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[17-18 janvier 1598] - La charmante obligation de fin de semaine [Terminé]

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Message par Éléonore de Fromart Mar 27 Avr - 12:11

Un prix d’ami ? C’était tout ce qu’il trouvait à dire ? Bon, tant pis… Elle chassa ce que cette retenue avait de préoccupant. L’heure était au rangement, et d’après ce qu’elle voyait dans la réserve, l’illustration d’Alexandre y avait tout à fait sa place.

Eléonore ne put s’empêcher de le reprendre ensuite. Peut-être parlait-elle juste à tort et à travers, dans les élans d’une arrogante jeunesse persuadée de tout savoir… Mais pourtant, cela, elle en était sûre. Si ces derniers mois avaient été un véritable cauchemar, elle n’aurait jamais envisagé d’avoir vécu sans son tout. Sa vie aurait été vide dès le départ s’il avait manqué. Qu’aurait-elle été sans lui ? Sans doute pas grand chose. Bref : pour rien au monde elle n’y aurait renoncé.

Cette brève étreinte la rassura. Il… Il ne lui en voulait pas de dire n’importe quoi. Et elle avait raison : malgré toute la souffrance que sa perte lui avait causée, il n’aurait pas voulu renoncer à son grand amour. Les plus belles années de sa vie. Ce qu’elle ne concevait pas, c’était qu’il ait pu supporter les autres.

— C’est pour cela que je vous en parle et uniquement pour cela.

Oui, pour quoi d’autre ? Ce qui lui échappait, c’était seulement qu’il lui confie ses meilleurs souvenirs. Pourquoi à elle ?

— Tout le reste n’a que peu d’importance.

Cela, elle ne risquait pas de l’oublier… Tout le reste.

— Et si c’était à refaire, je les tuerais tous un par un, jusqu’au dernier.

Elle frémit légèrement. Ce n’était certainement pas ce qu’elle avait cherché à lui faire dire. N’était-ce pas un peu… Expéditif ? S’il avait eu cette opportunité, celle de tout recommencer, il aurait pu éviter d’autres pièges. Bien sûr, elle ne savait pas grand chose de ce qu’il s’était passé mais… Mais il devait bien y avoir une autre solution qui n’implique pas de tuer à tour de bras…

Mais qu’aurait-elle fait, elle, pour protéger son Ariste ? N’importe quoi. Absolument n’importe quoi. Même sacrifier sa conscience si c’avait été vraiment nécessaire… Alors pour Coldris, qui n’était déjà pas tellement entravé sur ce point… Non, elle comprenait.

— Vous pouvez trouver ça cruel, pourtant, je n’aurais aucune hésitation à le faire.

Elle secoua doucement la tête. Elle comprenait. De toute façon, elle n’avait pas à interférer avec sa vie et son opinion n’avait pas la moindre importance.

— Mais...

Mais ?

Elle n’osait plus quitter ses yeux. Puisqu’il voulait lui faire confiance, elle ferait tout pour s’en montrer digne. Elle était là, prête à l’écouter. Ecouter seulement ce qu’il avait besoin de dire, et ne pas poser de questions indiscrètes.

Ne pas lui demander qui il avait pu perdre quand il avait dix ans. A cet âge-là, il était peu probable qu’il s’agisse d’un amour comme celui dont ils parlaient à l’instant. Ce qui ne voulait certainement pas dire que cela ne blessait pas, et cela, elle le savait très bien.

Mais il avait pu être heureux de nouveau, et c’était important. Trop brièvement, c’était injuste. Vingt-quatre ans… S’il avait mis les pieds ici pour la première fois à vingt-et-un… Elle ignorait toujours comment il l’avait perdue et n’avait pas besoin de le savoir. Peut-être un jour lui en dirait-il davantage, mais pour l’heure, elle se contenta d’acquiescer et de lui prendre les mains. Elle était là. Elle ne lui en voudrait pas s’il craquait. Tant pis pour les comptes, elle voulait juste être là pour lui. Être là toutes les fois où il aurait besoin d’elle.

Elle cilla. Alors il y avait… quelqu’un. Quelque chose brûla dans sa poitrine et dans sa gorge. Il y avait quelqu’un. Quelqu’un dont il avait fatalement déjà parlé avec les “certaines personnes” qui avaient dû lui conseiller de saisir sa chance, mais à elle, il n’avait rien dit. Elle se sentit un instant très mal à l’idée que lorsque cette affaire serait réglée, il n’aurait certainement plus besoin de la voir. Ou du moins, il n’aurait plus besoin de se conduire si étrangement avec elle. Ou… Ou elle ne savait pas, mais elle aurait plutôt dû se réjouir pour lui. Et s’il ne lui en avait pas parlé, c’était sans doute simplement parce qu’elle n’avait pas besoin de le savoir. Après tout, il ne lui devait rien.

Mais honnêtement, il était idiot : pourquoi perdait-il son temps ici s’il y avait quelqu’un qu’il aimait et avec qui il avait une chance ? Elle ne comprenait décidément plus rien. Et son affirmation suivante ne fit que l’embrouiller davantage. Pourquoi aurait-elle dû garder… Mais… Il disait n’importe quoi. Une part d’elle était touchée qu’il semble encore lui faire confiance, mais pourquoi devait-elle le garder, elle ? Pour l’empêcher de prendre des risques ? Non, c’était trop dommage. Et puis, ce n’était qu’une image. Si cette personne ne l’aimait pas, il ne serait pas moins blessé pour avoir dit ça… Et… Non, elle n’aimait pas du tout ce qu’il insinuait. Elle aurait préféré qu’il puisse rejeter toute la faute sur elle et que ça puisse l’aider… N’avait-il pas dit qu’elle l’aidait à éloigner ses ténèbres ? Alors ne pouvait-elle vraiment rien faire pour lui si cela n’allait pas ?

Non, probablement pas. Quelle idiote, elle se donnait trop d’importance. Comme si elle avait réellement pu l’apaiser, c’était ridicule ! Elle ne parvint même pas à s’empêcher de froncer les sourcils d’incompréhension. Sur quoi il proposa de sortir. Elle n’était vraiment pas à la hauteur. Mais puisqu’elle avait échoué à l’aider, il fallait qu’elle soit au moins là pour lui changer les idées. Ne pas comprendre, c’était une chose, mais il était hors de question de lui faire une nouvelle crise de larmes.

De retour près de la table, il disparut derrière elle. Et ensuite, la bibliothèque disparut derrière ses mains. Pensait-il vraiment avoir besoin de cela pour l’aveugler ?

— C’est curieux : j’aurais juré qu’à l’instant, cette pièce était éclairée.

Alors, elle ne savait vraiment faire que ça ? Dire toutes les sottises qui lui venaient à l’esprit à défaut d’avoir une conversation intéressante. Mais puisqu’on lui demandait de fermer les yeux, elle s’exécuta. Et elle n’aurait sans doute pas dû le confirmer si vite, parce que naturellement, il retira ses mains.

Qu’avait-il encore bien pu inventer ?
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Message par Coldris de Fromart Mer 28 Avr - 22:10


Elle ne fut pas effrayée par ses propos et quelque part il en fut soulagé.  En réalité, elle semblait même comprendre ce qu’il tentait de lui expliquer. Les tuer tous, un par un. Pour ne plus avoir à fuir quoi que ce soit. Si seulement, il suffisait de tout recommencer. Il en avait conscience, tout avait basculé à partir de ce moment et sa vie aurait été bien différente alors. Toutefois la question ne se posait pas vraiment puisqu’il était impossible de revenir en arrière.

Il avait perdu son cœur à deux reprises. Deux fois de trop. S’il avait surmonté la première sans trop de difficulté malgré tout en transformant l’énergie du désespoir en féroce ambition, la seconde avait bien failli l’emporter. Il lui avait fallu plus d’années pour panser les plaies qu’il n’en décomptait d’heureuses. Et de loin. De très loin.

Depuis il avait réussi à rassembler les morceaux comme il avait pu, mais le prochain choc lui serait fatal, il le savait. Pourtant Thierry avait sans doute raison, quitte à mourir, autant mourir heureux. Alors si elle voulait le prendre, elle pouvait. Il le lui offrait bien volontiers. Il l’observait tandis qu’il lui avouait à demi-mots qu’il l’aimait, mais tout ce qu’il discernait dans le fond de ses prunelles d’obsidiennes c’était un million de petits papillons d’interrogation. Il réprima un soupire et l’entraina vers la sortie.

Au fond ça n’avait pas d’importance. Il pouvait bien lui offrir et ne rien lui dire si cela la mettait si mal à l’aise. Elle devait sans doute s’imaginer qu’il ne faisait toujours que jouer tandis qu’il était pourtant on ne peut plus sérieux. Et le pire dans tout cela, c’est que dans d’autres circonstances, elle n’aurait pas eu tort.

Arrivé à proximité de la table, il lui couvrit les yeux avec malice.

—La nuit tombe vite, ma luciole, vous voyez. rétorqua-t-il moqueur Gardez les yeux fermés. Et ne vous avisez pas de tricher !

Il retira ses mains et récupéra l’ouvrage sur la table. Alexandre avait réellement trouvé une belle édition. Il y avait même quelques illustrations à l’intérieur. Des illustrations… Celle offerte à Thierry se rappela soudainement à lui et il feuilleta rapidement le livre avant de le retourner par acquit de conscience. Rien. Ses épaules s’abaissèrent de soulagement. Il n’aurait plus manqué qu’une version adaptée de Roméo et Juliette se soit invitée entre les pages. D’une main, il attrapa les siennes et déposa son présent. Il embrassa furtivement ses lèvres -parce qu’il avait quand même envie d’en profiter un peu-  et l’invita à ouvrir les yeux.

—Puisque vous ne cessez de vous plaindre de l’effroyable distraction que je représente au théâtre et de mon aptitude innée à interrompre les pièces de manière théâtrale, j’ai songé que vous apprécierez d’en faire la lecture au calme, loin de mes commentaires permanents.

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Message par Éléonore de Fromart Jeu 29 Avr - 18:08

— Tricher ?! Moi ?! Mais quand m’avez-vous vu tricher ?! s’offusqua Eléonore.

Ce n’était pas drôle de ne pas pouvoir regarder. En plus, il n’avait pas l’air pressé d’y remédier ! Il glissa dans ses mains un objet facilement identifiable avant de la dédommager - elle préférait le voir ainsi - pour cette attente aveugle.

Lorsque la vue lui fut rendue, elle s’enquit d’abord de son phénix, qui semblait être passé outre la profonde inutilité dont elle avait fait preuve. Elle sourit, puis baissa les yeux sur le livre tandis qu’il en justifiait la présence.

— Mais je ne me plaignais pas ! protesta-t-elle.

Elle ne savait certes faire que cela, mais à ce sujet, ses remarques se rapprochaient plus de taquineries que de lamentations. Rien que des prétextes… Quant à la façon dont tout cela s’était achevé, elle ne lui en reprochait rien et espérait qu’il le savait.

Même si elle rêvait de passer une représentation entière blottie dans ses bras - en se plaignant de ne pouvoir rien suivre, mais seulement pour le principe -, Eléonore avait de toute façon eu l’intention de lire cette fichue pièce. Elle n’avait juste pas encore eu le temps d’y penser.

— Merci, répondit-elle, enthousiaste. Elle aurait bien voulu l’embrasser mais… il s’était déjà servi, tant pis ! Toutefois, un détail la chiffonait : Vous… Vous l’avez déjà terminé ?

Il n’aurait pas fallu trop tarder à lui rendre s’il n’avait pas encore eu l’occasion de le lire. Et en neuf mois sans pratique, elle n’était plus certaine de son aisance de lecture en anglais - même sans le feuilleter, cela lui aurait semblé évident qu’il fut dans sa langue d’origine.

Comme il confirmait, elle se demanda tout de même si cela n’avait pas été difficile pour lui… Mais elle s’inquiétait pour rien : il était fort, son phénix, et si le texte voulait le perdre, il ne l’aurait pas laissé gagner.  

— J’essayerai tout de même de ne pas trop tarder à vous le rendre, promit-elle.

Et elle en prendrait soin, bien entendu ! C’était une évidence. Elle se serait détestée d’abîmer un objet qu’on lui aurait confié.
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Message par Coldris de Fromart Sam 1 Mai - 17:09

 

Elle n’était sans doute pas du genre à tricher outre mesure, mais la curiosité était un irrésistible défaut dont il fallait parfois se prémunir. Et puis, il fallait admettre qu’il aimait malgré tout jouir de la position de force dans laquelle il se trouvait tout comme il était plaisant de laisser ses pensées s’emballer en se demandant ce qu’il avait bien pu inventer de nouveau. Rien de bien méchant qu’elle se rassure. C’était même tout à fait conventionnel. Un simple livre. Certes un livre magnifique, agrémenté de quelques gravures et… sur l’une des dernières pages vierges, d’un sonnet. Il regrettait déjà de l’avoir écrit, mais c’était trop tard. Avec le recul, il ne le trouvait plus si bien que cela et il aurait changé plusieurs choses. Le pire n’était pas là. Le pire… c’était qu’elle comprendrait et il doutait à nouveau du bien-fondé de cette initiative.

— Parfait en ce cas. Puisque je vous rappelle que vous devez encore me supporter pendant une tragédie grecque. rétorqua-t-il alors qu’elle découvrait l’ouvrage.

