[17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
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[17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Coldris venait de quitter Thierry, il repartit à cheval en direction du manoir du moulin, Valmar sur ses talons, accompagné de trois gardes, une escorte désormais obligatoire depuis de bien nombreuses années. Le temps où il pouvait simplement se rendre au manoir du moulin en chevauchant seul était désormais révolu. À vrai dire, il s’y était habitué et les évènements l’avait conforté dans cette direction. Il fallait bien quelques inconvénients à être au pouvoir après tout.
Dans son esprit, un tourbillon d’émotions s’affrontait. La joie tout d’abord à l’idée de la retrouver et de passer un long moment en sa compagnie sans que rien ni personne ne puisse venir les interrompre, mais aussi l’appréhension de revenir au manoir. Après tout, il n’y avait pas remis les pieds depuis la disparition de Solange, trop effrayé à l’idée d’y croiser des fantômes. Il avait cependant conservé le personnel en place afin que les lieux restent tels qu’ils avaient été lors de son vivant. Il avait tout de même emporté dans sa poche, cette petite clé dorée qui donnait accès à sa bibliothèque personnelle. Il y déposerait l’œuvre d’Alexandre dans son roman favori, en guise d’offrande. Ce soir, elle ne serait pas là pour le sermonner, ni même l’encourager à accepter la réalité. Il ne pouvait que se raccrocher aux échos qui hantaient perpétuellement son esprit. Elle avait été une plus qu’une amie ou une confidence, il avait trouvé en elle, une sorte de mère spirituelle et s’il n’en avait toujours fait qu’à sa tête, il aurait quand même pris plaisir à les présenter toutes deux.
Derrière tout cela se livrait bataille son amour flamboyant et sa glaciale raison. Celui qui lui intimait d’accepter, celle qui lui sommait de se retirer. Peut-être bien que Thierry avait raison et que le choix devait lui être laissé au risque de tout briser, mais était-il prêt à tout sacrifier ? À tout perdre pour… Pour quoi d’autre si ce n’était trois mots ? Non. Il ne dirait rien, à moins d’en être sûr. Il profiterait encore un peu égoïstement de son soleil avant qu’il ne se couche et ne le replonge dans la nuit éternelle.
Les grilles du manoir se dessinèrent finalement, conformes à son souvenir. Tout comme la silhouette du manoir. Elles s’ouvrirent et il galopa le long de cette allée comme la toute première fois où il y avait mis les pieds. La fontaine était cette fois-ci gelée, parée de ses diamants de glaces scintillants sous le soleil de midi. Il la contourna avant de mettre pied à terre devant l’écurie où un palefrenier se chargea de mener Ambrosia par la bride. Il ferma brièvement les paupières et inspira l’air frais. Cette fois-ci, il n’aurait personne à saluer dans le salon. Pas de remarque taquine, pas de café-whisky ou de porto, pas de discussion littéraire licencieuse. Elle était partie, elle aussi. Il contempla un instant les environs. Tout ceci retournerait à Sarkeris. C’était son héritage, celui de sa mère et de sa grand-tante. Lui n’en était que le gardien temporaire. Il gravit les marches sans la moindre hésitation et commença aussitôt par faire le point avec Léonilde, déjà présent depuis le matin.
Elle n’allait plus tarder à arriver. Coldris faisait les cent pas dans la bibliothèque principale. Il avait bien essayé de lire, il n’avait pas pu se concentrer bien longtemps. Trop d’impatience, trop de souvenirs qui grattaient pour s’échapper par les maigres interstices qu’il ne pouvait combler de toute sa volonté. Son cœur se rappelait à lui jusque dans ses oreilles, mais ses entrailles ne cessaient de le mettre en garde alors même que ses jambes hurlaient au mouvement et que ses lèvres fourmillaient, et que ses doigts le démangeaient, et que sa tête bourdonnait, et que sa respiration se faisait lourde. Lorsqu’enfin, il entendit le crissement des roues et des sabots, il attrapa son pourpoint qu’il reboutonna en vitesse et dévala le perron sans même prendre son manteau. Aucune importance. Il ne comptait pas s’éterniser. De là où il était, il avait l’impression que la voiture avançait au ralenti, cela ne faisait que l’agacer un peu plus. L’allée n’était pourtant pas si longue, non ? Enfin, la portière s’ouvrit et elle glissa hors de son coche dans une élégante vague vert émeraude qui lui rappelait le feuillage des buis et des épicéas du parc. Il resta quelques secondes à la contempler, un discret, mais chaleureux sourire au bord des lèvres avant de combler le vide qu’il y avait entre eux pour l’enlacer tendrement.
— Bienvenue au Manoir du moulin. Je vois que vous avez réussi à trouver le chemin déclara-t-il taquin pour penser à autre chose qu’à ses lèvres carmins qu’il rêvait d’embrasser.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Elle ne comprenait pas. Toujours pas. Elle ne comprenait rien. Absolument rien. Comment parvenait-il à apprécier sa présence ? L’excuse de la pure arrogance ne tenant plus debout, son attitude n’avait plus le moindre sens.
Qu’importe : elle n’aurait pas pu souffrir davantage que ces derniers mois. Tout ce qu’il pourrait faire désormais, ce serait la rendre aux enfers d’où il l’avait extirpée, ou l’achever. Certainement l’achever. Et, au fond, n’attendait-elle pas que cela depuis neuf mois ?
Dans son coche cahotant, elle ne pouvait s’empêcher de penser à ce jour - deux semaines auparavant à peine, mais cela semblait remonter à une éternité - ou il l’avait attirée dans ses bras. Ce jour-là, elle aurait déjà dû comprendre ce qui lui retournait les entrailles. Comment expliquer autrement la légèreté de son cœur que par ce mot-là. Idiote et faible qu’elle était, elle l’avait ignoré. Trop lâche pour accepter un amour qui ne trouverait jamais d’écho. Oh, oui, elle en finirait dévastée, elle le savait, mais tout ce qui comptait, c’était lui.
Cette voiture ne semblait pas avancer. Cela faisait des siècle qu’elle avait quitté Fromart, et elle n’arrivait toujours pas. Jean faisait-il exprès de perdre du temps ? Heureusement que Coldris ne l’avait pas invitée aussi tard que la dernière fois : comment aurait-elle pu attendre l’heure du dîner pour le voir ? Il lui manquait déjà terriblement.
Le manoir, enfin ! Et une allée tout aussi interminable que l’avait été la route. Elle jeta un regard furtif par la fenêtre de sa portière, elle vit qu’il était déjà dehors. Le véhicule arrêté, elle déploya tout ce qui lui restait de contenance pour de pas démonter la portière et se jeter dans les bras de son merveilleux phénix. Elle sortit calmement - bien que sans excès de manière - et chercha instinctivement ce regard qui la détaillait. Elle surprit son sourire, et avait avait presque mal à essayer de réprimer le sien.
Il l’enlaça, elle le serra aussi fort qu’il lui avait manqué - ou presque, parce que lui briser les côtes n’était pas nécessaire. Trois mots restèrent bloqués sur ses lèvres. Trois mots qu’elle ne devait surtout pas prononcer. Il n’était pas aisé de dissimuler des sentiments si intenses lorsque l’on était d’une nature si démonstrative. Quand ces mots-là, elle aimait à la dire, à les répéter et à prouver leur véracité de mille manières. Il était atroce de savoir que cette fois, ils eurent tout gâché.
Il ne l’embrassait pas ? Un éclair malicieux passa dans son regard : et si elle ne prenait pas l’initiative, combien de temps résisterait-il ? A moins qu’elle ne l’attire simplement plus… Non, ce n’était pas ça… Ou peut-être que si : de toute façon, elle ne le méritait pas.
— Et moi, je vois qu’oublier de se couvrir est un défaut familial, répliqua-t-elle sur le même ton pour faire passer le doute.
Elle effleura sa joue du bout de ses doigts gantés.
— Vous savez, ce n’est pas en tombant malade que vous vous vous acquitterez de vos dettes..
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Coldris la serrait dans ses bras et s’enivrer à ne plus en pouvoir des effluves de romarin qu’il aimait tant mais pas autant que celle dont le corps se pressait contre le sien. Il mourrait d’envie de l’embrasser et même plus encore de la dévorer de baisers. Il n’en fit rien. Il voulait savoir ce qu’elle ferait. Prendrait-elle l’initiative ou rentre-t-elle dans son jeu ? Il patienterait en habile chasseur qu’il était, jusqu’à obtenir l’opportunité adéquate pour la surprendre. Et là, ce n’en serait que meilleur encore que le velours de ses douces lèvres entre les siennes. Il se laissa tout de même aller à un chaste baiser sur le front. Le genre même qui ne lui ressemblait pas mais qu’il affectionnait étrangement également. Ses mains glissèrent le long de ses bras jusqu’à trouver les siennes.
Elle pouvait bien le sermonner, ce n’était pas ça qui éteindrait son sourire.
— Réjouissez-vous ma jolie luciole, j’ai failli sortir en veston puis je me suis dit que ce serait fort indécent de me présenter ainsi… il marqua une pause, espiègle avant d’ajouter : et de vous retirer tant le plaisir que l’honneur de jouer avec les nombreux boutons de mon pourpoint.
Après tout, il se souvenait parfaitement de leur étreinte passionnée dans sa loge du théâtre. Celle qui avait bien failli faire avorter la représentation avant même que le rideau ne soit levé, ce qui au fond, n’aurait peut-être pas été si mal que cela… Il lui devait une nuit et il pourrait s’en acquitter ce soir… et tous les autres soirs qu’elle voudrait. Peut-être qu’il ne pourrait pas honorer toutes ses dettes en étant malade, mais il y voyait malgré tout quelques avantages non négligeables.
— Certes non. Et j’en contracterai même de nouvelles en vous demandant de bien vouloir rester à mon chevet.
Avec malice, il récupéra sa main égarée sur sa joue pour lui présenter les lieux.
— Souhaitez-vous faire un tour du propriétaire ? Comme je vous l’ai dit précédemment, nous sommes ici dans une demeure dont j’ai reçu l’héritage. Elle appartenait à Solange d’Ovant. il leva les yeux vers la bâtisse avant de les reposer sur elle Il s’agissait de sa tante, mais pour moi, elle était surtout une amie, une confidente et plus encore ma mère d’adoption. Je n’y suis pas revenu depuis sa mort. Venez, rentrons, puisque je dois de toute évidence me vêtir de mon manteau.
Il lui adressa un petit sourire moqueur et l’entraina dans le hall.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Ce qui ne lui échappa pas, en revanche, c’était que la phobie des manteaux d’Alduis lui venait bien de son père. Elle regretta les gants qui interdisaient le contact de leurs mains - de toute façon, elle avait toujours eu horreur de les porter. Heureusement, bien que ce soit tant un plaisir qu’un honneur - elle eut un sourire désabusé et constatant que son beau phénix était toujours aussi humble - ce n’était certainement pas encore le moment de régler le cas de ce pourpoint.
Ce n’était pas tant l’indécence qui la gênait - elle avait déjà vu pire - que le risque qu’il tombe malade. Il pouvait bien en rire, elle, cela ne l’amusait pas. La nature de ses dette étant ce qu’elle était, elle avait besoin de lui, heureux et en forme, pour les payer.
— Cela risquerait de vous coûter très cher, signala-t-elle d’un ton excessivement sérieux.
Oui, elle aurait fait grimper ses dettes si elle avait dû rester à son chevet. Elle les aurait augmentées de tous les tourments que le savoir mal lui aurait causés, parce que toutes les excuses étaient bonnes pour grappiller des moments de bonheur avec lui. Mais elle n’aurait pas hésité un instant à rester auprès de lui. Même si la situation finissait par le rendre exécrable.
