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[14 décembre 1597] - La naïveté n'apprend pas de ses erreurs [Terminé]

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Message par Éléonore de Fromart Ven 30 Oct - 21:17

Éléonore était épuisée. Elle n’avait passé que de très mauvaises nuits depuis sa rencontre avec Alduis de Fromart.

Oui, c’était bien cela, son nom. A peine rentrée de l’église, elle s’était précipitée sur la pile de lettres soigneusement empaquetée qu’elle n’avait pu s’empêcher de prendre dans ses malles. Elle avait été bien inspirée le jour où elle les avait jointes à ses bagages.

La première nuit, elle n’avait pas fermé un oeil. Elle-même ne pouvait pas s’expliquer l’excitation qu’elle ressentait : cet homme avait connu Ariste. Cela pouvait sembler anodin, mais n’était-ce pas fou qu’elle soit tombée sur l’un des amants de son cousin alors même qu’elle cherchait un signe ? Cette situation ne pouvait pas être le fruit du hasard. Cela devait lui indiquer la voie.

Ariste… Si la première moitié de cette nuit l’avait vue frétiller, la seconde l’avait vue pleurer. Ses larmes n’avaient pas tari jusqu’au matin. Ariste… Il avait été tout pour elle. N’était-ce pas justement pour fuir son fantômes qu’elle s’était éloignée de Tianidre ? Elle n’échapperait manifestement jamais au deuil…

Elle avait hésité. Longuement. Elle avait laissé débattre la part d’elle-même qui désirait passer à autre choser et celle qui lui jurait que c’était une trop belle occasion. Un trop belle occasion d’avoir une autre vision de lui. De savoir qui il était en tant qu’homme, qui il était comme militaire -- elle avait bien compris qu’elle n’échapperait pas non plus à quelques allusions sur l’amant, mais ce ne suffisait pas à la refroidir. Après tout, elle n’avait jamais pu voir que le fils et le cousin.

Trois jours à tergiverser. Elle redoutait de ne pas le reconnaître, mais par dessus tout, elle redoutait que Fromart ne la remballe sans cérémonie. Il ne lui devait rien, après tout. Il ne devait rien à Ariste. Elle ne se faisait pas d’illusions : ils n’y avait certainement jamais eu d’amour. Ariste le lui aurait fait comprendre si tel avait été le cas ! Il ne lui aurait pas caché une telle chose !

Non, il n’y avait jamais eu d’amour, mais tout de même… Il devait bien y avoir eu quelque chose. Ariste n’était pas un animal, non plus ! Et puis, si Ariste en avait parlé dans ses lettres, c’était bien qu’ils s’étaient côtoyés. Quitte à ne revenir qu’avec deux anecdotes ridicules, il fallait qu’elle retrouve Fromart.

Trois jours à tergiverser, mais aussi à se renseigner. L’autre homme. Il l’avait intriguée. Elle n’avait pas appris grand chose à son sujet. Son statut et le nom de son maître. Mais cela l’avait encore davantage interrogée. Elle avait eu affaire à un esclave. Un esclave ! Ami avec un noble. Cela ne fit que conforter les valeurs inculquées par son oncle. Cela ne faisait que rajouter de la valeur à cette amitié que trop auraient jugée malvenue.

Trois jours de sommeil perturbé, de doutes. Trois jours à ne manger que des pâtes de fruits et des gâteaux au citron. Trois jours pour prendre les choses en main. Qu’avait-elle à perdre ?

Elle hésita à descendre de son véhicule lorsque celui s’arrêta. Elle se sentit oppressée par l’ombre du château : et si elle faisait une erreur ? Et si cela ne lui apportait que de la déception ? Et si, en dépit de son serment, le noble changeait d’avis sur son sort ?  

Elle secoua la tête. Non : il se contenterait de l’envoyer paître. Elle ne risquait rien. Rien.

Elle s’avança, la tête haute. Personne ne devait discerner son hésitation.

— J’aimerais voir Alduis de Fromart, répondit-elle au garde qui l’interpella. Annoncez Éléonore de Tianidre.
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Message par Coldris de Fromart Ven 30 Oct - 23:35

Alduis était enfin rentré au château. A vrai dire, il n'avait pas vraiment eu le choix. Peu après sa visite à Joseph, il avait envoyé deux gardes le ramener de gré ou de force à Fromart. Il devait savoir, il devait lui parler. Tout cela n'avait que trop duré. Et il avait enfin su.
Leurs relations s'étaient temporairement apaisées, ce qui après les évènements mouvementés de son anniversaire n'était pas plus mal. Coldris en gardait encore des séquelles: sa côte cassé et le faisait régulièrement souffrir et l'empêcher de monter à cheval. Les médecins lui demandait de rester au repos et de laisser le temps au temps, mais rien ne l'agaçait plus que l'oisiveté.

Et pour cause, ne rien faire, c'était accepter de se laisser emporter par le ressac de ses pensées. A défaut de pouvoir faire des activités physiques, il se dédiait donc tout entier à son travail. Il fallait dire que ce n'était pas ce qui manquait avec la mise en place de la toute nouvelle colonie mornoyenne. Il était donc assis à son bureau, plume à la main au milieu d'une pile de vélin lorsque son intendant racla sa gorge pour s'annoncer. Il leva aussitôt ses yeux sévères tandis que l'homme s'inclinait respectueusement avant d'annoncer:

- Madame Eléanore de Tianidre est aux grilles et demande à voir votre fils.

Ses sourcils se froncèrent. Il avait dû mal attendre. C'était bien la première fois qu'une femme demander à voir Alduis.

- Et bien faites-là entrer Hermélien. Vous n'avez pas besoin de moi pour cela que je sache! répondit-il sèchement avant de retourner à ses écrits.
- C'est que... Veuillez m'excusez Messire, mais votre fils dort encore.

Il posa sa plume avec agacement et referma son écritoire.

- Très bien, je vais la recevoir. Faites-là patienter dans le petit salon. Je descends dans un instant.

L'intendant s'inclina et sortit à reculons afin de s’exécuter. Dans son esprit, les questions commençaient à se bousculer et la curiosité le piquer. Sans parler du fait qu'il n'avait jamais vu un Tianidre à la Cour depuis une éternité. Il la laissa patienter dix minutes et descendit rencontrer cette étrange invité.

- Madame de Tianidre, dit-il en s'inclinant poliment Il semblerait que vous désiriez voir mon fils. Malheureusement il était indisposé pour l'heure. Mais je peux sans doute vous aider. Je vous en prie prenez place.

Il indiqua les fauteuils disponibles et s'installa à son tour face à elle tandis que déjà on apportait rafraichissement et collation de rigueur. Coldris croisa les jambes et l'observa tandis qu'elle s'exprimait. Elle était plus jolie - sans être exceptionnelle non plus- avec ses cheveux bruns. Deux ans auparavant, les siens étaient de la même couleur. Désormais, ils commençaient à se teinter de gris par endroit.

Il posa ses coudes sur les accoudoirs écoutant attentivement.
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Message par Éléonore de Fromart Sam 31 Oct - 0:58

Éléonore frissonna. Elle fut prise d'un sursaut d'hésitation lorsqu'un flocon de neige solitaire se posa sur son nez. Était-ce ainsi que l'on faisait patienter ses invités ?

Bon… Elle n'avait pas vraiment été invitée, c'est vrai. Une demoiselle bien élevée aurait au moins fait prévenir de son arrivée… Mais quel message aurait-elle pu faire passer ? Elle ne voulait rien risquer de dévoiler dans un billet pouvant être intercepté par n'importe qui. Même involontairement, elle aurait risqué de rompre son serment… Pas de messages du tout valait mieux qu'un message vide de sens. Et puis, sans vouloir en préjuger, celui qu'elle cherchait ne semblait pas être là personne la plus à cheval sur les bonnes manières.

On la laissa enfin entrer, affirmant qu'on allait la recevoir. On l'entraîna vers un salon. Elle tourna entre les sièges, mal à l'aise. Elle venait de se rendre compte que c'était la première fois qu'elle rendait visite à quelqu'un en dehors de chez elle. Dire qu'elle était là depuis près de deux semaines et qu'elle ne s'était pas affichée une seule fois en public. Elle avait même omis d'aller à la messe tant la perspective de croiser du monde l'effrayait. D'ailleurs, n'était-on pas justement dimanche aujourd'hui ? Elle finirait avec la même réputation de recluse que son oncle si elle continuait ainsi. Pire encore : d'hérétique.

Puis, la porte s'ouvrit à nouveau… mais pas sur celui qu'elle attendait. Elle s'efforça de s'apaiser, et d'écouter ce qu'on avait à lui dire.

— Demoiselle, rectifia-t-elle entre ses dents.

Elle s'en voulut immédiatement. Recluse, nièce d'un original, et en plus malpolie… Ça allait en donner une fameuse image d'elle.

Mon fils… Évidemment... Savoir à qui elle avait affaire la mit plus mal à l'aise encore, si bien que que ses salutations lui échappèrent très maladroitement. Elle se ressaisit. Elle n'avait pas de raison d'être mal à l'aise, si ? Alduis n'était pas disponible pour l'instant, ce n'était pas dramatique. On avait au moins la délicatesse de ne pas la laisser attendre bêtement.

Indisposé… Un mot qui pouvait vouloir tout dire, mais elle ne put s'empêcher de l'imaginer retomber dans le délire. Elle s'inquiéta un instant, mais chassa cette perspective. Après tout, si Alduis s'était retrouvé dans un tel état, son père aurait eu bien d'autres priorités que celle de la recevoir. Son raisonnement était bancal, mais suffit à la rassurer.

Elle s'assit, masquant son indécision du mieux qu'elle le put. Faute d'habitude, elle ignorait comme réagir à une telle situation.

— C'est fâcheux, hasarda-t-elle. Il m'était vraiment nécessaire de lui parler. Je… Vous savez, si vous étiez occupés… Ne vous sentez pas obligé de vous déranger pour moi… Vous devez être un homme très occupé.

Elle se sentait étrangement épié. Elle sentait sur elle la même attention que celle qu'elle avait porté à ce bébé hérisson qu'Ariste avait déposé un jour sur son bureau quand elle avait cinq ans. Une étrange curiosité. C'était distrayant, mais qu'allait-elle bien pouvoir faire d'un hérisson ? Elle ne se sentait pas plus à sa place que ce bébé hérisson ce jour-là.

Elle se rendit compte qu'elle donnait l'air de vouloir se débarrasser de sa présence. Elle entendait déjà sa gouvernante la morigéner. C'était tout à fait déplacé de sa part.

Je veux dire que vous n'avez pas l'air d'être homme à paresser, tenta-t-elle de se rattraper.

Mais il fallait se rendre à l'évidence : elle s'enfonçait.
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Message par Coldris de Fromart Sam 31 Oct - 8:20

Sa jeune invité impromptu le rectifia sur son nom. Mademoiselle donc. Voilà qui était intéressant. Coldris plongea ses yeux dans les siens : il les préférait mariées mais il pouvait bien faire une petite exception de temps à autres. Il attendit la suite de sa phrase mais rien ne vient. Ni de Monsieur de Formart ou de même de Messire et encore moins d'Excellence.

- Vous avez visiblement passé trop de temps dans votre campagne, Mademoiselle de Tianidre pour en oublier les salutations d'usage. répondit-il froidement.

Savait-elle au moins qui il était et pourquoi elle se trouvait ici ? Il commençait à en douter sérieusement. La suite le renfrogna sévèrement. Bien évidemment qu’il avait été dérangé mais puisque c’était le cas qu'elle en vienne au faite.

- Et bien comme vous pouvez le constater vous aller devoir vous contenter de moi puisque mon fils ne peut vous recevoir.