Il l’avait lu la veille au soir quand Alexandre le lui avait apporté. Il voulait savoir la fin dont il avait été privé. Lire avait quelque chose de moins pénibles. Surtout en anglais qui était la langue qu’il maîtrisait le moins bien d’entre toutes. Il hésitait entre bêtise et soulagement. Bêtise de ce malentendu qui avait causé la mort de Roméo puis celle définitive de Juliette. Et soulagement car aucun des deux n’avait eu à vivre sans l’autre aspiré par un vide dévorant qui engloutissant chaque fragment de bonheur. Il y retrouvait quelques similitudes avec la tragédie romantique qu’il avait lui-même écrite. À la fin, lui aussi sautait du haut de la falaise de Lodmé, directement dans les abysses après s’être vengé. En y repensant, il avait envie de tout jeter et d’écrire cela différemment encore. Ce serait son fantôme qui reviendrait se venger et de là, la légende serait déroulée, jusqu’à ce qu’il puisse partir en paix. Il garda cette idée en tête, rapidement rangée suite à cette déclaration pour le moins étrange… Le rendre ? Mais ? Pourquoi ? Il cacha difficilement son étonnement. Il avait peut-être des manières peu conventionnelles pour bon nombre de choses, il ne se serait jamais donné autant de mal pour un simple prêt. Enfin si c’était ce qu’elle s’imaginait, il pouvait bien la faire marcher un petit peu…

— Je compte sur vous mon innocente brebis. Pour tout vous avouer, j’ai une sainte horreur des espaces libres dans ma bibliothèque. Il y a quelque chose d’angoissant à contempler ce ténébreux interstice de vide entre deux couvertures, voyez-vous. renchérit-il non sans ironie.

Il fallait voir le bon côté des choses : elle serait obligée de revenir pour lui rendre l’ouvrage. Il pourrait bien lui dire à ce moment qu’elle se fourvoyait complètement et il aurait alors tout le loisir d’admirer ses prunelles chargées d’éclairs. En attendant, ils en avaient fini de cette visite des plus succinctes de l’intérieur du manoir. L’étage et la salle à manger attendraient.

Traversant le hall pour se rendre à l’arrière du manoir où se trouvait les jardins, il se tourna vers elle et lui proposa :

— Peut-être souhaiteriez-vous partagez vous aussi quelques souvenirs le temps d’une petite promenade dans les jardins ? Je ne voudrais pas étouffer sous mes souvenirs.

Le jardin n’était pas des plus beaux. Au loin, les tilleuls étaient décharnés, les buis saupoudrés de neige et la pelouse disparaissaient complètement. Pourtant, il ressentait toujours la même émotion à la vision de cette allée qui s’enfonçait entre les arbres. Une impression diffuse comme un songe. Si diffuse que s’il n’avait pas eu le mouchoir brodé à ses initiales, il aurait certainement douté de l’existence de ce moment.

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Message par Éléonore de Fromart Dim 2 Mai - 22:16

Cette tragédie dans ses bras, elle en rêvait. Le supporter, comme il disait, était fort loin d’être un problème… En revanche, il était bien une chose dont elle préférait se passer.

— Tant que je ne dois pas supporter les accoudoirs.

Bien sûr qu’il n’allait pas arranger sa loge autrement uniquement pour ses enfantillages ! Elle ne voulait pas faire de caprices. Elle ne passait pas de temps avec lui pour l’écraser sous ses exigences d’enfant gâtée, mais bien parce qu’avec lui, elle se sentait bien… et qu’aussi fou que cela puisse paraître, il prétendait cela réciproque. Mais ce petit arrangement-là, après tout, n’était pas si mauvais à demander.

Eléonore demeurait néanmoins soucieuse de ne pas trop le déranger. Aussi assura-t-elle qu’elle ne tarderait pas à rendre le livre qu’il venait de lui prêter. Coldris le lui avait d’ailleurs remis de manière bien étrange… En général, n’était-ce pas pour les cadeaux que l’on faisait un tel cérémonial ? Enfin, soit, c’était un homme extravagant, parfois. Cela lui allait bien.

— Oui, réjouissons-nous alors que celui-ci n’ait pas encore eu besoin d’une place dans votre bibliothèque.

Ou peut-être que si, mais s’il ne l’avait pas encore lu en voyant la pièce, il y avait des chances pour qu’il ne le soit juste pas encore procuré. Donc, après sa lecture, s’il avait déjà eu l’intention de le lui prêter… Cela ajouté au ton qu’il employait… Enfin, soit, cela n’avait pas beaucoup d’importance.

Elle la suivit vers la sortie - non sans s’arranger pour que le livre soit porté dans ses affaires. Se promener avait quelque chose d’une bonne idée. Et puis, ici, s’il lui venait soudainement l’envie de la presser contre son coeur pour lui prouver qu’il battait encore, il n’y aurait pas besoin de le justifier.

L’ennui, c’étaient bien les souvenirs… Oh, Coldris pouvait parler des siens autant qu’il le voulait, elle n’y voyait pas d’inconvénient. Elle aimait l’écouter. Beaucoup. Elle aimait savoir qu’il avait été heureux. Et puis, il avait quelque chose - peut-être dans sa voix, ou bien dans ses yeux, Eléonore ne savait pas trop - qui rendait tous ses récits passionnants.

Elle acquiesça, et réfléchit à ce qu’elle pourrait bien dire jusqu’à ce qu’ils arrivent dehors. Elle n’avait pas grand chose d’intéressant à dire… Pas dans ce qu’elle avait le droit de dire, en tout cas. Enfin, tant que ça ne compromettait qu’elle...

— Oh, vous savez, je n’ai pas grand chose à raconter. Je suis une jeune femme sage qui a toujours vécu dans le même château perché sur les falaises. A vrai dire, je suis quelqu’un d’assez discret, qui passe énormément de temps enfermée dans sa chambre. A lire, principalement. Et il se trouve que souvent, je suis à ce point absorbée par mes lectures que je n’entends pas cogner à la porte.

Ou bien était-ce parce que la moitié du temps, elle se trouvait tout simplement ailleurs… Le pire, c’était que personne n’en doutait jamais. Il suffisait d’avoir la même attitude imperturbable lorsque la porte était ouverte, et de ne rien avoir l’air d’entendre jusqu’à ce qu’on lui arrache le livre des mains. Oh, bien sûr, Eltinne n’était pas dupe, et savait que ses oreilles fonctionnaient… Mais au moins, elle ne s’imaginait pas que sa petite protégée vagabondait. A tel point que la gouvernante avait cessé de venir. Enfin, Eléonore, jamais aveuglée par une fausse sécurité, s’était toujours montrée très prudente, afin de ne jamais se trahir.

— Mais puisqu’elle était verrouillée de l’intérieur et que je finissais toujours par en ressortir, vous pensez bien que je ne pouvais pas être ailleurs, reprit-elle avec un sourire complice.

Il n’imaginait certainement pas combien tout ce qu’elle avait déjà pu laisser échapper en sa présence était secret. Elle avait toujours fait très attention. A vrai dire, seuls Ariste et Gabriel savaient ce qu’elle était en réalité.

— Je suis aussi quelqu’un d’excessivement maladroit, paraît-il. A tel point que je me coupe dès que je me retrouve en présence d’un objet tranchant. Heureusement, on les tient éloignés de moi… Sauf ces derniers mois, où j’ai appris à faire attention parce que… Parce qu’il était hors de question que l’on me prive de sa dague. Et depuis mes huit ans, je me casse la figure dès que j’essaie de monter sur quelque chose.

Elle soupira. Le pire, c’était que cette histoire de maladresse n’était en aucun cas une manoeuvre volontaire. Avant qu’elle ne se blesse la première fois, tout le monde s’en était déjà persuadé. Elle avait même essayé plusieurs fois de les détromper, sans succès. Et tout cela parce que depuis le début, nul autre que son Ariste n’acceptait de voir en elle autre chose qu’une enfant fragile qu’il fallait préserver de tout.

Au fond, c’est ce qu’elle était. Peut-être pas physiquement, mais moralement, elle était d’une faiblesse sans nom. Sans son cousin, elle était exactement ce que sa famille avait toujours vu en elle. Alors elle pouvait bien raconter ses stratagèmes en faisant comme si elle en était fière, au fond, depuis que celui qui les légitimait l’avait quittée, elle se sentait atrocement coupable de ne pouvoir redevenir ce que l’on attendait d’elle. Pas une jeune femme fragile, mais une jeune femme convenable, responsable et honnête, qui ne passait pas son temps à mentir pour grappiller des heures de liberté et commettre des folies.

— Je ne raconte pas de souvenirs... remarqua-t-elle. Elle parlait d’elle, oui, pour se vanter à demi-mot des choses qu’elle n’aurait jamais dû faire. Mais elle ne racontait rien de particulier… A vrai dire, il y avait à cela une raison très claire : Mais, vous savez, ils parlent tous de lui. Tous ceux qui comptent. Ariste n’a pas seulement été les meilleures années de ma vie : il a été ma vie toute entière. Depuis ma naissance jusqu’à notre… son décès. Et encore aujourd’hui, à vrai dire.

Elle soupira, cherchant le regard de son merveilleux phénix. Elle aurait aimé apporter à cela une petite précision. Ajouter le miracle dont elle ne pouvait pas lui parler… Mais non, parce que précisément : elle ne pouvait pas.

— C’est difficile de trouver quelque chose à raconter qui ne parle pas de lui, de Louis ou de Gabriel.
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Message par Coldris de Fromart Lun 3 Mai - 22:55


Ah les accoudoirs ! Toute une histoire ! Il les appréciait pour sa part, ces délicates pattes de lion qui accueillait le repos de ses bras avec une dévotion sans faille. Oh certes, il ne niait pas qu’ils pouvaient parfois devenir légèrement encombrants lorsqu’il était en bonne compagnie, mais cela faisait partie du jeu. Quelques obstacles supplémentaires pour pimenter le tout, sinon, autant se retrouver chez soi, n’est-ce pas ?

— Oh ne vous en faites guère, ma mémoire ne me fait pas encore défaut et vous aviez particulièrement insisté sur ce point répondit-il petit sourire en coin

Peut-être le ferait-il cette fois-ci. Ou la fois suivante. Allez savoir. Il aimait générer la surprise autant qu’une légère frustration, mais surtout, il préférait jouer avec l’inattendu qui rompait la monotonie d’un quotidien millimétré. Cette petite folie qui s’invitait dans une routine parfaitement établie. Toutefois, il n’en était pas à prêter des livres en lui faisant une telle mise en scène. Bien sûr, il lui avait proposé d’en emprunter à Fromart mais de là à procéder de cette façon… Enfin si elle y tenait, il voulait bien rentrer dans son jeu puisqu’il y avait là d’indéniables avantages à soulever. D’ailleurs, elle avait -sans le savoir- on ne plus raison au sujet de sa bibliothèque.

— En effet, je ne me suis pas encore penché sur la question. A vrai dire, je doute de pouvoir lui trouver une place un jour fit-il pensivement en s’amusant intérieurement de sa réaction.

Il ne s’appesantit cependant pas plus sur le sujet, elle aurait tout le loisir de comprendre l’ensemble de ses propos d’ici quelque temps, lorsqu’elle déciderait de lui rendre l’ouvrage et qu’il lui demanderait de le garder, car tout le monde savait que l’on ne rendait pas un présent. Il parlait, parlait et elle devait sans doute en avoir assez de tous ses souvenirs qui s’imposaient en même temps qu’il redécouvrait les lieux en sa compagnie. Il préférait lui laissait la parole -et un peu d’espace-.

— Voilà qui est étonnant ! J’aurais juré que vous étiez adepte de l’escalade et de toute sorte de jeux étranges plus farfelus les uns que les autres ! plaisanta-t-il en prenant sa main avant de pousser la porte qui les menait droit vers les jardins.

Il se réjouissait de venir en hiver. La nature était assoupie et ses fantômes refusaient de jouer à cache-cache dans ce décor bien trop blanc et mort pour eux. Alors, tandis que ses pas crissaient sur la fine couche de neige faisant rouler les gravillons sous ses semelles, il était tout ouïe à chacune de ses paroles, acquiesçant de temps à autre, répondant même à ses sourires jusqu’à ce qu’un point lui donne la possibilité pleine de politesse d’intervenir.

— Tout ceci ne m’intéresse pas. C’est là ce que l’on dit de vous et non ce que vous êtes. Et nous éviterons de parler de nos images respectives ou bien vous n’aurez d’autre choix que de demeurer ici une longue semaine avant que je n’aie pu faire qu’un vague contour de tout ce que femmes comme hommes peuvent dire de moi.

Il étouffa un petit rire au travers de son sourire toujours taquin. Non ce qu’il voulait, c’était entendre de vrais souvenirs, qu’elle lui parle d’elle, de ce qu’elle aimait, de ce qu’elle haïssait qu’importe le sujet tant qu’il s’agissait d’elle. Il ne voulait pas l’étouffer ici sur ce terrain qui voulait tant dire à ses yeux.

Ariste n’a pas seulement été les meilleures années de ma vie : il a été ma vie tout entière. Depuis ma naissance jusqu’à notre… son décès.

Il ne put retenir son étonnement à cette phrase si forte et si triste à la fois. Comment pouvait-on ainsi remettre sa vie entièrement à quelqu’un d’autre et se priver de sa liberté d’être, de penser et de vivre ? Il ne l’aurait jamais fait et il ne le ferait jamais. Il n’en voulait pas non plus. Finalement, c’était sans doute un mal pour un bien qu’il soit mort. Elle allait enfin pouvoir apprendre à vivre et à voler de ses propres ailes. Elle pourrait sentir le souffle de la liberté s’engouffrer entre ses plumes. Pour l’instant, elle n’était qu’un oisillon duveteux, perdue, sur le rebord de son nid.

— Votre vie n’appartient qu’à vous Eléonore, ne soyez pas esclave de qui que ce soit. Vous n’avez besoin de personne ni pour vivre ni pour survivre. Chérissez son souvenir, mais conservez votre vie.

Et la dernière chose qu’il voulait en sachant cela était bien de devenir le maitre de son âme marquée au fer rouge. Raison supplémentaire de ne pas lui offrir les chaines qu’elle pourrait trop facilement saisir pour s’entraver.

— Cela ne me dérange nullement si telle est votre préoccupation. Faites comme bon vous semble et si vous souhaitez conserver le silence, je le respecterai également.

Ils avaient quitté la pelouse centrale pour s’engouffrer dans l’allée aux arabesques. Au loin, il reconnaissait les grands tilleuls qui ployaient leurs ramures enneigées dans une voute de branchages zébrant l’azur du ciel comme un chemin de plomb.

