle avait besoin de sentir qu'il était là. Elle n'aurait pas dû pleurer. Elle n'arrivait pourtant pas à s'arrêter. Il n'aurait rien pu décrire de plus odieux. C'était atroce. Tellement atroce qu'elle ne serait jamais capable de mesurer combien cela pouvait l'être. Tellement atroce qu'elle aurait hésité avant de se désigner à leur place, que ce soit à Ariste ou à lui, et pourtant elle l'aurait fait parce que… parce que savoir que ceux qu'elle aimait souffriraient pour toujours était encore pire. Tout ce qu'elle aurait voulu, c'était qu'ils n'en sachent rien. Qu'ils oublient jusqu'à son existence pour ne pas en souffrir.
Elle finit par se calmer afin qu'il puisse en revenir à son idée qui n'avait rien de si bête. Elle acquiesça lorsqu'il la rassura quant à Ariste. C'étaient deux choses différentes et elle l'aimait. Elle ne voulait pas qu'il se sente envahi par lui. Même si elle n'avait pas l'intention de l'oublier et moins encore de les trahir, lui et la place qu'il occupait dans son cœur. Puis vint la question du témoin par être mise sur le tapis. Car si l'éternité était à d'autres, c'était ensemble qu'ils passeraient le reste de leurs vies. Et ça, c'était bien. Jamais assez long, mais bien.
— Ce… Ce n'était pas du tout contre lui, vous le savez, pas vrai ? fit-elle d'une petite voix lorsqu'il mentionna son filleul. Je tiens seulement à ce qu'Alduis… Enfin, c'est… mon ami et il a tellement besoin de votre estime et… c'est vous, son père. Moi, je ne suis que... moi. Enfin, vous avez raison. Si ce n'est pas lui que vous voulez, ce serait mal de le lui laisser croire. Vous… Vous pensez qu'il le prendra comme vous avez dit ? Parce que si moi je vois que ce n'est pas pareil, il le verra peut-être aussi… Et puis… pourquoi ne puis-je pas lui demander moi-même ? Je sais que c'est pour qu'il voie que cela vient de vous seulement si je le choisi c'est comme mon ami, non comme votre fils, vous comprenez ? Si c'est mon témoin, je n'ai pas à être exclue.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Mais pourquoi, pourquoi, pourquoi avait-il fallu qu’il s’étende dans ces considérations macabres ? Mais quel idiot fini ! Qui pouvait bien avoir de telles idées exceptées lui ? Et enfin… Ce n’était pas comme si tous deux partageaient déjà un rapport douteux avec la mort sans qu’il ne soit nécessaire de le rappeler et encore moins de songer au caractère potentiellement éphémère de leur relation, celui-là même qui l’avait tant fait hésiter à lui avouer ses sentiments.
Et la voix qui pleurait comme s’il avait annoncé mourir demain. Il sentait sa poitrine tout humide des larmes qu’il avait provoquées avec ses éternelles maladresses et cela lui serra le cœur. Bon à rien qu’il était dès qu’il s’agissait de toucher aux sentiments. Il ne savait même pas quoi faire pour arranger les choses et craignait de s’enliser encore plus en osant ouvrir la bouche. C’était… oh il s’en voulait tellement d’avoir tout gâché en la mettant dans un tel état. Il referma ses bras autour de son corps qui lui paraissait subitement si fragile et délicat. Il n’avait bêtement jamais songé que le pire serait qu’elle devrait subir sa propre punition alors qu’elle n’avait rien à se reprocher ? Et à cette idée ses yeux se mirent à bruler. Elle ne méritait tellement pas de souffrir par sa faute. Il la pressa contre son corps, remontant de son dos à son crâne en passant par sa nuque. Il marmonna un timide « non » lorsqu’elle évoqua Aurélia. Enfin c’est que… il avait envie de la revoir oui, mais il avait tourné la page désormais et toute l’affection qu’il avait pour elle, ne remplacerait jamais celle qu’il avait désormais pour… sa future femme. Il ne put s’empêcher de sourire à ses ordres si pleins d’une délicieuse candeur. Si seulement tout pouvait être aussi simple ! Peut-être était-ce mieux qu’il n’y ait rien du tout au final, même si cette forme de solitude glaciale avait de quoi être effrayante également.
