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[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé]

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Message par Le Cent-Visages Mer 6 Jan - 19:22

AVERTISSEMENT:

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Direct11

M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général

Une visite de très mauvaise augure approchait. Le Ministre des Affaires étrangères s'était annoncé - que venait-il donc faire ici, celui-là ? L'Hôpital Général ne rentrait pas dans ses fonctions et jusqu'à preuve du contraire, il ne se situait pas de l'autre côté de la frontière... hormis éventuellement de celle du bon droit, et encore cela dépendait-il du point de vue. Et avec lui, le très droit, très pieux, très cul-serré et exigeant Dyonis de Frenn, Premier Conseiller. Ne pouvait-il aller exercer ailleurs ses conseils ?
Monsieur Berlingtham ressentait une vive tension depuis son réveil. Il savait que le seigneur au crochet s'était lancé dans une grande chasse aux optimisations fiscales. Avait-il pu entendre parler - et y trouver à redire - des arrangements patronaux des dirigeants de l'institution ? Allons ! Il ne s'agissait pourtant que de réclamer un peu d'efforts aux pensionnaires, que l'Empire, en sa grande générosité, accueillait et nourrissait malgré leur qualité de mendiants, d'infirmes, de parasites des rues, d'incurables, de filles-publiques et autres rebuts dégénérés de la société. Les petites mains à peu près valides du lot pouvaient bien effectuer des petites tâches demandant peu de qualifications, et en faire bénéficier la sous-traitance de certaines entreprises.

Le directeur était cependant bien conscient que tel ne serait pas le bon discours à tenir au Premier Conseiller. Ménager la chèvre et le chou serait de mise. Ne pas s'attirer d'ennuis. Mais ne pas non plus faire fuir les patrons qui pourraient apprendre les résultats et propos tenus lors de cette visite. Avant d'aller accueillir ses prestigieux hôtes, le sieur Berlingtham se signa. La tâche lui serait doublement ardue... qu'il n'était à la tête de l'établissement que depuis deux semaines ! L'homme ne connaissait même pas encore complètement les lieux, et encore moins l'identité ni la personnalité de tous les internés. Il devait donc s'en remettre à un des plus anciens des enfermés pour conduire Ses Seigneuries là où elles le désireraient.
La peste ! Pourvu que cet abruti d'Édouard se tienne ! Il n'avait pas toute sa tête, manquait de philtre parfois... mais disposait d'une mémoire remarquable et d'une certaine débrouillardise. Et puis, il ne pouvait parler qu'à l'écrit sur une petite ardoise. Ce n'était pas avec l'espace laissé par celle-ci, ni par ses rares borborygmes, qu'il saurait faire comprendre beaucoup de choses aux deux hôtes. Ses jambes valides pour les guider, ses doigts pour pointer ceci ou cela suffiraient.
Le sieur Berlinghtam inspira. Il se dirigea vers la grande porte de l'institut quand on y sonna, ouvrit et s'inclina profondément devant les deux austères Messieurs. Un gringalet sur béquilles les accompagnait. Sûrement un esclave.

-- Monsieur le Premier Conseiller, Monsieur le Ministre, c'est un immense honneur pour cet établissement que de vous recevoir. Nous espérons tout faire pour contribuer aux missions gouvernementales qui vous amènent céans. Donnez-vous la peine d'entrer.

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Edouar13

Édouard, interné*

Édouard regardait, encore à demi-caché derrière une vieille colonne comme le sordide établissement en comptait tant. Ces abrutis avaient préparé la visite et donné un coup de peinture fraîche à la plupart des salles. Il s'amusa de la courbette du directeur devenu soudain comme un petit roseau devant les deux grands personnages. Aux côtés de ces Seigneuries, un petit bout d'invalide attendrit le regard de l'interné. Celui-là aurait presque pu être un de ses camarades d'infortune, ça se comprenait très vite.
Les deux Messires, on n'avait pas exactement dit à Édouard de qui il s'agissait. Oh mais sans doute un de ceux qui décidaient les guerres, comme celle à laquelle il avait perdu toute la moitié basse de son visage, explosé avec une bombe à la frontière de Hô-Yo. Un trou béant de la fin de sa gorge jusqu'à sa lèvre supérieure - dissimulé par un épais tissu encore régulièrement tâché de pus même bien des années après l'accident. Au retour de la guerre, le garçon alors très jeune avait été jeté de partout, avait erré dans la rue, fut ramassé par les archers de l'Hôpital.
Comme tout le reste de son corps fonctionnait sans problème, Édouard était fortement sollicité comme le dit l'euphémisme des papiers. Au moins, il connaissait quasiment tout le monde ici, sympathisait même, connaissait les lieux comme sa poche - si bien qu'on venait souvent le trouver. On avait besoin de lui. Et tant qu'à faire, l'homme avait décidé de faire croire qu'il n'avait pas que la gueule de complètement déglinguée. Simuler un petit pet au casque, cela lui offrait de se permettre bien des choses et de générer moult malaises.

Il attendit qu'on l'appelle à sortir de derrière son poste. En restant droit, presque décontracté dans la dégaine de sa silhouette effilée, mains aux poches. Pas de révérence, il avait oublié. Il regardait un peu ailleurs, puis revenait sur les visiteurs, puis fixait une tâche là bas dans l'angle...
Tout passait par les prunelles et les sourcils très expressifs d'Édouard. C'étaient eux qui riaient, souriaient, se mettaient en colère... Dans sa poche attendait une craie. Pendant à son cou, une petite ardoise qu'il prenait en main quand il fallait. Au moins aujourd'hui, avec ces trois-là dans la place, la journée serait un peu différente.

___________

*Transposition RPGique assumée d'un personnage de Au Revoir Là-haut ^^
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Mer 6 Jan - 20:18

Dyonis se sent prêt. Arrivé parfaitement à l'heure devant la porte de l'institution, il lui tarde de découvrir ce qui peut réellement s'y tramer. Les malversations se révéleraient-elles vraies ? Les sous-traitances entrepreneuriales également ? Va-t-il découvrir d'autres choses encore... Il espère au moins que l'institut de charité fait correctement son travail par ailleurs.
Très curieusement, Coldris de Fromart a récemment insisté pour venir lui aussi à l'Hôpital Général. Le Premier Conseiller ne peut refuser une telle proposition, dans l'optique de l'entretien de bonnes relations professionnelles avec les Ministres - malgré les tensions qu'il avait déjà pu avoir avec le vicomte. Voilà qui lui paraît stratégique, même s'il doute que le bien des internés soit la préoccupation première du Ministre des Affaires étrangères. Il ne tardera pas à connaître les raisons pour lesquelles Coldris a tenu à mener cette inspection en sa compagnie. Bien curieux duo qu'ils allaient faire.
D'ailleurs, le vicomte vient tout juste de le rejoindre... accompagné d'Alexandre ! Seigneur Dieu ! Que signifie la présence du jeune Bellanger aux côtés du seigneur de Fromart ? Dyonis a bien entendu dire récemment que le petit esclave avait encore été arrêté pour homosexualité. Et que le Tribunal ainsi que le Cardinal avaient eu l'indulgence de le tirer de cellule. Mais il semble qu'un arrangement ait eu lieu entre Matthieu Cassin et le vicomte - ce que le seigneur de Frenn ne savait qualifier de bonne ou mauvaise chose... Il essaierait de savoir comment Alexandre est traité. Dans cette nouvelle configuration, le faire affranchir allait devenir une complexe affaire.

Dyonis aura accueilli son collègue du gouvernement dans les formes les plus courtoises et aura même adressé un petit salut à Alexandre, d'un sobre hochement de tête. Quand le directeur de l'Hôpital Général en personne ouvre la porte, il demeure de marbre. Que cet homme-là comprenne qu'ils ne venaient pas aujourd'hui pour prendre le thé. A sa prise de parole, le Premier Conseiller répond purement et simplement : "Nous y comptons bien."
Il entre. Inspecte les lieux à l'allure au moins correcte. C'est en tout cas ce que suggère le premier coup d'œil et il faut prudence garder face aux apparences. Dyonis repère un grand sifflet à demi caché derrière une colonne. Masqué. Et qui semble à l'ouest...
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Message par Coldris de Fromart Mer 6 Jan - 21:31




Quand Coldris avait eu vent de cette inspection de l’Hôpital Général, il s’était aussitôt dit que c’était l’occasion idéale de recruter de nouvelles perles pour les soirées de Sa Majesté. Certes aucune n’équivaudrait jamais à celle qu’il avait dénichée récemment et qu’il comptait lui offrir, mais ne savait-on jamais !
Il était d’autant plus motivé à assister à cette inspection que son cher Premier Conseiller avait insisté pour la faire en personne. Tant de zèle à la tâche ! Officiellement, le Ministre des Affaires Etrangères avait invoqué une quelconque surveillance fiscale des denrées produites partant à l’étranger, quant aux bons soins octroyés à ces individus, ma foi ce ne pouvait guère être pire que de faire l’aumône avachie au coin d’une rue pleine de pisse.

Alexandre avait également été convié à assister à l’évènement. Il comptait tester le jeune homme sur sa capacité à respecter ses engagements et à rester impassible en toute circonstance. Il savait pertinemment qu’il serait révolté de ce qu’il découvrirait, mais les règles étaient claires : pas de commentaire. Pas de réaction. Pas d’initiative. Après discussion, il était autorisé à évoquer deux points : l’avortement et les considérations religieuses liées aux invalides et allant dans le sens de la Réforme.

Coldris descendit d’un pas lent les quelques marches de sa voiture suivi par Alexandre. Il étouffa un sourire de satisfaction à la mine étonnée du baron de Frenn découvrant sa nouvelle recrue. Il le salua cependant protocolairement et le directeur les accueillit. A ses paroles, Coldris n’eut qu’un regard impassible et froid comme il en avait l’habitude. Il entra à la suite du Premier Conseiller et laissa son regard vagabonder dans le décor. Il y avait cette odeur acide qui flottait dans ses narines, diffuse, mais prenante : de la chaux.

- Vous avez refait la peinture pour notre arrivée ? demanda-t-il un brin caustique avec son détachement habituel.

Encore une idée du protocolaire Premier Conseiller… Depuis quand avertissait-on d’un contrôle ? Avec un peu de chance, il avait même envoyé une liste de recommandations. Enfin cela ne le concernait pas, après tout, il n’était pas là pour ça.

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Message par Alexandre Mer 6 Jan - 22:27

Alexandre se sentait atrocement nerveux à l'idée de cette première visite en compagnie de son maître à l'Hôpital Général. Il redoutait de commettre un impair. Il ne pouvait le décevoir. A la moindre erreur, tout s'effondrerait. Afin de se détendre, le jeune homme se rappelait cette visite, effectuée deux jours plus tôt, dans la famille de son jeune frère et de cette impassibilité dont il avait su se rendre maître. Peu importait les visions qui viendraient dans ce lieu dont les rumeurs en ville décrivaient comme sinistre, Alexandre ferait taire la sensibilité de son cœur.

Il se rappela de son objectif : devenir le secrétaire du ministre des affaires étrangères. Bientôt, le petit esclave s'effacerait et montrerait au monde une superbe ascension. Il s'imagina ensuite sa mère, recluse dans son couvent, qui recevrait la lettre annonçant cette nouvelle incroyable. Elle rayonnerait de fierté et serait folle de joie. Cette pensée le réconfortait et lui donnait toute la force dont il aurait besoin pour s'acquitter de cette visite de la manière dont son maître. Il se décida à repasser dans son esprit les informations qu'il avait étudié pour se préparer à cette inspection. Comme Coldris lui avait annoncé qu'il pourrait prendre la parole pour évoquer l'avortement et les considérations religieuses sur les infirmes dans le sens de leurs projets de Réforme, Alexandre avait travaillé avec assiduité pour connaître les prérogatives de l'Hôpital Général, sur les cas des filles-mères et d'autres affaires qui pourraient avoir son utilité. Le ministre avait eu cependant à un moment une répartie qu'il n'avait pas compris, lui demandait s'il comptait l'accompagner avec trente-cinq dossiers et Alexandre avait jugé bon de ne pad relever pour se concentrer sur les papiers qu'il était en train d'étudier.

Ils venaient à présent d'arriver devant le bâtiment, là om les attendait le seigneur de Frenn. Alexandre s'obligeait à demeurer impassible, à la fois pour respecter son engagement et pour montrer au baron à quel point il avait enfin muri. Il sourit intérieurement de sa surprise en le voyant tiquer de sa présence, puis le salua sobrement.


"Bonjour votre excellence."

Il referma aussitôt la bouche et suivit les deux hommes, s'obligeant à marcher vite en dépit de ses béquilles pour ne pas les ralentir. Ils s'arrentèrent face au directeur qui les salua d'une politesse que l'infirme devina mielleuse. Il avait assez entendu son père adoptif e d'autres clients de la librairie Bellanger pour se laisser duper par ses faux accents de sincérité. Son maître lâcha brusquement une répartie basée sur cette odeur de chaux pénible et Alexandre réprima le sourire qui lui venait. Il était manifestement en grand verve aujourd'hui ! L'inspection promettait.
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Message par Le Cent-Visages Jeu 7 Jan - 10:54

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
Édouard, interné

A la répartie déjà salée de l'un des Messires, on pourra entendre un long grognement. Guttural, comme directement craché d'un cratère. Il sera difficile de deviner que c'était un rire. Celui d'Édouard qui cette fois-ci allait être repéré par tous. L'enfermé ne savait pas qui était le plus drôle dans l'histoire : celui qui avait prévenu de la visite d'inspection - certes le plus tard possible, la veille, mais sérieusement ? Le nouveau directeur qui était tombé dans le panneau et avait fait repeindre en urgence ? Ou ce Monsieur en noir qui en faisait ouvertement la remarque.

-- Oh, oui, quand on a su la visite de Vos Excellences, nous avons tenu à les accueillir impeccablement en reprenant les rares petites malfa......

M. Berlingtham se dépatouillait en ces termes quand il fut interrompu par le borborygme du patient et, en cet instant, il l'aurait loué - pour une fois - de cette intervention qui allait lui permettre la diversion. Il se tourna vers lui, força un sourire et l'invita à approcher avant d'annoncer aux visiteurs :

-- Comme ces Excellences le savent peut-être, je ne suis entré en fonctions que tout récemment. Je confesse humblement ne pas connaître encore sur le bout des doigts les moindres arcanes de ces lieux ni l'ensemble des patients.

Et vu tes faux-pas au démarrage, songea l'interné, tu vas peut-être repartir aussi vite que tu es venu. Ce que dans son dos il signifia d'un haussement de nez en direction de la porte et d'un tour de doigt mimant une horloge. En fait, cette visite serait plus amusante que prévue. Le malade prit cependant soin de retrouver aussi sec une posture sage si le dirigeant se retournait. Déjà, le directeur achevait :

-- Édouard va nous accompagner et pallier les renseignements susceptibles d'encore me manquer pour votre orientation optimale. Il... fréquente les lieux depuis même plus longtemps que la majorité des gens qui y travaillent.

L'Hôpital Général de la capitale observait un important roulement de personnel. Bosser au milieu d'invalides lourds n'était pas le projet de vie de grand monde... Sur serment - et secret médical - les sortants n'évoquaient rien de ce qui se déroulait entre ces murs. D'autant que cela reviendrait à se compromettre soi-même tant les commis avaient eu leur petite part de ces menues affaires. M. Berlingtham cacha au mieux son dépit d'avoir à être dépendant, ces premiers jours de travail, d'un de ces prétendus dépendants de la société... Bientôt toutefois, il n'en aurait plus besoin.

Arrivé au niveau de ces Seigneuries - le Premier Conseiller, rien que ça ! Et un Ministre... ministre de quoi, celui-ci ? - c'est vers le jeunot aux béquilles qu'Édouard affichera surtout un salut. Le sourire dans le regard, et dans ses sourcils haussés en de jolis arrondis. Pour les deux autres, il inclina brièvement le haut du buste pour la forme. S'arrêtant des yeux sur le grand sévère aux prothèses en bout de bras, il lui mit sous le nez son ardoise après y avoir griffonné à la hâte :

FAITES COMME
A LA MAISON


Et pour cause, avec moins de Bonne Fortune, cet aristocrate aurait pu être un de leurs camarades de renfermement. Qu'il se sente comme chez lui ! Pour le coup, c'était un petit mot sincère. Taquin, mais sincère. Édouard effaça sitôt après le contenu de son ardoise, non sans que M. Berlinghtam ait eu juste le temps de lire... et de se retenir de se pincer l'arrête du nez. Vivement qu'il ait acquis toutes les connaissances pour lesquelles il avait pour le moment besoin de ce déglingué. Ensuite... bon, ce serait une paire de bras et jambes valides en moins, mais qu'importait. Et pour Édouard aussi, à vrai dire, qu'importait d'en finir tôt ou tard.

-- Par où souhaitez-vous commencer ? enchaîna sans tarder le directeur.

Comme il avait hâte d'en terminer déjà ! La veille, des gens d'armes étaient venus prévenir de l'arrivée de ces Messieurs. Et avaient pris soin de repartir avec l'intégralité des livres de comptes et documents administratifs. Qu'ils ne se volatilisent pas mystérieusement pendant la nuit ni ne changent. Lesdits papiers se trouvaient en la possession du seigneur de Frenn. M. Berlinghtam avait prié pour que rien de ce qu'il allait y lire ne le heurtât puis avait misé sur le bon accueil dans un lieu à peu près esthétique... ce dont cependant il se mordait à présent les doigts. Stupide décision prise dans la panique.
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Jeu 7 Jan - 10:55

Dyonis a longuement hésité : prévenir ou non ? Il a finalement opté pour l'affirmative, éternellement scrupuleux qu'il est, préférant éviter d'avoir à répondre d'un "vice de procédure", mais aussi afin d'éviter le désordre en ne donnant pas au peuple l'impression qu'on venait contrôler par surprise un institut "de charité" comme des fraudeurs. Tant que rien n'est démontré, autant ne pas générer de la contestation ni de la méfiance vis-à-vis des autorités publiques dans les esprits des vassaux. La chose passera donc auprès du peuple comme une visite de courtoisie dûment annoncée. Dans un premier temps, du moins. Toutefois, le baron avait donné ordre expresse à ses hommes venus prévenir de ne pas repartir sans l'intégralité des documents. Il les a avec lui et les ouvrirait pour commentaire en présence du directeur, même si dans son carrosse le Premier Conseiller y a déjà jeté son premier coup d'œil entre deux courriers dictés à tel poste de prévôté, tel collecteur d'impôts.
En arrivant, le seigneur de Frenn aura noté la grande politesse - même la distinction - avec laquelle l'a salué Alexandre. Le garçon a  mûri, ou du moins aujourd'hui il se tient calme et raisonnable. Serait-ce là l'effet des traitements de son nouveau maître ? Il n'en doute guère : le vicomte de Fromart n'est pas homme à se laisser désobéir.
Après les courbettes et les politesses du directeur, Coldris a cette remarque pour le moins... directe et amusante. Entre la pointe acide et bien méritée adressée par le Ministre et la froideur affichée par le Premier Conseiller, le ton est donné. Dyonis comprend que ce tout nouveau directeur n'a rien d'avisé, pour être tombé dans le panneau d'une réfection en urgence. Rien de tel pour se désigner coupable. A cette pensée et à la pique du Ministre, le coin de sa lèvre se retrousse dans une ombre de rire contenu. Rire muet qui fond aussi sec quand vrombit une respiration des Enfers. Le baron comprend de qui elle provient : cet homme au masque. L'individu approche. A le voir faire ses étranges gestes dans le dos de M. Berlingtham puis s'incliner sans politesse, presque par-dessus la jambe, il apparaît que celui-là n'a au choix pas froid aux yeux, pas toute sa tête... ou plus rien à perdre.
Il note la sympathique expression d'Édouard pour Alexandre, avant de se voir mettre sous le nez cette ardoise et son contenu. En effet non. Vraiment plus rien à perdre. Dyonis demeure neutre, sans réponse ni expression particulière dans le regard hormis son indéfectible sévérité. Ce malheureux n'a pas tort : le Ciel a donné au seigneur de Frenn le privilège d'une bonne famille sans laquelle il aurait pu en être, de ces rebuts installés là. Aussi laisse-t-il pour cette fois sans conséquence le mot insolent de l'interné... d'autant qu'il pourra s'avérer un contre-poids d'une certaine utilité pour la suite de l'investigation. Il y aura des vers à tirer du nez d'Édouard.