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Message par Éléonore de Fromart Mar 4 Mai - 13:09

À vrai dire, insister sur cette affaire d'accoudoirs n'était certainement qu'un prétexte. Un peu comme l'horreur que représentaient les interstices dans les bibliothèques. Un prétexte qui tournait curieusement, d'ailleurs… Elle voulait bien croire qu'il avait une bibliothèque bien fournie, mais de là à ne rien savoir y ranger de plus… Qu'était-il encore en train d'élaborer comme stratagème douteux ? 

— C'est bien dommage, hasarda-t-elle. C'est pourtant un bien bel ouvrage.

Les livres représentaient - pour la plupart - une occupation convenable. Et même si elle était réellement adepte de bonnes lectures, Éléonore devait reconnaître qu'elle y passait moins de temps qu'elle ne le prétendait. 

— Quelle idée saugrenue vous avez là ! s'exclama-t-elle tandis qu'il la tirait dehors. De l'escalade, vraiment ? Et qu'irez-vous vous figurer ensuite ? Que je détournais des livraisons pour ma consommation personnelle ? Que je m'étais spécialisée dans la couverture de liaisons clandestines ? Oh, non, je sais : que je me suis volontairement faite arrêter uniquement pour avoir l'occasion de mettre en pratique un plan d'évasion que j'avais élaboré ! Non, vraiment, Coldris, c'est absurde.

Tellement absurde qu'elle avait fait les trois. Ce qui était nettement moins conventionnel que les salons, il fallait l'avouer, mais surtout moins angoissant. 

C'était la première fois qu'elle en parlait. Même à demi-mot, même en ayant l'air de sortir les pires énormités qui lui venaient à l'esprit. Oh, il n'y croirait pas : personne n'imaginait qu'une enfant fragile et maladroite ait pu se livrer à de telles folies. Mais cela faisait quelque chose de l'évoquer. Entre la part d'elle qui hurlait à la prudence, et celle qui pensait faire confiance. Elle s'était rarement sentie aussi proche de quelqu'un, et jamais en si peu de temps. Dire que jusqu'à peu, elle n'aurait jamais dit un seul mot compromettant devant un autre qu'Ariste ou Gabriel. 

— Tout cela a bien plus d'intérêt qu'on ne le pense, croyez-moi. Mon Ariste disait que les gens ne voyaient que ce qu'ils voulaient voir. Et puis… j'avouerais ne pas être insensible à la perspective de vous écouter reprendre ce que l'on peut dire de vous.

Il pouvait bien rire, cela devait réellement avoir quelque chose d'amusant. Mais puisqu'il voulait entendre parler d'elle, elle fut naturellement ramenée à celui qui avait donné du sens à son existence. 

Elle ne comprit pas immédiatement ce qu'il tentait de lui dire. Il avait interprété ses mots si différemment de leur sens originel… 

— Coldris… non. Je… Vous me parlez d'esclavage, je parlais seulement de durée. Il a toujours été là, depuis le début et jusqu'à la fin, c'est tout ce que je disais. Une relation de très longue date.

Pour défendre son tout, la jeune femme retrouvait tout son aplomb, toutes ses certitudes. Personne, pas même Coldris de Fromart, n'avait le droit de contester son Bien-nommé. Personne, jamais. Elle était la seule qui ait le droit de le blâmer. Pour elle, elle aurait accepté les critiques. Mais s'en prendre à Ariste était intolérable. 

— Ariste et moi étions peut-être plus fusionnels qu'il n'était raisonnable, concéda-t-elle. Nous avions fini par nous connaître par coeur. Mais jamais je n'aurais interféré avec ses aspirations ni lui avec les miennes. Il se trouve seulement que notre bonheur n'était jamais aussi vrai que lorsque nous étions réunis. Et que je n'ai jamais rien connu d'aussi atroce que de le perdre.

Elle prit une grande inspiration, puis, raffermie dans ses positions par le besoin viscéral de défendre ce qui lui était le plus cher, enchaîna sans lui laisser la moindre occasion de répliquer : 

— Mais je vous interdis de parler d'esclavage ! En quoi n'étais-je pas libre ? Quelle plus grande liberté y a-t-il que de pouvoir faire absolument tout ce que l'on veut et d'être toujours soutenu même dans ses projets les plus fous ? De savoir que quoi qu'il arrive, il y aura toujours quelqu'un sur qui se reposer quand ça ne va pas ? Quelqu'un qui vous tire vers le haut, qui vous aide à surmonter toutes les difficultés qui se dressent sur votre chemin et qui vous fait confiance. Quelqu'un qui vous aime et vous rend heureux. Et à qui vous le rendez bien. Quelqu'un avec qui vous pourriez partager n'importe quoi, à qui vous pourriez confier tous vos tourments, tous vos maux, tous vos doutes, toutes vos erreurs sans craindre un instant d'être jugé. Quelqu'un qui vous aide à canaliser la soupe de pensée qui bouillonne anarchiquement dans votre esprit et avec qui tout devient évident. Qui a toujours les mots pour vous réconforter alors même que ses bras suffiraient. Quelqu'un à qui se raccrocher dans les mauvais moments, et à qui songer pour magnifier les bons. Est-ce cela, l'esclavage, pour vous ? Une promesse de bonheur et de soutien ? Un refuge ? Une source de courage et de confiance ? Si pour vous, ce bonheur-là est celui d'une esclave et que vous voulez me le reprocher, je me fiche éperdument de votre opinion. Mais sachez une chose : Ariste n'était pas ma cage, il était à la fois mes ailes, la clef du cadenas, et l'attrait d'un ciel d'azur infini.

Les ailes qu'on lui avait sauvagement arrachées, le cadenas qui avait été remis bien en place, et le ciel noirci à tel point que même l'envie de sortir l'avait désertée. C'était lui, sa liberté, et la vie la lui avait volée. 

Ses yeux avaient scintillé pendant son discours. Son cœur avait battu plus fort. Mais ses positions étaient assurées, imprenables. Parce qu'elle retrouvait la confiance qu'elle n'avait que pour lui. Elle sentait son pendentif contre sa peau. Paradoxalement, c'était le respect qu'elle portait à Coldris qui l'a forçait à le contredire si fermement. C'était à cause de son affection qu'elle tenait à ce qu'il comprenne. Un autre n'aurait récolté qu'indifférence ou mépris, s'il avait remis en cause la seule chose qui comptait, mais lui, elle l'aimait. Lui, elle voulait qu'il comprenne, elle ne voulait pas le laisser dans l'erreur. Si quelqu'un était à blâmer, c'était elle. Surtout pas Ariste. Si on le lui retirait, elle n'avait plus rien. 

Elle sourit, puis, radoucie, lui expliqua pourquoi, à l'origine, elle avait évoqué son tout : fusionnels depuis toujours, elle n'avait que peu de souvenirs marquants et agréables qui ne l'impliquent pas. Lui, Gabriel ou Louis. Mais parler de son fiancé à son amant ou relancer Coldris à propos de son bâtard avait également quelque chose de saugrenu. 

— Je pourrais me taire, confirma-t-elle en prenant son bras. 

Elle aurait pu marcher avec lui, tout simplement, sans que le silence ne l'affecte. Avec lui, elle était simplement mieux. Mais après tout, elle pouvait bien raconter quelque chose. Il lui pardonnerait si ce n'était pas excessivement intéressant. 

— A-t-on déjà essayé de vous tuer avec un bébé hérisson dégoulinant d'encre ? demanda-t-elle enfin.
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Message par Coldris de Fromart Mar 4 Mai - 23:32




Il était à deux doigts de lui dire de garder le livre et lui adressa même un regard en ce sens, mais se ravisa de justesse : ce serait bien trop dommage de se gâcher le plaisir maintenant.  Non, il était définitivement tard pour faire machine arrière, tant pis ! Il faudrait désormais être patient, le jeu en valait la chandelle. Il passa donc à toute autre chose en lui proposant de lui raconter à son tour un souvenir, quel qu’il soit. S’il avait su que cela génèrerait une telle réaction !

Elle prétendit tout d’abord ne rien faire d’intéressant, ce qu’il contredit aisément en lui rappelant qu’elle pratiquait l’escalade (en revanche, il se garda bien de lui rappeler ses maigres expériences dans ce domaine). L’air frais, lui fit un bien fou alors qu’il s’engouffrait dans ses courts cheveux poivre et sel, vivifiant au passage son esprit. Il tourna la tête vers elle tandis qu’elle énumérait bon nombre de frasques plus absurdes les unes que les autres.

—Ne vous embêtez plus à détourner un convoi si vous voulez de l’opium, j’ai tout ce qu’il faut. Et si vous souhaitez autre chose, je suis certain que Sarkeris le trouvera. déclara-t-il amusé.

Quant aux liaisons clandestines, n’était-ce pas cela même qu’elle était en train de faire ? Il doutait plus que fortement qu’elle n’ait clamé haut et fort à sa gouvernante « je vais passer la nuit avec Coldris de Fromart, je rentrerai dimanche. Non, ne vous en faites pas, tout ira bien je vous assure. ». Et pour ce qui était de tenter de s’évader, il lui déconseillait fortement la Prévôté. Certes les gardes étaient un tantinet benêts sur les bords mais les cellules ne souffraient guère de failles. En revanche, elle pourrait cette fois-ci clamer haut et fort son nom pour en faire déverrouiller les geôles.

—Mais voilà qui est formidable ma luciole ! Je veux absolument tout savoir toutes ces absurdités que vous n’avez pas faites et que vous n’êtes absolument pas en train de faire.

Sa jovialité s’effaça aussi rapidement qu’elle s’était installée. « Mon Ariste » ? Ce n’était pas tant par jalousie -il n’en ressentait aucune- que pour ce pronom possessif à accoler à un nom. Même accoler au sien, la chose l’aurait dérangé.

— J’ai toujours dit que la vie n’était qu’une représentation. Il est si facile d’abuser les gens en jouant de leur représentation. L’on dit souvent que l’habit ne fait pas le moine, mais c’est parfaitement faux. C’est suffisant pour la majorité des gens. expliqua-t-il tout à fait sérieusement Et je puis vous l’affirmer, puisque je me suis déjà déguisé en curé pour me rendre chez une de mes maitresses sous le nez de son mari. acheva-t-il espiègle en guettant sa réaction.

Ce que cela avait pu être drôle ! Il avait emprunté une des soutanes de Thierry et s’était rendu dans la demeure, incognito. Ce n’était pas comme si l’on s’attendait à recevoir le ministre des Affaires étrangères -débauché notoire- en habit de prêtre. L’idée était si inconcevable que l’esprit lui-même refusait de faire le lien.

— Et si cela vous intéresse toujours autant, ma foi, la nuit sera longue. Et non je ne me baigne dans du sang de vierge si c’est ce que vous voulez savoir.

Pas plus qu’il n’avait de harem d’ailleurs. Ou qu’il ne glaçait d’un simple regard. Quoique sur ce dernier point, on pouvait sans doute y trouver à redire, enfin là n’était pas le sujet puisqu’il voulait avant tout la laisser libre de s’exprimer et ce qu’importe ce qu’elle est à dire. De toute évidence ses propos ne lui avaient pas plu et elle s’élança dans un long plaidoyer. Il ne savait quoi penser. Cette relation le mettait mal à l’aise. Sans doute parce qu’elle mélangeait des sentiments qui n’avaient pas lieu d’être. Il avait aimé sa sœur, son unique soutien durant ses dix premières années. Ils avaient été fusionnels, avaient partagé leurs malheurs, leurs rêves et leurs espoirs… Pourtant, Coldris n’avait jamais considéré qu’elle était sa vie. Elle faisait partie de sa vie mais ne l’était pas. Il avait aussi aimé Aurélia, son grand amour, sa belle déesse qui avait tant su panser ses plaies et le combler d’un bonheur incommensurable. La perdre l’avait amputé, brisé, anéanti. Il était monté si haut qu’il était retombé au plus profond des tréfonds de la terre lorsqu’elle avait disparu. Pourtant, là encore, il ne considérait pas qu’elle avait été sa vie. Elle n’en était qu’une partie, une belle partie, un océan de félicité sur une terre désolée et ravagée.

Elle pouvait dire ce qu’elle voulait. Elle pouvait nier autant qu’elle le voulait. Elle n’était qu’un petit oisillon qui ne savait pas voler. Ariste lui avait apporté la becquée pendant qu’elle était couvée. Il était tant qu’elle vole de ses propres ailes.

Il se renferma dans un profond silence, laissant la mélodie crissante de la neige sous leurs chaussures prendre le relais. Un silence qui visiblement ne semblait pas la déranger outre mesure. Coldris laissa ses pensées vagabonder ici et là, écoutant la nature qui survivait à l’hiver : des sifflements d’oiseaux, des craquements de branchage, le souffle de l’air dans ses oreilles, le bruissement  de sa robe dans la neige. Arrivée sous les tilleuls, elle rompit finalement le silence d’une remarque pour le moins incongrue. À tel point qu’il s’immobilisa, étonné de cette question

— On a attenté à ma vie plusieurs fois, mais je dois vous avouer qu’aucun de mes assaillants n’a fait preuve d’une imagination aussi fertile... On peut même dire qu’ils étaient fort classiques. Dites-moi donc ce qu’a bien pu mériter ce pauvre hérisson pour finir en arme destructrice.

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Message par Éléonore de Fromart Mer 5 Mai - 14:27

Oh, Coldris pouvait bien refuser de la croire, à vrai dire, elle ne faisait vraiment rien de sa vie. Huit mois d’oisiveté totale en témoignaient : elle ne savait rien faire d’intéressant seule.

Et lorsque sa vie avait un sens ? Oh, avec Ariste, le monde était différent. Elle avait des idées et l’envie de les mettre en pratique. S’il ne la soutenait pas, cela n’en valait pas la peine. De toute façon, sans lui, elle n’était rien du tout. Il avait fallu le perdre pour comprendre à quel point.

Ce qu’elle n’avait jamais fait, c’était détourner un convoi pour se procurer de l’opium. Ni se servir des relations d’un amant pour obtenir elle ne savait quoi dont elle n’avait pas besoin.

