[10 Décembre 1597] Une messagère de mauvaise humeur [Terminé]

Après la venue de ce maudit Alexandre, Cassandre n'avait pas su se rendormir, hanté par la requête que celui-ci lui avait faite. Quels étaient ses liens avec Eldred ? Pourquoi lui demandait-il son aide ? Eldred le détestait. Et Alexandre, aussi bête puisse-t-il être, devait l'avoir senti. A moins que des choses se soient passées sans qu'elle en sort informée. Elle ne sortait plus beaucoup  et le commerce de la Roza Azul ne permettait pas d'être à l'écoute des dernières nouvelles. Il y avait bien les courses au marché mais en ce moment, avec le froid qui montait, même les commères ne s'attardaient plus à bavarder.

L'hiver était une plaie. En tout.

Peu après le déjeuner, Cassandre avait quitté la Roza Azul avec son panier pour aller faire les courses au marché. Elle l'avait toutefois dissimulé dans un lieu sûr et filé ensuite vers le château de Frenn. Sous sa robe, elle gardait une brioche t un pot de confiture. Eldred serait content du cadeau. Et il pourrait la partager avec Aud ! la fillette arriva sur les lieux dans le milieu de la matinée et passa à l'écart des gardes pour s'introduire, comme à l'accoutumée, dans une brèche. Seul un enfant pouvait passer par là; Ces imbéciles de nobles, imbus de leur soi-disant importance, ne l'imaginaient pas. Quels naifs !

Une fois dans la cour, Cassandre se déplaça avec prudence. Il y avait cette fois un peu plus d'employés et d'esclave qui circulaient ici t là. Elle progressait lentement, de zone d'ombre en zone d'ombre, guettant le moindre bruit, prête à s'aplatir dans un recoin ou contre le sol. Elle réussit à gagner sans trop de difficulté l'écurie où Eldred et elle avaient fixé leurs rendez-vous quand Cassandre devait le trouver.

Elle n'avait plus qu'à attendre.

Durant ce laps de temps, Cassandre escalada un des box et caressa le cheval, un superbe alezan.

"Bonjour Vaillant !"

Il commençait à la connaitre quelques temps. Elle continua à le caresser puis lui donna quelques miettes de pain qu'elle avait gardé en débarrassant la table du petit-déjeuner. Sa mains'ouvrit bien grande pour laisser à l'animal la possibilité de les prendre sans lui faire mal.

"C'est bon, mon grand ?

Eldred avait fini de couper le bois qui irait alimenter les nombreuses cheminées du château. L’hiver s’était installé et avec lui la nécessité de se réchauffer n’était désormais plus une option. La demeure restait pourtant glaciale une fois éloigné des cheminées.

Le zakrotien était donc désormais disponible pour s’occuper des chevaux. Loin d’être une corvée c’était de loin sa mission favorite. Il appréciait le contact avec les chevaux qu'il trouvait apaisant. Et puis chacun avait sa propre personnalité.

Qui ne trouva-t-il pas accroché comme un petit écureuil sur la barrière du box ? Cassandre, la main sous le museau de Vaillant aspirant sans doute des miettes.

- Il a l’air d’apprécier répondit Eldred avec le sourire.

- Comment vas-tu ma petite Valkyrie ?

Il n’avait pas revu Cassandre depuis plusieurs jours. Il fallait dire qu’elle évitait de sortir depuis la fameuse lettre. Si elle était là, ce n’était donc pas uniquement pour le plaisir de venir lui rendre visite. Elle avait sans doute un message, une question ou une demande importante à formuler.

Il posa le seau et la fourche dans un coin avant de s’approcher de la fillette.

Vaillant semblait se régaler de ces quelques miettes que Cassandre de lui offrir. Elle caressait à présent le museau de l'animal lorsqu'une voix familière l’interpella. Elle sourit, ravie, et sauta de al barrière pour courir se jeter dans les bras de son ami. Les guerriers avaient le droit à la tendresse avait-il dit. Donc ils pouvaient tous deux se faire un câlin.

"Salut Eldred !"

Elle se recula ensuite et sortit sa brioche et un pot de confiture pour les tendre à Eldred.

"C'est pour toi ! Je l'ai faite avant-hier la brioche ! Et on en a mangé une hier ! Elle est très bonne ! Tu pourras la partager avec Aud ! Je suis sûre qu'elle serait contente !"

Mais assez perdu de temps. C'était le moment de parler de l'essentiel.

"Alexandre est venu cette nuit. Il m'a demandé de te faire passer un message : une certaine personne a besoin de ton aide."

Elle croisa les bras contre sa poitrine, la mine sévère, et se plaça devant Eldred pour l'empêcher de sortir. Pas question de partir avant d'avoir des réponses à toutes ces réponses.

"Tu vas m'expliquer, j'espère. Tu es ami avec Alexandre maintenant ? Vous vous passez des messages ? Ou c'est moi qui doit le faire entre vous ? J'aurais pu être au courant avant de me faire réveiller en pleine nuit ! Et c'est qui cette fameuse personne ? Je veux savoir, Eldred ! Je veux tout savoir !"

Cassandre quitta son promontoire pour venir se blottir dans les bras d’Eldred qui l’accueilli avec grand plaisir, lui embrassa même le front.
De ses poches, sa petite valkyrie sortit une belle brioche bien dorée ainsi qu’un pot de confiture.

