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[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé]

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Message par Augustin Carpentier Dim 15 Nov - 22:34

Il était une fois... Le septième jour de décembre de l'an de grâce 1597, un quidam aux longues jambes d'échassier campait dans un coin sombre de l'auberge, un gobelet de céramique serré entre ses mains, un vin chaud léger pour se donner du courage, dans cet emplacement pourtant bienheureusement épargné par les courants d'air. C'était ce genre d'homme qui laisse volontiers tomber son regard entre ses sabots ou au fond de son verre, et c'est ce qu'il faisait en ce moment. Il réfléchissait et ses lèvres formaient des mots indistincts. Etre ou ne pas être ? Enfin, ce n'était pas ce qu'il disait réellement, mais cette formule aurait pu résumer son questionnement intérieur.

Qui serait-il ici ? Eh bien, d'abord il serait un natif du pays, ce serait plus simple de cette façon. Mais il serait aussi originaire d'un village lointain, que personne ne connaîtrait. Il serait issu d'une brave famille chrétienne, respectable et sans histoires, modeste mais libre et bien élevée. Mais ce serait une famille totalement disparue. Si quelqu'un prétendait être cousin d'un Augustin Carpentier qui était bâtisseur, il lui rétorquerait que c'était probablement un autre du même nom. Il serait suffisamment érudit pour accomplir son métier sans coup férir mais suffisamment terre-à-terre pour mener ses manoeuvres en leur parlant leur langage.

Il resterait celui qu'il avait été depuis l'an passé. Ça lui réussissait bien. Restait à trouver quelqu'un qui aurait besoin d'un petit travail de construction, et les manoeuvres en question pour suivre ses ordres sur place. De ceux-là, il n'en manquait jamais. Il avait fait passer le mot par l'aubergiste, que tout ce qui cherchait de l'ouvrage et savait suivre des instructions vienne à sa table et s'adresse à lui. Pour l'heure, ce n'était pas encore un succès triomphant. Il y avait pas mal d'infirmes dans cette ville... Enfin, il pouvait trouver des tâches pour des infirmes, mais ça l'étonnait tout de même. Il avait sans doute passé trop de temps sur les routes de la campagne isolée, où ces pauvres hères seraient morts de faim.

Avec une grimace, il songea soudain qu'il suffirait d'un accident de chantier pour qu'il rejoigne leurs rangs, si toutefois il survivait. Ce métier-là était plus dangereux que de nourrir des chevaux, des chiens ou des porcs, de monter la garde sous la pluie froide tandis que Monsieur troussait de la ribaude en cachette, ou autres tâches plus ou moins glorieuses qui lui avaient été confiées durant ses précédentes errances.

Il ferait peut-être bien d'aller prier un peu. Quel était le saint patron de sa profession, déjà ? Il valait mieux que ce genre de question soit bien claire dans son esprit, car on lui ferait sans doute tôt ou tard une plaisanterie innocente sur le sujet. Il le savait, bien sûr, il l'avait sur le bout de la langue... Ah ! Saint Thomas. Tant mieux, il l'aimait bien celui-là. S'il avait dû être un apôtre, c'est clair qu'il aurait été le pragmatique qui réclame des preuves pour les déclarations excessives et des explications concrètes pour les miracles. L'homme s'enroula plus étroitement dans son vêtement, un long manteau sans forme et sans couleur qui portait encore la poussière de la route. A bien y regarder, on aurait pu remarquer qu'il était approprié pour une stature moins maigre que la sienne.

Il avait une explication pour cela aussi, au besoin. A priori, tout était calculé et il pouvait presque se permettre de se sentir en sécurité.
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Message par Thierry d'Anjou Dim 15 Nov - 23:42

Thierry avait passé une journée épouvantable. Il était déjà pénible de répéter plusieurs fois dans un même jour une messe ennuyeuse et d'écouter les jérémiades des fidèles venus le trouver en confession sous prétexte d'un prétendu grave péché mais cela s'avérait encore pire de ne rien faire du tout. Depuis son retour dans la capitale, deux soirs plus tôt, les gens ne revenaient pas à son église, ayant pris des habitudes ailles. Combien allait-il mijoter dans l'édifice, seul, à les attendre ? Ce devenait terriblement agaçant. Comble du malheur, avec ces fichus soldats qui lui collaient a train à la moindre sortie, il ne se trouvait même plus libre de ses faits et gestes.

Quelle plaie !

Le prêtre s'était finalement rappelé qu'il avait un presbytère à faire reconstruire. Avec tous ces enchaînements judiciaries, que ce soit les siens ou ceux de son fils, les dégâts de l'incendie lui étaient sortis de la tête. Thiery avait commencé à se renseigner pour recruter un architecte qui débuterait les travaux rapidement. Le lit que son excellent ami, le ministre des affaires étrangères Coldris, lui avait fait parvenir été d'u grand confort mais il aspirait à retrouver une demeure à lui. En discutant sur le parvis avec des gens de passage, il avait avait réussi à apprendre l'existence d'un architecte qui semblerait avoir bonne réputation et qui serait le soir à une de ses tavernes préférées.

La taverne.
Le lieu favori Thierry.
Il possédait une raison parfaite pour se rendre officiellement là-bas.
C'était trop inespéré pour laisser rater une si belle occasion.

Vers la fin de l'après-midi, le prêtre se présenta à la taverne et sourit en découvrant cette douce ambiance où les gens se laissaient aller. Les soldats l'avaient heureusement laissé au pied de l'établissement. Il était libre. Libre ! Le prêtre conversa avec quelques habitués, ravis de le revoir, et plaisante de manière grivoises avec eux. Il s'avança ensuite vers le comptoir pour se commander une première chope.

Une douce soirée en perspective s’annonçait !


"Dis, patron, il parait que t'as un architecte dans ta salle ! C'est vrai ?"
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Message par Le Cent-Visages Lun 16 Nov - 21:45

[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Jzorzo11

Jérémie Torrès, esclave, 19 ans

Quand la porte de la taverne s'ouvrit, la lumière déclinante se fraya dans l'interstice pour esquisser l'incessante saltarelle des ombres aux murs de l'établissement. Mouvements débraillés qui composaient l'habituelle fresque des plaisirs de soirée. Les uns jouant aux dés, les autres buvant, des voisins trinquant entre deux chansons. Tandis que certains voyageurs épuisés dormaient déjà à moitié, bras croisés et menton posé sur leurs balluchons, des clients plus rougeauds - et eux encore fort éveillés - attiraient les serveuses pour promener les doigts sur leurs formes engageantes. Un bourgeois s'épanchait en caresses le long des courbes d'une gredine, à la chemise ouverte en une feinte négligence. On riait ici, on chantait là, on ronflait au fond. De toutes parts, les bouteilles de vin se vidaient, se renversaient sous les gestes brusques de buveurs.
Dans cette atmosphère chamarrée, on ne prêta donc nulle attention à l'ombre vivante qui venait de pousser le battant - pour le refermer aussitôt en un quasi silence. Ses pas de même se firent discrets, progressant avec la régularité d'un métronome. Comme si le corps ici présent était inhabité et se frayait mécaniquement son chemin - en ligne droite, telle la tour d'une case à l'autre sur l'échiquier - alors que l'esprit était Dieu-savait-où ailleurs. Mutiques aussi restèrent ses lèvres - closes, figées, égales au reste de son visage long et austère quoiqu'harmonieux comme en auraient certaines statues antiques. Un réflexe de prudence lui fit promener ses yeux d'un noir caverneux, enfoncés au milieu de cette face osseuse, sur la salle afin de vérifier que nulle personne connue comme compromettante ne risquerait ce soir de le menacer. Apparemment, la voie était libre. A la place, il reconnut en revanche le père Thierry d'Anjou, installé un peu plus loin. La grande ombre gardait de relativement bons souvenirs de ses contacts avec le curé, qui du reste connaissait son passé et l'avait plus d'une fois aidé. Un soir, les deux hommes s'étaient même accordé un débat d'idées clandestin dans le bureau du religieux. Jérémie se souvenait d'ailleurs de cette plaisanterie de sa part : il serait digne d'être posté en effigie de pierre dans quelque église.
Le spectre rejoignit l'homme de Dieu. Les plis d'un long manteau crasse tombaient autour de son corps-charpente. Le drapé brun donnait un peu de matière à son dos qui gardait trace de quelques souvenirs de ses années de servitude, par une sécheresse et une roideur de poutre. Enfin à proximité du prêtre, il sourit - si du moins l'on pouvait qualifier ainsi la cassure à ses lèvres, au milieu d'une barbe de quelques jours.