— Sarkeris ? Qui est-ce ?

Et pourquoi lui en parlait-il comme si elle était censée le savoir, surtout ? Avait-elle… Avait-elle manqué quelque chose de ses explications ? Oh, elle ne voulait pas qu’il croie qu’elle ne l’écoutait pas, c’était bien faux. Elle craignit également que sa question ait été trop indiscrète mais… après tout, s’il en avait parlé, n’avait-elle pas le droit de demander de qui il s’agissait ?

— Voilà qui est ma formidable luciole !

Eléonore ne put s’empêcher de sourire. Il suffisait de quelques mots pour faire déborder son coeur.

— Qui elle n’est pas, rectifia-t-elle avec un regard entendu. Allons, il ne pouvait tout de même pas y croire, si ?

Ou, à défaut, qui elle n’était plus et ne serait plus jamais… Parce que sans Ariste, tout cela n’avait plus de sens. Ariste qui lui avait permis pendant toutes sa vie d’accepter qu’on ne puisse pas être honnête avec tout le monde. L’ennui était qu’elle, elle avait besoin de confiance pour se maintenir. De confiance donnée et rendue. Et que tout ne devienne qu’une vaste représentation n’offrait pas cette sincérité dont son coeur avait besoin. Bien sûr, on ne pouvait pas l’avoir avec tout le monde, et c’était regrettable… Mais il ne demeurait pas moins nécessaire d’en conserver pour se sentir vrai. Pour ne pas devenir aussi méprisable qu’elle ne l’était désormais.

— Vous ? Déguisé en curé ? répéta la jeune femme, incrédule.

Elle prit deux pas de recul pour tenter de l’imaginer en soutane… Et à vrai dire, c’étai bien trop absurde pour que qu’elle soit capable de le visualiser. Pour le reste…

— Il faut admettre que c’était astucieux, reconnut-elle.

Et que l’idée en était très amusante. La question étant de savoir si une telle tenue détruisait sa crédibilité ou si sa prestance était trop grande pour en être affectée.

— Oh, cela tombe bien que vous le précisiez ! s’exclama-t-elle à son commentaire suivant. A vrai dire, c’est exactement sur ce qui m’inquiétait ! Oh, vous savez, je n’ai pas l’habitude de croire aveuglément tout ce que l’on me raconte mais cette rumeur-là semblait tellement fondée qu’elle me tourmentait beaucoup.

En d’autres mots : elle n’avait même rien entendu d’aussi stupide à son propos. Et s’il avait fallu que ses oreilles surprennent ce genre de rumeurs, eh bien, elle n’aurait même pas pris la peine de s’interroger dessus.

A vrai dire, il n’existait qu’un être qui aurait pu lui faire avaler une telle ânerie. Mais s’il l’avait affirmé, c’eut été vrai, seulement vrai. Parce qu’il ne disait que la vérité. Le seul point sur lequel Ariste s’était trompé, c’était elle. Parce qu’elle n’avait rien de la perfection qu’il lui avait trouvée. Ou du moins, pas sans lui. Mais comment aurait-il pu savoir qu’elle deviendrait aussi méprisable livrée à elle-même et rongée par son deuil ?

Il demeurait son ancre. Son inattaquable. Sa limite. La ferveur qu’elle mettait encore à défendre cette vérité rendait grâce à la sienne : il subsistait quelque chose d’elle, là, tout au fond.

Coldris ne semblait pas tout à fait comprendre la profondeur de cette relation. Personne n’aurait pu comprendre sans l’avoir vécu. Ariste et elle n’avaient eu qu’un seul coeur et une seule âme, divisés entre eux. Ils étaient des complémentaires parfaits comme on n’en retrouverait jamais. Non, personne ne pouvait comprendre ce dont il s’agissait. Ils prenaient tous la question à l’envers, en se demandant comment deux êtres auraient pu être aussi proche alors que la vraie question était de se demander comment ils avaient pu être partagés en deux. Aurait-on idée de couper un corps en deux et de demander à chaque partie de vivre indifféremment de l’autre ? Non, jamais, parce que cela ne pouvait fonctionner. Eh bien là, c’était pareil, à la différence que la moitié qu’elle composait était beaucoup plus faible que l’autre.

Enfin, soit. Dire qu’elle avait commencé à parler d’Ariste uniquement pour s’assurer qu’il n’y avait pas de problème avec les souvenirs qui le faisaient figurer. C’était bien raté : la preuve qu’elle ne savait rien faire, sans doute. Elle espérait seulement… Elle espérait seulement ne pas avoir tout gâché.

Elle garda le silence jusqu’à trouver quelque chose à raconter. Coldris parut vivement surprit par sa question, ce qui la fit sourire. Elle ne fut pas le moins du monde étonnée qu’on ait voulu sa mort, en revanche, même si elle ne voulait que son bonheur. Quant à ce pauvre hérisson… Oh, il fallait dire qu’elle avait été bien triste pour lui, à l’époque, mais elle avait largement eu le temps de s’en remettre.

— Oh, vous savez ce que c’est : il s’est retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment, répondit-elle, amusée.

Il fallait admettre que c’était un extraodinaire concours de circonstances. Et un caprice davantage qu’une tentative de meurtre, mais le présenter ainsi eut été moin frappant.

— Vous vous souvenez de Louis ? demanda-t-elle.

Elle s’attendait presque à ce qu’il décide, à cause de ce qu’elle avait dit sur lui, que cette anecdote n’avait finalement plus d’intérêt. D’ailleurs… Elle avait encore du mal à concevoir qu’il éprouve le moindre intérêt pour ses souvenirs, qui n’avaient de valeur que pour elle. Enfin, puisque cela ne semblait pas lui poser trop de problème, elle poursuivit :

— Nous avions tout juste cinq ans, à l’époque. Ou bien allions-nous les avoir, je ne sais plus exactement. Il venait d’apprendre qu’il serait obligé de suivre les leçons avec moi. C’était quelques jours avant qu’il ne casse des oeufs dans mes chaussures, précisa-t-elle, se souvenant le lui avoir dit. Oh, il m’en voulait beaucoup, parce qu’il était persuadé que nous allions nous ennuyer. Or, c’était précisément pour éviter cela que j’avais tant tenu à ce que nous apprenions ensemble. Le précepteur était sans doute plus à plaindre que nous dans cette affaire.

Et elle le plaignait sincèrement pour toutes les farces qu’il avait dû encaisser. Oh, pourtant, elle n’y aurait pas renoncé si elle avait dû tout recommencer. Ils s’amusaient tant ! Encore aujourd’hui, en parler la faisait rire.

— Mais Louis ne l’avait pas entendu de cette oreille, vous pensez bien. Et il s’est précipité dans ma chambre pour me faire savoir combien mes exigences le contrariaient. Nous nous sommes disputés, jusqu’à nous dire que nous ne nous parlerions plus jamais parce qu’on se détesterait très fort pour toujours et qu’il ne me pardonnerait jamais cette trahison. Oh, mais bornée que j’étais, j’ai prétendu que je ne le ferais tout de même pas libérer des leçons. J’assumais mon égoïsme : si je devais faire des efforts et apprendre, ce serait son cas aussi, et il n’y avait pas à discuter. Mon oncle avait bien insisté sur l’importance de s’instruire, et je ne pouvais pas laisser mon frère de lait y échapper, même si nous nous détestions pour la vie.

S’il avait vécu plus longtemps, Louis aurait sans doute fini par l’en remercier. Oh, elle ne le faisait pas pour obtenir sa gratitude mais… c’eut simplement été préférable pour lui. Souvent, d’ailleurs, elle se demandait ce qu’il aurait pu devenir. Ariste avait un jour avancé l’idée qu’il aurait été le précepteur de leurs enfants, et aurait pu voir son talent pour les pitrerie surpassé. L’ironie de cette idée avait quelque chose de particulièrement séduisant.

— Il ne voulait pas se résigner, moi non plus, et allez savoir comment, je me suis retrouvée à lui jeter un verre d’eau à la figure. Il a répliqué avec de l’encre. Sauf qu’il ne m’a pas atteinte. Pas d’une goutte. Je lui ai fait un pied de nez et j’ai couru jusqu’à mon lit. Si je me hissais au dessus des baldaquins, il ne risquerait pas de me salir. Et puis… Puis, Louis a repéré un quelque chose dégoulinant au milieu de la flaque d’encre. C’était un bébé hérisson blessé qu’on avait recueilli avec Ariste. Il n’a pas vu ce que c’était, c’était simplement la première chose qui lui tombait sous la main. Alors, il s’en est saisi et l’a jeté de toutes ses forces vers moi en me recommandant de me préparer à mourir.

Elle soupira. La fin était nettement moins amusante, mais ce n’était pas grave. Le souvenir demeurerait toujours.
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Message par Coldris de Fromart Mer 5 Mai - 22:50




Ah oui Sarkeris. Il en avait parlé spontanément sans même réaliser qu’elle ne le connaissait sans doute pas. À moins de l’avoir croisé à Fromart ce qui était peu probable puisqu’il avait pas le mois de janvier à Nérée ou de l’avoir rencontré fortuitement en ville durant le mois de décembre. Après tout, c’était son fils et elle était magnifique.

— C’est mon fils. puis en réalisant qu’elle risquait de ne pas comprendre, il corrigea Notre fils. Si vous croisez un corsaire qui me ressemble étrangement, alors c’est lui. Peu importe le nom qu’il vous donnera.

Il pouvait bien avoir les troublants beaux yeux marines de sa mère, il se reconnaissait plus en lui qu’il ne pourrait jamais se reconnaitre en  Alduis. Et si ce n’était l’effroyable fossé des années qu’il ne comblerait jamais peu importe la volonté qu’il y mettrait, tout était plus facile avec Sarkeris. C’était comme cela et il n’y pouvait rien, il était le fruit de leur amour et cela surpassait tout le reste.

Ce petit aparté clos, il s’intéressa à toutes ces choses qu’il devinât être vrai ou en partie au moins et il mourait d’envie d’entendre le pourquoi du comment. Il pourrait en échange lui raconter quelques-unes de ces aventures épiques. Comme le fameux curé ou le pari fait avec Virgil, qu’ils n’avaient jamais pu solder d’ailleurs.
Elle semblait étonnée de son idée et il en tira une profonde fierté qu’il matérialisa d’un sourire enjôleur tandis qu’il acquiesçait. C’était absurde et c’est pour cela que cela avait si bien marché. L’idée avait d’ailleurs bien amusé Thierry lui-même. Le pire dans tout cela c’était que son autorité naturelle le rendait parfaitement crédible dans ce rôle.

— Je vous raconterai cela un jour, si vous voulez.

Il tairait en revanche le Hallelujah qu’il avait étouffé de justesse avant qu’elle ne hurle en plein ébat, mais s’il devait admettre qu’il avait trouvé cela encore plus amusant. Le meilleur moment était sans doute quand il était reparti en croisant son mari et qu’il avait déclaré d’un air navré qu’elle aurait besoin de repos et de l’aide du Seigneur pour s’en remettre. Évidemment, tous deux ne parlaient pas du tout de la même chose.

— N’allez pas avertir le Cardinal Cassin de mes errances je vous prie, nous commençons tout juste à tisser une relation de sincère cordialité, je m’en voudrais tout gâcher.

Elle évoqua ensuite sa relation avec Ariste. Ou aurait-il dû dire lui aussi son Ariste ? Il s’enferma dans un profond mutisme. Parfois le silence était préférable à des paroles déplacées ou qui pouvaient être mal interprétées et il savait que ce serait le cas. Ce fut elle qui rompit le silence épineux avec une histoire de hérisson et d’encre. Ce fut à son tour de se peindre d’étonnement.
Bien entendu qu’il se souvenait de Louis, ce bâtard mort il y a de nombreuses années et qui était la raison pour laquelle son Cerbère le maudissait chaque jour qui passait. Elle pouvait pourtant se rassurer, depuis le temps, il devait avoir plus de malédictions que de bénédictions et de loin. C’était à se demander comment il pouvait encore être en vie. Cinq ans. C’était il y avait donc seize ans. En 1581. Alduis avait douze ans et Sarkeris aussi, à survivre quelque part sur les océans. Bérénice en avait dix. Il était déjà ministre. Virgil était toujours là, Solange aussi. C’était amusant car Alduis n’appréciait pas beaucoup plus se rendre en étude contrairement à sa sœur qui était une élève modèle. Que faisait-il lui à cinq ans ? Il prenait déjà des bleus dans les cours d’armes et préférait les fuir pour observer les fourmis ou la vie dans la petite mare. Une occupation qu’il avait abandonnée après que l’un de ses frères l’ait poussé tête la première dedans à la fin d’automne et qu’il ne manque de s’y noyer. Une journée somme toute normale à Fromart. Si son père s’était réjoui de le voir apprendre lire si vite, il avait rapidement déchanté par la suite.

Ce souvenir avait une délicieuse part d’absurde enfantine. Si son père avait découvert qu’il cachait un hérisson dans sa chambre, il n’aurait eu d’autre choix que de l’achever. Dans le meilleur des cas. Coldris souriait.

— Et que s’est-il passé ensuite ? demanda-t-il tout en quittant l’allée de tilleuls pour le bosquet de buis.


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Message par Éléonore de Fromart Jeu 6 Mai - 9:58

Alors, ils avaient eu un fils. Eléonore ne savait pas vraiment ce qu’elle devait penser de cette nouvelle. Au moins, il lui restait quelque chose de son amour mais… Mais elle avait l’impression que ce n’était pas si simple. Enfin, soit, ce n’était pas le moment de s’interroger là dessus. S’il n’en disait pas plus, elle n’avait pas de raison de chercher à extrapoler.

Il avait donc un fils, et ce fils lui ressemblait assez pour qu’il l’estime reconnaissable si elle le croisait.

— Vous êtes cruel : s’il donne un faux nom, ce n’est certainement pas pour vous laisser l’honneur de trahir son identité, fit-elle remarquer.