Elle avait tout de même furieusement envie de l’embrasser. Tout ce qui l’en empêchait, c’était un écho taquin, mélange de souvenir et d’imagination.
Je parie que tu craqueras avant lui, petite soeur.
Ariste savait, depuis le temps, qu’il suffisait de cela pour qu’elle soit capable de lui donner tort. Peut-être un remède à son accablante faiblesse de caractère… Ou peut-être cela faisait-il d’elle une gamine sotte et manipulable… Soit, elle attendrait même si ses lèvres la démangeaient et que de drôles de sensations de manifestaient un peu partout.
Visiter ? Pourquoi pas ? Après tout, ils avaient tout les temps devant eux - enfin, jusqu’à demain seulement, et seulement s’il savait la supporter jusque là.
Evidemment, le nom qu’il prononça lui était inconnu. Mais il ne fallait pas être un génie pour deviner de qui ce pouvait être la tante. Même s’entendre rappeler son insignifiance était douloureux, une part d’elle était soulagée. Soulagée qu’il ait eu des gens sur qui compter. La conscience qui avait croisé leurs chemins au cimetière, et maintenant une mère d’adoption. Sans doute des êtres d’une grande valeur pour avoir réussi à prendre tant de place… L’ennui étant qu’ils étaient manifestement tous deux décédés, en plus de sa déesse.
Elle se sentait tellement indigne d’avoir ne serait-ce qu’espéré pouvoir l’apaiser. Elle n’était personne. Elle n’était plus rien depuis qu’Ariste l’avait laissée. Elle ne savait faire qu’aggraver les choses, et s’obstinait pourtant… Enfin, si sa compagnie lui plaisait malgré tout, elle n’avait pas à remettre cela en question - Bérénice avait raison : elle n’avait pas le droit de les contester.
— Par où commence-t-on ?
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Elle n’avait pas l’air de trouver cela bien amusant. Du moins c’est ce que semblait dire son air bien trop sérieux lorsque sa banquière annonça que son endettement atteindrait des sommets. Coldris plissa les yeux avec espièglerie puis se pencha près d’elle. Il aurait pu l’embrasser. Il pouvait le faire. Elle était si proche. Et il en mourrait d’envie. Ou même rien que sa joue rosée par le froid, mais non. Il poussa jusqu’au pavillon de son oreille où son souffle chaud se mua en paroles taquines.
— Rassurez-vous, je suis une très mauvaise graine. Il semblerait que j’insupporte les miasmes eux-mêmes. Le cas échéant, j’aurais déjà succombé de quelques fièvres bien avant de connaitre ma première femme.
Il se retira dans un sourire mutin avant de lui proposer de faire un tour des environs.
— Mais par le commencement, voyons! s'exclama-t-il en l'invitant poliment d'un geste du bras à entrer.
C’était presque autant pour elle que pour lui, car en réalité, à son arrivée, il s’était contenté de traiter avec Léonilde dans le hall avant de s’enfermer dans la bibliothèque où il avait fait les cent pas. D’ailleurs, son fameux manteau était toujours là-bas, jeté négligemment sur une chaise pour pallier à la chaleur du brasier dans l’âtre. Avant de commencer à faire le tour des différentes pièces et jardins, il se devait de lui dire chez qui ils se trouvaient et pour cause, il ne se sentirait jamais chez lui ici. Ce domaine appartenait à Solange, Aurélia et Sarkeris, mais il était plein de délicieux souvenirs qu’il ne pouvait s’empêcher de partager, à peine arrivés dans le hall. Il se revoyait faire son entrée, trente-deux ans plus tôt.
— Vous savez, c’est amusant, commença-t-il en se retournant vers elle, car la première fois que je suis venu ici, j’avais exactement votre âge !
Et ceux à deux tout petits mois de différence. Quelle étrange coïncidence quand on y pensait ! Il n’avait pas l’impression que tant de temps s’était écoulé. Parfois, il avait l’impression que tout ceci s’était déroulé avant-hier. Ses yeux étaient toujours aussi bleus, mais ses cheveux s’étaient parés d’argent depuis deux ans. La faute sans doute à Virgil autant qu’à Mornoy qui avait saupoudré leurs lots de soucis autant que de peines. Il poussa une première porte et découvrit un salon.
— Le premier salon de ce manoir. Celui où j’y ai rencontré ma chère mère la première fois et celle qui aura refusé d’être ma belle-mère. Par la suite, j’y passé de longues heures à conter, rire et me plaindre.
Et à pleurer aussi sur les genoux de Solange. Mais cela, il préféra le garder pour lui-même. Tout était comme il l’avait laissé la dernière fois qu’il était venu. Le sofa était toujours là, mais pas de Solange aux yeux espiègles et à la langue acérée pour accueillir son cher Coldris. Aujourd’hui, il n’y avait qu’eux. Il allait devoir s’y faire quand bien même il avait la cruelle impression qu’il manquait quelque chose dans le décor. Il fit quelques pas et l’invita afin de l’inviter à entrer.
— Dites-moi Eléonore, comment imaginez-vous celle que j’ai considérée comme une mère ? l’interrogea-t-il en se laissant tomber sur le canapé tapissé de fleurs bleues.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Et le voilà qui, se lançant dans la visite des lieux, lui rappelait subtilement qu’elle n’avait pas réellement sa place à ses côtés. Qu’était-elle exactement ? Pas grand chose, c’était certain. Et ce même s’il se laissait croire qu’il l’appréciait.
— Je ne pensais pas que c’était aussi récent, ironisa-t-elle à sa précision.
En fait, elle plaisantait à peine. Quel âge avait-il annoncé, ce jour-là, alors qu’elle se demandait par quel côté feinter pour le rattraper ? Alors qu’il lui avait chipé son pendentif et s’était encouru comme un enfant ? Alors que pour la première fois depuis une éternité, elle avait ri pour de vrai ? Oh, elle se souvenait fort bien de l’âge revendiqué, mais ce n’était qu’un nombre abstrait qui s’oubliait dès qu’on le voyait.
Alors qu’il lui montrait la première pièce, elle ne put s’empêcher de se demander à quoi son beau phénix avait pu ressembler à cette époque. Cela faisait drôle de se dire que ni elle, ni la première partie d’elle-même n’étaient nés. Dire qu’à cette époque, elle avait encore un ministre dans sa famille. Et que ce dernier avait certainement dû voir Coldris comme un parvenu qui retomberait bien vite dans l’ignorance dont il était issu. Par pur principe. Il faudrait qu’elle aille jeter un oeil dans son bureau, pour voir s’il n’avait pas laissé de pronostics. Gilbert en cachait la clef - Gilbert avait caché les clefs de la moitié des pièces de ce fichu hôtel - et elle ne saurait sans doute pas le convaincre de lui ouvrir mais... elle saurait négocier avec la serrure. Elle avait toujours les arguments pour ça, même s’il fallait avouer qu’Ariste y était bien plus habile qu’elle.
Elle entra dans la pièce, un peu hésitante, comme si elle craignait de bousculer ses souvenirs - que ce soient ses contes, ses rires ou ses lamentations. Et sa question suivante ne l’aida pas… A vrai dire, elle n’en savait rien du tout. Sotte Eléonore. incapable de trouver une réponse. Et que faisait-on lorsque l’on ne trouvait rien à dire devant l’une des seules personnes capable de la rendre orgueilleuse ? On débitait les pires âneries pour détourner l’attention, bien sûr ! Elle n’était bonne qu’à cela, de toute manière. Inutile, ridicule et ennuyeuse qu’elle était.
— Facile ! affirma-t-elle. Absolument inintéressante. Ce devait être quelqu’un de fade, de stupide, d’ennuyeux à en mourir, développa-t-elle en faisant un pas de plus vers le fauteuil. Certainement dénuée de toute culture, si ce n’est - il faut le lui accorder - une connaissance exacte des Saintes Ecritures desquelles elle semblait sortir chacune de ses phrases sans avoir l’air d’en comprendre un mot. Rigide jusqu’au bout des ongles. Incapable de tenir une conversation. Sans la moindre once d’ouverture d’esprit ou d’humour. Assurément une personne de très mauvais goût dans tous les domaines, conclut-elle en se rendant compte qu'elle s’était presque décrite - pour le plus grave, du moins.
Toujours debout à environ un mètre de lui, elle l’interrogea du regard :
— Ai-je oublié quelque chose ?
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Il devinait qu’elle avait décidé pour une raison qui lui échappait encore qu’elle ne cèderait pas la première à la tentation de ses lèvres. Il y avait dans son attitude un agacement mêlé de frustration et d’envie face à ses provocations répétées. Qu'elle se rassure, il n’avait pas prévu de jouer au plus têtu. C’était simplement qu’il préférait la surprendre lorsqu’elle s’y attendrait le moyen, car alors, ce n’en serait que meilleur.
Taquine, elle se permit de lui faire remarquer les années qui s’étaient écoulées et qui de fait les séparer. Loin de s’en offusquer d’une quelconque façon, ce fut sur le même ton qu’il lui répondit :
— Tout juste avant-hier.
Et d’un petit sourire, il commença la visite par ce premier salon. Celui où l’une l’avait accueilli avec curiosité et l’autre avec malignité. Il aurait dû se douter rien qu’à ce regard trop appuyé qu’il y avait là des intentions qui finiraient par lui être nuisibles, mais comment aurait-il pu se méfier alors que tout ceci n’était encore que son habituel jeu ? De la même façon, il ne s’était pas douté que cette autre femme assise sur ce divan prendrait une telle place dans sa vie et il était amusant de constater que c’était l’une des rares qu’il n’ait jamais tenté de mettre dans son lit quand bien même elle y aurait parfaitement eu sa place dans d’autres circonstances. C’était sur ses considérations qu’il posa sa question à Éléonore. Il n’y avait pas de pièges, simplement de la curiosité qui de toute évidence l’avait quelque peu déstabilisée l’espace de quelques grains de sablier. À sa description qu’il devinait emprunte d’ironie -puisqu’elle le connaissait suffisamment pour savoir qu’il aurait fui n’importe quelle personne répondant à ces affirmations- il étira un sourire qui acheva de se muer en un rire à en réveiller les fantômes. Il sauta hors de son assise, l’attrapa par la taille et la retourna dans un mouvement dansant afin qu’elle puisse contempler son reflet dans le miroir trônant au-dessus de l’imposante cheminée. Ses bras enroulés autour de son ventre, il appuya son menton contre son épaule.
— C’est exactement cela… déclara-t-il amusé en plongeant son regard dans celui du monde de verre, si vous l’observez dans un miroir. Excepté sans doute les Saintes Écritures qu’elle respectait plus que moi, quand bien même ses goûts littéraires étaient pour le moins variés et épicés. Plaisir qui se retrouvait d’ailleurs dans sa propension à déguster des breuvages qui tenaient chaud. Au fond après toutes ces années, je suis en mesure d’avouer que c’était surtout une frileuse notoire.
D’où son absurde obsession pour les promenades nocturnes en chaussettes, sans doute. Non décidément, il ne s’y ferait jamais et il ne l’avait fait qu’en sa présence. Lorsque le chat n’était plus là, les souris dansaient -et le taureau aussi-. Pour sa défense, il fallait dire que le parquet ciré avec des chaussettes était source de glissade et de blessure. Or, il n’y avait que dans le moelleux d’un lit (et quelques autres exceptions) qu’il aimait à se retrouver les quatre fers en l’air.
Ses bras se dénouèrent finalement, lui offrant de nouveau sa liberté alors qu’il retournait déjà auprès de la porte, commentant les faits passés avec nonchalance :
— Il semblerait que ma patience s’étiole avec le temps. Vous imaginez que je l’ai fait patienter trois semaines avant de donner de mes nouvelles et deux semaines supplémentaires avant de la revoir ?