"Par une visite complète des lieux." répond Dyonis, sec, à la demande du sieur Berlinghtam. "Puis nous nous installerons dans votre office pour lire par le menu les comptes et fichiers que vous avez eu la gentillesse de céder hier à nos agents." (à Édouard) ''Comment avez-vous atterri céans ?''
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Message par Coldris de Fromart Jeu 7 Jan - 13:43




Il y eut cet étrange grognement quasi bestial qui parvenait de l’une des colonnades. Coldris tourna la tête pour apercevoir l’un des pensionnaires de ce charmant établissement que l’on avait pris soin de repeindre pour leur visite. Il nota non sans une certaine fierté que son sens de la repartie avait amusée tant ce bonnet nuit de Premier Conseiller que son apprenti secrétaire. Le Directeur en revanche sembla s’enliser un peu plus chaque seconde et le Ministre n’eut pour lui qu’un sourcil levé et un regard aussi sévère que possible.

Derrière, il remarqua « le grogneur » faire le pantomime sans parvenir à comprendre exactement le sens. Il n’avait toutefois aucun doute sur le caractère moqueur de la chose. Sa commissure se releva légèrement. Finalement, ce serait peut-être non seulement productif, mais en plus amusant. Le curieux homme défiguré leur fut présenté au titre de leur guide pour cette visite. Il lui adresse un discret signe de la tête et note son intérêt tout particulier pour Alexandre. D’un coup d’œil, il lut rapidement l’ardoise et retint de justesse un petit rire face à ces cinq mots criant d’ironie et d’une certaine impertinence polie qui ne pouvait que lui plaire.

Ordre fut donné d’effectuer une visite complète des lieux que Coldris ponctua d’un petit commentaire comme à son habitude

- Au moins vous a-t-on épargné la reprise des rares petites malfaçons de vos registres de comptabilité nota-t-il non sans sarcasme.

Sur ce, il prit la suite du Premier Conseiller, tout en observant lieux et pensionnaires.

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Message par Alexandre Jeu 7 Jan - 14:32

Alexandre restait en retrait des deux nobles, soucieux de tenir son rang et les ordres auxquels son maître l'avaient soumis. Il suivait cependant avec grand attention ce qui se passait autour d'eux et ne perdait rien du discours du directeur. Ses nouvelles paroles, coupées par le bon mot du ministre qui avait achever la pensée que l'homme aurait voulu dissimuler, prouvait l'intuition qu'il avait eu en l'apercevant. Il était soucieux de bien faire de passer la brosse à reluire, la spécialité de son père adoptif. Il choisissait bien mal ses interlocuteurs pour mettre en valeur c savoir-faire : ni le seigneur de Frenn ni Coldris n'appréciaient les flatteries.

Le directeur déclarait ne pas être fonction depuis longtemps et déléguait un de ses pensionnaires. Alexandre avisa en la direction indiqué et aperçut un homme qui sortait d'une colonnade, qui faisait un geste évocateur à l'intention de son supérieur, mais en catimini, pour désigner ensuite la porte. le jeune homme perçut dans son regard l'ironie de ce mouvement et traduisait, sans les mots, que M. Berlingtham pourrait quitter prochainement ses fonctions. Disposait-il d'informations pour le justifier ? Ou était-ce un espoir ? Alexandre leva la tête vers Coldris et réprima un sourire de constater que celui-ci n'avait pour une fois rien vu. Il aurait le privilège, après leur visite de l'en informer, de retour dans la voiture.

Le directeur introduisit cet espion derrière la colonnade pour le présenter comme leur guide, afin de le suppléer, lui, qui n'avait pris ses fonctions depuis peu dans l'établissement. Son prénom amusa intérieurement Alexandre et réveilla les connaissances récemment découvertes. Edouard, ou Edward, unique fils du roi Henri VIII, qui n'avait pas personnellement régné. Pourtant, sous son avènement royal l'Angleterre avait adopté l'anglais lors des offices religieux et l'abolition du célibat des prêtres. Des mesures importantes qui étaient pour lui et Coldris les pierres angulaires de leur projet de Réforme. Alexandre chassa rapidement les notions historiques qui venaient s'immiscer dans son esprit pour revenir au présent. Edouard se tenait près lui et semblait le gratifier d'un sourire amical. Il nota en même temps le message de son ardoise, rapidement effacé.


Un infirme muet.

Le corps entier d'Alexandre se tendit aux souvenirs qui remontaient. Il se rappelait de cette folle qui avait su se joue de sa naïveté pour parvenir à ses fins. Il gardait aussi en mémoire le geste surpris tout à l'heure, à l'encontre du directeur. On disait que la parole avait été donné à l'homme pour cacher sa pensée mais la parole, grâce à l'élocution indiquait régulièrement des indices. Tout ceci ne lui faisait augurer qu'un bien mauvaise intuition avec Edouard. Il n'aimait pas plus cette familiarité et lui répondit d'un visage fermé et impassible. Pensait-il que tous deux appartenaient au même monde ? Son père adoptif le menaçait souvent de le conduire ici mais celui-ci ne l'aurait jamais fait. Il avait trop besoin d'un héritier, tout comme il appréciait ce moyen de pression que sa présence exerçait sur sa mère.

Ainsi, Alexandre resta impassible, légèrement même condescendant, face à leur guide, lui accordant un bref hochement de tête pour répondre à sa salutation. Il s'empressa suivre les deux nobles dans la visite, soucieux de ,ne pas les retarder ave son infirmité.

Alexandre
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Message par Le Cent-Visages Jeu 7 Jan - 19:06

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
Édouard, interné

Édouard remarqua les très discrets sourires du Premier Conseiller à la pique du Ministre, et du Ministre à sa propre petite facétie tracée sur l'ardoise. A son agréable surprise, aucun de ces Messieurs ne semblaient heurtés ni disposés à le réprimander - et quand bien même, ce menu détail ne l'aurait pas arrêté. Au point où on en est, comme dit l'expression consacrée. Il se pouvait d'ailleurs que ces deux Seigneuries aient bien saisi qu'elles allaient devoir davantage compter sur lui que sur ce fantoche de directeur pour découvrir les lieux ! Ce pauvre Berlingtham faisait peine à voir sous les regards glacials des prestigieux hôtes.
Le défiguré en revanche ne sut pas trop bien comment interpréter l'attitude du petit serviteur aux béquilles qui suivait docilement le Ministre. Le jeunot répondait d'un très sobre hochement de tête à son salut mais demeurait lui aussi assez distant, pour ne pas dire froid. On sentait du reste qu'il se forçait à se donner de l'allure, de la droiture, tout invalide qu'il était. Pour le coup, voilà une attitude que l'ancien soldat appréciait à sa juste valeur : joli sens de la discipline. Quant au reste... cette froideur, ce mutisme, oh, Édouard les mit sur le compte du statut du garçon : un commis, peut-être même un esclave, qui devait avoir reçu quelque interdiction formelle de la moindre expression de la part de son maître manifestement pas commode. L'interné ne réagira donc pas aux prises de distances du serviteur et gardera pour lui un regard tout à fait sympathique si leurs expressions venaient à se recroiser.

Et voilà que le Premier Conseiller s'intéressait à lui. Eh bien ! Très peu de Grands auraient pris cette peine, avec lui ou n'importe lequel des autres internés. Que lui répondre... Tenter, peut-être, de lui glisser un petit indice sur la façon dont les choses allaient réellement dans cette fichue institution ? Il se pinça la lèvre. Prépara son ardoise. Griffonna d'un côté puis de l'autre. Comment avez-vous atterri ? Hm.

SUR LE C... !


Pour accompagner cette première réponse : une drôle d'expression avec un sourcil froncé et l'autre haussé avec facétie. Comprendrait-il ? Qu'il y avait de quoi être effectivement sur le derrière en découvrant les vraies conditions céans... Mais aussitôt après, Édouard retourna l'ardoise, pour révéler la réponse sérieuse :

BOMBE.
HÔ-YO.

Cette fois-ci, pas la moindre trace de plaisanterie sur le haut de son visage. Sourcils droits et regard grave. Sa tête s'abaissera très légèrement, presque comme pour demander pardon de l'irrévérence de la première face de l'ardoise - avec le secret espoir qu'elle ait atteint son véritable but... Auprès du Premier Conseiller, ou même du Ministre ou de son jeune serviteur.

Édouard ne poussera pas un nouveau grognement hilare à la seconde bombe - figurée ! - du Ministre, quoique le cœur y était. Seuls ses grands yeux verts cillèrent et furent traversés d'une lueur amusée. Il lui plaisait, ce type. Berlingtham se voyait rhabillé pour l'hiver en quelques secondes déjà !

Le directeur n'aura cette fois-ci pas manqué d'adresser ostensiblement, devant ses visiteurs offensés par le dément, un regard noir et menaçant à l'interné qui faisait encore des siennes. Quelle mouche le piquait ? Puis, se retournant vers ses hôtes, il grommela un :

-- Je vous prie de le pardonner. Il n'a plus toute sa tête.

Édouard palpa fièrement son masque, hocha la caboche et décida de trouver cette dernière phrase drôle. Les petits tressautements de ses épaules en témoigneront. Allez, un peu d'indulgence pour ce pauvre Berlingtham ! L'interné était dans un bon jour et pouvait bien faire aussi la charité de temps en temps en juste retour des bons soins de céans.

-- Mais Vos Excellences peuvent compter sur lui en tant que guide fiable. (Un temps, serrant les dents à la nouvelle attaque du Ministre qui lui impulsa une nouvelle vague de chaleur) ...Je puis vous garantir que vous n'y verrez rien d'illogique. Maintenant si vous voulez vous donner la peine de me... (ou plutôt Édouard, malheureusement) nous suivre.

Mains dans les poches, l'interné se dirigea sans hésitation à travers les moindres couloirs de l'Hôpital Général, selon les demandes du directeur ou de ces Messieurs quant à l'ordre des salles à inspecter. Derrière cette désinvolture, l'enfermé gardait le cœur lourd pour ses camarades. Qu'en penseraient les deux Grands ? Édouard prenait du reste grand soin à marcher beaucoup plus lentement qu'il l'eut fait naturellement : pour le jeunot aux béquilles. Il regarda deux fois dans sa direction, discrètement, pour se caler avec soin exactement sur son rythme de marche.

M. Berlingtham fit voir les cuisines. Nettoyées. Assez correctement éclairées. Des employés y travaillaient, mêlés à certains internés - les plus en forme et mobiles. Une soupe cuisait dans des marmites, tandis que des femmes coupaient des tranches de pain, pelaient des légumes. Certaines semblaient égarées : des démentes. Aux questions de Dyonis, d'autres furent présentées comme des catins ou des fille-mères traînant les rues et qu'il valait mieux ramasser, mettre au travail et garder sous un toit chaud. On alla ensuite dans les dortoirs. Remplis. Évidemment la plupart des malades étaient autorités de repos. Si certaines étaient hagards, d'autres ployaient la tête à l'entrée du directeur et de deux grands personnages. D'autres encore souriaient de toutes leurs dents, à la vue de leur camarade au masque qui leur rendait la pareille d'un énergique salut de la main. Des gestes d'amitié pour survivre au milieu de l'horreur. Comme au front. Et tant pis s'ils passaient pour des benêts. Eux, ils savaient ce qui les tenait en vie au quotidien.
Sur des mètres et des mètres, des lits à la chaîne. Des malades et éclopés de tous genres. De tous âges. Déments à camisoles, béquilleux, voiturés, bandés... Femmes d'un côté, hommes de l'autre, dans un drôle de brouhaha où se mêlaient vaguement les paroles plus ou moins sensées qu'on chuchotaient, des bruits parfois à peine identifiables, des petites chansonnettes qui occupaient certains... Édouard se tint droit, prêt à répondre à n'importe quelle question sur n'importe lequel de ces patients. Il les connaissait, lui. Et les regards amicaux de beaucoup d'entre eux le laissaient deviner. Infirmier et infirmières circulaient entre les lits. On s'inclina devant les visiteurs. Malades et employés présentaient bien : lessive expresse.

Berlingtham lui aussi se tenait à la disposition du Ministre et du Premier Conseiller. Sa présence impressionnait les internés. Mais un certain nombre du lot offraient des sourires forcés pour les visiteurs. Édouard serra les poings sans ses poches. Et les salles de travail ? Ce trou de balle daignerait-il y emmener ses visiteurs ? S'il essayait de la dissimuler, tant pis, Édouard s'en foutrait et se tromperait malencontreusement de chemin ensuite. Ce serait son dernier fait de guerre.
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Ven 8 Jan - 10:23

À la question que Premier Conseiller, Édouard se permet à nouveau de répondre un jeu de mots. Dyonis pousse un minuscule souffle nasal en guise de rire, en se demandant si par cette plaisanterie l'interné essaie de faire comprendre autre chose. Il garde cela dans un coin de sa tête et reporte son regard sur la deuxième face de l'ardoise qui lui est présentée. Silence. Bombe, à Hô-Yo. C'est un ancien soldat, au visage détruit il y a dix-sept ans au cours de cette conquête monbrinienne... Aussitôt la mine du baron est grave et ses yeux partage l'expression du malheureux en face de lui. S'il n'avait pas été infirme, le seigneur de Frenn aurait sans doute eu un haut poste militaire. Il éprouve depuis toujours un immense respect pour les humbles combattants à qui d'Empire doit tant. Les petites mains des batailles...
Devant cet homme, Dyonis ressent l'envie de lui exprimer son estime – comme souvent lorsqu'il rencontre des militaires à qui il met un point d'honneur à témoigner le respect. ''Soldat.'' dit-il, tendant sa prothèse métallique à serrer si le défiguré le souhaite.

Le Premier Conseiller juge bien sûr très déplacée la remarque du directeur au sujet de son patient. Comment ose-t-il ? Ce petit administrateur aurait-il fait le quart, sur un front ? Quant à l'enfermé, ce dernier a-t-il un grain ? Dyonis l'ignore mais quand bien même, cet Édouard paraît infiniment plus intéressant que le notable. Le baron est même traversé d'un instant de révolte. Des soldats de l'Empire ici, dans ces conditions. Lamentable. Oh bien sûr, Monbrina fournit toujours une grosse bourse de retour à la vie civile aux combattants de retour – surtout aux blessés – mai il faut croire qu'après épuisement de celle-ci, Édouard n'a pas réussi à se réinsérer. La Fortune est décidément inégale.
Dyonis rend un regard noir à Berlingtham, appuyé. Il savoure une fois encore la pique du vicomte de Fromart, vraiment en forme en ce jour ! D'une brève oeillade, il fait comprendre au Ministre tout le bien qu'il pense de son intervention, d'autant qu'il doute fort que les comptes de l'hôpital ne comportent rien de honteux. Rien d'illogique ? En effet... selon un certain point de vue froidement mercantile, pour le coup le dirigeant de l'Hôpital Général a sûrement raison sur ce point. Toutefois le soucis de Dyonis est autre. Les deux nobles semblent partager un égal mépris pour ce financier. Entre Coldris et Édouard, la visite va peut-être s'avérer presque plaisante et le baron doit bien reconnaître en cet instant que le Ministre a de l'esprit à revendre – ainsi que certaines valeurs qu'ils partagent indéniablement.

Les voici à commencer la visite, dirigés davantage par Édouard que par le directeur. Dyonis sera à peine surpris de ce qu'ils découvrent aux cuisines puis aux dortoirs. Ob bien sûr, ils sont à nouveau tombés dans le panneau de donner un coup de propre, cependant des détails ne trompent pas. Les habits des enfermés qui sentent trop le propre alors qu'ils sont par ailleurs élimés. Les regards hâves de beaucoup d'entre eux trahissant de piètres conditions. Les gestes d'amitié et les attitudes presque enfantines de certains sont des lueurs d'humanité au fond de ce trou. Sourire pour se protéger. Toutefois, d'autres sourires sont forcés. ''Ne met-on donc pas les catins en maison avant que de les mener céans ?'' demande le Premier Conseiller quand il est question de ces femmes. ''Quant aux fille-mères, est-ce leur place première ?'' Puis, dans le grand dortoir, le baron prend une malade au hasard, la salue et questionne : ''Voudriez-vous bien me décrire votre journée type ?'' Ses pupilles ne manqueront pas de glisser de temps en temps vers Édouard, guignant d'éventuelles interventions de son ardoise. Le baron se retiendra en outre d'avoir un regard d'amitié pour Alexandre, à qui il devine que la visite doit peser même s'il n'en montre rien.
Dyonis n'est pas dupe : de la maltraitance se cache sûrement par ici. S'il la débusque – et découvre du même coup des gains d'argent sur le dos des internés – le Premier Conseiller pourra faire d'une pierre deux coups : réclamer que la moitié de ces excédants soient ré-injectés dans de bonnes conditions pour les enfermés... et que l'autre moitié revienne à la couronne qui finance l'institut. Après tout, une des préoccupations qu'il a en commun avec Coldris n'est-elle pas de renflouer les caisses ? En voilà une opportunité.
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Message par Alexandre Ven 8 Jan - 13:21

Alexandre demeurait toujours aussi impassible, fidèle au rôle que son maitre lui avait demandé de tenir. Il observa le Premier Conseiller interroger le dénommé Edouard sur les raisons de sa présence en ces lieux. Un agacement intérieur le saisit à nouveau de le voir écrire une nouvelle impertinence sur cette ardoise tendue à son interlocuteur, puis un élan de compassion et une légère culpabilité l'envahirent. Le malheureux avait participé à des batailles pour la gloire de leur Empire. Sans des gens comme lui, courageux, leur nation ne saurait être aussi puissante. Il regretta de s'être montré aussi dur et finit par adresser un sourire discret à l'infirme muet pour lui témoigner son respect et sa reconnaissance pour ses états de service. Son esprit songeait en même temps aux boucheries que Alduis avait pu lui décrire. De ces massacres au front. De tous ces morts atroces. Il contempla ensuite à nouveau Edouard et s'agaça intérieurement que ces anciens soldats, qui avaient risqué leur vie pour la patrie, revenus amputés d'un morceau d'eux-mêmes, hantées par des visions cauchemardesques soient aussi mal récompensés. Il garda dans un coin ces réflexions. Durant la visite, il la ressortirait pour évoquer le cas des infirmes si mal considérés à cause des dogmes religieux sévères et injustes.