A la vérité, elle ne comprenait pas pourquoi il avait apporté une telle précision. Qui, contrairement à l’idée de voir le ministre grimé en prêtre, n’était pas forcément amusante. Celle-là, en effet, il faudrait qu’il la dévelloppe.

— C’est idiot, moi qui comptais justement aller lui répéter tous vos secrets dès que vous m’auriez libérée, déplora-t-elle à sa demande suivante.

Elle n’était pas là pour le trahir, bien qu’elle ait un don pour tout gâcher. Elle craignit même que le parler encore d’Ariste ait eu cet effet. Elle était trop idiote. Et si… Et si elle l’avait perdu en racontant ces choses-là ? En lui laissant entrevoir un lien aussi fort que celui qui existait entre Ariste et elle ?

Et dire qu’elle en rajoutait, cette fois, en lui rappelant l’existence d’un bâtard dont elle n’aurait probablement jamais dû lui parler. Pourtant, tandis qu’elle racontait, elle ne se disait pas qu’elle racontait cela au géniteur de Louis, car le considérer ainsi la dérangeait. Non, c’était juste une anecdote de sa vie, telle qu’il lui en avait demandée.

Ce souvenir le décevait-il ? Elle se sentait idiote de lui raconter ce genre de choses au lieu de l’écouter. Et s’il comprenait que sa vie n’avait vraiment rien  d’intéressant à narrer. Si… Si cela lui faisait réaliser qu’en réalité, il valait mieux que cette relation cesse immédiatement parce qu’elle le fatiguait plus qu’elle ne lui faisait de bien ? Elle ne savait pas ce qu’il y avait de pire dans cette idée : qu’elle continue de l’exaspérer, ou qu’elle ne puisse plus le voir ?

Mais il souriait. Il souriait tout en l’interrogeant sur la suite, alors qu’il guidait leur progression dans le parc. Alors, elle sourit aussi.

— Eh bien… Je n’ai pas grimpé assez vite. Je l’ai reçu dans le dos, puis il s’est écrasé au sol… Je ne pense pas que ces petits animaux-là soient faits pour être lancés, à vrai dire, et celui-là étant déjà affaibli...

Elle avait pleuré, ce jour-là. Parce que c’était trop cruel et que bébé hérisson ne devait pas mourir comme ça.

— On a signé une trève parce que nous avions fait trop de victimes. Finalement, on ne se détestait plus. Nous nous sommes fait gronder pour les taches, vous vous en doutez… Mais cela à donné lieu à notre première sortie nocturne clandestine, pour aller enterrer bébé hérisson dans les jardins en secret. Cela peut paraître idiot mais… Nous avions cinq ans.

Elle se souvenait d’avoir gratté dans la terre et de s’être griffé les mains. Et d’avoir été réprimandée en rentrant, parce qu’ils n’avaient franchement pas été discrets.

— Ma première sortie et la seule fois où je me suis fait repérer, précisa-t-elle. Et ensuite, j’ai appris comment m’éclipser plus discrètement.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 6 Mai - 21:59


Cruel, un qualificatif qui agrémentait ces fameux on-dit, à tort ou à raison cela restait à déterminer… Il ne s’en souciait guère à vrai dire comme du reste. Et pour ce qui était de Sarkeris, mieux qu’elle sache que c’était lui et qu’elle lui en face la remarque avant que tout cela ne génère un effroyable malaise plus tard.

— Ne vous en faites pas pour lui. Il ne m’en voudra pas pour si peu et saura qu’il y avait une bonne raison, je n’en doute pas un seul instant.

Il pouvait parfois être terriblement idiot, mais de là à penser qu’il manquait de jugeote c’était grandement le sous-estimer. En vérité, il avait surtout besoin d’apprendre à se servir un peu mieux de son esprit et à dompter son instinct pour qu’il ne le serve au lieu qu’il ne le desserve en attisant son impulsivité familiale.

Malgré lui, il ne put s’empêcher d’imaginer le visage dépité de Matthieu si Éléonore était réellement venue le trouver pour lui raconter toutes ces sottises. L’idée le fit sourire et ce fut là sa seule réponse. Il préférait de loin écouter son anecdote d’enfance. Le sort de ce pauvre petit hérisson prit malgré lui dans une chamaillerie d’enfants. L’image du projectile incongru avait de quoi faire sourire.

— Oh je pense que rien ne vaut les cailloux. Ce doit être pour cela que les trébuchets sont chargés de rochers et non de hérissons voyez-vous. Notez que les figuiers de barbarie constituent somme toute une alternative intéressante affirma-t-il doctement comme s’il établissait là une déduction des plus scientifiques.

Il en déduisit que l’animal avait péri au cours de la campagne. Dommage collatéral comme toutes les guerres en comptaient malheureusement.

— Vous n’avez donc aucune pitié pour ces pauvres lavandières à la peau rongée par l’eau bouillante ? Et dire que vous me qualifiez de cruel quelque temps plus tôt !
En réalité, les taches d’encre lui évoquaient un souvenir tout aussi amusant. Lui aussi s’était fait grondé mais pour des raisons tout à fait différentes, au moins la camérière et sa robe jaune avaient disparu du plancher avec qu’il n’éternue violemment !
Il imagina la petite Éléonore et le petit Louis gratter la terre avec leurs ongles, comme lui-même et Isis l’avaient fait pour tenter de percer les secrets de la fourmilière. Bérénice non plus n’avait pas été en reste à cinq ans. Il se souvenait l’avoir retrouvé enfermé un jour dans un des placards de la salle de réception dans l’espoir de surprendre la discussion « de grands » qui avait lieu. En revanche, il n’arrive pas à se souvenir de quoi que ce soit du genre avec Alduis.

— Vous avez tiré les enseignements de vos erreurs. J’imagine que tant que personne ne débarque chez moi nous pouvons considérer que vous êtes toujours aussi discrète ?

Il afficha un petit sourire et fit quelques pas entre les buis jusqu’au fameux buis. Il était toujours là. Après toutes ses années. Il était plus grand encore que dans son souvenir. Il froissa ses épaisses petites feuilles vertes sapin entre ses doigts. Comment tout ceci pouvait-il avoir l’air si réel et si nébuleux à la fois ? Leur premier baiser, c’était ici. Sous cet arbuste.

— Vous ne savez pas ce qu’elle a fait ce jour-là pendant que nous étions occupés à jouer à cache-cache ? Elle m’a embrassé follement et elle est partie, comme ça, me faussant compagnie en riant moqueusement!

Il se tourna vers elle, un petit sourire amusé au bord des lèvres.

— Je vous laisse imaginer à quel point j’en étais fou. J’ai fini par rentrer vexé et j’ai entrepris de me venger de son affront.

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Message par Éléonore de Fromart Ven 7 Mai - 9:57

— Oh, bien sûr… Et pour quelle si bonne raison tenez-vous tant à ce que je sois en mesure de reconnaître votre fils ?

Parce qu’il fallait que cette raison fut sérieusement valable pour se permettre de saboter la couverture d’une personne à qui l’on semblait tenir. Et une excellente pour le pardonner.

En général, il en fallait beaucoup moins pour vous transformer en cible. Vous vouliez qu’un ami soit instruit, et vous finissiez par vous faire lancer un bébé hérisson dans le dos. Coldris commenta ce projectile d’une manière plutôt absurde qui effaça l’aspect plutôt triste de son sort.

— Il n’avait rien de tout cela à portée de main. Ce qui m’interroge, c’est bien qu’il n’ait pas lancé directement l’encrier.

C’eut évité de faire des victimes. Mais elle évita de s’étendre sur cet aspect. Comment faire valoir à un homme qui incitait des milliers d’autres à combattre - tuer et mourir, donc, quand ce n’était pas les deux - qu’il aurait fallu préserver la vie d’un pauvre bébé hérisson ? Quand elle avait cinq ans, elle avait pleuré d’avoir perdu son petit protégé. Oh, il aurait trouvé cela stupide, sans doute, et elle particulièrement faible. Mais ce n’était pas grave, elle l’aimait quand même.

Non, elle n’avait pas pensé aux lavandières, et pour cause, elle avait à l’époque la tête toute accaparée par leur expedition dans les jardins, pour aller enterrer bébé hérisson. A l’époque, elle arrivait à ne pas passer son temps à se poser des questions sur tout.

Evidemment qu’elle avait appris de cette erreur. Il y avait tant de choses qui ne seraient jamais arrivées si cela n’avait pas été le cas. Mais elle aurait certainement été une femme plus convenable. Et par la force des choses, elle ne serait pas venue ce soir.

— Je crois, oui. A vrai dire, vous êtes le seul qui soit capable de me trahir.

Le seul paramètre qui échappait à son contrôle. Le seul véritable risque venait de lui. Etait-ce judicieux de lui avouer ? Sans doute pas. Mais à vrai dire, elle s’en fichait éperdument.

— Je n’ai même pas pu en parler à mon fiancé.

Cela sonnait étrangement de le désigner ainsi, mais il fallait se résigner. C’était ainsi que les choses allaient se passer, et Eléonore ne pourrait en rien aller contre. C’était un choix qu’elle n’avait pas, et surtout, elle savait que c’était le meilleur que son oncle ait pu faire. Le seul qui soit raisonnable, elle le savait, car elle n’aurait jamais supporté de quitter Tianidre. Il le faisait pour elle. Il faisait tout pour elle, alors, elle devait cesser de se plaindre et en accepter les moyens.

Il s’éloigna vers un buis, qui semblait le rendre pensif. Tout s’en expliqua à sa précision. Elle sourit.

— C’est ce que l’on appelle se faire prendre à son propre jeu, remarqua Eléonore. Cela n’a rien à voir, bien sûr, mais j’ai connu un homme qu'il est très amusant d'imaginer dans une telle situation. Le fourbe, il s’est servi de notre premier baiser pour me voler un pendentif auquel je tenais beaucoup. Vous vous rendez compte ?

Et la faire rire vraiment pour la première fois depuis ce qu’elle jugeait avoir été une éternité. Mais elle trouvait tout de même amusant de l’imaginer vexé - et plus encore - par l’attitude d’une femme. Même si parler de cette femme n’avait de cesse de lui rappeler qu’elle n’avait rien à faire là.

— Vous venger ? releva-t-elle.
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Message par Coldris de Fromart Ven 7 Mai - 11:41


Et la voilà qui renchérissait sur Sarkeris. C’est vrai que ses propos pouvaient sembler étranges vus de l’extérieur pourtant ils étaient d’une logique implacable, et bien loin d’être malfaisant, c’était plus pour le protéger de lui-même que toute autre chose. Il savait qu’il s’en trouverait mal à l’aise d’avoir tenté de la séduire. Alors autant coupé court. D’autre part, si elle lui donnait son vrai nom, il saurait immédiatement de qui elle tenait son information.

— Je vous l’ai dit, ma luciole : il s’agit de mon fils. Et vous ne pourrez pas manquer la ressemblance entre nous.

Et il ne parlait pas uniquement de leurs traits familiers, mais bien de cet amour inconditionnel pour la gent féminine, de ce plaisir à séduire toutes les demoiselles qui passaient à leur portée. Coldris ne pouvait que se retrouver en lui lors de ses premiers pas à la capitale. Il était encore maladroit, titubant sur la terre ferme, mais il s’adapterait rapidement, il n’en doutait pas.

En fait, pour être tout à fait honnête, il en serait même sincèrement reconnaissant. Sa rencontre avec Bérénice avait été pour le moins marquante (et n’avait pas manqué de l’amuser), alors il pouvait affirmer sans la moindre hésitation qu’il apprécierait savoir qui était Éléonore.

D’autre fils, il avait le défunt Louis, amateur de lancer de hérisson. Une discipline pour le moins originale, mais sans doute pas la plus efficace pour une bataille rangée.

— L’impulsivité trouble bien souvent notre bon sens. C’est pourquoi il est si important de maitriser ses émotions.

L’issue avait sans doute été tragique pour ce pauvre hérisson qui aurait sans doute fini avalé par un blaireau ou un renard, un jour ou l’autre, pourtant elle lui avait été au fond bénéfique. Et c’était bien là le plus important : tirer des enseignements permettait d’avancer.

Il fallait éviter de regarder derrière soi. Chose qu’il était parfaitement incapable de faire dans ce lieu où le passé se superposait par moment au présent. C’était tout à la fois doux et douloureux de repenser à ces moments passés ici. Le pire étant qu’il ne pouvait s’empêcher de les évoquer afin de tourner la page. Il n’avait jamais raconté ses souvenirs à qui ce soit qui ne les ait connus à cette époque.
Sa remarque sur son fiancé le tira de ses pensées. Le prévenir ? En voilà une drôle idée tout de même. Quand bien même c’était là un mariage entièrement arrangé, il ne fallait pas sous-estimer l’orgueil des hommes.

— J’aurais plutôt tendance à dire que c’est là une sage décision.

Il se dirigea vers ce fameux buis qui avait été témoin du début d’une passion dévorante.


Mais ceux qui sont épris des plus célestes flammes
Ne sont haussés du trop et abaissés du peu,
Leur amour n’est enfant de peu de choses esmeu,
Rien ne le fait mourir : En ces heureuses âmes,
Sans espoir et sans bois vit l’amour et le feu.


Amour qui n’est qu’Amour – Agrippa d’Aubigné





Un feu dévorant qui avait tout réduit à l’état de cendres grises froides et sèches. Ce n’était pourtant guère à ces funestes pensées qu’il songeait en cet instant, mais bien à la fin de leur partie de cache-cache. Oh oui il avait été furieux, furieux et tout à fait charmer devant une telle audace. Éléonore commenta et bon joueur il ne put qu’en rire.

— L’amour tient parfois à peu de choses voyez-vous. déclara-t-il, ses yeux bleu sérac plissés d’amusement.

— Il faut croire que ce kleptomane trouve qu’il est bien difficile de résister à l’attrait lors des repas. Je ne saurais guère dire ce qu’il y a de pire entre voler un courrier personnel ou un pendentif ? Devrais-je en déduire qu’en plus de ses velléités chapardeuses, il en a les mains baladeuses ?

