[RP Flashback] Mai 1584 - Quand deux esprits s'ennuient dans une même messe

La messe.

Cette chose longue et ennuyeuse qui avait lieu une fois par semaine et qui durait, et durait, et durait encore.

Cette chose incompréhensible pendant laquelle il fallait rester assis sur un banc sans bouger, à écouter les propos bavés par les prêtres.

Totalement dénué d'intérêt.
Totalement inintéressant.
Totalement ridicule.

Mais obligatoire.

- Ysengrin, bon dieu ! souffla sa mère d'une voix exaspérée en lui lançant un regard en coin. Arrête de t'agiter comme ça dix secondes et tiens-toi un peu tranquille ! On croirait que tu as des vers !

Quelques regards se tournèrent dans leur direction, certains particulièrement insistants et réprobateurs. D'autres tout à fait consternés et, plus rares, quelques coups d'oeil amusés. Ysengrin se fit un plaisir de leur tirer la langue, avant de compter jusqu'à dix.

Enfin, sept.
Le temps de tirer la langue, trois secondes étaient déjà écoulées. Hors de question de les laisser passer.

Pourtant, quand il atteignit six, déjà las, il se pencha pour s'appuyer sur le banc devant lui et s'amusa, sous le regard dépité — peut-être un peu blasé — d'Yselda, à jouer avec sa langue.

Former un petit tunnel.
Toucher son nez.
La claquer contre son palais.

C'était inimaginable tout ce qu'on pouvait faire avec une langue ! Et c'était toujours plus intéressant que d'écouter le discours religieux. Quoique. Même ça devenait vite lassant. Il soupira. Et soupira encore.

- Ysengrin ! refit sa mère. Tu es monté sur ressorts, ma parole !

Ysengrin ne donna aucune réponse.

- Prends ton mal en patience quelques temps encore, ajouta-t-elle.

Il coula un regard aux alentours. Bon sang, qu'il s'ennuyait. Il devait bien y avoir quelque chose à faire dans cette église...

Ce fut à ce moment que ses yeux se posèrent sur les cierges. Un sourire germa sur ses lèvres, en même temps que l'idée naissait dans son esprit. Il se leva sans précaution et on se tourna de nouveau vers lui. Sa mère se fit petite, honteuse de tous ces questions muettes qu'elle lisait dans les yeux, et tenta de le retenir.

Trop tard.

Il lui avait déjà filé entre les doigts.

Chaque jour, vers la fin de l'après-midi papa donnait l’autorisation à maman d'assister à la messe. Une heure de liberté. Pas davantage. Ou sinon il y avait des conséquences. Le garçon frissonnait rien qu'à se rappeler des coups qui pleuvaient régulièrement sur le corps de sa pauvre maman. C'était pourquoi il s'efforçait d'être toujours bien gentil et bien sage. pour ne pas que papa ait de raisons de gronder maman puis de la punir. C'était son rôle de la protéger. Comme quand elle veillait sur lui quand il était malade ou qu'il tombait à cause de ses jambes qui ne portaient plus.

Malgré son jeune âge, Alexandre était déjà un enfant très pieux. Il suivait des yeux le prêtre qui débutait sa lecture et entendait avec émotion les phrases qui rapportaient le début du mariage. Il les avait déjà entendu plusieurs fois et pouvait à présent deviner, sans se tromper la phrase qui allait suivre. la mémoire, c'était son talent secret et il en était fier. Très fier.

Soudain, son regard surprit un mouvement qui passa près de lui. Sa curiosité fut aussitôt attirée et il découvrit un garçon plus âgée que lui qui se déplaçai rapidement vers le lieu où brûlaient les cierges qui servaient aux gens à exaucer leurs prières. Pourquoi allait-il là-bas ? ce n'était pas le moment. D'un autre côté, il avait peut-être une demande très importante à faire à Jésus. Sa maman ou ou son papa était peu-être malade ? Les questions se bousculèrent dans sa tête et lui firent oublier les règles.

Discrètement, Alexandre se leva en s'appuyant sur les béquilles taillées à sa taille et se dirigea lentement vers le lieu où avait filé l'enfant. Ses pas étaient hésitant et lents. Les adultes, occupés à suivre la messe, ne le remarquèrent pas. il arriva dans la zone aux cierges et observa, intrigué, son aîné, qui les fixait d'un drôle de regard.

"Tu n'as pas d'argent pour en allumer un ?"

Le petit garçon posa une de ses béquilles contre un pupitre métallique qui soutenait plusieurs cierges allumés et fouilla ses poches. il en sortit une belle pièce.

"Tiens, je te la donne. Tu vas prier pour ton papa et ta maman ?"

Il se décida à prendre une seconde pièce.

"Je vais en acheter un aussi. Comme ça, on priera ensemble."

Alexandre jeta un regard inquiet derrière eux. Personne ne semblait les voir.

"Tu sais, c'est pas bien d'être là. Il ne faut pas se lever pendant la messe. Mais tu dois avoir une demande très importante, c'est pour ça, hein ? je peux savoir ? Je peux ? Je peux ?"

Ses yeux brillaient de curiosité mais aussi de joie. C'était al première fois qu'il parlait à un autre enfant peut-être devenir amis ? Alexandre en rêvait.

Dieu par-ci, Dieu par-là...

On ne jurait que par lui, c'était incroyable. Mais au bout d'un moment, ce Dieu, quelqu'un l'avait-il déjà rencontré en vrai ? Peut-être qu'il en avait marre, ce monsieur, que l'on jure avec son nom à tort et à travers pour tout et rien ! En tout cas, lui, il aurait été sacrément énervé à sa place !