-- Père d'Anjou, dit-il en guise de salut, de son timbre sombre roulant ses R comme Sisyphe son roc.

Sous ses épais sourcils, rabattus, à peine expressifs, il continua de scruter discrètement les tables environnantes. Des têtes connues. Des attitudes et des silhouettes que son excellente mémoire remit sans encombre. Un ou deux nouveaux venus cependant, égrenés ça et là. Il y avait notamment, dans un coin discret de la taverne, ce curieux escogriffe à l'air songeur, un gobelet entre ses mains. Un instant, Jérémie apprécia d'observer ses traits osseux, comme taillés par bien des aventures que la part d'écrivain en lui se plairait à imaginer. Sa part mathématicienne, elle, s'intrigua des étranges formules qu'il semblait se murmurer à lui-même. Toutefois, il se désintéressa finalement de l'homme, assez tôt pour ne pas être remarqué. Ne pas être remarqué, davantage que ne pas être impoli - cette notion-là passait souvent au-dessus de l'esprit haut-perché de Jérémie.
Entre temps, le prêtre venait de s'adresser à l'aubergiste revenu vers lui, pour une question guère surprenante : enfin, après ses déboires judiciaires, il envisageait la reconstruction de son presbytère et se renseignait dans ce sens. La grande ombre prêta l'oreille à sa réponse. L'homme énergique se fit un plaisir zélé de détailler :

-- Ci fait mon père ! C'est c'gars là-bas qui vient de nous arriver. Un certain Carpentier. Si ça c'pas prédestiné comme nom, ma parole !

D'un haussement de menton, il venait d'indiquer l'échassier logé dans son petit coin d'ombre. Voilà donc ce que ce voyageur venait faire à Braktenn, songea Jérémie. Intéressant.
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Message par Augustin Carpentier Mar 17 Nov - 12:53

Du coin de l'oreille, le voyageur écoutait ce qui se disait au comptoir. Les voix qui parlaient de lui avaient l'air pleines de joie et de bonne volonté, des gens qui imaginaient son intervention sous la meilleure lumière. Il attendit cependant quelques instants avant de se lever de table ; il avait espéré qu'ils viendraient d'eux-mêmes s'asseoir en face de lui, pourquoi pas en commandant une tournée de boissons. Mais il ne pouvait pas laisser échapper une occasion de retrouver du travail, sinon sa prochaine nuit se ferait sous les combles d'une grange ou à l'abri des arbres, et la saison ne s'y prêtait pas.

Il abandonna donc la dignité pour la sécurité, et se hâta de rejoindre le comptoir en ramenant ses cheveux broussailleux sur l'arrière de son crâne, pour dégager son visage. Il l'ignorait, mais il reproduisait la courtoisie des guerriers d'antan, relevant leur visière sur le champ de bataille pour saluer un adversaire valeureux à visage découvert. Sa tignasse ondulait sous l'effet d'une pluie froide qui avait figé les mèches sous leur forme nattée la veille, imprégnant son capuchon au-delà de la résistance naturelle de la laine. Elle séchait au coin du feu et devait maintenant être redevenue bien chaude. Mais il espérait vraiment ne pas en avoir besoin.

"Messieurs ?"

Il y avait là deux convives, et c'était le curé qui le cherchait. "Mon père", c'était lui. Augustin le salua donc des mêmes mots, inclinant sa tête comme s'il s'était trouvé en présence d'un marquis, à tout hasard. "Dieu vous bénisse, mon père." L'autre à côté était peut-être son serviteur, ou autre ouaille de sa paroisse, mais ce n'était pas cette guipure-là qui lui donnerait de l'ouvrage ; donc il ne servait à rien de prendre en compte son existence, si ce n'est pour faire plaisir au curé.

"Les noms, c'est le jeu du hasard, des flatteurs et des médisants," sourit-il d'un demi-sourire maladroit, cherchant à montrer qu'il avait en lui ce brin de philosophie que l'on prêtait à ceux qui travaillent aux belles oeuvres. A élever des échafaudages vers le ciel, on était censé réfléchir, et voir le monde sous un autre angle, pas vrai ? L'architecte dont il portait la peau avait parfois montré cette tendance à parler sans qu'il comprenne clairement de quoi. Ce n'était pas facile à copier. Comme l'usage d'une arme dont il n'aurait pas vu les mécanismes intérieurs.

"Augustin Carpentier, pour vous servir. Je suis sans ouvrage depuis cet automne et si vous avez besoin de mes talents, ce sera avec plaisir. Il suffira de quelques jours pour recruter les ouvriers, dans un pareil vivier," ajouta-t-il en balayant de son regard fuyant l'animation des environs.
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Message par Thierry d'Anjou Mar 17 Nov - 19:23

L'ambiance légère et décontractée de la taverne avait énormément manqué à Thierry pendant ces longues semaines d'exil, escorté dans ses moindres mouvements. Certes, il avait passé une excellente soirée dès son retour, grâce à cette rencontre miraculeuse avec Kalisha de Monthoux. Mas cela ne suffisait pas. Il avait beaucoup de retard à rattraper ! Son regard, déjà, lorgnait de superbes silhouettes féminines. Quand serait-il enfin libre à nouveau de les séduire ?

Sur ces pensées, le prêtre but une longue gorgée du vin que l'aubergiste lui servit.


"Un excellent crû, mon bon ami ! Je le bénis !"

Avec amusement, le curé signa la chope, dans un éclat de rire.

"Que le Saint-Esprit, tout puissant, bénisse ce vin !"

Sur ces paroles, il leva à nouveau le verre, pour le boire, tout en déclenchant les rires gras de la salle. Un individu sombre s'approcha et le salua de manière bin sobre. Sec même. Il tourna la tête et reconnut Jérémie qui venait de le joindre au comptoir. Ses sourcils se froncèrent. Il ne se rappelait que trop que ce garçon était un esclave en fuite, dans une taverne surveillée par des soldats. Décidément, Dieu aimait toujours autant provoquer le destin des hommes. De quoi vivait le fugitif en ces moments d'errance ? Avait-il seulement un logement ? Le prêtre regretta de ne pas pouvoir l'interroger trop ouvertement. Le jeu devait être joué de manière serré.