En parlant de correspondance, cela faisait le lien parfait avec sa petite vengeance qui avait suivi et qui trente ans après l’amusait toujours autant. Il se tourna vers elle, espiègle et après quelques secondes à se régaler de son regard brun, il expliqua :

— Je lui ai écrit une lettre pour le moins osée où je la laissais deviner d’où je l’avais rédigée…

Ses lèvres s’ourlèrent d’un malicieux sourire, le temps qu’elle envisage différentes possibilités

… un écritoire de porcelaine vénitienne, tout en courbe. Vous pouvez dire que je ne suis rien d’autre qu’un cruel goujat -et vous auriez sans doute raison-, en vérité, ce n’était là que pour la courroucer tout en lui rappelant que je ne pensais qu’à elle malgré toutes les autres.

Un petit rire s’échappa et il lui proposa son bras pour prendre le chemin du retour. Les jardins en hiver étaient affreusement tristes et moroses.

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Message par Éléonore de Fromart Ven 7 Mai - 13:47

Eléonore n’était pas certaine de ce qu’elle devait déduire de ces précisions. Mais si le problème était celui qu’elle soupçonnait, elle le comprendrait bien vite dès lors que le fameux Sarkeris se retrouverait sur son chemin. Alors, elle aurait bien aimé signaler à Coldris qu’il n’avait absolument rien à dire sur qui elle fréquentait ou non… Mais dans ce cas particulier, il fallait avouer que la situation eut été particulièrement dérangeante pour elle. De toute façon, si cela pouvait le rassurer, couvrir une aventure était déjà bien trop fastidieux pour qu’elle ne sache les multiplier actuellement, et honnêtement, c’était par son coeur qu’elle se laissait guider.

Un caprice comme un autre, peut-être. Comme celui qui transformait un enfant en catapulte à hérisson. Maîtriser ses émotions semblait beaucoup demander à un enfant de cinq ans, quand une adulte ne savait pas réprimer ses sentiments.

Eléonore se savait impulsive, parfois. Elle ne s’en débrouillait pas moins bien, avant. Quand elle savait encore réfléchir. A vrai dire, elle craignait qu’il ne soit pas judicieux d’avoir caché cette relation à Gabriel. Elle pouvait toujours prétendre qu’elle craignait de voir son courrier intercepté, mais cela n’avait pas de sens si ces détails devaient être écrits au lait.

— Je n’en sais rien, avoua-t-elle. Il risque d’être vexé de ne pas l’avoir su plus tôt.

L’ennui était bien qu’à Gabriel, elle ne pourrait pas mentir sur ses sentiments. Et s’il allait se figurer que cela lui faisait plus de mal que de bien de continuer à aimer un homme qui ne le lui rendrait jamais ? Et si, finalement, pour cela aussi il était nécessaire de se conduire en adulte responsable ? Etait-ce à cause de cela qu’elle n’en avait encore rien écrit ?

Oh, oui, l’amour tenait à peu de choses. Enfin, il naissait de peu de choses. Ou bien simplement de choses inexpliquables, d’une cause inconnue et on ne pouvait en repérer que les symptômes.

Mais elle faisait des comparaisons qui n’avaient pas lieu d’être. Pourquoi ne pouvait-elle pas s’empêcher de tout ramener à elle, pauvre idiote égocentrique et ridiculer qu’elle était ?! Pour faire oublier cet écart, elle le laissa embrayer sur sa fameuse vengeance.

Elle fronça les sourcils. Qu’avait-il encore inventé ? Non… Non, il n’avait pas… Eléonore se mordit les lèvres pour ne pas rire. Tout de même, son empathie la poussait à trouver cela… une idée relativement blessant. Enfin, ce devait dépendre du caractère de cette Aurélia, mais là, tout de même, il avait mis la barre haut.

Et malgré tout, elle avait eu de la chance. Elle, elle n’avait pas dû s’entendre répéter que seule une autre comptait. Mais Eléonore n’avait pas le droit de s’en plaindre, car il n’y avait qu’une seule personne responsable si elle ne savait pas contrôler son coeur.

— L’a-t-elle compris ? s’enquit Eléonore en acceptant de reprendre son bras.
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Message par Coldris de Fromart Lun 10 Mai - 14:12


Coldris ne comprenait pas pourquoi elle tenait tant à avertir son fiancé. Il ne pouvait rien en ressortir de bon. Elle aurait à peine prononcé son nom qu’elle se retrouverait surveillée si ce n’était pas complètement séquestrée chez elle.  Il n’aurait plus manqué qu’elle avoue le fréquenter depuis un mois et l’on aurait requis un examen pour s’assurer qu’elle soit bien intacte. Non, vraiment c’était mieux que l’on ignore qui elle voyait en secret.

— Il sera vexé de toute manière et vous finirez avec un chien de garde si ce n’est pas une ceinture de chasteté jusqu’à vos noces

Mais après tout c’était elle que tout cela regardait puisqu’elle était la première concernée par la chose. Si elle souhaitait se débarrasser de sa présence, il suffisait de chuchoter son nom comme une invocation pour que ses cerbères ne retroussent les babines dans un grognement sourd. Quant à lui, il avait passé l’âge de provoquer des duels. Il avait toujours été piètre épéiste et ces dernières années n’avaient guère arrangé les choses, au contraire, il devait être rouillé à souhait. Et si un malandrin ne viendrait sans doute pas à bout de lui, il n’en était pas aussi sûr d’un jeune coq entrainé. Déjà à l’époque, sa victoire contre Quentin n’avait tenu qu’à sa détermination supérieure et un peu de chance sans doute…

Et tout cela le ramenait à sa belle Aphrodite, ce jour de cache-cache qui l’avait lâchement abandonné après un baiser volé suscitant sa vengeance. Coldris observa la réaction de sa luciole, s’apprêtant à recevoir une bonne dose de récrimination par solidarité féminine, mais il n’y eut rien de tout cela. Au contraire, elle se pinçait les lèvres et à en juger par ses yeux pétillants ce n’était nullement de dégoût. Il n’y avait là qu’un amusement qu’elle tentait de conserver par tous les moyens ce qui illumina un peu plus le visage du vicomte. Il s’approcha de son oreille pour y chuchoter :

— S’il n’y a que cela pour vous faire plaisir, je peux certainement réitérer l’exploit. Je préfèrerais pourtant utiliser votre dos pour y écrire mes vers. avoua-t-il en laissant glisser son index le long de sa colonne vertébrale d’un sourire mutin.

Quant à savoir si elle l’avait compris, la question le fit rire. Il se souvenait parfaitement de leur discussion à ce sujet, juste après l’avoir surpris en train de fouiner dans son bureau.

— Sa première réaction fut de la bruler de rage. Ce qui était une sage décision comme j’ai déjà eu l’occasion de vous l’expliquer. Cela ne l’a pas empêché de venir à l’improviste diner chez moi. Certes plus tard qu’elle ne l’avait prévu. Toujours est-il qu’elle devait en être arrivée à cette conclusion, à moins que je ne sois à ce point irrésistible ? Qu’en pensez-vous Athéna à l’illustre sagesse ? demanda-t-il enjôleur en prenant le chemin du retour.

Le long de l’allée bordée de buis, de tilleuls et autres plantes assoupies, ils discutèrent ça et là, passant d’un sujet à l’autre au gré des mots qui s’invitaient entre eux. Lorsqu’il leva les yeux, la façade d’ordinaire couverte de vigne vierge leur faisait face. Coldris s’immobilisa en revoyant ses deux fenêtres, ses commissures se relevèrent et il indiqua l’étage.

— Vous vous souvenez de mes misérables exploits d’escalade ? C’était juste ici. Elle m’avait dit qu’elle laisserait la fenêtre ouverte pour que je puisse entrer. Lorsque je suis arrivé, il n’y en avait qu’une d’ouverte. Alors je suis monté, en me hissant à l’aide de la vigne jusqu’à l’allège pour entrer et… à sa plus grande stupéfaction c’est sa tante qui m’a accueillie ! il laissa échapper un petit rire en fait je ne sais pas lequel de nous deux était le plus surpris. Nous avons longuement discuté. Il fallait dire que ma chère mère de cœur prenait un malin plaisir à lire ma correspondance avec ma belle, si bien que je finissais par lui écrire des paragraphes entiers puis par lui écrire directement. C’est derrière cette fenêtre autour d’un café-whisky que tout a commencé. il souffla un nouveau petit rire Aurélia était furieuse de mon retard, alors je me suis offusqué en lui disant que j’avais atterri chez sa tante par sa méprise.

Et c’était comme ça qu’il avait gagné des excuses gênées et surtout un baiser. En réalité, heureusement que cette chambre avait été celle de Solange et non d’Isabelle. La situation aurait été bien plus gênante et il ne s’en serait pas tiré si facilement. Cette simple idée l’avait fait frissonner lorsqu’il avait vu la porte s’ouvrir sur une silhouette qui n’était pas celle de son Aphrodite.

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Message par Éléonore de Fromart Lun 10 Mai - 20:18

— Il n’aurait pas été vexé si je le lui en avais parlé. En revanche, sa méfiance à votre égard aurait pu être encombrante... admit-elle.

Parce que malgré tout, comme les autres, Gabriel avait fini par ne plus voir en elle qu’une gamine fragile et manipulable. Il avait fini par comprendre que sans Ariste, elle n’avait pas la moindre volonté, qu’elle avait perdu ses repères, qu’elle ne savait plus rien faire de bien. Mais il ne pourrait pas la priver de son dernier jour, pas lui. Et il ne saurait pas l’empêcher de voir Coldris s’il savait combien son coeur y tenait, si ? S’il voyait combien elle en était heureuse.

Oh, elle abandonnerait toutes les extravangances qu’il lui demanderait s’il n’y avait que cela pour le convaincre. Elle ne prendrait plus aucun autre risque s’il lui laissait profiter de celui-là, car c’était bien le seul qui comptait encore. Coldris… Coldris lui avait demander de ne plus le laisser, et tant qu’il ne changerait pas d’avis, ce n’était certes pas elle qui s’y opposerait. Gabriel devrait comprendre : elle voulait profiter de chaque moment qu’elle pourrait passer avec son merveilleux phénix.

Alors même que la probabilité était grande que tout finisse demain, elle parvenait à espérer que cela dure. Des mois, pourquoi pas des années ? Oh, sans-doute pas en se voyant aussi fréquemment qu’ils ne le faisaient actuellement, mais il suffisait de savoir que cela arriverait encore, non ?

Même l’entendre parler de la femme qu’il avait tant aimé était agréable pourvu que ce soit par sa voix. Même amusant, à vrai dire, pour cette dernière anecdote dont elle s’efforçait de ne pas rire. Parce qu’elle aurait sans doute dû trouver cela choquant, non ?

Tout comme ses suggestions alors qu’il retraçait la ligne de son dos. Malgré elle, cela lui faisait un coup au coeur. A qui préférait-il donc penser ? A qui volait-elle son temps et ses confidences ? Innocemment, elle chercha à s’éclairer sur ce point :

— Des vers que vous adresseriez à… ?

Mais sa réponse était déjà formée : elle ne l’aiderait pas à jouer avec la jalousie de qui que ce soit. La jalousie, c’était dangereux. Elle était bien placé pour le savoir, puisqu’elle avait manqué d’en mourir. Que d’une certaine manière, c’était une affaire de jalousie qui avait poussé Ariste à partir.

— Qu’en saurais-je ? A défaut d’être irrésistible, vous êtes suffisamment distrayant pour qu’une femme vous laisse une chance de vous racheter, le nargua-t-elle.

Sur quoi ils s’en retournèrent doucement vers le manoir, sans que rien ne se démarque dans leur conversation jusqu’à ce que Coldris fasse référence à une anecdote partagée au théâtre.

Le seul mot d’escalade fixa le regard de la jeune femme sur les murs. A travers les tiges de vigne vierge, elle repéra le chemin qu’elle aurait emprunté. Les prises dans la pierre semblaient bonnes, et elle pouvait presque sentir son poids balancer entre ses membres dans ce monde vertical. Un spectre d’extase s’empara d’elle, à cette intensité même qui savait lui montrer tout ce qu’elle en manquait sans en offrir la moindre satisfaction.

Elle secoua la tête, et chercha le regard de Coldris pour ne plus que de sien soit attiré par cette folie. Quelle drôle de rencontre il décrivait là ! Et curieuse correspondance qui la fit sourire.  

— Vous êtes impossible ! soupira Eléonore avec un dépit attendri lorsqu’il se vanta de sa mauvaise foi.

Son regard grimpa une nouvelle fois jusqu'aux fenêtres. Elle pouvait se mentir autant qu'elle voulait, quelque part, cela lui manquait.

— Avez-vous souvent dû grimper ainsi ? s'enquit-elle pour détourner ses pensées. Ce qui n'était peut-être pas la bonne technique.
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Message par Coldris de Fromart Mar 11 Mai - 22:07




Encombrante, c’était un euphémisme. Il ne fallait jamais sous-estimer les fiancés encore plus s’il ne l’était pas officiellement. Grossière erreur qu’il n’aurait plus l’orgueil de répéter contrairement à ses frasques épistolaires qui semblait l’amuser presque autant que lui. À tel point qu’il lui proposa d’utiliser son dos comme pupitre pour ses poèmes. Il aurait pu écrire le sien ainsi, lui dictant les vers au fur et à mesure qu’ils lui venaient. La question étant de savoir si elle résisterait à l’envie de bouger pour lui éviter toute rature ou encore s’il parviendrait au dernier vers avant qu’elle n’abandonne son rôle. Renverseraient-ils l’encre sur les draps immaculés ? Oh les pauvres lavandières le maudiraient de faire de telles tâches. « T’y crois pas qu’ils écrivent dans leur lit ces nobles ? C’est qu’leur table c’est qu’pour faire beau et après c’est qui qui frotte et s’détruit les bouts des doigts ?! ». À côté le sort de hérisson était finalement dérisoire et il dut se pincer les lèvres pour réfréner un rire qui s’estompa aussitôt que sa question tomba.