C'était terriblement ridicule et ennuyeux. Il préférait faire autre chose pour patienter. Et l'idée qu'il venait d'avoir était une très bonne manière de passer le temps. Il allait tendre la main vers l'un des cierges quand une voix le coupa dans son élan. Il fit volte-face en prenant un air innocent, et faussement contrit, – prêt à trouver il ne savait quelle excuse pour justifier sa présence près des cierges et éviter un de ces longs sermons dont les adultes avaient le secret.

Mais il se détendit aussitôt. Fausse alerte : ce n'était qu'un enfant. Un enfant plus jeune que lui, avec des béquilles, mais un enfant tout de même. Tous les enfants, de n'importe quel âge, étaient plus intéressants que les adultes – et surtout, plus intéressants que Dieu et ses messes.

Il prit la pièce que le petit garçon lui tendait. Une belle pièce. Qu'il mit aussitôt dans sa poche. Ce n'était pas du vol, puisqu'il venait de la lui donner. Il n'allait certainement pas l'utiliser à acheter un cierge, quel gâchis ce serait ! Son interlocuteur en prit alors une seconde, en commentant ses gestes suivants. Acheter un cierge pour prier ensemble. Ysengrin fit la moue. Oh non, ce n'était pas drôle, ça. Se pouvait-il qu'il soit tombé sur le seul enfant de toute la ville aussi ennuyant que les adultes ? Il soupira.

En tout cas, les adultes, eux, étaient tous concentrés sur le prêtre dans sa chaire. Personne ne les regardait, ils étaient libres de leurs mouvements. Enfin, personne sauf sa mère qui dardait sur lui un regard sans équivoque. Reviens ici ! signifiait-il. Elle lui fit même un signe.

Signe qu'Ysengrin ignora dès qu'il eut détourné les yeux.
Il suffirait de dire qu'il ne l'avait pas vu. C'était facile.

Il revint alors vers le garçon. Bon, peut-être que ce ne serait pas si énervant de jouer avec lui, finalement ? Et comme il était plus jeune, il pourrait toujours lui apprendre quelques bêtises ! Il eut un immense sourire et sans répondre à la question, il demanda :

- Ça te dirait qu'on joue ensemble ? On pourrait devenir ami, si tu veux.

Alexandre observa le garçon qui se tenait devant lui et s'étonna de le voir mettre dans sa poche la pièce qu'il venait de lui donner. Pourquoi il ne la gardait pas en main ? Il allait l'utiliser pour la glisser dans le tronc et prendre un cierge. Quoique.. c'était peut-être pas perdre ? On ne savait jamais. Il aurait pu glisser sur une des dalles et lâcher le sou. Le garçon jeta un instant un regard vers les bancs où une femme semblait l'appeler. Il l'ignora.

"C'est ta maman là-bas ? On dirait qu'elle t'appelle. tu.. tu vas y aller ?"

Il n'avait pas envie que ce garçon le quitte déjà. Mais ils étaient à la messe. Ce serait logique. Il reporta son attention vers lui et demanda s'il voulait jouer. S'il voulait être ami avec lui ! La bonne conscience d'Alexandre le chatouillait. Il aurait dû retourner s'asseoir près de sa mère. On ne jouait pas à une messe. Mais il connaissait déjà beaucoup de psaumes, il était toujours attentif.. Jésus pardonnerait bien cet écart ? C'était pour avoir enfin un ami. Et puis, il prierait tout à l'heure pour s'excuser. Et il demanderait pour aller se confesser demain. Le père Thierry lui donnerait sûrement l'absolution. Il était gentil et ne grondait jamais. Quoique il dise.

"D'accord. On joue à quoi ?"

Il se rappela avoir oublié les bonnes manières. Ce n'était pas bien.

"Je me nomme Alexandre. Alexandre Bellanger."

il s'inclina poliment, comme maman lui avait appris, puis prit un ton légèrement prétentieux.

"Et je suis le fils du libraire Bellanger ! Mon papa, il tient une magnifique libraire qui est dans la famille depuis quatre générations. Et ça va être moi plus tard, quand je serai grand !"

Très fier, Alexandre se grandit autant que possible, rayonnant de faire étalage de son nom et de la réputation qui allait avec.

Ysengrin haussa des épaules quand le petit garçon l'interrogea sur sa mère — qui continuait à essayer d'attirer son attention, soit dit en passant. Oui, elle l'appelait. Non, il n'allait pas y aller. Parce qu'elle allait lui dire exactement la même chose que les trois dernières fois : de ne pas bouger.

Mais c'était chiant — ses parents aimaient pas qu'il le dise, alors il le faisait ! — de rester immobile pendant des heures. Pour toute réponse alors, il haussa des épaules, sans en dire davantage.

Il tourna le dos à sa mère pour ne plus voir son regard courroucé. S'il lui disait qu'il s'était fait un nouvel ami, sa mère ne le gronderait pas.

Et même si le garçon sembla hésiter un peu, il finit par accepter de jouer avec lui. Un grand sourire s'afficha sur ses lèvres. Ah ! Voilà que la messe s'annonçait plus intéressante ! Il manquait plus qu'à trouver le jeu parfait.

Ses parents adoraient le dicton qui disait : "le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt." Il préférait se dire que la vie appartenait à ceux qui savaient jouer. On s'amusait beaucoup plus ainsi !  

- Voyons voir...

Il réfléchit quelques secondes. Jouer à chat s'annonçait compliqué, avec ses béquilles. Une idée lui effleura l'esprit. Il s'élança vers la sortie de l'église, abandonnant — pour le moment — l'idée du cierge.

- Je sais ! Suis-moi !

Et à grands pas, il se dirigea vers l'entrée de l'église. Il dut bien vite ralentir la cadence, cependant, pour permettre à Alexandre — lequel venait de se présenter — de le rattraper. Il n'avait pas l'habitude de marcher aussi lentement.

