[10 Janvier 1598] Ultime jour
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[10 Janvier 1598] Ultime jour
Les cloches de l'église Saint-Eustache sonnèrent neuf heures lorsque Thierry sortit de son profond sommeil dans lequel il était tombé dès le moment où ils étaient revenus. Quelle mauvaise journée que celle de la veille ! Est-ce Beckie qui aurait manigancé toutes ces mésaventures ? Ce serait bien son genre. Rien que pour le voir s'agacer. Beckie... Les souvenirs de sa petite sœur refaisait surface. Il se remémorait son absence, de cette dernière rencontre en cellule, agenouillés sur un dallage glacial, sans savoir qu'elle pensait à se tuer dans la nuit. Ses pensées s'embrouillaient. La culpabilité reprenait le dessus et l'empêchait de raisonner à nouveau avec clarté. Il devait enfermer ces idées tumultueuses qui se refusaient à le lâcher et qui obscurcissaient son âme.
Rapidement, il quitta le lit et pressa le pas vers la table. Le pichet d'eau l'attendait, accompagné de pain frais et de confiture. Le laudanum dans sa poche le démangeait. Il lui tardait d'absorber les trois gouttes libératrices qui canaliseraient ses émotions et ordonneraient sa raison mais ce serait mauvais de les avaler à jeun. Il s'assit et réalisa une tartine de confiture de fraises. Tout en la mangeant, son regard se promena dans la cellule. Lucinde n'était pas présente ? Etrange. Normalement, elle aurait dû être là pour le sortir du lit à grands coups de pieds dans les fesses. S'était-elle endormie quelque part ? Non, cela ne faisait pas partie de es habitudes. Dans ce cas, un badaud avait dû l'accaparer, sans doute pour connaître l'horaire de la messe. La messe... Un rictus lui vint au souvenir des deux imbéciles qui les avaient importuné hier. Ils lui avaient donné une magnifique idée d'homélie. Elle serait une de ses dernières mais resterait inoubliable.
Après une seconde tartine, Thierry se versa un verre d'eau et se saisit avec délicatesse de sa précieuse fiole. Il compta précision trois gouttes et la rangea dans la poche intérieurement de sa chemise, sous sa soutane. Il mélangea le contenu et s'apprêta à boire.
Rapidement, il quitta le lit et pressa le pas vers la table. Le pichet d'eau l'attendait, accompagné de pain frais et de confiture. Le laudanum dans sa poche le démangeait. Il lui tardait d'absorber les trois gouttes libératrices qui canaliseraient ses émotions et ordonneraient sa raison mais ce serait mauvais de les avaler à jeun. Il s'assit et réalisa une tartine de confiture de fraises. Tout en la mangeant, son regard se promena dans la cellule. Lucinde n'était pas présente ? Etrange. Normalement, elle aurait dû être là pour le sortir du lit à grands coups de pieds dans les fesses. S'était-elle endormie quelque part ? Non, cela ne faisait pas partie de es habitudes. Dans ce cas, un badaud avait dû l'accaparer, sans doute pour connaître l'horaire de la messe. La messe... Un rictus lui vint au souvenir des deux imbéciles qui les avaient importuné hier. Ils lui avaient donné une magnifique idée d'homélie. Elle serait une de ses dernières mais resterait inoubliable.
Après une seconde tartine, Thierry se versa un verre d'eau et se saisit avec délicatesse de sa précieuse fiole. Il compta précision trois gouttes et la rangea dans la poche intérieurement de sa chemise, sous sa soutane. Il mélangea le contenu et s'apprêta à boire.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Quelque chose ne tournait plus rond depuis quelques jours. Lucinde avait déjà nourri des soupçons, sans savoir à quoi les attribuer. C’était sans doute sot : elle avait l’impression qu’on lui cachait quelque chose. Se levant de bonne heure, elle avait fouillé le bureau - l’église entière, même - afin de vérifier qu’il n’avait pas réussi à se réapprovisionner en bouteilles. Rien. Mais au fond, ce temps n’était pas si perdu : au moins, elle savait que la question n’était pas là.
En revenant vers la cellule, peut après que les neuf heures eurent sonné, l’ancienne sage-femme entendit que Thierry s’était levé. Par instinct, elle ne se montra pas, et attendit en l’observant de loin. C’est alors qu’elle surprit le méfait.
En était-ce vraiment un ? A vrai dire, ce n’était pas la question. Le problème était bien qu’il ait besoin de se cacher. Elle entra donc immédiatement dans la cellulle, et avant qu’il n’ait le temps de boire, demanda sans préambule :
— Qu’avez-vous versé là-dedans ?
En revenant vers la cellule, peut après que les neuf heures eurent sonné, l’ancienne sage-femme entendit que Thierry s’était levé. Par instinct, elle ne se montra pas, et attendit en l’observant de loin. C’est alors qu’elle surprit le méfait.
En était-ce vraiment un ? A vrai dire, ce n’était pas la question. Le problème était bien qu’il ait besoin de se cacher. Elle entra donc immédiatement dans la cellulle, et avant qu’il n’ait le temps de boire, demanda sans préambule :
— Qu’avez-vous versé là-dedans ?
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Tout en mordant dans sa seconde tartine de confiture, les souvenirs affluaient. Il se revoyait le matin, dans la salle à manger du château d'Anjou, à plaisanter avec Beckie tout en avalant des tartines. Ils discutaient joyeusement, de leurs rêves ou de leurs projets pour la journée. Son coeur se serra. Elle lui manquait. Elle lui manquait tant. Il secoua la tête. Il devait arrêter de s'accrocher au passé. Elle était morte. Il ne pouvait rien y faire.
Mais il aurait pu.
Il secoua la tête. Tout avait été un enchainement de conséquences sur des faits qu'il ne maitrisait pas. Il ne pouvait rien y faire. Quoique... S'il avait chercher à confirmer le décès de Beckie. On lui avait appris ceux de sa mère, son père et son frère aîné. Tout avait été consigné dans des déclarations judiciaires du fait du caractère peu naturel de leur mort. Sa sœur n'apparaissait nulle par. Il aurait dû comprendre. Il aurait dû se poser des questions. Mais il n'avait rien fait. Il avait été lâche. Comme pour Rosina. Comme pour Alex.
Ses pensées s'embrouillaient, imprégnées de ces émotions tumultueuses. Elles le ramenaient vers le fond. Vers le pire. Il devait les chasser. Tout de suite. Il sortit sa précieuse fiole et compta les trois précieuses gouttes avant de la ranger en sûreté. Sa main fit légèrement tourner le verre pour mélanger le laudanum à l'eau. Bientôt, sa raison reviendra. Il louerait longtemps son ami pour ce fabuleux remède qu'il lui avait prescrit. C'était un vrai miracle. Bien plus efficace que les prières et les pénitences.
Sa main leva avec fermeté le verre et il s'apprêta à le boire quand la voix de Lucinde résonna. Il sursauta et l'observa s'approcher pour demander des comptes.
"De l'eau, bien sûr."
Sur cette réponse, il s'empressa de vider le verre.
"Vous ne savez plus reconnaître d'eau, ma pauvre Lucinde ? Ce doit être la fatigue."
Son sourire s'étira. Il avait bien envie de jouer. Rien de tel que pour se mettre de meilleure humeur.
Mais il aurait pu.
Il secoua la tête. Tout avait été un enchainement de conséquences sur des faits qu'il ne maitrisait pas. Il ne pouvait rien y faire. Quoique... S'il avait chercher à confirmer le décès de Beckie. On lui avait appris ceux de sa mère, son père et son frère aîné. Tout avait été consigné dans des déclarations judiciaires du fait du caractère peu naturel de leur mort. Sa sœur n'apparaissait nulle par. Il aurait dû comprendre. Il aurait dû se poser des questions. Mais il n'avait rien fait. Il avait été lâche. Comme pour Rosina. Comme pour Alex.
Ses pensées s'embrouillaient, imprégnées de ces émotions tumultueuses. Elles le ramenaient vers le fond. Vers le pire. Il devait les chasser. Tout de suite. Il sortit sa précieuse fiole et compta les trois précieuses gouttes avant de la ranger en sûreté. Sa main fit légèrement tourner le verre pour mélanger le laudanum à l'eau. Bientôt, sa raison reviendra. Il louerait longtemps son ami pour ce fabuleux remède qu'il lui avait prescrit. C'était un vrai miracle. Bien plus efficace que les prières et les pénitences.
Sa main leva avec fermeté le verre et il s'apprêta à le boire quand la voix de Lucinde résonna. Il sursauta et l'observa s'approcher pour demander des comptes.
"De l'eau, bien sûr."
Sur cette réponse, il s'empressa de vider le verre.
"Vous ne savez plus reconnaître d'eau, ma pauvre Lucinde ? Ce doit être la fatigue."