La voix u directeur troubla ses pensées. Alexandre releva la tête et fixa, impassible là aussi cet homme qui se permettait de juger aussi sévèrement un ancien soldat, puis remarqua l'indignation que le Seigneur de Frenn partagé lui aussi. Il tourna un instant et réprima un sourire, évitant d'observer son maitre. Son intuition lui soufflait un nouveau bon mot en préparation. Il aurait presque pitié pour le directeur. Presque... S'il s'était mieux renseigné, celui-là aurait compris qu'on agissait pas ainsi avec Coldris de Fromart. Autrement, le voici exposé à la cruelle place de la souris avec laquelle s'amusait un chat.

La visite commença véritablement et Alexandre consacra tous ses efforts à presser le pas dans ses longs couloirs pour ne pas ralentir le groupe. Il constata que leur guide prenait du reste soin à ne pas avancer trop risque et à ces regards que celui-ci lui lançaient de temps en temps il agissait ainsi à son intention. Pour éviter de trop le fatiguer ou de le perdre. Le jeune homme se sentit honteux de l'avoir sans doute trop mal jugé, le liant à cette maudite sorcière folle, et lui répondit par un rapide hochement de tête, discret, pour le remercier de sa prévenance.

Leur première étape fut consacrée aux cuisines, là où des femmes s'affairaient, certaines visiblement démentes. Quels moments dans leur existence les avaient fait dérailler à ce point ? Alexandre écouta avec attention les interrogations du Premier Conseiller sur leur provenances : des catins et des fille-mères. Le jeune homme réprima un sourire à la suite de ses questionnements. Si celui-ci leur ouvrait lui-même le portail pour leur permettre d'évoquer leurs réformes... Quel grand homme ! Alexandre leva la tête vers son maître, simulant un air ingénu.


"Cela me rappelle la conversation que nous tenions hier soir, maître, vous souvenez-vous ?"

Le ministre lui répondit d'un air entendu, complice de sa manœuvre, et Alexandre s'en revint vers le Premier Conseiller.

"Ces filles-mères sont des victimes. Leur seul vrai crime a été celui de la naïveté. Un homme sans honneur leur a fait accroire de beaux sentiments, une bonne situation peut-être, et les voilà dans un état terrible, rejetées ensuite de leur famille pour éviter que celles-ci ne jettent sur la maison le déshonneur et l'opprobre. Méritent-elles réellement ce sort ? Il semblerait mieux, pour tout le monde, la société, qui n'aurait pas à gérer leur cas, et les individus, qui seraient plus épanouis, si ces femmes pouvaient se débarrasser du problème avant que celui-ci n'en soit un."

Alexandre marqua une pause, laissant passer quelques minutes pour que le Premier Conseiller s'imprègne de l'idée.

"L'avortement est un crime. Nous le savons bien. Pourtant, il se pratique, malgré les risques judiciaires et sanitaires. L'an dernier, la prévôté recensa trois affaires, dont la dernière remonte au mois précédent. Vous me disiez, votre excellence, une fois que les maisons closes existaient pour encadrer le vice, car la prostitution s'est toujours faite, et se fera toujours. La pratique de l'avortement n'en est-elle pas de même ? Là aussi, on en retrouve des traces depuis fort longtemps. Il serait ainsi préférable de la dépénaliser afin d'exercer un plus grand regard sur ces affaires douteuses, là où se fraie actuellement on nombre de charlatans véreux. Est-ce le fait de retirer la vie dans le vente d'une mère qui gêne ? Mais cette vie.. Est-elle déjà une vie ? Par ailleurs, observez donc ce que nous voyons ici ou les enfants miséreux que l'on voit dans les rues, puis méditez ceci : ces vies nées dans des conditions misérables méritent-elle vraiment d'exister ? Pour beaucoup, privés de ressources, ils se tournent facilement vers la délinquance et finissent tôt ou tard la corde au cou."

Il marqua une seconde pause, puis poursuivit avec son dernier argument.

"Par ailleurs, il serait certainement possible par la dépénalisation de l'avortement, votre Excellence, de réduire un autre crime, plus terrible encore. Les rapports de la prévôté de l'an dernier énoncent que vingt-neuf cas d'infanticides ont été découvert l'an dernier, ce qui fait en moyenne deux par mois. Chaque fois, un malheureux nourrisson assassiné froidement, à la naissance. Dès fois, la mère est prise sur le fait, dès fois, les soldats du guet n'ont retrouvé que le cadavre du pauvre bébé. Et il existe certainement bien plus de ces cas qui ont échappé à la justice. Si l'avortement pouvait être pratiqué avec plus tolérance, les grossesses de ces mères meurtrières auraient été interrompues bien avant la naissance. Ne serait-ce pas préférable à laisser un enfant venir au monde pour l'en retirer aussitôt, sans que celui-ci ne reçoive en prime de baptême ?"

Alexandre termina son allocution sur ces derniers mots, puis observa, impassible, le Premier Conseiller. Qu'en pensait-il ? L'impressionnait-il enfin de sa maturité nouvelle ? En son for intérieur, il s'excitait de ce premier débat d'idées et brûlait d'entendre la réponse.

Peu après, la visite se poursuivit par l'inspection des dortoirs, là où gisait les malades et les infirmes, consignés dans leurs lits. Faibles dépendants. Alexandre chassa les images de son jeune frère qui lui venait et s'efforçait de songer à demeurer neutre. Pourtant, il pouvait s'empêcher de se questionner : combien d'enfants du père Thierry avaient pu finir dans cet établissement ? Il évita de prêter trop attention aux gestes de complicité que les pensionnaires s'échangeraient. Sa sensibilité pourrait reprendre dessus et menacer de fissurer le masque que le jeune homme se forçait à garder. Il préféra tourner un instant la tête vers son maitre et songea que celui-ci n'avait pas prononcé un bon mot depuis longtemps conte le directeur. La souris allait se relâcher si le chat cessait de jouer.



Alexandre
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Message par Coldris de Fromart Ven 8 Jan - 15:07




Rapidement, le baron de Frenn entreprit de faire connaissance avec leur nouveau guide. Entre infirmes, ils devaient se sentir pousser une certaine solidarité. Quoi que à en juger le détachement d’Alexandre… Mais c’était certainement car il tenait à respecter les consignes données. En tout cas pour l’heure, il se montrait exemplaire. Pour sa part, il n’était pas là pour lier de quelconques liens sociaux avec quelqu’un qui ne lui rapporterait de surcroit rien du tout. Il attendit donc la réponse, sans réelle curiosité si ce n’était celle de vérifier jusqu’où irait son audace.
A son premier mot, ses prunelles se mirent à briller et un très léger rictus se dessina. Il avait de toute évidence un sens certain de l’humour et de l’autodérision. La vraie réponse fut plus grave. Une bombe à Hô-Yo. Un soldat donc. Son visage se fit plus grave. Coldris était à l’origine -en partie- de cette guerre. Il en avait bien conscience et n’avait aucun regret pour toutes les vies prises durant cette conquête. Cela avait été le prix à payer pour passer d’un petit royaume sans histoire à un puissant empire. Il pensa à Alduis, à Démétrius… Eux avaient la chance de vivre dans une famille qui pouvait les entretenir en cas de problèmes, mais les autres ? Était-ce juste de les laisser dans les rues ou croupir dans cet hospice pour fous après avoir offert leur vie ? On ne pouvait pas les laisser être mélangé avec des gosses de catins et des dégénérés. Quelle image donnait-on ? Oh ce n’était pas pour faire dans les bons sentiments, seulement, une bonne image, favorisait les conquêtes. Le Prince en place tenait sa légitimité du peuple après tout. Sans parler de la guerre contre Djerdan qui approchait à grands pas et qui n’était pas des mieux accueillies. Le calcul fut vite fait. Il eut un hochement de tête sévère.

- Il est inacceptable que nos infirmes de guerre demeurent ici, Votre Excellence déclara-t-il sobrement sans quitter le défiguré du regard.

Un embryon d’idée commençait déjà à se former dans son esprit. Un hospice pour vétéran. Peut-être même qu’en récupérant les monastères durant la réforme, il pourrait trouvait de quoi les héberger et surtout… Financer cette institution, c’était bien ce que l’on attendait de l’Église non ? Faire dans la charité… Ses réflexions furent interrompues par cet accapareur de merde d’abeilles, ne pouvait-il donc pas se taire à défaut de faire preuve de jugeote ? Il posa sur un lui ses yeux de glace.

- Je trouve qu’il a au contraire beaucoup d’esprit. Plus que certains ici, en tout cas.

Se reconnaitrait qui voudrait dans ses propos. Le Directeur ou les internés. Il scruta sa réaction pour jauger de son niveau d’arrogance personnelle. C’était toujours une information intéressante à connaitre, surtout lorsque l’on commencerait à parler « affaire ». Il emboita leur pas pour effectuer la visite des lieux. Il y avait là toute sorte de personnages, mais aucun du genre qu’il cherchait. Une chose le frappa cependant : comment pouvait-on mélanger ainsi sains d’esprit et déments dans un même lieu ? Dyonis souleva la question et il écouta avec attention la réponse qui ne manquerait pas d’arriver. Pour la première fois depuis leur arrivée, Alexandre prit la parole. Il l’encouragea à poursuivre d’un signe de la tête. Il était curieux de l’entendre défendre ses idées face au Premier Conseiller et de découvrir jusqu’où il avait travaillé le sujet. Il posa sur lui, le regard du Maitre sur son disciple. Son plaidoyer était précis et il avait même été chercher des chiffres ce qui ne manquerait pas de plaire à ce mange-rapport de Dyonis. S’il s’avérait être obéissant, il ferait un parfait Secrétaire. Travailleur comme il était, il dépasserait surement la barre fatidique des trente-cinq rapports pour le prochain Conseil des ministres… Il acquiesça pour exprimer son assentiment et appuya ses propos.

- N’était-ce pas d’ailleurs ce que soulignait votre dernier rapport au Conseil au sujet de la délinquance infantile en pleine croissance ? Vous savez de plus autant que moi, que la justice peut s’avérer fort clémente pour ces petits garnements exploités par de plus gros poissons que les soldats du guêt ne parviennent pas à dénicher.

Le baron demanda ensuite une journée type à une malade et Coldris se prit à espérer qu’elle soit muette simplement pour la cocasserie de la situation. Il se tourna vers le directeur qui avait donné sa langue au chat.

- J’aimerais rencontrer vos lavandières. Je suis admiratif du zèle et de la régularité avec lesquels ses tuniques sont lavées !  félicita-t-il en revanche, vos couturières devraient apprendre à mieux repriser les accros.

Tout était si propre, si faussement ordonné, qu’il avait envie de gratter et de donner un grand coup de pied dans cette fourmilière. D’ailleurs…

- Edouard, passons aux choses sérieuses, je vous prie : montrez-moi les endroits qui  vous répugnent le plus ici, je m’en remets à vos talents de guide.

Il eut un petit sourire pour l’infirme et put sentir le directeur blêmir. Eh bien quoi ? Il n’était pas venu ici pour admirer des vessies transformées en lanterne pour l’occasion. Qui plus est, il avait beau regarder, il ne trouvait rien de particulièrement « exotique » pour leur Souverain, alors autant en profiter pour s’amuser un peu.


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Message par Le Cent-Visages Sam 9 Jan - 11:21

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
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Après avoir apprécié les rires partagés - même d'un souffle ou d'un coin de lèvre retroussé - avec ces Messieurs, Édouard sentit leur sérieux à sa véritable réponse. Leur respect pour l'ancien soldat. Bon. Il resta conscient que ces deux-là étaient de ceux qui en profitaient, de ces guerres. Qui participaient à les faire déclarer et les estimaient bonnes pour l'Empire. Un petit pays sans histoire, ça lui semblait bien aussi... Mais après tout, il n'était qu'un gars du peuple et accepta de se dire qu'il devait y avoir dans la politique moult subtilités qui le dépassaient. Lui, il avait fait son travail. Non, ce qu'il gardait au travers de la gorge, c'était l'incapacité de Monbrina à assurer un retour à une vie correcte pour tant de démunis ! Cela servait à quoi, un si grand Empire, pour ce résultat ? Ce n'était pas sa bourse de vétéran qui avait suffi à le tirer de la panade avec l'infirmité devenue sienne...
Il accepta cependant de laisser de côté ces réflexions et de serrer sans manière la prothèse, tout simplement, puisque cet instant rapprochait comme trois hommes des êtres si éloignés. Une seconde, il fut surpris du contact avec le métal froid. Et consulta le regard de cet invalide qu'il n'avait quand même pas épargné de son ardoise. C'était de bonne guerre va !
Il entendit la remarque du Ministre et arrondit les yeux de surprise, avant d'avoir la reconnaissance dans les prunelles. Mais aussitôt, il fut tenté de gratter sur son ardoise quelque chose capable de lui signifier "C'est gentil mais en fait, c'est acceptable pour personne. Pas dans ces conditions en tout cas." Si peu de place, de temps et moyen. Dans ces moments son verbe lui manquait.

Et c'était sans compter sur le directeur qui le surveillait, attirait l'attention à lui avec ses conneries. Édouard rongea son frein. Il trouverait autre chose et en attendant savoura que le Ministre prenne sa défense, sans n'en rien montrer, continuant d'avancer en un faux détachement. M. Berlingtham détestait ces rapprochements entre les hôtes et l'enfermé. Il gardait un sourire de convenance à sa face. Hochait de temps en temps la tête, notamment à cette suggestion quant aux vétérans.

-- Hm, hm. Oui, sans doute Monsieur le Ministre. En attendant, nous en recevons la responsabilité comme les autres. (Il valait mieux abonder dans son sens. Et à vrai dire le directeur se moquait de ces détails. Les décideurs décidaient. Les administrateurs comme lui administraient. Et à la répartie de Coldris défendant le déglingué, il eut son souffle en suspend avant de se ranger au parti de l'humilité, bien conscient de son mauvais démarrage de cette inspection) Certes. Peut-être suis-je un peu dur, surtout que chacun de nous est quelque part un peu dément et que le début de la sagesse est de s'en rendre compte.

Un peu devant, toujours en marche et entendant cela, Édouard joua à faire tournoyer son ardoise entre ses mains puis à la rattraper, comme pour imiter quelque chose qui travaille à retomber sur ses pattes. Berlingtham se retint : ses hôtes semblaient apprécier leur guide. Ne pas les froisser.

Et la visite de démarrer. Le directeur et l'interné notèrent les regards consternés des seigneurs. Le béquilleux laissait peu deviner ses émotions. Soudain, à l'énorme surprise des deux hommes, ce fut lui qui se lança dans un discours élaboré après que le seigneur de Frenn eut posé ses question.
M. Berlingtham écouta, concentré, mine pincé. Il avait du bagout, pour un esclave ! Cela avait l'air... de quelque chose de répété. Comme si allez savoir quoi fut préalablement entendu avec son maître, car quel maître laisserait un esclave déblatérer de la sorte ? Le directeur s'interrogea. Devait-il... répondre au béquilleux ? Convenance et hiérarchie voulaient qu'il s'adresse au Premier Conseiller. Il ne pouvait cependant pas ignorer le laïus du serviteur. D'où sortait-il d'ailleurs celui-là ? Se tournant vers Dyonis, Berlingtham entreprit : "Votre Excellence, les catins atterrissent ici quand précisément on les retrouve encore dans la rue après plusieurs sommations d'aller en maison. Quant aux fille-mère... l'on ne veut plus d'elles nulle part et certaines viennent d'elles-mêmes pour survivre. Les autres... nous sont amenées si elles parasitent les rues." (Un temps, après l'intervention d'Alexandre, voyant que le Ministre y acquiesçait) "Mais Monsieur le Ministre, et Votre Excellence, le fait que des crimes se perpétuent en cachette doit-il être l'argument pour dépénaliser ce crime ? L'on continue aussi toujours à voler, à agresser... Une vie innocente ne s'ôte guère au ventre d'une mère, quand bien même j'entends... que moins de ces individus donnerait moins de malheureux dont il faille prendre soin. Cependant, nous nous faisons devoir de nous occuper d'eux, avec la possibilité parfois que certains se réinsèrent quand notre administration leur trouve des places ici ou là à l'extérieur. Condamner certains dès le ventre n'est-il pas contrevenant à ce qu'enseigne la morale ?" Là-dessus, il se taira puisque c'était à son collègue que le Ministre s'adressait à présent.

Édouard quant à lui avait les émotions en vrac. D'abord, cette intervention du jeunot. Il l'écouta... médusé. Ne détacha pas de lui ses grands yeux verts durant tout son discours. Maître ? Bigre ! Un esclave. Mais où avait-il appris à si bien raisonner ? Bras ballants, l'interné se laissa porter par le flot de paroles. Comme ça lui manquait... Impressionné par Alexandre, il en secoua la tête à la fin de ses réflexions. Sacré gars ! Il se sentit presque alors une pointe... d'envie. Si là tout de suite, on lui proposait de récupérer sa mâchoire, d'apprendre à discourir comme ça, et d'avoir une bonne place près de quelqu'un à qui cela plairait... quitte à prendre un M à l'épaule, peut-être que... Et puis non ! C'était bête de raisonner de cette façon. Édouard s'en voulut et se contentera de transmettre à Alexandre tout son respect par un discret petit applaudissement, ainsi que par les yeux s'ils se croisaient.
Ensuite, le contenu de cette conversation. Préjuger de ce que sera la vie d'un enfant né dans la mouise et prendre sa future dépendance ou délinquance comme prétexte pour l'ôter du ventre ? Par économie ? Fichtre, non. Il pensa à certains estimant qu'on invalide ferait mieux de ne simplement pas être. Toutefois s'il s'agissait de laisser simplement le choix... oh oui ! Ça épargnerait des ennuis. Choix de ne pas garder l'enfant. Mais pour celle qui voudrait le conserver : des moyens, afin qu'elle l'élève bien. Hm, c'était loin d'être incohérent. Où cependant commençait la vie ? Ces questions le dépassèrent un peu. Il resta en retrait.
Il ne s'intéressera pas aux mots de Berlingtham, préférant se satisfaire de voir le Ministre et le Premier Conseiller sidérés à juste titre du bazar : des valides et des infirmes, des filles des rues et des filles mères, des sains d'esprit et des déments... fichus tous là sans ordre !

De nouveau, on bougea. Le directeur allait retenir d'un geste le Premier Conseiller qui se dirigeait vers une fille muette... mais trop tard, ce fut à elle que le baron adressa ses questions. Il se pinça la lèvre pour camoufler un rire - seul et unique rire du supérieur qui sera partagé par Édouard : ou plutôt, encore un léger souffle directement sorti de la gorge et qui gonfla le tissu de son masque. Même la muette en question esquissa un sourire complice, en même temps que ses joues rosées la montraient toute désolée devant le seigneur. Elle fit "non" du doigt, posa la main à sa bouche, puis désigna sa voisine qui avec la permission du Premier Conseiller le renseignerait à sa place. En se balançant, l'air perdu, elle aligna :

-- On s'réveille à l'aurore M'sieur. On prie. Après, il y a du pain et un pichet. Quand ça sonne sept, on travaille. Oh d'temps en temps ça s'arrête, on s'nettoie et on r'fait dévotion. Pour le roi, et pour l'Empire qui s'occupe d'nous. Pour dire merci. Quand l'soleil est tout là haut, on mange. C'est la soupe. C'est Fanchatte qui la fait, elle est bonne. En tout cas elle est chaude. Après, y a le travail. Sauf quelques jours où c'est repos, comme aujourd'hui. Aux vêpres, on arrête le travail, fait la dernière prière, on va au lit. Euh... Voilà M'sieur. (Un temps, intimidée et pour changer de sujet, comme honteuse) Elle est jolie votre main.