Il marqua une pause entrelaçant ses doigts sans jamais la quitter du regard. Elle ressemblait à ces biches qui apercevaient soudainement le chasseur au détour d'un bosquet.

- Dites-moi donc ce qui vous amène ici, Mademoiselle de Tianidre. Vous voulez épouser mon fils peut-être ? demanda-t-il avec une certaine ironie

Oh ça il en doutait fortement. Si Coldris avait un don pour les attirer, Alduis en avait un pour les éloigner. Alors quoi ? Pourquoi venait-elle ici ? Ce n’était pas de main la veille qu'il changerait de préférence de tout évidence, et, soyons honnête, se faire des amis n’était pas non plus dans ses habitudes. Alors pourquoi ?
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Message par Éléonore de Fromart Sam 31 Oct - 9:14

Eléonore se renfrogna un instant, mais s’efforça de se rendre aimable. Après tout, elle était la seule en tort. Sa campagne… Elle n'aurait jamais cru en vouloir tant à son oncle de l'avoir retenue si longtemps.

--- Et c’est un honneur, n’en doutez pas, mais je ne m’attendais pas à vous rencontrer.

Elle frémit, s’efforçant de ne pas rompre le contact visuel que son hôte avait instauré. Elle aurait dû. Son regard la déconcertait. Il était insondable. Des yeux vides et à la fois trop emplis. En temps normal, elle pouvait lire énormément de chose dans les yeux d’un homme. Son oncle prétendait qu’ils étaient le miroir de l’âme. Cet homme-là n’en possédait-il aucune ?

--- Vous voulez épouser mon fils, peut-être ?

Eléonore écarquilla les yeux, surprise par cette plaisanterie malvenue. Certes, il était fort temps – malheureusement – de commencer à y songer, mais ce n’était certes pas ce qui la menait à Fromart ce jour-là.

--- Cela ne me viendrait pas à l’idée, laissa-t-elle échapper.

Elle se couvrit la bouche. Mais quelle idiote ! Voilà pourquoi elle ne se montrait pas en société : Elle multipliait décidément les impairs… Elle aurait tout aussi bien pu dire qu’elle s’asseyait carrément sur l’influence de leur famille.

--- Pardonnez-moi, je me suis mal exprimée. Je ne doutes pas qu’énormément de femmes seraient ravies de lier leur nom au vôtre, mais Tianidre aurait besoin d…

Idiote ! Il fallait qu’elle se taise. Elle disait n’importe quoi.

--- Je veux dire : ma venue n’est pas liée à une quelconque affaire d’alliance.

Incorrigible.

--- J’ai rencontré votre fils et il se trouve que nous n’avons pas eu l’occasion d’achever notre conversation. Et elle revêtait pour moi une importance toute particulière.

Voilà, c’était réglé : elle passait définitivement pour une gourde.
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Message par Coldris de Fromart Sam 31 Oct - 23:13

Coldris fixait la jeune femme de ses yeux froids et imperturbables. Il voyait bien qu’il la mettait mal à l’aise et il en avait l’habitude. Sa remarque sur le mariage eut le don de lui faire écarquiller les yeux. Si ses lèvres restèrent figées sur son masque d’impassibilité, intérieurement, il souriait, amusé de ses maladresses. Au contraire, il continua son petit jeu, haussant les sourcils alors qu’elle se reprenait. La seconde fois qu’elle se reprit, il ferma les paupières un court instant, comme désespéré par le flot de paroles qui s’échappait de ses lèvres sans le moindre contrôle.

Lorsqu’elle eut enfin terminé, il se pencha en avant, un rictus au coin des lèvres.

- Mademoiselle, j’ignore de quoi vous pensez que Tianidre a besoin, mais je peux en revanche vous dire ce dont vous vous avez besoin.

Il se recula dans son fauteuil, nonchalamment

- Vous allez vous faire dévorer si vous vous présentez ainsi à la Cour, mon petit agneau. Et je ne vous parle même pas de trouver un mari.

Quant à converser avec Alduis et bien c’était pour le moins originale… Surtout lorsque l’on savait à quel point il pouvait se montrer laconique. Il imaginait parfaitement le monologue de la jeune femme intercalé de quelques brèves interventions de son fils.
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Message par Éléonore de Fromart Dim 1 Nov - 0:15

Éléonore ne parvenait plus à désarrimer son regard. Elle avait l'impression que si elle clignait des yeux, ou se détournait un instant, elle allait perdre tout ce qui lui restait de sécurité. Il lui fallait surveiller l'éclat de danger qu'elle discernait au fond de ses prunelles. Ne pas le perdre de vue un seul instant.

Curieusement, par ce regard glacial, il lui permit de reprendre un semblant de contenance. Il fallait qu'elle se détende. Un instinct primaire lui hurlait de ne pas baisser la garde, mais demeurer attentive ne devait pas l'empêcher de relâcher ses épaules dont la crispation se faisait douloureuse, ni de moduler sa respiration.

Elle accueillit sa réplique avec un froncement de sourcil interrogatif. Ce n'était pas le moment de s'offusquer ou de perdre ses moyens. Il fallait qu'elle se reprenne. Tout de suite !

Mon petit agneau…

Inspire. Expire.

Non mais pour qui se prenait-il ?! Certes, elle avait manqué de subtilité aussi mais… C'était différent : c'était de la maladresse. Lui, au contraire, savait pertinemment ce qu'il faisait. Il la testait.

Inspire. Expire. Calmement. Pas trop profondément non plus. Juste ce qu'il faut.

Et au fond, elle savait qu'il avait raison. Elle n'était pas taillée pour ça. Elle n'arriverait jamais à rien. Elle avait toutes les raisons du monde de s'enfermer dans son hôtel particulier. Elle n'était pas prête à affronter le monde. Elle s'était voilé la face : elle n'avait jamais vraiment cru y parvenir, c'était juste la seule excuse qu'elle avait trouver pour échapper au carcan du deuil.

Elle choisit de ne pas relever. Elle le laissait marquer un point, elle en était consciente, mais elle ne se sentait pas capable de répliquer sans s'embourber. Elle ne se sentait pas capable de trouver la réaction la plus appropriée. Autant, dans ce cas, se contenter du moins pire scénario.

— Je n'ai jamais prétendu chercher un mari, rappella-t-elle. Ni chercher à m'afficher où que ce soit, d'ailleurs.

Non… Ce n'était pas la bonne formulation. Elle ne ferait que se ridiculiser davantage si elle s'obstinait. Elle renonça à l'impulsion de corriger ce qu'elle avait dit : il fallait se rendre à l'évidence : ça ne faisait jamais qu'empirer les choses.

— Mais je vous en prie, dites-moi donc ce dont j'ai besoin selon vous.

Elle tenta de feindre une curiosité polie, uniquement motivée par la conversation. Elle ne voulait pas laisser croire à son interlocuteur qu'il avait gagné. Alors qu'en vérité, quitte à entrer dans son jeu, elle brûlait d'entendre ce qu'il pourrait bien lui dire.

La réponse à une telle question lui permettrait certainement de se faire une idée plus précise de son interlocuteur et de cerner ses motivations... Sans son Ariste, sortir je pouvait que mal tourner.
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Message par Coldris de Fromart Lun 2 Nov - 14:21

Et bien quoi ? Un petit agneau c’est ce qu’elle était. Un petit agneau qui bêlait devant le loup. Coldris la fixait toujours, imperturbablement de ses prunelles bleues sérac.
Le silence.
Nombreux étaient ceux qui détestaient voir le silence s’installer dans une conversation, mais lui l’appréciait. Car il était des discours qui n’avaient pas besoin d’être prononcés.

Sa poitrine engoncée dans son corset qui se soulevait d’une manière parfaitement artificielle, ses muscles tendues à l’extrême qu’elle essayait de relâcher sans y parvenir, ce contact visuel qu’elle gardait de peur de voir la gueule du loup se refermer autour de son innocente gorge.

Coldris haussa les sourcils à son affirmation et pencha légèrement la tête un petit rictus aux lèvres qui disait clairement « me prenez-vous pour un idiot ? ». Heureusement, elle se reprit bien vite pour l’interroger un peu plus précisément sur ses idées. Il discernait sans mal la petite étincelle d’intérêt qui venait de naitre dans son regard. Il pencha son buste vers l’avant et reprit sur le ton de confidence :

- Mais, c’est pourtant évident, douce brebis : des crocs. Il vous manque des crocs pour jouer au milieu des loups.

Il retourna à sa place, le visage bordé d’un sourire terriblement provocateur mêlé d’espièglerie. Elle était charmante lorsqu’elle passait sa main dans ses cheveux pour se rassurer. Charmante mais bien trop pure.
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Message par Éléonore de Fromart Lun 2 Nov - 16:39

Eléonore s’efforça d’imaginer la main rassurante de son cousin sur son épaule. Si Ariste était présent, elle était en sécurité. Elle laissa échapper un soupir de soulagement, tout en désaccord fut-il avec la situation. S’autoriser à croire qu’elle était soulagée lui permit de relâcher les épaules. Avant de tromper qui que ce fut, il fallait d’abord tromper ses propres défenses.

Elle s’autorisa à rompre le contact visuel un instant. Ou plutôt, elle s’y obligea. Bien que les siens soient parfaitement opaques, le seigneur de Fromart parvenait à lire dans ses yeux, elle le sentait. C’en était presque effrayant. Pour un peu, elle serait retombée dans la panique pétrifiante dont elle se libérait tout juste.

Elle renoua le contact avec moins d’insistance. Elle espérait que ses craintes seraient occultées, mais ne se faisait pas d’illusions. Il la surpassait de très loin à ce jeu là. Il avait eu toute sa vie pour s’y exercer, pour apprendre à ne laisser transparaitre que ce qu’il désirait la laisser voir.

Une telle aisance avait quelque chose de fascinant. Le danger qu’elle amenait, en était grisant. Elle brûlait de le voir se mesurer à un adversaire convenable et non “un petit agneau”. Elle brûlait de le voir déployer réellement son potentiel. Elle regrettait presque de ne pas être assez dangereuse pour qu’il se donne cette peine.

Une étincelle de frustration vint la titiller. Elle semblait si fragile qu’il ne ne l'a jugeait même pas digne de réfléchir un peu. Il ne se battait pas, il se contentait de claquer des chiquenaudes pour rire de ses grimaces ! Ils ne jouaient pas dans la même catégorie et il manquait pas de le lui faire comprendre. C’était tellement agaçant ! Et pourtant, elle ne se faisait pas d’illusion : il ne méjugeait pas son niveau. Elle n’était pas taillée pour ça. Elle devait déjà s’estimer heureuse du peu de lucidité dont elle était armée.

Elle tenta de se rassurer : s’il n’estimait pas utile de se battre, c’était parce qu’il n’y avait aucune raison de se montrer hostile, tout simplement ! Mais non : impossible de s’en convaincre. Mais non : c’était juste parce qu’elle n’en valait pas le dérangement. D’ailleurs, il n’aurait même jamais pris la peine de s’abaisser à son niveau s’il n’avait pas été obligé de la recevoir.

A moins… Non. Elle réfléchissait beaucoup trop. Beaucoup trop pour quelqu’un qui ne savait pas agir. En fait, la frustration ne venait pas de lui, elle venait de la vérité qu’il lui renvoyait sur elle-même.

Il répondit. Un brebis, cette fois-ci. Comme elle aurait aimé pouvoir lui faire ravaler sa condescendance ! Comme elle aurait aimé pouvoir lire le cheminement de ses pensées. Mais pas maintenant : lorsqu’il se trouvait face à un défi. Ce devait être passionnant. Bien plus intéressant que ce qu’elle avait pu  admirer jusqu’ici. Elle rêvait de comprendre ce genre d’esprits.

--- Des crocs, murmura-t-elle, songeuse.