"Oh ! Te voilà enfin, toi ! Où te cachais-tu donc, gredin ? Ta pauvre mère s’inquiétait à ton sujet ? Oui oui, je sais, tu es parti pour le travail, aux vendanges, tu l'avais bien expliqué cet été. Mais ne pouvais-tu pas lui faire écrire à ta propre mère ? Elle se désespérait d'avoir des nouvelles ! Elle te croyait mort !"

Le prêtre jouait à merveille la comédie de celui qui avait entendu longuement une mère submergée par le chagrin et l’inquiétude. Tout cela est parfaitement orchestré, comme son esprit savait si bien simuler. Il perdit brusquement son ton moralisateur pour éclater un instant de rire, avant de prendre Jérémie dans ses bras.

"Mais d'un point de vue personnel, je suis heureux, mon garçon, de te voir devenu enfin homme ! Tu as enfin commencé à gagner ton propre pain ! Quand j'y repense, il me semble que c'était hier que tu jouais encore sur le parvis de mon église et maintenant.. maintenant, tu es un homme qui voyage et rapporte de l'argent !"

Satisfait de ce rapprochement qui lui permettait de parler plus discrètement, il se mit à murmurer, pour que seul son interlocuteur puisse entendre.

"Lors de mon séjour dans les colonies, je suis allé dans ton village natal. J'espérais trouver une piste pour retrouver ta famille. En vain. Je suis navré, mon garçon Sinon... Tout va bien ?"

Sur ces confidences, il s'écarta, claquant une dernière fois la main sur l'épaule du jeune homme de façon énergique.

"Mais n'oublie pas de continuer à venir à l'église, n'est-ce pas ?"

Sur cette indication, censée faire référence à ses occupations religieuses, Jérémie devrait comprendre que le prêtre l'invitait à trouver chez lui un refuge sûr. En cette période hivernale qui s'annonçait, ce n'était pas un luxe inutile.

Peu après ces manœuvres, Thierry se retourna à boire sa chope de vin, attendant la réponse de l'aubergiste sur sa question au sujet du fameux architecte. Jérémie le devança et lui annonça la présence de l'homme, puis le lui montra dans un recoin ombreux. Singulier. Si cette personne recherchait des clients, i serait mieux à participer aux discussions. Aurait-il des secrets à cacher ? Ou simplement timide ? Il écouta en même temps les paroles de son ami tout en contemplant ce Carpentier se diriger vers eux. sa répartie sur les noms ne lui causa aucun sourire.


"Un nom est précieux. Il s'agit d'une identité propre à chacun et qui nous rattache à un passé plus ou moins glorieux. Un nom nous enracine avant même notre naissance."

Il eut cependant un sourire au prénom de cet architecte.

"Un presbytère qui serait érigé par un Augustin, voilà là aussi un nom qui laisserait penser à la prédestination ! Enchanté, sieur Carpentier, je suis le père d'Anjou, de la paroisse de Saint-Eustache, et j'aurais besoin de faire reconstruire mon prébystère avalé cet automne par les flammes."

Il tourna la tête vers l'aubergiste et laissa sonner quelques pièces sur le comptoir.


"Soyons généreux ! Une tournée générale, patron, pour célébrer cette rencontre !"

Thierry d'Anjou
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Message par Le Cent-Visages Ven 20 Nov - 16:32

[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Jzorzo11

Jérémie Torrès, esclave, 19 ans

L'aubergiste sourit sans ambages à ce curieux prêtre qui décidément comptait parmi ses meilleurs clients et ne buvait pas du vin que dans l'exercice de ses fonctions sacerdotales ! Il leva lui aussi une chope à son attention avant d'aller servir d'autres clients qui déjà l'interpellaient plus loin.
Jérémie s'amusa de la scène, tout autant que du jeu habile par lequel le prêtre lui demandait à présent de ses nouvelles, très indirectement, en le faisant passer pour une de ses brebis égarées mais revenue au bercail après moult péripéties. Quelle drôle d'histoire Thierry inventait-il tout de même ! Le fugitif toutefois jouera le jeu, conservant un air sérieux - jamais bien difficile à afficher pour lui - et même faussement désolé, l'espace de quelques secondes, à la mention de cette prétendue pauvre mère qui n'aurait eu nulle nouvelle de sa part.

-- Vraiment ? simula-t-il. Elle n'a rien reçu ? J'avais pourtant mis toute confiance dans ce coursier à qui j'avais pris soin de confier une missive. Mon père, je suis bien triste de ce que vous me dites-là et ne manquerai pas d'aller réparer au plus vite. (Un temps) Merci d'avoir pris soin de ma mère en mon absence. Quant à ce que j'ai fait ? Du travail journalier ici ou là. Dans les petites villes alentour on ne crache jamais sur une paire de bras le temps de quelques réparations, ou sur un esprit capable de prompts calculs pour la remise en ordre de divers registres. A présent me revoici à la capitale pour espérer un travail de plus longue durée.

Il ne mentait pas tant que cela : Jérémie avait en effet couru les petits travaux, souvent à des lieues et des lieues de ce qui l'intéressait réellement et de ce dont son cerveau était capable... mais il demeurait primordial de se fondre dans la masse de tant de petits ouvriers, de ne pas attirer l'attention outre-mesure, et surtout de pouvoir gagner aisément quelque sous à se mettre dans la poche, ou son pain quotidien sous la dent. Cependant, il lui était aussi arrivé de rôder en forêt - où il s'était acoquiné avec le brigand Sylvère d'Aiguemorte, auto-proclamé souverain de ces bois. De se faire également, une autre fois, passer pour un ermite pour recevoir quelque pitance en échange de ses enseignements portant sur les Écritures. Enfin, la tenancière de cette taverne elle-même l'accueillait de temps en temps volontiers pour lui donner un panier de vivres : elle s'était attachée à lui et se souvenait de sa promesse de l'aider. La bonne dame s'était attachée à l'esclave évadée et souhaitait conserver son secret.
Devant l'éclat de rire du prêtre, Jérémie feignit la bonne humeur mêlée à un fond de contrition : le père d'Anjou appréciait de le revoir malgré le chagrin de sa pauvre mère qu'il semblait lui pardonner. Cette trame romanesque lui convenait. Le grand sec fut surpris de se sentir embrassé par le père d'Anjou mais joua le jeu, sculptant un sourire à sa face et enroulant lui aussi ses bras osseux autour du curé le temps de l'accolade. Profitant de ce rapprochement, il écouta Thierry confier avoir tenté de rechercher sa famille - en vain. Le poids de ses sourcils s'abattit comme deux menhirs sur ses yeux noirs et il murmura :

-- Grand merci tout de même, mon Père. Je vais bien. J'ai des appuis ici et là. (Puis, plus haut) Je n'y manquerai pas. L'intelligence de vos homélies m'a manqué.