Elle avait trituré sa tresse, nerveuse. Berlingtham serra les dents, préféra rester en retrait, acquiescer aux paroles comme si tout cela était normal. Il espéra ces Messieurs assez renseignés. Il n'eut même pas le loisir de réagir à la remarque cinglante portant sur les habits des malades que, au compliment fait aux lavandières, une voix guillerette s'éleva du fond de la salle sans saisir le second degré :

-- Oh merci M'sieur ! C'est moi ! (pointant ici et là d'autres internés) Et elle, et lui, et elles trois aussi ! Merci ! J'm'appelle Théa.

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Thzoa10

Théa, internée

C'était une petite femme, au visage tout rond, aux étroits yeux bridés caractéristiques de sa maladie. Elle remarqua Alexandre sur ses béquilles, à qui elle adressa un coucou de sa main ouverte comme à un nouveau camarade... puis vit Édouard qui servait de guide. Pour lui, ce fut un câlin comme elle en réclamait si souvent ici et là dans ses journées. Le vétaran lui ébouriffa les cheveux. De deux doigts, il pointa ses yeux, puis d'un mouvement descendant du plat de sa main lui indiqua de les fermer. Il tira de sa poche un vieux papier froissé cueilli par chance au milieu des pièces détachées manipulées lors du travail. L'homme le déplia, le lissa au mieux, le fit tenir droit autour de la chandelle sur la table de nuit, calée grâce aux encoches du bougeoir. Il avait taillé dans la feuille de vagues formes d'oiseaux, alors projetés sur le mur grâce à la lumière filtrant dans les trous. Une tape à l'épaule de Théa. Elle rouvrit les yeux, battit des mains.
Ceci en tournant le dos aux visiteurs et Berlingtham. Édouard n'en avait rien à faire. Ils pouvaient bien attendre quelques secondes, pour une fois qu'il voyait Théa et avait l'occasion de lui donner son bricolage. Et puis le directeur ne dirait rien : après ces deux nobles il devait faire bonne impression.

La visite, malheureusement, se rappela à lui quand le Ministre donna... cet ordre. Qu'il ne sut dire glaçant ou réjouissant. Au moins, il pourrait tout montrer sans retenue. Sans ruser. Eh bien oui, il s'agissait d'un ordre - et il était bon soldat. Pour les conséquences, Édouard verrait plus tard. Après un silence lourd, conscient de ce qui se jouait, il se détendit comme il put en obtempérant devant Coldris d'une main ouverte portée au coin de son front - acquiescement militaire. Ils seraient servis.
Il partit, décidé comme une balle. Le directeur le colla. Très discrètement, il avança la main pour serrer son bras dans un avertissement éloquent. Sans s'arrêter de marcher, Édouard l'écarta du coin de son ardoise, comme il chassait jadis une mouche avec sa lance sur le champ de bataille.

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Message par Dyonis Howksley de Frenn Sam 9 Jan - 11:24

Dyonis apprécie la simplicité presque naïve avec laquelle le vétéran lui serre la prothèse, comme dans un moment de trêve alors qu'ils sont clairement les décideurs de l'Empire. Plus encore, il sourit discrètement au bon mot du vicomte pour défendre leur guide... suivi d'une réponse dans laquelle il est évident que Berlingtham tente de se rattraper. C'est déjà cela. Oh sans doute dénué de sincérité, mais au moins le directeur comprend-il qu'il en a assez dit et y perdrait à la ramener de nouveau.
Tout en avançant vers la première pièce, le Premier Conseiller acquiesce à la remarque de Coldris au sujet du traitement des invalides de guerre. ''Je suis totalement d'accord. Par ailleurs cet endroit ressemble pêle-mêle des situation qui n'ont rien à voir entre elles.'' Il ignore M. Berlingtham qui abonde sans conviction dans leur sens. Édouard quant à lui semble osciller entre reconnaissance... et frustration de quelque chose de plus complexe qu'il aimerait dire mais ne peut pas. Le baron trouve ce mutisme terrible. Ne pas pouvoir se faire comprendre doit être l'une des pires situations.

Après la visite des cuisines, Dyonis s'étonne de la longue prise de parole d'Alexandre. Toujours aussi bavard, celui-là. Il a toujours préféré les choses qui savent s'énoncer en peu de mots bien choisis, mais doit reconnaître la grande finesse de raisonnement de l'esclave - ce dont il n'a en vérité jamais douté, mais qui s'exprime en ce jour avec bien plus de tempérance. Il a mûri. En l'écoutant, le baron réfléchit aux mots, aux arguments qu'il faudrait trouver pour inciter son nouveau maître à l'affranchir. Qu'il travaille pour le vicomte encore si cela enthousiasme Alexandre, mais libre. Lui, et l'autre garçon au service de la famille du Cardinal. Au milieu de ces pensées, d'une oreille il suit les interventions successives du fils Bellanger, de Berlingtham, puis du Ministre soulignant que le sujet était déjà venu sur la table en Conseil. Du coin de l’œil, il surprend au passage les petites marques d'admiration d'Édouard pour Alexandre, et pour cause ce dernier a du bagout pour deux.
Le Premier Conseiller aura acquiescé de temps en temps à certains arguments de l'esclave et à un ou deux points de l'intervention du directeur. En croyant qu'il est, il lui semble en effet problématique de prendre une vie innocente dans un ventre. Encore plus pour des raisons économiques : ce n'est pas là-dessus que doit se décider le prix ou non d'une vie. Dans une réponse générale aux trois interventions, mais surtout à Coldris qui l'interpelle, il engage : ''Je sais, oui, combien des enfants misérablement nés viennent grossir les chiffres des dépendants, des délinquants, et de ceux qui se font exploiter dans des réseaux. Mais peut-être est-il d'autres solutions pour leur éviter cela ?'' (Rebondissant sur un point soulevé par Alexandre) ''Je sais bien que beaucoup de femmes s'avortent déjà... mais j'estime que l'idéal serait de tout faire en amont pour qu'elles n'en viennent pas à cette sinistre extrémité : que les catins soient en maison comme je l'ai déjà dit à Alexandre, qu'elles se protègent, que les hommes abandonnant celles qu'ils ont engrossées soient sévèrement sanctionnés afin qu'ils restent et prennent leurs responsabilités de père s'ils ne veulent risquer gros. Et en aval, s'il y a un enfant malgré tout, que ces femmes en difficulté reçoivent de quoi bien l'élever afin qu'il ne devienne ni criminel ni dépendant.'' (Un temps) ''Cela dit, j'entends que quand bien même tout ceci se faisait un peu mieux, il resterait toujours des cas tragiques dans lesquels une femme est enceinte sans n'y avoir rien pu faire... Les punir elles est en effet une erreur. Mais n'est-ce pas déjà une vie en elles et qui n'y est pour rien ?'' La question demande longue réflexion et consultation des spécialistes, ce qui ne peut se régler là au détour d'un couloir d'Hôpital Général. ''Je prends note de ce sujet à mettre prestement en débat. Ainsi que de la nécessité de séparer en quartiers bien discounts les cas ici réunis : aliénés d'une part, femmes en difficulté d'autre part, vétérans encore ailleurs, estropiés dans une autre aile... ce mélange insensé est intolérable.''

En arrivant dans le sinistre dortoir, l'atmosphère est bien troublante, mélange de situations à pleurer et de moments où s'expriment l'humanité dans ce qu'elle a de plus touchante. Aux petits rires autour de lui quand on s'aperçoit que Dyonis s'est adressé à une muette, bon joueur il sourit lui-même de la cocasserie de la situation avec la petite internée toute rouge de timidité devant lui. Il la salue de sa prothèse à l'épaule, puis écoute sa voisine lui dérouler le morne emploi du temps de tous ces pensionnaires. Un mot revient souvent. Trop souvent. Travail. Le Premier Conseiller a déjà eu connaissance du fait que des entreprises sous-traitent ici mais l'idée le heurte. Tout comme l'apparent volume horaire de labeur de ces enfermés. Polaire, il se retourne vers le directeur et lâche : ''Faire travailler les patients est-il votre conception de la charité ?'' (Un temps) ''Au moins que gagnent-ils en retour ? Ne vous avisez pas de mentir.'' Oh ce ne sont pas les malades qui risqueraient de s'insurger et révéler la vérité – sans doute sous la menace de représailles – mais au moins les livres de comptes parleraient ensuite. Souriant, Dyonis remercie la femme à la tresse pour sa réponse... et son petit compliment sur sa prothèse finement ouvragée.
Là-dessus, Coldris note avec une ironie toujours aussi efficace les haillons lavés à la hâte mais non reprisés. Une attendrissante petite femme prend le compliment au premier degré, remercie le vicomte et, d'elle-même, se désigne comme travailleuse, ainsi que plusieurs camarades d'infortune. Dyonis retient un long soupir. Il ne saurait dire si cette scène est touchante ou absolument pathétique. Au moins a-t-il, par cette dénommée Théa, la confirmation de la sollicitation de tous ces internés à moult corvées. Le regard du Premier Conseiller vrille sur le directeur, qui a intérêt à bien répondre aux questions qu'il vient de poser. Tout accaparé par l'obtention de ses justifications, le baron ne se formalisera pas de la liberté que prend ouvertement Édouard de les planter et de leur tourner le dos, pour offrir quelques instants de complicité à ladite Théa – un câlin contre un joli vol d'oiseaux. Il faut croire que les roulements des corvées laissent aux uns et aux autres devenus amis peu d'occasion de se croiser. Édouard et Théa peuvent donc bien profiter de celle-ci.

Soudain, le vicomte de Fromart achève de mettre les pieds dans le plat en commandant sans détour à leur guide de leur montrer ce qu'il y a de plus sordide. À bien y réfléchir, l'idée est directe, lourde de conséquences... mais peut-être bien qu'il s'agit de la plus efficace et pragmatique des idées. Dyonis approuve donc d'un signe de tête, puis d'un regard d'encouragement à Édouard. Le Ministre agit avec l'efficacité qui le caractérise. Berlingtham n'a qu'à bien se tenir. D'autant que, au geste décidé du guide – geste une nouvelle fois grave derrière ses faux-airs joueurs – et à l'assurance avec laquelle il prend cette mission sur lui, Dyonis comprend qu'il va obéir sans se dégonfler aux menaces du directeur. Cet homme-là a du cran. Les voilà donc partis pour aller rencontrer l'horreur sans masque.
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Message par Alexandre Sam 9 Jan - 17:18

Le moment où leur guide révéla les origines de son mutisme devient délicat et se chargea d'une ambiance teintée de respect et de gravité. Les trois visiteurs saluaient à al manière le sacrifice de cet homme pour la grandeur de l'empire. Coldris fut le premier à prendre la parole pour estimer que les soldats victimes d'aussi lourds traumatismes n'avaient nullement leur place dans un pareil établissement. Alexandre songea à une histoire surprise un jour et estima que celle-ci allait parfaitement dans le sens ce qui lué atit permis de dire.

"Les infirmes sont de plus mal traités par le clergés. Même ceux qui reviennent de guerre. Je me souviens d'un curé qui a chassé une foule autour d'un mendiant amputé d'une main, qui avait de la fierté pour avoir servi, et qui s'est vu stigmatiser On lui a dit qu'il avait perdu cette main par sa faute, car il avait trop péché, et encourageait les gens à aller à la messe au lieu de l'écouter ou ils lui ressembleraient."

Le jeune homme s'arrêta là dans l'anecdote. Ces quelques paroles suffisaient pour consolider le discours de son maître et appuyer ce fait que les infirmes de guerre devaient être soutenus par l'Etat puisque la religion leur refusait, elle, le salut. Le seigneur de Fren partagea leur opinion, puis le directeur se permit d'intervenir, pour mieux se faire moucher une fois de plus par le ministre. Alexandre retint un sourire. Il n'avait absolument pas compris que plus il parlerait, plus Coldris jouerait avec lui, en cruel chat il savait être pour une souris imprudente.

La visite commença donc et s'arrêta pour la première étape dans les cuisines. Après les premiers questionnements du Premier Conseiller, Alexandre ne fut pas peur fier des regards de surprise qu'il surprit dans les yeux du directeur ou d'Edouard. Derrière le masque d'impassibilité , il jubilait de se sentir les dominer et les remuer dans leurs petites habitudes. Il était effectivement un infirme et un esclave mais possédait une érudition rare qui le rendait singulier par rapport à cette masse silencieuse. Une érudition que lui reconnaissait Coldris et dont il acceptait de servir. Sa mère lui disait autrefois que l'instruction lui permettrait de s'élever et trouver une place dans la société, que la sienne serait à jamais éloignée de cette plèbe inculte. Elle avait raison. Il s'élèverait même à des sommets dont elle soupçonnait pas l'existence, grâce à son savoir et à son maître.

D'ailleurs, son maitre appuyait ses propos t rappelait au Premier Conseiller de rapports sur la délinquance dont celui-ci avait avancé lui-même le fait au dernier Conseil des Ministres. Il écouta les remarques attendues du directeur, qui ne se mouillait pas, soucieux de se conformer à la bonne moralité voulue par l'Eglise. Les arguments du seigneur de Frenn étaient de meilleure qualité même si lui aussi se montrait frileux et refusait de sortir du sentier parfaitement dressé par les prélats. Il leva un instant la tête vers Coldris pour échanger à nouveau l'accord tacite dont ils avaient discuté avant le départ puis reprit :

"Je crains malheureusement que ces idées, si belles soient-elles, soient idéalistes, votre Excellence. Les hommes sans honneur, s'ils ont osé abandonner une femme enceinte, quels moyens concrets de les appeler à leurs devoirs ? Même si la mère témoignait contre eux, ce serait parole contre parole, et, à moins que l'enfant ne présente une ressemblance indéniable avec son père, il est difficile d'apporter, il est bien peu facile d'apporter des preuves à de tels témoignages. La femme se retrouvera toujours victime, contrainte à assumer seule l'enfant. Et si vous souhaitez connaître l'opinons d'un enfant né d'un adultère, prenez le mien : j'aurais préféré ne jamais naître plutôt que d'assister chaque jour au supplice de ma mère."

Il le pensait sincèrement ce dernier aveu. Il aurait préféré ne pas connaître la vie, ses moments de bonheur, plutôt que de voir sa mère subir les coups de son père adoptif. De savoir utilisé contre elle. Les enfants devenaient pour une mère une arme de destruction. Alexandre se décida à redevenir silencieux. Il y aurait bien à répondre sur la question de tuer apparemment une vie dans le ventre d'une mère mais ce serait sûrement prendre une liberté de trop sur ce qui lui avait été autorisé. Il regarda un court instant son maître mais ne dit rien. Son regard indiqua cependant que des idées bouillonnaient dans son esprit mais que celles-ci ne lui semblaient pas pertinentes quant aux intitulés de ses ordres.

Dans son mutisme, Alexandre gardait contenance et fixait Edouard qui l'observait avec une admiration dans le regard, étonné et séduit par son éloquence et ses connaissances. Il arbora quelques instants une mine de suffisance, ravi de lui montrer leur différence de niveau. Certes, il le respectait pour son engagement lors de la guerre contre Yô-Hô et du sacrifice de sa parole mais cela n'effaçait pas que celui-ci lui était inférieur. Même avant de s'engager dans l'armée, il l'était déjà. De par la qualité de son éducation. Sa tête se dirigea à nouveau vers Coldris, à présent indifférent au muet. Grâce au ministre et à ses capacités, il monterait pendant que cet homme resterait en bas à végéter.

La visite se poursuivit par l'inspection des dortoirs, là où se rassemblaient les malades, infirmes et autres personnes. Alexandre demeurait, se fermant le plus possible pour ne pas se laisser avaler par ses émotions. Tous ces gens étaient des infirmes comme lui, entassés dans des salles de repos comme des poules trop nombreuses dans un poulailler, mais elles n'avaient rien à voir à lui. Son destin ne ressemblait pas au sien. Et n'y ressemblerait jamais. Le jeune homme s'attacha à suivre le seigneur de Frenn qui voulut interroger une patiente et l'ironie voulut que celle-ci soit muette. Décidément, beaucoup de ces gens finissaient entre ces murs. Pourtant, cela ne lui semblait pas le handicap le plus terrible en comparaison à des jambes à l'équilibre précaire ou à un membre amputées. Quoique... Sans la voix, la méfiance s'installait. Oui, il comprenait finalement. Le Premier Conseillier écoutait finalement la voisine détailler le rythme d'une journée en ces lieux et au fil des phrases Alexandre pressentait la colère froide envahir le baron.

Sans surprise, il se retourna vers le directeur pour l'attaquer sur ces heures de travail et la vision de la charité. Là encore, Alexandre réprima un sourire intérieur. Cet homme pourrait prochainement faire ses valises : il ne resterait en place guère plus d'une semaine. Coldris vint contribuer une nouvelle fois à son malaise en vantant le travail des lavandières. Une fille s'exprima spontanément, qui se nommait Théa, incapable de percevoir le second degré du ministre, et se réjouissait que l'on vante la qualité de sou ouvrage et mettait en avant ses camarades. Elle était touchante. Face à la scène émouvante qui suivit, entre elles et Edouard, Alexandre détourna la tête, préférant s'intéresser au sort du directeur qui semblait en cet instant subir le sort de Saint-Laurent. Sa sensibilité n'avait pas besoin d'assister aux scènes d'effusions. Elles ne seraient par ailleurs d'aucune utilité pour sa formation.

Soudain, Coldris réclama à Edouard de les emmener aux lieux qui le répugnaient, une manière de connaître l'envers du décor. Alexandre observa un dernier instant le dortoir et ses pensionnaires puis estima que cela serait sûrement effroyable. Il serra ses béquilles et suivit le mouvement, observant le directeur qui tentait de retenir vainement le guide. Décidément, celui-là n'avait pas encore appris que l'on ne s'opposait pas au ministre des affaires étrangères. Même si Edouard avait brusquement eu une jambe cassé, Coldis aurait malgré moyen de révéler les ténèbres de cet hôpital. Le pauvre fou se passait lui-même la corde...
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Message par Coldris de Fromart Lun 11 Jan - 13:25




La proposition fut donc notée dans un coin son esprit, en attente d’une future discussion dans un lieu propice. Il rangea ses idées dans un tiroir et reprit le cours de la visite non sans une remarque cinglante à l’encontre du directeur qui malgré son humilité apparente n’en avait pas moins pris le coup de plein fouet.

- Les fous sont partout. commenta-t-il doctement en paraphrasant Cicéron.

La visite reprit et Alexandre demanda l’autorisation d’exposer son projet sur l’avortement. Il observa tour à tour son esclave puis Dyonis, surprit de cette prise de parole tout comme leur guide dont il ne manqua l’applaudissement discret -et mérité-. C’était sans compter la langue pendue jusqu'au pavage du Directeur qui aurait mieux fait, lui, d’être muet. Coldris roula des yeux dans un soupir visiblement agacé.

-  Dois-je comprendre que non content de diriger médiocrement votre établissement, vous souhaitez également avoir voix au chapitre ? Allez donc balayer votre porte, Berlinghtam, je crois voir suffisamment de poussière comme ça.