À cela, s’ajouter son retard savamment préparé à son invitation. Il doutait fortement d’être en mesure de parvenir à en faire autant aujourd’hui. Rien qu’avec elle, il n’avait guère tenu que deux semaines. À ses vingt et un ans, il était jeune, fougueux et débordant d’arrogance. Désormais, quoi que l’on en dise, il était nettement plus modéré, bien que tout cela soit compensé par un cynisme qui ne le quittait plus, de peur de voir le bout étincelant de la faux déchirer le voile de ténèbres et s’abattre sur sa nuque.
Si tout devait se finir demain, alors il refusait d’être déraisonnablement patient.
dum loquimur, fugerit invida
aetas: carpe diem, quam minimum credula postero.
Pendant que nous parlons, le temps jaloux s’enfuit.
Cueille le jour, et ne crois pas au lendemain.
Odes, I, 11 - Horace
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Replongée dans ce très lointain hier, ce fut par élimination qu’Eléonore décrivit la fameuse mère de substitution de son phénix. Au moins ses bêtises amusaient-elle Coldris... Malheureusement, il fallait admettre que la jeune femme possédait plus de la moitié des défauts qu’elle citait. A se demander pourquoi elle était ici, et pourquoi il lui portait assez de confiance pour multiplier les confidences. Elle stoppa là sa réflexion : pas le droit de contester, comme Bérénice l’avait dit. Même il fallait tout de même dire...
Il la saisit par la taille et la fit tournoyer avant qu’elle n’ait pu dévelloper son objection, et ce fut elle qui fut secouée d’un rire aussi franc que bref. Un rire de surprise, qui laissa ses lèvres souriantes et ses yeux pétillants. Il était fou. D’une folie qu’elle ne pouvait qu’adorer.
A travers le miroir, elle se fixa dans ses yeux. Qu’il était agréable de pouvoir les contempler tout en sentant ses bras autour d’elle. Et quels moyens fallait-il déployer pour s’interdire de laisser tomber sa tête contre la sienne… Elle qui n’avait d’abord cherché que la destruction dans ce jeu absurde, la voilà qui craignait de plus en plus de se trahir et que cela y mette fin. Elle le voulait encore un peu pour elle. Rien qu’un peu.
Elle écouta avec attention les informations que Coldris lui livrait. Et, non, elle regrettait, mais l’exception ne tenait pas : il fallait prendre les éléments dans leur ensemble pour les contester. Le défaut qu’elle invoquait n’avait pas été de connaître - et encore moins de respecter - les Saintes Ecritures, mais bien de n’avoir que cette référence et d’en tirer toutes ses phrases sans les comprendre. Cette lubie-là, elle ne la tirait pas d’elle, mais d’Adélaïde de Diéron - l’une des personnes qui, dans sa vie, l’avaient le plus agacées. La cible privilégiée de ses vilains tours, bien qu’ils ne fussent jamais si méchants.
Pour le reste… S’il était fort évident qu’il ne parlait pas de tisane, Eléonore se garda bien d’écouter les interprétations osées que l’affirmation suivante lui inspirait.
— Ce qui se compense sans doute plus aisément qu’un esprit étriqué, fit-elle remarquer.
Restons dans le thème : s’étant habituée à la chaleur de sa présence, la jeune femme eut soudain froid lorsqu’il la lâcha, et ce en dépit de l’épais manteau qu’elle conservait. Il s’éloigna, elle le suivit sans précipitation.
— Je ne vais pas m’en plaindre : si c’était encore le cas, j’aurais dû rentrer avant même que vous ne songiez à m’inviter… Notez, cela vous reviendra peut-être si la vie vous offrait une nouvelle chance… Quelqu’un qui vaille la peine de l’attendre. J’espère que vous trouverez cela un jour.
Elle avait dit cela sans la moindre arrière pensée. Oui, il aurait mérité de retrouver le bonheur. Elle le lui souhaitait d’autant plus maintenant qu’elle avait pris conscience de ce qu’elle ressentait pour lui. Elle aurait été tellement heureuse que quelqu’un puisse l’aimer à sa juste valeur et qu’il puisse le lui rendre. Que cette personne ne l’abandonne jamais, et puisse l’aider à affronter ses fantômes bien mieux qu’elle ne le ferait jamais. Et que cette personne ne soit pas malhonnête avec lui, ni ne complique les relations déjà conflictuelle qu’il avait avec son fils, c’était important. Mais quoi qu’il en soit, elle n’avait pas à interférer dans ses histoires de coeur.
— Il ne me resterait plus qu’à espérer qu’elle ne soit pas excessivement jalouse et me laisse profiter de votre compagnie de temps à autre, ajouta-t-elle avec un sourire mutin en arrivant à sa hauteur.
Et pourtant, elle savait fort bien qu’elle n’aurait pas hésité une seule seconde à s’effacer. A disparaitre. Jamais elle n’aurait pris le risque d’affecter son bonheur. Jamais.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Elle était bien là entre ses bras, et c’était encore mieux de pouvoir contempler cette image d’eux qui avait quelque chose de surnaturel. Sans doute car ce n’était qu’un moment éphémère à plus d’un titre. À peine plus que les fleurs du verger balayées au premier coup de vent et qui laisseraient l’arbre nu. Sa remarque lui étira un sourire amusé. D’ailleurs, Solange aussi devait bien rire de tout cela, là-haut avec Virgil et Aurélia. Elle devait rire de ses taquineries contre sa personne et… De tout le reste. Il se serait déjà fait sermonner plus d’une fois, si elle savait. Il n’en doutait même pas. Il aurait encore eu droit à son célèbre « vous êtes un idiot, Coldris » auquel il aurait invariablement répondu « je sais. » avec un petit sourire en coin. Il préféra mettre fin tout de suite à ses divagations en reprenant sa visite. Bouger lui permettait de rester concentré, focalisé sur le présent.
Il se dirigea vers la porte, évoquant cette attente interminable dont il était autrefois capable pour le simple plaisir du jeu. C’était dans une autre vie. Lorsqu’il avait encore -quoi qu’il en dise- une certaine forme d’innocence. Celle-là même qui avait laissé place à son profond cynisme.
Je ne vais pas m’en plaindre : si c’était encore le cas, j’aurais dû rentrer avant même que vous ne songiez à m’inviter…
Elle ne pouvait pas le voir d’où elle était, mais ses propos l’amusaient, parce qu’au fond elle n’avait pas tort et que c’était aussi pour cette raison qu’il ne pouvait s’empêcher de profiter de sa présence. Soudain, son sang se changea en rivière polaire, son sourire s’évanouit dans les airs, laissant retomber ses commissures. Il se figea dans l’embrasure de la porte.
Quelqu’un qui vaille la peine de l’attendre. J’espère que vous trouverez cela un jour.
N’importe qui d’autre aurait pu lui dire cette phrase que cela n’aurait jamais eu pour effet de le geler littéralement sur place. Parce que si elle disait cela, c’était bien qu’elle ne se considérait pas comme étant cette personne. Et tous ses doutes ressurgirent comme une volée d’étourneaux assombrissant le ciel d’azur. Elle disait cela avec un tel détachement… Il ne savait dire si c’était qu’elle ne tenait pas lui autant que lui-même tenait à elle ou si ce n’était qu’une simple protection ou encore toute autre chose. Il ferma brièvement les paupières. Dans tous les cas, cela voulait bien dire ce que cela voulait dire : il n’était pas question de dire quoi que ce soit. Les choses semblaient limpides entre eux. Aussi limpides que cet éphémère reflet dans lequel il suffisait d’un simple coup pour le faire voler en éclats. Bien. Il inspira. C’était comme cela. Froide et glaciale raison.
Il se retournait pour répondre à son ultime remarque quand il accrocha son regard brun qui brisa d’un coup sec toutes ses résolutions fraichement établies. Une première main se glissa derrière ses reins, quand l’autre cherchait des doigts à entrelacer le temps que ses lèvres ne réclament leur dû avec avidité. Quand il disait qu’il n’avait plus aucune patience, cela se vérifiait parfaitement. Appuyés contre le chambranle de la porte, il quitta le velours carmin de sa bouche. Mais elles ne semblaient guère repues ni de baisers ni de mots qui lui brulaient toujours cette surface qui lui paraissait desséchée. Elles voulaient se mouvoir et parler. Sa raison les maintenait cadenassées. Il la dévorait de son regard azuréen, sans un bruit, de peur d’anéantir son ultime résolution, déjà sans doute trahi par son propre regard brulant.
— C’est impossible. Je ne m’embarrasse pas de femmes jalouses. Quand on m’aime, il faut m’aimer et m’accepter entièrement. Ce n’est pas être enchainé à l’autre que d’aimer déclara-t-il en passant une main le long de son visage. C’est être libre. Et si je donne mon cœur, alors peu importe combien de femmes il y aura dans mon lit, il n’y en aura toujours qu’une dans ma vie.
Et si une chose n’avait jamais changé depuis toute ces années c’était bien cela : sa vision de l’amour. La liberté poussée à l’extrême même.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Qu’avait-elle donc dit de mal, idiote, incapable, méprisable qu’elle était ? Etait-ce… Etait-ce parce qu’il ne pensait pas pouvoir tomber amoureux deux fois ? Pensait-il qu’elle négligeait ce qu’il avait pu ressentir ? Ce n’était pas ce qu’elle avait voulu dire, pas du tout. Elle voulait juste qu’il soit heureux. Etait-ce tout simplement parce qu’encore une fois, elle s’immisçait dans des affaires qui ne la concernaient pas ? Parce qu’elle manquait de respect à celle qu’il aimait ? Ou bien parce qu’elle parlait juste sans savoir… Après tout, peut-être avait-il déjà usé cette deuxième chance aussi… Il ne lui en avait pas parlé, mais maintenant qu’elle y songeait, elle ne voyait pas pourquoi il le lui aurait dit.
Son regard semblait troublé quand il se retourna vers elle. Elle aurait voulu se rattraper, mais elle ne savait pas quoi lui dire. Idiote ! Idiote ! Idiote ! Elle se détestait de lui faire tant de mal… Voilà pourquoi elle n’aurait pas dû revenir. Comment était-il assez aveugle pour ne pas remarquer qu’elle ne faisait que le blesser ?
Elle n’eut pas de temps de parler, ni même de trouver quelque chose à dire qu’il l’emportait dans l’ivresse d’un baiser qu’elle lui rendit avec fougue. Il fallait dire que ce n’était pas trop tôt. En revanche, il y mit fin beaucoup trop vite à son goût. Et tous ses doutes revinrent dès que leurs lèvres se détachèrent.
Elle ne comprenait pas son regard. Il mêlait trop d’opposés et trop de réserves pour qu’elle puisse vraiment le déchiffrer. Quelque chose lui échappait, elle le savait.
Quand il reprit la parole, il lui fallut quelques instants pour raccrocher sa réponse à la question dont elle était issue. Elle crut d’abord que ce qui était impossible, c’était qu’elle le revoie si cela advenait. Elle n’aurait protesté davantage, elle comprenait. Elle était trop envahissante et trop peu intéressante pour que leur relation se poursuive s’il trouvait quelqu’un qui fut vraiment capable de l’apaiser.
Mais non, ce n’était pas cela. Soit. Ce qu’elle ne comprenait pas, c’était qu’il parle ainsi tout en lui caressant le visage. C’était déstabilisant. Même si elle comprenait ce qu’il disait, même si elle était d’accord avec lui, cela la perturbait. Elle craignit un instant qu’il n’ait compris et ne ruse pour qu’elle ne se dévoile mais… Non, c’était absurde. Elle n’avait pas le droit de voir des pièges partout. C’était insultant.