Finalement après quelque temps à ne trop savoir quoi faire, poussé par ses propres réflexions, il prit la parole :
— Je vous demande pardon… Je ne voulais pas vous blesser avec mes sombres pensées… Mais vous avez raison ce serait injuste de vous punir pour mes fautes. Il embrassa tendrement sa joue. En réalité, c’est oublié que j’aurais là-bas le meilleur avocat qui soit. Croyez-moi il aura eu le temps de trouver toutes les jurisprudences célestes d’ici là.
Il souffla un petit rire et cela marqua la transition vers l’épineuse question des témoins, notamment pour elle qui n’en avait pas réellement à disposition. Bien entendu que ce n’était pas contre Démétrius, il avait parfaitement compris et la laissa dérouler fil tortueux – dans lequel il s’égara – de sa pensée avant d’intervenir :
— C’est simplement que j’ai des choses à lui dire que vous ne pouvez pas faire pour moi et que je ne peux lui dire qu’en privée, voilà tout. Rien ne vous empêche de lui parler ensuite, je n’ai rien dit de tel. Et si jamais vous aviez une autre personne en tête à qui vous pourriez confier cette tâche, n’hésitez pas. Ce n’était qu’une simple suggestion.
Et ce n’était pas parce qu’il ne voulait pas d’Alduis non plus. Au contraire, il avait immédiatement pensé à lui, seulement voilà ce n’était sans doute pas le plus pertinent, mais il n’avait pas envie de s’étaler sur le sujet, car il n’avait pas envie de s’entendre rebattre les oreilles de confiance et d’estime même si cela partait d’un bon sentiment.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Elle ne voulait pas pleurer, elle le rendait triste. Elle était soulagée qu'il la serre fort dans ses bras au lieu de la rejeter ou de prétendre qu'elle faisait des simagrées. Oh, ce devait arriver, mais là… Là elle était seulement tellement inquiète de son sort… C'était sans doute idiot de rendre toutes les larmes de son corps pour quelques mots… Il allait croire qu'il ne pouvait rien dire. Elle n'avait pas assuré. Elle était tellement, tellement désolée. Elle l'aimait tellement.
Ses sanglots s'étaient calmés quand il en vint à s'excuser. Elle remua la tête dans sa mare de larmes. Non, on ne devait faire souffrir personne. Elle releva les yeux vers lui quand il l'embrassa.
— Il n'y a rien à pardonner, mon phénix. Je… C'est l'émotion, voilà tout. Et je vous aime trop pour accepter que vous souffriez. Mais je… je préfère que vous parliez plutôt que de porter seul des idées si horribles. S'il vous plaît… Je… C'est seulement l'émotion et… vous êtes tout mouillé, maintenant… mais vous ne devez pas vous en vouloir si je pleure. Si je pleure c'est parce que les larmes que je verse dans vos bras, après, leur lourdeur disparaît vraiment. Mais je ne veux pas qu'elles vous fassent du mal.
Et avec ou sans meilleur avocat, elle, elle ne le laisserait pas comme ça. Elle ne l'abandonnerait jamais.
On passa bientôt au choix des témoins. Pourquoi il ne pouvait pas dire toutes ces choses à Alduis après qu'elle lui ait demandé ? Puisque c'était son témoin ! S'il voulait tout savoir, elle aussi, il y avait des choses qu'elle devait faire en privé. Comme le serrer dans ses bras, parce que si elle le faisait devant Coldris, cela risquait de mettre tout le monde mal à l'aise. Ou lui rappeler combien elle le trouvait formidable. Enfin, tant pis, le mieux pour Alduis passait avant : elle n'en rajouta pas
— J'aurais trouvé une autre personne pour vous le laisser mais si vous ne le prenez pas et qu'il accepte, je n'ai aucune raison de me passer de lui...
Elle soupira.
— Quand je pense que ce jour-là, vous m'avez demandé si je venais parce que je voulais épouser votre fils… rappela-t-elle dans un rire léger. Si nous nous étions attendus à cela… Tout de même… J'avais l'air tellement ridicule...
Elle avait encore du mal à comprendre comment il avait pu s'intéresser à elle en dépit de tout cela et… Et cela lui rappelait qu'un problème important à régler.