- Merci beaucoup! répondit-il en lui frottant la tête affectueusement Je suis sûr que Aud sera ravie même si elle n’aime pas beaucoup cacher de la nourriture.

Et le sujet passa rapidement au motif de sa visite. Alexandre ?! Si Alexandre venait lui demander de l’aide c’était d’une part forcément concernant Alduis et d’autre part cela signifiait qu’il n’avait pas d’autres possibilités… Et ce n’était pas vraiment encourageant lorsqu’on connaissait le draugr.

-Ami avec Alexandre?! Ca ne risque pas d’arriver ! La dernière fois que je l’ai vu au port, il s’est mis à frapper de rage les pavés et à même tenter de m’envoyer une béquille à la figure

Au souvenir de cet épisode, un profond rire s’empara de lui.

- Tu ne le sauras que lorsque tu seras calme et sage, petite chipie répondit-il taquin.

Cassandre souriait, fière d'apporter de la bonze nourriture à ses amis. Eldred lui lui tapotait gentiment la tête en remerciement et ça lui faisait plaisir. Mais elle n'oubliait pas le plus important. Le fameux message.

A la mention du nom d'Alexandre, les yeux d'Eldred devinrent sérieux. Il semblait comprendre. Il y avait bien un lien entre eux. lequel ? Cassandre détestait vraiment ne pas savoir. C'était agaçant. Il confirmait cependant les deux esclaves ne seraient pas amis puis rapportait que le petit infirme aurait frappé les pavés de page au port avant d'essayer d'envoyer une de ses béquilles à Eldred. Ses sourcils se froncèrent. Ce n'était pas le genre d'Alexandre de s'énerver sans une bonne raison. A moins... Elle se rappelait d'une fameuse journée où il avait été très en colère. A cause d'une certaine personne lui ayant rendu visite. Une information que Eldred disposait. Elle soupira.

"Ne me dis pas, Eldred, que tu t'es moqué de son histoire avec Alduis de Fromart ?"

La fillette passa les mains sur les hanches, comme une mère qui sermonnerait son enfant fautif.

"Ce n'est pas bien de se moquer des histoires d'amour. C'est comme si tu te moquais de celle de grand frère et grande sœur ! C'est méchant ! Je n'aime ni Alexandre ni Alduis de Fromart mais je ne veux pas me moquer de leur histoire. C'est cruel. Tu voudrais que je me moque de ta femme, Eldred ?"

Elle eut quand même un sourire d'imaginer Alexandre essayer d'attaquer Eldred avec sa béquille.

"N'empêche... Il commence à se laisser pousser les couilles, Alexandre. Finalement l'amour, ça rend pas si idiot on dirait. Grand frère commence à être prudent... Et Alexandre, lui, apprend à tenir tête. "

La réplique de Eldred, accompagnée de son rire moqueur, l'agaça au plus haut point. Elle rétorqua sèchement, les mains toujours sur les hanches.

"Si je suis une chipie, tu ne dois pas être mieux que moi à te moquer des autres à partir de leurs faiblesses. Sur ce coup, moi, je dis que je suis plus sage que toi."

Cassandre commença à la sermonner sur ses moqueries sans lui laisser le temps d’en placer une. Il la jugea d’un œil sévère et croisa les bras contre son torse.

- Premièrement Cassandre, ma femme est morte.

Il marqua un temps afin de laisser retomber les effets de sa répartie.

- Deuxièmement, c’est bien mal me connaitre que de croire que je me moquerai de ce genre de chose. Taquiner oui. Mais je ne m’en moquerai pas encore moins pour humilier quelqu’un. Est-ce que c’est clair ?

Il avait parlé sans agressivité mais fermement. Il reprit d’un ton plus doux.

- D’ailleurs tu sais déjà de qui il s’agit. Alors ce n’est pas la peine d’en faire tout un pâté. Je me demande même comment tu as fait pour ne pas y penser ! Tu es plus perspicace que ça d’ordinnaire. C’est sans doute le réveil au milieu de la nuit. Mais crois-moi si Alexandre la fait, c’est qu’il ne pouvait vraiment pas faire différemment. Parce que je suis l’une des dernières personnes vers qu’il se tournerait…

Cassandre haussa les épaules au rappel de al femme d'Eldred;

"C'est pareil. On se moque pas des amours des gens. Qu'ils soient morts ou vivants. C'est pas bien. Et même juste taquiner, c'est pas bien. Sylvère... l aime pas quand je l'embête avec Kalisha. alors j'essaie de ne plus le faire. Ou de faire en sorte que de l'embêter que lui. Même si je fais ça pour lui, je dois aussi respecter les autres. Ou sinon Sylvère, il ne serait pas content de le savoir. Tu comprends ?"

C'était un peu embrouillé dans ses explications mais dans sa tête ça paraissait clair. Pourquoi les mots n’arrivaient à retranscrire les sentiments. C'était pénible.

La fillette eut ensuite un choc violent quand Eldred lui dit qu'elle connaissait déjà l'identité de la fameuse personne et lui rappelait que d'ordinaire elle se montrait plus perspicace. Son esprit eut du mal à comprendre. Il ne voulait pas admettre cette possibilité. Néanmoins, elle ne put se voiler plus longtemps et quand la réflexion se fit, le visage de l'enfant changer de colère.

"QUOI ?"