Son sourire s'étira. Il avait bien envie de jouer. Rien de tel que pour se mettre de meilleure humeur.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
De l’eau ! De l’eau ! Oui, cela, elle l’avait vu, mais encore ? Il pouvait bien vider son verre déraisonnablement vite, cela n’y changeait rien. A son froncement de sourcils dubitatif, Thierry ne fit que renchérir, mais elle ne s’en laissa point agacer. Elle ne lui accorderait pas cette satisfaction. Elle soutint son regard, imperturbable.
— Tout à fait. Mais j'avoue éprouver quelques difficultés à comprendre l’utilité de remplir une petite fiole d’eau pour en laisser tomber quelques gouttes dans un verre contenant lui aussi de l’eau. Peut-être cela est-il aussi dû à la fatigue.
Elle voulait bien admettre que certains détours puissent échapper à son esprit pratique, mais celui-là relevait de l’absurde même. Et même si ce curé n’était pas parangon d’intelligence, elle ne l’estimait pas encore si bas… pour l’instant.
— Tout à fait. Mais j'avoue éprouver quelques difficultés à comprendre l’utilité de remplir une petite fiole d’eau pour en laisser tomber quelques gouttes dans un verre contenant lui aussi de l’eau. Peut-être cela est-il aussi dû à la fatigue.
Elle voulait bien admettre que certains détours puissent échapper à son esprit pratique, mais celui-là relevait de l’absurde même. Et même si ce curé n’était pas parangon d’intelligence, elle ne l’estimait pas encore si bas… pour l’instant.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Thierry contemplait Lucinde s'énerver avec un certain plaisir. Rien de tel que cette scène pour chasser ses vilaines humeurs. Elle avait manifestement bien observé ses gestes. Cela ne servirait à rien de nier. Il haussa alors les épaules.
"C'est un médicament."
Son sourire s'étira alors qu'il se releva.
"Une vigoureuse potion mis au point par le grand sorcier Coldris de Fromart ! Vous souhaitez en informer l'inquisiteur Cassain ?"
La scène aurait de quoi être cocasse et il y avait à parier que Matthieu s'énerverait à la simple mention que l'infirmation émanait de la bouche du bon père Thierry. Quel pauvre homme ! A s'emporter sans cesse comme cela, pour tout prétexte, il finirait par rejoindre le Seigneur dans une crise d'apoplexie.
"Malheureusement, je doute qu'il vous écoute. Il ne trouve pas ma parole recevable. Quelle tristesse ! Quelle profonde tristesse !"
Il dépassa Lucinde et se dirigea vers la porte de la cellule.
"Je crois avoir une messe à dire."
"C'est un médicament."
Son sourire s'étira alors qu'il se releva.
"Une vigoureuse potion mis au point par le grand sorcier Coldris de Fromart ! Vous souhaitez en informer l'inquisiteur Cassain ?"
La scène aurait de quoi être cocasse et il y avait à parier que Matthieu s'énerverait à la simple mention que l'infirmation émanait de la bouche du bon père Thierry. Quel pauvre homme ! A s'emporter sans cesse comme cela, pour tout prétexte, il finirait par rejoindre le Seigneur dans une crise d'apoplexie.
"Malheureusement, je doute qu'il vous écoute. Il ne trouve pas ma parole recevable. Quelle tristesse ! Quelle profonde tristesse !"
Il dépassa Lucinde et se dirigea vers la porte de la cellule.
"Je crois avoir une messe à dire."
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Un médicament… Oui, bon… C’était une façon de voir les choses. Elle n’était pas certaine de ce dont il s’agissait, mais toutes les hypothèses qui lui venaient lui déplaisaient.
Thierry pouvait bien sourire et se pavaner autant qu’il le voulait, et faire son intéressant, les faits étaient les faits. Et les faits étaient également qu’il était plus que probable qu’il ait effectivement eu cette fiole à Fromart : le seul endroit où elle ne l’avait pas surveillé. Ce qui signifiait sans doute qu’elle n’avait pas plus à en dire. Tant mieux, cela faisait une préoccupation de moins.
Honnêtement ? Non, si elle avait dû prévenir l’inquisiteur, c’eut été pour le reste des documents qu’il avait trouvés. Pour quelque chose d’utile et de concret.
Elle hésita un instant. Cela ne relevait peut-être plus de son autorité, mais son devoir était quand même de l’empêcher de déraper. Elle saisit fermement son bras alors qu’il annonçait avoir une messe à dire.
— N’abusez pas de ça, rappela-t-elle avec autorité. Et, par acquis de conscience, elle précisa : Si je me souciais assez de vous, je vous éloignerais de cette chose avant que vous ne perdiez pieds. Mais je suppose que même si je vous dit que choisir la solution lâche ne mène nulle part, vous le feriez quand même, n’est-ce pas ?
Car oui, il s’agissait là de lâcheté. D’une faiblesse. D’une bêtise. Ce genre de produits auraient dû être réservés aux cas d’extrème nécessité, pas à des caprices. Cet imbécile de prêtre ne faisait là que se créer de nouvelles difficultés atténuant temporairement des symptômes.
Thierry pouvait bien sourire et se pavaner autant qu’il le voulait, et faire son intéressant, les faits étaient les faits. Et les faits étaient également qu’il était plus que probable qu’il ait effectivement eu cette fiole à Fromart : le seul endroit où elle ne l’avait pas surveillé. Ce qui signifiait sans doute qu’elle n’avait pas plus à en dire. Tant mieux, cela faisait une préoccupation de moins.
Honnêtement ? Non, si elle avait dû prévenir l’inquisiteur, c’eut été pour le reste des documents qu’il avait trouvés. Pour quelque chose d’utile et de concret.
Elle hésita un instant. Cela ne relevait peut-être plus de son autorité, mais son devoir était quand même de l’empêcher de déraper. Elle saisit fermement son bras alors qu’il annonçait avoir une messe à dire.
— N’abusez pas de ça, rappela-t-elle avec autorité. Et, par acquis de conscience, elle précisa : Si je me souciais assez de vous, je vous éloignerais de cette chose avant que vous ne perdiez pieds. Mais je suppose que même si je vous dit que choisir la solution lâche ne mène nulle part, vous le feriez quand même, n’est-ce pas ?
Car oui, il s’agissait là de lâcheté. D’une faiblesse. D’une bêtise. Ce genre de produits auraient dû être réservés aux cas d’extrème nécessité, pas à des caprices. Cet imbécile de prêtre ne faisait là que se créer de nouvelles difficultés atténuant temporairement des symptômes.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Thierry 'apprêtait à passer la pore, lentement, mais prenait le temps d'apprécier la réaction que ses interventions déclenchaient en Lucinde. Elle restait toujours aussi imperturbable. Rien ne semblait l'énerver. Sauf peut-être les dessins au mur. Et s'il en recommençait dans le clocher ? Il lui suffirait de s'éloigner avec un fidèle, quelqu'un d'a peu près sûr, tenir un début de conversation personnelle entre eux histoire de garder Lucinde en retrait. Elle n'oserait pas approcher si l'individu confierait des tourments sur son mariage ou l'un de ses enfants. Puis, il ne leur resterait plus qu'à réaliser de beaux graffitis. Comme ce serait amusant !
Lucinde lui conseilla alors de ne pas abuser de son remède miracle. Il répondit dans un rire sans joie.
"Je sais. Mon médecin m'a déjà tout expliqué de cela."
Il fronça les sourcils devant la suite. Elle le jugeait lâche, une fois de plus, pour contrôler ses pulsions ? Que savait-elle de cette douleur à devoir réfréner continuellement des émotions qui l'assaillaient ? Savait-elle à quel point les souvenirs et les regrets causaient une douleur atroce ? Probablement pas. Il haussa les épaules et répondit d'un ton froid.
"Je me préfère comme je suis depuis trois jours plutôt que celui que j'étais durant les trois dernières années."
Elle la fixa, sévère.
"Puis-je aller dire ma messe ou comptez-vous dire le sermon à ma place ?"
Lucinde lui conseilla alors de ne pas abuser de son remède miracle. Il répondit dans un rire sans joie.
"Je sais. Mon médecin m'a déjà tout expliqué de cela."
Il fronça les sourcils devant la suite. Elle le jugeait lâche, une fois de plus, pour contrôler ses pulsions ? Que savait-elle de cette douleur à devoir réfréner continuellement des émotions qui l'assaillaient ? Savait-elle à quel point les souvenirs et les regrets causaient une douleur atroce ? Probablement pas. Il haussa les épaules et répondit d'un ton froid.
"Je me préfère comme je suis depuis trois jours plutôt que celui que j'étais durant les trois dernières années."
Elle la fixa, sévère.
"Puis-je aller dire ma messe ou comptez-vous dire le sermon à ma place ?"
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Thierry était donc averti. Malheureusement, ces individus faibles, aussi avertis fussent-ils, n’étaient pas moins susceptible de céder. Ainsi, même si ce rappel semblait vain, son intention n’en était pas superflue.
Peut-être y avait-il un peu de dépit dans la voix de Lucinde lorsqu’elle exposa une opinion qui ne serait sans doute pas écoutée.