— Coldris, je… Il y a à propos de ce mariage des paramètres important sont nous n'avons pas discuté et… même si j'ai accepté parce que vous êtes l'homme que j'aime, même si pour moi c'est tout ce qui compte… J'ai besoin de savoir à quoi m'en tenir concernant… l'épouse du Ministre. Comment est-elle ? Pourquoi l'est-elle ? Pourquoi dans ces conditions ? Quel couple formons-nous ? Il faut que nous soyons sûrs de nous accorder à ce sujet. Que nos versions se croisent correctement - ou s'opposent pour laisser entendre ce qui nous arrange -, que… C'est un plan à long terme, on ne peut pas en négliger la préparation.
Elle aurait déjà assez de mal à assumer cette position comme cela et à vrai dire, si le plan devenait que le mariage demeurait définitivement secret aux yeux du monde elle aurait sauté de joie, mais elle se doutait que ce n'était pas ce qu'il avait en tête.
Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Avait-on déjà réussi à faire pleurer sa fiancée juste après qu’elle ait accepté de vous épouser ? Il devait sans doute détenir le record avec son évidente maladresse. Le pire était certainement qu’il ne se souvenait que vaguement de ce qui l’avait poussé à détailler ce genre de pensées morbides à sa belle étoile. En réalité, il était tout de même touché de la voir plonger dans un tel état pour son après-vie et encore plus de savoir qu’elle acceptait d’entendre toutes les sordides idées qui pouvaient habiter son esprit de jour comme de nuit. Enfin même si elle acceptait ce poids il n’était pas sûr de vouloir lui alourdir les épaules quand bien pleurer suffisait à l’évacuer. Il ne pouvait pas lui dire par exemple qu’il craignait chaque jour de tomber et de ne plus jamais se relever, et qu’il craignait par-dessus tout que cela arrive sous ses yeux parce que… elle ne méritait pas d’assister à cela. Sa remarque sur son épaule humide lui étira un sourire ensoleillé : c’était si peu cher payé en réalité, elle aurait bien pu le noyer de larmes de crocodile qu’il n’aurait pu lui en vouloir.
— Vous n’avez pas idée des obscures pensées qui gangrènent mon esprit. Elles s’y multiplient plus surement que dans un terreau fertile… Il resserra un peu son étreinte, et certaines sont si profondément implantées qu’il serait impossible de les déraciner complètement. Vous ne feriez que vous blesser sur leurs épines. Je préfère vous savoir planter des fleurs dans mon cœur.
Et toutes les fleurs avaient besoin d’une belle lumière pour s’épanouir. C’était ce qu’elle était pour lui. Il sentait leurs deux peaux chaudes, l’une contre l’autre réchauffer sa poitrine et en réalité il n’en fallait pas plus pour se sentir bien que de savoir leurs deux esprits s’accorder paisiblement.
— Je ne le laisse pas voyons : j’aurais mon fils et mon filleul pour témoin. Quoi de mieux ? Mon fils, votre ami, celui par qui tout a commencé et mon gendre, le fils de mon meilleur ami et celui qui est désormais comme un fils pour moi. N’y voyez aucun favoritisme là-dedans, je vous en supplie, car mes intentions en sont bien loin. Et cela fait d’ailleurs partie des choses que je dois lui expliquer. Et enfin, peu importe je crois que j’aurais bien du mal à vous expliquer que je ne le dénigre pas dans ma démarche, alors si vous pouviez juste l’envisager, je ne vous en demanderai pas plus.
Sur ces paroles toujours pleines de maladresse, Éléonore lui rappela leur rencontre à Fromart et ce souvenir le fit sourire. Il s’en souvenait comme si c’était hier. Et pour cause c’était presque le cas à l’échelle d’une vie.
— Vous l’ignorez peut-être, mais quelques jours avant c’était mon anniversaire. Nous nous sommes violemment disputés. En réalité, il m’a cassé une côte. Je lui avais demandé de choisir sa future épouse, je voulais que la décision vienne de lui, un minimum, mais il a dit que cela lui était égal… confia-t-il.
Il caressa sa joue le regard malicieux.