Elle fixa Eldred un instant, s'attendant un court instant à une plaisanterie. Mais non ! Il était variment sérieux.

"Tu as des relations avec ce draûg ? Eldred, tu as oublié ce qu'il m'a fait ? Tu te souviens que son couteau aurait pu m'ouvrir la gorge ? Tu t'en souviens ? Et en plus, ce draug, il a combattu à Zarkos ! Tu l'ignorais peut-être ? Eh bien, je l'ai appris en cherchant des informations à son sujet et il n'est pas réputé pour être tendre ! il a certainement massacré des centaines de tes frères d'arme ! Et toi, toi, tu noues des relations avec un gars comme ça ? Et quand on parlait de l'utiliser, tu me disais d'être prudente ! Et c'st toi finalement qui manque de prudence avec lui !"

Elle garda ses bras croisés, agacée.

"Même Sylvère ne ferait pas ça."

Eldred fronçait toujours les sourcils, le regard sombre. Etait-elle vraiment en train de lui faire la morale, elle ?! Cela ne lui plaisait pas mais alors pas du tout. Il prit cependant sur lui pour ne rien répondre car c’était manifestement inutile.

Sylvère par ci. Sylvère par là….

Il décida de reporter son attention sur l’identité de la personne mais il le regretta aussitôt. Ce ne fut qu’un déferlement de mauvaise humeur et ce matin-là, il n’en avait pas envie. Il savait parfaitement tout ce que Alduis avait fait ou non et bien plus encore. Si son étonnement était légitime, son agressivité n’avait aucunement lieu d’être et il n’appréciait guère son comportement envers lui. Il expira un bref soupir tandis qu'un hennissement dans son dos lui faisait écho.

- Il a payé pour ce qu’il t’a fait. L’affaire est close désormais. Je sais qu’il était à Zakros, je l’ai combattu là-bas. Et ce n’est pas parce qu’il était de l’autre côté qu’il n’est pas respectable pour autant. Alduis est un grand guerrier. Avec ses défauts comme ses qualités. Comme chacun de nous. Je te remercie de t’inquiéter pour moi mais je sais parfaitement ce que je fais avec lui.

Sa dernière pique acheva de l’agacer et il jeta le torchon qu’il tenait depuis le début rageusement au sol. Il n'avait aucun compte à lui rendre sur ses fréquentations jusqu'à preuve du contraire.

- Skítt! Tu sais quoi Cassandre ?! Si Sylvère est si parfait, tu n’as qu’à aller le voir plutôt que de me casser les burnes et de m’agresser !

Sans attendre de réponse, il fit volte-face, ramassa le seau à l’entrée et se dirigea d’un pas brusque vers le puits.

Cassandre faisait la moue, boudeuse.

Elle ne digérait pas que son ami ait pu se lier avec ce démon qui avait osé l’agresser. Et sans rien lui dire. Il aurait pu quand même faire un détour par la Roza Azul et trouver un moyen de lui apprendre. Elle n'aimait pas se retrouver devant un fait accompli. Ne pas savoir, ça l'effrayait. Et ça l'énervait. Elle avait l'impression de ne plus rien maîtriser. Or, le contrôle, c'était ce qui lui permettait de vivre sereinement. Ou à peu près sereinement.

La fillette restait boudeuse à l'énoncé que lui adressait Eldred pour se défendre. au fond, ça ne le concernait pas. Elle le savait. Mais elle détestait voir ses proches s'éloigner vers de nouvelles personnes. Elle redoutait qu'ils finissent par ne plus s’intéresser à elle. Elle avait un trop mauvais caractère pour qu'on s'attache bien longtemps à elle. Mais elle n'arrivait pas à le dire. Elle était trop fière. Trop engluée à retenir ces fichus sentiments. Alors, elle resta là à fixer Eldred, impassible.

Soudain, le coup du torchon violemment jeté à terre la fit sursauter.

Mais plus encore Eldred s'énervait.
Sauf qu'Eldred ne s'énervait jamais.
Eldred était toujours calme. Maître de ses nerfs.

Alors s'il s'énervait contre elle, c'était qu'il était très fâché contre elle.
Il... Il ne l'aimait ?
Il la détestait ?

Des larmes perlaient à ses yeux.
Cassandre n'arrivait pas à les retenir.
Elle ne voulait pas encore perdre une personne.
Pas encore.
Ses larmes coulaient à présent le long de ses joues.

"Eldred..."

Le nom de son ami sortit difficilement articulé de sa bouche.

"Eldred... tu m'aimes plus ?"

Sylvère aurait dit de s'excuser.
La pensée lui revenait au loin. Comme une mélodie qui résonnait dans le lointain. Son corps et son esprit s'étaient bloqués. Elle avait peur. Elle avait peur de perdre encore quelqu'un.

"Eldred !!!!"

Son cri brillait de désespoir.

Eldred en avait eu assez. Il n’était pas vraiment du genre sanguin. Loin de là. Mais se voir houspiller ainsi de bon matin… Le zakrotien était tolérant mais cela ne voulait pas dire qu’il se laissait marcher sur les pieds non plus. Cassandre avait dépassé les bornes et si elle n’avait rien de plus à lui dire excepté lui vanter les mérites de Sylvère et le pointait du doigt, il préférait de loin aller remplir les seaux au puits. Il avait essayé de lui expliquer la situation mais de tout évidence, elle ne voulait pas écouter alors à quoi bon parler avec quelqu’un qui n’écoutait pas ?