- Je m'appelle Ysengrin, répondit-il alors. Ysengrin Zellers. Mais appelle-moi Ys !

Il se glissa à l'extérieur, pour rejoindre le parvis de l'église et les arbres qui s'y trouvaient. Là, le petit Alexandre vanta les mérites de son père et de la librairie qui était tenue par sa famille. Ysengrin se suspendit à une branche et se balança dans le vide nonchalamment.

- Mes parents sont verriers, répondit-il. Ils veulent que ce soit à moi, aussi, comme toi. Mais moi, j'ai pas envie !

Il se hissa assis sur la première branche, se laissa tomber en arrière pour faire le cochon pendu. Son visage se retrouva à quelques centimètres de celui d'Alexandre, et là, il écarta les bras pour lâcher la branche :

- Quand je serai plus grand, je serai acrobate ! Et je ferai rire les gens ! Tu as envie de rire ?

Il se redressa ensuite et tendit la main à Alexandre et proposa :

- Tu viens ? Je t'aide à monter !

Alexandre tiqua un peu sur l'attitude de son garçon qui semblait se désintéresser de sa mère. Les enfants étaient pourtant soumis à l'autorité de leurs parents. Mais son aîné était vieux. Il avait l'âge de commencer un apprentissage ou s'en approchait. alors il devait avoir quelques libertés supplémentaires. Lui allait seulement atteindre, dans quelques jours, l'âge de raison. A cette pensée, il tourna la tête pour essayer de distinguer maman mais celle-ci restait en prière sur leur banc. Elle l'avait pas remarqué son absence. Alors il pouvait rester encore un peu. Mais si elle l'appelait, il derait y retourner. Pourvu que maman reste bien concentrée...

Le garçon réfléchissait à une idée de jeu. On jouait à quoi entre enfants ? D'ordinaire, lui s'amusait avec de beaux jouets qu'on lui achetait, flambant neufs, mais seul. Il avait entendu parler de cache-cache, de chat ou de colin-maillard mais ne savait pas bien en quoi cela consistait. Soudain, l'aîné s'éloigna en lui disant de le suivre. Alexandre lui emboita le pas mais eut du mal à maintenir la cadence. Il eut la surprise de le voir ralentir et s'adapter à sa marche. Alexandre, sourit, touché. Comme il était gentil !

Ils sortirent de l'église et arrivèrent devant le chêne planté près de l'entrée, prisonnier des pavés. Alexandre se demandait parfois si cet arbre n'était pas malheureux, seul, loin de ses congénères restés en forêt. Le garçon se suspendit en arrière à une branche et impressionna à une branche.

"Ah ! Trop fort !"

L'aîné dit se nommer Ysengrin. Comme dans le roman ? Il ajouta qu'on pouvait le nommer Ys.

"Moi, tu peux m'appeler juste Alex alors !

Il l'entendit parler du métier de ses parents puis de ses rêves à lui. faire rire les gens, c'est vrai c'était un métier sympa...

"Tu veux dire que tu vas être saltimbanque ? J'en vois dès fois depuis la fenêtre de am chambre ! Ils sont très drôles !"

Ys lui proposait de l'aider à monter dans l'arbre. Un instant, Alexandre eut peur de grimper aussi haut. Mais c'était tentant. Et puis, tous les garçons grimpaient dans les arbres. c'était normal. Alors il pouvait le faire. Maman répétait que malgré son infirmité il devait apprendre à être comme les autres. Ne pas être faible. Il apprenait ainsi à être solide sur ses béquilles en toutes circonstances et à ne surtout pas végéter dans un fauteuil. Régulièrement, le temps du trajet entre l'église et la maison, maman lui montrait des infirmes qui se déplaçaient dans des engins roulants improvisés et elle le sermonnait en affirmant qu'il ne devait jamais ressembler à ces parasites, qu'il fallait beaucoup mieux que cela.

"Eh, je peux me débrouiller seul ! J'ai sept ans ! Je suis plus un bébé !"

Posant ses béquilles contre le tronc, Alexandre tendit les bras et réussit à accrocher une première et s'accrocha fort pour réussir à se hisser. C'était pénible. ses muscles lui faisaient un mal de chien. Mais Amman allait être tellement fière ! Il lui raconterait avoir grimpé dans un arbre tout seul, comme n'importe quel quel petit garçon normal !

Alexandre réussit à se poser sur la première branche et observa Ys d'un regard narquois.

"T'as vu ? je l'ai tout seul !"

Désireux de poursuivre cette ascension, de pouvoir remplir maman de fierté, Alexandre releva la tête vers al cime et commença à grimper vers les branches suivantes. ses bras lui faisaient très mal mais tant pis. Tout à l'heure quand maman aura un beau sourire, ça voudrait tous les efforts et toutes les douleurs qui soient !

"On joue à celui qui monte le premier ? Je pars en premier ! Et toi, tu essaies de m'attraper ! Et si je perds... si je perds, eh bien, je... je ferai ce que tu veux ! Tu pourras me donner n'importe quel ordre ! Mais si je je vais en haut sans que tu m’attrapes, c'est moi qui gagne ! Et là... Là, c'est moi qui pourra te donner un ordre !"

Sans attendre la réaction de Ys, Alexandre continua à monter. lentement. Par gestes lents et délicats. il savait que ça allait difficile de gagner alors autant prendre un peu d'avance.

Comment se comporte Ysengrin face à ce défi lancé :

1 ~ 2: Il monte et attend en haut qu'Alexandre arrive.
3 ~ 4 : Il laisse gagner Alexandre.
5 ~ 6 : Il monte en même temps que lui, pour qu'ils soient ex-aequo.