Jamais il n'en avait ouï une seule, mais le jeu commençait à plaire à Jérémie. Et alors que le jeune homme faisait ainsi ses dévots compliments, l'architecte venait d'approcher et donnait ses pieuses politesses au père d'Anjou. La grande ombre aura hoché sobrement la tête en guise de salutation au "Messieurs" qui leur fut servi. Alors, il préféra se redresser et se tenir un peu en retrait, silencieux, durant la suite de l'échange puisque c'était au curé que le sieur Carpentier s'adressait. Néanmoins, son discours l'intéressa. Le nom : il faisait paraît-il la chose, tout arbitraire qu'il pouvait-être. Jérémie avait retenu cette leçon du Cratyle de Platon qui longuement débattait de la force et pertinence du signe. Depuis son évasion, le vivant spectre appréciait de se donner de multiples corps par le jeu des rôles et noms qu'il s'attribuait. Par eux, être maître de son destin. Et cependant, il demeurait quelque part toujours attaché à sa véritable identité dont il espérait bien réaliser le sens. Jérémie, "Dieu élèvera". Torrès. Le nom créait-il l'homme ? Il voulait y croire, quitte à passer par de fausses identités mais pour mieux s'affranchir. Se réaliser.
Alors qu'il pensait ainsi, ses pupilles seront restées inhumainement fixes, comme rivées à un point invisible quelque part sur la table, au bout de ses longs doigts osseux écartées là comme des racines sortant de terre. Racines qu'évoquait le père Thierry, lequel voyait le nom comme attachement pour le meilleur et le pire. Pour connaître l'histoire familiale du prêtre, Jérémie voyait bien ce que son affirmation recouvrait. Quant à ce sieur Carpentier, à quelles flatteries ou médisances pouvaient être liées son nom ? La suite le dirait peut-être.
Plus prosaïquement, Jérémie entendit dans les mots de l'architecte l'éventualité d'un travail. Qui du reste pour le coup ne lui déplairait pas. L'ennuierait un peu moins.

-- A la bonne heure ! s'exclama l'aubergiste, revenu vers le petit groupe alors que Thierry réclamait la tournée générale.

Il se mit à remplir trois grands verres d'hypocras qui se retrouvèrent presque aussitôt devant chacun des messieurs. Jérémie esquissa un sourire, tant pour le tavernier que pour le généreux prêtre.
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[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Empty Re: [7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé]

Message par Augustin Carpentier Sam 21 Nov - 12:37

"Les flammes, un grand malheur, une émanation du démon," murmura Augustin pour le principe. Sa timidité naturelle se faisait déjà plus souriante. "Ce serait un honneur que de contrer leur action par mes humbles talents. Je visiterai le terrain quand bon vous semblera, et si vous voulez vous enquérir à mon sujet, vous pouvez écrire à mon dernier client. Ses mots auront plus de valeur que les miens."

Tournée générale, deux mots magiques, et le parfum de l'hypocras qui égayait de ses épices bien choisis l'atmosphère chaleureuse de ce coin de cheminée. Tout s'engageait sous les meilleurs auspices pour établir un accord parfait. Sans écrire vraiment, quand il pouvait éviter ce laborieux exercice, l'architecte autoproclamé comptait bien apposer sa signature au bas d'un contrat régulier, afin de s'assurer un paiement correct, du genre qui s'égrène tout au long de la tâche et la rend plus agréable. Il n'avait pas besoin de grand-chose, il vivrait avec ses travailleurs sous un abri qu'ils érigeraient sur place, comme il s'y était habitué lors de ces trois ans passés, et cela lui convenait parfaitement.

Mieux valait pouvoir espionner qui se querelle avec qui avant d'envoyer les deux querelleurs encordés au sommet d'une charpente. C'était une vision paternaliste de son travail, mais il ne connaissait pas d'autre manière d'assurer son autorité. Il n'avait jamais appris à tirer avantage de sa stature ou à pousser sa voix dans les timbres du tonnerre. Cette aptitude comparable à la danse, qui semblait s'activer d'elle-même chez d'autres hommes plus sûrs de leur bon droit, n'existait chez lui qu'au contact des bêtes ; peut-être parce que d'elles, il ne craignait aucune opinion défavorable. Elles étaient des créatures secondaires comme lui, et n'avaient pas de hauts standards quant à leurs fréquentations.

Tout cela pour dire qu'il réfléchissait déjà à ce qu'ils pourraient coucher sur le papier ; mais il laisserait l'honneur de choisir les mots à son respectable client. Un homme jovial et sans histoires apparemment, mais Augustin veillait à se méfier tout de même. Il lui laissa avec une déférence affectée le siège le plus proche du feu, tout en gardant à l'oeil discrètement la grande sauterelle qui bavardait avec le prêtre avant qu'il le rejoigne.

Un journalier sans ouvrage, donc. Histoire de se faire bien voir, il l'invita également à sa table, en repliant son manteau pour dégager le dossier du siège restant ; le ballot de tissu resta sur les genoux d'Augustin, roulé comme un coussin de chaleur qu'il serrait machinalement contre lui. Personne n'allait tenter de le poignarder dans les secondes à venir, mais c'était un réflexe, et ça lui occupait les mains. Point de grandes embrassades cordiales pour lui, il gardait ses distances, comme un voyageur qui revient des territoires pestiférés.

"Je pourrais t'en proposer, de l'ouvrage, bonhomme. Si vraiment le père d'Anjou démarre ce chantier, et s'il te recommande, bien sûr..."

Son regard parcourut rapidement la physionomie de ses convives, et il s'étonna de constater que d'eux trois, l'homme d'église au logement dévasté, l'errant sans travail et lui, l'architecte qui venait si bien résoudre leurs deux difficultés, c'était lui qui semblait le plus humble et le moins sûr de lui, caché derrière ses cheveux flottants, comme un oiseau de nuit derrière le rideau de branches d'un saule. Il espérait être le seul à l'avoir remarqué.
Augustin Carpentier
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Message par Thierry d'Anjou Dim 22 Nov - 18:36

Thierry s'amusait beaucoup de cette conversation inventée, qui ne sortait que son imagination mais à laquelle Jérémie répondait sans avoir grand temps pour improviser. C'était là un numéro parfait, sans aucune répétition. Ils auraient dû être comédiens tous deux ! Il lâcha le jeune homme en écoutant ses justifications.

"Oui, je vois, je vois. Ah la la ! De nos jours, à qui donc se fier ? Quel monde ! Mais quel monde ! Enfin, l'essentiel est de te voir revenu, en bonne santé, mon garçon !"

Grâce à cette habile comédie, les messages importants étaient passés, sas éveiller les soupçons. Il espéra revoir Jérémie tantôt à l'église. Ses conversations philosophiques, si intelligentes, lui manquaient. Peu après, le prêtre se tourna vers le fameux architecte qui s'était avancé, ct Augustin Charpentier, et l'étudia longuement. Il s'assit en même temps à table, en premier, et sourit de voir l'aubergiste apporter les chopes commandées.

"Merci, mon brave."

Thierry but une longue gorgée, puis exposa sa requête, et réprima la grimace qui lui venait des paroles de l'architecte sur les flammes t le démon.
Le prêtre répliqua, un peu sec :


"Il n'y a aucun démon, ni magie, là-dedans. Uniquement une pauvre folle qui souhaitait me nuire. Elle a heureusement été arrêtée. Il est tentant d'invoquer démon des causes complexes mais les explications sont souvent fort simples et se cachent au cœur des hommes."

Sur ces paroles, il descendit quelques gorgés d'hydromel. Sa gorge avait encore soif. Il méditait en même temps sur ces notions de culpabilité inhérente à l'espèce humaine. Orgueil, profit, gloire, luxure... Peu importaient les recommandations de l'église, l'homme ne songeait qu'à ses interest à lui. Le bonheur d'autrui ne comptait pas. Jamais.

"Seriez-vous disponible, demain, pour visiter l'élise et le lieu où doit se dresser le presbytère ?"

Il tourna la tête vers Jérémie.