Elle se laissa aller contre son dossier. Des crocs. Les siens étaient rétractiles, et elle refusait de les laisser sortir. Certes, elle voulait la capacité. Elle voulait pouvoir agir justement, ne jamais se laisser dépasser. Mais elle ne voulait pas le faire au détriment d’autrui. Voilà ce qui la différenciait de tous ces fourbes.

Elle demeura méditative une minute, peut-être. Le silence. Elle savait que son attitude la rendait vulnérable, la faisait paraitre particulièrement influençable. Mais elle savait aussi que c’était faux : réfléchir aux paroles entendues était bien plus sage que de les balayer sans même s’être interrogé. Ou pire : les intégrer bêtement. De toutes manière, elle n’avait plus aucune apparence à sauver devant lui. Elle avait déjà dérapé.

Elle se pencha vers lui, laissant couler ses cheveux sur l'accoudoir. Elle ne put réprimer un léger sourire. Elle ne pouvait pas jouer à son niveau à lui, mais elle avait apaisé sa peur et en était infiniment satisfaite.

--- Mais vous n’êtes pas un loup, Messire, finit-elle pas lâcher d'une voix assurée.

Elle planta son regard dans celui de son interlocuteur. S’il parvenait toujours à lire dans ses yeux, il avait certainement déjà compris. Elle ne le sous-estimait pas. Il ne lui faisait pas penser à un loup. S'il fallait vraiment l'associer à un animal, ce serait plutôt plutôt aux serpents constricteurs du nouveau monde.
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Message par Coldris de Fromart Mar 3 Nov - 11:24

Finalement cette rencontre inopinée n’était pas sans intérêt. De tout façon, une femme qui voulait rencontrer Alduis suscité forcément la curiosité. Et si le Ministre avait bien failli retourner à sa paperasse, il trouvait désormais que la discussion prenait un tournant nettement plus intéressant.

Le petit agneau parlait peu mais son corps parlait pour lui. Et la flamme d’intérêt qui brillait au fond de son regard ne trompait pas sur sa fascination naissante. Il la laissa méditer, entrelaçant ses doigts par intermittence. Il dût bien admettre qu’il fut quelque peu surpris de ce revirement de situation, lorsqu’elle se pencha vers lui, offrant son décolleté à son regard. Ses longs cheveux sombres cascadaient le long de l’accoudoir. Et il y avait ce petit sourire de fierté qu’elle ne parvenait pas à réprimer.

- Mais vous n’êtes pas un loup, Messire

Si Innocente brebis voulait jouer, alors Coldris ne se faisait jamais prier, surtout lorsqu’il y avait une pareille lueur de défi dans son regard. Sans répondre, il se leva pour se glisser fluidement dans son dos. Il se pencha, bouche à son oreille et ses mains se déposèrent avec légèreté sur ses épaules. C'est dans un murmure qu'il lui confia sa curiosité.

- Ah oui? Alors dites-moi… A quoi vous fais-je penser, charmant petit agneau ?


Dans sa voix se sentait, ce sourire aussi taquin que provocateur donc il aimait tant user et abuser. Il se languissait déjà de connaitre sa réponse et plus que tout sa réaction.
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Message par Éléonore de Fromart Mar 3 Nov - 14:08

À l'instant même où son regard croisa celui du serpent, Éléonore sur qu'elle n'aurait pas dû. Quelle idiote ! Il aurait suffit de poursuivre sur sa lancée. Lâcher encore une ou deux énormités, et elle aurait été débarassée de son hôte… quitte à devoir trouver un autre moyen de revoir Alduis.

Mais non ! Elle s'était sentie obligée de jouer. Pourquoi ? Pourquoi ?! Incapable de résister à un défi, hein...

Elle le vit se lever. S'approcher. Un serpent, définitivement. Un frisson remonta sa colonne vertébrale lorsqu'il la toucha, lorsque son souffle glissa sur sa nuque. Pas de la peur. Non, ce n'était pas de la peur. C'était quelque chose de tout à fait différent. Quelque chose qu'elle ignorait jusqu'alors.

C'était semblait à ce sentiment qui la faisait trembler lorsqu'elle couvrait les sorties d'Ariste, lorsqu'elle escaladant les tours lorsqu'elle préparait un mauvais coup. Terriblement stressant, mais terriblement amusant. Terriblement addictif. C'était un sentiment proche de celui-là qui s'emparait d'elle aujourd'hui. Proche, mais avec une subtilité différente, qu'elle n'était pas tout à fait sûre d'identifier. Fascinant. Effrayant. Obsédant.

Elle aurait dû se reprendre immédiatement. Elle aurait dû faire marche arrière. Elle ne voulait pas se retrouver dans une telle situation. C'était dangereux. Elle devait remettre immédiatement les points sur les i. Il se méprenait sur ses intentions, non ?

Ce ne devait pourtant pas être compliqué ! Une phrase, n'importe quoi, pourvu qu'il comprenne tout de suite que "son petit agneau" ne voulait pas jouer -- et puis, elle n'était pas son petit agneau, d'abord ! Il était évident qu'il s'amusait ainsi avec toutes celles qu'il pouvait croiser. Éléonore n'aurait-elle pas l'air encore plus naïve si elle poursuivait dans cette voie ?

Il y avait une limite à ne pas dépasser, elle le savait. Elle prenait les risques qu'elle voulait pour elle, mais pas si ce devait salir son nom. Idiote. Inutile. Pitoyablement ridicule.

Il lui avait fallu quelques secondes à peine pour remuer tout ça dans son esprit. Tout cela et toutes les conséquences, toute les remises en questions qui s'y rapportaient. Quelques secondes de silence, à essayer de tout faire cesser. Elle aurait pu le dire, mais ses lèvres refusaient. Elle aurait pu s'agiter, le repousser, mais ses épaules se contentèrent de frémir légèrement. Elle aurait dû faire quelque chose ! Maintenant ! Elle savait pourtant bien qu'elle était incapable de gérer une telle situation. Elle était tellement gourde ! Mais tout cela était bien trop amusant pour que le malaise, la peur, ou même le pur bon sens ne puissent la raisonner.

Tant pis ! Elle aurait tout le temps de le regretter ensuite. Pour l'instant, elle ne lâcherait rien.

— Cela vous surprend lorsque vous vous y attendez le moins, commença-t-elle d'un ton énigmatique. On dit que son regard vous captive afin d'endormir votre méfiance tandis que ses anneaux s'enroulent autour de vous et se resserrent. Se resserrent. Se resserrent.

Il fallait entendre prononcer ces mots pour se rendre compte de combien ils convenaient à son interlocuteur. Son regard…

Elle se pivota lentement pour pouvoir le retrouver. S'y replonger. Tenter vainement de le sonder. Terrifiant. Fascinant. Impénétrable. Magnifique.

— Et lorsque vous en prenez conscience, vous êtes déjà entièrement à sa merci.

Oui, c'était cela. Elle l'avait cerné. Mais elle redoutait infiniment d'avoir raison. Son instinct lui hurlait de partir tout de suite. Avant que son intuition se confirme. Il était dangereux…

— Aucun petit agneau avisé, qu'il soit muni de crocs ou non, ne s'aventurerait sur son terrain de chasse, conclut-elle dans un souffle.

Et voilà ! Elle était définitivement complètement idiote ! Comment pouvait-elle être gourde à ce point ! Ne voyait-elle donc pas combien elle était ridicule ?! Si c'était pour faire preuve d'une telle imprudence, autant se jeter directement au fond d'un précipice.
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Message par Coldris de Fromart Mer 4 Nov - 21:23

Et dire qu'il avait failli écourter cette visite quelques minutes plus tôt ? Qui aurait cru que le petit agneau se montrerait si joueur. Il ne fallait rien de moins que ce ton énigmatique pour susciter son intérêt et son envie de poursuivre le jeu. Et pourtant il savait qu’il avait mis mal à l'aise. Il l’avait senti se raidir et se figer durant quelques secondes, avant de dépasser son malaise non sans une certaine audace qui n’était pas pour le déplaire.

Les énigmes… Si elle savait à quel point il pouvait aimer ça… La simple idée de devoir chercher était au moins aussi excitante que la découverte de la solution. Et puis ce regard hypnotisé et si
… Attrayant. Ses commissures se retrouvèrent en même temps que ses mains glissaient le long de ses bras avant de la libérer.

- Mais là n'est pas son terrain de chasse. Un petit agneau audacieux dévoré par la curiosité pourrait sans doute souhaiter visiter son repaire.

Il fit quelque pas et s’adossa nonchalamment à la fenêtre, sourire en coin


- Connaissez-vous les légendes de Zakros, Mademoiselle de Tianidre ? Je tiens celle-ci d’une délégation du pays en question : la légende raconte qu’autour du monde des hommes, un serpent gigantesque, le plus grand qui soi, serait enroulé. Il serait si grand que d’un bout à l’autre il pourrait s’en mordre la queue.

Il pencha la tête en attendant sa réaction.
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Message par Éléonore de Fromart Jeu 5 Nov - 16:35

Eléonore cherchait encore une excuse pour tout arrêter. Elle imagina la réaction son oncle s’il entrait dans la pièce à l’instant. Eineld de Tianidre n'était pas particulièrement colérique, mais mieux valait tout de même ne pas abuser de sa patience. Ni de sa confiance – quoi que pour cela, elle exagérait déjà allègrement. Elle imagina sa fureur s’il avait vu ses mains longer les bras de sa nièce comme elles venaient de le faire.

Raté ! Cette perspective ne parvint qu’à la faire sourire. Il fallait admettre qu’outre les conséquences, cette scène eût été particulièrement amusante.

Ariste, alors ? Non, Ariste lui aurait adressé un clin d’oeil chargé de sous-entendus parfaitements inapropriés. Il oubliait trop souvent qu’elle était une femme, et qu’une femme de son rang devait surveiller sa réputation. Ou bien était-il juste le seul à lui faire suffisamment confiance pour prendre des propres risques ?

Pourquoi ne parvenait-elle pas mettre fin à cette conversation. “Oh, j’avais oublié : j’avais quelque chose de très important à faire cet après-midi. Il faut absolument que je m’en aille. Pouvez-vous prévenir votre fils que je suis passée ?” Cette phrase-là ou une autre. Ou bien tout simplement lui signaler que son comportement était tout à fait inconvenant. Non mais !

--- Son repaire…

Eleonore se leva souplement. Son hôte s’éloignait ? Bien, parfait ! Elle ferait pareil. Elle fit quelques pas dans la direction opposée, songeuse.

--- Il faudrait que cet agneau soit téméraire -- ou bien idiot -- pour ne pas entendre qu’il est plus périlleux encore de s’en approcher.

Elle s’accouda au dossier d’un autre fauteuil pour écouter son histoire de serpent géant. Avait-elle plissé le nez ? Elle ne put retenir un léger élargissement de son sourire à l'ouïe de sa dernière remarque. Ca y était ! Elle redevenait sotte. C’était bon. Il suffisait de se raccrocher à cela et en quelques minutes maximum, elle se serait débarrassée de cette situation. Enchainer les énormités n’était-il pas tout à fait dans ses cordes ?

Bien sur que si ! Alors pourquoi ne le faisait-elle pas immédiatemment ?

--- Avouez que ce ne serait pas judicieux de sa part, commenta-t-elle. Mais je n’ai malheureusement pas eu l’occasion d’entendre beaucoup de légendes de nos colonies dans ma compagne, déplora-t-elle sans pouvoir retenir une pointe d'amertume rancunière.

Non, pas de légendes, mais des histoires bien moins glorieuses. Les rafles, les abus, l’exploitation… Sur le sujet, son oncle avait des milliers d’exemples. Mais cela, elle se garda bien de l’ajouter. La réputation de son oncle serait déjà bien difficile à occulter sans qu’elle ne semble approuver ses idées. Dommage, tout de même. Dans la catégorie énormités, ce genre de coup de gueule aurait tout à fait convenu. Bien mieux que son léger dérapage.