— Vous étiez une adorable petite brebis candide et téméraire. Je n’arrivais pas à trancher entre votre courage et votre inconséquence à me tenir tête je dois dire, mais pour être honnête, vous m’attiriez déjà suffisamment pour que j’ai affreusement envie de faire votre connaissance.
Il se souvenait encore fort bien de ce sentiment étrange qui s’était instillé en lui. Comme un rideau de théâtre qu’il avait envie de soulever pour percevoir ce qui se cachait derrière l’apparent décor. Et cette espèce d’écho sourd au fond de son âme. Il n’aurait jamais pu ne pas la revoir. Il avait bien trop eu envie de savoir pourquoi.
Il quitta néanmoins rapidement ses rêveries pour découvrir de quel paramètre il n’avait pas encore discuté. Ah oui la femme du ministre. Une question qu’il avait tournée et retournée en établissant une liste de conséquence pour chacun des scénarios et… toutes ces questions qu’elle énumérait… Il se les était déjà posées un millier de fois… Et… savait-elle à quel point elle était belle et désirable lorsque les égrainait de la sorte ? Si intelligente, si maline, si astucieuse… Oui un plan à très long terme… Des mots qui le faisaient frémir de plaisir dans sa bouche. C’était leur plan à eux et il serait forcément parfait.
— Elle est absolument fabuleuse et ensorcelante, répondit-il complètement émerveillé par ce qu’il venait d’entendre avant de reprendre dans une légère toux gênée.
En même temps… Rien ne l’émoustillait autant que de l’écouter préparer un plan. La politique… Elle mettait son esprit fertile au défi et cela l’empêchait de l’utiliser à des fins moins… utiles ou pires encore : laissé à l’abandon, c’était un jardin où les ronces proliféraient et l’étouffaient… Au fond c’était l’une des raisons pour lesquelles il aimait tant son travail.
— Veuillez m’excuser, je sais que c’est une question très sérieuse à laquelle je n’ai en réalité aucune réponse à vous fournir à mon grand regret. Je suis incapable de trancher entre les différentes options… Mon cœur m’ordonne de les laisser parler et de vous montrer telle que vous êtes, car je suis si fier de vous avoir mes côtés, plus sans doute que vous ne pouvez le concevoir. Je me couvrirais de faiblesse de la sorte, mais voilà qui m’arrangerait bien en réalité tant je pourrais en jouer. Seulement je sais qu’ainsi je vous exposerai et je crains bien trop que quelque chose vous arrive… Je ne me le pardonnerai jamais. Vous savez c’est aussi pour cela que je me suis toujours refusé à montrer mon attachement à mes enfants. On les aurait utilisé et il est même étonnant de constater que personne n’ait jamais tenté de retourner Alduis contre moi… il marqua une petite pause pensivement avant de reprendre : j’envisage également de vous présenter comme un mariage politique. Nous savons tous deux que cela est crédible compte tenu de la réputation de votre père. Je n’aurais qu’à vous ignorer ou à me jouer de vous. Ce serait le plus sûr pour vous, seulement… J’ai tellement envie d’envoyer tout cela valser, j’ai tellement envie de leur montrer à quel point je vous aime et à quel point vous êtes belle, forte, intelligente, douce et absolument merveilleuse. J’aimerai tellement que vous puissiez-être vous, car c’est ainsi que je vous aime Éléonore et je ne voudrais personne d’autre ni pour être ma femme ni pour être celle du ministre.
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Re: [1er février 1598] - La dernière barrière [Terminé]
Idiote, tellement idiote, elle aurait dû savoir combien cette réaction laissait à croire qu’elle serait incapable de porter avec lui ce fardeau qu’il n’aurait pourtant pas dû porter seul. Ou plutôt, elle aurait dû s’en souvenir avant de se laisser dériver vers un tel état. Ce qu’elle pouvait s’en vouloir d’avoir tout gâché de la sorte. Tout cela, c’était parce qu’elle était trop faible. Trop faible par elle-même pour réussir à se contrôler, et d’autant plus vulnérable face à lui qu’il la protégeait des tourments du monde extérieur. Trop faible.