Sur ce, il se tourna vers le Premier Conseiller afin de lui rappeler ses propres chiffres sur la délinquance qui ne tarda pas à ajourner la réflexion, sans grande surprise. A nouveau, Alexandre lui demanda l’autorisation de répondre, ce qu’il fait d’un discret signe de la tête. Il appuya ses propos et signa la fin de la discussion.

-  C’est à chacun de prendre ses responsabilités face à Dieu, mais nous aurons tout le loisir d’évoquer ce point dans de meilleures conditions.
Ou comment pointer du doigt l’intérêt d’une réforme religieuse. Coldris savait pertinemment que si le baron de Frenn finissait convaincu de l’intérêt d’un schisme autant que de son évidence, la partie serait pour ainsi dire gagnée. On trouvait difficilement plus moral et pieux à la fois que cet homme. Il y avait certes plus bigot que lui, mais il se plaçait tout de même en bonne place, et surtout, il avait pour lui, le respect de celui que l’on écoutait sagement, et ça, cela valait tout l’or du monde.

Un peu plus loin, on entra dans une salle et le choix de Dyonis sembla amuser les deux hommes. Il ne tarda pas à en comprendre la raison : il avait choisi une muette. Un sourire s’esquissa sur le visage du Ministre qui songea subitement qu’il devait y avoir bon nombre de muets en ces murs. Il écouta sans grand intérêt l’emploi du temps de la jeune fille, mais était curieux d’écouter la justification du Directeur et tourna donc son regard d’acier vers lui comme pour lui préciser qu’il n’aurait aucune pitié s’il sentait poindre le moindre mensonge. Oh! Cette histoire d’exploitation lui était parfaitement égale, mais il ne comptait pas manquer une nouvelle occasion de profiter de ce pauvre fantoche. C’était sans doute le bon moment pour lui faire une petite remarque sur la lessive et la couture. Il ne s’était pas attendu le moins du monde à voir émerger de l’assemblée une petite femme toute fière d’elle et du compliment reçu. Il nota aussitôt la peau pelée de ses mains pour avoir trempé bien trop longtemps dans l’eau. Il inclina doucement la tête pour la saluer avec une douceur qu’il réservait d’ordinaire à d’autres circonstances.

- Enchanté Théa.

Le Ministre laissa quelques instants à leur guide avant d’en venir aux faits en réclamant une visite des lieux les plus sordides de l’Hôpital Général. Il ne doutait pas un seul l’instant qu’Edouard se ferait une joie de leur montrer la face cachée de ce lieu. Lorsque l’on repeignait les murs la veille c’était bien que l’on voulait paraitre irréprochable et … Qu’on ne l’était pas. L’ancien soldat valida les ordres donnés et il le remercia d’un bref signe de la tête. Il ne manqua pas de noter le geste de menace du Directeur.

- Que pensez-vous de Zakros, Berlingtham? demanda-t-il aussitôt l’air de rien avant que l’explication ne tombe

- J’ai horreur que l’on interfère dans le bon déroulé d’une inspection, mais si vous souhaitez un poste de directeur de prison à Zakros, je peux sans aucun doute vous obtenir une mutation pour demain matin.


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Message par Le Cent-Visages Lun 11 Jan - 23:00

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
Édouard, interné

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Thzoa10

Théa, internée

Dyonis donna son avis quant aux avortements et aux moyens de les éviter. Dépassé par la conversation, Édouard écouta, sourcil arqué, puis fut sensible à la nuance qu'émettait le jeunot : un peu idéaliste, ce noble. Il n'avait pas idée de la fourberie de gens particulièrement motivés à échapper à leur devoir et aux autorités. Ne pas tout miser sur l'amont...
La crispation de Berlingtham autour des vies prises aux ventres était notable. Il arrondit les yeux une nouvelle fois devant cet esclave qui la ramenait à ce point. Il s'apprêta à rebondir, estimant être concerné puisque ayant à veiller sur ces enfants non désirés ou abandonnés dans son institution... mais la réplique sans appel du Ministre l'en dissuada. Décidément, ces deux nobles l'avaient pris en grippe. Il ne faisait pourtant que perpétuer le travail de ses prédécesseurs ainsi que les consignes quant au juste usage des patients. Berlingtham estima plus raisonnable de se taire.
Édouard de son côté entendit la triste anecdote rapportée par Alexandre. Un soupir triste quitta sa gorge et le dépit imprégna ses yeux en entendant l'humiliation un confrère d'armes. Il ne put s'empêcher d'un petit commentaire et glisse vers Alexandre, avec une œillade solidaire à ses propos, une phrase en deux temps sur les faces de son ardoise.

ILS BENISSENT NOS
MAINS POURTANT


Et retournant le support :

QUAND ELLES GUERROIENT
POUR LE SAINT-EMPIRE


Et que dire des mains du Premier Conseiller ? Maudites, elle aussi ? Pour le coup, le mot serait déplacé et le vétéran le ravala. Message adressé aussi mine de rien au directeur. Récompenser par ce traitement des soldats, et pas seulement : de braves gens qui pour certains avaient eu des vies honnêtes et de labeur pour le pays avant d'essuyer des coups durs de la vie. Berlingtham n'eut pas vraiment l'opportunité de réagir à cette anecdote ni à l'écrit de l'interné : le Premier Conseiller le pressa de questions et le regard d'acier du Ministre l'écrasa tout autant bien que celui-ci ne faisait qu'écouter.

-- Il en a toujours été ainsi dans ces établissements, tels sont les ordres et je poursuis l'office de mes prédécesseurs, déclare-t-il à Dyonis quant à la charité. Cela répond aux volontés gouvernementales d'assainir nos rues, de les débarrasser des parasites et gens de mauvaise vie. Ils ont ici toit, nourriture, habits. Il est apparu raisonnable que, dans la mesure évidemment des capacités des uns et des autres, ils fournissent un menu ouvrage. D'abord pour rendre un peu à l'Empire, qui prend soin d'eaux plutôt que de les envoyer aux tribunaux ou de les laisser pourrir aux boulevards. Ensuite dans l'optique d'une ré-insersion, car il arrive que des patients retrouvent place à l'extérieur quand, en commission, nous abordons certains cas devant les organismes en recherche de main d'œuvre et qui de temps en temps viennent ici. Il ne fait pas bon mettre dans les esprits que l'on peut être assisté. Je sais bien que jadis, l'église se chargeait d'accueillir les déshérités, et sans rien demander, dans les Hôtels Dieu. Mais les temps sont plus ardus depuis ces siècles passés. L'accroissement de la population des villes, la crise... L'institution est en outre passée des mains de l'église à celles du pouvoir temporel. (Puis, pour sa deuxième question) Ils gagnent un salaire, bien évidemment. Quatre rilchs par jour, ainsi que l'indiquent les livres de comptes.

Au fil de cette réponse, cette fois-ci Édouard n'eut pas la moindre envie de faire le pitre, ni d'écrire un bon mot. Tous ces arguments, les patients les entendaient tous les jours lors des prières et sermons leur rappelant d'être redevables à la Couronne. Quant au "menu travail"... Il y aurait... trop à dire. Nul son n'a quitté sa gorge. Il resta immobile, étonnamment presque aussi froid et droit que Dyonis et Coldris. Seule la dernière réponse de Berlingtham lui donna envie de réagir.
Oui ! Il fallait trouver quelque chose pour dire ce que le directeur cachait. Berlingtham n'avait pas menti : on accordait bien quatre rilchs par jour à chaque interné. Sur le papier, c'était honorable. Le vétéran avait ouï dire que telle était la moyenne des petits emplois en ville ou pour les journaliers de campagne. Mais ! ...Mais les cahiers de comptes ne disaient sans doute pas qu'une fois octroyés, on prélevait sur salaire pour n'importe quoi. Ici, financer le luxe d'un peu plus de goût et de sel dans la soupe - alors qu'Édouard doutait de la véracité de ces manques... Là, avoir tel aménagement simplifiant tel travail d'un tel... Et quand il restait des sous, l'écrasante majorité des internés verraient-ils vraiment un jour la couleur de ces maigres économies qu'ils retiraient en quittant l'institut ? On faisait miroiter cet espoir, mais bien peu sortaient en vérité.

Tant de choses qu'il faudrait faire comprendre... Et pour cela, si peu de surface. Une. Putain. D'ardoise. Un soupir rocailleux qu'il sera ardu d'interpréter quitta sa gorge plaintive. Et évidemment, le temps qu'il trouvât quoi faire... le directeur éloigna déjà le seigneur de Frenn et le Ministre vers les autres patients, qu'ils écoutent. Seul le jeunot aux béquilles était encore là, au plus près de lui. Comment lui dire... que son maître ou le Conseiller devaient creuser, ne pas en rester à ce que disent les chiffres... Édouard eut une idée. Il grogna, porta gentiment les doigts à l'épaule d'Alexandre afin d'attirer son attention. Puis il tenta de mimer "ce qui se gagne d'une main se perd de l'autre", frottant ses doigts de gauche dans un geste évoquant l'argent, ouvrant sa main de droite et la secouant. Il soupira. Ridicule... Va te faire comprendre... Alors, il griffonna sur son ardoise. Il fallait une image... percutante. Une comparaison. Il présenta finalement à Alexandre ce message :

NOUS,
PRESQUE =
M.
PARDON


Il pointa le M puis son épaule. Le "Pardon", c'était pour le fait d'aborder cette condition qu'il devina si douloureuse au concerné. Mais pour être franc et sans avoir peur des mots, entre ces murs sévissait bien de l'esclavage déguisé. De l'argent en façade. Des fausses promesses. Un travail quasi gratuit. Le regard d'Édouard était fuyant, gêné. Que comprendrait le garçon ? Il semblait autorisé par son maître à parler de certains sujets. Aussi Édouard finira-t-il par un petit haussement de menton en direction du Ministre : manière de demander à Alexandre de trouver une astuce, quelque chose, pour lui faire comprendre à son tour. Alexandre était très intelligent. Peut-être trouverait-il un biais pour raccrocher ce sujet à ceux que son maître lui autorisait ? Ne garde pas ça pour toi, sembla le prier le défiguré en souriant des yeux.

Théa là-dessus quitta sa couchette pour venir papillonner autour du vétéran et lui faire son câlin. Il retrouva un peu de sa bonne humeur, puis offrit à petite femme la lanterne de fortune. De joie, Théa battit des mains, autant au gentil salut du Grand Monsieur en noir qui fit sa journée - un noble ! - ...qu'aux oiseaux découpés sur le mur par les soins du camarade. Il doit enfin s'écarter d'elle pour mener les visiteurs là où le Ministre le demanda. Édouard savait qu'une fois les Messieurs partis, il essuierait sûrement plus tôt que prévu la colère de Berlingtham. Mais c'était l'occasion ou jamais de montrer.

Sur le chemin, le directeur comme l'enfermé s'étonnèrent de cette mention à Zakros. Puis tous deux virent où Coldris voulait en venir. Le supérieur comprit surtout qu'il devait filer droit à présent et obtempéra :

-- Je... n'interviendrai plus. Pardon, Monsieur le Ministre.

Cette saloperie de colonie. Le trou du cul de l'Empire. Un ramassis de sauvages. Merci bien ! Quelle idée saugrenue avait eue le grand Der Ragascorn en envoyant les soldats de Monbrina dans ce bourbier qui donnait tant de fil à retordre !
Édouard lui aussi comprit. Que cet homme était Messire de Fromart, Ministre des Affaires étrangères et de la guerre. Il en marqua un temps d'arrêt, jambes crispées, glaire à clapoter dans sa gorge ouverte. Sa marche décidée reprit néanmoins dès la seconde suivante. Oui, cet homme était, avec le roi, décideur de toutes ces guerres. Il les avait crus, en s'engageant à ses seize ans : que ce serait pour la grandeur de tout le continent. Engagement qu'il ne regrettait pas : il avait fait son travail en toute bonne foi... Con. Mais en toute bonne foi à l'époque. Car apparemment, il y avait de quoi douter de ce "pour la grandeur de tout le continent", à voir cet institut bondé, à entendre plus tôt Berlingtham évoquer presque les sept plaies d'Egypte, crise, exode vers les villes. Bigre, où allait le bénéfice ? Toutefois... les champs de bataille lui avaient enseigné autre chose : "penser instant présent". Et en l'occurrence, en ce moment, le Ministre était en quelque sortes un allié.

Il mena donc volontiers le groupe dans une des pires salles de travail de l'institut. Des lignes de bancs à la chaîne, des murs lépreux à peine éclairés. Là, certains ouvriers débinaient à n'en plus finir des cordes pour récupérer le chanvre. D'autres sciaient à la chaîne différentes petites pièces détachées - sous-traitance pour diverses manufactures.
Berlingtham resta à l'entrée, avait l'air de se chier dessus. Plus un mot. Simplement répondre aux questions au rasoir. Édouard de son côté, maintenant qu'il bénéficiait de l'ordre de montrer le pire, ne cacha même plus ses commentaires. La salle parlait d'elle-même. Il gratta cependant son ardoise et indiqua :

DE PRIME
A VÊPRRES


Il sentit soudain qu'on tirait sa blouse. Il repéra alors, assis derrière lui, Kirm du haut de ses quinze ans. Ils s'échangèrent d'amicales expressions. Les regards des hôtes s'arrêteraient sûrement sur le garçon pâle, aux immenses yeux bleus encadrés de boucles blondes, les mains occupées à tailler sans cesse son défilé de pièce. Ils remarqueraient surtout la bosse en plein milieu de son ventre. C'étaient deux petits bras supplémentaires qui y avaient poussé n'importe comment, et dont les minuscules mains sans vie dépassaient du col du garçon. Dans une envie de blague pour détendre l'ambiance et rassurer Kirm alors qu'il n'osait pas arrêter de travailler, Édouard se pencha avec distinction et serra une des menottes en excédant, comme à un grand monsieur. Le jeunot rit de toutes ses dents.
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Mar 12 Jan - 13:38

Il est d'une grande satisfaction que de voir Berlingtham la fermer après une nouvelle intervention du Ministre. Tout comme Édouard dont il lit l'ardoise, Dyonis se révolta de l'anecdote rapportée par Alexandre. L'église comporte le meilleur et le pire : ceux qui voient dans le blessé leur Prochain et le respecte... et les odieux personnages comme le garçon en décrit.

Dyonis écoute avec intérêt la nouvelle intervention d'Alexandre. Il l'estime pour son intelligence, omettant son statut servile. Il en sera tout de même étonné : de ce dont il se rappelle du fils Bellanger, il est d'une piété irréprochable et le voir ainsi plaider en faveur d'un acte qui va à l'encontre du respect de la vie des Innocents le surprend. Cela ne lui ressemble gère. Le baron se rappelle de la tendance très malléable d'Alexandre, d'abord dévoué à la sorcière muette, puis à lui-même, puis maintenant à... ces idées. Qu'y a-t-il de vrai et de profondément ancré dans la personnalité du garçon dans ce qu'il dit à présent ? Il est tellement changeant... Pourvu qu'un jour, Alexandre trouve à se construire de façon droite et solide, à la fois adulte tout en restant fidèle au cœur honnête qu'il lui connaît. Sans cette bonté naturelle, Dyonis n'aurait pas été si rapide à avoir du remords pour son asservissement et ne se ferait pas à présent un objectif pressant de les affranchir, Tristan et lui.
"Nous sommes d'accord. Nous ne mettrons jamais la main sur tous les contrevenants et c'est pourquoi il est nécessaire de penser comment agir une fois que... le mal est fait. Toutefois je reste persuadé que des choses sévères peuvent être mise en place pour dissuader un conjoint identifié d'abandonner sa femme, pour punir les abus sexuels avec une extrême rigueur, pour faire sentir aux hommes qu'ils doivent être responsables, pour faire que les catins puissent se protéger et que nul client ne s'y refuse. Comment envoyer aux hommes un message de responsabilité s'il voit que sa bassesse n'aura nulle conséquence et qu'ils n'auront rien à assumer, que tout peut se résoudre en... retirent le résultat de leur égoïsme." (Grave, il écoute la confidence d'Alexandre sur son propre cas.) "Ton père a été criminel. Toi, tu n'as pas à te sentir coupable, il est hors de question de préférer la mort d'un enfant qui n'a rien fait dans l'histoire, il ne faut pas tout mélanger." Le Premier Conseiller en restera là cependant, sur un bref acquiescement à la phrase de clôture du Ministre : en effet, il faudra reprendre ce sujet ultérieurement.

Arrivés dans le dortoir, le directeur est sur des charbons ardents, pressé de questions par le seigneur de Frenn. Coldris le soutient par ce regard polaire qu'il rive sur Berlingtham, lequel a intérêt à ne pas mentir. Ce dernier évoque la continuation de l'œuvre de ses prédécesseurs. Malheureusement, il n'a pas tort : ce financier fait le même mal que les autres avant lui. Il obéit à la politique de grand renfermement et d'assainissement des villes. Dyonis serre les dents et son visage ne se décrispe pas durant l'intervention de Berlingtham. Oui, il fut un temps où les Hôtels Dieu veillaient honnêtement sur les malades et les laissaient sortir une fois rétablis... Désormais, des entreprises ont senti le filon. Sans compter que la législation des Hôpitaux Généraux prévoit que les directeurs de ces institutions deviennent tuteurs et propriétaires de n'importe qui y rentre ! Il est inadmissible de laisser une telle image de l'assistance perdurer... même si tout cela est pour l'instant secret entre les murs de l'Hôpital. Tôt ou tard, tout se sait. Le seigneur écoute à moitié le verbiage du directeur, dont il connaît les arguments. Il s'intéressera surtout à sa dernière réponse : la plus concrète et tangible.
"Quatre rilchs quotidiens. Je vois." (Un temps) "Je demande à inspecter là où sont stockées les paies de ces patients en attendant leur sortie. Et justement, aussi : je prendrai tout à l'heure le temps d'inspecter avec vous le registre des entrées et des sorties que mes hommes m'ont confié hier." (Un temps, la voix plus pincée) "Ne vous cachez pas derrière l'exode rural et les difficultés. L'Hôpital Général reçoit quantité de dons des femmes de charité et dames patronnesses. J'aimerai pouvoir leur dire que leur argent est bien employé." Dyonis a sa petite idée : prélever ce que l'institution et les entreprises se mettent en trop dans les poches. Ré-injecter le plus gros dans la véritable aide aux internés. Prendre le reste pour la couronne, selon son objectif commun avec Coldris.

Entraîné par le directeur vers les malades, Dyonis n'entendra pas les grognements dépités d'Édouard ni ne verra les mots qu'il écrit à Alexandre, resté un peu plus en arrière avec le vétéran. Le seigneur aura laissé le temps au petit moment d'amitié entre Théa et Édouard, et se sera même attendri de la réaction de la petite infirme envers le Ministre qui d'ailleurs lui rend un salut plein de douceur. Il la met en confiance.
Sur le chemin, mené d'un pas décidé par Édouard qui ne semble plus d'humeur à plaisanter, Berlingtham s'écrase à la menace de perdre son poste pour être envoyé à Zakros. Si Dyonis a eu l'occasion de constater combien les Zakrotiens sont loin d'être tous des sauvages, il se délecte de l'effet de menace qu'a toujours à Monbrina le nom de cette colonie. Il se réjouit moins, toutefois, de voir leur guide arrêté net, une seconde, en déduisant être en présence du Ministre des Affaires étrangères et de la guerre. Le seigneur de Frenn imagine ce qui doit se passer dans la tête du vétéran et s'attriste de ses manifestations gutturales. Mais celui-là a assez de jugeote pour continuer sa mission sans commentaire : le présent est ce qu'il est. Chacun son rôle et pour les plus humbles comme pour les plus grands, lesdits rôles n'ont souvent rien de facile. Oh cerces, ce ne sont jamais les nobles en première ligne et les premiers à être déglingués, toutefois ils ont d'autres lourdeurs.