Il entendit vaguement son nom mais ne se retourna pas. Il se contenta de relâcher un profond soupir pour extérioriser les tensions accumulées

- Eldred... tu m'aimes plus ?

Eldred s’immobilisa et soupira à nouveau.

- Eldred!!!

Sa voix… Il se retourna aussitôt pour la découvrir en larmes. Il combla la distance en quelques enjambées et se précipita pour la serrer dans ses bras.

- Mais bien sur que je t’aime toujours, ma petite valkyrie !

Il embrassa le sommet de son crane et caressa lentement ses cheveux.

- C’est pas parce qu’on se dispute que je ne t’aime plus d’accord ? Mais tu ne peux pas venir juger, ni interférer dans ma vie. C’est d’accord ? Tu dois me faire confiance. Si je fais quelque chose c’est qu’il y a une raison. Il y a des choses qui nous rapproche Alduis et moi mais ça ne  veut pas dire que je déconseille désormais d’être prudente avec lui. C’est juste qu’il y a un statut quo entre nous.

Il se recula un peu pour croiser son regard et ajouta

- Tu comprends ?

Cassandre se notait dans ces larmes qui coulaient sans vouloir s'arrêter.
Elle ne voulait pas perdre quelqu'un.
Elle ne voulait pas les voir s'éloigner.
Elle voulait les garder pour elle.
Qu'est-ce qui n'allait pas chez elle ?
Elle ne comprenait plus. Comme elle ne comprenait pas Alexandre. Comme elle commençait à ne plus Eldred. Ou même d'autres personnes.
Elle ne comprenait pas et ça l'énervait. Et après, la colère, ça la rendait triste et déprimée. Pourquoi ne pouvait-on pas s'arracher le cœur ? Ne plus ressentir ces émotions fatigantes, ce serait tellement plus simple. Plus reposant.

Eldred la prit soudain dans ses bras et l'embrassa.

Il... Il l'aimait encore ? Malgré la colère ?

Elle releva la tête, les yeux humides, et le fixa en train d'essayer de lui expliquer sa relation avec Alduis. Elle fit la moue.


"Non, je comprends pas. Pourquoi toi tu pourrais le fréquenter et que moi ça reste dangereux ? C'est parce que.. je suis une enfant ? Mais c'est pas juste !"

Elle s'écarta et sortit sa dague d'un pan de sa robe. La fillette fit mine de se défendre, d'un geste sûr.

"Moi aussi, je sais me battre et me défendre ! Comme tu m'as appris ! J'ai pas peur de Alduis de Fromart, ni de personne !"

Eldred observa Cassandre faire la moue à ses explications tout en se disant que Dame Irène avait décidément bien du courage pour la supporter à longueur de journée en étant enceinte…

- Cela n'a rien à voir avec ton âge mais avec ton attitude ! Alduis est trop instable pour être fréquenté par quelqu'un qui ne maîtrise pas ses émotions. Il est comme de l’argile qui prendrait forme en fonction de la personne. Si tu es agressive comme ce la avec lui, tu n'en retiras rien de bon. C'est tout.

Sur ce Cassandre sortit son poignard et commença à taillader l'air. Agacé, Eldred lui saisit le poignet qu’il fit pivoter pour récupérer l'arme.

- Ca suffit maintenant Cassandre ! Les armes ne sont pas un jouet ! Si tu ne veux pas être prise pour une enfant alors conduis-toi en adulte !   il la jaugea sévèrement avant de reprendre Eh bien tu devrais. Il est dangereux. Et tu devrais toujours avoir peur. L’orgueil te mettra un pied dans la tombe. C’est ça que tu veux ?!

Sa voix était sans appel. Il gardait toujours le couteau en main et ne lui rendrait pas avant d’être sûr que le message soit bien passé. Une arme pouvait bien facilement se retourner contre son possesseur….

Eldred était en colère et lui faisait la leçon. Ce n'était pas bon de tenir tête aux adultes. Ils n'aiment pas ça. Cassandre s'obligea à baisser les yeux et à simuler d'être désolée. Cette stratégie fonctionnait toujours très bien. Elle écouta péniblement la leçon en se retenant de ne pas répondre. Mais intérieurement elle savait qu'elle avait très bien géré avec Alduis de Fromart. Elle ne l'avait pas sous-estimé et il était à distance d'ell. Elle savait maîtriser le danger.

Elle se vit retirer son arme et l'enfant grimaça aussitôt, déçue de pas avoir su la garder. En même temps, face à Eldred, c'était normal. C'était un grand guerrier. Il avait maté des adversaires bien plus coriaces qu'une fillette. Elle n'avait aucune honte à avoir.

Le sermon qui se poursuivait lui faisait grincer des dents. Elle contint son air désolé. Ne pas montrer d'insolence. Si Eldred ne lui rendrait jamais sa dague. Certes, elle pourrait toujours réussir à en emprunter une autre quelque part. Ce n'était pas si difficile. Elle connaissait quelques soldats qui cuvaient régulièrement leur vin dans des ruelles désertes auxquels il se révélait facile de subtiliser des affaires. La dernière fois, en plus de ce beau couteau, Cassandre avait dérobé un crouton de pain et une belle étoffe. Techniquement cela semblait être du vol. Mais un soldat, ça ne comptait pas les règles. Eux, ils passaient leur temps à embêter les gens, surtout les mendiants et les enfants sans ressources. Alors, ils méritaient de se faire voler. C'était pas comme Sylvère qui détroussaient des honnêtes travailleurs pour ces fameux impôts. Néanmoins, ça restait quand même pénible comme idée de devoir se chercher une nouvelle arme alors que la sienne était dans les mains d'Eldred. Ca méritait bien quelques efforts.