Elle se contenta pourtant de rejeter ses cheveux indisciplinés dans son dos et de pivoter lentement jusqu’à ce que son interlocuteur sorte de son champs de vision, s’efforçant de réprimer le rictus de défi qui pinçait ses lèvres -- il ne fallait pas l’encourager, en plus ! Mais ce n’était pas à elle de tourner en rond pour maintenir le contact visuel. Il ne l’aurait pas à ce jeu là !

--- Combien y en a-t-il eu, rien que ce mois-ci ? interrogea-t-elle soudain, sans que son ton ne rapporte cette question à aucune des précédentes. D'agneaux, je veux dire. D'agneaux, de biches, de colibris, de fleurs des champs...

Elle fut bien ennuyée de constater qu’elle avait posé la question à haute voix. Et d'une voix empreinte de défi, en plus ! Merde ! Ne pouvait-elle plus filtrer ses pensées ? Quelle idiote ! Quoique… Ce n’était peut-être pas plus mal. Elle hésitait. Elle regrettait. Elle voulait qu'il le prenne mal et lui demande de partir. Elle voulait qu'il le prenne sur le ton de la plaisanterie et poursuive. Elle voulait... Elle ne savait plus. Elle décida qu'elle laisserait sa réaction en décider. Elle réfléchissait trop.
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Message par Coldris de Fromart Jeu 5 Nov - 18:20

Douce brebis souriait. Alors Coldris lui conta l’histoire du serpent-monde de Zakros qui pour son plus grand bonheur lui était inconnue. Ignorant sa remarque sur le discernement de l’agneau, il rétorqua avec un large sourire :

- Venez donc diner un soir à Fromart. Je vous en raconterai autant qu’il vous plaira. C’est bien là, l’une des plus belles facettes de ma fonction : l’exotisme. Il serait fort dommage de ne pas vous en faire profiter

Innocence, lui tourna le dos. Mais c’était bien mal le connaitre que de l'imaginer s'offusquer ou encore se précipiter pour s'imposer. Et puis de là où il était, il avait tout le loisir d’observer sa cascade de cheveux bruns tomber sur ses reins élégamment dessinés par le corset qu’elle portait. Pourquoi s'en serait-il passé?

Sa question lui arracha un haussement de sourcil surpris. Combien ? Vraiment ? C’était bien la première fois qu’on lui posait la question si directement.

- Qu’importe le nombre pourvu qu’on ait l’ivresse.

Si Coldris oubliait aussitôt chacune de ses conquêtes -s’encombrer l’esprit de détails inutiles n’était pas dans ses habitudes-, il notait pourtant soigneusement chacune de ses escapades depuis des années dans l'un de ses innombrables carnets. Il ne s'agissait pas qu'on vienne lui présenter un bâtard dont il n'était pas le père.

- Mais si vous voulez jouer… La chasse est ouverte.

Un rictus taquin se dessina tandis que Léonilde faisait son entrée. Si l'homme était toujours aussi respectueusement malgré le nombre d'années de service, il avait désormais plus que blanchis. Coldris avait souhaité le libérer de ses obligations mais l'homme s'en était offusqué et avait préféré servir son Maitre jusqu'à sa mort. Depuis le temps, il faisait partie intégrante de la vie du Ministre et il était indiscutablement la personne qui connaissait le plus de secrets sur l'homme si ordonné pour qui il travaillait.

- Monsieur, votre fils arrive.
- Parfait. Merci Léonilde. puis à Eléonore Songez à mon invitation, Mademoiselle de Tianidre.

Sans attendre de réponse, il se redressa et quitta le salon pour retourner à ses longs rapports.
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Message par Éléonore de Fromart Jeu 5 Nov - 21:36

Une surprenante invitation que voilà. Il la prenait pour une gourde -- était-ce vraiment la peine de se demander pourquoi ? -- mais elle n’aurait pas cru que c’était à ce point. Lorsque l’on parvenait à s’extirper d’un nid de serpents, n’était-ce pas pure folie d’y remettre les pieds ?

Et pourtant… Pourtant, elle rangea cette idée dans un coin de sa tête. Flirter avec le danger était tellement vivifiant ! C’était inconvenant, parfaitement déraisonnable, mais…

--- Qu’importe le nombre pourvu qu’on ait l’ivresse.

Elle s’amusa de l’étonnement qu’il n’était pas tout à fait parvenu à dissimuler. Visiblement, sa brusquerie ne l’avait pas refroidi. Mais cette réponse… Nous n’étions tout de même que le 14 du mois. S’il était même incapable de se souvenir des quatorze derniers jours, eh bien…

Eh bien, elle ne risquerait rien, voilà tout. Tout était parfait ! Elle aurait à peine quitté le château que son existence même aurait déserté ses souvenirs, et toute cette affaire serait réglée. Et quand bien même elle reviendrait, il oublierait tout aussi aisément.

Tout de même… Quand il s’agissait de nuire à quelqu’un, ou de retrouver des informations compromettantes, la mémoires de ce genre de personnes pouvait soudain se révéler bien plus performante… Et c’était bien ce qui était à craindre ! Ah, ces hommes ! Ils ne se rendaient pas compte de la chance qu’était leur liberté…

Et puis, Eléonore elle-même, elle s’en souviendrait… Elle ne tomberait jamais assez bas pour se trouver capable de tout effacer si facilement…

La chasse était ouverte…

Faisait-il exprès de remuer son hésitation ? Ne pouvait-il pas se contenter de toutes celles qu’il avait au lieu de chercher à tenter les nobles demoiselles ? Il avait l’âge de son oncle… et un esprit infiniment plus fascinant. Il avait cette aura d’intelligence, de…

Eléonore s’efforça de se ressaisir. Elle mélangeait tout.

--- Un soir, peut-être, ne put-elle s’empêcher de murmurer, plus pour elle que pour lui.

Mais déjà, son attention se déplaçait vers la porte qui s’ouvrait. Elle était soulagée. Non, elle était frustrée : pourquoi déjà ? Non ! Non ! Non ! Elle était soulagée ! Elle devait être soulagée. Elle allait s’éloigner de l’aura déstabilisante du Ministre et se débarrasser des idées tout à fait indignes d’elle qui la harcelaient. Elle ne pouvait pas. Elle ne pouvait plus.

--- Songez à mon invitation, Mademoiselle de Tianidre.

Eléonore le regarda disparaître. Voilà, c’était terminé. Elle allait pouvoir tout effacer. Expier ses pensées malvenues et ce frisson d’excitation. Remettre ses idées dans l’ordre. Et pourtant… Elle ne pouvait nier qu’elle avait redécouvert quelque chose, enfoui au fond d’elle. Plus que la dernière fois, elle avait adoré jouer avec ses limites, flirter avec le danger. Jouer avec le feu.

Pire : elle s’était rendu compte qu’elle était plus ou moins capable de juguler son angoisse pour y parvenir seule. Sans Ariste. Définitivement, elle n’aurait jamais dû venir.

Elle s’en retourna dans son fauteuil. La prochaine fois, elle éviterait de se demander ce qu’elle risquait. Le jour où elle accepterait cette invitation, par exemple… Même si elle ferait tout pour s’en préserver.
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Message par Alduis de Fromart Jeu 5 Nov - 21:59

Alduis mangeait une tartine de pain beurré en s’amusant à se balancer sur sa chaise depuis plusieurs minutes, les deux pieds croisés sur le rebord de la table. Ce fut précisément à la quatrième bouchée que l’on vint frapper à la porte. Il cessa aussitôt de se balancer, surpris, et reposa les pieds par terre. Comme personne n’entrait, il donna pour toute réponse, un grognement peu jovial. Enfin, la porte coulissa.

- Messire.

- Hum ?
marmonna-t-il sans cacher le moins du monde son mécontentement profond d’être dérangé, en appuyant un coude sur la table comme s’il s’ennuyait profondément et sans regarder le nouveau venu.

- Une certaine Éléonore de Tianidre demande à vous parler.
- Hum.
- Elle attend aux portes, messire,
lui précisa-t-on, avec insistance. Devons-nous la faire entrer ?

Nonchalamment, Alduis haussa des épaules. Il se rejeta contre le dossier de sa chaise et reprit ses balancements sur les pieds arrière de sa chaise. Il se doutait bien qu’elle reviendrait prochainement, mais aujourd’hui tombait mal. Il n’avait aucune envie de subir les babillages de quelqu’un. Que ce soient les siens ou ceux d’un autre, d’ailleurs. Encore moins quand ils attendaient une quelconque réponse de sa part.

- Je n’ai pas envie de parler. Dites-lui de repasser.
- Messire ?
- Renvoyez-la, je vous dis,
répéta-t-il.

Il reprit une autre bouchée, continuant de chercher le parfait équilibre de la chaise.

- Si vous avez des états d’âme, vous n’avez qu’à lui dire que je suis indisponible parce que… parce que je dors ! Je dors et j’ai demandé à n’être dérangé sous aucun prétexte. Allez lui dire cela, et qu’elle revienne plus tard. Quand je serai réveillé et pas avant.
- Et… puis-je vous demander dans combien de temps vous vous réveillerez ?


Alduis réfléchit sincèrement à la question. Il se pencha en avant pour s’appuyer sur ses genoux avant de déclarer finalement :

- Pas avant demain ! Dites lui que je suis très fatigué.

La porte se ferma.

o~o~o

Ce fut plusieurs minutes plus tard - suffisamment pour avoir fini les tartines et ouvert un livre à une page au hasard pour lire en diagonale, sans vraiment chercher à comprendre - que quelques coups furent de nouveau frappés. Cette fois-ci, il n’eut pas le temps de donner son accord qu’on entrait déjà. Il fallait dire qu’il aurait renvoyé le visiteur. Qui était précisément le même que précédemment. Alduis soupira exagérement :

- Quoi encore ? Je dors, vous avez déjà oublié ? Je pensais mon père plus regardant sur la mémoire de son personnel.

On ne répondit pas à la provocation. Tout ce qu’il obtint en échange fut une réplique parfaitement neutre :

- Votre père est en ce moment-même en train de la recevoir. Je me suis dit que malgré votre… sommeil… vous voudriez en être tenu au courant.
- Qui est-ce que mon père reçoit au juste ?
- Mais Eléonore de Tianidre, messire. Comme je vous le disais, elle...
- Ah oui ! encore elle ! vous ne lui avez pas dit que je dormais ?
- Si, messire, comme vous me l’avez signalé. Mais votre père a décidé de la recevoir en attendant votre… réveil.
- Mais de quoi se mêle-t-il encore, celui-là ?
grommela-t-il entre ses dents avec une mimique agacée.

Il se releva. De toute évidence, il n’avait plus le choix désormais. Pour lui qui n’avait pas envie de parler, il fallait croire que les choses l’y poussaient. Un peu plus ou un peu moins maintenant. Il devait bien s’assurer que cette chère Éléonore ne raconte rien de compromettant. C’était leur promesse, après tout, n’est-ce pas ?

- Je vais y aller.

o~o~o

Il entra dans la pièce, alors que Léonilde venait de l’annoncer - bien contre lui, si cela n’avait été que de son ressort, il serait entré sans rien dire. Il n’avait pas daigné s’habiller correctement, et ne daigna pas les saluer.

Il se vautra dans un fauteuil, croisa les jambes et remarqua :

- Je ne savais pas que vous receviez mes invités, vous, maintenant.
Je ne voulais pas parler. Vous venez de casser tout mon plan.

- Je suis encore le Maitre de ce château et à ce titre, il m'appartient de recevoir ou d'éconduire les visiteurs qui s'y présente. Qui plus est, c’est une femme, lui fut-il répondu.