"Achille ! Tu pourrais peut-être venir, mon garçon, si tu cherches du travail. Les grabats n'ont pas encore été évacués et il reste un mur à battre, à moitié consumé, mais qui a résisté malgré tout aux flammes. Il faudra tout démolir avant de reconstruire du neuf. Je ne suis pas expert comme vous, sieur Carpentier, mais je suppose que cela devrait vous occuper une année entière."
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Message par Le Cent-Visages Dim 29 Nov - 14:59

[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Jzorzo11

Jérémie Torrès, esclave, 19 ans

Les traits de Jérémie restèrent neutres à l'évocation - l'invocation - du démon comme raison donnée à cet incendie. Pour avoir lui-même pratiqué à plus d'une occasion le double langage, ou observé certains s'appliquer à dire à telle personne ce qu'il plairait à sa corporation d'entendre, le fugitif se demanda en son for intérieur si le sieur Carpentier avançait cette explication en toute sincérité ou si sa stratégie parlait à l'homme d'église en leurs termes favoris. Mais pour le coup ce prêtre-là écartait toute intervention surnaturelle et préférait mettre sur le compte de causes logiques le saccage de son presbytère : cette femme à demi-folle que Jérémie avait eu l'heur de croiser en prison. On disait qu'elle y était morte. Cependant, l'un excluait-il l'autre ? Par une main mortelle et des actions rationnellement explicable, Dieu ou Diable n'agissait-il pas parfois ?

-- Les humains peuvent être les outils préférés du Seigneur comme du Malin, avança le noiraud. Mais parfois est-il besoin que l'on ne soit que l'instrument de l'un ou l'autre et ne peut-on agir de notre propre chef ? L'on ne saura jamais si cette aliénée a pensé agir pour un mauvais maître ou si son esprit abîmé n'a même pas eu besoin de cela.

Là-dessus, il préférera balayer d'un revers de main le triste souvenir de l'incendiaire pour penser plutôt, à la suite de l'intervention d'Augustin proposant ses services, à sa reconstruction. L'avenir comptait désormais. Braktenn aurait de quoi conjurer l'ombre du sinistre événement avec l'érection d'une nouvelle demeure sacerdotale. Jérémie prit en main son verre d'hypocras, reconnaissant au curé pour ce geste généreux, puis s'intégra un peu plus au trio quand le maître bâtisseur s'adressa directement à lui pour lui proposer de l'ouvrage. Thierry corrobora d'ailleurs aussitôt la proposition et Jérémie adressa un sourire à l'un comme à l'autre. Même si son travail serait de charrier des gravats et des décombres, il aurait ensuite le loisir d'observer tout le processus d'une construction, d'apprécier la matérialisation de calculs, la métamorphose de plans en pierres... et peut-être même d'apporter ses compétences et sa rapidité aux opérations mathématiques si cela pouvait intéresser le maître du chantier.

-- Je vous remercie pour cette proposition, Messire, et vous aussi mon Père, répondit Jérémie de son ton toujours égal. Dans ce cas, demain, j'y serai.

Il nota au passage la distance que le sieur Carpentier gardait avec lui - chose à laquelle il était accoutumé et dont il ne prenait nul ombrage : après tout, il jouait la partition d'un errant à la recherche d'ouvrage et c'était toujours mieux que d'être esclave. Cette marque à son épaule, personne ne devait jamais la connaître. Jérémie prendrait donc volontiers tous les autres rôles susceptible de le mettre temporairement à l'abri du besoin. La grande ombre acquiesça à l'intervention du prêtre, acceptant d'office ces tâches physiques qu'il évoquai, puis savoura quelques premières gorgées chaleureuses de son hypocras. Il hésita un instant à soulever ses autres compétences mais jugea le moment inopportun : ne pas avoir l'air de mépriser les fonctions qu'on lui décrivait.
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Message par Augustin Carpentier Dim 29 Nov - 18:46

"Bien, bien... si vous pouvez tracer un plan général, ou une liste de ce qu'il vous faut... vous n'hésiterez pas."

Il était temps de parler boutique. En fait, Augustin s'était âprement mordu la langue pour se rappeler avec obstination que c'était tout ce qu'il s'autorisait. Le prêtre n'avait pas envie de parler prêtrise, eh bien, ça valait sans doute mieux. En sortant du purement technique, il risquait de finir par dire des bêtises, et ça se verrait qu'il n'avait pas d'éducation. Du moins, pas formelle. Tendu et visiblement passionné par le fond de son verre, comme ces charlatans qui prétendent y lire l'avenir, il s'efforçait à éliminer de son apparence et de ses dires tout ce qui pouvait dépasser de la simple tâche qu'il acceptait.

"S'il y a les ruines à dégager, comptez pour ça une bonne semaine. Ça dépendra de la quantité qui reste. On peut sûrement récupérer une partie des pierres. La charpente, mieux vaut ne pas y compter."

Son regard détailla un instant la stature de son nouvel ouvrier ; un presbytère, ça pouvait représenter une sacrée bâtisse. Ce n'était pas une fermette d'une pièce à vivre, grenier et grange. Il lui faudrait une bonne équipe de tels désoeuvrés pour abattre la besogne. Mais il comptait sur le bouche à oreille qui venait déjà de si bien fonctionner. Et ce bonhomme étrangement calme avait peut-être des connaissances qui viendraient se joindre à la manoeuvre.

"N'hésite pas à prévenir ceux que tu connais. Achille, c'est ça ? Je rajoute un sou sur ta paye, si tu me trouves quelques gaillards solides, de quoi débuter rapidement."

Puis il vida son verre et se retourna vers le curé. Son sérieux avait quelque chose de morne, mais si c'était comme avec ses derniers clients, son efficacité rattraperait cette première impression étrange. Et au pire, il expliquerait qu'il était veuf et que son humeur en était altérée, ce qui avait souvent pour effet de calmer les questionnements.

"Je vous retrouve demain à l'église, c'est dit. Ce que je vous conseille, attendez à la mi semaine prochaine pour racheter du matériel. Dans une pareille ville, ça ne manquera pas de toute façon. A ce moment-là, je vous dirai ce qu'on aura pu sauver, ça vous fera toujours de l'économie."

Tout le monde n'était pas aussi avare que lui, mais il n'ignorait pas quelles activités de charité pouvaient abriter les murs d'un presbytère ; la demeure curiale était le théâtre de bien des entreprises coûteuses. Un peu de monnaie mise de côté n'était jamais à négliger, lorsqu'on intervenait auprès des malades et des pauvres.

Ah, il n'aurait pas voulu être à sa place. Non pas que les pauvres lui faisaient horreur ; mais d'une, il n'aimait pas être comparé à eux ; et de deux, il détestait sentir qu'il allait lui devenir difficile de rompre les amarres et de partir, le jour venu. Sentir qu'on lui était trop redevable avait tendance à lui faire cet effet.
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Message par Thierry d'Anjou Lun 30 Nov - 13:35

Thierry tourna la tête vers Jérémie qui venait de rebondir sur ses paroles et émettaient une réflexions des plus intéressantes. Seigneur, que la pensée rapide et intelligente de ce garçon lui avait manqué ! Il résumait eu peu de mots l'énoncé du problème et ouvrait ainsi les bases d'une réflexion qui pourrait les mener loin.