Cassandre continua ainsi à baisser la tête et à simuler la repentance tout en écoutant le long sermon qui se poursuivait. Que c'était pénible ! Il avait prévu de parler encore longtemps ?

"Oui, je sais que c'est pas un jouet. C'était juste pour te montrer. Je sais. C'était stupide. Je suis désolée."

Elle murmura ces phrases d'une toute petite voix, teintée d'une intonation de repentir. Toute cette scène n'était que de l'hypocrisie mais c'était justement dans l'hypocrisie qu'elle se révélait la meilleure. Ses années au Lupanar le lui avaient bien appris. On pouvait tout obtenir des gens si on savait les flattait correctement et leur faire entende ce que ceux-ci voulaient entendre.

"Et je sais, oui que Alduis de Fromart est dangereux. C'est pour ça que je ne levois plus. Je l'ai introduit à qui tu sais et ils peuvent réaliser ce que tu sais ensemble. Je m'occupe plus d'eux."

Cassandre s'autorisa à relever la tête et esquissa un petit sourire, teintée d'une fausse innoncence.

"Je ne sors même plus de la maison. Sauf pour aller au marché. Je vais même plus voir Sylvère. Tu vois ? Je suis sage et responsable."

Son regard fixait Eldred. Elle s'obligeait à ne surtout pas regarder la dague entre ses mains. Ou il risquait de comprendre ses véritables motivations. Pourvu qu'il lui rendre son arme ! Pourvu que ça s'arrête vite ce maudit sermon !

Dé pour savoir ce que Eldred pense du talent d'actrice de Cassandre

1-10 il se fait berner
11-20 il doute de sa sincérité
21-35 il sait qu'elle ment mais préfère ne pas relever
36-65 il lui fait remarquer avec humour
66-80 il lui fait la moral
81-100 il est fortement agacé par son comportement

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'Dé 100' : 63

Eldred écoutait Cassandre se justifier et faire pénitence de son comportement. En apparence du moins. Car il n’était pas dupe de son petit jeu. Cela aurait sans doute dû l'agacer mais à vrai dire il trouvait ça presque amusant qu'elle puisse s’imaginer le berner aussi facilement. Ce qui lui donna une  idée… Après tout, lui aussi pouvait bien jouer la comédie. Alors il entra dans son jeu et ses sourcils fronçaient, se détendirent peu à peu au fil de ses excuses. Même ses bras jusque là croisés sur sa poitrine finirent par reprendre leur place naturelle le long de leur corps. Tout tension semblait s’évader du corps du guerrier. Il acquiesça même une ou deux fois à certains de ses propos jusqu’à ce que la conclusion arrive.

- En effet Cassandre. Je suis désolé de m’être ainsi emporté. C’était sans doute un peu exagéré de ma part… Mais c'est que je tiens à toi et à ta sécurité tu comprends ? répondit-il d'un sourire bienveillant.

Il fit pivoter la dague dans sa main pour la prendre par la pointe et la lui tendre en guise de paix. Mais au dernier moment, il esquiva la main de la fillette et lui asséna un coup sur le crâne à l'aide de la poignée.

- Tu me prends vraiment pour un pigeon Cassandre ?

Et il rangea la dague à sa ceinture. Elle n’avait quand même pas cru qu'elle apprendrait au vieux singe à faire la grimace.

- Je suis franchement vexé de voir que tu oses me mentir de la sorte. Si tu n'as rien de mieux à me dire, j'ai autre chose à faire que de jouer avec une enfant.

Oh oui, cela la piquerait sûrement à vif d'entendre ces derniers mots mais si cela pouvait la faire réfléchir alors tant mieux et sinon elle y songerait plus tard et lui irait donner à boire aux chevaux.

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'Dé 100' : 2

Cassandre observait Eldred avec prudence et n'était pas assurée que son petit jeu fonctionne. Ce n'était pas un noble ou un commerçant à qui on pouvait croire toutes sortes de salades. mais savait-on jamais ? Cela pouvait fonctionner. Si on ne tentait pas, on on ne risquait pas d'avoir quelque chose. Elle accueillit avec surprise le guerrier se détendre à ses prises de paroles et opiner de la tête, toujours cependant sans rien en montrer.

La fillette réprima un sourire de triomphe. Une puissante satisfaction monter elle. Elle devait trop forte à ce jeu et pouvait endormir n'importe quel ennemi. Même un ami ! L'orgueil lui faisait oublier la prudence.

Dès l'instant où Eldred tendait sa belle dague pour la lui rendre, Cassandre tendit la main. Sa méfiance s'était évanouie. Elle s'apprêta à refermer sa poigne sur le manche quand celui-ci se déroba. Un coup vint ensuite et tapa son crâne. Surprise, la fillette bascula en arrière et contempla le guerrier, hagarde.