Alduis haussa des épaules :

- Et alors ? Vous ne vous en réjouissez pas ? J’aurai cru.

Il se pencha en avant pour prendre un apéritif sur la table. Et daigna enfin se tourner vers Éléonore :

- Vous vouliez me parler ? Maintenant que je suis réveillé, allez-y.
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Message par Éléonore de Fromart Ven 6 Nov - 20:55

Alduis entra. S’il restait encore un doute à ôter, c’était fait : cet homme méprisait les bonnes manières. Il s’adressa à son père de manière assez grossière. Même en privé, Eléonore ne se serait pas permis d’être aussi sèche avec son oncle.

Soit. Elle espéra sincèrement qu’il n’avait pas entendu cette histoire d’invitation, ou, du moins, qu’il ne relèverait pas. La situation était déjà bien assez embarrassante sans qu’il n’y ait besoin d’en rajouter.

Enfin, il s’adressa à elle. Réveillé. Alors, il dormait encore à des heures pareilles… Soit. De toute manière, que ce fut vrai ou non, cela ne modifiait en rien la situation.

--- S’il m’était parvenu que vous n’étiez pas d’humeur avant qu’on ne me fasse entrer, j’aurais fait demi-tour, tint-elle à préciser.

C’aurait certainement été plus simple. Cela lui aurait épargné la rencontre avec son père et cette drôle impression qu’elle lui laissait.

Eléonore attendit que la porte fut bien refermée. Peut-être était-ce une précaution inutile, mais elle baissa la voix.

--- J’aimerais vous demander une faveur, annonça-t-elle. C’est… A propos d’Ariste, mon cousin. Que… Enfin, nous savons tous deux que vous savez de qui il s’agit.

Elle hésita. Elle n’avait presque pas dormi ces quatres dernières nuits. Ce n’était certes pas pour se dégonfler maintenant.

--- Si vous préférez un autre jour, je le comprendrai. Mais… J’aimerais vous demander…

Sa gorge se serra. Ariste… Ne parviendrait-elle jamais à se détacher de sa peine ?

--- Si vous vous êtes souvenu de son poignard, de son prénom… C’est ridicule, mais je me demandais si vous ne pouviez pas me parler de lui. Après son départ, je ne sais de lui que ce que ses lettres ont bien voulu me dire... Enfin… Vous devez bien vous souvenir d’une anecdote, au moins. Une petite chose, n’importe quoi. Je sais que vous ne me devez rien, mais cela ne vous coûte rien, et cela me tient vraiment à coeur.

Et au moins, s’il la remballait maintenant, elle ne pourrait pas se reprocher de ne pas avoir essayé.
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Message par Alduis de Fromart Lun 9 Nov - 21:23

Son père avait quitté le salon, sous le regard grognon de Alduis. C’était une femme. Certes. Mais qu’est-ce que son père pensait ? Il avait toujours le même avis sur les robes : une barbarie dans laquelle on s’emmêlait trop facilement. Il renifla ostentiblement tandis que la porte se refermait. Qu’il aille se faire voir chez ses putes.

Alduis eut un sourire plein d’ironie. Mais était-elle donc aussi naïve ? Il remonta ses manches sur ses avants-bras, révélant les quelques cicatrices qu’il avait récoltées à la guerre, en remarquant :

- Je ne suis jamais d’humeur pour les discussions autour d’un petit thé. Et pour votre gouverne, ma chère Éléonore, ce n’est pas moi qui vous ait fait entrer mais mon père. Je vais être franc : je n’ai toujours pas envie de parler.

Il fit une pause et conclut, après avoir laissé quelques temps de silence pour la faire mariner :

- Mais puisque vous êtes là, maintenant… vous n’allez pas partir, n’est-ce pas ? Alors parlez.

Parlez, et non pas parlons. Il n’avait strictement aucune envie d’alimenter la conversation. La jeune femme baissa la voix. Alduis la toisa sans broncher, sans laisser la moindre émotion percer le voile implacable qui recouvrait son visage.

Une faveur. Inutile d’être devin pour comprendre ce que cette faveur concernerait. Ou plus justement : qui. De nouveau, il laissa le silence s’étirer entre eux une fois qu’elle eut parlé. Enfin, il mit sa main gauche, la seule qui soit en état, derrière sa nuque avant de remarquer avec un sourire entendu :

- Alors c’était donc votre cousin.

Et ce fut tout. De nouveau, il ne lâcha plus un mot. Si bien qu’elle poursuivit, mal à l’aise. Il fallait dire que le regard froid que Alduis dardait sur elle n’était pas fait pour la détendre.

- Si vous préférez un autre jour, je le comprendrai.

Alduis leva la main pour la couper.

- Vous êtes ici, alors autant en profiter, répéta-t-il, lassé. Je vous l’ai déjà dit, et je ne suis pas du genre à changer d’avis. Alors épargnez nous vos déblatérations inutiles.

Enfin, elle se décida à parler. Alduis se pencha en avant, appuya ses coudes sur ses genoux et regarda les motifs des tapis à ses pieds.

- Je me souviens de tout, Éléonore, répondit-il machinalement. De bien plus que vous ne pourrez jamais le faire.

Elle devait à peine se rappeler précisément sa journée trois jours plus tôt. Alors plusieurs années ! Il secoua la tête avec un petit ricanement. Puis il s’arrêta, aussi brusquement qu’il avait commencé. Et soupira tout à fait audiblement. Avant de se lever.

Il lui tourna le dos. Lui parler d’Ariste ?

- C’était un bon militaire. Il avait sa place dans l’armée et… il était honorable.

Il eut un hochement de tête affirmatif, comme pour le confirmer à lui-même. En pivotant sur ses talons, il se tourna vers elle, pour planter ses yeux dans les siens :

- Écoutez. Je suis mauvais pour faire la conversation. Encore plus pour raconter quoi que ce soit. Alors posez des questions. Ce que vous voulez savoir. Et je répondrai.
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Message par Éléonore de Fromart Mar 10 Nov - 19:52

Elle n’apprécia pas la façon dont il la regarda, la façon dont ses lèvres se pincèrent. Que s’imaginait-il, exactement ? C’était son père qui l’avait faite entrer. Oui, et comment aurait-elle pu le deviner avant d’entrer ?

--- Eh bien c’est fort judicieux. Demandez à votre père de recevoir tous vos invités indésirables. Laissez les mariner ainsi quelques minutes de plus, et ça leur passera l’envie de venir vous déranger pour au moins dix ans.

Pourquoi devenait-elle si sèche ? Et puis, croyait-elle seulement en ses mots ? Elle souffla rageusement sur une mèche qui retombait dans son visage. Que cherchait-elle à prouver. Elle était juste ridicule.

Elle baissa les yeux sur ses doigts crispés. Ce n’était pas une attitude à adopter lorsque l’on s’apprêtait à demander une faveur à quelqu’un. Elle n’était pas tout à fait radoucie, mais carrément honteuse. Depuis quand rejetait-elle des frustrations infondées sur des tiers ?

Elle le laissa poursuivre, puis exposa sa requête. Son cousin. Evidemment.

--- Cette situation aurait été fort embarrassante s’il avait été mon époux, fit-elle remarquer, souriant malgré elle.

Elle ne savait pas si elle devait être contente qu’il semble accepter. Il n’en avait pas envie et ne faisait rien pour s’en cacher, ce qui la mettait dans une position bien délicate. Elle n’était plus certaine de vouloir poursuivre, mais partir aurait relevé du caprice. Oh, et puis, c’était un adulte, non ? S’il ne voulait vraiment pas, il n’avait qu’à refuser par lui-même. Elle avait fait ce qu’elle pouvait.

Une remarque de son interlocuteur frappa soudain son attention.

--- De tout ? répéta-t-elle, incrédule. De tout… à quel sujet ?

Elle sourit lorsqu’il affirma qu’Ariste était un bon militaire. Qu’il était honorable. Honorable. C’était certes un terme dont certains usaient pour décrire tout et n’importe quoi, mais…

Alduis se tourna vers elle, surprenant l’air niais qui s’était peint sur ses traits. Ariste. Son cousin, son frère, son meilleur ami, sa raison de vivre… Tout ce qui la composait. Entendre parler de lui, même en termes vagues, c’était comme retrouver une partie égarée d’elle-même.

Mauvais pour faire la conversation. Elle se retint à grand peine de signaler qu’elle l’avait déjà remarqué. Mais… Poser des questions. Poser des questions ?! Elle n’avait aucune idée de question qui ne fut indiscrète. Pas avec le peu d’élément qu’elle avait… Elle sentit ses joues s’empourprer. Venir avait été une très mauvaise idée.

--- Je… Je ne sais pas. Combien de temps avez-vous servi ensemble ? Comment vous êtes-vous connus ? Comment avez-vous su qu’il était… Enfin, vous savez. Que lui trouviez-vous ? Vous deviez bien lui trouver quelque chose, non ? Enfin… Ce serait logique et…

Elle se tut. Elle parlait trop. Elle se désespérait toute seule. Quel besoin de poser de telles question ? Ariste était parfait, voilà tout. Ce n’était pas parce qu’ils étaient du même sang qu’elle n’avait pas remarqué que son cousin était beau. Quant à son caractère… Eh bien, c’était simple : toutes ses qualités, Eléonore les tenait de lui. Et il possédait également toutes celles qui lui faisaient défaut à elle. Notamment la capacité de s’exprimer de façon concise et percutante, de se taire quand il n’y avait rien à dire et de ne pas stresser et parler à tort et à travers... Pourquoi ne lui avait-il pas transmis celle-là ?

Elle l’imagina dans ce salon. Il saisissait sa main pour la rassurer. Lui seul savait vraiment l’apaiser. Il était toute sa vie. Comment avait-il osé l’abandonner ? Il savait bien, pourtant, qu’elle avait besoin de lui ! Qu’elle n’était rien, sans lui. Que sa vie n’avait pas de sens. Et il l’avait tout de même abandonnée.

Eléonore sécha ses yeux. Elle l’air stupide de pleurnicher ainsi. Que faisait-elle, là, au juste, sinon souiller le souvenir que cet Alduis de Fromart avait de son cousin en lui montrant son plus grand défaut : cette cousine faible, inutile et sotte qu’il avait pourtant adorée. Comment le sort avait-il pu lui offrir un cousin aussi parfait ? Comment quelqu’un d’aussi parfait avait-il pu réserver une si grande place dans son coeur à un boulet pareil ?

--- Excusez-moi. Je… Je ne suis pas aussi forte que lui. Je…Toute ma force c'était lui, vous comprenez ? Je l'aimais plus que tout. Il était toute ma vie. Et il est parti. Il est parti combattre, et ça, je pouvais l'accepter. Parce que je lui faisais confiance. Infiniment confiance. Et qu'il en avait besoin. Comment aurais-je pu l'en empêcher ? Si j'avais insisté, je sais qu'il aurait renoncé. Si je lui avais dit combien ça me faisait mal, il serait resté. Mais je n'avais pas le droit de lui faire ça, alors j'ai fait comme si je le supportais. Il m'écrivait. Beaucoup. Énormément. Je ne comprends même pas comment il trouvait le temps de m'écrire autant. Quand je lui demandais, il me disait qu'il aurait toujours le temps pour moi.

Éléonore étouffa un sanglot. Elle n’était pas possible. Incontrôlable. Elle se détestait.