— Je conçois que certaines personnes assument moins aisément leurs tourments. Mais ne vous enfermez pas dans l’illusion d’être meilleur : profitez au moins ce cet apaisement passager pour réellement progresser.
L’ennui était bien que les gens agissaient rarement ainsi : ils se laissaient sombrer. Un homme qui se laissait déjà dépasser par l’alcool n’était sans doute pas susceptible d’évoluer ainsi.
Du reste, elle le trouvait fort arrogant sans avoir rien pour le justifier. Elle lâcha son bras, indifférente. Il avait quelque chose d’exaspérant, mais elle ne lui ferait pas le plaisir de le laisser voir.
— Je suppose que vous n’avez pas renoncé à votre vengeance ? s’enquit-elle pour changer de sujet, sans avoir l'air de répondre à son insolence.
Peut-être y avait-il un peu de dépit dans la voix de Lucinde lorsqu’elle exposa une opinion qui ne serait sans doute pas écoutée.
— Je conçois que certaines personnes assument moins aisément leurs tourments. Mais ne vous enfermez pas dans l’illusion d’être meilleur : profitez au moins ce cet apaisement passager pour réellement progresser.
L’ennui était bien que les gens agissaient rarement ainsi : ils se laissaient sombrer. Un homme qui se laissait déjà dépasser par l’alcool n’était sans doute pas susceptible d’évoluer ainsi.
Du reste, elle le trouvait fort arrogant sans avoir rien pour le justifier. Elle lâcha son bras, indifférente. Il avait quelque chose d’exaspérant, mais elle ne lui ferait pas le plaisir de le laisser voir.
— Je suppose que vous n’avez pas renoncé à votre vengeance ? s’enquit-elle pour changer de sujet, sans avoir l'air de répondre à son insolence.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Depuis le seuil de la porte de la cellule, Thierry observa Lucinde qui se plaisait à lui adresser une leçon de morale. Elle s'écoutait. Comme un sermon pénible dont certains curés austères savaient se rendre maîtres. Mais on ne retenait jamais un mot. Les messes de cet acabit permettait aux fidèles de dormir et non de prier ou de se recueillir.
Après cet intermède, le prêtre sourit, moqueur, et s'exclama :
"Ainsi soit-il !"
Elle se décida finalement à lâcher son bras et évoquait cette idée de vengeance. Il continua de sourire de manière innocente et répondit d'une voix doucereuse.
"Une vengeance ? Quel mot étrange ? Non, non, on parle d'éducation, ma chère Lucinde !"
Il reprit de cette voix toujours doucereuse :
"Puis-je aller passer mon aube et préparer la messe ?"
Après cet intermède, le prêtre sourit, moqueur, et s'exclama :
"Ainsi soit-il !"
Elle se décida finalement à lâcher son bras et évoquait cette idée de vengeance. Il continua de sourire de manière innocente et répondit d'une voix doucereuse.
"Une vengeance ? Quel mot étrange ? Non, non, on parle d'éducation, ma chère Lucinde !"
Il reprit de cette voix toujours doucereuse :
"Puis-je aller passer mon aube et préparer la messe ?"
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Lucinde soutint le regard du prêtre.
— De l’éducation, oui. J’invoquerai cela la prochaine fois que j’aurai des comptes à régler, répondit-elle aimablement malgré le ton qu’on lui opposait.
Oh, elle savait même fort bien dans quel contexte elle aurait pu mettre en avant cet argument mais… Si elle se mettait à devoir argumenter, c’était fichu. Elle ne devait pas y songer pour l’instant. Surtout pas. Elle se serait embrouillée. Y penser lui faisait imaginer la réaction qu’aurait eue Marie-Laurence si elle avait ainsi plaidé sa cause. Mais elle non plus, il ne fallait pas y penser en même temps que les résolutions de son départ. Cela amenait trop de vaines remises en question.
Elle haussa ensuite les sourcils. Qu’il aille donc dire sa messe au lieu de se montrer bêtement insolent.
— De l’éducation, oui. J’invoquerai cela la prochaine fois que j’aurai des comptes à régler, répondit-elle aimablement malgré le ton qu’on lui opposait.
Oh, elle savait même fort bien dans quel contexte elle aurait pu mettre en avant cet argument mais… Si elle se mettait à devoir argumenter, c’était fichu. Elle ne devait pas y songer pour l’instant. Surtout pas. Elle se serait embrouillée. Y penser lui faisait imaginer la réaction qu’aurait eue Marie-Laurence si elle avait ainsi plaidé sa cause. Mais elle non plus, il ne fallait pas y penser en même temps que les résolutions de son départ. Cela amenait trop de vaines remises en question.
Elle haussa ensuite les sourcils. Qu’il aille donc dire sa messe au lieu de se montrer bêtement insolent.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Thierry s'amusait beaucoup à défier Lucinde, que ce soit du regard ou par la parole. Elle résistait. Cela se sentait. Elle refusait cependant à céder contre lui. Il aurait aimé poursuivre et voir s'il pouvait réussir à lui perdre peu à peu sa patience mais se rappelait avoir une messe à dire. Notamment il avait deux idiots à dénoncer. Ils allaient payer pour leurs imbécilités et leurs propos scabreux.
"J'espère que vous l'entendrez. Cela sera instructif."
Sur ces paroles, le prêtre quitta la cellule et se dirigea vers la sacristie, là où il revêtit la traditionnelle aube pour la liturgie. Combien de temps la porterait-il encore ? Quand Dyonis viendrait-il finalement l'arrêter ? Les jours passaient, rien ne venait. Renoncerait-il à ses desseins ? Non impossible. Aucun père n'abandonnerait l'idée d'obtenir réparation pour son enfant bafoué dans ses droits. Il se résolut à oublier ces idées pour se concentrer sur l'homélie à prononcer bientôt.
Pour la messe de onze heures, le prêtre constata une certaine affluence. Beaucoup de femmes, des mères de familles ou des vieilles qui ne savaient plus comment s'occuper, quelques jeunes enfants, mais aussi ici et là des hommes. Certains se montraient pieux, d'autres, cela se voyait qu'ils se trouvaient là par souci des apparences. Par besoin de se faire voir en acte de pitié. Thierry salua avec une humilité calculée la foule venue se recueillir dans la maison de Dieu puis s'installa dans la chaire afin de débuter son homélie.
"Mes frères, mes sœurs, hier, en me promenant en ville, je fus témoin d'individus grossiers qui portèrent atteinte en paroles à la réputation honorable d'une jeune femme. Les femmes sont un péché. Elles tentent les hommes. C'est bien cela que vous avez tous en tête, n'est-ce pas ? Vous vous tromperiez. Si les femmes sont si attirantes, c'est parce que les hommes sont faibles face à elles et perdent en les apercevant le peu de dignité et d'intelligence qu'ils peuvent posséder. Le Christ lui-même nous enseigne à ne pas jeter la première pierre à une femme coupable d'adultère. Quand bien même elle a mal agi, elle n'en est pas l'unique fautive. Pour tromper l'époux, il faut être deux. Et l'homme qui l'aura séduit est au moins aussi coupable qu'elle. Certains hommes prennent maîtresse tout en ayant une bonne situation maritale. Je songe là à Bernard Clairet et Paul Dupont, soldats du guet à la prévôté, l'un marié depuis onze ans, l'autre depuis sept ans, respectivement père de cinq et trois enfants. Et pourtant, pourtant, tous deux ont une maîtresses qui leur a donné deux magnifiques bâtards baptisés de mes mains. Je n'aurais rien dit à leur sujet s'ils n'avaient pas fait preuve de plus respect. Mais hier tous deux ont plus que mal et sont l'exemple des travers que tout individu ne devrait jamais adopter. Inspirez-vous en et défendez-vous en de leur ressembler !"
Le prêtre laissa la foule méditer aux paroles de son homélie puis redescendit lentement, d'un air grave pour retourner à l'autel et préparer la communion.[/i[i]]
"J'espère que vous l'entendrez. Cela sera instructif."
Sur ces paroles, le prêtre quitta la cellule et se dirigea vers la sacristie, là où il revêtit la traditionnelle aube pour la liturgie. Combien de temps la porterait-il encore ? Quand Dyonis viendrait-il finalement l'arrêter ? Les jours passaient, rien ne venait. Renoncerait-il à ses desseins ? Non impossible. Aucun père n'abandonnerait l'idée d'obtenir réparation pour son enfant bafoué dans ses droits. Il se résolut à oublier ces idées pour se concentrer sur l'homélie à prononcer bientôt.
Pour la messe de onze heures, le prêtre constata une certaine affluence. Beaucoup de femmes, des mères de familles ou des vieilles qui ne savaient plus comment s'occuper, quelques jeunes enfants, mais aussi ici et là des hommes. Certains se montraient pieux, d'autres, cela se voyait qu'ils se trouvaient là par souci des apparences. Par besoin de se faire voir en acte de pitié. Thierry salua avec une humilité calculée la foule venue se recueillir dans la maison de Dieu puis s'installa dans la chaire afin de débuter son homélie.