L'entrée dans la salle de travail soulève le cœur du baron, habile cependant à déguiser son trouble derrière un air de sévérité redoublé. Statue imperturbable et observatrice. La nouvelle phrase d'Édouard sur son ardoise confirme de longues journées de ce "menu travail"... Consciencieux, Dyonis observe les tâches de tous les internés : ici, le chanvre, là des pièces de bois, plus loin des boulons, ou encore de la couture de petites pièces pour aller ensuite servir de plus nobles étapes de la fabrication pour de grosses entreprises. Le Premier Conseiller arrêtera un des surveillants et le sommera de lui lister tous les travaux. Quant au noms des firmes : les cahiers de comptes les diront.
Il évite presque de regarder les visages de tous ces malheureux afin de rester bien droit dans sa fonction, mais devint leur peine. Néanmoins il ne peut que porter son attention sur l'un des jeunots : le petit blond qu'Édouard rassure et fait éclater de rire en lui faisant cette plaisanterie. Dyonis cille : a-t-il bien vu ? Deux petites mains comme mortes sortant de son haillon ? Son regard descend du corps du malheureux : ces bosses sous ses hardes doivent être de petits bras parasites. Le baron décide de profiter de la meilleure humeur que leur guide a su installer chez le jeunot - qui n'ose même pas interrompre son travail - pour déclarer dans un sourire : "Nous venons voir non pas comment vous travaillez, je suis certain que vous, vous êtes irréprochables... mais dans quelles conditions vous le faites." (Un temps) "Comment t'appelles-tu ?"
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Message par Alexandre Mar 12 Jan - 16:05

Dans les cuisines, à évoquer le sujet complexe de l'avortement, Alexandre éprouvait de l'appréhension à avancer un à un ses arguments, en dépit de les avoir longuement travaillé et de les appuyer sur des faits tangibles. Après sa dernière prise de paroles, il se résolut à ne plus intervenir. Cela suffisait pour le moment. Il ressentit cependant une profonde fierté d'entendre le ministre remettre à sa place le directeur suite à ses  réponses sur l'exposé du jeune homme. Alexandre en appréciait intérieurement l'intention : de se sentir distingué, lui l'infirme, l'esclave, avait été distingué par Coldris pour son intelligence, son érudition et ses idées capables d'aller à contre-courant.

Le seigneur de Frenn répondit à nouveau et Alexandre ne pensait plus répondre mais celui-ci s'adressa directement à lui, pour revenir sur cette dernière phrase de son discours. Le jeune homme tourna un instant la tête vers son maître, pour croiser son regard, puis se décida à s'expliquer brièvement puisque son interlocuteur lui adressait la parole.


"Je ne considère mon père comme criminel. Uniquement lâche. Et faible. Le véritable criminel est mon père adoptif. Celui sous couvert de la loi et de la religion qui a longuement manipulé ma mère pour rappeler que mon infirmité venait de sa faute.."

Dans cette réponse rapide se renouvelait  le sapement lent que le dogme sévère faisait souffrir la population du fait de cette culpabilisation à l'extrême. Si seulement le seigneur de Frenn parvenait par se laisser à convaincre... S'ils arrivaient à lui démontrer les absurdités qui contraignaient les masses laborieuses, sous couvert de salut, leurs projets aboutiraient certainement plus facilement.

En baissant un instant la tête, pour simuler l'humilité, Alexandre remarqua Edouard qui s'approchait avec son ardoise et lui tendait un rapide message. Aux écrits sur les deux faces, il comprit le message : il évoquait ces prêtres qui osaient se moquer des infirmes, mêmes ceux revenus du front, ayant offert leurs vies à l'empire, mais qui bénissaient autrefois les mains de ces soldats valides avant leur départ? Quelle superbe hypocrisie. Alexandre inclina respectueusement la tête en reconnaissance pour ce homme qui avait beaucoup perdu pour leur pays.

Le ministre signifia par sa répartie habituelle la fin du débat, même si celui-ci reviendrait tôt ou tard avec le Seigneur de Frenn, dans un autre cadre. Ils se rendirent aux dortoirs pour découvrir dans quelles conditions sinistres s'entassaient tous ces infirmes et malades. Alexandre se forçait à observer les lieux d'un regard impassable et à ne pas flancher. Il entendit le directeur, puis le seigneur de Frenn, évoquer le salaire qui serait remis aux pensionnaires pour leur travail dans l'établissement. Quelque chose n'allait pas. Son intuition le lui soufflait. Les gestes du directeur, son corps... Cela paraissait imperceptible mais le jeune homme percevait de discrets signes de gêne. Il vit s'approcher à nouveau Edouard qui montra son ardoise avec une étrange inscription.

Nous, presque = M. pardon.

Que signifiait ce message ? Qu'essayait-il de lui communiquer ? L'esprit d'Alexandre analysait à toute vitesse pour percer ce code. Le muet désignait les les pensionnaires de l'établissement. Cette partie était une certitude. Mais ce M ? En langage mathématique, la lettre M renvoyait à une moyenne. A moins que ce soit plutôt la masse ? Non, cela ne possédait pas le moindre sens. Que pouvait donc désigner ce maudit M ? Le M.. Il s'agissait d'une double consomme qui s'associait à un W renversé. Le W appelé  aussi un double u. Un double U. Que pourrait-il vouloir dire par ce terme ? Soudain, Edouard montra son épaule et Alexandre se sentit subitement idiot de ne pas avoir été au plus simple. M pour Monbrina ! Alors, il essayait de lui montrer que les pensionnaires logés ici seraient comme des esclaves ?

Malgré le décodage du message, Alexandre demeura impassible et ne signala pas à Edouard avoir compris. Coldrid venait de tourner la tête dans sa direction et le jeune homme désirait lui montrer suivre scrupuleusement ses ordres. Son esprit cependant s'agitait pour chercher un moyen d'aborder un sujet aussi délicat. Il se remémorait cette sensation particulière en observant le directeur et le message allait dans le sens de ses soupçons : des choses louches se cachaient ici. Il lui fallait à présent un angle pour lier cette information à la condition de comment les infirmes pouvaient être traités. La tâche se révélait complexe.

Alexandre cherchait une idée quand il remarqua son maître qui se dirigea vers la dénommée Théa, sans doute pour utiliser al simplicité de son esprit à son avantage. Et si cela le servait ? Il s'avança pour interpeler poliment son maître.

" Maître, vous souvenez v que nous discutions hier soir de certaines déclarations qui ont pu être rapportées ? Que certains infirmes affirmaient avoir été spoliés des sommes gagnées pendant leur séjour, que leur directeur les aurait mis de côté en invoquant le rachat de leurs âmes ou d'autres excuses liées à la condition physique."

[i]Discrètement, le petit infirme indiqua de sa béquille Edouard qui marchait devant eux d'un pas. Il se tourna ensuite vers le seigneur de Frenn, soucieux de ne pas le mettre à l'écart de la proposition, et ajouta toujours bien bien poliment :


"Il serait peut-être intéressant d'interroger les pensionnaires eux-mêmes, en plus des livres de comptes, pour recouper témoignages et faits, ne pensez-vous pas ?"

Là-dessus, Alexandre se tut jusqu'au moment où le groupe découvrit la salle de l'atelier, là où s'entassaient une quantité effroyable d'infirmes, soumis à un travail répétitif. Son visage pâlit quelques instants. Le jeune homme s'obligea à serrer les mains autour de ses béquilles. Ne pas ressentir. Ne surtout pas s'apitoyer. Il visualisa pour s'encourager la silhouette de sa mère, installée sur la couchette de sa cellule, à lire la toute première lettre qu'il lui aurait envoyé pour annoncer son emploi de secrétaire du ministre des affaires étrangères. Elle serait transportée par la joie. Elle crierait peut-être, emportée par l'émotion, et pleurerait ensuite. Elle serait fière. Immensément fière de sa réussite et soulagée de le savoir dans une excellente situation.

Imprégné de ces images, Alexandre contempla toutes ces petites mains, misérables, s'user dans des conditions effroyables. Il remarqua ensuite l'ardoise de Edouard. Tous ces gens, des malades et des infirmes, forcés à travailler des petites heures de la matinée jusqu'au crépuscule. Cela se révélait parfaitement inhumain. Même son père adoptif, aussi cruel avait-il pu être, se souciait de les ménager. Il tourna la tête vers son maitre et déclara d'une intonation austère tout en s'efforçant difficilement de garder son humilité :


"Il y a un abus net de la reconnaissance que les infirmes doivent à ceux qui leur permettent de se loger et de les nourrir. Ces personnes ne peuvent malheureusement travailler à des tâches physiques de trop longues heures. Dans mon propre cas, après deux heures, la fatigue m'oblige à prendre du repos. Or, si ces gens œuvrent du matin en soir dans ces conditions, il serait intéressante d'étudier les taux de décès de l'établissement."

L'explication passée, Alexandre redevint silencieux et contempla avec répugnance l'atelier. Il s'obligea à nouveau à contempler l'image mentale heureuse de sa mère pour garder son impassibilité jusqu'au moment où le Premier Conseiller s'adressa à un infirme pour évoquer le détail du travail. L'esclave tourna la tête et découvrit avec fascination deux autres bras, en plus des siens. Quelle singulière chose ! Comment cela avait-il poussé ? Pouvaient-ils bouger ? Sa curiosité bouillonnante lui faisait oublier l'horreur pour se perdre dans les hypothèses.
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Message par Coldris de Fromart Mer 13 Jan - 22:53




Coldris était satisfait de l’intervention d’Alexandre. Il avait coupé court au débat, car le but n’était pas d’attiser le brasier à grand renfort de soufflet, mais simplement d’allumer la mèche de leur projet de réforme. C’était chose faite, ils pouvaient désormais passer à la suite de la visite. Ah Berlingtham ! Cet homme aurait pu vomir des limaces et des scolopendres chaque fois qu’il ouvrait la bouche que ce n’aurait pas été plus désagréable que de l’entendre s’étaler sur de pareilles banalités. Parfois, mieux valait se taire que de déblatérer ineptie sur ineptie. S’il pensait qu’il allait le plaindre de sa situation miteuse, il se mettait le doigt dans le cul.

Dyonis allait inspecter les registres, mais qui était intelligent (ce dont il commençait à douter sérieusement) s’arrangeait toujours pour dissimuler ses petites magouilles des colonnes de chiffres. En tant qu’ancien clerc de notaire, il le savait pertinemment. Ce n’était pas là-dedans que l’on trouvait les failles d’un esprit méticuleux, mais à la source même du problème. Une simple question à un esprit innocent. Comme celui qu’il avait en face de lui et à qui il adressait un sourire. Il s’avançait justement vers elle, lorsque la voix d’Alexandre le stoppa. Il pivota pour l’écouter surpris avant d’esquisser un léger rictus. Comment avait-il compris ? Mystère. Il verrait cela plus tard. Pour l’heure, il avait une question à poser. Il ravala son sourire malin pour afficher celui bien plus charmant qu’il savait prendre.

- C’est une sacrée somme, quatre rilchs par jour ! Que vous êtes-vous offert dernièrement  Mademoiselle Théa?

Il se tourna ensuite vers leur guide pour lui retourner la question.

- Et vous Édouard ?

Pourquoi ces deux-là en particulier ? Car Théa avait pour elle la candeur de l’enfance, celle qui vous empêchait de discerner les intentions derrière les paroles. Quant à Édouard, lui les verrait et se ferait sans doute une joie de répondre à sa question.

Sur son ordre, ils reprirent la visite dans les tréfonds de l’hôpital général. Bien entendu, le directeur tenta d’user d’une subtile -ou non- menace sur l’infirme de guerre.
Un seau d’eau aussi glacée que les torrents de Zakros : c’était l’effet qu’avait eu sa proposition de mutation. Quand on voulait menacer quelqu’un, il fallait le faire avec brio. Ou se taire. Édouard s’immobilisa, comprenant sans doute son identité. Qu’importe. Il n’était pas là pour se faire des amis. Et il n’y avait que ceux qui ne faisaient rien qui n’avaient pas d’ennemis. Or, c’était loin d’être son cas. Bien loin même d’être son cas. Il apprécia le professionnalisme de leur guide qui rangea sa rancœur de côté le temps de sa mission pour les guider dans une salle qui n’avait rien ni de propre ni de respectable.

Coldris posa sur les lieux un œil sévère, mais qu’il garda somme toute détaché. Il examinait minutieusement les petites mains récupérer les filins de chanvre lorsque l’ardoise surgit dans son champ de vision, détournant un instant son regard. Peu ou prou du lever au coucher du soleil. Il acquiesça gravement et reporta son attention sur la salle. Des esclaves à crédit. C’était ce qu’il voyait tandis qu’il s’approchait d’un mur écaillé pour en gratter la peinture tout en commentant :

- Vous n’avez pas eu assez de chaux ou vous espériez que nous ne poussions pas la visite jusque-là ?

Coldris acquiesça à la remarque d’Alexandre. Ça ne sentait pas que la moisissure et autres odeurs peu ragoutantes ici, ça empestait le vice. Un jeune homme surgit soudainement pour saluer Édouard. Le ministre eut un instant de surprise en constatant les deux petits bras hors du col puis un sourire illumina son visage. Alors comme ça il fallait descendre dans les abysses pour dénicher des perles ! Qu’à cela ne tienne ! Bon, il aurait préféré une femme, mais cela ferait amplement l’affaire : il n’avait encore rien vu de tel dans sa collection.


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Message par Le Cent-Visages Jeu 14 Jan - 10:28

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
Édouard, interné

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Thzoa10

Théa, internée

Édouard fut soulagé de voir Alexandre repérer son message et s'y concentrer. Comprenait-il ? Rien dans ses traits ne lui signifiait ou non la réussite de son intervention. Même pas un acquiescement, un furtif sourire ou quoi ? Mais putain... C'était à se demander qui de lui-même ou de l'esclave avait le plus perdu son visage et le droit aux expressions. Car il apparaissait net au vétéran que le jeunot agissait ainsi relativement à son maître et à son statut. De dépit, il laissa retomber ses bras, l'ardoise pendouillant de nouveau sur sa poitrine. Il se souvint, à cet instant, des quelques malheureux de Hô-Yo qu'avec ses compagnons d'armes il avait saisis, dans l'émulation et l'effet de groupe. Miné, Édouard demeura immobile, espérant seulement qu'Alexandre l'ait compris et sache intervenir plus tard. Ce qui arriva. Seigneur, merci... Il en aurait béni le jeunot et aussitôt qu'une occasion se présentera, le défiguré aura pour Alexandre un regard habité de reconnaissance.
L'interné approuva les paroles du Premier Conseiller, qui ne se laissait pas duper par les indications du directeur. Il promit de gratter cette surface légale. Le Ministre n'était pas en reste et s'adressa immédiatement derrière à Théa. L'épais visage tout rond de la petite femme fut traversé d'une expression songeuse - elle fouillait sa mémoire, pour répondre :

-- B'en un peu de sel et d'herbes dans la soupe c'est meilleur. (Ses pouces se rejoignirent et elle les fit tourner l'un contre l'autre devant sa bouche, soudain confuse sans parvenir à saisir exactement pourquoi. Dans un petit bond et en retrouvant son sourire candide elle compléta) Et sinon, en fait pas grand chose, mais c'est de côté pour le jour où je vais sortir !

La question lui fut adressée à lui aussi. Temps de suspend. La réaction incontrôlée d'Édouard fut... de rire. D'une de ces hilarités sinistres et nerveuses. Les battements très audibles de sa glotte sous le masque et les plis à ses yeux seraient éloquents. Hormis peut-être pour Théa : son ami riait, donc ça devait être drôle, et comme ici l'on riait si peu, dès que cela arrivait la chose lui était communicative - alors elle rit elle aussi brièvement. Édouard enfin fit une réponse par l'absurde : un geste fier de sa main gauche le long de son habit miteux, et l'autre main élégamment posée à sa taille au côté comme jadis quand il posait en uniforme. Cela ne dura qu'une seconde ; Édouard retrouva son sérieux, le groupe quitta le dortoir. Pour le reste, Théa avait tout dit - le Premier Conseiller comme le Ministre et le jeunot étaient intelligents : ils comprendraient d'eux-mêmes l'arnaque de l'espoir de sortie sans qu'il n'ait besoin de commenter.

Quand on arriva dans la salle de travail, Berlingtham observa d'un œil soucieux les gestes de ses hôtes. Il comprima les poings dans ses poches au seul bruit du crissement de peinture sous les doigts de Coldris, puis au crissement de la craie d'Édouard qui donnait à présent des renseignements sans plus n'avoir aucun philtre. Et à cette question enfin. Le directeur avait compris à présent qu'il lui valait mieux en dire le moins possible. Que répondre ? La vérité - le moins pire...

-- Nous ne pensions pas en effet.

Derechef, Alexandre reprit la parole, pour une intervention achevant de convaincre l'interné que son message était passé et que le jeunot avait à cœur de l'exploiter. Le vétéran se demanda alors ce qu'il en était de l'esclave lui-même : cela sentait le vécu... Comment faisait-il avec cette fatigue et son maître en tenait-il assez compte ? Berlingtham, pour sa part, contre toute attente ne ressentit nulle anxiété aux mots du béquilleux : ce qui se passait ici... était légal. Les deux Messieurs pouvaient bien s'outrer, ils n'avaient rien vu dans l'institution que ne soit autorisé - du moins pas interdit - par la loi. Seules les fraudes aux comptes pouvaient faire l'objet d'une condamnation, et encore faudrait-il les trouver. Il tentait de se rassurer de la sorte pendant que ces Seigneuries abordaient le gamin aux quatre bras qui riait de bon cœur avec Édouard.

-- J'm'appelle Kirm, M'sieur, répondit l'adorable et frêle voix du garçon, après avoir timidement acquiescé à ce que disait l'homme au crochet. Prothèses qui au passage attirèrent ses yeux surpris autant qu'il avait bien senti les regards étonnés des hôtes se poser sur ses membres en excédant.

Sur un dernier échange de sourire - Kirm aux lèvres, Édouard aux prunelles - ce dernier se résolut à mener à terme la visite. Pour la première fois, l'on sentira son pas moins décidé, ses jambes flageoler en parcourant un couloir... jusqu'à cette porte noircie de crasse devant laquelle il s'arrêta. Berlingtham suivait sans un mot : il savait où ils allaient. Et que la loi autorisait. Grave, Édouard se tourna vers ses hôtes, griffonna puis montra son ardoise de ses doigts un peu tremblants :

CELA VA
ÊTRE DUR.


Puis, à Berlingtham, en tapotant l'épaisse serrure au milieu du battant :

LES CLÉS JE
VOUS PRIE.


Le directeur ne réagit pas sur le coup. Zakros lui macérait encore sous le crâne et il s'occupait à se rassurer quant au bon droit de son œuvre. Il sursauta néanmoins au claquement de l'ardoise d'Édouard contre la serrure, avant d'y lire sa nouvelle inscription - accompagnée pour le coup d'un éclat facétieux dans les yeux du défiguré, qui se préparait lui-même à ce qui approchait en se raccrochant à un peu d'humour :

M. DE L'ASSISTANCE
POUVEZ-VOUS ?


Et la retournant :

OU FAUT-IL VOUS
ASSISTER ?