— Mais si je l'ai accepté… C'est parce que je savais qu'il reviendrait, et que ma vie aurait à nouveau un sens. Il suffisait d’attendre. Alors j’ai attendu. J’avais envie d’être un homme, juste pour pouvoir le rejoindre. Juste pour pouvoir être avec lui. Toute seule, je suis faible, mais quand il était avec moi… Quand il était avec moi j’aurais pu affronter n’importe quoi. Et puis… Il y a eu ce jour. Ce jour ou mon coeur a éclaté dans ma poitrine. J’ai encore reçu plusieurs lettre, après. Ou il prétendait que tout allait bien. Enfin… Aussi bien que ça puisse aller là-bas. Et rien qu’à son écriture, je savais qu’il mentait. Vous allez me prendre pour une folle : je savais, au fond de moi, que j’étais entrain de lire les dernières lettres d’un mort. Je sentais qu’il manquait quelque chose là.

Elle cogna deux coups contre son coeur. Pourquoi racontait-elle tout ça. Il n’en avait rien à cirer, de toutes manières. Elle était ridicule. Elle tremblait.

--- Et enfin, on a reçu… l’annonce. J’ai… Je me suis écroulée. J’aurais préféré être morte. Ce n’est pas une façon de parler. C’était vraiment la seule chose que je voulais, mais même ça, je n’en avais plus la force. Je me sentais tellement mal que la souffrance en était physique. Vous y croyez, ça ? Qu’un battant comme Ariste puisse avoir dans sa famille quelqu’un d’aussi lâche. Même pas capable de prendre ce foutu poignard et d’en finir. Et qui vient de déballer tout ça à un parfait inconnu juste pour un moment de faiblesse. Pardonnez-moi, je ne sais pas ce qui m’a pris. Je n’avais pas l’intention de vous embêter avec mes histoires mais… J’ai vraiment besoin d’entendre parler de lui. Parce que sa mémoire, c’est tout ce qu’il me reste. Je suis désolée. Vraiment.

Ariste. Il s’imposa avec plus de force que jamais. “Calme toi, petite soeur, semblait-il lui dire. Tu es formidable. Tu souffres, c’est tout. Cela passera.” Oui, c’est ce qu’il aurait dit. Il serait même parvenu à le lui faire croire.
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Message par Alduis de Fromart Mer 11 Nov - 21:53

Alduis ne répondit pas à la pique de la jeune femme. Ce n’était pas une question d’invités indésirables. Pour ainsi dire, Alduis recevait peu d’invités. Les femmes ne l’intéressaient pas, il n’aimait pas tellement les discussions autour d’un petit thé comme il était de coutume. Quant aux hommes… il les évitait. Le plus possible. Il resta vague sur le sujet et se contenta de l’écouter exposer sa requête.

Qui concernait son cousin Ariste. Ainsi donc, son lien de famille avec lui était ici. Un petit sourire s’afficha sur les lèvres de la jeune femme et sa réplique lui en tira un aussi. Alduis n’était pas très doué en matière de plaisanterie, mais celle-ci avait quelque chose d’amusant. La situation aurait eu quelque chose de … loufoque. Et certes gênant pour elle.

Ce fut cependant à autre chose qu’il répondit. Bien plus sérieusement. Le petit sourire envolé de ses lèvres. De quoi se souvenait-il ? De tout. Il n’aurait pu dire plus précis que cela. Mais il aurait dû s’attendre à cette réaction-là.

- Tout. Chaque jour de ma vie. Depuis le 9 août 1579.

Depuis ce jour fatidique où le drap blanc avait recouvert le visage blanc et gangréné de sa mère. Il eut un sourire entendu et reprit, plus malicieusement :

- Vous voulez faire le test ? Allez-y. Dites-moi une date. N’importe laquelle.

Elles étaient toutes là. Dans un coin de son esprit. À attendre d’être rappelé à la surface. Il y avait cette fois où elles remontaient d’elles-mêmes et où il se perdait parmi elles - comme la dernière fois. Et puis, il y avait celles où il les invoquait volontairement et alors, il savait parfaitement comme les isoler les unes des autres. Malheureusement, le second cas restait plus rare que le premier.

Le sujet revint sur Ariste. Un militaire, adroit une arme dans la main. Et par dessus tout, un militaire honorable - et Alduis n’avait jamais employé ce mot à la légère. De ce genre d’hommes qu’il respectait. Ils se comptaient sur les doigts de la main, mais surprenamment, ce jeune homme brun qu’avait été Ariste en faisait partie.

Il ne manqua pas l’expression qui se peignit sur ses traits. Elle attendait sûrement des dizaines de réponses. Mais Alduis ne savait pas parler. Il n’était pas comme Bérénice qui avait toujours des choses intéressantes à dire. Il savait mieux se taire et écouter. Il laissait les gens faire la conversation pour lui alors… elle n’avait qu’à lui poser des questions.

Mais cette proposition lui laissa les joues rougies par une gêne. Et puis, elle se décida. Les questions se mirent à pleuvoir. Mais Alduis les retint toutes et y répondit, une à une, sans en oublier une seule. Le plus brièvement possible, sans s’étendre en détail. Voilà une autre chose qu’il ne savait pas faire.

- On a servi 5 ans ensemble. Jusqu’à ce qu’il meurt. Croyez-moi, quand on combat pendant tout ce temps côte à côte, on apprend à se connaître. D’une bataille à une autre, beaucoup de têtes changent alors celles qui restent, on les reconnaît vite. Pour le reste… je dirai que c’est le genre de choses que l’on devine. Surtout quand vous vivez des semaines et des semaines entourés d’hommes.

Et là-dessus, il savait ce qu’il disait. Parce que même avec toute la volonté du monde, il n’arrivait pas toujours à contrôler le désir en lui. Et que les autres n’étaient pas différents de lui. Quant à ce qu’il trouvait à Ariste… Il prit le temps de réfléchir.

- Il tenait ses promesses.

C’était une réponse bien pauvre. Certainement pas celle à laquelle elle s’attendait, mais il n’avait guère d’autres réponses à fournir. Mettre des mots sur ces sensations d’une nuit, sur ces regards échangés à la dérobée, sur ses mains moites et les battements de son cœur ? Il n’y avait pas d’amour, et pourtant, il y avait quelque chose malgré tout. Qui ne se définissait pas.

La jeune femme se tut. Il ne dit rien de plus et laissa le silence s’étirer entre eux. Qu’aurait-il pu dire de plus ? Il n’en savait rien. Alors il préféra attendre.

Il était parti dans ses pensées quand soudain… un geste dans son champ de vision le ramena au présent. Une larme au coin de son oeil. Qu’elle sécha aussitôt. La vision de ces doigts, qui venaient essuyer prestement cette perle de nacre, le déstabilisa. Il se râcla la gorge, pour chasser ce maudit noeud qui venait de s’y inviter.

Bérénice aurait su dire quelque chose pour la consoler. Mais pas lui. Il se contenta d’attendre. Il aurait préféré que les choses s’arrêtent ici. Il n’en fut rien. Bien entendu. Mais d’un autre côté… il ne s’était pas vraiment attendu à ce qu’elle en reste là.

Il l’écouta. Toujours sans mot dire. Pourquoi lui racontait-elle cela ? Que devait-il faire et dire ? Qu’attendait-elle de lui ? Plus les mots passaient ses lèvres, plus Alduis paniquait. Ses émotions s’agitaient, remuées par ce sanglot qu’elle étouffa.

- J’avais envie d’être un homme, juste pour pouvoir le rejoindre.

Une phrase.
Une seule.
Qui trouva une étrange résonance en lui. Il se revoyait, petit, admirer sa merveilleuse soeur. Toujours belle. Toujours lumineuse. Aimée et choyée. Il la comprenait. Il la comprenait, parce que lui aussi, il avait voulu être une fille. Pour être aussi belle qu’elle. Tout en sachant que jamais il ne lui arriverait à la cheville.

Il baissa les yeux, pour fuir ce regard larmoyant.

Elle avait lu ses dernières lettres.
Il avait vu ses derniers instants.

Mais comment aurait-il pu le laisser agoniser ainsi ? Il ne se ressemblait plus. Alduis se souvenait de son visage fatigué, cerné, enfoui au fond de la couche de fortune. Il semblait si fragile… Et Alduis avait eu peur. Il n’aurait pas pu rester sans rien faire. Personne n’avait voulu l’achever quand il s’était trouvé à cette même place. Il ne pouvait pas le laisser agoniser ainsi. Ariste était mort aussi dignement qu’il le pouvait. Une mort comme il le méritait. Comme il aurait voulu avoir.

Il y eut cette seconde phrase.

- J’aurais préféré être morte. Ce n’est pas une façon de parler.

Alduis le savait. Il y avait pensé tellement de fois, lui aussi. Et malgré toutes les fois où il y avait songé, celle du port et les autres, il était toujours là. Eldred disait que c’était une force. Éléonore parlait de lâcheté. Alduis, au contraire, n’était sûr de rien. De nouveau, il ne lâcha pas un mot. Il serrait ses mains l’une contre l’autre. Il y avait quelque chose dans son discours sanglotant qui se répercutait en lui.

- Je suis désolée. Vraiment.

Alduis se leva brutalement. Traversa la pièce. Et aussi maladroitement qu’il était possible de prendre quelqu’un dans ses bras, d’une étreinte certainement un peu trop musclée et rapide, il la prit dans ses bras.

Il compta jusqu’à deux. Puis toussota et recula, soudainement mal à l’aise. Il passa une main dans ses cheveux. Se râcla la gorge encore et lâcha d’une traite :

- Vous savez. On a parlé, parfois.

Ou plutôt… Ariste parlait, et lui se contentait d’écouter. Ce qui était sûr, c’était que… :

- Il parlait de vous, parfois. Souvent. Toujours en bien. Et… il n’a jamais dit que vous étiez lâche. Vous pouvez me faire confiance. Je n’oublie rien.

Maigre tentative maladroite de la consoler.
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Message par Éléonore de Fromart Jeu 12 Nov - 0:16

Se souvenir de tout… Cela surprit beaucoup Eléonore. C’était… impossible. Insensé. C’était formidable. Non… Ce devait être horrible. Absolument atroce. Peut-être pensait-elle cela parce qu’elle passait déjà sa vie à ressacer ses souvenirs… Se souvenir de s’être souvenu… Se souvenir d’avoir passé son temps à attendre... Cela n’avait rien de palpitant. Peut-être était-ce plus intéressant lorsque l’on faisait quelque chose de sa vie. Alduis faisait certainement bien plus de choses qu’elle.

Faire le test… A vrai dire c’était bien tentant. Mais c’était facile. Il aurait pu dire n’importe quoi, puisqu’elle ne connaissait rien de sa vie… Cependant… A force d’analyser les lettres d’Ariste, elle avait cru déduire quelque chose. C’était sans doute l’occasion de confirmer son intuition.

--- Le 14 novembre 1594, suggéra-t-elle innocemment.

Au reste, il répondit, méthodiquement. Elle était toujours impressionée de voir combien les autres parvenaient à employer si peu de mots pour dire tant de choses.

Ariste savait faire cela aussi. Ariste… Qui tenait ses promesses. Evidemment qu’il tenait ses promesses. C’était bien pour cela qu’il ne lui avait jamais promis de revenir vivant. Il avait promis de ne pas prendre de risques inutiles, ça oui. De se battre jusqu’au bout, de ne jamais fléchir. De lui écrire beaucoup, parce que même si elle masquait son désespoir, il savait que cette séparation lui serait assez douloureuse. Mais il n’avait jamais promis de ne pas mourir. Elle n’avait pas pensé à le lui demander. Cela semblait tellement évident. Ariste ne pouvait pas mourir. C’était impossible. Sans lui, le monde entier se serait écroulé. Il ne s’était écroulé que pour elle.