Elle baissa la tête, humiliée, honteuse d'avoir baissé aussi bêtement sa garde. Ses poings se serraient contre al paille qui recouvrait le sol de l'écurie. Elle enrageait. Comme elle-même. Contre sa faiblesse. Elle ne dissimulait plus rien de ses émotions. Son visage dévoilait sa colère, son amertume et sa frustration.

Elle écoutait à peine la reprise du sermon. Elle enrageait. Seule la dernière phrase la heurta violemment et elle releva la tête, furieuse.

"Je ne suis plus enfant ! Les enfants, eux, ils crèvent dans la rue ! De faim et de froid ! Eh oui, e mens ! Et alors ? C'est comme ça que j'ai toujours survécu ! Les adultes, ils ne considèrent jamais que je peux simuler. Un petit sourire, petit air malheureux.. ils gobent tout ! C'est quoi le problème à ça ? C'est grâce à ça que j'ai pu survivre, moi ! Tu aurais préféré que je meurs de faim ?"

La colère la rendait plus mauvaise que jamais. elle avait envie de faire mal. très mal.

"Tu sais, ton maître, lui aussi, il a mangé dans ma main ! L'autre jour, au marché, quand j'ai donné des tartines à Aud, je lui ai fait croire que je ne savais que c'était interdit, que j'avais mal agi... Tu vois pas, Eldred ? c'est comme ça qu'il marche le monde ! Tu dis de belles paroles et ceux qui t'écoutent, ils sont contents, ils cherchent pas plus loin !"

Elle ne récupérerait pas sa dague.
Elle en avait conscience.
Tout était allé trop loin.
Tant pis !
De toute manière, elle était désormais trop en colère pour se contenir.

Loin de s'apaiser et de reconnaître ses torts, Cassandre, sans doute outrée de s’être fait berner fulminait. Eldred avait quant à lui retrouver un calme relatif. Il n’était pas particulièrement en colère, simplement excédé de son comportement qui n’avait pas lieu d’être. Il se contenta de maintenir son visage fermé et reprit la parole posément mais sans la moindre douceur.

- Parce que tu te sens menacée face à moi ? Je mets à mal ta survie peut-être ? Dis-moi tu mens aussi à Sylvère ? A Dame Irène ? A Hyriel ? Ou tu ne mens qu’à moi ?

Eldred pointa du doigt -ou plutôt de ses mots- ses incohérences. Il était hors de question qu'il ne laisse passer cela. Mentir pour survivre oui. Mentir parce  qu’on le devait oui. Lui-même mentait chaque jour en se rendant pieusement aux offices de Frenn tandis qu’il priait ses dieux dans la sécurité de ses pensées. Mais c’était là une question de survie justement. Il n'avait pas envie de finir rôti. En revanche mentir à sa famille et surtout mentir pour mettre fin à une situation désagréable c’était mal.

- Tu veux que je te dise ? Quand tu mens à ta famille comme tu le fais actuellement pour ne pas assumer  et bien tu ne vaux pas mieux que tous ces nobles que tu détestes. Tu es une hypocrite, Cassandre. Tu n'auras qu’à demander à Sylvère de te l’écrire sur le front pour te le rentrer dans ta petite tête.

Eldred ramassa ses deux seaux et plongea intensément son regard sombre dans le sien.

- Tu as peur de perdre les gens que tu aimes ? Et bien continue comme ça parce que c'est exactement ce qu’il faut faire pour les faire fuir.

Cassandre continuait de serrer les poings contre la paille. Elle étouffait de colère de s'être faite manipuler. On ne pouvait même pas se fier en ses amis. Eux aussi vous trahissaient. Voilà une excellente à retenir de cette scène pitoyable : n'avoir confiance en personne. Absolument personne. Pas même en celui qui paraissait gentil.

Eldred fermait son visage et elle fit aussitôt de même. Pas question de montrer davantage ses faiblesses. Elle gaussa les épaules à la première question.

"C'était la stratégie qui paraissait la plus logique pour reprendre mon bien. Mais tu peux la garder. J'en trouverai une encore mieux."

Elle hocha ensuite la tête aux interrogations sur Sylvère et Dame Irène.

"S'il le faut, oui. Pur les protéger. Ils sont optimistes. Ils ne comprennent pas bien ce monde et ces dangers. Et puis, ils n'ont pas besoin de le savoir. C'est mieux d'être insouciant. Au moins, ils le vivent mieux. ils sont heureux. Alors que quand tu sais... "

Son corps se mit à cet instant tremblant. Son esprit était incapable de masquer les angoisses que certaines situations lui avaient fait connaitre et qui persistaient à la ronger aujourd'hui encore. Sa tête était en réalité un océan de ténèbres. Un océan qui menaçait chaque fois de la submerger et de l'engloutir chaque fois que la fillette perdait le contrôle de ses pensées.

"Quand tu sais... Quand tu sais, c'est te noyer tous les jours n haute mer. ils ont pas à connaitre ça eux. Non. Alors c'est mieux de leur mentir. Pour pas qu'ils s'inquiète si je dois faire des choses dangereuses."

Elle se mordit brusquement les lèvres, gênée par l'apparition du nom d'Hyriel dans la conversation.

"Hyriel... Hyriel, c'est pas pareil. Hyriel.. Il m'a sauvé la vie. Il m'a vu au pire moment. Il va vu travailler au Lupanar. il sait. alors, pourquoi je lui mentirais ? Il sait déjà tout. Et puis, lui, il me juge pas. Il me laisse tranquille."