A qui ? Il attrapa son regard.
A qui ? Il ne pouvait pas…
A qui ? Lui dire. Il en avait déjà trop écrit.

— A qui? Doivent-ils être adressés à quelqu’un en particulier? Il ne s’agit pas d’une lettre après tout

Il allait renchérir en improvisant un quatrain mais la seule chose qui lui venait spontanément en observant les reflets de la lumière se mouvoir dans ses iris se rapportait à elle et à ses désirs d’exploration. Il referma les lèvres. Non. Tant pis, s’il ne trouvait rien d’autre, il garderait le silence.

— Si vous êtes si joueuse, vous n’aurez qu’à me donner des mots à faire rimer. Je m’y plierai volontiers.

Il espérait la détourner suffisamment de cette question pour ne rien dévoiler davantage. Et puisqu’elle le trouvait si distrayant, il lui vola un baiser avant de se mettre en route vers le manoir. Il se permit de lui raconter cette anecdote dont il avait laissé fuiter quelques indices au théâtre. Il n’avait pas manqué d’apercevoir son regard briller alors qu’elle contemplait la façade. Elle aimait donc réellement cela à ce point ? Un sourire s’étira avant qu’il ne reprenne son récit.

Oui il était impossible mais c’était pour cela qu’on l’aimait. Et il prenait cela pour un compliment. Après tout, sa vie n’en était-elle pas l’exacte démonstration ? Impossible, c’était ce que tout le monde disait tout haut ou tout bas lorsqu’il se plaisait à dire qu’il serait Premier Conseiller. Les mauvaises langues pourraient arguer que le contrat n’était pas rempli, certes. Il leur concéder volontiers ce point. Avec le recul, il appréciait cette position de pouvoir à l’ombre du Premier Conseiller qui lui servait de bouclier. Il suivit des yeux son regard grimper le long de la vigne.

— Certainement moins que vous. Je préfère m’arranger avec les domestiques. C’est nettement moins éprouvant. Vous voulez monter ? J’irai vous ouvrir la fenêtre si vous me promettez d’arriver entière.

Il avait déjà brisé le dos de son filleul et beau-fils, c’était amplement suffisant, mais si elle le souhaitait, il la laisserait volontiers escalader. En fait, il était même plutôt curieux de la voir à l’œuvre. Il lui ouvrirait la fenêtre de Solange, celle par laquelle il était rentré, ce soir-là. L’autre… L’autre, il ne voulait pas pousser la porte. Il n’y était jamais retourné depuis qu’elle était partie et il n’y retournerait jamais. Il était à peu près certain que rien n’avait bougé dans cette chambre.

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Message par Éléonore de Fromart Mer 12 Mai - 12:30

Coldris s’amusait de ses projets jusqu’à ce qu’elle cherche des précisions. Il sembla alors presque déstabilisé. P… Pourquoi ? Oh, ce n’était pas grave, c’était de sa faute. S’il ne voulait pas lui en dire davantage, elle le comprenait fort bien. Elle ne pouvait pas lui demander une confiance qu’elle-même ne se serait pas accordée.

Elle se laissa donc convaincre et acquiesça sans lui faire d’autres questions - parce que même un poème devait avoir une inspiration, de quel ordre qu’elle fut, et qu’elle aurait bien aimé savoir tout ce qui pouvait l’inspirer. Rien que pour ça, elle aurait pu se plier à ce caprice.

— Vous me feriez trouver des mots que vous seriez bien incapable de placer, avertit-elle, amusée.

Car elle était parfois cruelle lorsqu’il s’agissait de défis sans réelles conséquences. De ceux qu’elle-même relevait juste pour faire ravaler ce mot d’incapable, à l’époque où elle ne l’était point encore.

Il ne put s’empêcher de saisir ses lèvres avant de prendre le chemin du retour. Elle aimait à l’imaginer qui, à son âge, se hissait - sans doute fort maladroitement - le long de cette façade. Elle-même avait rarement droit à du whisky à l’arrivée, et à vrai dire, profiter de ses déplacements suffisait largement à la griser.

Elle écarquilla presque les yeux quand Coldris qualifia cette activité d’éprouvante. Cela ne l’était pas ! Pas du tout, même. Ce n’était pas assez haut pour être réellement fatigant, si ? Le plus périlleux était d’ailleurs de descendre.

— Voulez-vous monter ?

Son regard illuminé glissa vers le mur. Une part d’elle en avait follement envie. Mais n’avait-elle pas cherché la conversation précisément pour éviter d’être tentée ? Oh, il ne l’aidait vraiment pas… Non, elle ne voulait pas… Elle ne pouvait pas. La piste était fort attrayante, c’était bien vrai... Quelle meilleure raison pour s’en détourner ?

— J’arrive toujours entière, l’informa-t-elle.

Elle n’était jamais tombée - autrement, elle ne serait certainement plus là pour le dire. Mais les choses étaient différentes depuis qu’en pleine nuit, elle poussait sur la paroi pour se propulser dans le vide. Et elle se réveillait en se détestant pour avoir terni ce dont Ariste s’était servi pour la remotiver.

— Mais je n’en ai pas envie.

Ne plus regarder ce mur. Cela ne servait à rien. S’accrocher à son regard. Ne pas se laisser emporter par ses pensées qui menaient aux sanglots et ravivaient la douleur.

— Désolée de vous décevoir, s’excusa-t-elle sincèrement. Parce qu’elle était véritablement ennuyeuse, désormais. Ennuyeuse, inutile, lassante, désespérante, insupportable. Il avait existé une Eléonore différente, mais celle-là était déjà morte. Je n’y arriverais plus. Cela date d’une autre vie.
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Message par Coldris de Fromart Mer 12 Mai - 22:35




L’idée de trouver des mots sembla lui plaire. Tant mieux ! Le plaisir était partagé, en ce cas, et plus grande était la difficulté, plus grande était la satisfaction qui en découlait.

— Les défis n’existent que pour être relevés. J’espère que la récompense sera à la hauteur de la complexité ! rétorqua-t-il sur le même ton

Parce que la gloire et la fierté, c’était bien beau, mais parfaitement insuffisant pour nourrir sa volonté et tout juste suffisant pour abreuver son arrogance. En attendant, il pouvait toujours s’octroyer durant un bref instant ses lèvres. Si seulement tout pouvait être aussi simple et innocent qu’un jeu. Elle l’était, en quelque sorte. Un jeu cruel où il ne fallait pas perdre, car tous les échecs se payaient chèrement. Comme ce fameux jour où tout aurait pu affreusement mal tourner si ce n’avait pas été la chambre de Solange. Il n’aurait pas eu d’autres choix que de … Non, il ne voulait pas y penser. Il préférait de loin lui proposer de réitérer l’exploit puisqu’elle en avait les yeux émerveillés rien qu’à regarder la façade de pierre et de vignes mêlées.

On arrivait toujours entier, jusqu’au jour où l’on était plus là pour en témoigner, mais il lui faisait confiance et opina du chef avant qu’elle ne décline l’offre étonnamment.

— Vous n’aurez qu’à me prévenir lorsque vous en aurez envie.

Il croisa son regard troublé, houleux même. Il n’avait pas réellement besoin d'en savoir plus pour prendre ses épaules entre ses mains et en frotter doucement l’arrondi.

— Je ne suis pas déçu. Ce n’était qu’une proposition comme une autre parce que cela semblait vous plaire. il marqua une pause Vous savez, s’il y a bien une chose que j’ai apprise depuis toutes ces années c’est qu’il ne fallait jamais dire jamais.

Comme ne jamais tomber amoureux. Par exemple.
Et ne jamais retomber amoureux. Par exemple.

Quel genre d’idiot fallait-il être pour se laisser avoir deux fois après toutes ces années ? Une fois passait encore, mais deux ? Quel genre d’abruti fini y sautait joyeusement à pieds joints, si ce n’était un fou fini ? Oh oui, il était certainement fou. Érasme le disait lui-même après tout: Les fous regorgent d'argent, prennent le gouvernail de l'État et, en peu de temps, sur tous les points sont florissants. Il était fou. Fou amoureux et il ne s’était plus senti si vivant depuis des années. Elle le faisait revivre de ses cendres… Le temps suspendu par ses pensées, il en avait oublié ce qu’il voulait lui dire. Il lui fallut quelques secondes de plus pour reconnecter ses idées et revenir de là où il s’était égaré.

— Si cela vous plait viendra un jour où vous y arriverez, j’en suis persuadé. La volonté peut tout. Regardez-moi, j’en suis la preuve vivante. Combien on rit du garçon désargenté qui rêvait d’entrer au palais et de gouverner ? il caressa sa joue tendrement Construisez une nouvelle vie où vous pourrez faire tout ce dont vous rêvez, ma petite luciole.

Il déposa un baiser sur son front

— Que diriez-vous de rentrer nous mettre au chaud ? Je pourrais régler une partie de cette colossale dette si vous daignez m’accorder une partie d’échecs.

Et ils rentrèrent à l’abri du froid qui se faisait plus mordant sous la brise. Coldris la guida vers le salon de lecture situé dans l’une des anciennes tours du manoir. Ici, derrière les colonnades, se trouvait entre autres, une table dotée d’un beau jeu d’échecs en marquèterie et ivoire où se faisaient face deux confortables fauteuils aux motifs ornithologiques. D’un côté les grandes baies vitrées s’ouvraient sur les jardins, de l’autre était disposé quelques rafraichissements et en-cas sur une petite table, ainsi qu’un discret Léonilde. Il lui laissa choisir sa couleur, puis tira sa chaise afin qu’elle s’installe. La partie pouvait commencer.

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Message par Éléonore de Fromart Jeu 13 Mai - 13:41

Les défis n’existaient que pour être relevés. Un mode de pensée bien piégeux par lequel Eléonore s’était laissée happer dès le plus jeune âge. La récompense ? Elle ne répondit que d’un regard espiègle. Il verrait bien. Ou pas.

Le retour au manoir ramena la jeune femme au plus grand défi de sa vie. Celui d’un gamin sur son lit de mort qui n’avait rien trouvé de mieux à faire que de lui rappeler qu’elle n’était toujours pas arrivée au sommet de la Tourelle du Lion. Mine de rien, c’était cela qui l’avait été à surmonter son deuil. Non pas de se dire qu’il avait été pénible jusqu’au bout, non, mais bien d’avoir quelque chose à lui prouver, de là où il était. Mais tout cela, c’était grâce à Ariste, à son soutien et à sa confiance qu’elle y était parvenue. Ce dont elle était aujourd’hui dépourvue.

Ainsi, elle refusa cette montée. Oh, il pouvait être surpris : elle, cela lui serrait le coeur. Et plus encore lorsqu’elle crut l’avoir déçu. Elle ne voulait pas le perdre, pas pour si peu, au point même qu’elle hésita à revenir sur sa décision. C’est alors qu’elle sentit les mains de Coldris se poser sur ses épaules et chercher à la rassurer.

Elle s’accrocha à son regard. Un paradis bleu de réconfort. Il n’était pas déçu, vraiment ? Cela pouvait sembler sot - puéril ? - mais elle avait besoin de l’entendre. Besoin d’être sûre. Restait à espérer que cela non plus ne détruirait pas tout.

Oui, grimper lui plaisait mais… Comme elle le lui avait dit, elle ne pouvait plus. C’était terminé. Puisqu’il il précisait, elle s’abstint de préciser que ce le serait sans doute pour jamais. Car jamais elle ne se sentirait assez bien. Jamais elle ne retrouverait cette force qu’elle avait autrefois et qu’elle prenait pour acquise.

Mais après tout, elle avait aussi pensé que le monde ne retrouverait jamais aucunes couleurs, or, il y avait ce bleu qui semblait être la plus belle couleur au monde - sauf pour les vêtements. Elle s’y perdait en s’y retrouvant, s’y noyait pour mieux respirer. Parce qu’il avait cette curieuse sincérité d’autant plus frappante qu’elle l’avait vu glacial et impénétrable.

Elle ne parvenait à rien dire. Elle voulait le croire, tellement. Et d’une manière ou d’une autre, il la ramenait à un rare apaisement. Elle dut seulement résister à l’impulsion de l’étreindre. De le presser contre son coeur, de lui dire tout ce qu’elle ressentait et combien il était merveilleux. Elle ne voulait pas qu’il sache, pas que cela gâche tout.

Heureusement, il reprit la parole avant qu’elle n’y cède. Pour dire qu’elle y arriverait. Qu’il en était persuadé. Oui, seulement, c’était justement de cette volonté qu’on l’avait privée. Elle n’en avait aucune pour elle-même. Cela ne servait à rien si on ne pouvait la partager. Et même la fièvre des hauteurs n’aurait été qu’aigreur si personne n’était là pour le vouloir.

Elle couvrit la main qui caressait sa joue, les yeux toujours plongés dans les siens. Oh, cela, certainement. Personne n’avait dû le prendre au sérieux - à quelques exceptions près. Il avait bien plus de force qu’elle n’en aurait jamais, mais elle ne voulait pas le décevoir. Elle voulait être digne de sa confiance, et de cette certaine affection qu’il lui accordait.  

Elle avait scellé ses lèvres pour ne pas le contredire. Pour ne pas lui rappeler qu’elle n’avait rien de sa volonté. Qu’elle n’avait rien du tout, tout simplement. Elle ne pouvait pas construire une nouvelle vie dans laquelle elle grimpait, car cela avait déjà existé. Car elle l’avait perdue. Car elle ne voulait plus. Car...

— Je ne suis pas prête, avoua-t-elle d’une petite voix. Et pourrait-elle seulement l’être un jour ? “Un jour” existerait-il seulement ? C’était ce qu’Ariste voulait, et pourtant, elle ne trouvait plus la force.

Elle sourit quand les lèvres de Coldris touchèrent son front. Pour lui, elle pouvait ne plus y penser. Elle pouvait se laisser tenter par une autre activité datant d’une autre vie.

— Eh bien… Je dois pouvoir vous aider à rembourser tout cela. Après tout c’est un peu de ma faute si vous vous retrouvez couvert de dettes.

oOo

— Echec et mat, annonça Eléonore en essayant de ne pas sourire.