Les lorgnades entre eux furent orageuses. Berlingtham saisit un trousseau au revers de sa veste, le tendit au patient qui ouvrit. La porte ronfla d'usure. Crissa sous toute sa pesanteur. On pénétra dans une salle étroite. Quasi noire. A priori, rien dans celle-ci. Carré de vide entre quatre murs polaires. Mais Édouard grogna et pointa au sol. Son pied poussa une trappe, révélant une grille sous laquelle on eut dit que le sol bougeait, vivait. Des souris. Édouard travailla à apaiser sa respiration, et étonnamment alla lui-même chercher le regard de Berlingtham resté neutre sur le côté. Cela lui donnait un genre de force rageuse où puiser. Pour pouvoir plaisanter et s'interdire de verser une larme à d'affreux souvenir en remontées acides. Coups de craie. Sourcils arrondis et affables. Ardoise exhibée :

BONS COLOCATAIRES.
MA, RIK ET JO PARTAGENT
ESPACE ET CROÛTES


Malgré ses efforts son pied frottait nerveusement le sol. Ah et dernière chose. Il pointa un carcan à l'angle de la salle quasi vide. Officiellement ce n'était "que" pour les fous à maîtriser - déjà assez sordide. Les autres instruments étaient rangés et Édouard n'eut pas la foi d'aller les chercher. Qu'importait : sa craie traça un fouet. Aussitôt vu par les hôtes, il l'effaça d'un revers de manche aussi vite qu'un mauvais rêve et laissa retomber son ardoise sur sa poitrine. Le vétéran sembla épuisé. Mission accomplie. De la main à son front : salut de fin d'opération.
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Jeu 14 Jan - 18:28

Le sang de Dyonis se glace à l'horreur qu'énonce Alexandre. Oh ce n'est certainement pas contre lui - mais être encore capable d'excuser ainsi son odieux père adoptif témoigne pour la énième fois de l'étendue des dégâts. Le seigneur préfère ne pas rebondir. Avoir seulement pour le garçon un regard de soutien.
Il se détourne alors, dans la suite du directeur, pour interroger les internés. La nouvelle question du Ministre est glaçante de cynisme mais diablement efficace : ainsi permet-elle à Théa de révéler que les parents n'ont quasi aucune occasion de dépenser ce prétendu salaire. Plus déchirant encore, le Premier Conseiller comprend que la malheureuse déficient - et sûrement tant d'autres de ces malades - ne tiennent qu'à l'espoir de sortir. Qu'un jour, on leur donnera le pécule amassé. La tête du baron manque de peu de dessiner une lente secousse effarée. Il déglutit - notamment quand clapote ce qui tient lieu de rire à Édouard. Le guide le fera néanmoins de nouveau sourire avec sa façon singulière, cet humour d'enfant, qu'il choisit pour faire passer son message au sieur de Fromart avant toutefois de savoir retrouver aussitôt son sérieux.

Dans la salle de travail, au milieu de toutes ces misérables petites mains, Alexandre souligne la fragile condition des infirmes que son père avait au moins la décence de respecter - quand bien même la démarche était purement utilitaire. Le seigneur de Frenn acquiesce. Très silencieux, il n'en retient pas moins chacune des informations données ici et là. L'arnaque aux salaires. Le labeur excessif. La médiocrité de la nourriture, les hardes piteuses... Il faut absolument changer les lois quant à ces hôpitaux ! Comment ne pas être révolté en prenant présentement conscience que Berlingtham, ainsi que tous les autres directeurs de ces établissements, n'a pour l'heure aucun motif de condamnation à son encontre ! Le Premier Conseiller entend plaider pour le retour aux statuts administratifs des Hôtels-Dieu. Un douloureux bras de fer avec les grosses entreprises allaient commencer, pour qu'elles cessent leurs sous-traitance en ces lieux et paient à la Couronne des dizaines d'années de taxes qui auraient dû lui revenir.
Le baron tente de laisser ces considérations dans un coin de sa tête, le temps d'adresser un sourire et quelques mots aux jeune Kirm - puisque c'est ainsi qu'il se présente. Peu doué pour dire autre chose que du purement utile et direct... Dyonis tente malgré tout un gentil : "Enchanté, Kirm. Tu... fais de l'excellent travail..." A peine ces mots sortis, il se trouve bête. Il aurait aimé lui dire plutôt "Je vais tout faire pour que bientôt tu puisses jouer et te reposer" ou bien "Tu ne mérites pas cela..." mais il déteste énoncer des promesses qu'il ne serait pas certain de tenir - surtout à un enfant. Sa prothèse vient donc doucement se poser dans un geste chaleureux sur l'épaule du jeunot, en guise d'encouragement et d'au-revoir. Au moins, le vicomte est là pour adresser un nouveau bon mot qui sait déstabiliser Berlingtham et amener un petit plissement réjoui au visage de Dyonis - même si cette visite est de plus en plus ride et que l'envie de rire décroît à mesure.

L'ont sort de la grande pièce. Un énième couloir se déroule sous les pas des visiteurs. La porte devant laquelle Édouard les arrête n'augure rien de bon. Leur guide a la délicatesse de prévenir quant à la dureté de ce qui s'annonce. Après tout ce qui a déjà été vu, le Premier Conseiller se prépare au pire. Il se draine d'une lente inspiration, en appelle à toute sa contenance. Son regard se retient de glisser vers Alexandre, cependant qu'il s'inquiète pour lui : avec tous les sévices qui ont déjà maculé ses jours, comment va-t-il réagir ?
Pour une fois, trop concentré sur son calme à garder face à cette étape, Dyonis n'extériorisera rien de son amusement aux échanges muets entre Édouard et le directeur pour que celui-ci cède la clé. Décidément, la menace de Coldris l'a pétrifié. Au moins, il ne pérore plus. En pénétrant dans la petite pièce, le baron s'étonne de ne rien voir... avant de baisser la tête pour découvrir l'immonde cage encastrée dans le sol. Son cœur en rate un battement, son ventre se noue. Néanmoins il tient bon : après tout, en septembre, il a supervisé en personne l'exfiltration de dizaines d'esclaves mutilés de chez le fou de Rottenberg. L'odeur du sang séché lui revient. La vue des cadavres enchaînés le long des mors, des geôles, des mains coupées, des peaux mortes... A côté, ceci serait presque une visite tranquille !
Dyonis n'en reste pas moins choqué. Ses yeux croisent les gestes tremblants d'Édouard, chez qui l'horreur est évidente à percevoir derrière le bouclier de son humour. Quand, enfin, leur guide signe comme un militaire la fin de cette épreuve, le seigneur demeure vissé sans réaction deux secondes durant, puis incline la tête avec respect. Son attention du reste n'aura pas manqué de se tourner aussi vers Coldris : comment aura-t-il affronté cette dernière étape ?

Une fois tous les cinq à nouveau dans le couloir - et la porte refermée sur ces cauchemars - Dyois décrète sans détour en regardant vers Berlingtham : "Comptez sur moi pour mettre toute mon énergie à faire que l'ensemble de ce que nous venons de voir ne soit plus légal." Oh oui ! Le Premier Conseiller a bien compris que le directeur estime n'avoir que continué l'ouvrage des processeurs. Qu'il se protège sûrement derrière les textes. ...Et pourtant, quelque part sa conscience lui a bien dit que ce qui arrive entre ces murs est susceptible d'en révolter plus d'un, pour qu'il n'ait pas voulu montrer l'intégralité de l'établissement. "Maintenant, passons dans votre bureau, une fois que j'aurai seulement fait un petit détour par ma voiture." Il allait être l'heure de sortir et commenter les nombreux documents saisis, qui n'attendent plus pour très longtemps entre les mains du secrétaire du baron, resta dans son carrosse.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 14 Jan - 23:33



Avertissement - châtiments corporels, violence physique et psychologique:


Il ne fut pas déçu de la réponse à sa question. Du sel et des herbes. Qu’aurait-elle pu demander d’autres quand sa vie se limitait à tromper le goût insipide de sa soupe le temps d’un jour ? Il hocha la tête avec un petit sourire pour la remercier.

- Voilà qui est fort sage de votre part, Mademoiselle Théa. J’espère de tout cœur que vous pourrez sortir prochainement répondit-il avec une sincérité troublante.

Et c’était tout le mal qu’il lui souhaitait : qu’elle puisse sortir avec une somme rondelette pour revoir le bleu du ciel et entendre le chant des oiseaux, bien loin des cris assourdissants des déments qui résonnaient de temps à autre entre ces murs faussement propres reflétant parfaitement l’établissement : trompeusement lisse et ordonné. Pourtant, il n’était pas dupe et savait pertinemment que ce jour n’arriverait sans doute jamais : non seulement elle avait peu de chance de quitter l’Hôpital Général, mais en plus elle ne toucherait jamais les sommes dues, il en était persuadé. D’ailleurs, savait-elle seulement compter pour s’en assurer ? Il en doutait. Aurait-il dû briser ses espoirs pour autant ? À quoi bon si ce n’était pour transformer son quotidien en supplice.
Il se tourna vers Édouard à qui il avait adressé la même réponse. Son rire équivoque lui étira un rictus, de même que son mime.

- Excellent choix, Édouard! Une tunique de qualité dans une étoffe distinguée. commenta-t-il plein d’ironie.

Un regard au Premier Conseiller lui indiqua qu’il avait pris en considération les informations récoltées. Lui qui faisait la moue à son arrivée, devrait sans doute le remercier pour le précieux temps qu’il était en train de lui faire économiser. Il n’aurait plus qu’à remplir toute sa paperasse habituelle... C’était ce à quoi il songeait lorsqu’ils arrivèrent dans la salle de travail, où de petites mains s’affairaient à trier cordage, boutons et autres tâches ingrates. « Petites mains », un terme qu’il trouva on ne peut plus adéquat lorsqu’un jeune homme affublé de deux bras atrophiés supplémentaires fit son apparition.
Exactement ce qu’il cherchait. Si on faisait abstraction de son sexe masculin, mais il s’en contenterait: son bon Roi serait sans doute ravi de sa trouvaille. Les goûts et les couleurs… On ne jugeait pas. Encore moins ceux de son souverain, aussi étrange puissent-ils être. À sa remarque, le Directeur semblait enfin avoir compris l’attitude requise. Zakros faisait décidément toujours son petit effet, à croire qu’on ne l’avait conquise que pour ses forêts et cette terre d’exil aux accents de condamnation à mort. Un lieu de rêve pour éliminer les éléments embarrassants sans s’encombrer des lourdeurs assommantes de la justice monbrinienne.
À la question du Seigneur de Frenn, une adorable petite voix pleine de douceur répondit s’appeler Kirm. Il observa d’un regard amusé son collègue de travail s’embourber dans une vaine tentative de bienveillance. De l’excellent travail ? ll n’avait rien trouvé de mieux ? Fallait-il donc tout faire ici ? Et dire que c’était lui, le Premier Conseiller du Roi. D’une enjambée, il se rapprocha du jeune Kirm.

- Si excellent, que j’ose vous proposer de nous accompagner au Palais Royal. Je vous présenterai au Roi en personne, Kirm.

Ce n’était pas si compliqué non ? Petit sourire charmeur, des mots bien choisis et sincères. C’était là tout l’art de la chose : pouvoir annoncer une vérité enjolivée et séduisante, mais parfaitement réelle. L’essence même de la politique. Il inclina légèrement la tête à son encontre déclarant muettement « Tout le plaisir est pour moi, après tout vous êtes novice dans le domaine. » Et qu’il ne vienne pas lui rebattre les oreilles de sa foutue morale ! Parce qu’il ne pouvait nier que le gamin serait mieux à servir de jouet au Roi qu’à s’esquinter les doigts en triturant de vieux cordages. Il serait bien logé, bien nourri et jouirait d’une vie relativement agréable -et de toute façon- bien meilleure que celle d’ici.

La visite reprit, mais Coldris nota bien vite que la terreur semblait s’emparer de leur guide au fur et à mesure qu’ils s’enfonçaient dans le corridor. Où les menaient-ils ? Son regard s’assombrissait à chaque nouveau pas. Lui qui était jusque là si plaisantin, n’en menait pas large ce qui n’augurait rien de bon. Ils s’arrêtèrent devant une porte à la couleur indéfinissable tant elle était crasseuse. Une porte que Berlingtham n’avait pas prévu de leur montrer et il n’avait même pas besoin d’en faire la remarque. Un simple regard au directeur le lui confirma. Le regard à la fois assuré et hautain de celui qui se sait dans son bon droit et angoissé à l’idée de signer son arrêt de mort. Pardon, son ordre de mutation. Édouard tentait tant bien que mal de contenir son anxiété tandis qu’il griffonna quelques mots. Le Ministre opina sévèrement de la tête. Il l’avait compris à son attitude, mais voir l’avertissement le conforta dans ses craintes. Il se tourna vers Alexandre :

- Attends-nous ici ou retournes auprès de Kirm, compris ?

Il était hors de question que le jeune homme visite ces lieux. Il avait suffisamment pris sur lui, il était inutile qu’il découvre ses secrets les plus sordides. Ce serait le forcer à rompre à ses engagements en le poussant à la faute. Considérant ses ordres comme actés, il attendit patiemment le cliquetis de la porte qui annonçait son ouverture imminente sur une pièce obscure. Coldris réprima un frémissement : il détestait l’obscurité. Combien de fois avait-il demandé à Léonilde de maintenir le feu ou des bougies allumées ? Dans les ténèbres, il lui semblait que ses vieux démons étendaient leurs griffes le long des parois jusqu’à venir le tenailler, à l’oppresser, à l’étouffer. Il inspira profondément et chassa ses considérations aussi loin que possible. Dans cette pièce, il n’y avait rien. Rien d'autre qu’un silence lourd et pesant uniquement rompu pour les couinements des rongeurs et une goutte d’eau qui tombait de temps à autre. Un nouveau frisson s’empara de lui. Il serra les mâchoires et déglutit péniblement. Dans la pénombre, personne ne pouvait sans doute lire ses traits. Édouard poussa une trappe révélant une geôle souterraine. L’air commença à manquer.

Quel jour sommes-nous Isis ? Lundi. Non, tu es idiot, tu t’es endormi longtemps hier. Alors cela veut dire que nous sommes Mardi ? Mais je ne suis pas sûr. Je ne suis pas sûr que nous étions Dimanche hier. Le vent… Le vent il a soufflé tous les petits grains. Tu aurais dû voir cette bourrasque ! Elle s’est engouffrée là, par le soupirail et fiouuu tout s’est envolé. Tout. Tout. Tout. (il se mit à pleurer) Comment je vais faire maintenant ? Comment ? Tu as vu comme il fait froid en plus ?(il sécha ses larmes du revers de sa main et renifla) La nuit, je me roule en boule, je serre mes genoux aussi fort que possible contre moi, mais je grelotte, je grelotte tellement… Alors j’imagine que tu es là et que tu me serres dans tes bras en me chantant la chanson. Je l’entends même, comme si tu étais là !

«Dors dors petit renard, c’est le soir, il est tard.
Range ton étendard et quitte les remparts.
Dors dors petit renard, c’est le soir, il est tard.
Petit veinard sous ta pelisse de brocart… »

Et quand je me réveille, je suis toujours enfermé. Tu n’es pas là et je suis seul. Je hurle, mais seul l’écho me répond.


Sa tête commençait à tourner au fur et à mesure que les images affluaient et qu’il s' efforçait de les chasser. Il appuya machinalement sa main contre un mur poisseux avant dans la retirer aussitôt de dégoût. Il constata la pancarte et répondit sans réfléchir :

- Au moins ils ne grignotent pas vos croutes...

… Et vous n’avez pas encore assez faim pour vous dire que cela ferait un repas tout à fait honorable.

Il se souvenait parfaitement du couinement aigu, de leurs petites pattes griffues qui l’escaladait alors qu’il n’avait pu la motivation de se lever ou de les chasser. Ils farfouillaient dans ses cheveux à la recherche de la plaie qu’il s’était infligée en se cognant violemment la tête dans l’espoir d’en finir. Ou alors c’était ses pieds dont la peau semblait tomber en lambeaux sans qu’il ne se sache trop pourquoi. Parfois, il faisait le mort, juste pour les laisser s’approcher et tentait de les attraper par surprise. Il n’avait jamais réussi. C’était sans doute mieux ainsi au fond.

Édouard expédia la suite et désigna un carcan accroché à un mur.

Alors Coldris, elle est comment la vue ici ? Ton nouveau collier te plaît ? Non ? Tant mieux. J’espère que tu ravaleras ton insolence en même temps que ton ingrate médisance ! Après tout ce que j’ai fait pour toi !

Ce jour-là il avait craché à la figure de son géniteur dans un regard haineux pour toute réponse. Il se souvenait encore de l’humiliation de ses frères qui étaient venus le couvrir de toutes sortes de détritus et paroles fleuries. Il se souvenait encore de la douleur dans son cou quand la fatigue avait eu raison de lui et que ses jambes avaient fini par se dérober. Une semaine. On l’avait laissé une semaine. Attaché par le cou, les bras menottés au mur, reliés par une chaine trop courte pour pouvoir les soulager….

Édouard reprit sa pancarte. Cachés derrière ses bras croisés dans une attitude stoïque, ses doigts jouaient nerveusement le long de son velours noir. Le visage fermé, il ne comptait rien laisser passer des traumatismes qui surgissaient et menaçaient de l’emporter. Ça n’allait pas durer, la visite allait s’achever, il le savait. Il se raccrocha à cette certitude, lorsqu’il remarqua le fouet dessiné. Réminiscence physique, son dos se tendit subitement.

Vingt coups Coldris. Vingt pour avoir volé dans ma bibliothèque et t’être adonné à l’oisiveté de ces gratte-papier. Si j’avais su à quoi cela te servirait, le Père Jean ne t’aurait jamais instruit du latin ! Un… Deux…

C’était toujours la même histoire. Il serrait les dents les trois premiers coups. Les trois suivants, il se mordait si fort lèvres, joues ou langue qu’un goût ferreux finissait par emplir sa bouche, mais il préférait encore ça que de lui donner la satisfaction de l’entendre hurler. Au septième son père perdait patience et redoublait de fureur. Il hurlait ensuite, jusqu’au dernier. Il retournait dans sa chambre et Isis pansait ses plaies en secret. Jusqu’à ce qu’elle ne soit plus là, alors il s’allongeait sur le ventre et hurlait dans son oreiller. Les stigmates zébraient encore son dos de marbrures blanchâtres. Aussi étrange que cela puisse paraitre, bien peu de femmes avaient eu le privilège de les voir.

Édouard signa la fin de la visite. Il retint un soupir et se contenta d’un discret signe de la tête tandis qu’il retrouvait peu à peu contact avec la réalité. Passer la porte en sens inverse lui fit l’effet d’une bouffée d’air frais -pleine de cette âcre odeur de chaux-. Il inspira profondément aussi discrètement que possible. C’en était fini. Il aurait voulu se secouer la tête. Il ne pouvait pas. Il devait rester stoïque.

- Je vous remercie pour cette visite enrichissante, Édouard. Vous avez à nouveau servi votre pays aujourd’hui et votre Roi vous en ait reconnaissant. Je tâcherai de faire en sorte que vous soyez récompensé pour la totalité de vos services rendus.