Trop faible pour le soutenir, trop faible pour être utile, et maintenant il ne voudrait plus jamais lui parler de ce qui le tourmentait. De ce qui lui faisait vraiment du mal et qu’elle aurait peut-être pu l’aider à… Oui, elle savait bien qu’elle ne savait rien porter toute seule mais il n’avait pas idée de toute la force que leur amour lui procurait et elle aurait préféré tout entendre, quitte à finir les mains en sang pourvu qu’elle ait pu le débarrasser de quelques épines parce que…
De toute façon, elle n’aurait rien pu faire ! C’était bien l’arrogance de son âge que de toujours s’inventer des dons illusoires. Ridicule, inutile, méprisable… Et pourtant, elle… Elle aurait voulu essayer, parce qu’il n’y avait rien de pire que de ne rien tenter pour la personne que l’on aimait et… et d’autre part, lui faire plus de mal que de bien était une idée intolérable… Pourquoi fallait-il qu’elle soit à ce point incapable, elle qui aimait tant ?
Elle caressa sa joue avec toute la tendresse que ce geste pouvait contenir et qui ne serait pourtant jamais comparable à toute celle qu’elle pouvait lui porter. Ce qu’il lui accordait déjà était mieux que ce qu’elle aurait mérité d’accomplir, et pourtant elle aurait voulu tellement plus pour lui. Et quelque part, égoïstement - finalement, ils avaient raison, même si elle n’avait aucune envie de l’être -, elle aurait voulu que ce soit elle qui le lui offre.
— Je… Si vous ne voulez pas m'en parler, je le respecterai mais… je veux que vous sachiez que si un jour vous changez d'avis je… je serai toujours là. Et… que… je sais que c'est difficile à concevoir en me voyant ainsi mais je saurais le porter. Vous ne pourriez pas avoir de pire pensées que celles que votre présence éloigne de moi… Je suis désolée d'avoir pleuré… Je ne voulais pas vous faire de mal. Et je… autant de fleurs que vous voudrez.
Elle ferait de son mieux, parce que c'était tout ce qui comptait… Parce que c'était pour lui qu'elle voulait continuer. Parce que… sinon, cela n'en valait plus la peine.
Elle remua légèrement la tête au sujet d'Alduis. Elle n'avait pas dit que...
— Si vous me dites que ce n'est pas le cas, ce n'est pas le cas, assura-t-elle.
Oui, quelque part ce devait être idiot d'accorder une telle confiance à ce genre d'hommes, mais c'était ainsi. De toute façon, ce qui comptait, c'était la manière dont Alduis l'interpréterait et elle espérait sincèrement que cela lui convienne.
Elle en revint donc à quelque chose de plus léger, et quoi qu'elle escompta bien arriver par ce biais à une question importante, elle écouta volontiers ses précisions. Elle laissa échapper un soupir à l'indifférence d'Alduis. Quelque part, elle le comprenait. C'était difficile d'imaginer se lier ainsi à une femme dans sa situation, alors la désigner soi-même… Mais il fallait, malheureusement. Et comme c'était une personne formidable et que tout indiquait qu'il voulait quand même bien faire, et pour peu que sa fiancée soit un peu conciliante, cela irait. Tout de même, c'était tellement dommage que son père et lui doivent se disputer ainsi… Elle voulait tant que cela s'améliore encore.
Quant à ses raisons de lui tenir tête… Elle non plus n'arrivait pas bien à trancher, pour être honnête. Elle… tellement perdue… Et… Et elle aurait certainement été tentée même sans tout ce brouillard mais quelque part, elle savait qu'elle n'avait pas agi pour les bonnes raisons. Et… Elle se demandait vraiment comment elle avait pu l'attirer comme il le prétendait dans ces conditions, lui qui était tellement…
— Je ne vous ai pas trop déçu, j'espère...
Non… Non, parce qu'il était évident que ce qu'ils avaient trouvé était bien au-delà de tout ce qu'ils avaient pu espérer, mais… Mais quelque chose l'empêchait de se dire qu'elle était vraiment à la hauteur. Alors pour ne pas le mettre en difficulté publiquement… Cette idée lui avait tourné dans la tête encore, et encore, et encore. Et elle en mourrait de peur parce que pour se faire discrète, c'était fichu et qu'il y avait tellement de choses à prendre en compte qu'elle avait besoin de savoir vers quoi il souhaitait se diriger - quoiqu'elle ait déjà élagué ses idées les plus extravagamment intenables sur le long terme. En réalité, tant qu'elle ne songeait pas à la présence publique que tout cela impliquait, c'était assez plaisant à échafauder.