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'Dé à 6 faces' :

Ysengrin eut un sourire ravi – et très fier – quand les yeux d'Alexandre se mirent à pétiller. Il hocha la tête quand ce dernier précisa son surnom. Il réfléchit quelques secondes, avant de finir de se hisser sur la branche pour demander, très sérieusement :

- Alexandre, alors... C'est comme Alexandre le Grand ?

Ce serait un jeu amusant, tiens. Il nota cette idée dans sa tête, pour un peu plus tard. Après tout, les messes étaient infinies. Ils auraient bien le temps de faire un peu de tout. Il eut un nouveau sourire, tandis qu'Alexandre semblait enchanté par ses envies.

- Je sais marcher sur les mains aussi ! Toi, si tes jambes ne marchent pas bien, tu pourrais apprendre, d'ailleurs ! Qu'est-ce que tu en dis ?

Mais il n'allait pas rester tout seul assis sur sa branche alors il lui proposa de le rejoindre, en lui tendant la main. Alexandre sembla hésiter, comme s'il craignait de monter. Pourquoi ? Mais finalement, il accepta de monter... sans se servir de sa main. Ysengrin la reposa sur la branche et le regarda faire sans un mot. A sept ans, c'était quand même encore un peu un bébé.

Il réussit à monter. Au bout d'un looong moment, il fut assis à côté de lui sur la branche. Il haussa les épaules nonchalamment. Mais déjà, il montait vers les branches suivantes.

- On joue à celui qui monte le premier ?

Ysengrin lui jeta un regard surpris. Il avait déjà commencé son ascension et il était aussi lent qu'un escargot. S'il l'avait voulu, il lui aurait fallu moins de dix secondes pour le rattraper. Mais malgré la difficulté évidente que l'escalade représentait pour lui, il n'abandonnait pas et continuait de partir devant.

Il aurait pu le doubler.
Il aurait pu gagner le défi facilement.

Il n'en fit rien.

Escalader sans difficulté n'était pas drôle. Ce n'était pas vraiment une course si elle était gagnée d'avance. Une victoire se méritait avec des efforts.

Mais comme il ne s'agissait tout de même pas de se laisser faire par un presque-bébé, il se mit à son niveau pour poser la main sur la branche la plus haute en même temps que lui. Parfaite égalité.

- Ex-aequo ! Ça veut dire qu'on peut se donner un ordre chacun. Tu m'en donnes un, je t'en donne un.

Il balança les jambes dans le vide.

- Allez ! Vas-y, donne le tien en premier !

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'Dé à 6 faces' :

Alexandre se redressa, plus que fier, quand Ysengrin évoqua l'origine de son prénom :

"Oui, c'est ça ! Tu connais ? C'était le plus grand empereur au monde ! C'est mon papa qui l'a choisi ! Mon papa, lui, il se nomme Romain. c'est moins prestigieux mais c'est parce que j'étais pas lui l'héritier à la base de notre librairie mais ses deux frères ainés sont décédés, eux. Ils s'appelaient Claude et Dominique. Dominique, c'est rapport à l'empereur Dioclétien. C'est le truc le plus que mon grand-père a trouvé pour correspondre à un nom chrétien. C'est malin, non ? Et mon grand-père, lui, il se nommait Auguste ! Comme le premier empereur romain ! C'est chouette, hein ? Et après.. Euh, après, je me suis souviens plus. pardon..."

Le petit garçon, gêné d'être ainsi pris en défaut. Papa n'aurait pas aimé. Maman non plus. ils disaient que c'étaient important de se souvenir de ses ancêtres et de toujours les valoriser. Ils étaient venus avant lui et "étaient la raison de son existence à lui.

"Et toi, tes grands-parents, ils étaient verriers aussi ? Et ton papa, il est pas trop en colère que tu veuilles pas reprendre son métier ? Oh ! Tu as peut-être un frère aîné ? C'est pour ça que ton papa te laisse devenir saltimbanque ?"

Le jeune garçon était devenu un véritable moulin à paroles et cherchait à comprendre la situation de son ami d'après les informations en sa possession. Ysengrin lui proposa ensuite de marcher sur les mains pour remplacer les jambes et il secoua tristement la tête.

"C'est mon corps entier qui a des problèmes. Mes jambes et bras. Ils sont pas.. normaux. Ils sont faibles. mais je peux quand même faire des choses, hein ! Comme les autres !"

Peu après, Alexandre réussit à monter dans l'arbre. Seul. Au prix de gros efforts. Mais il était fier et heureux. Ysengrin accepta son idée et le garçon sourit, continuant son ascension. Ce n'était pas facile de monter là-haut. Ses muscles lui faisaient de plus en plus mal. Mais il n'allait pas renoncer. Pas question ! Maman n'aimait pas quand il renonçait et disait être fatigué. Elle le grondait et rappelait qu'il devait au contraire déployer plus d'effort que n'importe qui pour s'intégrer dans cette société qui n'aurait de cesse de s'acharner sur lui.

Lentement, très lentement, Alexandre grimpa en s'agrippant de plus en plus difficilement aux branches. Ses muscles commençaient même à tétaniser. Sans parler de ses ses épaules qui le tiraient. Lorsqu'il toucha la dernière branche, au moment où Ysengrin fit de même, le garçon n'eut pas besoin de réfléchir pour comprendre.

"Tu me prends pour un bébé, hein ? Tu as pas voulu gagner contre moi, hein ?"

Alexandre se tourna et fit un gros baiser qui claqua fort sur la joue de son ami.

"Merci !" C'était gentil de ta part !"

Il étudia son idée que chacun donne un ordre et il secoua la tête.

"Nan ! Je mérite pas de te donner un ordre. C'est toi qui aurait dû gagner ! Et de loin : Alors c'est toi qui me commande !"

Alexandre se hissa pour s'asseoir sur la branche et imita un salut militaire.

"Alors, on fait quoi commandant Ysengin ? Le soldat Alex attend vos ordres !"