Eldred reprit la parole après ces explications et Cassandre se figea quand le guerrier résuma son attitude à un mot. Hypocrisie. Hypocrite. La fillette resta quelques minutes immobile, tétanisée. Le terme la rebutait, surtout quand Eldred la comparais à tous ces nobles. Elle... leur ressemblait ? La comparaison al mettait mal à l'aise. Mais se remettre en question, songer à changer lui était encore pénible.

"Je... Eh bien, tant pis, si c'est hypocrite. au moins, je peux protéger les gens comme ça. "

Cassandre n'était pas convaincue de propres ses mots mais son esprit se révélait trop perdu pour être capable de mieux raisonner. il se raccrochait à ce qu'il connaissait.

Eldred ne l'épargnait pas.
Il renchérissait et lui parlait de sa peur viscérale et s'en servait pour lui signifier que ses mensonges lui feraient perdre ses proches. il avait peut-être raison. Le doute s'insinuait en elle mais elle n'arrivait pas à laisser percer cette petite voix qui tentait de percer vers sa raison. une bataille s'engageait dans son esprit et commençait à lui donner mal au crâne. Elle grimaça.

'"Je.. Je.. c'est peut-être mieux comme ça. Si tu n'as plus de gens, tu n'as plus personnes à protéger. Et ça ne fera plus mal."

Sa main se porta en même temps à sa poitrine. Elle en avait assez de cette douleur qui la mordait chaque fois qu'elle s’inquiétait pour quelqu'un. Si on brisait les liens volontairement, est-ce que ça cessait de faire mal ? Ce serait tentant Si tentant...

La stratégie la plus logique ?! Eldred se passa une main sur le visage en entendant ses paroles. Il ne s’agissait pas de « stratégies », simplement d’être honnête. D’ailleurs, il n’avait même pas compté la confisquer indéfiniment.
A la réponse à ses interrogations, le zakrotien soupira et ferma brièvement ses paupières ? Pour les protéger ?! Mais qui lui avait donc mis cette idée absurde en tête ? C’était vraiment les prendre pour plus naïfs qu’ils étaient. Sylvère y compris. Il avait beau paraitre enfantin, il était bien plus sérieux qu’il ne le laissait paraitre. C’était s’arrêter à l’épiderme superficiel que de penser ce genre de choses. Si c’était acceptable pour certaine personne, Cassandre valait bien mieux que cela.

Au moins la suite de ses paroles, aussi dures soient-elles eurent pour effet de la faire réagir et penser. La vérité n’était pas toujours bonne à entendre, mais Eldred n’avait pas pour habitude de la dissimuler. Comment aurait-il pu se permettre de critiquer et de cracher sur l’hypocrisie générale sinon ? Non. Il fallait avoir des principes et s’y tenir. S’il n’avait pas de principes alors il valait moins que ceux qu’ils détestaient.

A sa dernière remarque, il secoua la tête. Elle n’avait rien compris. Rien du tout. L’homme n’était pas fait pour vivre seul. Parfois quand il l’écoutait, il avait l’impression d’entendre Alduis. Qu’est-ce qu’ils avaient tous à penser que l’amour et l’attachement rendait faible, putain de pisse de troll !

Il extirpa la lame de sa ceinture et la lui tendit.

- Prend-là et plante là dans la buche là-bas. De toutes tes forces.

Son ton ne souffrait d’aucune échappatoire possible. Il l’observa faire avec attention.

- Retire-là et recommence.

Avec Alduis, il se serait contenté de se battre…

- Encore.

... Jusqu’à ce qu’il ait vomi toute sa rage…

- Encore.

… Mais avec Cassandre, ce n’était pas possible…

- Encore.

… Elle n’avait pas son niveau…

- Encore.
… Elle était trop jeune…

- Encore.
… Mais frapper le rondin…

- Encore.

… Aurait sans doute le même effet…

- Encore une fois.

Cassandre semblait se fatiguer et il tenta de reprendre le contact, plus posément.

- Bien. Tu es calmée? On peut parler entre adultes maintenant ?

Il attendit d’avoir sa validation et la prit dans ses bras.

- Les principes c’est important. C’est ce qui fait de nous des êtres civilisés et non des barbares. il nota l’ironie de sa phrase et ne put s’empêcher de sourire Et il y a des principes important : comme celui de ne pas mentir à sa famille. Parce que si tu leur mens, tu ne leur fais pas confiance. Et la confiance Cassandre, c’est à double sens. Pour construire, une belle maison, il faut de solides fondations. Tu comprends ?

Il la berça lentement dans ses bras en caressant ses cheveux
- Le passé tu dois le laisser où il est. Tu es en sécurité en maintenant et c’est tout ce qui compte, d’accord ? Ca ne t’arrive plus. Tu ne souffriras plus de faim ou de froid. C’est terminé, tu m’entends ?

Cassandre respirait difficilement, hantée par toutes ces ombres qui semblaient décidées à l'avaler. Son corps tremblait de plus en plus. Etre forte, ne pas montrer ses faiblesses... Elle n'arrivait plus à se raccrocher à ces principes. Elle craquait. Elle se noyait. L'océan sombre revenait et cette fois allait peut-être réellement l'avaler.