Sa dernière phrase - bien qu’elle la comprenne et l’accepte autant que le reste - eut quelque chose de brutal, de douloureux. Elle était certaine qu’il ne l’avait pas fait exprès - parce qu’il n’était jamais cruel avec elle -, mais il lui rappelait plus qu’abruptement où était sa place. Ou plutôt : où elle ne serait jamais même s’il lui accordait une certaine affection.
Quelque chose en elle criait “je sais”. Elle voulait qu’il cesse de le lui dire. Elle en était consciente, n’était-ce pas suffisant ? Elle résistait à l’impulsion sotte de se jeter à son cou pour le supplier d’arrêter. Elle était trop lâche pour supporter ça. Supporter d’entendre encore et encore combien elle ne servait à rien. Ou bien, lui demander de le dire plus clairement, plus fort. Pour qu’elle parte plus facilement. Tout sauf ce qu’il faisait actuellement, parce que c’était une véritable torture pour son coeur.
Elle sentit ses yeux s’embuer. Non, ça ne pouvait pas recommencer. Elle ne devait plus pleurer. Certes, Coldris était celui qui la consolait le mieux, mais pas pour ça. Il aurait compris. Et puis, elle devait cesser de l’encombrer avec ses maux.
Mais il avait dû percevoir le trouble dans son regard, d’où la nécessité de le justifier :
— C’est amusant... commença-t-elle en s’efforçant de sourire. Sur certains points, vos pensées rejoignent les siennes. (une inspiration) Mais vous êtes naïf : si l’amour n’a pas besoin de chaînes, c’est seulement parce qu’il est déjà seul maître. Et si l’être aimé n’a aucune envie de vous enfermer, c’est seulement parce que son amour est assez vrai pour que quoi qu’il arrive, vous voir heureux compte bien davantage à ses yeux que de vous garder pour lui. Et qu’il vous fait confiance. Infiniment.
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Enfin de compte tant pis pour les résolutions. Pour toutes ces résolutions même qu’il bafouait les unes après les autres depuis quelque temps. Il n’était plus à ça après. Ce n’était qu’entre lui et lui-même, alors s’il en acceptait le prix, cela n’avait au fond que peu d’importance. Et un baiser qu’est-ce que c’était ? Beaucoup et si peu à la fois. Quelques secondes d’ivresse ravis à ses noirs tourments pour avoir le plaisir de sentir son cœur battre et réaliser qu’il était toujours en vie.
A ses yeux sombres qui se mirent à miroiter d’humidité, il se demanda quelle maladresse, il avait bien pu commettre. Il n’avait fait qu’énoncer une simple vérité. Sa vision de l’amour dont il avait compris être parfois si particulière. Mais c’était ainsi, et ce ne serait pas autrement. Il était exclu qu’il ne change maintenant et quand bien même il serait fou amoureux, il ne pourrait jamais s’empêcher de visiter d’autres couches. Il aurait pu lui dire qu’il était désolé, cela aurait été parfaitement faux. Il assumait pleinement qui il était. La seule chose pour laquelle il s’en voulait c’était bien de l’avoir blessée, pourtant en y réfléchissant bien, mieux valait que ce soit maintenant que plus tard, et qu’elle réalise d’elle-même la dure réalité de se qu’impliquer une relation avec lui. Il avait bien conscience que dire qu’il n’était pas facile à vivre n’était qu’un vulgaire euphémisme tant il fallait être prêt à supporter bon nombre de choses. Au fond, c’était bien l’une des raisons -mais guère la plus importante- qui l’entravaient à tout avouer.
Puis elle s’efforça de sourire entre quelques mots. Sur certains points leurs pensées se rejoignaient ? Peut-être la liberté. Sans doute pas le libertinage qui l’accompagnait lorsqu’on la poussait à l’extrême. Il haussa les sourcils, étonné d’être qualifié de naïf, ce n’était pas vraiment quelque chose qu’il avait l’habitude d’entendre le concernant. Au contraire, il avait tué son innocence dans l’œuf et le peu qui avait pu lui rester avait été emporté au large de Lodmé. Il devait admettre qu’il comprenait désormais où elle venait en venir et qu’il se réjouissait de leur point de vue commun, si bien qu’il retrouva son sourire. Cependant…
— Vous vous trompez. Ce n’est pas ce que je pense, je ne faisais qu’énoncer des constatations. Songer à des chaines, c’est déjà les avoir en main. Et vous, Éléonore, me faites-vous confiance ? Infiniment confiance ? questionna-t-il avec un intérêt voilé de malice.
Etait-ce une question piégeuse cette fois-ci ? Hmm sans doute quelque peu, il fallait bien l’admettre, mais comme il ne pouvait s’empêcher malgré tout de vouloir en savoir plus tout en la taquinant, il n’avait pas résisté à ce coup bas.
Il la laissa répondre -ou pas-, puis l’entraina par la main dans le salon qui faisait face. C’était amusant de constater que rien, absolument rien n’avait changé depuis toutes ces années. Il était toujours là, ce canapé où elle s’était trouvée dans sa robe bleu myosotis entourée de sa petite cour de dindes et de coqs. Il se souvenait encore avec délice des mots glissés dans son oreille : « Coldris de Fromart, Mademoiselle Aurélia » et de l’effet qu’ils avaient produit. Sur elle… mais également sur lui. Il avait fait le fait fier, il avait voulu la rendre jalouse en jouant avec les autres petites fleurs présentes, pourtant, il n’avait eu d’yeux que pour elle.
— Puis-je vous offrir à boire ? demanda-t-il en constatant que Léonilde avait fait remplir le dressoir de bon nombre de spiritueux qu’il s’empressait déjà de déboucher pour en humer les effluves.
— Nous avions joué à un innocent jeu ici.
Un jeu qui s’était poursuivi trois ans durant. Une longue partie qui n’aurait jamais fini.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Sa remarque sur les chaines lui fit froncer les sourcils… Où voulait-il en venir ? S’était-elle déjà trop trahie ? Avait-elle laissé croire qu’elle s’imaginait quoi que ce soit ? C’était faux ! Il le savait que c’était faux. Elle ne s’imaginait rien du tout. Et pourtant, sa question laissait entendre qu’il avait un doute.
Qu’y avait-il à répondre à cela ? Bien sûr qu’elle lui aurait fait confiance. Infiniment, éperdument, aveuglément… mais à la seule condition qu’il le veuille. Car une confiance non-voulue était un fardeau si l’on s’efforçait de l’honorer, et une tache si l’on ne s’y résignait pas. Alors non, elle ne voulait pas lui faire confiance - ou du moins lui avouer que c’était le cas -, parce qu’elle ne voulait pas lui imposer cette responsabilité pour le peu qu’elle devait représenter. Trop de choses reposaient déjà sur lui, même s’il l’ignorait.
Son dernier jour. Il était son dernier jour. Et quoi qu’on en dise, voir les choses ainsi avaient quelque chose de rassurant : désormais, il n’y aurait plus de désespoir infernal ; soit elle aurait encore du temps avec lui et serait heureuse malgré tout, soit ce serait fini et elle serait prête. Il fallait que ce soit le cas.
En attendant, il était inconcevable de l’envahir avec les déboires de son coeur, qui ne voulait plus s’en remettre qu’à lui. Elle sourit.
— Je crains qu’il ne soit pas sage pour une femme de vous faire confiance, fit-elle remarquer.
Ses lèvres se pincèrent un moment, et l’aveu s’imposa :
— Mais si je vous ai avoué certaines choses, c’est que je devais vous avoir accordé un peu tout de même.
D’ailleurs, lui-même s’était confié à elle sur certains sujets. Lui-même lui avait accordé une part de cette précieuse confiance sans qu’elle ne sache pourquoi.
C’avait beau être incompréhensible, il lui laissait effectivement une place bien étrange. Etrange, et inconfortable car elle ignorait où en étaient les limites. Parce que tout était trop flou pour qu’elle n’ait pas envie de le serrer dans ses bras, et de lui dire les mots qu’elle devait sans cesse chasser mais qui revenaient toujours sur ses lèvres. Parce qu’il n’était pas du tout dans sa nature de cacher ce qu’elle ressentait. Et qu’elle savait que ce bonheur serait toujours terni par l’absence de réciprocité. Par l’impossibilité de l’exprimer et de le montrer.
Mais la visite se poursuivit dans un autre salon. Elle acquiesça à sa suggestion, marmonna distraitement une approbation toute en regardant la pièce autour d’elle. Elle ramena son regard sur lui quand il commenta.
— Curieusement, j’ai assez de mal à vous associer à quelque chose d’innocent, admit-elle. Qu’était-ce donc ? s’enquit-elle.
Elle ne tenait pas à être indiscrète, mais puisqu’il lui en parlait, elle pouvait lui demander, non ?
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Coldris ne pouvait s’empêcher de sourire en attendant la réponse à sa question. D’une part parce qu’il était fier de sa trouvaille -même si c’était affreusement mal de la mettre dans cette position délicate et qu’en même temps il n’y avait rien de réellement mesquin derrière de sa part- et d’autre part car il adorait saisir son regard troublé qu’il mourait d’envie d’étouffer d’un baiser qui lui dirait « Oubliez, c’était simplement pour le plaisir de vous tourmenter un peu. ». Parce qu’elle pouvait bien le qualifier de naïf, il ne l’était pas assez pour croire qu’elle répondrait « oui évidemment ».
— C’est ce que l’on dit de moi parait-il. constata-t-il toujours aussi mutin.
C’est ce que l’on disait de lui depuis… Depuis que son nom avait commencé à être murmuré dans le Tout-Braktenn. Avant même qu’il ne mette les pieds ici pour la première fois. Il pouvait voir à ses lèvres pincées qu’elle retenait la suite. Alors, il l’encouragea en penchant la tête très légèrement de côté.
— Sans doute. Mais point trop non plus. Vous savez être raisonnable... il marqua une légère pause avant de compléter avec provocation parfois...
Sur ce il l’entraina dans le salon suivant étouffant un petit rire. Lui aussi lui faisait confiance. Assez pour l’inviter ici, dans une demeure qui était bien plus à ses yeux qu’un simple tas de pierres. Assez pour lui raconter ses souvenirs si heureux et ceux qui l’étaient beaucoup moins. Aujourd’hui, il ne serait pas question de ces derniers. Il s’en était fait la promesse silencieuse. Il n’était pas question de laisser le moindre nuage assombrir cette fin de semaine, pas après la pitoyable sortie au théâtre qui avait bien failli leur couter si cher. Il déboucha la carafe de Madère, non sans une pensée amusée pour Alexandre qui n’avait pas manqué de trouver ce vin cuit excellent. Enfin, c’était ce qu’il avait dit. Sa grimace avait eu l’air de dire bien autre chose.
— J’espère que vous l’apprécierez. fit-il en lui tendant son verre le regard toujours à ce souvenir.
A sa remarque suivante, il haussa en revanche les sourcils d’un air faussement vexé et parfaitement étonné. Parlait-on réellement de lui ?
— Vraiment? Je ne vois pas pourquoi pas. rétorqua-t-il ironiquement Je suis pourtant bien sage en votre compagnie !
Et il noya le petit rire qui s’échappait d’une chaleureuse gorgée de vin. À peine eut-il dégluti, qu’il reprit :
— Elle – car c’était son idée et non la mienne, vous noterez tout de même – avait décidé, puisque nous étions six femmes et six hommes de nous attribuer mutuellement le nom d’une divinité. A mon grand damne, elle avait retiré Zeus.