Il avait eu raison. Alexandre comme Alexandre le Grand. En même temps, il fallait dire que c'était facile de le deviner ! Il écouta ses explications d'une oreille. Ils avaient des noms importants dans la famille, dis donc ! Est-ce que leurs chevilles passaient encore dans les portes ? Il aurait bien posé la question, juste pour voir la tête que ferait Alexandre, mais il n'en eut pas le temps.

Le garçon s'excusait. Pourquoi donc ? Il avait l'air de s'en souvenir déjà beaucoup, de ses ancêtres ! Ysengrin, lui, ne se souvenait déjà pas des prénoms de ses oncles et tantes, alors – et qui étaient pourtant encore bien vivants !

Il s'amusa à se suspendre la tête en bas, en répondant à la nouvelle question d'Alexandre :

- Oui, ils l'étaient aussi ! J'ai pas de frère, et ils le savent pas encore. Mais de toute manière, c'est ma vie, alors je ferai ce que je veux !

Et il ne voulait pas devenir verrier. Vraiment pas.

En tout cas, c'était vraiment dommage que ses bras marchent aussi mal que ses jambes. Sinon, il aurait pu les remplacer ! Et puis en plus, il aurait pu amuser les passants ! Les gens s'arrêtaient toujours pour regarder. Mais bon. S'il ne pouvait pas, tant pis.

L'ascension fut longue, Alexandre montait lentement. Mais il montait quand même. Et comme toute personne qui persévérait, ses efforts furent récompensés et il finit par atteindre le sommet de l'arbre. Alors il le laissa – en partie – gagner. Pas totalement, parce qu'il était quand même plus vieux et qu'il ne pouvait pas se laisser battre par un presque-bébé.

Mais ce dernier n'était pas idiot, et il avait bien compris la manoeuvre. Ysengrin se contenta de hausser des épaules, même s'il ne put réprimer le sourire quand Alexandre lui claqua un bisou sur la joue. Il laissa son regard se promener sur les toits de la ville, et par-delà les murailles de la ville. Il y avait une si belle vue, d'ici. Un oiseau pépiait tout près d'eux. Que voyaient les oiseaux, eux, de tout en haut ? Est-ce qu'ils étaient de tout petits points noirs, vus des nuages ?

Il bondit sur ses pieds pour être encore plus haut et ouvrit grand les bras pour prendre le vent. Avant de se rattraper à une branche pour éviter de basculer dans le vide.

-Tu aimerais pas être un oiseau ? En plus, en volant, tu aurais pas besoin de bras ou de jambes ! Ça doit être si bien !

Mais il fallait désormais passer au reste du jeu : les ordres. Un chacun, comme ils avaient gagné tous les deux. Mais Alexandre refusa sa part. Ysengrin aurait pu insister, mais il n'était pas du genre à refuser les propositions qu'on lui faisait. Surtout quand elles étaient en son avantage ! Se faire commander par un presque-bébé n'aurait pas été très bon pour son image, en plus ! Sans compter que se faire appeler commandant Ysengrin, c'était très drôle !

Il réfléchit quelques instants et repensa aux petites brioches dorés devant lesquelles il était passé en venant. Il en avait encore l'eau à la bouche. Il eut un sourire, en même temps que l'idée germait dans son esprit :

- Dis. Tu as faim ? Je sais où trouver de la brioche, on pourrait la partager et faire un pique-nique ?

Alexandre contemplait ce garçon qui se suspendait à la branche, tête à l'envers, sans savoir quoi penser à son sujet. Il était quand même étrange. Comment il pouvait décider de ne reprendre l'affaire familiale ? Quoique.. Il n'avait pas encore parlé de ça avec ses parents. Le pauvre... Il ne se rendait pas compte que c'était impossible. Les enfants devaient reprendre le commerce de leur père. Surtout si on était fils unique. C'était comme ça et pas autrement. Alexandre n'osa pas lui dire. Il serait assez triste quand il devrait comprendre la réalité de ce monde.

Au fond de lui, Alexandre était fier de sentir supérieur face à son ainé. Malgré leur différence d'âge, il savait plus de choses. Il aurait pu s'en vanter amis ça serait mal et pas gentil. Alors le petit garçon se contenta de sourire gentiment.

Après la longue ascension qui l'avait totalement épuisé, Alexandre s'assit sur une branche et observa Ysengrin qui contemplait le vol des oiseaux. Comme on voyait bien d'ici ! C'était encore mieux que depuis le clocher de l'église ! Il se tourna ensuite à la question de son ami.

"Voler dans le ciel comme les oiseaux.. Oui, ça doit être... beau. Et puis, on pourrait voler au-dessus de al mer. Tu sais que de l'autre côté, il y a de nombreuses terres avec des gens différents que nous ? J'aimerais bien les rencontrer !"

Il lui semblait avoir lu quelque chose sur le sujet et il s'obligea à fouiller as mémoire.

"Mais oui ! Il y a un italien, un peintre, qui a crée au début du siècle une machine qui permet de voler ! Il s'appelle euh... Léo... Ah mince, je me souviens plus son nom.. Léo... Léo... Euh peut-être Léopold ? Enfin, peu importe ! Il avait crée une machine qui fonctionnait sur la manière dont vole les oiseaux ! Si on étudie le sujet, on pourra peut-être en construire une nous aussi et voler ?"

L'esprit curieux d'Alexandre imagina déjà la conception d'une telle machine qui reproduirait le vol des oiseaux tandis que sa mémoire cherchait à se rappeler de connaissances sur le sujet qui ne revenaient pas. Ysengrin le sortit de ses pensées en lui demandant s'il avait faim et proposait de al brioche. L'appétit lui vint aussitôt.

"Miaaaam ! J'aime beaucoup les brioches Oh oui ! Et toutes les pâtisseries même !"