Elle se rendit au flot de paroles qui lui échappait. Ariste… Ariste l’avait abandonné et le le monde n’avait pas été assez miséricordieux pour la tuer aussi. Ariste, parfait, tué par une saleté de maladie. Si seulement c’avait été un ennemi, quelque chose qu’elle aurait pu mépriser, massacrer. Quelqu’un qu’elle aurait pu détester de toute son âme… pour ensuite pardonner. Parce qu’après tout, d’un côté comme de l’autre, les hommes se battaient pour leur pays. Pour leurs familles… Pour une raison. Mais non, elle n’avait même pas eu le droit à cela, parce que c’était une saleté de maladie qui l’avait détruit. On ne pardonnait pas à une maladie. On restait en colère et on se faisait du mal à soi-même indéfiniment. Parce que ce n’était pas juste.

Elle pleurait. Ariste avait-il pleuré ? Elle avait entendu que c’était vraiment une infection terrible. Il avait dû souffrir. Souffrir et ne rien pouvoir faire.

Elle s’excusa. Elle n’était vraiment pas venue pour s’épancher. Il devait la trouver tellement ridicule. Tellement faible.

Une brusque étreinte l’arracha à sa crise de larmes. Elle ne l’avait même pas vu bouger. Elle… C’était tellement inattendu. Elle voulut lui rappeler sa réaction lorsqu’elle-même avait effleuré son épaule… Que devait-elle faire, elle ? Lui crever les yeux ? Lui fracasser le crâne. Elle garda ses plaisanteries pour elle, trop lasse pour les partager. Trop reconnaissante également.

C’était étrange… Il ne semblait pas la juger. Il semblait… Non, cela n’avait pas de sens… Il semblait comprendre. Peut-être pas tout… Mais il semblait comprendre.

Elle sortit son mouchoir juste à temps. Il fut fort vite dégoutant, mais tant pis.

Non… Elle observait Alduis sous ses paupières lourdes de peine. Il semblait gêné. Elle s’était trompée, comme toujours. Evidemment, personne ne pouvait comprendre. Personne ne pouvait comprendre qu’une personne parle de se donner la mort comme si c’était quelque chose de normal. Même son oncle, en plein deuil, lui avait dit qu’elle était ridicule de refuser de s’alimenter. Pathétique. Mais elle n’y pouvait rien si elle ne ressentait plus l’envie de manger. Si elle n’en avait plus le courage.

La voix d’Alduis résonna de nouveau. Elle releva les yeux. Il parlait d’Ariste. Elle sourit sous son regard rouge de larmes.

--- Il ne l’aurait jamais dit. Il n’arrivait même pas à le penser. Il avait… Il avait le don de vous faire croire que vous étiez quelqu’un de formidable, et de le penser vraiment. En fait… C’était lui qui vous changeait en quelqu’un de formidable, mais il refusait de s’en attribuer le mérite.

Elle rit, d’un rire perdu entre rire et sanglot. Elle se sentait bien. Elle n’aurait su expliquer comment -- d’habitude, elle passait des jours à se morfondre quand ça la prenait -- mais la vague de désespoir était passée. Elle était encore triste, c’est vrai… Elle ne cesserait jamais d’être triste. Mais elle avait retrouvé son équilibre. Elle arrivait à penser à lui sereinement. En se souvenant du bien.

--- Merci, souffla-t-elle en frottant ses yeux. Vous êtes formidable.

Elle plaqua les mains sur sa bouche, soudain affreusement genée. Elle ne les retira que pour se reprendre.

--- Enfin… Je… Ce n’est pas ce que je voulais dire, vous n’êtes pas...

Oh, mais quel boulet… Après la crise de larme, l’enchainement d’énormités.

--- Enfin, si, mais ce n’est pas comme ça que je voulais le dire. Enfin… C’était… Tout à fait inadapté…

Elle secoua la tête. Elle aurait voulu disparaître. La voilà qui se laissait de nouveau prendre par ses tremblements. Elle se mordit la joue pour tenter de réprimer le sourire gêné qui devait vraiment lui donner un air gourde.

--- Je voulais juste dire : merci. Et… Désolée. Je n’ai pas l’habitude des gens. Je n’aime pas cela. Ça m'angoisse alors je dis n’importe quoi. Je ne vais pas vous importuner plus longtemps, mais… J’aurais une question… un peu délicate. Vous… Vous dites que vous l’avez connu jusqu’à sa mort… Je… L’avez vous vu après qu’il soit tombé malade ?

Elle ravala sa salive.

--- Soyez honnête, je dois savoir : dans quel état était-il ? Je veux dire… Ce n’était pas beau à voir, n’est-ce pas ? Il a…

Quoi donc ? Souffert ? Pourquoi posait-elle des questions auxquelles elle connaissait déjà la réponse ? Elle laissa sa phrase en suspens. Elle ne méritait pas d'être achevée. Mais elle devait essayer de comprendre la fin. Cette fin intercalée entre sa dernière lettre et le moment où un autre les informait de sa mort.
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Message par Alduis de Fromart Mer 18 Nov - 17:21

Le 14 novembre 1594.

Ce fut un flot d’images immédiat, comme si quelqu’un venait de tourner une poignée pour déverrouiller un sas. L’esprit d’Alduis était comme un immense couloir, avec des milliers et des milliers de portes qui le longeait - au même titre que sa vie se composait de milliers et de milliers de jours. Il avait en mains toutes les clefs qui permettaient d’ouvrir ces battants, et le trousseau devenait de plus en plus lourd et encombrant, davantage à chaque jour qui passait.

Quand il se trouvait devant l’une de ces entrées, il savait pertinemment qu’une seule clef avait la capacité de révéler ses mystères. N’importe qui d’autre se serait trompé ou aurait hésité. Mais pas Alduis.

Alduis choisissait toujours la bonne. Les problèmes résultaient ensuite, quand il oubliait de refermer les portes et que leurs contenus se répandaient librement.

Le 14 novembre 1594.

Éléonore avait lancé une date, sur un ton innocent. Une date comme une autre - du moins en apparence. Un simple hasard, aurait-il certains. Mais Alduis ne croyait pas aux coïncidences, encore moins quand elles touchaient à ce domaine-là.

Ce n’était pas la première qui se prêtait à cette expérience. Ce ne serait pas la dernière non plus. En tout et pour tout, Alduis avait fini par remarquer certains détails. Lorsqu’il prononçait ces quelques mots : “dis-moi une date et je te raconterai”, personne n’en lançait une totalement au hasard. Tout simplement parce que la première qui leur venait à l’esprit avait forcément une valeur significative à leurs yeux.

Aussi, que cette date, le 14 novembre 1594, sorte de la bouche de Éléonore et que ces mots lui soient adressés à lui… Non, cela n’avait rien d’un hasard. Elle savait pertinemment ce qu’elle demandait. Elle voulait avoir un moyen de vérifier qu’il ne la menait pas en bateau. Mais quel intérêt aurait-il eu à lui mentir sur ce sujet ? Strictement aucun.

Alduis eut un demi-sourire.

- Tu es sûr de vouloir entendre ça ?

Le tutoiement était venu tout seul. D’ailleurs, il n’attendit pas la réponse pour lui répondre. Elle avait demandé. Elle allait savoir. Puisqu’elle avait voulu jouer à cela, il pouvait bien jouer lui aussi.

- Il a neigé ce jour-là, le mois était déjà particulièrement froid… mais le corps de ton cousin était chaud, lui. La nuit fut moins fraîche entre ses bras.

Un sourire entendu, et il ajouta avec une expression sans équivoque :

- Dis-moi… ce qui se passait dans son lit t’intéresse tant que cela ?

Mais voilà, il y avait un autre problème avec les portes ouvertes : lorsqu’il s'aventurait trop profondément à l’intérieur des pièces, le couloir se révélait être un labyrinthe. Où toutes les salles communiquaient entre elles. Une porte en emmenait une autre et à trop s’y enfoncer, on oubliait vite par où on était venu.

Et Ariste faisait partie de ses noms qui avaient le don d’en amener de nombreuses. Des sourires par-ci, quelques mots par-là, quatre nuits de chaleur, de peau et de lèvres. Et un corps gangréné.

Ces larmes furent autant une bénédiction qu’une déstabilisation supplémentaire. Elles eurent le don de le remettre en action et de lui faire instantanément refermer les portes qui l’appelaient, comme les sirènes appelaient Ulysse. Même si… en y réfléchissant, c’était très étrange de la serrer dans ses bras et… il recula aussitôt. Il toussa, pour faire disparaître sa gêne.

Qu’aurait dit Bérénice, à sa place ? Certainement plein de choses intelligentes. Elle savait mieux consoler que lui. Elle parlait aussi facilement qu’Éléonore. Où trouvaient-elles cette facilité à ouvrir leur coeur, quand il avait la sensation que les mots restaient bloqués sur sa langue, puisqu’elle n’avait pas la force de les soulever, eux qui pesaient des tonnes ?

- Il avait le don de vous faire croire que vous étiez quelqu’un de formidable, et de le penser vraiment.

Alduis avala sa salive. Ces mots résonnaient étrangement en lui. Parce que… Parce que Bérénice était ainsi. Quand il l’écoutait, il aurait pu croire qu’il était le meilleur grand frère que le monde ait pu lui donner. Alors qu’il le savait bien, lui, qu’il était le plus maladroit de tous et que…

De nouveau, il chassa ses pensées, les repoussa dans un coin de son esprit. Pour mieux revenir à la charge. Une phrase suffit :

- Vous êtes formidable.

Alduis ouvrit de grands yeux. Il pivota sur ses talons pour l’observer. Elle avait posé ses mains sur sa bouche, mais le mal était fait. Cette fois-ci, ce fut le vouvoiement qui s’imposa :

- Je… Qu’est-ce que vous… avez dit ?

Formidable ?
Elle avait dit qu’il était formidable ?

Et voici que en quelques secondes, elle était aussi gênée que lui. Alduis ne savait plus quoi dire. Et Éléonore balbutiait des propos sans queue ni tête et s’enfonçait davantage. Il ne la regardait plus quand il répondit :

- Je n’aime pas beaucoup les gens non plus. Je… je ne sais jamais quoi dire… Et je...

... et je suis un idiot.

Il l’avait vu au plus mal. Il l’avait vu au milieu des draps nauséabonds, rongé, faiblard, maigre, au bord de la mort. Il l’avait vu incapable de se redresser tant il était épuisé. Il lui avait épargné cette agonie. Pourquoi n’y avait-il pas eu le droit, lui ? Il méritait de vivre ainsi, à moitié mort en dedans ?

Il avala sa salive. Soyez honnête. Il fut honnête.

- Vraiment pas. Vous ne l’auriez pas reconnu. Et vous n’auriez plus jamais pu vous souvenir de lui comme avant.

Car c’était ce qui restait dans son esprit, quand il pensait. Ce corps détruit et vidé de toute vie...
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Message par Éléonore de Fromart Ven 20 Nov - 23:25

--- Tu es sûre de vouloir entendre ça ?

Non, pas du tout. Mais la jeune femme n’en laissa rien paraître, trop fascinée par l’idée que son interlocuteur soit effectivement capable de se souvenir si aisément.

C’était peut-être une pure coïncidence, se raisonna-t-elle. De la déduction ? Elle imagina mille excuses pour qu’il soit capable de lui dire ce qui était arrivé un jour si lointain. Et pourtant, aucune ne la satisfaisait autant que de le croire sur parole. Il se souvenait, voilà tout.

Tout de même… Il aurait pu mentir de manière très convaincante. Avec le père qu’il avait, cela n’aurait rien eu d’étonnant. Ce genre de talent pouvait naître de l’éducation. Mais pourquoi s’inventer une mémoire exceptionnelle ? Pour se rendre intéressant ? Quelque chose clochait.

Elle l’écouta, presque jalouse. C’est auprès d’elle qu’Ariste aurait dû être. Certes pas pour le même type d’activités, mais c’était son Ariste. Il n’aurait jamais dû la quitter. Il lui avait préféré la guerre et quelques amants. Les hommes qu’il avait rencontrés en campagne étaient-ils tellement mieux que ceux qu’il avait côtoyés à Tianidre ?