"Il est difficile de savoir où commence par ailleurs notre propre liberté. Même ceux qui ne sont point esclaves, soumis à la volonté d'un maître, sont-ils réellement libres ? La société demande au tout et à chacun des exigences et il faut bien souvent savoir s'y tenir, autrement celle-ci, impitoyable, met ses brebis rebelles en retrait. Combien ont pu être stigmatisés pour quelques différences ? Sans un grand nombre, je le crains. Nous avons tous ressenti au moins ce sentiment dérangeant de ne pas être à notre place. Ou que les gens nous jugeaient, désapprouvaient notre conduite. Pourtant, en revenant sur l'interrogation initiale, j'aime à croire que nous sommes libres de nos choix. Que Dieu ou le Diable, ou quel que entité qui soit, ne puisse agir sur nous. L'individu ne possède que trop de contraintes. Pourquoi en ajouter une autre ? Pourtant..."

Il ne pouvait s'empêcher que certains personnes restaient purees tout au long de leur existe, comme Alex ou Claire, ses enfants, et refusaient de s'écartaient du droit chemin. Pourquoi , qu'est-ce qui les retenait ? Entendaient-ils des voix célestes qui inspiraient leurs actes ?

"Décidément, cette notion de prédestination est un concept qui m'échappe. Nous le commentions autrefois, te souviens-tu ? Certains êtres sont capables de bonté et d'un détachement qui dépassent l'entendement. Nous évoquions Claire, si douce, si exceptionnelle.. Je rajouterai Alexandre. lui aussi est d'une bonté et d'une resilience qui me laissent perplexes. Il a été condamné injustement à l'asservissement et depuis même le procès, il ne se plaint pas de celui responsable de as déchéance. Il lui a pardonné, le respecte, l'écoute... Comment est-ce humainement possible ? Reçoit-il des commandements divins qui le pousse à être bon, à oublier ses ressentiments ? Ou l'est-il de son propre chef ? Alexandre, Claire... Dans ces deux configurations, on y retrouve le même paramètre : ils sont infirmes. Tu connais le point de vue de l'église sur l'infirmité, n'est-ce pas ? Et si elle se trompait du tout au tout ? Ou au moins sur ses conclusions ? Et si en réalité les infirmes étaient un relais de la divinité ? Que cette particularité, qui marque leur corps, soit un signe de reconnaissance pour transmettre la parole divine mais que nous avions choisi d'ignorer ?"

Sa gorge commença à le piquer d'avoir autant parlé. Il but quelques gorgées pour s'hydrater, le temps de rassembler de nouvelles pensées.

"Cette notion de prédestination est quelque chose qui m'intrigue et m'interroge beaucoup. Le sommes tous ? Ou est-ce seulement quelques élus ? Est-ce l’infirmité qui serait un digne divin finalement ? Dans la Bible, Jésus est montrer guérir des aveugles, des paralytiques... Mais quel est le message ? Que le Christ les a soigné pour les rendre normaux, conforme aux désirs de la société ? Ou pour enseigner que nous devons nous approcher de tout le monde, même des indigents ?"

Le prêtre se rappela soudainement de la présence de l'architecte, qu'il avait certes oublié un temps, absorbé par le débat philosophique, et tourna la têt pour l'écouter exposer les modalités du chantier. Rien de tout ceci ne l’intéressait. Les réponses que Jérémie pourraient faire à ses paroles le seraient bien plus. Même l'évocation du financement des travaux ne le touchait. Pourquoi s'en faire ? Il n'aura qu'à dire à ses bons paroissiens que leurs dons pour reconstruire un bâtiment pour leur église serait un bon moyen de racheter leurs péchés et les sous tomberaient rapidement dans les corbeilles. Il dissimula un sourire. Tant mieux ! Le trop-perçu servirait à ses sorties personnelles.

Il répondit d'un ton avenant à l'architecte :


"Je vous fais confiance pour toutes ces questions, mon brave. Que diriez-vous ainsi de nous rencontrer demain, dans la fin de la matinée, pour évaluer les lieux ? Je regrette de ne pouvoir plus tôt mais je dois assurer quelques messes auparavant."

Le prêtre s'amusa de cette belle fourberie en buvant le fond de sa coupe. Demain matin, il serait couché à se remettre de la cuite de ce soir. Car, il ne comptait pas rentrer de bonne heure ! Une fois dans une taverne, Thierry y restait jusqu'au petit matin. A moins de rencontrer une belle femme, bien séduisante, peu farouche qui l'invite à son lit. Quelle belle soirée cela allait être une fois cette rencontre passée !
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Message par Le Cent-Visages Dim 6 Déc - 15:59

[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Jzorzo11

Jérémie Torrès, esclave, 19 ans

Augustin consultait le fond de son verre tandis que Jérémie achevait le sien. Les premières instructions furent données. Une semaine de ramassage des débris. Une charpente qui méritait une reprise à zéro. Puis Jérémie se sentit observé, se demanda si sa haute stature osseuse conviendrait au sieur Carpentier. Il hocha la tête pour confirmer son prénom, non sans écouter avec intérêt la précision que lui donna le bâtisseur. D'autres ouvriers ? Oui, il pourrait trouver cela. Les rues mal famées qu'il hantait et les forêts ombreuses ne manquaient pas de gueux qui ne demanderaient que de trouver un ouvrage même temporaire.

-- Comptez sur moi, je peux vous trouver du monde.

Il envisageait déjà les quartiers où se rendre, les moments auxquels les fréquenter afin de dénicher les gros bras et les errants en manque de pécunes. Avant de venir occuper le chantier, plusieurs heures encore allaient se présenter à lui. Assez pour mener sa moisson. Jérémie signifia enfin d'un simple sourire avoir retenu les dernières indications d'Augustin.

Le père d'Anjou entre temps, et à la grande surprise du jeune homme, rebondit sur ses propos pourtant assez évasifs au sujet du déterminisme. Il écouta le prêtre toujours avec le même intérêt pour ces sujets qui l'enthousiasmaient tant. L'esclave fugitif brûla d'envie de rebondir, de citer Marc Aurèle qui effectivement affirmait que même le plus puissant des hommes était esclave de ses passions ; ou encore de mentionner les conceptions de certains présocratiques au sujet d'un monde en mouvement perpétuel et dans lequel l'humain n'était pas une exception aux lois de la nature... Jérémie fronça cependant les sourcils quand le curé profita de cette discussion pour faire le panégyrique de sa progéniture. Rien que ça ! Claire-Marie lui semblait digne d'admiration. Alexandre laissait en revanche au grand sec un souvenir beaucoup plus mitigé. Par ailleurs, le jeune homme doutait que ce soit l'infirmité, ou même l'asservissement, ou quelque autre paramètre qui fasse de quelqu'un un "signe" - même si évidemment ils contribuent à influencer un cheminement intellectuel. Cette pensée était aussi superstitieuse en un sens que ceux qui voyaient des démons ou des pécheurs dans les estropiés. Pourquoi fallait-il les classer soit en-deçà, soit au-delà de l'humanité ?
Thierry partait dans tous les sens. Certains points ennuyèrent Jérémie, d'autres lui donnèrent grande envie de rebondir. Il serait fâcheux néanmoins de se lancer, là, en pleine taverne, dans une conversation aussi élaborée alors que le fuyard était censé n'être qu'un gars du peuple sans rien de particulier. Du reste, il ne s'avérerait pas stratégique de se montrer excluant vis-à-vis du sieur Carpentier, que Thierry - il ne s'en rendait probablement pas compte - laissait carrément sur la touche avec cette longue dissertation uniquement adressée au noiraud. Non, peu habile alors que l'on parlait embauche avec lui.
Jérémie glissa donc un regard entendu, un peu appuyé, au curé avec l'espoir qu'il comprenne que cette conversation devrait davantage venir à un moment où ils ne seraient de nouveau que tous les deux. Il fallait toutefois bien répondre quelque chose. Pour la forme. Jérémie ravala ses références livresques, ses pensées plus détaillées quant à la place des infirmes dans la Bible, et répliqua sobrement :

-- Voilà bien des interrogations toutes ensemble, et il serait orgueilleux, celui qui se prétendrait capable d'y répondre alors que des siècles de philosophie s'y essaient. Je partage vos questionnements. Il me semble... que nous sommes un peu comme les constructions de Messire Carpentier, esquisse-t-il avec un regard vers ce dernier. Un subtil jeu de lois naturelles avec lesquelles il faut composer pour être équilibré. Un mélange de causes et d'effets, qu'on ne peut pas entièrement décortiquer à l'œil nu mais qui agissent sur nous... Mais que nous avons aussi le libre arbitre. Tel est le sens, je crois, des Écritures disant que le Seigneur nous a voulus à son image : doués de raison et de choix. C'est vous le prêtre, le plus instruit de ces affaires-là.