Elle baissa un instant les yeux sur ses mains nues. Elle avait hésité à retirer ses gants. Finalement, elle n’avait pas passé sa seconde paire, celle qu’elle portait à l’intérieur. Elle avait craint que l’idée qu’il puisse voir encore ses mains ne la déconcentre, mais cela aussi avait rapidement disparu, son esprit étant complètement accaparé par son activité.  

Elle soupira, et secoua la tête pour revenir à son état normal. Elle avait toujours trouvé que tante Anne faisait peur quand elle conservait son “visage de stratège” après la partie. Au départ, c’était même effrayant de la voir jouer. On aurait cru avoir affaire à une personne différente tant son regard était froid, tant ses traits perdaient leur douceur. Et la femme la plus compréhensive et gentille que l’univers eu porté, celle qui n’aurait jamais laissé tombé personne et se souciait du bonheur de tout le monde, se transformait en un monstre de manipulation. Le pire pour Eléonore avait été de comprendre qu’elle avait une attitude similaire dès qu’elle se retrouvait devant le plateau. Ce n’était qu’un jeu, et des pièces sans vie qui n’inspiraient, par leur nature, aucune compassion. Alors, tout était permis.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 13 Mai - 17:33




Un jour elle se sentirait prête à recommencer, il en était persuadé, comme lui-même avait fini par oser survivre. Dire qu’il était le même et que rien n’avait changé aurait été cruellement mentir. Sa vie avait pris un tournant à cent quatre-vingts degrés depuis et elle n’avait jamais retrouvé la légèreté des années précédentes.

La partie fut longue et acharnée. Coldris devait admettre qu’elle était une adversaire redoutable. Plus d’une fois, il avait dû changer de stratégie en cours de route pour la perdre et tenter de reprendre l’avantage. Derrière la baie vitrée, les derniers rayons cuivrés du soleil mourraient entre les silhouettes noiraudes des arbres dégarnis, lorsqu’elle prit finalement son roi.

Coldris se renfrogna en observant son roi à terre. Il avait pourtant tout calculé. Enfin, c’était ce qu’il pensait jusqu’à ce qu’il réalise qu’il avait oublié une bête possibilité. Une erreur qui coutait cher dans une finale de pions où chaque coup pouvait sonner le glas. Il soupira.

— C’est parce que je vous ai laissé les blancs. Les blancs sont avantagés, tout le monde sait cela, mais je vous fais grâce de cette première victoire.

Il remit fièrement d’aplomb son roi noir.

— Et puis pour tout vous dire, j’ai sacrifié ce pion uniquement pour vous laisser la victoire. J’aurais pu continuer et remporter la partie au tour suivant, mais je ne voulais pas froisser ma charmante invitée en remportant cette première partie. mentit-il effrontément.

Il n’allait tout de même pas admettre qu’il avait stupidement perdu en oubliant de prendre en compte ce coup qu’elle avait choisi spécifiquement. Et dire qu’il avait verrouillé toutes les issues possibles ! Ah il avait tout de suite compris en la voyant saisir ce pion précisément. Il avait masqué sa frustration mais elle avait tout de même était là en réalisant qu’il venait de signer son arrêt de mort. Coldris vida le fond de son verre de Porto. Il n’allait pas admettre avoir perdu. Ou encore qu’il jouait très rarement depuis la mort de son partenaire de jeu, Bérénice ne remontant qu’une fois l’an généralement. Il avait encore en mémoire toutes ses parties avec son ami. Celles qu’il avait gagné loyalement, celles où il s’était joué de lui et… Celles où il s’était fait lamentablement écraser.

— Bien, puisque nous n’avons pas le temps de vous laisser réellement gagner avant le diner, je vous propose de vous accompagner jusqu'à vos appartements, qu'en dites-vous ? Vous souhaitez sans doute vous reposer ou tout du moins cesser de m'écouter palabrer. Si vous le désirez, l’on vous fera porter de l’eau pour votre bain.

Il avait grand besoin de s’immerger entièrement dans une eau bouillante pour oublier cet échec cuisant. En même temps il n’avait joué que deux fois en un an et demi. Il était forcément un peu rouillé, non ? Ce pion… Ce maudit pion… C’était bien pour cette raison qu’il fallait toujours se méfier des simples pions qui n’étaient rien d’autre qu’une arme redoutable.

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Message par Éléonore de Fromart Jeu 13 Mai - 19:15

Eléonore eut envie d’éclater de rire en voyant l’air boudeur du grand ministre devant une défaite qu’il ne semblait pas avoir anticipée. Sa mauvaise foi l’empêchait-elle même de voir sentir venir la fin ?

Elle fronça les sourcils quand il affirma que sa couleur l’avait fait gagner. C’était un jour impair, aujourd’hui. Les jours impairs, elle jouait la première avec les blancs - et les jours pairs avec les noirs. C’était ce qu’elle avait déterminé avec sa tante pour ne plus se poser de question et, quand Coldris lui avait demandé de choisir sa couleur, le réflex lui était venu naturellement, voilà tout.

— Donc, si je comprends bien, vous ne savez pas gagner sans commencer avec un avantage ? le taquina-t-elle. Comme c’est fâcheux !

Il n’était pas le seul qui savait détourner ce que les autres disaient, d’abord ! Il pouvait bien redresser son roi, les choses étaient faites : il avait perdu, point final. Et non, il n’avait pas fait exprès de perdre. Et non, il n’aurait rien pu gagner au tour suivant, avec ou sans ce fichu pion. Elle voyait bien ce qu’il avait essayé de faire et savait déjà quelle réaction elle aurait eue. Et à celui d’après aussi si cela s’était enchainé de cette manière. S’il la laissait gagner, c’eut été en testant ses réactions depuis le début, mais elle en doutait très fortement.

— Parce que vous ne me pensez pas capable de gagner pas moi-même ? C’est dommage : j’aurais bien voulu vous en consoler mais si vous avez vous-même choisi de perdre, je n’ai aucune raison de prendre cette peine, pas vrai ? répliqua-t-elle avec ce sourire qui assurait qu’elle n’en était vraiment pas dupe.

L’avantage des jeux - et surtout des victoires - était qu’ils rendaient une certaine assurance qui l’éloignait de la réalité désespérante dans laquelle elle n’était qu’une idiote inutile, ennuyeuse et ridicule. Et puis - il ne fallait pas croire qu’elle avait gagné dans le but de le manipuler, elle répugnait à cette idée, mais - remporter la première partie retenait son attention. A moins d’un conflit majeur, Coldris de Fromart ne pourrait pas rester sur une défaite. Elle n’aurait pas pu non plus, à vrai dire. Il ne la lâcherait pas avant sa revanche. Donc à moins d’une catastrophe, elle avait désormais plus que tout ne se finisse pas demain matin - car il était hors de question de rejouer maintenant.

Et Coldris semblait assez d’accord avec cette idée. Elle, en revanche, ne l’était absolument pas avec ce qu’il supposait. Elle adorait l’écouter. Elle n’avait aucune raison de vouloir s’éloigner de ses discours, c’était absurde. Enfin… Il devait avoir besoin de temps pour laisser passer ses râleries de mauvais perdant.

— Oui, ou bien peut-être que je vais juste ressasser ma victoire qui rend le grand Coldris de Fromart si grognon, ajouta-t-elle avec un sourire jusqu’aux oreilles.

On appelait cela enfoncer le clou. Elle n’avait pas l’habitude de fanfaronner, mais la mauvaise foi dont il faisait preuve rendait la chose irrésistible. Mais… Même s’il boudait un peu, il ne lui en voudrait pas trop, n’est-ce pas ? C'était juste pour jouer.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 13 Mai - 22:40




Coldris n’aimait pas perdre. Et ce qu’il détestait par-dessus tout était de perdre à cause d’une vulgaire erreur de calcul. Ce n’était pas une question de chance, non, c’était une négligence de sa part. La fin avait été serrée et il avait malheureusement laissé une faille dans laquelle elle s’était engouffrée. D’ailleurs, il se demandait bien à quel moment il en avait fait de même de son cœur, car soyons honnête, pourquoi avait-il fallu qu’il cède après vingt-huit ans ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi ? Avec toutes les femmes qu’ils avaient rencontrées durant toutes ces années pourquoi avait-il fallu qu’il finisse par céder ?

— Oh non vous n’avez pas compris. Ce que je voulais dire, c’est qu’une vraie victoire ne pouvait être concédée qu’avec les noirs.

Raison pour laquelle il s’agissait de sa couleur favorite. En même temps, sa petite brebis, sa blanche colombe, ne pouvait que prendre les blancs. Ce qui en conclusion signifiait qu’elle ne pourrait sans doute jamais gagner pleinement contre lui.

— Je vous remercie, mais je ne suis plus un enfant qui a besoin d’être consolé. Et de toute façon je l’ai bien rarement été alors inutile de vous inquiéter pour moi. s’agaça-t-il.

Isis l’avait consolé quelques rares fois, mais elle avait surtout pansé ses plaies. Coldris se plaignait rarement et pleurait encore plus rarement. Chacune de ses innombrables fois n’avait fait qu’alimenter sa rage en le poussant à se surpasser pour les écraser tous autant qu’ils étaient comme de misérables et répugnantes blattes. Et tout ceci avait été infiniment plus douloureux qu’une vulgaire partie d’échecs perdue par inadvertance.

Il aurait tout le loisir de prendre sa revanche, comme il avait pris sa revanche sur la vie que l’on avait voulu lui imposer. Ce n’était qu’une question de temps désormais. Là, tout ce qu’il souhaitait, c’était de disparaitre sous un bon chaud qui calmerait le sang qui pulsait dans ses tempes. Et elle ne cessait d’en rajouter en plaisantant ce qui ne faisait que l’agacer plus encore.

— Vous n’aurez qu’à la ressasser au portrait de ma mère, je suis sûre qu’elle appréciera. grogna-t-il en quittant le salon.

Elle n’aurait qu’à demander à Léonilde de finir la visite pour lui. Cela lui apprendra à en rajouter. Lui au moins ne renversait pas la table comme son cher cousin qui avait réussi à perdre un évêque, ce à quoi Coldris avait rétorqué qu’il n’avait qu’à prendre sa place sur le plateau dans ce cas. Un sourire s’esquissa à ce souvenir tandis qu’il empruntait l’escalier jusqu’à sa chambre, située juste au-dessus du champ de bataille à damier.

* * *

Coldris s’immergea entièrement une énième fois dans l’eau chaude et resta ainsi, les yeux clos dans cet univers aux bruits étouffés avant de souffler l’air contenu de ses poumons qui remonta à la surface sous forme de bulles qui éclatèrent instantanément. A son tour, il remonta à la surface et entreprit de se laver de cet affront en même temps que le reste. Il frotta chaque parcelle de son corps, y compris ce dos lacéré de toute part qu’il haïssait autant que celui qui avait porté les coups. Ses doigts glissèrent sur les renflements de ses multiples cicatrices, comme une terre craquelée et dévastée. Il savait déjà que pour elle, il enlèverait cette chemise qu’il prenait toujours soin de garder. Il l’avait décidé au théâtre. Ce soir-là, si tout s’était déroulé comme prévu, il n’aurait gardé que sa croix et se serait montré avec toutes ses imperfections, toutes ses failles et tout son passé gravé ad vitam eternam dans la chair rosée de son dos. Ses mains remontèrent jusqu’à ses omoplates. Dire qu’il ne craignait pas de croiser son regard lorsqu’elle découvrirait cela aurait été mentir, mais il ne voulait pas et ne pouvait pas le lui cacher.

D’ailleurs, il n’avait toujours pas décidé ce qu’il allait faire ce soir. Ou plutôt dire. Une partie de lui voulait toujours écouter les conseils de Thierry et lui faire confiance quand l’autre ne cessait de le freiner des quatre fers usant de différents arguments tous plus séduisants les uns que les autres. Il ne pouvait pas nier qu’il craignait autant d’en souffrir que de faire souffrir. Il y aurait toujours quelque part, cette épée de Damoclès prête à trancher le fil qui les liait. Sans parler du fait qu’il ignorait ce qu’elle ferait s’il venait à lui avouer. Elle pouvait tout aussi bien disparaitre. Après tout, c’était idiot et presque cruel de lui avouer cela alors qu’elle devait se fiancer et… rentrer à Tianidre. Là-bas. Le plat de sa main frappa l’eau, provoquant des remous. Quoi qu’il en soit, tout se terminerait prochainement, alors à quoi bon ? Il soupira puis s’immergea une ultime fois avant de s’enrouler dans un drap de lin blanc.

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Message par Éléonore de Fromart Ven 14 Mai - 13:05

Un tel condensé de mauvaise foi existait-il vraiment ? Oh, Eléonore ne l’en aimait pas moins, mais quelque chose de profondément ancré en elle la poussait à la souligner dès qu’il en faisait preuve. Il ne concéderait la victoire qu’avec les noirs, vraiment ?

— Alors je prendrai les noirs pour la prochaine, décréta-t-elle naturellement.

Après tout, pour elle, c’était pareil. Mais juste parce que c’était lui, s’il gagnait, elle lui ferait remarquer que cela n’avait pas réellement été le cas puisqu’il aurait eu les blancs.

Et… Il savait bien que ce n’était pas ce qu’elle voulait dire… Elle se concentra sur le poids de son pendentif jusqu’à ce qu’il annonce la suite et… Non, elle n’avait vraiment pas pu s’en empêcher. Elle s’efforça de ne pas le rattraper pour s’excuser lorsqu’il décida de partir en maugréant.

— Râlez autant que vous voudrez, mais cette fois, ce sera à votre tour d’écrire ! prévint-elle tant qu’il pouvait l’entendre.

Idiote ! Elle était vraiment trop idiote. Elle se tourna vers Léonilde et après une brève hésitation, lui demanda :

— Pourriez-vous m’indiquer les appartements en question ? Puis, prise d’un doute : Ou faire prévenir Jean s’il est préférable que je parte...
Éléonore de Fromart
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Aristocratie

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