Il en aurait presque vu leurs fantômes respectifs rejouer la scène. Lui, assis nonchalamment sur ce sofa, les bras autour de deux jeunes filles, ses yeux rivés vers la seule qui comptait. Aphrodite.
— Mais elle m’en a gratifié plus tard. Pour ce jeu qui nous intéresse, Elle avait choisi trois dieux grecs et leurs homologues romains. Arès-Mars, Vulcain-Hephaïstos, Apollon-Phoebus et pour les demoiselles : Athéna-Minerve, Aphrodite-Vénus et Eris-Discorde.
Coldris croisa son regard. Il avait déjà en tête le nom qu’il lui aurait donné. Et ce n’était pas Aphrodite, bien qu’elle n’en soit pas moins séduisante en tout point. Différent ne voulait guère dire moins bien. Il était curieux de savoir ce qu’elle aurait choisi, elle.
— Dites-moi donc ma petite luciole, en toute innocence bien sûr, vers lequel de ces Dieux se serait porté votre choix me concernant ? Je vous dirai à mon tour de quel surnom je vous aurais baptisé si nous devions jouer aujourd’hui même à ce jeu.
N’était-ce pas ce qu’ils étaient en train de faire ? Au moins, il n’y avait qu’eux deux et aucun Quentin au regard baveux et au cerveau atrophié pour se perdre dans les gorges de son décolleté. Pas d’idiot non plus à qui devoir réciter l’Odyssée… Il n’y avait qu’eux, et personne d’autre, et c’en était délicieux..
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
— Et je suis certaine que vous méritez allègrement cette réputation.
Mais pour elle, c’était différent. Ce qu’elle retiendrait de lui, ce ne serait pas qu’il était un salaud et qu’il n’avait pas le droit de l’abandonner. Elle n’était pas comme ça. Ce qu’elle retiendrait, c’était qu’il lui avait offert beaucoup plus qu’elle n’en avait espéré de lui, qu’il l’avait rendue heureuse à nouveau, et qu’elle pourrait partir en paix lorsque - pas trop tôt, priait-elle - tout serait terminé.
Et pourtant, malgré sa fourberie, malgré son arrogance, malgré tout ce qu’il pouvait y avoir à lui reprocher en ce monde - ce qui devait certainement former une liste interminable -, il avait eu ses confidences et aurait pu avoir son coeur sur un seul mot. Et même en sachant qui il était, elle savait que le seul tort qu’il y avait eut à lui confier ses tourments était d’avoir nuit à l’ambiance. Si elle ne lui accordait visiblement point trop de confiance non plus, c’était uniquement pour ne point l’en alourdir, car à sa manière, il la méritait.
Il était en revanche un point qu’elle se devait d’éclaircir immédiatemment :
— Je suis toujours capable d’être raisonnable, mon joli phénix ! précisa-t-elle, faisant mine de s’offusquer qu’il en doute. Cela n’implique seulement pas de rester sage.
D’autant que toutes les précautions avaient déjà été prises pour couvrir cette petite escapade. Elle éviterait juste de finir ivre - ce qui ne serait plaisant pour personne. Mais à ce propos, elle ne s’inquiétait pas trop non plus : pour cela, au moins, elle connaissait ses limites, et ce n’était pas le verre qu’il lui proposa une fois dans l’autre pièce qui lui ferait perdre ses repères. Pour le reste… elle n’avait pas besoin de boire pour lancer des jeux idiots - comme danser sur une table et en essayant de faire casser des verres à son hôte.
Elle prit une gorgée, murmurant un remerciement, et n’eut pas le temps de boire que déjà, une énormité prononcée - et même pas par elle - la força à intervenir. Et rien que cette mine vexée suffit à l’amuser.
— Très sage, oui, reprit-elle sur le même ton. Et on n’oserait douter de ce que vous le resterez, bien évidemment.
Mais… s’il le permettait - parce qu’elle ne voulait pas avoir l’air de se mêler de ses affaires - elle aurait tout de même bien voulu savoir ce dont il avait été question lorsqu’il avait son âge - ce qui était étrange à penser, d’ailleurs. Soit, il lui racontait de bon gré, et c’était malgré tout rassurant, quand bien même elle se trouvait toujours un peu intruse. Ne la trouvait-il pas trop envahissante ?
Alors c’était de là que cette histoire de déesse venait ? Peut-être… Ou bien cela n’avait rien à voir, mais c’aurait eu du sens. La seule chose qui n’en avait pas, c’était de réunir autant de monde dans ce salon ! Enfin… Il ne devait y avoir qu’elle pour ne pas s’y retrouver lorsqu’il y avait du monde. Une faiblesse écrasante que même son merveilleux Ariste n’avait pas su complètement chasser. Mais quelle importance, puisque désormais elle n’était plus rien et ne savait plus rien faire ?
Elle prit une gorgée dans son verre, et chercha dans le regard de son phénix - et dans le poids de son pendentif contre son coeur - la force de se détourner de ses tourments et de cesser de se mordiller bêtement la joue.
Elle roula des yeux à ses revendications divines, mais écouta sagement la suite. Puis, elle se pencha, pensive, sur sa proposition toute innocente.
— Choix limité, râla-t-elle d'abord.
Parce que s'il était un dieu grec qui convenait assez à ce qu'il représentait aujourd'hui, c'était Hélios. Mais soit, elle n'avait pas de raison de ne pas se prêter au jeu pour autant. Alors…
— Je ne vous fuis certes pas... - elle tira sur les liens de son pendentif pour le sortir de son manteau avec un regard entendu – ...mais puisqu'il faut choisir, je dirais Apollon.
Et puis, il n'y avait pas que cette histoire de laurier, loin de là. Rangeant son talisman sur le cœur qu'il n'aurait jamais dû quitter, elle porta son verre à ses lèvres, et chercha dans ses iris ce qu'il avait bien pu trouver pour elle.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
S’il méritait sa réputation ? Il eut un sourire. Indubitablement. Il n’aurait jamais eu l’hypocrisie d’affirmer le contraire et les colonnes noircies de noms et de dates au fil des ans en étaient le témoignage. En revanche si l’on devait lui concéder un maigre point, c’était bien qu’il évitait d’ordinaire les femmes non mariées. Preuve était qu’il n’y avait que les imbéciles pour ne pas changer d’avis ou outrepasser leurs propres lois. A la mention de sa raison, il acquiesça la tête avec une certaine ironie.
— Si vous le dites ! Il est parfois bon de céder aux caprices de la folie pour rester sage.
Il aurait pu argumenter que tout dépendait également de la définition que l’on plaçait sous le terme de raisonnable et de raison, mais c’eut été les emmener bien loin dans un débat philosophique qui au fond ne l’intéressait pas plus que cela, car il savait, que quoi qu’elle en dise, elle avait au fond d’elle cette petite étincelle de folie qui le faisait vibrer.
Elle au moins semblait plus apprécier le Madère que son cher Alexandre. En même temps, ce n’était pas bien difficile. Il aurait sans doute subi le même sort que le whisky s’il n’avait pas tant voulu lui plaire. Toutefois, peut-être aurait-elle eu le même réflexe que lui si elle avait commencé à boire au moment où il s’était mis à ironiser.
— Parfaitement sage! renchérit-il sur le même ton pour avoir le dernier mot.
Comment aurait-il pu résister à ce petit regard amusé qu’il sentait pétiller ? Il ne pouvait pas et … il n’aimait pas perdre. C’était comme ça. C’était plus fort que lui. Puis il lui détailla finalement ce qu’était ce petit jeu -qu’il n’avait pas inventé- avant de la faire participer à son tour au choix. Il esquissa un sourire lorsqu’il la surprit en train de rouler des yeux à ses modestes doléances. Aurélia avait précisé l’avoir exclu pour ne pas faire de jaloux, pourtant il fallait bien un roi et rien ne lui serait mieux allé que Zeus. Enfin… il lui pardonnait, car elle avait fini par se rattraper.
— Choix limité
— C’est tout autant la difficulté que le charme de cet amusement voyez-vous.
Puis il lui laissa le temps qu’elle souhaitait pour faire son choix, en profitant pour l’observer durant une gorgée de vin cuit. Il remarqua qu’elle avait tiré son pendentif-talisman hors de son manteau. Simple réflexe ou geste mesuré ? Il ne savait pas trancher malgré les paroles qu’elle déclamait.
Les lauriers. Daphné. Il adorait particulièrement les statues mettant en forme sa métamorphose, certaines d’une saisissante réalité. Un sourire s’étira. Apollon. C’était bien mieux que le choix initial de sa déesse qui l’avait tant vexé sur le coup avant qu’il ne comprenne de quoi il retournait réellement.
— Et pourquoi donc ma téméraire Daphné ?
Il déposa son verre sur l’une des petites tables.
— Me trouvez-vous solaire ? questionna-t-il avec enthousiasme avant de faire un pas vers elle
— Beau comme un dieu ?
Il la contourna pour passer dans son dos, poser une main sur son épaule et se pencher à une oreille.
— Ou serait-ce pour mes vers dont vous n’avez pas encore eu l’occasion de profiter ? puis à l’autre, joueur Peut-être simplement pour mon amour des lettres.
Il déposa un baiser dans son cou avant dans la faire prisonnière de ses bras.
— En verité, vous préférez les oliviers aux lauriers. Vous êtes belle, courageuse et sage à la fois. Votre intelligence n’a d’égale que votre force et votre audace. Et vous soutenez les héros sans faillir. Je ne vois qu’une différence notable avec elle : vous êtes bien plus douce et espiègle qu’elle.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Et Coldris ne l’était pas non plus - ou, du moins, pas au sens dans lequel il l’affirmait désormais. Et d’ailleurs…
— Ce serait bien embêtant ; que ferais-je d’un amant aussi sage ?
Mais elle aimait rester avec lui. Elle aimait l’écouter, même lorsque ses propos lui rappelaient qu’elle n’était pas grand chose, au final. Il la rejetait dans ses plus vives douleurs, plus l’en éloignaient par sa confiance, par son regard, par sa seule existence, aussi, qui rendait la sienne moins pénible. Avec lui, elle se sentait assez libre pour dire ce qui lui passait par la tête, pour s’amuser, et même pour bougonner gentiment. Ce à quoi il eut une réponse fort pertinente qui la fit sourire.
— Deux éléments qui, souvent, vont de pair, commenta-t-elle, presque rêveuse.
Et elle savait qu’en cela aussi, il la comprenait. Même s’ils ne jouaient pas aux mêmes jeux, ne côtoyaient pas les mêmes dangers, et ne savouraient pas les mêmes victoires. Même si elle se sentait ridicule avec ses escapades clandestines, ses murs à escalader, ses jeux de couteaux et même son évasion des geôles tidriennes. Quand bien même eut-elle eu quelques compétences, elle n’était qu’une gamine qui échafaudait des plans par loisir. Rien de plus.
Après quelques secondes, son choix fut fixé. Elle l’annonça tout en montrant son pendentif. Il était évident qu’il comprendrait, et la forme de sa question le lui prouva. Toutefois, elle n’y répondit pas, se contentant d’un regard énigmatique comme il lui en servait tant.
Elle déposa son verre - plus pour ne pas s’en laisser encombrer que par mimétisme - alors qu’il avançait en proposant ses premières hypothèses qui, toutes, étirèrent le sourires de la jeune femme.
Solaire ? Plus qu’il ne l’aurait jamais cru. Beau ? Certes bien plus à ses yeux qu’il n’aurait dû l’être raisonnablement. Il avait une prestance exceptionnelle, des yeux magnifiques, et un sourire… Ah, ce sourire ! Il avait un charme unique, conforté par chaque mot, chaque geste, chaque regard, chaque battement de coeur ; et qui lui faisait tourner la tête bien plus dangereusement que jamais.