Il jeta cependant un regard au sol et devint un peu pâle.

"Mais... Il faut resdescendre alors ?"

C'était peut-être ce qu'il préférait. Monter en haut des arbres. Regarder les oiseaux et s'imaginer à quel point il devait être drôle de voir les villes, immenses vu d'en bas, simples petits points noirs dans le ciel. Les choses paraissaient tout de suite moins importantes...

Il se tourna vers Alexandre qui évoquait l'autre côté de la mer, et les peuplades différentes qui habitaient ses terres inconnues. De nombreuses personnes rêvaient de dépasser cet océan. Mais pourquoi ? Il fallait déjà connaître parfaitement son chez-soi, avant d'aller chez les autres, non ? Chercher le bonheur près de soi. Parce qu'il n'était pas loin : Ysengrin en était persuadé, du haut de ses douze ans.

- Léonard ? proposa-t-il avec un sourire amusé, tandis qu'Alexandre évoquait cette machine volante – dont ses parents lui avait déjà parlé.

Mais qu'importe les inventions. Il y avait une chose qui serait toujours plus importante : les bonnes brioches dorées qu'il avait vues en passant devant tout à l'heure. Et qui, en y repensant, serait de très bon goût pour patienter jusqu'à la fin de la messe.

Il pensa à sa mère qui devait guetter son retour dans l'église. Elle serait peut-être en colère ? Mais de toute manière, cela ne durait jamais très longtemps. Elle lui pardonnerait vite. Comme à chaque fois. Elle lui ferait promettre de ne pas recommencer, il prometterait, elle serait satisfaite et voilà. C'était toujours pareil.

En tout cas, il n'était pas le seul à se réjouir des brioches. Il eut un grand sourire. Il allait commencer à descendre quand la petite voix de son nouvel ami le coupa dans son élan :

- Mais... il faut redescendre, alors ?

Ysengrin hocha la tête. Alexandre n'en semblait pas enthousiaste. Il baissa les yeux vers le sol, regarda les branches puis se tourna vers le presque-bébé. Pour répondre :

- Si tu veux, tu peux venir sur mon dos pour redescendre ? Tu dois pas être très lourd ! Et puis, j'ai l'habitude d'aider les autres à descendre !

Il sourit, s'accrocha à une branche en attendant sa réponse.

- Alors ? Tu veux ? Personne pourra le savoir, regarde, il n'y a pas un chat !

Alexandre méditait longuement sur le vol des oiseaux et cette invention fabuleuse qui permettait de reproduire ce vol. Pouvait-on réellement fabriquer une pareille machine ? Un génie, oui. Mais deux petits enfants comme eux, ça serait sûrement impossible. Ils n'en savaient pas assez. Il tressaillit quand Ysengrin souffla un nom.

"Ah oui ! C'est Léonard, pas Léopold. Pardon."

Il baissa la tête, gêné. Si son père l'avait entendu, il l'aurait sûrement reçu un coup de ceinture. Pour le principe. Quand il apprenait quelque chose, il ne devait pas l'oublier. Papa répétait toujours ça. Sa morosité dira peu. dès l'instant où Ysengrin évoqua de bonnes brioches, l'enfant saliva déjà puis déchanta en réalisant que cela impliquait descendre.Cette idée le mettait mal à l'aise. Monter c'était pas si difficile. Mais à contempler le vide et descendre sans voir ça l'était plus. puis, ses muscles le faisaient trop mal. Comment il allait faire ? Son ami vint à son secours et Alexandre sourit aussitôt.

"Oh oui ! Oh oui ! Oui !"

Pendant le temps que dura la descendre, Alexandre enroula ses bras autour de la taille de son aîné et admira l'habilité du garçon à se mouvoir si facilement dans l'arbre. Une fois en bas, il garda ses bras autour de lui et fit un gros câlin affectueux à Ysengrin.

"Tu es trop gentil ! Je t'aime !"

Et il embrassa la joue de l'aîné, tout heureux, puis s'écarta.

"'Alors, elles sont où tes brioches ? On va les manger ? On va les manger ?"

Le jeune garçon trépignait d’impatience et aurait suivi n'importe où son camarade.

Ils redescendirent. Ysengrin le porta sur son dos, jusqu'à ce qu'il touche le sol. Là, il posa un genou à terre, pour qu'Alexandre puisse descendre, et récupérer ses béquilles, plus facilement.

Là, le presque-bébé le serra dans ses bras. Ysengrin lui tapota la tête, un peu maladroitement, en jetant un regard autour de lui. Fallait pas qu'on le voit ! Ce serait fort humiliant. Mais c'était quand même mignon, alors finalement, il le serra dans ses bras aussi.

Si Alexandre avait pu sautiller, il l'aurait certainement fait. En tout cas, il était impatient de pouvoir goûter les brioches.

- Elles sont pas loin ! dit-il.Suffit juste d'aller les chercher, viens !

Et il prit le chemin qui les mènerait à l'étal des petites brioches...

L'odeur de pain chaud envahit l'air quelques rues avant qu'ils arrivent. Cela suffit à lui mettre l'eau à la bouche. Ysengrin se cala dans un coin d'une ruelle, juste à l'entrée, et déclara en désignant l'étal, avec ses petits pains chauds, ses brioches dorées, ses viennoiseries fraîches... :

- Tu vois, c'est là ! Pas vrai qu'elles sont belles, hein ?

Il souriait déjà de la pensée de pouvoir sentir la pâte moelleuse fondre sur sa langue. Pouvoir la déchirer avec ses doigts, en faire des boulettes... Il se tourna à gauche, puis à droite. Les gens commençaient à le connaître, ici, un peu trop. On commençait à se méfier de lui, et à surveiller ses mains qui traînaient parfois trop près des marchandises.