Elle fronça les sourcils à sa réponse, qui si elle était touchante - comme toutes les choses gentilles qu'il pouvait lui dire -, ne répondait absolument pas à sa question.
— Idiot ! soupira-t-elle avant de déposer un baiser sur ses lèvres.
Pas de réponse, donc. Mais il y avait forcément déjà pensé et lui fit d'ailleurs part de l'état de ses réflexions qu'elle suivit bien attentivement, les comparant déjà aux siennes - non sans que ses propos si élogieux ne lui ramène les larmes aux yeux. Elle acquiesça lorsqu'il eut terminé et se donna quelques secondes avant de commencer sa réponse.
— Je crois que je serai exposée dans un cas comme dans l'autre. Disons que dans le second, on sera plus susceptible de chercher à me manipuler et que dans le premier… Enfin, soit. Dans les deux cas il y a un risque que j'ai déjà mesuré et que je suis prête à prendre si cela nous permet de rester ensemble. De là à l'accentuer dans une situation dont on perdrait si facilement la maitrise… En outre, quoi qu'il soit une erreur de considérer l'amour comme une faiblesse, le laisser paraître au grand jour serait dévoiler un point qui vous sera réellement sensible. Il faudrait que nous nous penchions davantage sur cet équilibre… Je peux jouer le jeu du mariage politique s'il est présenté favorablement pour Tianidre - je ne pourrais pas trahir les miens a ce point. Le fait est que quelle que soit la version que nous adopterons, il faut être certains qu'on parviendra à la tenir et à la vérité… À la vérité, dès lors que l'on mentira sur la nature de notre relation, plus personne ne devrait pouvoir en être informé : ce serait encore plus risqué de laisser voir combien nous tenons à conserver notre secret. Ce qui voudra dire que dès lors que vous décidez de montrer un désintérêt total à mon égard, voire une forme de mépris, il faudrait conserver cette attitude d'une manière bien trop permanente si l'on veut qu'elle soit crédible. À mon avis, il faudrait trouver une situation plus… personnalisée. Quelque chose que nous serions certains de pouvoir gérer sans regrets - je sais que vous y tenez - et qui puisse justifier les erreurs qui pourraient être commises… En réalité, je crois que j'ai peur que cela ne nous contraigne à nous éloigner et… quelque part, une idée neutre serait plus sûre. Quel que soit le point dont on parte, il serait plus sain pour tout le monde d'aboutir à une apparente bonne entente et à un certain respect - mais entre nous pour de vrai, je ne veux pas qu'on retombe à cela. En aucun cas je ne voudrais que notre union vous impacte. Le fait est que j'ai peur, Coldris. J'ai peur que tout cela ne nous change… Et… je sais que je ne devrais pas douter mais je n'arrive plus à produire la moindre pensée rationnelle dès lors que je crains de nous détruire. J'ai parfois l'impression d'avoir une ruche dans la tête tellement cela bourdonne quand cela pense et je ne sais pas… Je ne trouve aucune solution qui me convienne assez. Il faut que ce soit réalisable, que ce soit sûr, que ce ne soit pas trop pénible - Coldris, je ne tiendrais pas au milieu de tout ce monde dans votre soutien -, que cela tienne sur la durée - bien sûr, certaines idées se font par étapes mais cela n'empêche -, et surtout, surtout : que cela ne nous nuise pas. Et tant d'autres critères encore... En fait, je crois que vous vous trompez : il ne s'agit pas de choisir entre un choix rationnel et un choix qui suive nos coeurs parce que… parce que la seule décision sensée est celle qui ne nous affectera pas…. Je… j'ai enchaîné trop vite ? Vous suivez ?
Bon, elle s'était peut-être un peu perdue. Il restait tellement de points qu'elle n'avait pas su soulever et... Et certainement tant d'autres auxquels elle n'avait pas encore pensé.
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» [5 février 1598] - Là où le devoir nous appelle [Terminé]
» [9 février 1598] - Baiser plutôt que prier [Terminé]
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