Soudain à sa surprise, Eldred lui rendit sa précieuse dague et lui ordonna d'aller la, planter dans une bûche à quelques mètres de là. Elle le contempla quelques instants, ne comprenant pas la motivation de cet ordre, mais il se révélait trop tentant. Elle bouillait d'envie de al réduire en copeaux cette bûches ! La fillette se saisit fermement de l'arme et l'abattit avec violence dans le bois. Sans entendre réellement les indications du guerrier, elle la déplanta et al planta. Encore et encore. Avec rage. Avec colère. Tous ses démons étaient frappés en même temps que cette malheureuse bûche.

Après un certain temps, Cassandre s'écroula à genoux, vidée, la main toujours serrée autour de la garde de la dague. Elle respirait à nouveau difficilement, mais d'essoufflement. La colère semblait être passée. Elle ne savait plus quoi ce qu'elle ressentait en vérité. Ses pensées semblaient s'être enfin éteintes.

Eldred la prit soudain entre ses bras et lui parla à nouveau de principes. Que cela permettait de construire une maison avec des fondements solides. Cela semblait juste. Elle commençait à se laisser happer par sa voix puis son esprit se déroba quand il essaya de lui faire comprendre qu'elle n'aurait plus faim, qu'elle serait maintenant en sécurité. Son corps se raidit aussitôt. Elle paniqua.

"Non !"

Sa respiration s'emballa à nouveau.

"Dame Irène... Elle... est enceinte. Elle va avoir un autre enfant. Et elle... Elle ne se repose pas. Elle se fatigue. Comme... Comme maman. maman ne se reposait jamais lors de sa dernière grossesse. Elle était toujours debout. A s'occuper de quelque chose. Et maman.. maman est morte. Agathe aussi... Agathe a repris son rôle et s'épuisait. Je ne veux pas que Dame Irène meure ! Mais.. mais si elle continue comme ça... Et ses enfants, et moi... Elle dit que ses frères vont s'occuper d'eux. Et de moi. Mais elle se trompe. Mon papa.. Mon papa elle a essayé d'écrire à ses sœurs pour qu'elle vienne me chercher. mais personne n'est venu. elles nous ont laissé seuls. Ca va recommencer. Je le sais. Les bonnes choses ne durent jamais. Les mauvaises reviennent toujours. Toujours."

Eldred berçait la fillette entre ses larges bras tout en lui expliquant que l’on ne pouvait pas mentir ainsi à sa famille qui plus était dans ce genre de circonstances qui ne l’imposaient pas. Elle semblait se détendre petit à petit jusqu’à ce qu’il évoque la faim et le froid. Il la sentit se raidir et la plaqua encore plus fort entre ses bras.

- Le passé ne se répète pas toujours et heureusement ! Tu ne peux pas avancer en regardant les ombres que tu traines derrière toi. Non seulement tu vas finir par te prendre un arbre ou tomber mais en plus tu piétines les jolies fleurs sans même les remarquer ! Les mauvaises choses reviennent toujours, comme les nuages et la pluie. Mais tu peux aussi voir les choses différemment : le soleil revient toujours un jour et l’autre. Et tu sais quoi ? Mieux que ça : pour voir de beaux arc-en-ciel, il faut avoir contempler la pluie.

Il avait parfois l’impression d’entendre Alduis parler. Les mots n’étaient certes pas les mêmes mais le fond était similaire. Et pourtant, Cassandre, elle, était bien entourée, contrairement à Alduis qui n’avait guère qu’Alexandre et lui-même.
Il caressa ses cheveux et embrassa le sommet de son crâne.

- Et même si ça tourne mal. Ta situation est différente. Tu as plein de personnes sur qui compter désormais : Sylvère et sa Reine, Hyriel et moi-même. Il y a toujours une solution tu sais. Tu ne seras plus jamais seule désormais c’est fini. Et même si tu dois venir à Frenn en temps qu’esclave et bien tu n’auras plus ni froid, ni faim. Et tu seras en sécurité. C’est compris ?

Cassandre avait du mal à s'apaiser malgré les caresses et les paroles que Eldred essayait de lui témoigner. Elle avait du mal à se sortir de ces ombres qui la paralysaient. Elle poussa un faible soupir.

"Ce sont des mots, tout ça. C'est beau, c'est joli... Mais dans la réalité ça existe vraiment ? Je... Je ne peux pas y croire. Même Zita.. Même Zita, après toutes les brimades qu'elle a subi, quand on l'a reconnu pour ses mérites, que ça aurait pu aller enfin, là elle est tombée malade et est morte."

Eldred tentait de lui parler de as situation, que même s'il arrivait de mauvaises choses à sa nouvelle afmile, elle ne serait pas seule. Elle baissa la tête.

"Sylvère m'a promis que s'il arrivait quelque chose à Irène, il me prendra dans sa forêt. Mais.. Il a d'autres choses à gérer en ce moment. Je ne peux rajouter une charge de plus. Pareil pour Kalisha et Hyriel. Ils ont suffisamment d'ennuis. Pas la peine d'en ajouter avec moi. Et Frenn.. Tu crois que ton maître voudrait de moi ? Alexandre lui a dit que j'étais une mauvaise gamine, qui faisait de mauvaises choses... Lui, il est honnête, moral.. Il ne voudra jamais de moi."

Cassandre se décida à s'échapper des bras d'Eldred et s'approcha de la porte.

"Je devrais y aller. Il faut que j'aille au marché. Je t'ai assez dérangé."