Il s’inclina, légèrement plus que son simple hochement de tête habituelle, mais point trop non plus. Il n’oubliait pas son nouveau projet de Maison de Repos pour vétérans. Cette nouvelle année s’annonçait décidément fort riche. Lui qui pensait s’ennuyer…

… Et toi Virgil qu’est-ce que tu en penses ? Peut-être que Démétrius se plairait à s’atteler à cette tâche, qu’en dis-tu? Cela lui donnerait un objectif…

Pendant que Dyonis retournait à sa voiture, Coldris retourna auprès d’Alexandre.


Coldris de Fromart
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Message par Alexandre Ven 15 Jan - 11:12

Dabs les dortoirs, l'atmosphère demeurait étouffante, pleine de lourdeurs et de malaise. Après un dernier regard, impassible, à Edouard, pour lui signifier qu'un très court hochement de tête son remerciement pour l'information, Alexandre se tourna vers son maître pour lui révéler habilement cette dernière. Il écouta ensuite la question posée à Théa et se désola intérieurement de l'entendre se contenter de son sort. Elle était un esprit simple, si aisée à duper. Par ailleurs, dans son état mental, savait-elle bien ce que représentait quatre rilchs ? Au moins, dans son malheur, par rapport à Edouard, dont le rire sauvage et brusque lui fit peur, elle possédait au fond de la chance. Elle ne comprenait pas être dupée, attendant naïvement de sortir un jour, comme un enfant attendrait la venue de son prochain anniversaire.

Tout en écoutant les dernières discussions, Alexandre commença à se perdre dans ses souvenirs et mesura qu' il ressemblait un peu autrefois à cette malheureuse Théa. Lorsque son père adoptif lui faisait régulièrement qu'il l'emmènerait le lendemain à l'Hôpital Général car il n'en pouvait plus de ses bêtises et qu'il ne cessait de le décevoir à être aussi faible. Il y croyait totalement et passait presque toute la nuit sans dormir, à prier, hanté par cette idée de quitter son confort et sa mère. Ce monstre n'appliquait jamais cette sanction et préféra annoncer au matin avoir décidé de passer l'éponge et qu'il ferait mieux de se montrer reconnaissant pour sa générosité.

La visite allait reprendre et Alexandre s'empressait de la suivre. Néanmoins, il eut un léger temps de retard, encore sous le coup de l'émotion. Il observa un instant son maître se retirer, suivant le Premier Conseiller, et se tourna vers Théa pour lui glisser un beau mouchoir de soie, brodé à ses initiales, et lui tendit, accompagné d'un sourire tendre. Cela avait beau être de as mère, elle en prendrait encore plus soin que lui. Et puis, elle ne devait pas recevoir, elle, beaucoup de cadeaux. Il ne lui laissa pas le temps de la remercier et se pressa pour rejoindre le groupe.

Une fois dans l'atelier, Alexandre dut longuement prendre sur lui pour se contenir devant la réalité du travail intensif de malades et infirmes qui auraient dû recevoir plus de soins et de repos. Au moins, son père adoptif comprenait, lui, ce principe en dépit de sa longue liste de cruautés. Il contempla ensuite la découverte étonnante de ce Kirm pendant que le Premier Conseiller conversait avec lui. Son regard, qui s'efforçait d'être impassible, détaillait ses deux bras supplémentaires. Ils semblaient ne pas bouger. Seraient-ils inertes ? Ce seraient ainsi des appendices inutiles ? Mais pourquoi avaient-ils poussés ? Que s'était-il passé dans le ventre de sa mère ? Il se souvint des fameuses siamoises. Et si la mère ou le père de ce Kirm serait un siamois ? Par conséquent, l'enfant avait développé une autre forme de état déjà complexe.

Alexandre n'eut pas le temps de réfléchir plus longtemps à ce sujet que la visite se poursuivit. Elle s'arrêta cependant assez vite au milieu du couloir. Des échanges tendus entre le directeur et Edouard. L'ancien soldat prenait l'avantage. Derrière son masque impassible, Alexandre eut un frison qui lui parcourait l'échine. Les gens supérieurs et imbus de leur importance détestaient être malmenés. Edouard paierait ce conflit. Pour de petites phrases malheureuses, bien plus anecdotiques que cette situation, son père adoptif avait souvent zébré son dos. L'infirme tiendrait. Il avait survécu à la guerre. Si un gamin aussi mal foutu qu'Alexandre avait su survivre à des traitements ignobles, l'ancien militaire le pourrait aussi.

Coldris lut l'ardoise que Edouard leur tendait mais à laquelle Alexandre ne pt accéder, se trouvant derrière. Son maître se tourna cependant vers lui et lui demanda de rester en arrière. Attendre ici ou retourner auprès de Kirm. Le jeune homme sentit la gorge se serrer en observant le groupe se diriger vers une partie de l'établissement qui devait être le septième cercle de l'Enfer.

De retour dans l'atelier, Alexandre s'attrista un instant de ces conditions, puis revint vers la table où travaillait le singulier infirme. Normalement, il ne devait pas parler. Mais, son maitre n'était pas là et techniquement il ne suivait plus la visite.


"Bonjour Kirm. Y a t-il longtemps que tu es ici ? Tu.. Tu as eu une famille un jour ?"

Afin de ne pas paraître impoli à fixer ses appendices, Alexandre sortir une feuille un fusain pour dessiner le temps que durerait la conversation. Il réalisera des croquis des salles inspectées tout le long de al visite. Cela pourrait peut-être utile. Au pire, cela exerçait le travail de ses doigts et de ses capacités artistiques.
Alexandre
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Message par Le Cent-Visages Ven 15 Jan - 22:36

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M. Berlingtham, nouveau directeur de l'Hôpital Général
Édouard, interné

[6 et 8 janvier 1598] Charité bien ordonnée... [ft. Dyonis, Coldris, Alexandre - RP sensible][Terminé] Thzoa10

Théa, internée

Le Ministre et le Premier Conseiller comprirent l'horreur qui se cachait sous la douceur de la réponse de Théa - et derrière les pitreries de la sienne. Édouard le sentit à leurs regards. Pendant ce temps son amie reçut un cadeau du jeunot aux béquilles. Les petits yeux des l'internée pétillèrent d'émerveillement. Ses doigts potelés reçurent comme un trésor le délicat mouchoir, l'étendirent devant ses yeux, le fit se balancer en admirant les broderies. D'un bond, elle se leva et fonça vers Alexandre pour l'étreindre de toute l'énergie câline de ses bras pâlots - avant de le lâcher et d'écouter les bons souhaits que lui adressait le Monsieur en noir. Dans ses sautillements d'enfant, elle battit des mains.

-- Oh merci, merci ! J'espère aussi que c'est pour bientôt ! (à Alexandre) Et merci aussi à toi, c'est trop trop beau.

Toute à sa joie de faire tournoyer le mouchoir, notamment dans la lumière des oiseaux découpés par la lanterne en papier d'Édouard, elle n'entendra pas la réponse ironique de ce dernier ni la réaction du Monsieur, ni ne verra les mimes du vétéran autour de ses guenilles. Ce sera sur ces deux beaux cadeaux que restera Théa, tandis que les hôtes et son ami quittaient la pièce. Édouard lui adressa un dernier regard prolongé : il savait qu'à peine partis, les gardiens allaient venir et la rappeler à l'ordre de tranquillité. Que tous les occupants du dortoir allaient même bientôt être remis au travail.

Un labeur qui fut le maître mot de la gigantesque salle qui les avala de ses portes délavées. Au milieu de l'horreur : le radieux sourire de Kirm, la lumière de ses cheveux et de ses grands yeux brillants quand Dyonis le complimenta. Si le jeunot fut poliment enthousiaste - ce travail était son cauchemar, néanmoins entendre une gentillesse quelconque faisait toujours du bien - Édouard sentit que ce pauvre Premier Conseiller essayait... oh oui, essayait vraiment d'être gentil ! Que cependant les mots et l'amusement ne lui semblaient pas chose aisée. Le cœur y était et cela demeurait assez rare pur être souligné... mais ah la la ! S'il pouvait lui prêter toutes ses idées de choses à dire, bloquées à jamais dans le silence d'un masque ! Enfin... il s'attendrit malgré tout de la tentative. Et heureusement - quoiqu'à la grande surprise du directeur autant que de l'interné - ce fut le Ministre qui sembla pris à son tour d'une envie de flatter Kirm... comme personne !

-- Merci beaucoup M'sieur, aura d'abord souri le garçon à Dyonis. Mais regardez c'est tout facile en fait. (Il lui présenta une de ses austères petites pièces et passa le doigt sur la tranche avant d'exhiber ses gestes de travail, le rose toujours aux joues. L'intervention de l'autre Monsieur suspendit le mouvement du jeunot. Par réflexe sidéré, il regarda le Ministre dans les yeux... avant de s'en mordre la lèvre et de courber humblement l'échine, craignant d'avoir été impoli) M... Le... Le roi M'sieur ? Mais... il s'ra pas content... j'l'ai dit, c'est tout facile, et même que Thibault là bas, et aussi Maryse, y sont encore plus rapides que moi...

Il n'y comprenait rien. Lui au palais royal. Le souverain qui s'intéresserait à ses petits carrés qu'il taillait toute la journée. Le Monsieur qui en tout cas semblait proposer de l'emmener pour cette raison. Et ça n'avait aucun sens. Kirm s'efforça de sourire un "merci" à Coldris, mais chercha surtout le regard du vétéran : lui, est-ce qu'il avait mieux saisi ?
Dans son coin, Berlingtham arqua un sourcil puis fit vite le calcul : le vicomte était sérieux. On prétendait que le souverain collectionnait les monstres. Oh... il ne ferait pas d'histoire à lui céder ce jeunot si tel était son désir. Si cela pouvait plaider en sa faveur et rattraper le début de la visite.
Édouard quant à lui aura arrondi les yeux à l'intervention du Ministre. Cependant, afin de ne pas troubler davantage Kirm, il adressa sitôt après un acquiescement entendu comme un "merci" pour l'insigne honneur fait à son ami. Autre genre de tentative de bienveillance - clairement d'un style opposé à celui du Premier Conseiller : entre celui qui n'en faisait pas assez et celui qui en faisait... peut-être un peu trop. Car évidemment, Édouard savait si peu du roi - autant que de la vie hors de ces murs depuis dix-sept ans - et estima que ce devait être un essai de rêve donné à Kirm. Bizarre tout de même. Le principal intéressé ne paraissait pas convaincu, mais que se passerait-il s'il venait à espérer vraiment cela ? Songeur, Édouard bidouilla une des petites pièces dans l'établi de son ami. Il y avait des bonnes intentions... périlleuses. Et un vrai univers entre maintenir l'espoir déjà vivant chez Théa... et en créer un délirant chez Kirm. Dans l'incertitude complète, le défiguré ne voulut pas jeter un malaise. Il rentra dans le "jeu" en prenant devant Kirm une longue inspiration impressionnée. De celles qui vous félicitent et disent "la chance !" Il devra laisser on camarade sur ces étincelles avec la poursuite de la visite, non sans lui avoir ébouriffé les cheveux et reçu un échange un rire jovial avant de sortir. Édouard décida cependant que quand même, c'était trop étrange : le palais, le roi, franchement ! Dès qu'une opportunité se présenterait, il posera au Ministre sur son ardoise la question de ce qui lui était passé par la tête... En des termes plus polis.

Toute trace de légèreté et l'idée même de jeu s'évanouirent avec la fin de la visite. Tombeau d'horreur et semaison de cauchemars dans les veines de chacune des personnes présentes. Les murs ici avaient l'air de pleurer de toutes ces griffures reçues, de tout ce sang séché. Pour le plus grand soulagement d'Édouard, le maître d'Alexandre eut la délicatesse de l'autoriser à retourner voir Kirm le temps qu'eux pénètrent le jardin des supplices. Deux fossettes aux coins du nez en guise de sourire, l'interné observa l'esclave s'éloigner, avant d'achever sa funeste mission. Au revoir Alexandre !
Malgré ses efforts, malgré les lambeaux de son courage d'ancien soldat où il voulut puiser, l'enfermé ne sut dissimuler ses tremblements. Souvenirs de punitions reçues ici. Pires... pires que les champs de bataille de Hô-Yo par certains aspects ! A moins que ce ne fît l'effet rétroactif de la guerre, revenant pulser dans la chair aux moments peineux. Et tant qu'à parler de guerre... ce qu'Édouard découvrit du vicomte de Fromart entre ces murs lépreux... le déshabilla un instant de tout ce pour quoi il aurait pu le haïr. Il n'avait plus à ses côtés le Ministre de la Guerre, envoyeur avec le roi de milliers d'hommes au front... mais juste un homme. Un homme qui dut se retenir à une paroi avant de retirer derechef sa main de dégoût. Un homme dont la respiration s'était étrangement modifiée. Et Édouard, pour n'avoir plus en guise de gueule qu'un trou béant sur un souffle depuis dix-sept ans, était devenu particulièrement sensible à ce que cela pouvait exprimer, un souffle. Même chez ceux qui disposaient encore d'une bouche pour les masquer un minimum, cette respiration et ces émotions. Le défiguré ne savait rien de ce qui se cachait dans le trouble du sieur de Fromart, des traumatismes que l'endroit réveillait, mais n'y fut pas insensible. Ses sourcils auront monté vers son front, dans ce pli si caractéristique d'un triste désarroi. Puis il s'écarta. Se tourna, très vite. Car le Ministre n'avait pas l'air d'être homme à aimer être interrogé dans ses troubles.
Il y eut aussi cette phrase que Cloldris lui adressa après sa plaisanterie au sujet des souries. Arrêt net. Dans un vieux réflexe fantôme de sa vie valide, Édouard porta la main devant son masque comme s'il y avait encore une bouche arrondie d'un "merde... désolé..." à cacher derrière. Il crut comprendre. On... ne disait une telle phrase sans qu'elle sente le vécu. Des rongeurs et ses propres croûtes. Le vétaran n'osera pas se demander dans quelles circonstances exactes - l'image horrible suffit. C'était un peu comme avec la guerre : on oubliait le contexte précis, ne restait ici qu'un bruit assourdissant d'explosion comme du plomb dans tes oreilles, là une puanteur de sang séché ou de pisse dans ta culotte, là encore une brûlure tellement forte que c'est comme une autre mâchoire qui t'arrache la tienne. Alors non, on ne demande pas les circonstances. On ne peut pas, quand il n'y a que la souffrance vive. Par respect, Édouard aura expédié la fin de la visite.

Le seigneur de Frenn, lui, semblait être resté de marbre. N'en avait-il pas assez vécu pour se rendre viscéralement compte... ou au contraire en avait-il tant vu qu'il s'en était armuré ? Question que le défiguré garda pour lui. Berlingtham, il ne le regarda même pas. Suffisant et inconséquent, resté à l'entrée. Il avait regardé ailleurs tranquillement comme si de rien n'était. Son poing dans sa gueule : Édouard en avait quelquefois rêvé. Au moins put-il apprécier l'engagement du Premier Conseiller à rendre la teneur de ce lieu illégale. Il reçut avec émotion le remerciement du Ministre, et celui, silencieux, du baron. "Enrichissante". Édouard cilla. "Récompensé" ? Il arqua un sourcil. Comment ? Que... pouvait-il espérer ? Oh.. ce que le vicomte voudrait, après tout. N'importe quoi serait mieux qu'ici. Ou n'importe quelle amélioration - s'il demeurait ici - serait bonne à prendre. Pour toute réponse les ailettes de son nez s'étirèrent en sourire.
Berlingtham accueillit d'une très mauvaise oreille les interventions de ses hôtes. Le seigneur de Frenn d'abord. S'il réussissait ce à quoi il s'engageait... adieu les optimisations fiscales et les nombreux dons des patronnesses. Il afficha cependant un sourire docile et approuva en surface d'un mielleux :

-- Comme Votre Excellence en jugera le plus sage... (Puis, quand il fut question de rejoindre son bureau) Naturellement.

Les documents... Pourvu que ses agents et lui-même aient tout suffisamment bien codé ou dissimulé pour que le baron en lise le moins possible. Il partit en quête des dossiers dans sa voiture. Pendant ce temps, le directeur fera signe à Édouard de les guider à nouveau à travers ce foutu dédale de l'Hôpital... au moins jusqu'aux parties connues à partir desquelles il saurait très bien retrouver seul son office. Ce déglingué en avait assez fait. ...Assez même pour que le Ministre lui adresse des honneurs quasi militaires - Bonté Divine, rien que cela ! Malgré tout, il se força lui aussi à un sourire et à un :

-- Oui. Merci.

Tellement... mais tellement faux, putain. s'inquiéta Édouard, avant de se raccrocher à la phrase de Coldris - de bon augure ! Pour être "récompensé", il faudrait que quelqu'un revienne, et si quelqu'un revenait, ce trou de balle n'aurait pas la bêtise de le toucher. Non, il allait devoir revoir ses plans ! Rassuré, Édouard en avança le cœur plus léger. Profitant de se trouver un instant tout près du vicomte dans son circuit, il griffonna sur son ardoise et la glissa devant ses yeux :

DITES, POUR TOUT A L'HEURE
POURQUOI LE ROI ?


Édouard avait quand même la curiosité de se faire éclaircir ce drôle d'événement, avant de se séparer définitivement de ses hôtes dès qu'ils seraient arrivés à quelques couloirs du bureau. Berlingtham quant à lui se donna l'air calme, mains dans le dos, courtoisie à la face. Il garda pour lui ses interrogations tendues quant à la "récompense" promise au vétéran, censée lui faire retenir son bras... Est-ce que cela voulait dire qu'il devrait s'attendre à une nouvelle visite ? Ou bien un coursier lambda viendrait-il simplement au nom de Ces Messieurs apporter au défiguré quelques pécunes, un peu de brioche ou une orange si cela leur chantait ? Une médaille peut-être ? L'effet serait savoureux sur son sarrau d'interné. Berlingtham en était là de ses questions quand approchèrent les locaux qu'il connaissait. Bon.

oOo

Dans la grande salle de travail, Kirm fut tout à son étonnement puis à son bonheur de voir le garçon aux béquilles revenir pour lui parler. A lui ! Oh lala ! Le suivant du Monsieur qui voulait qu'il montre son travail au Roi ! Il l'accueillit, rieur, en saisissant de ses bras valides les deux plus petits pour les faire applaudir. Puis il reprit son travail, au cas où... tout en parlant ça serait bien.

-- Re bonjour ! (Un temps, timide) J'sais plus trop... Attends je compte... (Il s'aida de ses vingt doigts, se perdit dans son calcul ou dans sa mémoire) J'sais pas en fait. On sait pas trop dire ici comment le temps il avance. Vite ou pas, tu penses ? Comme dehors ou pas ? (D'un doigt, il fit clapoter sa lèvre, embarrassé à la dernière question sur sa famille) Je sais pas non plus... j'suis trop nul, j'arrive à répondre à aucune de tes questions en vrai ! Le roi, s'il a des questions comme ça aussi, ça va pas le fâcher ? (Sur un petit rire, il se pencha, curieux, pour observer ce que dessinait Alexandre) Oh lala c'est trop beau !! Même si c'est ici, et qu'ici c'est moche, comment tu arrives à le faire apparaître c'est trop beau ! Wahou, est-ce que c'est de la magie ? Tu t'appelles comment dis ?
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