"Mes frères, mes sœurs, hier, en me promenant en ville, je fus témoin d'individus grossiers qui portèrent atteinte en paroles à la réputation honorable d'une jeune femme. Les femmes sont un péché. Elles tentent les hommes. C'est bien cela que vous avez tous en tête, n'est-ce pas ? Vous vous tromperiez. Si les femmes sont si attirantes, c'est parce que les hommes sont faibles face à elles et perdent en les apercevant le peu de dignité et d'intelligence qu'ils peuvent posséder. Le Christ lui-même nous enseigne à ne pas jeter la première pierre à une femme coupable d'adultère. Quand bien même elle a mal agi, elle n'en est pas l'unique fautive. Pour tromper l'époux, il faut être deux. Et l'homme qui l'aura séduit est au moins aussi coupable qu'elle. Certains hommes prennent maîtresse tout en ayant une bonne situation maritale. Je songe là à Bernard Clairet et Paul Dupont, soldats du guet à la prévôté, l'un marié depuis onze ans, l'autre depuis sept ans, respectivement père de cinq et trois enfants. Et pourtant, pourtant, tous deux ont une maîtresses qui leur a donné deux magnifiques bâtards baptisés de mes mains. Je n'aurais rien dit à leur sujet s'ils n'avaient pas fait preuve de plus respect. Mais hier tous deux ont plus que mal et sont l'exemple des travers que tout individu ne devrait jamais adopter. Inspirez-vous en et défendez-vous en de leur ressembler !"
Le prêtre laissa la foule méditer aux paroles de son homélie puis redescendit lentement, d'un air grave pour retourner à l'autel et préparer la communion.[/i[i]]
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Instructif. Cela, Lucinde en doutait beaucoup, mais après tout elle lui avait laissé champs libre. Quelle idée, franchement !
Mais il n’était pas question qu’elle manque cela. Rien à voir avec une quelconque pulsion revancharde seulement… Eh bien, elle ne pouvait pas cesser de le surveiller, voilà tout.
— Je fus témoin d'individus grossiers qui portèrent atteinte en paroles à la réputation honorable d'une jeune femme
Témoin… Témoin… Et pas que, d’ailleurs. Qui cela avait-il le plus affecté, fallait-il le lui rappeler ?
— Si les femmes sont si attirantes, c'est parce que les hommes sont faibles face à elles et perdent en les apercevant le peu de dignité et d'intelligence qu'ils peuvent posséder.
Pour ceux qui en avaient, sans doute n’était-ce pas faux… Mais c’était somme toute fort réducteur. Bien qu’elle n’ait pas d’exemple d’homme discipliné sous la main - à part peut-être son époux, qui se tenait relativement bien -, il semblait fort démissionnaire de tout justifier ainsi.
C’était presque douloureux de l’admettre, mais cet abruti de curé n’avait pas entièrement tort. A l’exception près, sans doute, que vu l’insistance démesurée de certain la faute n’était pas si partagée que cela, et elle ne l’aurait pas rejetée sur la même partie que l’opinion publique.
Et voilà qu’on en venait au fait. L’épouse de l’un des gardes nommés se figea, et baissa les yeux avant des les diriger vers une autre femme de l’autre côté de la nef. Lucinde serra les dents. Elle aurait dû se réferer à son instinct lorsque celui-ci lui avait assuré que c’était une mauvaise idée de le laisser faire.
Soit, c’était fait. Et c’aurait pu être pire.
Mais il n’était pas question qu’elle manque cela. Rien à voir avec une quelconque pulsion revancharde seulement… Eh bien, elle ne pouvait pas cesser de le surveiller, voilà tout.
— Je fus témoin d'individus grossiers qui portèrent atteinte en paroles à la réputation honorable d'une jeune femme
Témoin… Témoin… Et pas que, d’ailleurs. Qui cela avait-il le plus affecté, fallait-il le lui rappeler ?
— Si les femmes sont si attirantes, c'est parce que les hommes sont faibles face à elles et perdent en les apercevant le peu de dignité et d'intelligence qu'ils peuvent posséder.
Pour ceux qui en avaient, sans doute n’était-ce pas faux… Mais c’était somme toute fort réducteur. Bien qu’elle n’ait pas d’exemple d’homme discipliné sous la main - à part peut-être son époux, qui se tenait relativement bien -, il semblait fort démissionnaire de tout justifier ainsi.
C’était presque douloureux de l’admettre, mais cet abruti de curé n’avait pas entièrement tort. A l’exception près, sans doute, que vu l’insistance démesurée de certain la faute n’était pas si partagée que cela, et elle ne l’aurait pas rejetée sur la même partie que l’opinion publique.
Et voilà qu’on en venait au fait. L’épouse de l’un des gardes nommés se figea, et baissa les yeux avant des les diriger vers une autre femme de l’autre côté de la nef. Lucinde serra les dents. Elle aurait dû se réferer à son instinct lorsque celui-ci lui avait assuré que c’était une mauvaise idée de le laisser faire.
Soit, c’était fait. Et c’aurait pu être pire.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Durant tout le temps de son homélie, Thierry contemplait la foule et cherchait à surprendre les réactions. Quelques uns s'étonnaient du discours, qui s'éloignait de beaucoup du prêche officielle qui se vouait à faire de la femme une éternelle pécheresse, tandis que d'autres opinaient plus ou moins discrètement de la tête. Le sermon ferait réfléchir. Cela était certain. Il nota ensuite l'embarras de l'épouse de l'un des gardes stupides, puis son regard porté en direction de celle de l'autre imbécile. Elles souffriraient sans doute des rumeurs et commérages. Pourtant, il n'en éprouvait aucune honte. Au contraire, elles méritaient de savoir dans quels lits s'aventuraient avant de retourner s'allonger dans leur couche. Ils portaient peut-être eux une maladie vénérienne qui les contaminerait à leur tour.
En descendant avec prudence de la chaire, il retourna à l'autel pour rompre le pain et verser le vin. Ce long cérémonial l'ennuyait. Comment croire que ces aliments se changeaient réellement en corps et sang du Christ ? Il se rappelait de ses frayeurs enfantines, lorsqu'au moment de sa petite communion, il croyait qu'avaler l'hostie lui ferait prendre goût à la chair humaine et lui donnerait envie de consommer peut-être un voisin. Il avait lu les récits relatant la sinistre chronique de Gilles de Rais, un puissant maréchal de France, et s'imaginait bien un tel monstre manger les enfants qu'il tuait. Tels les ogres dans les contes. Aujourd'hui, le prêtre savait que ce n'étaient là que des peurs naïves mais l'incompréhension du rituel perdurait.
Lorsque la messe se termina, Thierry observa les fidèles se rassembler et discuter par petits groupes. De ce qui parvenaient à ses oreilles, beaucoup commentaient son sermon. Il se décida à rejoindre Lucinde et s'immobilisa devant elle, un sourire tranquille aux lèvres.
"Cette messe fut-elle plaisante, ma fille ?"
En descendant avec prudence de la chaire, il retourna à l'autel pour rompre le pain et verser le vin. Ce long cérémonial l'ennuyait. Comment croire que ces aliments se changeaient réellement en corps et sang du Christ ? Il se rappelait de ses frayeurs enfantines, lorsqu'au moment de sa petite communion, il croyait qu'avaler l'hostie lui ferait prendre goût à la chair humaine et lui donnerait envie de consommer peut-être un voisin. Il avait lu les récits relatant la sinistre chronique de Gilles de Rais, un puissant maréchal de France, et s'imaginait bien un tel monstre manger les enfants qu'il tuait. Tels les ogres dans les contes. Aujourd'hui, le prêtre savait que ce n'étaient là que des peurs naïves mais l'incompréhension du rituel perdurait.
Lorsque la messe se termina, Thierry observa les fidèles se rassembler et discuter par petits groupes. De ce qui parvenaient à ses oreilles, beaucoup commentaient son sermon. Il se décida à rejoindre Lucinde et s'immobilisa devant elle, un sourire tranquille aux lèvres.
"Cette messe fut-elle plaisante, ma fille ?"
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Alors que certains méditaient bien bruyamment les remarques peu conventionnelles de leur curé, ce dernier rejoingnit sa gardienne. Celle-ci haussa simplement les sourcils à sa question.
— Je suppose que cela dépend pour qui, répondit-elle avec un léger sourire. Inspirez-vous, Thierry, ajouta-t-elle innocemment.
C’était qu’il pouvait toujours parler. Mais tous les comptes se soldaient un jour où l’autre, d’une manière ou bien d’une autre. Et bien qu’elle ne saute pas de joie à l’idée d’avoir humilié quiconque, cela sonnait comme une affaire réglée.
— Je suppose que cela dépend pour qui, répondit-elle avec un léger sourire. Inspirez-vous, Thierry, ajouta-t-elle innocemment.