Il passa dans son dos. Son souffle était si proche. Elle n’avait certes pas pu évaluer ses compétences poétiques - qu’il lui avait pourtant vantées - , mais sachant combien il était habile avec mots, elle ne s’inquiétait pas trop. Et oui, en effet, il lui avait plus d’une fois montré son goût des belles lettres.
— Sans doute un peu de tout cela, confirma-t-elle.
Elle réprima un frisson lorsque ses lèvres se posèrent dans son cou. A peine l’avait-il déconcentrée qu’il la retenait déjà jalousement dans ses bras, depuis lesquels elle écouta sa réponse. De toute façon, quoi qu’il eut choisi, rien n’aurait pu convenir car elle n’avait rien d’une déesse, que ce fut Athéna ou même n’importe quelle autre. Parce qu’elle n’avait aucune qualité seule. Toutefois, elle devait concéder qu’elle n’était pas faite pour les lauriers.
— Voilà qui ferait plutôt deux différences, rectifia-t-elle.
Elle avait envie de le serrer fort dans ses bras, pour essayer de se convaincre qu’elle pourrait devenir ce qu’il la pensait être. Pour lui, elle le pourrait peut-être, s’il la laissait puiser dans sa force, dans sa confiance… Mais il aurait fallu quelque chose de plus pour que cela fonctionne vraiment. Quelque chose qu’elle n’avait ni le droit, ni les moyens de lui demander. Mais elle devait pouvoir déjà faire un effort.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
La sagesse, ils auraient sans doute pu se chamailler sur cette définition pendant des heures. Rien que pour le plaisir. Et si elle semblait douter de sa sagesse, ce n’était que pour lui plaire un peu plus encore. Ce fut donc avec son habituelle nonchalance et cette pointe de provocation qu’il décréta :
— Sans doute pas grand chose. Être amant, ne nécessite-t-il pas par défaut une certaine folie ?
Ce qui l’emmena à évoquer ce doux équilibre, crucial entre folie et sagesse qui lui rappelait par certains égards les propos d’Érasme. Était-ce judicieux de lancer un débat philosophique ? Sans doute pas. Et il préféra donc passer à la mythologie au travers d’un petit jeu parfaitement innocent.
Elle l’avait baptisé Apollon, mais pour quelles raisons ? Il brulait d’envie de le savoir. Au final, Apollon comme Vulcain avaient quelque chose de flamboyant et chaleureux, chacun à leur façon et d’un certain point de vue. Quand bien même il n’eut droit qu’à une réponse des plus évasives qui ne l’incitait que plus à vouloir percer les mystères de ses pensées, il la gratifia d’un baiser dans son cou, aussi léger qu’une petite luciole le réclamait. Lui en revanche, ne se fit pas prier pour lui dire combien il l’admirait, et s’il avait aimé à la folie son Aphrodite du passé, il n’en aimait pas moins son Athéna du présent. Y compris lorsqu’elle tenait à jour les comptes.
— En effet. avoua-t-il pris en faute avant de repasser devant pour l’embrasser.
— Je vous en devrais donc un autre pour ma méprise. son index se posa sur ses lèvres tandis qu’il ne pouvait réprimer un petit sourire amusé mais un peu plus tard dans la journée. Ne soyez pas si gourmande.
Et Dieu -s’il existait- savait que la gourmandise était le plus charmant de tous les péchés. Ses doigts glissèrent entre les siens puis il l’entraina d’un pas lent vers une autre porte.
— Savez-vous de quel nom elle m’a affublée ?
Il se tourna vers elle dans l’attente d’une réponse, puis comme elle donnait sa langue au taureau, Coldris lui répondit avec la légèreté qu’offrait le recul de la nostalgie.
— Vulcain. Ce forgeron cocu ! Vous noterez qu’elle m’a quand même épargné sa boiterie. Inutile de vous dire que j’en suis resté pour le moins interloqué de ce choix. Il m’a fallu quelques minutes avant de réaliser le pourquoi du comment qui m'a bien amusé il se pencha à son oreille pour lui murmurer, espiègle je vous laisse en trouver la raison.
Il étouffa un petit rire, arrivé devant la porte qu’il ouvrit d’un geste ample.
— L’ironie du sort voulut que mon Aphrodite épousât son Héphaïstos. Et que l’histoire se répétât. Sauf qu’à la fin, Zeus tua le baveux Dieu boiteux qui ne connaissait pas l’Odyssée.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
— Alors restez fou !
Parce que seule, elle ne savait être que morose. Et qu’il avait le don de la ramener à un aspect d’elle-même qu’elle avait cru disparu à jamais. Un aspect qu’elle n’aurait jamais cru être aussi heureuse de retrouver.
Comme ses bras, alors qu’il cherchait à éclaircir son choix. Mais comment aurait-elle pu lui dire toutes ses raisons sans trahir les sentiments importuns qui l’empêchaient de réfléchir ? Quelle nouvelle folie que voilà : elle n’était pas moins perdue que lorsqu’il l’avait trouvée, en fait. Elle l’était juste différemment. Avec moins de souffrances et moins de délires insensés - parce qu’elle les lui dédiait tous.
Elle ne su répondre à son éloge que par une chasse aux erreurs - qui l’empêcha de s’écrouler dans ses bras en pleurant combien il se trompait. Il récompensa généreusement ses lèvres pour la précision apportée.
Elle lui aurait bien fait remarquer qu’elle n’avait pas besoin de dette pour cela, mais il condamna ses lèvres qui se pincèrent en une moue boudeuse tandis qu’il le lui refusait pour l’instant. Ce qui rappela à la jeune femme qu’elle lui devait encore les intérêts de ses tercets…
Elle replia cet index qui la privait toujours de parole, serra sa mains entre les siennes.
— Pourquoi ne le pourais-je pas ? s’enquit-elle alors qu’il entrelaçait leurs doigts. Je n’ai jamais ce que vous reportez à plus tard, lui fit-elle remarquer. Alors je me méfie, maintenant.
Bon, d’accord, elle exagérait - et son ton prouvait qu’elle en était consciente… Mais tout de même, cette fois, elle aimait autant qu’il évite de la mettre dehors en plein milieu du repas. C’était idiot, mais elle avait l’impression que cela avait donné le ton de leurs rencontres suivantes, toujours écourtées, comme si au fond… Comme si au fond, il ne voulait pas vraiment d’elle… Entre cette libération trop facile - bien que préférable ce jour-là -, l’intervention importune d’Alduis, le dérapage - pas celui qu’il aurait fallu - au théâtre, l’arrivée de Jean quand elle était sur le point de changer d’avis… Qu’allait-ce être, aujourd’hui ?
Il était temps de quitter le salon, mais manifestement pas sans une devinette.
— Comment voudriez-vous que je le sache ?!
Il aurait pu insister et qu’elle essaye, mais il répondait déjà. C’était donc que même dans ses anecdotes heureuses, même en parlant de son grand amour, il ne pouvait pas s’empêcher de râler ! Elle sourit. Il était touchant tout de même. Quand aux motifs qui lui avaient fait attribuer un tel nom… Elle ne pouvait pas les définir exactement, mais le chamboulement qu’il provoquait en elle rien qu’en s’approchant laissait à Eléonore quelques pistes de réponse.
— Ce que je remarque, c’est que vous passez votre temps à changer de rôle...
Elle évita évidemment le “ah, donc il était là, lui aussi”, qui n’auraient certainement rien apporté.
— Et que vous avez une drôle de façon d’aller chercher votre manteaux.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Rester fou, c’était nettement plus facile que de devenir sage. Autant dire que cela lui allait complètement. Aussi parfaitement même que de recevoir le titre d’Apollon, celui qu’il avait convoité trois décennies plus tôt à défaut de pouvoir prétendre à celui de Zeus.
En revanche, Athéna, fidèle à sa sagesse, tenait le compte des différences aussi bien que celui des rendez-vous avortés. Il plissa légèrement les paupières. Le pire c’est que c’était vrai. Si l’on exceptait leur diner à Cervigny, rien n’avait fini comme cela aurait dû. Devrait-il se méfier de celui-ci également ? Il réprima un frisson. Se pouvait-il qu’il soit maudit ? Non, c’était idiot. Il n’y avait pas de raison. Et admettre une quelconque malédiction reviendrait à admettre qu’il y avait là-haut un marionnettiste fou et un brin sadique qui appréciait torde le cou de ses jouets tout en riant grassement aux prières qu’on lui adressait. Non, c’était parfaitement ridicule. Pur hasard. Pure Fortune malicieuse qui se jouait de lui, provocante à l’extrême. Aujourd’hui, elle ne pourrait que ployer le genou de soumission, car il ne comptait pas la laisser semer le chaos jusqu’au petit jour. Il en était hors de question. Que pouvait-il se passer excepté que sa luciole ne prenne ses jambes à son cou lorsqu’elle aurait réalisé que toute cette folie n’était rien d’autre qu’un transport passager dont elle se serait bien gardée d’être aveuglée ? Après quelques secondes, il lui répondit finalement :
— Je vous promets de vous le donner avant minuit, ce soir. Il me faut bien quelque assurance de vous garder à mes côtés jusque là, vous comprenez ?
Sourire taquin, il l’emporta jusqu’à la porte. Quelques pas, le temps d’achever en beauté ce petit jeu d’une ultime devinette. Elle ne pouvait pas connaitre la réponse bien entendu, mais elle pouvait toujours faire une proposition. Ce qui excluait d’office Apollon puisqu’il n’aurait en toute logique pas manqué de le dire en cet instant. Tant pis ! Il lui fournit donc la réponse mais la laissa avec ses déductions concernant l’origine de son attribution. Il aimait bien voir ses petites prunelles brunes pleines d’intelligence aussi pensives.
— Ce que je remarque, c’est que vous passez votre temps à changer de rôle...
— C’est que j’aime le théâtre, voyez-vous ! Mais j’aimerais cesser de jouer des tragédies.
Si l’on exceptait sa carrière politique, le reste de sa vie aurait pu faire l’objet de plusieurs tragédies, ou à la limite, pour certaines de tragi-comédie. Et puis, il préférait de loin les écrire que de les expérimenter. Il avait assez donné de sa personne ces dernières années pour avoir envie de se reposer. Pourtant, il fallait croire qu’il les attirait pour que pas plus tard qu’en ce début de mois, il s’y retrouve de nouveau confronter.
— Dites tout de suite que vous me trouver piètre guide ! et il l’invita à passer la première.
Entre les belles étagères de bois sculpté emplies de volumes de cuir de couleurs variées se trouvait une table de lecture massive ainsi que quelques chaises. Sur l’une d’elles, son épaisse cape doublée de fourrure y était déposée, face un ouvrage à la couverture bourgogne ornée d’arabesques et à la tranche dorée. Le regard rivé sur cet ouvrage si spécial, Coldris ne prêta que peu d’attention à la façon dont il se saisit de son manteau, oubliant complètement ce qu’il avait glissé dans sa poche quelques heures plus tôt et qui plana avec une légèreté outrageuse jusqu’aux pieds d’Éléonore. Et comme Dame Fortuna n’avait pas fini de le torturer, elle avait poussé le vice jusqu’à entrouvrir l’œuvre biblique d’Alexandre en plein sur la cambrure provoquante d’Eve, pomme à la main. Il contempla interdit ce qu’il venait de se passer. C’était… C’était… Qu’allait-elle penser de lui désormais ?
— Ce n’est pas ce que vous croyez… marmonna-t-il quasi gêné.