Mais personne ne se méfirait d'Alexandre. Personne ne ferait attention à lui. Il se tourna finalement vers lui pour lui expliquer son plan :

- Voilà ce qu'on va faire : je vais faire diversion, d'accord ? et pendant ce temps, toi, tu passes à côté et tu en prends deux. Fastoche, non ?

Alexandre se lova contre son ami, tout heureux, quand il fut descendu de l'arbre et se réjouit encore plus quand il sentit Ysengrin l'enlacer lui aussi. Il n'"y avait que as maman pour lui faire des câlins mais c'était agréable aussi avec une autre personne.

Peu après, Ysengrin se détacha et l'entraina chercher les fameuses brioches. alléché, Alexandre le suivit en clopinant, les mains serrées autour de ses béquilles. Néanmoins, la pensée des friandises lui donnaient de la force. Il se déplaçait même beaucoup plus vite qu'à l'accoutumée, stimulé par les pâtisseries qui tomberaient bientôt dans sa bouche puis son estomac.

a son étonnement, Ysengrin s'arrêta au coin d'une ruelle puis lui désigna un étal où étaient exposées les fameuses brioches. Comme elles semblaient bonnes et leur odeur éveillait les papilles. Alexandre en salivait. Il sursauta cependant quand son ami lui donnait ses ordres et pâlit.

"Mais... Tu veux dire.. tu veux les voler ? Mais c'est pas bien de voler ! C'est très mal ! Si on est pris, on va nous mettre au pilori ! et on va avoir des coups de fouet !"

Il se souvint alors de leur décision au sommet de l'arbre. Il avait promis d’obéir à son commandant. Et si c'était un ordre ? Il demanda d'une petite voix :

"C'est... C'est un ordre, commandant Ysengrin ?"

Il n'aimait pas du tout son idée. Mais il avait promis et on ne revenait pas sur une promesse.

Alexandre n'était plus si enthousiaste que cela à l'idée de manger les brioches. Pourquoi ? Parce qu'il fallait les voler et que c'était mal ? Ysengrin ne voyait pas où était le problème. Il n'y avait pas de différence, ça restait des brioches et, volées ou non, elles auraient toujours le même goût ! Sauf que dans l'un des cas, elles seraient gratuites. Que du bénéfice.

Ysengrin haussa des épaules tandis que le presque-bébé lui opposait ses arguments d'une voix virulente. Que voulait-il faire ? Lui apprendre la vie ? Ça ne marchait pas comme ça !

- Bah quoi ? Tu voulais pas manger des brioches ?

Il ne dit rien de plus et regarda encore les brioches. Elles avaient vraiment l'air délicieuses. Si Alexandre ne voulait pas aller les voler, il irait le faire lui-même et tant pis pour le presque-bébé qui se priverait. Lui pourrait se régaler. Ce ne serait pas tout à fait une matinée perdue, avec ces bonnes viennoiseries dans le ventre, ça non !

Il se tourna à nouveau vers Alexandre et demanda :

- Tu as peur de te faire prendre, c'est ça ? Pourtant, t'es pas un bébé, et y'a que les bébés qui ont peur de ça ! Tu veux être un grand ?

Il eut un sourire amusé, tandis qu'Alexandre demandait soudain avec une petite voix :

- C'est ... c'est un ordre, Commandant Ysengrin ?

Ysengrin se redressa alors et se raidit, comme un vrai militaire, avant de répondre sans une hésitation — il n'était pas le genre à laisser passer une occasion comme celle-là :

- C'est un ordre, Soldat Alexandre !

Il fit une pause, pour ajouter finalement :

- Et puis, même si tu te fais prendre, je te défendrai, tu sais ! C'est le rôle des commandants de protéger ses soldats ! En plus, on les vole pas vraiment, on les prend juste sans autorisation !

Dissimulés dans leur ruelle, les deux enfants fixaient l'étal aux bonnes brioches qui sentaient si bons et Alexandre continuait à baisser la tête. Il n'aimait pas du tout cette idée. Maman ne serait pas contente. Mais s'il refusait, Ysengrin n'allait pas être content non plus. Et s'il ne voulait plus être son ami ? Alexandre ne le voulait pas. pas du tout. Il entendit alors l'aîné le traiter de bébé.

"Je suis pas un bébé ! C'est pas vrai !"

Malgré son embarras, Alexandre se força à gonfler la poitrine.

"Et puis, j'ai pas peur ! Pas peur du tout !"

Ce n'était absolument pas vrai. Alexandre était terrifié des conséquences qui résulterait de cette action. Les accusations du marchand, les dénonciations, le pilori, la déception de maman... Mais il n'avait pas le choix. Il ne pouvait pas laisser croire qu'il était un bébé.

Ysengrin confirmait d'ailleurs que le vol du pain était un ordre. Un ordre donné à un soldat. Il avait fait une promesse de lui obéir et devait s'"y tenir. Sinon c'était encore pire que voler. Bien pire.

"Bon... Alors, j'y vais."

Rassemblant son courage, Alexandre observa l'étal puis se décida à s'approcher tout de suite. Mieux valait ne pas perdre tout de suite sa résolution. Il en oubliait que l'aîné devait faire diversion. Il arriva devant la boulangère et sourit.

"Bonjour madame !"

La commerçante l'observa, intriguée par ce petit garçon en béquilles. Alexandre se décida à deviser pour l'occuper.

"Elles sentent très bons vos miches aujourd'hui ! Dites, j'ai lu que le pain était fait avec de la farine et des œufs, c'est vrai ? Et il faut le pétrir longtemps ? Je me demande si ça n'use pas les mains. Je peux voir vos mains ? J'aime beaucoup manger du pain. C'est très bon ! Mais vous avez déjà remarqué qu'il n'a jamais le même goût ? Comme si chaque boulanger avait dans ses mains une capacité spéciale qui le faisait un pain unique ! Comme un pouvoir magique ! Et dès fois, chez le même boulanger, selon les jours, le pain a aussi un goût différent. C'est étrange, non ?"