C’était qu’il pouvait toujours parler. Mais tous les comptes se soldaient un jour où l’autre, d’une manière ou bien d’une autre. Et bien qu’elle ne saute pas de joie à l’idée d’avoir humilié quiconque, cela sonnait comme une affaire réglée.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Au milieu des bruissements de la foule, Thierry fixait Lucinde et guettait sa réaction. Une nouvelle fois, pas la moindre trace d'exaspération. Ni même une esquisse de sourire ou une lueur de satisfaction. Son visage avait-il donc figé dans la cire ? Il lui répondit d'un ton tranquille.
"J'ai compris ma leçon, oui et c'est bien pour ça que je l'ai exposé au pus grand ombre."
Son regard distingua au même moment une silhouette amie, qui se tenait à distance des attroupements. Il dissimula un sourire et se rappelant de la bêtise qui lui était venu à l'esprit une heure avant le début de la messe. Ce serait si drôle. Est-ce que Lucinde les surprendrait ? Ou éviterait-elle de s'approcher avant la fin des fausses confidences ? Il était trop excité pour ne pas le faire.
"Pardonnez-moi, Lucinde, mais je dois retrouver quelqu'un."
Le prêtre s'avança d'un pas pressé vers un homme, qui semblait avoir son âge, et lui tomba dans les bras.
"Comment vas-tu alors ?"
Profitant de l'accolade, il murmura à l'oreille de son ami, camarade de quelques unes de ses meilleures beuverie, de rapides paroles :
"On va au clocher ? Je voudrais échapper à ma chienne de garde."
Son camarade, Bernard, opina discrètement la tête et arbora une mine abattue.
'"Bah... Ma belle-mère... Elle..."
Le prêtre lui tapota doucement l'épaule et l'invita à se diriger vers le clocher, loin des oreilles indiscrètes. Néanmoins, une fois hors des yeux, ils accélèrent le pas, semblables à des gamins sur le point de faire une grosse bêtise. Thierry s'arrêta à mi-chemin et sortit de son aube des craies.
"On va faire des dessins ! Mais dans le genre que les Romains aimaient faire !"
Sous le regard amusé de l'autre, il commença à tracer une représentation hasardeuse d'un phallus. Le dénommé Bernard éclata de rire, puis prit à son tour une craie pour dessiner lui aussi de son côté.
"Ma gardienne doit être au pied des marches. Mais elle ne montera pas. Elle nous auravu. Elle ne peut que croire à des confidences pénibles. Et quand nous descendrons..."
Il s'interrompre pour rire, terriblement amusé par son idée.
"Quand on redescendra, je dirais avoir vu ces dessins, d'un air surpris, mais que je ne peux nettoyer. Que je dois écouter les fameuses confessions. Alors, c'est qui qui devra le faire ?"
Les deux complices éclatèrent à nouveau de rire, confiant à ce niveau de l'escalier dans le clocher que personne ne pouvait les entendre. Surtout avec l'affluence des fidèles venus pour la messe et qui était en train de discuter tous en même temps. Ils étaient libres, parfaitement libres de laisser exprimer leur créativité sur ces murs.
"J'ai compris ma leçon, oui et c'est bien pour ça que je l'ai exposé au pus grand ombre."
Son regard distingua au même moment une silhouette amie, qui se tenait à distance des attroupements. Il dissimula un sourire et se rappelant de la bêtise qui lui était venu à l'esprit une heure avant le début de la messe. Ce serait si drôle. Est-ce que Lucinde les surprendrait ? Ou éviterait-elle de s'approcher avant la fin des fausses confidences ? Il était trop excité pour ne pas le faire.
"Pardonnez-moi, Lucinde, mais je dois retrouver quelqu'un."
Le prêtre s'avança d'un pas pressé vers un homme, qui semblait avoir son âge, et lui tomba dans les bras.
"Comment vas-tu alors ?"
Profitant de l'accolade, il murmura à l'oreille de son ami, camarade de quelques unes de ses meilleures beuverie, de rapides paroles :
"On va au clocher ? Je voudrais échapper à ma chienne de garde."
Son camarade, Bernard, opina discrètement la tête et arbora une mine abattue.
'"Bah... Ma belle-mère... Elle..."
Le prêtre lui tapota doucement l'épaule et l'invita à se diriger vers le clocher, loin des oreilles indiscrètes. Néanmoins, une fois hors des yeux, ils accélèrent le pas, semblables à des gamins sur le point de faire une grosse bêtise. Thierry s'arrêta à mi-chemin et sortit de son aube des craies.
"On va faire des dessins ! Mais dans le genre que les Romains aimaient faire !"
Sous le regard amusé de l'autre, il commença à tracer une représentation hasardeuse d'un phallus. Le dénommé Bernard éclata de rire, puis prit à son tour une craie pour dessiner lui aussi de son côté.
"Ma gardienne doit être au pied des marches. Mais elle ne montera pas. Elle nous auravu. Elle ne peut que croire à des confidences pénibles. Et quand nous descendrons..."
Il s'interrompre pour rire, terriblement amusé par son idée.
"Quand on redescendra, je dirais avoir vu ces dessins, d'un air surpris, mais que je ne peux nettoyer. Que je dois écouter les fameuses confessions. Alors, c'est qui qui devra le faire ?"
Les deux complices éclatèrent à nouveau de rire, confiant à ce niveau de l'escalier dans le clocher que personne ne pouvait les entendre. Surtout avec l'affluence des fidèles venus pour la messe et qui était en train de discuter tous en même temps. Ils étaient libres, parfaitement libres de laisser exprimer leur créativité sur ces murs.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Lucinde haussa les sourcils. Pas qu'elle doutait que Thierry eut assez d'esprit apprendre de ses erreurs, mais tout de même un peu. Elle se méfia immédiatement quand une malice malsaine s'invita dans le coin du regard du prêtre, mais n'eut aucune réaction lorsqu'il s'éloigna soudain pour rejoindre un homme un peu plus loin, dont le visage se ferma aussitôt après une accolade.
Interrompue par une question, Lucinde ne put intervenir immédiatement et les vit tous deux disparaître vers le clocher. Elle répondit promptement avant de prendre elle-même cette direction. Elle n'avait pas envie de devoir à nouveau fouiller l'église entière pour s'assurer qu'il n'y ait pas de bouteilles, ni de poursuivre cet imbécile s'il tentait de s'évader.
Un éclat de rire un rien trop bruyant lui indiqua qu'ils étaient bien là, et qu'on tentait effectivement de la leurrer. Seigneur tout puissant, mais qu'avaient-il encore inventé ? Et ce sac à conneries prétendait avoir appris de ses erreurs ? Au cas où il aurait persisté un doute, celui-ci s'évanouit. Qu'avait dit la furie brune, déjà ? Qu'il était un cas trop désespéré ? Elle avait bien raison de ne pas s'encombrer l'esprit avec son sort, mais elle aurait surtout dû apprendre que dépenser de la gentillesse auprès de ceux qui ne le méritaient pas ne menait nulle part.
Alors qu'elle montait les marches à pas de loup, Lucinde entendit Thierry affirmer qu'elle ne monterait pas. Raté. Mais au moins, il ne sous-estimait pas sa vigilance. Se rapprochant lentement mais discrètement, elle écouta la suite des projets. Elle n'aurait pas dû montrer son agacement la dernière fois. On ne pouvait rien exprimer avec cet abruti sans qu'il n'en rajoute. Mais elle, au moins, elle savait vraiment apprendre de ses erreurs et ne la commettrait plus. Elle prit une grande inspiration. Il voulait la faire sortir de ses gonds ? Elle resterait aussi impassible que les murs sur lequels il s'était mis à gribouiller. Alors, qui nettoierait ?
— Probablement vous, répondit-elle, assurée, alors qu'elle se trouvait enfin à leur niveau. Moi, j'ai des souris à trouver, vous comprendrez bien que je ne sais pas tout faire en même temps.
En fait si, elle aurait pu, mais là n'était pas la question. Elle fit volte face pour redescendre.
— Amusez-vous bien, se permit-elle d'ajouter avant de disparaître.
Interrompue par une question, Lucinde ne put intervenir immédiatement et les vit tous deux disparaître vers le clocher. Elle répondit promptement avant de prendre elle-même cette direction. Elle n'avait pas envie de devoir à nouveau fouiller l'église entière pour s'assurer qu'il n'y ait pas de bouteilles, ni de poursuivre cet imbécile s'il tentait de s'évader.
Un éclat de rire un rien trop bruyant lui indiqua qu'ils étaient bien là, et qu'on tentait effectivement de la leurrer. Seigneur tout puissant, mais qu'avaient-il encore inventé ? Et ce sac à conneries prétendait avoir appris de ses erreurs ? Au cas où il aurait persisté un doute, celui-ci s'évanouit. Qu'avait dit la furie brune, déjà ? Qu'il était un cas trop désespéré ? Elle avait bien raison de ne pas s'encombrer l'esprit avec son sort, mais elle aurait surtout dû apprendre que dépenser de la gentillesse auprès de ceux qui ne le méritaient pas ne menait nulle part.