Et autant en rester là même si Jérémie se demandait en vérité jusqu'où la liberté pouvait être un leurre, jusqu'où ce que l'on faisait - et croyait de notre fait - ne serait que le résulté d'infinitésimales chaînes causales. Que par commodité ou ignorance on nomme tantôt hasard, tantôt liberté. Comment marchait la grande horloge de ce monde et un rouage d'une immense mécanique est il vraiment libre ?
L'esclave fugitif, après ce moment gênant, apprécia que la conversation revienne au principal sujet de ce jour et il se tourna, à l'instar du prêtre, vers Augustin. Demain. Fin de matinée. Si cela convient au bâtisseur, Jérémie acquiescera aussi.
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Message par Augustin Carpentier Lun 7 Déc - 13:55


Quelque chose dans l'esprit d'Augustin se révoltait contre la philosophie qui s'échangeait autour de cette table. A moins que ce soit de la théologie ? Il ne différenciait pas les deux. Mauvais convive, noyé dans son hypocras, et interlocuteur revêche, il se donnait des airs de gars de la campagne qui n'aime causer que par proverbes et qui considère alors le débat clos. C'est qu'au fond leur échange lui faisait mal. Les points de vue de l'église sur le destin des hommes, leurs défauts de fabrication et leurs travers de naissance, ça ne le touchait que de trop près, et surtout il n'y avait le cuir que trop sensible. Il ne se sentait pas capable d'en bavarder sans que sa détresse apparaisse tôt ou tard, plus ou moins clairement.

Et il avait affaire à deux malins. Plus ils causaient et plus il en avait la conviction. Ils pensaient clair et ils parlaient avec élégance. C'était une amitié de plume qu'ils avaient là, comme en ont les grands de ce monde, sans doute. Pas qu'il soit totalement ignorant de la chose, il avait entendu ses maîtres discuter et s'était imprégné d'une partie de leur vocabulaire, mais ça ne le mettait pas à l'aise. Il avait l'impression de se dévoiler pour le pauvre hère qu'il était, et que, tel un accent de la province, sa bassesse perçait à travers ses discours.

En fait, parler professionnel avait presque l'air honteux, à cette table de beaux esprits.

Le pire, c'est que son employé discutait d'égal à égal avec son employeur. Ça n'avait pas de sens. Personne ne tenait son rang, dans cette histoire. Alors lui, comment devait-il se situer ? Plus bas que le simple maçon qu'il engageait au hasard d'une taverne ? Le pire, c'est que c'était effectivement sa place, et il était horrible de songer que, sans même le connaître, le prêtre adoptait tout naturellement cette position vis à vis de lui.

Il fut tout à coup pris à parti ; on attendait sans doute qu'il dise quelque chose de philosophique au sujet de ses propres constructions. Oh là là, il n'allait jamais s'en sortir. Il n'improviserait pas ça comme un bateleur de foire qui se moque de recevoir des navets trop mûrs pour paiement de son audace. Il avait trop à perdre. Mais heureusement, il n'eut qu'à hocher la tête, en tâchant de se donner un air convaincu. Oui, certes, les gens étaient des maisons. Et certaines étaient mieux ou plus durablement construites que d'autres. Pourvu qu'on ne se mette pas à citer des exemples concrets. Il attendit patiemment, et enfin le rendez-vous fut scellé. Une sorte de soupir de soulagement contenu de justesse lui échappa, et il se remit à rouler son gobelet machinalement entre ses mains, en regardant brièvement les deux hommes en face de lui.

Il ne savait littéralement plus où se mettre. Comment leur parler, à l'un et à l'autre ; qui être vis-à-vis d'eux. C'étaient de drôles d'oiseaux et il devrait s'assurer que toutes ses nouvelles recrues en restent à leur tâche première. Il se promit de les aborder avec autorité, en l'absence du prêtre si rapide à fraterniser avec le tout-venant.

"Eh bien, si cela vous convient à tous les deux, c'est parfait pour moi. Je chercherai d'autres ouvriers dans le courant de la matinée, et... vous de même, Achille... et nous verrons si nous avons de quoi débuter les travaux dans l'après-midi."

Il n'osait plus le tutoyer. Son malaise était palpable, comme s'il les avait entendus employer un langage cabalistique. L'envie de fuir, si familière, remontait soudain et il la maîtrisait de justesse. Heureusement pour ce soir c'était la fin de leur prise d'accord ; d'ici le lendemain, il lui faudrait se préparer mentalement à d'autres conversations tout aussi ardues.
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Message par Thierry d'Anjou Lun 7 Déc - 22:23

Le prêtre essayait de se concentrer vers l'architecte mais ni sa personne ni son discours ne l’intéressait. La reconstruction du presbytère ne lui faisait ni chaud ni froid. Les lits de l'église lui suffisaient pour dormir, et son bureau lui permettait de travailler correctement. Pourquoi s'embêtait-il alors ? Simplement, pour satisfaire les caprices idiots de l'évêché qui risqueraient de s'agacer si aucun travaux ne commençaient à être engagés. Quels ramassis de crétins !

Assez vite, Thierry tourna la tête vers Jérémie et essaya de lire dans les traits de ce visage insondable. Il ne répondait à ces questionnements et ses hypothèses. Sans doute jugeait-il la taverne comme un lieu peu sûr pour entamer sur un débat d'idées. Quelle tristesse ! Comment allait-il se divertir ? Machinalement, sa main serra sa chope et il la leva pour en boire une gorgée. Quelle douce saveur ! Rien de mieux pour chasser l'ennui ! Il nota un instant que Jérémie accrochait son regard vers l'architecte. Pourquoi avait-il été le chercher celui-là déjà ? Sa présence l'insupportait déjà. Il n'avait plus envie de discuter de ce maudit presbytère. Que le Diable l'emporte ce presbytère, ses pierres et as charpente ! Le prêtre but une nouvelle gorgée et grimaça en apercevant ensuite de voir ensuite le verre vide. Déjà ?

Il n'eut pas à attendre ou un râler. Le tavernier surveillait ses gestes et venait d'envoyer un employé qui lui apportait une nouvelle chope. Sans un regard à Thierry, qui portait déjà le verre à sa bouche pour avaler une énième gorgée, l'homme se dirigea rapidement vers un des tonneaux pour servir une autre chope, devinant que le prêtre alcoolique, qui avait depuis longtemps ses habitudes dans l'établissement, serait bientôt à sec.