Grâce à son babillage, Alexandre espéra avoir suffisamment noyé la boulangère sous les détails. Les clients se pressaient devant l'étal et elle ne devait que peu faire attention à lui. Il se risqua ainsi à s'emparer de deux belles brioches pour les dissimuler sous sa tunique.

Lancer de dés : Quelles sont les conséquences du larcin ?

1 : Alexandre se fait prendre alors qu'il essaie d'embarquer les brioches.
2 : Alexandre met une brioche sous sa tunique et se fait prendre
3 : Alexandre réussit à mettre les deux brioches sous sa tunique et a déjà reculé quand on le remarque
4 : Alexandre n'a pas été vu car Ysengrin a couvert sa manœuvre.
5 : Alexandre réussit seul son vol sans se voir du tout
6 Alexandre a été vu depuis le début mais la boulangère était touchée par ce petit infirme et croit qu'il vole pour se nourrir et regarde ailleurs volontairement.

Le membre 'Alexandre' a effectué l'action suivante : Lancer de dés

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'Dé à 6 faces' :

Alexandre n'en revenait pas.

Pendant que la boulangère discutait avec l'un de ses clients, il avait réussi à prendre brioches de son étal et les mettre sous sa tunique. Personne ne lui disait rien. C'était donc si facile de voler ? Une sensation d'excitation l'envahissait et lui faisait oublier al peur et le danger. C'était amusant de désobéir aux règles finalement !

Tout fier de montrer son beau butin à son complice, Alexandre commença à reculer de quelques pas lorsqu'un homme se mit à crier.

"Ce gamin ! Il vient de voler sur votre étal, m'dame !"

Cette accusation fit perdre tous ses nerfs à Alexandre qui éclata aussitôt en sanglots.

"C'est pas moi ! C'est pas moi ! C'est pas moi !"

Son argument sur le bébé avait fonctionné. Trop facile. Parce que sitôt qu’il l’avait sous-entendu, Alexandre renchérissait en se défendant. Ysengrin fit mine de regarder ailleurs, avant de répondre :

- Vas-y, si tu as pas peur ! Qu’est-ce que tu attends ?

Une petite provocation, un petit ordre sous le couvert d’être Commandant Ysengrin, et le tour fut joué. Le presque-bébé sortit de la ruelle et se dirigea vers l’étal. De son côté, Ysengrin se prépara à faire diversion, comme il l’avait indiqué, mais… il n’en eut même pas besoin. Voilà que le petit infirme se mettait à papoter avec la vendeuse, pour occuper son attention ailleurs.

C’était astucieux comme méthode. Foi de voleur aguerri ! Ysengrin écouta son petit discours et s’il n’avait pas fait attention, lui-même n’aurait peut-être pas vu les mains d’Alexandre prendre les brioches et les glisser sous sa tunique.

Il fut peut-être trop précipité sur la fin ? ou pas assez discret ? Toujours fut-il qu’un homme s’exclama soudainement en le pointant du doigt :

- Ce gamin ! Il vient de voler sur votre étal, m’dame !

Aussitôt, le presque-bébé se décomposa et éclata en sanglots. En se mettant à scandait que ce n’était pas lui. Ysengrin fit la moue. Autant agiter les bras, l’objet du délit dans la main et hurler à la place entière : regardez-moi, je suis là, je viens de voler une brioche ! Il soupira. Ça avait pourtant bien commencé ! Dommage.

Il se décida à sortir de la ruelle. Se glissa au milieu de la foule. Il n’avait plus qu’à attirer l’attention sur lui, pour laisser à Alexandre le temps de partir. Il fallait juste espérer qu’il allait comprendre la chance qui s’ouvrait à lui. Et puis ! attirer l’attention, cela, Ysengrin savait faire !

Il passa devant un étal un peu plus bancal que les autres et, les mains dans les poches, donna un grand coup de pied dans l’un des piliers. Aussitôt, toutes les marchandises, des pommes et autres fruits, roulèrent sur les pavés sous les cris horrifiés du marchand. Il en profita pour faire semblant de tomber. Les regards se tournèrent vers la nouvelle scène, et en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il se retrouva au centre de l’attention. Il ferma les yeux et ne bougea plus.

Première étape, attirer l’attention.
Deuxième étape, faire le mort.

- Mes pommes ! disait le marchand, d’une voix désespérée.
- Mais on s’en fout de tes pommes ! renchérissait une femme, plus proche, et vigoureusement. Tu vois pas que le gosse s’est fait mal !

Quelques grommellements. On s’approcha. Un attroupement se forma. Ysengrin ouvrit tout juste un œil, qu’il referma aussitôt. Plus personne ne s’occupait du petit Alexandre.

Avant de répondre, Alexandre va-t-il comprendre que Ysengrin n'st pas réellement blessé et simule ? Ou alors va t-il décider de fuir sans en prendre compte ?

1 : Alexandre a terriblement peur des conséquences pour lui et fuit sans prêter attention à quoique ce soit quand l'opportunité se présente.
2 : Alexandre est paralysé par la peur de s'être fait remarqué et l’agitation.
3: Alexandre voit l'intervention de Ysengrin, a un doute sur la blessure mais décide de profiter.
4 : Alexandre a une longue hésitation sur la prétendue blessure de Ysengrin mais finit par s'éloigner.
5 : Alexandre ne comprend pas la ruse et croit son ami réellement blessé et accourt vers lui, désespéré.
6 : Alexandre se décide à partir mais il revient une fois avoir mis les brioches dans un coin, trop inquiet pour son ami.