Alors qu'elle montait les marches à pas de loup, Lucinde entendit Thierry affirmer qu'elle ne monterait pas. Raté. Mais au moins, il ne sous-estimait pas sa vigilance. Se rapprochant lentement mais discrètement, elle écouta la suite des projets. Elle n'aurait pas dû montrer son agacement la dernière fois. On ne pouvait rien exprimer avec cet abruti sans qu'il n'en rajoute. Mais elle, au moins, elle savait vraiment apprendre de ses erreurs et ne la commettrait plus. Elle prit une grande inspiration. Il voulait la faire sortir de ses gonds ? Elle resterait aussi impassible que les murs sur lequels il s'était mis à gribouiller. Alors, qui nettoierait ?
— Probablement vous, répondit-elle, assurée, alors qu'elle se trouvait enfin à leur niveau. Moi, j'ai des souris à trouver, vous comprendrez bien que je ne sais pas tout faire en même temps.
En fait si, elle aurait pu, mais là n'était pas la question. Elle fit volte face pour redescendre.
— Amusez-vous bien, se permit-elle d'ajouter avant de disparaître.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Les deux hommes s'amusaient, tels deux enfants insupportables loin de toute surveillance adulte, à gribouiller sur les murs du clocher. Leurs dessins n'avaient que peu de ressemblances avec le sujet qu'ils désiraient représentaient. Ils se livraient à cet sommaire en riant et en s'amusant des réactions possibles. Dans leurs facéties, plus pitoyables que comiques, ils avaient abandonné toute prudence, si bin que Thierry sursauta à l'apparition de Lucinde.
"Oh, Lucinde, vous voilà !"
Il ne comptait certainement pas se laisser démonter pour si peu. De toute manière, quand la tête était sur le billot, qu'avait-on à perdre à ennuyer le bourreau ?
"Comment trouvez ces superbes fresques ? C'est une nouvelle forme de l'art religieux. Le Vatican a bien décoré la chapelle Sixtine d'hommes nus, alors pourquoi ne lancerais-je pas un style équivalent dans mon église ?"
Le prêtre devinait, avant de l'attendre, sa sanction. La supplier ne changerait. Alors, quitte à passer une nuit épouvantable avec des souris, autant rire à sa guise.
"Vous partez déjà ? S'il n'y a personne pour me surveiller, je ne garantis pas de ne pas poursuivre cette magnifique fresque !"
Comme pour le confirmer, il reprit le fusain et traça une nouvelle figure aléatoire.
"Oh, Lucinde, vous voilà !"
Il ne comptait certainement pas se laisser démonter pour si peu. De toute manière, quand la tête était sur le billot, qu'avait-on à perdre à ennuyer le bourreau ?
"Comment trouvez ces superbes fresques ? C'est une nouvelle forme de l'art religieux. Le Vatican a bien décoré la chapelle Sixtine d'hommes nus, alors pourquoi ne lancerais-je pas un style équivalent dans mon église ?"
Le prêtre devinait, avant de l'attendre, sa sanction. La supplier ne changerait. Alors, quitte à passer une nuit épouvantable avec des souris, autant rire à sa guise.
"Vous partez déjà ? S'il n'y a personne pour me surveiller, je ne garantis pas de ne pas poursuivre cette magnifique fresque !"
Comme pour le confirmer, il reprit le fusain et traça une nouvelle figure aléatoire.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Oui, la voilà, en effet. Après son entrée, elle haussa simplement les épaules à ses propositions de renouvellement décoratif. Bien qu’elle n’ait jamais été férue d’art - pas même à l’époque de Coutrenielle - elle trouvait un brin insultant de comparer les fresques de la chapelle Sixtine et les gribouillages répugnants dont il salissait les murs.
Mais Thierry paraissait décidé à l’énerver, et ce n’était que la meilleure des raisons pour ne pas entrer dans son jeu ridicule. Elle était certes plus irritable depuis le drame, mais elle n’allait pas devenir stupide en plus de tout cela. Elle annonça donc qu’elle s’en retournait là où le devoir l’appelait.
— Si griffonner sur les murs vous incommodait tant, je suis persuadée que vous sauriez vous surveiller tout seul, comme un adulte, assura-t-elle en redescendant l’escalier, sans tenir compte de ses provocations.
La seule chose qu’elle aurait pu faire pour l’empêcher d’agir eut été de le ligoter quelque part et elle n’avait pas franchement envie d’en venir à ces extrémités. Le jeter dans l’escalier eut sans doute fonctionné également, mais là encore, la solution semblait trop radicale et relevait d’un manque accablant de professionalisme. Qu’il joue donc avec ses craies, si cela l’amusait tant que cela. En attendant, elle s’assurerait que l’on oublie son repas aujourd’hui et ait quelque souris pour lui tenir compagnie cette nuit.
Il était tout de même vraiment pénible de l’obliger à prendre des sanctions en permanence. Elle n’aurait pas dû le laisser aller à Fromart l’autre jour. Depuis, il s’était senti pousser des ailes comme si plus rien ne pouvait lui arriver. Félicitations !
Mais Thierry paraissait décidé à l’énerver, et ce n’était que la meilleure des raisons pour ne pas entrer dans son jeu ridicule. Elle était certes plus irritable depuis le drame, mais elle n’allait pas devenir stupide en plus de tout cela. Elle annonça donc qu’elle s’en retournait là où le devoir l’appelait.
— Si griffonner sur les murs vous incommodait tant, je suis persuadée que vous sauriez vous surveiller tout seul, comme un adulte, assura-t-elle en redescendant l’escalier, sans tenir compte de ses provocations.
La seule chose qu’elle aurait pu faire pour l’empêcher d’agir eut été de le ligoter quelque part et elle n’avait pas franchement envie d’en venir à ces extrémités. Le jeter dans l’escalier eut sans doute fonctionné également, mais là encore, la solution semblait trop radicale et relevait d’un manque accablant de professionalisme. Qu’il joue donc avec ses craies, si cela l’amusait tant que cela. En attendant, elle s’assurerait que l’on oublie son repas aujourd’hui et ait quelque souris pour lui tenir compagnie cette nuit.
Il était tout de même vraiment pénible de l’obliger à prendre des sanctions en permanence. Elle n’aurait pas dû le laisser aller à Fromart l’autre jour. Depuis, il s’était senti pousser des ailes comme si plus rien ne pouvait lui arriver. Félicitations !
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Après le départ de Lucinde, Thierry continua à dessiner ces décorations originales sur les murs du clocher jusqu'à son compère de boisson ne doive se retirer. Il se décida à redescendre et partit sans entrain s'installer dans le confessionnal s'installer pour écouter les monologues insipides des fidèles qui se disaient en faute. Comme à son accoutumée, il les entendait d'une oreille distraite tout en occupant son esprit en lisant l'ouvrage installé sur ses genoux.
Après quelques heures d''un long supplice, le prêtre sortit et commença à détendre ses muscles endoloris par une posture inconfortable. Pourquoi avait-on conçu des sièges dignes d'instruments de torture ? Ne pouvait-on pas avoir pitié du religieux qui y poserait ses fesses ? Il ruminait ces pensées tout en arpentant en silence ne allée de l'église. Il s'ennuyait. Que faire dans cette existence recluse et dépourvu de la moindre utilité ? Les bavardages stériles des fidèles l'agaçaient de plus en plus. Il commençait à penser que Dyonis ne viendrait peut-être pas. Après tout, le pire châtiment ne serait-il pas de le laisser à cette place ? Un long soupir lui échappa. Comme la vie était injuste.
En passant devant la sacristie, une idée lui traversa l'esprit. Et si... Ce pourrait être drôle aux prochaines de les voir boire du vin corrompu. Le prêtre poussa rapidement la porte et s'empara d'une première bouteille. Son regard se promena au travers de la pièce t aperçut un cierge. Il s'en saisit et gratta un pu de cire pour l'introduire dans le goulot. Le sang du Christ aurait demain un goût tout particulier. Un crû unique était sur le point de naître. Thierry en rit de bon coeur en songeant à son cousin qui raffolerait entendre cette bonne histoire. Une mauvaise surprise l'attendit : Lucinde se trouvait derrière lui et chassa toute nouvelle envie de rire. Elle le chassa sèchement de la sacristie et verrouilla à clé la porte
Peu désireux cette fois à lutter, surtout avec des fidèles à proximité pour les entendre, Thierry s'éloigna rapidement en ruminant. Il ne pouvait même pas s'amuser comme il le souhaitait. Comment passer le temps alors ? Il marcha jusqu'à la cellule et se laissa tomber dans le premier lit.
Le temps s'écoula lentement. Très lentement. Quelle longue journée, sans intérêt. Finalement, l'heure du souper vint enfin. Il se releva de manière plus énergique et attendit la cuisinière qui venait apporter le repas. Elle n'arrivait pas. Que faisait-elle ? Il s'approcha du seuil, le pied battant la mesure, bras croisés.
"Bon, elle fait quoi cette bonne femme ? Il faut tant de temps que ça pour livrer un bête repas ?"