Non, il n’était pas si débauché qu’il se promenait constamment avec des illustrations érotiques dans la poche de son manteau et c’était simplement un pur concours de circonstances et de toute façon c’était un don à sa mère. C’était… Il poussa un discret soupire en contemplant le désastre tandis que l’insaisissable Fortuna se gaussait. Façon de lui rappeler qu’il ne maitrisait que ce qu’elle daignait lui laisser. Et sa répartie ? Envolée avec le courant d’air qui avait fait voleter malicieusement le papier autrefois plié.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
— Craignez-vous encore de me faire fuir ?
Elle lui avait pourtant bien dit qu’il faudrait inventer mieux, cette fois. A moins que ce ne soit simplement lui qui craignait qu’elle l’ait lassé d’ici-là… Mais alors, il n’avait aucune raison de chercher à la retenir.
Il aimait le théâtre, oui… sans le respecter assez pour que l’on puisse suivre les pièces auxquelles on assistait en sa compagnie. Ce qu’il ajouta rappela néanmoins à la jeune femme certaines des paroles qu’il avait prononcées dans sa loge. Des paroles estompées par la manière dont ils s’étaient quittés. Fatigué de se battre. Il l’avait dit comme si… Comme s’il pensait que le prochain coup, quel qu’il soit, allait l’abattre. Eléonore savait ce que c’était, à la différence qu’un seul choc avait suffit à la mettre dans un tel état. Qu’elle n’avait jamais eu aucune force. Il méritait bien plus qu’elle que cette vie décide de lui accorder du répit. Il méritait d’être heureux… et ce même s’il n’avait toujours pas retrouvé le manteau qu’il avait prétendu prendre.
— Non, je n’oserais pas !, s’exclama-t-elle en entrant dans ce qui semblait être la bibliothèque.
Ce qu’elle pouvait être mauvaise langue ! Le voilà, ce fameux manteau, que l’homme attrapa assez négligemment pour qu’une feuille s’en échappe et tombe aux pieds de son invitée. Instinctivement, Eléonore baissa les yeux dessus.
— Eh bien... lâcha-t-elle tandis que son regard passait de Coldris à la l’image, de l’image à Coldris…
Coldris qui semblait étrangement mal à l’aise. Ce n’était pas ce qu’elle croyait ? Elle mordit dans sa joue pour ne pas éclater de rire. Il était bien la dernière personne dont elle aurait cru voir perdre ses moyens pour si peu.
— Vous devriez voir votre tête !
Et même s’il y avait bien pire, c’était beaucoup trop beau pour qu’Eléonore retienne son rire plus longtemps. Elle ramassa le dessin sur lequel elle attarda quelques instants son regard en ignorant cette petite voix qui lui signalait que son attitude était pitoyablement ridicule.
— Vous êtes certains que ce n’est pas ce que je crois ? parvint-elle à articuler malgré sa respiration chaotique. C’en a pourtant tout l’air.
Et ce parce qu’elle n’y voyait que ce que c’était effectivement, sans avoir pensé à extrapoler, et ne voyait pas ce que cela pouvait être d’autre. Elle retourna le papier, sans comprendre ce qui pouvait bien l’avoir gêné...
— Divertissant, releva-t-elle. Sans doute pas de la manière dont c'était projeté, mais ça l'était assurément.
Elle contrôlait déjà mieux son fou rire, sans s’en remettre tout à fait. Elle avait presque honte de ne plus réussir à le contrôler en dépit de ses années d’entrainement. Une part d’elle craignait que Coldris ne la trouve définitivement bien trop gourde pour lui. Peut-être même aurait-elle dû avoir l’air plus… choquée par cette illustration. Faire semblant d’être plus convenable que ce qu’elle n’était mais… le réflexe ne lui en était pas venu. Elle ne pourrait que se détester plus si cela gâchait tout.
Elle fronça soudain les sourcils. Interloquée par les caractères
— Attendez… Mais c'est l’écriture d’Alexandre...
Oui, c’en avait bien l’air, là aussi. Cela aussi, c'était de famille.
Mais sa réaction... Elle n'aurait peut-être pas dû... Elle déposa la feuille sur la table, puis posa ses mains sur les épaules de son merveilleux phénix, lui offrant sa plus belle mine de chien battu.
— Vous ne m’en voulez pas, n’est-ce pas ? demanda-t-elle en accentuant volontairement l’inquiétude dans sa voix.
Il ne fallait pas qu’il se rende compte qu’elle était réellement inquiète, parce qu’il aurait compris… Ce n’était toujours qu’un jeu. Juste un jeu. Il n’allait pas lui reprocher d’avoir ri, n’est-ce pas ? Non, pas lui… Il... Il ne l'aurait pas mal pris, pas vrai ?
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
S’il craignait de la faire fuir ? Seulement si elle envisageait de prendre la poudre d’escampette. Pour le reste, il était plutôt serein sur cette soirée. Comme il l’avait été pour toutes les autres… Toutes celles qui s’étaient si mal terminées. Il ne répondit que d’un sourire énigmatique. Ce genre de réponse qui voulait tout dire et rien à la fois. Peut-être parce qu’au fond de lui c’était vraiment ce qui l’effrayait ce soir. Et cette éventualité semblait toujours planer au-dessus de sa tête comme une épée de Damoclès. La question était… quand ?
Et puisqu’il était incapable de maitriser cette partie, il se concentra sur celle qu’il pouvait maitriser. Enfin c’était ce qu’il pensait avant que ce foutu dessin ne s’envole. Il regrettait presque de l’avoir récupéré. Et pire que le dessin en lui-même -ce dont il se fichait éperdument-, il y avait l’explication de sa présence -parce qu’il se sentait étrangement obligé de se justifier- à fournir. Et ça… Il ne pouvait décemment pas avouer que c’était une farce d’Alexandre à son père qu’il venait tout juste d’aller visiter en prison. Il n’était pas assez idiot pour en finir aussi vite. Il ne voulait pas non plus lui laisser croire qu’il se promenait avec ce genre de dessin constamment ou qu’elle pense qu’il y avait une raison particulière à sa présence dans son manteau compte tenu de son esprit retors, or l’on savait que les esprits des femmes pouvaient être fertiles lorsqu’il s’agissait de générer des malentendus qui n’avaient pas lieu d’être.
Il croisa son regard brillant de larmes et les vibrations de ses lèvres trahissaient son rire imminent.
— Vous devriez voir votre tête !
Non, vraiment il n’en avait pas envie. Ce devait être excessivement ridicule de le voir ainsi mal à l’aise pour une illustration, lui qu’en avait toute une collection nettement plus osée encore dans les étagères supérieures de sa bibliothèque. Et voilà qu’elle se mit à rire. Il passa une main sur son visage. Il ne s’était certainement jamais senti aussi idiot de toute sa vie. Même se faire surprendre par Alexandre en train de faire la fête à une paroissienne de son père pour un simple défi n’était strictement rien à côté. Elle ramassa la feuille. Il soupira, inclinant les sourcils de dépit. Elle était toujours secouée de spasmes et à vrai dire, cela lui étirait un sourire en coin. Il en soufflait même un léger rire, parce qu’elle n’en était que plus désirable et admirable de ne pas s’offusquer et mieux encore d’en rire. Son propre regard se mit à briller. Avait-elle conscience qu’il ne l’en aimait désormais que plus encore ?
—Ce que je voulais dire, c’est que je n’ai pas pour habitude de glisser ce genre de dessin dans mes poches et que sa présence n’est que le fruit du hasard, car…
Elle retourna la feuille et découvrit le mot de son apprenti, interloquée. Cette fois-ci, ce fut à son tour de rire sans préavis et sans retenue ;
— Oui c’était une plaisanterie d’Alexandre. Quand je l’ai trouvé dans mes affaires, je l’ai mise dans mon manteau. Voyez-vous c’est une offrande.
Elle déposa finalement l’illustration sur la table et se tourna vers lui, mains sur les épaules pour s’enquérir de son avis.
— Si. Terriblement. répondit-il avec un sourire qui disait l’exacte contraire Vous n’avez plus qu’à vous faire pardonner, désormais. Je ne vous félicite pas. Dire que vous me devez déjà des intérêts !
Il récupéra l’œuvre d’art et posa enfin son regard d’expert dessus. Son index glissa le long de la cambrure irrésistible d’Eve, mais c’était à d’autres courbes qu’il songeait. A celle-là même qu’il rêvait de parcourir, à cette peau qu’il voulait couvrir de baisers pour abreuver ses lèvres qui ne cessaient de le réclamer. À contrecœur, il fit un effort pour se contenir. Parce qu’il ne voulait rien précipiter… Pour elle.
— Il a quand même du talent, vous ne trouvez pas ? Je suis sûr qu’elle aurait apprécié, dommage qu’elle ne soit plus là. Enfin, cela ne m’empêchera pas de lui glisser dans son livre favori. répondit-il taquin Mais… Il n’est pas dans cette bibliothèque-ci. Il y en a une autre. Plus… personnelle. fit-il dans un regard espiègle.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
— Vous n’avez pas de comptes à me rendre, lui rappela-t-elle quand il plaida le hasard.
Elle voulait bien le croire - parce qu’il n’avait aucune raison de mentir - mais il n’avait pas besoin de justifier le contenu de ses poches. Les douanes, après tout, c’était son affaire à lui. Elle n’avait pas à lui poser de questions. Même quand il avait vidé cette maudite fiole de laudanum, elle n’aurait pas dû l’interroger car cela ne la concernait pas… Mais elle avait été si inquiète pour lui... Il devait comprendre...
Elle reconnut l’écriture d’Alexandre au dos du dessin. Il en rit. Et même si le voir gêné avait eu quelque chose de mémorable, elle préférait de loin l’entendre rire.
— Quelle offrande ne vaudrait pas un tel spectable ? s’amusa-t-elle encore alors les spasmes la reprenaient.
Une part d’elle s’en voulait un peu d’être moqueuse… Mais elle ne l’était pas méchamment. Jamais pour blesser. D’ailleurs, lui aussi en aurait ri s’il s’était vu. Eléonore en était persuadée, même si une part d’elle ne pourrait s’empêcher de craindre qu’il lui en veuille.
Elle dut retenir un soupir de soulagement quand il la rassura. Il ne devait pas savoir qu’elle s’était réellement inquiétée, il la trouverait encore plus ridicule.
Elle conserva une mine repentante tandis qu’il dressait sa liste de doléances. Repentante qui se mordait la joue pour ne pas éclater de rire. Puis elle lui vola un baiser fugace parce qu’elle trouvait que c’était une bonne manière d’ouvrir les négociations.
— Hmmm mais comment répare-t-on un tel affront ? Et pour vos intérêts... - ses mains glissèrent sur son torse de son implacable créancier et se rejoignirent dans son dos -je vais avoir du mal à vous les rembourser si je ne peux savoir ce dont il s’agit...
Ce fourbe devait faire exprès de la maintenir dans l’ignorance afin de l’empêcher de payer et de pouvoir les augmenter. N’était-ce pas odieux d’abuser ainsi de la naïveté qui l’avait laissée contracter de telles dettes ? Ces hommes n’avaient vraiment aucune morale ! Mais il verrait : sa vengeance serait terrible.
Elle le libéra, et il en profita pour récupérer le dessin abandonné sur la table. Dessin fort réussi, d’ailleurs. Eléonore acquiesça. Oui, Alexandre était doué.
— Ou il sera tout à fait à sa place, je suppose.
Coldris pouvait bien faire ce qu’il voulait de cette feuille, ce n’était pas son problème. Et sa mère spirituelle pouvait bien avoir eu la bibliothèque qu’elle voulait avec le contenu qu’elle y voulait, elle n’avait rien à y redire non plus.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Bien sûr qu’il n’avait pas de compte à lui rendre ! Mais si elle l’avait connu mieux que cela, elle aurait su qu’il y avait une exception qui confirmait la règle générale : les rares personnes à qui il tenait vraiment, celles que l’on aurait pu compter sur les doigts d’une main amputée, elles, avaient le droit à certains comptes.