Alors que Thierry descendait sa troisième chope, Jérémie se décida enfin à lui répondre. Il cessait de reporter son attention vers l'architecte, dont la conversation restait finalement aussi peu passionnante que ces commères agaçantes qui venaient se confesser. Les paroles du jeune homme étaient prudentes. Il craignait, à juste titre dans sa condition précaire, d'être entendu et poursuivi. Le prêtre haussa les épaules.


"Pourquoi être prêtre ferait-il de moi un savant ? Ce que je sais, mon garçon, c'est que je ne sais rien. Socrate le disait déjà de ton temps. Les réponses aux questions n'apportent que plus de questions et mes connaissances absolues n'existent pas. La vérité absolue non plus n'existe pas. Pour chaque être humain, il existe une vérité relative, de ce que nous avons vu, de ce que nous vécu.. pourquoi un prêtre détiendrait-il plus la vérité que n'importe qui ?"

Il eut à cet instant à un rot peu élégant. Le vin commençait à bien fait son effet. Il en oubliait ses manières et oubliait de s'excuser. Thierry se contenta de porter son verre à ses lèvres et de continuer son verre. Quel délicieux breuvage ! Il se mit à s'exclamer bruyamment, oubliant définitivement la retenue :

"Ah ! Quel bon crû, patron, que vous avez là ! Un nectar ! Que dis-je de l'ambroisie ! Vous ne voudriez pas m'en livrer à l'église ? Cela changerait du vin de messe complètement insipide !"

Thierry se tourna vers Augustin et Jérémie, levant à nouveau son verre, euphorique.

"Nous avons fini avec cette discussion, non ? Il est temps de faire la fête, les amis ! Que diriez-vous de finir cette soirée au lupanar ? Je vous introduirai au plus belles filles de l’établissement !"

Dans un geste large, le prêtre sortit de nouvelles pièces et clama à l'attention du tavernier.

"Patron ! Une autre tournée générale, je vous prie ! Que Bacchus nous rejoigne tous !"

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Message par Le Cent-Visages Jeu 10 Déc - 13:32

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La conversation philosophico-religieuse tourna court. Heureusement. Ce n'était ni le lieu ni la bonne configuration pour cela et le malaise restait palpable. Surtout pour Augustin que Jérémie devina aussi surpris que déstabilisé : ce devait être un rendez-vous d'embauche, une prise de contact entre un employeur et un artisan - ledit artisan se faisant à son tour employeur vis-à-vis du noiraud. Et tout ce monde environnant...

-- Cela me paraît une sage humilité, se dégagea-t-il après l'ignorance socratique dont fit montre le curé.

Moins sage cependant fut la suite de son attitude. Il commanda à boire, encore. Commença à parler trop, trop fort, avec trop de gestuelle pour ne pas attirer sur leur petit groupe des regards au mieux curieux, au pire possiblement encombrants pour la suite. Jérémie se pinça la lèvre. Le maître bâtisseur ferait comme il le souhaitait mais lui-même n'avait nulle envie ni de rester à boire avec le prêtre dans cet état... encore moins d'achever cette soirée au Lupanar ! Cette seule idée venait de faire monter le rouge aux joues de l'austère fugitif. Il se leva.

-- Je vous remercie pour votre proposition, mon Père. Et merci encore pour la tournée. Mais je préfère aller m'acquitter de ce que nous venons de convenir en matière de recherche d'autres employés, puis aller me reposer. (Il se tourna vers Augustin.) Sieur Carpentier, à demain.

Après un léger salut en abaissant le haut du buste, il se retira dans le noir de son vieux manteau et le silence de ses pas.

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[7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé] Empty Re: [7 décembre 1597] L'homme est un loup [Terminé]

Message par Augustin Carpentier Sam 19 Déc - 11:34

A peine le jeune homme avait-il quitté la table que Carpentier, lui aussi, s'était esquivé comme un fantôme. Décidément, ce prêtre l'inhibait. Trop bon vivant, plus grand que nature, il occupait l'espace de ses ailes déployées, et le triste sire qu'était l'architecte ne souhaitait qu'une chose : lui abandonner la scène bien volontiers. Sincèrement, sans qu'aucune démonstration de ferveur religieuse ne s'en mêle, il n'aimait pas les bordels, endroits tristes et oppressants comme des marchés aux esclaves, et il n'aimait même pas la luxure, seule étoile qui y brillât encore. C'était moite, sale, putride, hypocrite, cauchemardesque parfois ; ça communiquait les pires miasmes, et ça risquait même de créer la vie, merci bien.

Naturellement, il ne dit pas tout ça à voix haute. Il se contenta de remercier mille fois son employeur pour sa nature chaleureuse et enjouée, et de trouver des excuses pour fuir au sommet des escaliers, où il se réfugia dans son lit, encore tout retourné de cette entrevue. Il en tournait sans cesse le bilan dans sa tête, en tâchant de se rassurer qu'il était voué au succès, non à quelque chute infernale.

Cette nuit là, l'hypocras lui donna des rêves étranges ; à moins que ce ne soient les démons de son ambition qui venaient le visiter, et lui souffler à l'oreille un poison qui le rendait malade.

Il souffrait de vertige, pris au milieu d'un tourbillon de lueurs. Certaines rougeoyaient comme des brases, d'autres étaient opalescentes comme les regards d'un fauve dans la nuit, d'autres encore reflétaient toutes les couleurs des pierreries de la couronne, telle qu'il se l'imaginait en tout cas. Les sons n'étaient pas en reste ; les tambourins du sabbat frappaient une sourde mélopée qui remontait dans ses jambes, vibrante à le faire trembler, jusqu'à lui saisir le coeur. De toutes parts, des cris sauvages lui parvenaient... Oui, c'était bien le bal des sorcières. Mais on ne lui réclamait pas de sauter au-dessus du feu. On lui remettait quelques accessoires barbares, une crinière de lion, une baguette magique qui amplifiait sa voix, et on lui ordonnait de prononcer l'incantation du rituel.

Pourquoi lui ? Pourtant, il s'exécutait, et les mots sortaient d'eux-mêmes de sa bouche, comme s'il les savait d'avance par coeur. Et soudain, on lui présenta un miroir. Il avait les yeux enfoncés dans des cercles noirs qui lui donnaient l'air d'un cadavre, et du sang sur les lèvres. Autour de lui, alors qu'il descendait de scène, apparurent alors des visages connus, qui paraissaient frappés d'horreur en le voyant : le prêtre, Achille, mais aussi d'autres plus anciens. Le roi de la forêt d'Aiguemorte, ce bon diable que rien ne pouvait choquer, paraissait pour sa part ravi de l'aventure ; mais il est vrai que jamais Augustin ne lui avait vu un autre visage.

En revanche, le sieur Coldris de Fromart – qui lui faisait parfois l'honneur de présider à ses mauvais rêves – fixait un regard effaré sur une scène qui se déroulait juste derrière lui ; Augustin tourna la tête et vit, sur la scène du rituel, le jeune Alduis qui apposait ses lèvres sur le visage d'un autre garçon, dont il ne discernait pas les traits.

Augustin se sentit tomber, et se réveilla en sursaut, la sueur au front et le regard traqué. Mais il était bel et bien à la taverne de l'Ours Noir, seul dans une chambre bien close. Et l'aube approchait ; il aurait du travail aujourd'hui. Il chassa ce rêve étrange au fond de son esprit, en se promettant de ne plus jamais y repenser.
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