Après quelques heures d''un long supplice, le prêtre sortit et commença à détendre ses muscles endoloris par une posture inconfortable. Pourquoi avait-on conçu des sièges dignes d'instruments de torture ? Ne pouvait-on pas avoir pitié du religieux qui y poserait ses fesses ? Il ruminait ces pensées tout en arpentant en silence ne allée de l'église. Il s'ennuyait. Que faire dans cette existence recluse et dépourvu de la moindre utilité ? Les bavardages stériles des fidèles l'agaçaient de plus en plus. Il commençait à penser que Dyonis ne viendrait peut-être pas. Après tout, le pire châtiment ne serait-il pas de le laisser à cette place ? Un long soupir lui échappa. Comme la vie était injuste.
En passant devant la sacristie, une idée lui traversa l'esprit. Et si... Ce pourrait être drôle aux prochaines de les voir boire du vin corrompu. Le prêtre poussa rapidement la porte et s'empara d'une première bouteille. Son regard se promena au travers de la pièce t aperçut un cierge. Il s'en saisit et gratta un pu de cire pour l'introduire dans le goulot. Le sang du Christ aurait demain un goût tout particulier. Un crû unique était sur le point de naître. Thierry en rit de bon coeur en songeant à son cousin qui raffolerait entendre cette bonne histoire. Une mauvaise surprise l'attendit : Lucinde se trouvait derrière lui et chassa toute nouvelle envie de rire. Elle le chassa sèchement de la sacristie et verrouilla à clé la porte
Peu désireux cette fois à lutter, surtout avec des fidèles à proximité pour les entendre, Thierry s'éloigna rapidement en ruminant. Il ne pouvait même pas s'amuser comme il le souhaitait. Comment passer le temps alors ? Il marcha jusqu'à la cellule et se laissa tomber dans le premier lit.
Le temps s'écoula lentement. Très lentement. Quelle longue journée, sans intérêt. Finalement, l'heure du souper vint enfin. Il se releva de manière plus énergique et attendit la cuisinière qui venait apporter le repas. Elle n'arrivait pas. Que faisait-elle ? Il s'approcha du seuil, le pied battant la mesure, bras croisés.
"Bon, elle fait quoi cette bonne femme ? Il faut tant de temps que ça pour livrer un bête repas ?"
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Lucinde avait donc laissé le nouveau prodige de l’art Braktennois poursuivre ses croquis dans le clocher, non sans s’assurer qu’il n’invente pas de bêtises qui prêtent davantage à conséquences. Profitant des confessions dont elle était persuadée qu’il les écoutait toujours avec la plus profonde et respectueuse des attentions - comme en témoignait sa manie d’emporter des livres -, elle avait régler quelques détails logistiques pour le soir. Non sans être allée s’enquérir de l’ampleur de l’oeuvre du jour.
Manifestement, le curé n’était pas décidé à faire profil bas. Ou du moins, pas pour les bonnes raisons. Sérieusement, comment aurait-il pu se figurer qu’elle relâcherait suffisament la vigilance pour ne pas remarquer ses expériences douteuses avec le vin de messe ? Mais quel gaspillage, c’était vraiment déplorable ! S’il s’ennuyait tant, qu’il fasse son travail ! Elle était certaine qu’il était bien moins pénible que le sien.
L’heure de souper arriva bien vite, et comme prévu, la cuisinière n’avait redistribué le repas bien trop copieux de ce soir à ceux qui en avaient vraiment besoin. Ce n’était pas de la gentillesse, ni des bons sentiments inutiles… Il était seulement hors de question de gaspiller ou de faire payer à quelqu’un pour les bêtises de quelqu’un d’autre.
Et comme prévu, Thierry finit par se plaindre. A l’entrée de la cellule, Lucinde sourit.
— Ne vous inquiétez pas, ce devrait bientôt arriver, assura-t-elle.
Et comme prévu, environ un quart d’heure plus tard, on leur livra ce dont ils avaient besoin. Lucinde revint vers la cellule, et déposa le panier sur la table, et partagea en deux le pain qu’il contenait.
— Vous savez, ce n’est pas toujours facile la vie d’un artiste raté. Bon appétit.
Manifestement, le curé n’était pas décidé à faire profil bas. Ou du moins, pas pour les bonnes raisons. Sérieusement, comment aurait-il pu se figurer qu’elle relâcherait suffisament la vigilance pour ne pas remarquer ses expériences douteuses avec le vin de messe ? Mais quel gaspillage, c’était vraiment déplorable ! S’il s’ennuyait tant, qu’il fasse son travail ! Elle était certaine qu’il était bien moins pénible que le sien.
L’heure de souper arriva bien vite, et comme prévu, la cuisinière n’avait redistribué le repas bien trop copieux de ce soir à ceux qui en avaient vraiment besoin. Ce n’était pas de la gentillesse, ni des bons sentiments inutiles… Il était seulement hors de question de gaspiller ou de faire payer à quelqu’un pour les bêtises de quelqu’un d’autre.
Et comme prévu, Thierry finit par se plaindre. A l’entrée de la cellule, Lucinde sourit.
— Ne vous inquiétez pas, ce devrait bientôt arriver, assura-t-elle.
Et comme prévu, environ un quart d’heure plus tard, on leur livra ce dont ils avaient besoin. Lucinde revint vers la cellule, et déposa le panier sur la table, et partagea en deux le pain qu’il contenait.
— Vous savez, ce n’est pas toujours facile la vie d’un artiste raté. Bon appétit.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Devant dans l'embrassure, Thierry observait Lucinde arriver avec une lenteur qui l'exaspéra. De ne pouvait-elle passe dépêcher ? Elle se trainait alors qu'ils devaient discuter d'un terrible problème. Et pourtant, elle ne se trouvait qu'à quelques mètres de l'entrée de la cellule. N'avait-elle donc pas faim ? Il la fixa, perplexe, de mauvaise humeur, à sa réponse simple.
"Elle ferait bien de presser oui, sinon, je vais la renvoyer."
Il tapait du pied, agacé.
"J'ai passé une journée difficile. J'ai le droit à un repas consistant, non ?"
Lucinde semblait refuser de répondre à toutes ses prises de parole.
"Dans la vie, on se doit de respecter l'heure. Surtout celle des repas. Il y a une certaine discipline à adopter. Vous n'êtes pas 'd'accord?"
"J'ai faim, moi ! Je vais faire un malaise si ça continue !"
"A t-on idée de faire attendre les gens comme ça ?"
"Ce n'est pas possible ! C'est de l'impolitesse !"
"Elle va m'entendre !"
Finalement après un temps considérable, occupé à se plaindre, le prêtre vit enfin arriver Lucinde avec un panier. Il s'installa à table, pressé d'avaler ce bon repas.
"Enfin ! Il me tarde de voir ce qui nous a été préparé !"
Son visage se décomposa lorsque Lucinde sortit une simple miche du panier et la coupa en deux. Il blêmit, surcout quand celle-ci et cette répartie insolente. Elle n'avait quand même pas fait ça, cette mégère ? Il se leva pour attraper le panier mais le découvrit.
"Mais.. Vous ne pouvez pas pas ! Il y a un outrage ! J'ai le droit à des repas copieux et équilibrés ! Vous ne pouvez me priver de manger !"
"Elle ferait bien de presser oui, sinon, je vais la renvoyer."
Il tapait du pied, agacé.
"J'ai passé une journée difficile. J'ai le droit à un repas consistant, non ?"
Lucinde semblait refuser de répondre à toutes ses prises de parole.
"Dans la vie, on se doit de respecter l'heure. Surtout celle des repas. Il y a une certaine discipline à adopter. Vous n'êtes pas 'd'accord?"
"J'ai faim, moi ! Je vais faire un malaise si ça continue !"
"A t-on idée de faire attendre les gens comme ça ?"
"Ce n'est pas possible ! C'est de l'impolitesse !"
"Elle va m'entendre !"
Finalement après un temps considérable, occupé à se plaindre, le prêtre vit enfin arriver Lucinde avec un panier. Il s'installa à table, pressé d'avaler ce bon repas.
"Enfin ! Il me tarde de voir ce qui nous a été préparé !"
Son visage se décomposa lorsque Lucinde sortit une simple miche du panier et la coupa en deux. Il blêmit, surcout quand celle-ci et cette répartie insolente. Elle n'avait quand même pas fait ça, cette mégère ? Il se leva pour attraper le panier mais le découvrit.
"Mais.. Vous ne pouvez pas pas ! Il y a un outrage ! J'ai le droit à des repas copieux et équilibrés ! Vous ne pouvez me priver de manger !"
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Thierry trépignant comme un enfant d'à peine trois ans. Lucinde n'osait même pas imaginer ce qu'il serait advenu si elle-même avait eu une telle attitude à cet âge. Le plus élémentaires des instincts de survie l'aurait réduite au silence avant même d'avoir envisagé de se plaindre, sans doute.