— En effet. trancha-t-il, préférant la laisser dans l’ignorance de son importance.
De toute façon, sa gêne s’évapora aussi vite qu’elle était arrivée et il en fut bientôt à rire en sa compagnie, lorsqu’elle découvrit l’artiste qui avait dessiné cette œuvre licencieuse destinée à sa chère mère. Et Éléonore en rajoutait une couche au sujet de son malaise. Bon joueur, il esquissa un petit sourire en guise de réponse à ses moqueries. Il aurait pu s’offusquer mais qui s’offusquerait de la voir rire ainsi déversant une poignée d’étoiles filantes à chaque nouveau spasme ? Ses taquineries pouvaient bien piquer sa célèbre et imposante fierté, cela ne pouvait égaler la joie contagieuse qu’elle dégageait en cet instant.
Inquiétude jouée ou réelle, elle s’enquit tout de même de sa rancune. Terrible et effroyable rancune qu’il comptait bien utiliser pour réclamer quelques avantages que ce soit, car après tout cela faisait partie du jeu et il fallait en utiliser toutes les cartes. Et les baisers volés qui mettaient en appétit étaient une carte comme une autre. Tout comme ses mains qui glissaient contre le velours de son pourpoint ou encore ce regard pétillant dont il ne parvenait plus à se détacher. Quant au montant, son sourire malicieux en disait long sur ce qu’il s’apprêtait à lui dire lorsqu’il se pencha à son oreille.
— Je vous l’apprendrai ce soir, si vous n’avez pas fui d’ici là. et ses lèvres quittèrent son oreille pour se déposer avec légèreté dans son cou.
Il se recula et contempla sa réaction, partagé entre l’envie irrépressible de faire coucher le soleil dans la seconde et l’espièglerie langoureuse qui l’habitait. Ah ! Pourquoi tout n’était pas aussi simple qu’au théâtre ? Changement de décor et le tour était joué. En attendant, bien que rasant, le soleil était toujours atrocement présent et semblait même s’accrocher au ciel avec férocité pour ne pas disparaitre trop tôt. Entre-temps, il avait récupéré le dessin, drapé son manteau -pour être sûr de ne pas l’oublier- et se dirigea vers l’une des extrémités de la pièce. Il y avait là une statue qu’il avait toujours connue. Celle d’une Aphrodite mi-dénudée assise lascivement et d’un homme face à elle, bras tendus. Arès. Enfin, il avait s’agit d’Arès (et Dieu sait qu’il s’en était plaint allègrement). Jusqu’à ce qu’il ne découvre un beau jour pas si lointain, un Vulcain tout aussi séduisant que le Dieu de la Guerre. Depuis, il n’avait cessé de l’implorer de la remplacer par Éros et Psyché -par pur esprit de contradiction-. Il contempla la statue, amusé. De là où l’on se trouvait, on aurait pu croire que le forgeron la suppliait, mais cela, c’était pour les non-initiés. Coldris empoigna les épaules du Dieu et le bascula en avant, de sorte que ses bras se trouvaient désormais autour de ses flancs et que sa tête embrassait sa gorge. La bibliothèque cliqueta puis gronda alors qu’un pan s’entrouvrait pour laisser le passage vers une porte close.
— Prenez de quoi éclairer et suivez-moi.
Il extirpa de son veston une petite clé dorée. L’unique clé. Et l’engagea dans la serrure, déverrouillant la porte. Derrière se trouvait une nouvelle salle d’une taille nettement plus modeste mais tout aussi fournie. Il prit la bougie des mains d’Éléonore et alluma un petit chandelier, baignant la pièce dans un jeu d’ombres et de lumières dansantes.
— C’est ici que se trouvent ses livres les plus précieux.
Chandelier dans une main, il parcourut les ouvrages aux titres pour le moins évocateurs de leur contenu. Il y avait là les fameuses Lettres djerdannes.
— Il y a certains de mes présents ici. Celui-ci par exemple.
L’autre partie du présent avait été bu depuis bien longtemps déjà. Mais de tous, celui qu’il avait pris le plus de plaisir à lui offrir était une bouteille de whisky de son petit neveu, « confisquée » lors de leurs retrouvailles. Il se souvenait encore de ce qu’il lui avait dit ce jour-là en lui servant un verre.
Il s’arrêta finalement sur une version très monbrinienne de Gargantua et la sortie des rayonnages pour y glisser religieusement le dessin d’Alexandre.
— J’avais beau l’adorer, je lui en ai affreusement voulu de ma souffrance pour l’avoir naïvement cru quand elle disait que toutes les histoires d’amour ne finissaient pas mal alors que l’expérience me forçait à admettre le contraire comme une évidence.
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Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Oh, et puis, puisque les détails ennuyeux étaient réglés, pourquoi y aurait-il forcément eu besoin d’attendre le soir ? Certes, la nuit tombait vite, mais tout de même… D’autant que ses gestes n’étaient pas pour l’aider à patienter !
— Ce soir, ne serait-ce pas prendre le risque de mélanger les comptes ? s’inquiéta-t-elle.
Pour le reste… Non, bien sûr qu’elle ne fuirait pas. Elle ne risquait rien avec lui. Ce qu’elle craignait le plus, c’était bien de perdre toute l’estime - assurément non-méritée - qu’il semblait lui porter lorsqu’il saurait le peu de maitrise qu’elle avait de son coeur.
Mais voilà que la nouvelle priorité était de ranger les dessin d’Alexandre. Eléonore suivit ses manoeuvres, intriguée. Mais elle avait l’habitude de trouver des mécanismes partout et n’en fut pas démesurément surprise, quoi que l’esthétique en fut plutôt osée.
Elle retourna vers la table pour saisir un bougeoir. Quand elle s’aventurait dans les passages secrets de Tianidre, c’était toujours à l’aveugle, mais il était vrai que dans une bibliothèque, la lumière se justifiait aisément.
Elle acquiesça distraitement à ses précisions. Précieux, précieux… et qui faisaient surtout mauvais genre laissés à la vue des invités. Elle ne put s’empêcher de jeter un oeil aux titres. Elle devait en connaître un petit tier, pas plus. Et pour chacun d’eux, plus intéressant que le contenu avait été les trésors de ruse qu’il avait fallu pour se les procurer et s’en débarrasser. Elle jeta un oeil vers le livre qu’il désignait, sans se sentir obligée de préciser qu’elle le reconnaissait. Parce que ce n’était pas important. Elle continuait de parcourir les étagères du regard, repérant le souvenirs de quelques grandes frayeurs. Et d’une très mauvaise plaisanterie qu’elle ne pardonnerait jamais à Gabriel - enfin, qui la faisait toujours marmonner dès qu’on l’évoquait, même si maintenant elle en riait assez.
Elle fut ramenée au présent par ce qu’il affirmait. Non, pourquoi était-il si pessimiste ? Non, il ne devait pas… Elle voulait qu’il y croie. S’il n’y croyait pas, il n’avait aucune chance. Elle voulait qu’il puisse encore être heureux.
— Coldris... Elle prit une profonde inspiration. Elle avait raison. Et puis… Ne me dites pas que si c’était à refaire, vous y renonceriez, si ? C'est certes différent, mais j’ai beau avoir horriblement mal, jamais je n'aurais voulu revenir sur ce que j'ai vécu. C’en valait la peine. Si demain, vous avez une chance de bonheur, saisissez-la, c’est tout. Le contraire serait idiot. Un léger rire lui échappa. Et si cela tourne mal, je veux même bien que vous rejetiez la faute sur mes mauvais conseils.
Evidemment, ce ne serait pas près d’elle qu’il se consolerait. Elle ne servait fichtrement à rien. Mais elle voulait vraiment qu’il soit heureux. C’était idiot, et il ne trouverait probablement jamais quelqu’un qui le mérite vraiment… Mais elle continuerait de l’espérer. Et en attendant, tant qu’il voudrait d’elle, elle resterait.
Re: [17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]
Devait-il prendre cela comme une invitation ? Il aurait sans doute pu et elle ne lui en aurait pas tenu rigueur. C’eut été sans doute plus simple et il ne se gêna pas pour la rassurer sur ce point purement comptable qui la taraudait.
—Ne vous en faites pas, je vous ferai un prix d’ami.
Mais pour cela, elle devrait encore patienter quelques heures -et lui aussi par extension-. Il n’y avait donc guère d’autre choix que de prendre son mal en patience en s’évertuant à lui faire visiter la demeure, dont cette fameuse bibliothèque secrète puisqu’il devait y déposer l’œuvre d’Alexandre en guise d’offrande à l’esprit protecteur des lieux. Il lui désigna quelques livres dont un en particulier, mais sans se retourner, toujours concentré sur la recherche du fameux livre. Dommage. Après quelques tranches parcourues supplémentaires, il réalisa qu’il aurait été curieux de voir sa réaction. Une prochaine fois peut-être.
Il glissa finalement l’œuvre pliée derrière la première de couverture avant de le remettre à sa place non sans avouer les paroles acerbes dont il avait fait preuve. A son prénom, il se retourna. Que ferait-il si c’était à refaire ? La lueur dansante de la bougie projetait de sombres ombres sur leurs deux visages. Parmi ce clair-obscur, deux petites billes aqueuses brillaient, écrasées par deux sourcils sévères. Lui non plus ne voulait pas revenir sur ce qu’il avait vécu. Thierry lui avait dit la même chose, mais le chat échaudé craignait l’eau froide. Alors l’eau chaude… Qu’aurait-elle dit si elle avait su qu’elle était cette chance en question ? S’il devait la saisir… Il lui prit la bougie des mains et la déposa sur le rebord de la bibliothèque avant de la serrer dans ses bras quelques secondes puis de la relâcher.
—Je ne regrette rien, ce sont les plus belles années de ma vie, c’est pour cela que je vous en parle et uniquement pour cela. Tout le reste n’a que peu d’importance. Et si c’était à refaire, je les tuerais tous un par un, jusqu’au dernier. Vous pouvez trouver cela cruel, pourtant je n’aurais aucune hésitation à le faire. Mais…
Ses mots se suspendirent un instant alors qu’il cherchait au fond de ses prunelles d’obsidienne le courage de poursuivre. Il inspira puis soupira longuement.
—La première fois qu’on m’a arraché le cœur je n’avais que dix ans. Et toutes ces années j’ai eu l’orgueil de croire que je n’avais plus de cœur. Et puis je l’ai rencontré et l’impensable s’est produit. Ce n’était pas un ciel d’azur constant, il a connu son lot d’averses et d’orages. Et… l’été de mes vingt-quatre ans…
Il ne trouvait plus les mots pour continuer, mais cela n’avait que peu d’importance, elle savait pertinemment ce qu’il s’était passé cet été de l’an 1569.
—Je pourrais sans doute saisir cette nouvelle chance et certains disent même que je le devrais. Vous n’avez qu’à le garder mon cœur, si vous le souhaitez. Vous ne risquez rien, s’il se brise, je ne serai plus là pour vous maudire.
Il esquissa un sourire. Il le lui donnait volontiers. Si elle l’acceptait. Il ne l’aurait pas donné à grand monde, mais il était sûr qu’elle en prendrait soin, plus que lui-même tout cas.
— Venez sortons de là, puisque j’ai récupéré mon manteau.
Pourtant, avant de visiter les jardins, il lui restait une dernière chose à faire dans cette bibliothèque. Arrivé devant la table, il passa dans son dos et lui masqua les yeux.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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