Elle avait pris le parti d'ignorer ces enfantillages, c'était là la seule réaction qu'ils méritaient. Alors qu'il monologuait, la jeune femme se demanda comment la baronne de Coutrenielle aurait réagi si sa pupille s'était comportée de le sorte chez elle. Elle trouva du réconfort dans l'idée que jamais on ne l'aurait laissée agir ainsi.
Elle n'en revenait pas. Thierry était-il bien en train de se plaindre de sa journée ? Oui, c'avait dû être éreintant de gribouiller des insanités dans le clocher après s'être levé à une heure indécente, très certainement. Était-ce vraiment lui qui venait lui parler de discipline ? Sérieusement ? Elle en aurait presque ri si elle ne s'était pas résolue à demeurer impassible.
Pauvre petit, il allait faire un malaise ! Non, on n'avait vraiment pas idée de faire attendre les gens de la sorte. Impolitesse ? Non, c'était bien pire que cela : de la cruauté pure, voyons !
Si ses lamentations n'avaient pas eu quelque chose de profondément lassant, l'ancienne sage-femme aurait presque été déçue que leur livraison n'arrive si vite. Il lui tardait de voir ce qui avait été préparé ? Si elle avait été impatiente, elle, c'eût plutôt été de voir son visage se décomposer devant sa surprise. C'avait sans doute quelque chose de puéril de s'en amuser. Mais si ce n'était que dans le secret de son esprit, ce n'était pas bien grave.
— Tout à fait ! C'est absolument scandaleux, confirma-t-elle sur un ton qui indiquait clairement son indifférence.
En réalité, il pouvait bien geindre autant qu'il le voudrait, il n'aurait rien d'autre.
Elle avait pris le parti d'ignorer ces enfantillages, c'était là la seule réaction qu'ils méritaient. Alors qu'il monologuait, la jeune femme se demanda comment la baronne de Coutrenielle aurait réagi si sa pupille s'était comportée de le sorte chez elle. Elle trouva du réconfort dans l'idée que jamais on ne l'aurait laissée agir ainsi.
Elle n'en revenait pas. Thierry était-il bien en train de se plaindre de sa journée ? Oui, c'avait dû être éreintant de gribouiller des insanités dans le clocher après s'être levé à une heure indécente, très certainement. Était-ce vraiment lui qui venait lui parler de discipline ? Sérieusement ? Elle en aurait presque ri si elle ne s'était pas résolue à demeurer impassible.
Pauvre petit, il allait faire un malaise ! Non, on n'avait vraiment pas idée de faire attendre les gens de la sorte. Impolitesse ? Non, c'était bien pire que cela : de la cruauté pure, voyons !
Si ses lamentations n'avaient pas eu quelque chose de profondément lassant, l'ancienne sage-femme aurait presque été déçue que leur livraison n'arrive si vite. Il lui tardait de voir ce qui avait été préparé ? Si elle avait été impatiente, elle, c'eût plutôt été de voir son visage se décomposer devant sa surprise. C'avait sans doute quelque chose de puéril de s'en amuser. Mais si ce n'était que dans le secret de son esprit, ce n'était pas bien grave.
— Tout à fait ! C'est absolument scandaleux, confirma-t-elle sur un ton qui indiquait clairement son indifférence.
En réalité, il pouvait bien geindre autant qu'il le voudrait, il n'aurait rien d'autre.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Le pain rompit en deux sur la table n'avait d'appétissant. Pareillement à celui qu'il coupait lors des messes. Lucinde avait beau prétendre ne rien savoir, il n'était pas assez idiot pour croire qu'elle n'y était pas pour rie?. La peste ! La garce ! Il aurait bien ajouté la catin mais elle ne se comporterait jamais, elle, comme ses braves femmes qui l'accueillaient toujours tant de courtoisie et de plaisir. Le prêtre la fixa d'un regard triste.
"Lucinde s'il vous plait, vous avez sûrement prévu quelque chose."
Il baissa la tête et feignit la tête de l'homme repenti.
"Je suis désolé pour toutes mes bêtises d'aujourd'hui. Mais s'il vous plait, LUcinde, donnez-moi un vrai repas."
Le prêtre releva la tête et lui adressa un sourire.
"Vous êtes si gentille, si responsable, si compétente... Vous ne pouvez ne rien avoir prévu."
Elle allait bien céder.
Elle ne pouvait pas laisser un homme ne pas manger. C'était criminel, ça.
"S'il vous plaît, Lucinde, s'il vous plait."
"Lucinde s'il vous plait, vous avez sûrement prévu quelque chose."
Il baissa la tête et feignit la tête de l'homme repenti.
"Je suis désolé pour toutes mes bêtises d'aujourd'hui. Mais s'il vous plait, LUcinde, donnez-moi un vrai repas."
Le prêtre releva la tête et lui adressa un sourire.
"Vous êtes si gentille, si responsable, si compétente... Vous ne pouvez ne rien avoir prévu."
Elle allait bien céder.
Elle ne pouvait pas laisser un homme ne pas manger. C'était criminel, ça.
"S'il vous plaît, Lucinde, s'il vous plait."
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Lucinde devinait sur les lèvres closes de Thierry que toutes les insultes du monde lui semblaient bien trop douces après un tel affront. C’était bien l’ennui d’être un grossier personnage : on insultait à tort et à travers pour des broutilles et il ne restait plus rien pour faire sens lorsqu’un juron se justifiait. Encore que là, ce n’était même pas le cas : ce maudit débauché ne récoltait que ce qu’il avait semé. Elle était même clémente.
Pourtant, elle savait que le curé ne l’entendait pas de cette oreille.
Alors, par combien de phase allait-il passer ? Puisqu’il faudrait les endurer de toute manières, Lucinde prit les paris. Elle misa sur quatre. De l’indignation - phase un -, il était passé à une repentance qui aurait presque semblé convaincante si elle n’était pas absolument fausse et intéressée - phase deux.
— C’est un vrai repas, répondit-elle distraitement.
Et beaucoup n’avaient même pas cela, alors il n’était pas en droit de se plaindre. Elle tourna son regard vers lui et remarqua un étrange sourire sur son visage tandis qu’il la complimentait. Phase trois : flatterie. Seulement, elle n’avait pas l’intention de céder. C’était là toute l’essence de la discipline : une fois une sanction tombée, elle devait être appliquée. Seules quelques rares exceptions venaient confirmer cette règle.
Elle posa sur le prêtre un regard froid, imperturbable. Rien prévu ? C’était ce qu’il pensait. Oh, qu’il ne s’inquiète pas : s’il était à ce point affamé, la viande arriverait après s’il était prêt à l’attraper et à la manger crue.
— Il ne me plait pas. Ce sera ceci ou rien, trancha-t-elle.
Pourtant, elle savait que le curé ne l’entendait pas de cette oreille.
Alors, par combien de phase allait-il passer ? Puisqu’il faudrait les endurer de toute manières, Lucinde prit les paris. Elle misa sur quatre. De l’indignation - phase un -, il était passé à une repentance qui aurait presque semblé convaincante si elle n’était pas absolument fausse et intéressée - phase deux.
— C’est un vrai repas, répondit-elle distraitement.
Et beaucoup n’avaient même pas cela, alors il n’était pas en droit de se plaindre. Elle tourna son regard vers lui et remarqua un étrange sourire sur son visage tandis qu’il la complimentait. Phase trois : flatterie. Seulement, elle n’avait pas l’intention de céder. C’était là toute l’essence de la discipline : une fois une sanction tombée, elle devait être appliquée. Seules quelques rares exceptions venaient confirmer cette règle.
Elle posa sur le prêtre un regard froid, imperturbable. Rien prévu ? C’était ce qu’il pensait. Oh, qu’il ne s’inquiète pas : s’il était à ce point affamé, la viande arriverait après s’il était prêt à l’attraper et à la manger crue.
— Il ne me plait pas. Ce sera ceci ou rien, trancha-t-elle.
Re: [10 Janvier 1598] Ultime jour
Rien ne saurait la faire fléchir.
Lucinde était inflexible et ne revenait en arrière. Sauf si un chêne bloquait sa route.
Il poussa un long soupir et se résigna à prendre la miche de pain. Après une première bouchée, une grimace lui vint.
"C'est fade."
Il mâchonna le pain lentement, essayant de prendre son temps pour se donner l'illusion d'un vrai repas.
"Si je fais un malaise, ça sera votre faute."
Après l'ingestion de cette maigre collation, le prêtre se leva et alla se coucher.
"Bon, eh bien, qui dort dine comme on dit."
Lucinde était inflexible et ne revenait en arrière. Sauf si un chêne bloquait sa route.
Il poussa un long soupir et se résigna à prendre la miche de pain. Après une première bouchée, une grimace lui vint.
"C'est fade."
Il mâchonna le pain lentement, essayant de prendre son temps pour se donner l'illusion d'un vrai repas.
"Si je fais un malaise, ça sera votre faute."
Après l'ingestion de cette maigre collation, le prêtre se leva et alla se coucher.
"Bon, eh bien, qui dort dine comme on dit."
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