--- Dis-moi… ce qui se passait dans son lit t’intéresse tant que cela ?

Elle écarquilla les yeux, les joues brûlantes. Elle ne s’était pas rendue compte ô combien sa question avait pouvait être indiscrète. Voire déplacée.

--- Non, répondit-elle simplement. Seulement ceux avec qui il le partageait. Ceux-là finissent toujours par essayer de me tuer, il faut bien que je me méfie.

Enfin, toujours… Seulement trois fois en tout, à bien y compter. Le premier, c’était celui avec qui elle l’avait surpris la première fois. Il lui avait expédié un poignard à quelques centimètre de son visage. Il l’avait rattrapée quand elle avait fait demi-tour en courant. Pour l’empêcher de parler, sans doutes… Mais Ariste avait apaisé tout le monde. Personne ne dirait rien, et s’il s’avisait de l’approcher, il le payerait très cher. Mais tout s’était arrangé sans rancune. Il n’avait agi que pour se protéger, et Eléonore ne pouvait pas lui en tenir rigueur. Ils étaient même devenus amis – l'ami le plus valable qu'il lui restait.

La deuxième fois, ce fut une autre paire de manches. Un idiot qui était tombé fou amoureux. Il ne lui avait jamais inspiré la moindre sympathie… Il n’avait pas apprécié qu’elle donne clairement à Ariste l’avis qu’elle en avait. Celui-là, il avait essayé de la jeter par-dessus la rambarde de son balcon. Elle n’avait pas eu le temps d’avoir peur qu’Ariste était apparu. Cet espèce de lâche avait fichu le camp, alors que son fameux grand amour tenait pour priorité de rassurer sa cousine. Ils ne l’avaient jamais revu vivant. Cet imbécile avait plongé contre les falaises. Eléonore s’était sentie affreusement coupable, mais Ariste l’avait convaincue qu’elle n’était en aucun cas responsable.

Il prétendait que la mort d’un homme qui s’en était pris à son sang ne pourrait jamais l’affecter… Pourquoi, alors, s’était-il empressé de se jeter dans les bras de cette maîtresse inconstante qu’était la guerre ? Pour éloigner d’elle ses amants ? Elle en doutait. Et si c’avait été le cas, force était de constater qu’il avait brillamment échoué.

Face à Alduis, dans l’église, c’était encore Ariste qui l’avait sauvée. Lui, sa force, son courage. Elle n’avait pas son charme, ni sa prestance, ni rien de tout ça. Mais elle avait son souvenir, et l’envie de le chérir encore. De respecter sa volonté.

Tu existes, Eléonore. Tu dois exister. Promets-moi de faire un effort.

Des larmes, encore des larmes. Des aveux. Une étreinte un peu brusque. Quelques mots maladroits, échappés du fond de son cœur. Ses joues devinrent plus rouges que ses yeux. Elle tenta de rattraper cette sincérité malcommode… Mais, pour changer, ce ne fit que l’enfoncer.

--- Je n’aime pas beaucoup les gens non plus. Je… je ne sais jamais quoi dire… Et je…

Eléonore sourit. Elle comprenait. Son discret hochement de tête aurait été plus éloquent que n’importe quel “je comprends”. Comme quoi, parfois, elle était capable de s’empêcher de jacasser. Plus ou moins.

Elle posa la question qui l’avait toujours tourmentée. Toujours, oui, parce que sa vie n’avait vraiment commencé que le jour maudit où ce tourment était né. Imaginer son cousin agonisant, faible, détruit. C’était pire que de l’imaginer tombé au combat, arraché par cette maîtresse trop inconstante.

Ariste méconnaissable. Ariste, terni à jamais. Ariste détruit.

--- Dites… Est-ce vrai qu’il avait refusé que l’on nous fasse prévenir ? s’enquit-elle après une longue minute de silence. Quelqu’un a joint un billet à ses affaires. Apparemment, il ne voulait pas nous informer de son mal avant que… ce ne soit fini. Ce billet disait que s’il guérissait, il nous aurait affolés pour rien, et que s’il y succombait, eh bien, nous nous serions aussi inquiétés pour rien, puisque nous ne pouvions rien y changer. Et nous aurions été au supplice de le savoir entre la vie et la mort, en espérant vainement. Que la douleur n’en aurait été que plus cruelle.

Elle retint courageusement les larmes qui lui revenaient.

--- Ça ne m’étonnait pas de lui, à vrai dire… Mais ce mot n’était pas écrit de sa main, j’en suis certaine. J’ai passé cinq ans le nez plongé dans ses lettres, j’aurais reconnu son écriture entre toutes. Si vous l’avez connu jusqu’à la fin, vous avez peut-être une idée de la personne à laquelle il aurait pu confier cela ?
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Message par Alduis de Fromart Sam 28 Nov - 15:00

Bien sûr qu’elle savait ce qu’il s’était passé entre eux, ce 14 novembre 1594 Et bien sûr que c’était un moyen pour elle de le croire, sans la moindre arrière pensée sur ce qui se passait dans le lit de son cousin.

C’était bien pour cela qu’il s’était amusé à lui poser la question. Et elle réagissait exactement comme prévu : son teint pâle venait de virer à des couleurs plus chaudes en quelques secondes à peine. Pourtant, elle ne se démonta pas. Pas tout à fait, du moins, et cela le fit sourire. Elle était amusante, en fin de compte, dans sa maladresse. Et il la comprenait plus qu’il ne l’aurait cru.

Elle avait déjà failli mourir plusieurs fois de la main des amants qui avaient partagé le lit de Ariste. Alduis la croyait volontiers. Il savait quels réflexes agissaient dans ces cas-là. Précisément les mêmes qui l’avaient poussé à plaquer Cassandre contre ce mur, sa dague sur sa gorge, quand il avait entendu son petit cri. C’était l’instinct de survie. Celui qui intervenait quand vous étiez pris en faute, en train d’embrasser quelqu’un que vous n’auriez pas dû. Il savait ce que c’était. Il le savait beaucoup trop bien.

Alduis n’avait pas longtemps était en position de force, avec sa question qui n’avait eu d’autre but que de la mettre mal à l’aise. En quelques mots, un sourire, elle avait remis les choses à plat. Il n’était pas formidable. Loin de là. Mais elle le lui avait tout de même. Fallait-il être folle.

Et maintenant qu’ils évoquaient Ariste - Ariste et le typhus - il se sentait étrangement mal. La maladie était là, en lui. Elle avait préparé son terrain une fois. Reviendrait-elle une autre fois pour finir le travail ? Certainement. Mais combien de temps attendrait-elle encore ?

Tout à coup, il eut froid, et il ressentit le besoin d’aller rajouter une bûche dans l’âtre qui crépitait dans la pièce. Il se planta face à la cheminée, une manière de fuir le regard de Éléonore. Elle était venue chercher des réponses. Mais celles qu’il détenait n’étaient pas celles qu’elle attendait. Alduis soupira. La chaleur des flammes chauffait son visage mais ce n’était pas encore assez suffisant. Il eut un long frisson comme si quelqu’un était venu sinuer autour de sa colonne vertébrale.

Ariste avait refusé de prévenir ses proches. Comme Alduis avait catégoriquement refusé que son père soit mis au courant. C’était pourtant pour des raisons différentes. Il ne répondit pas. Ce billet qu’il lui avait demandé, presque supplié, d’écrire pour lui. Alduis s’était rarement autant appliqué pour tracer quelques lignes - et cette fois-ci, il n’avait fait aucune bavure sur le papier. Parce qu’il avait conscience d’écrire la dernière lettre d’un mourant à ses proches.

Il avait même rajouté quelques mots qu’Ariste n’avait jamais dits. C’était peut-être un manque de respect, au fond… Modifier les mots d’un mort... Si elle l’apprenait, elle lui en voudrait sûrement à juste titre, mais il n’avait pu s’en empêcher. De rajouter cette simple phrase, comme s’il avait cherché à porter une partie de la douleur que ressentirait les destinataires en lisant ces mots, ces destinataires qu’il n’avait pourtant jamais vus.

Il avait ajouté ces mots, certes. Mais Éléonore ne le saurait jamais. Elle devait continuer de croire que tout venait de lui, c’était important. Il finit par hocher la tête pour lui-même et dire simplement :

- C’est moi qui ait écrit.

Alduis baissa les yeux un bref instant. Les flammes mordaient la bûche rajoutée.

- Il a eu une mort digne, murmura-t-il doucement. Je vous promets qu’il a eu une mort digne.
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Message par Éléonore de Fromart Sam 28 Nov - 22:13

Éléonore sentit une gène s'installer lorsqu'ils en vinrent à parler d'Ariste et de sa fin peu enviable. Alduis semblait soudain la fuir. Pourquoi ?

Il alla alimenter le feu, et s'obstina à se concentrer davantage sur cette pauvre bûche calcinée que sur elle.

Elle parla de ce dernier mot qu'Ariste lui avait fait parvenir. Les choses semblèrent s'apaiser. Plus ou moins, car un voile persistait. Voile qu'elle mit sur le compte du souvenir désagréable que toutes ces affaires de maladies devaient représenter... Après tout, Ariste n'avait certainement pas été le seul malchanceux, et le spectacle n'avait pas dû être plaisant.

— C'est moi qui ai écrit.

Éléonore ouvrit grand les yeux. À vrai dire, cela ne la surprenait pas plus que ça, mais elle se sentit soudain accablée d'une lourde, très lourde dette. Et d'une reconnaissance sans doute démesurée par rapport à l'effort fourni... Si personne n'avait accepté de rendre ce service à Ariste, s'il était mort sans un dernier mot... Il était difficile d'imaginer combien ce dernier message avait compté. Pour lui permettre de comprendre.

C'était aussi ce message qui lui permettait d'être là aujourd'hui. Ce message qui l'avait arrachée à cette mort si douce qui lui tendait les bras. Ce message qui lui avait rappellé la volonté d'Ariste.

Tu existes, Éléonore. Tu dois exister. Promets-moi de faire un effort.

Accordes-moi le serment que tu m'avais refusé. C'est tout ce que je veux pour toi, car je t'aime plus que tout, petite sœur.

Devait-elle remercier Alduis pour lui avoir sauvé la vie ou le haïr pour l'avoir privée de la délivrance ? Sans lui, elle ne se serait pas imposé des mois de souffrances. Sans lui, tout serait terminé. Sans lui, elle n'aurait pas non plus pu aspirer au bonheur qu'elle entrevoyait au loin et à l'existence duquel elle commençait à croire. Elle n'aurait eu aucune chance de se reconstruire. Elle n'aurait pas pu – c'était sans doute le plus important – tenter de respecter la dernière volonté de son cousin adoré.

C'était ce qui primait : la volonté d'Ariste. Il voulait qu'elle existe pour elle-même, et elle essayait pour lui. N'était-ce pas paradoxal ?

Elle pensait très vite, comme toujours. Elle parvenait à condenser de tels débats en quelques secondes, sans en perdre une miette. Sans en perdre le moindre arguments ni la moindre émotion. Personne ne se serait jamais douté que son esprit était si encombré.

— Je t'avais dit que tu étais formidable, laissa-t-elle échapper en même temps qu'Alduis lui assurait que son cousin avait eu une mort digne.

Cette fois, elle ne chercha pas à rectifier. Pas même le tutoiement qui n'avait rien à faire dans sa phrase. Elle hocha doucement la tête, pas encore consciente de ce qu'elle venait d'entendre, seulement en paix avec sa propre affirmation.

Mais soudain, elle réalisa ce qu'il venait de lui dire. Cette phrase semblait tellement dépourvue de sens qu'elle la balaya aussitôt. Comment pouvait-il mourir dignement d'une telle abomination ? En étant détruit et méconnaissable ? Ce devait être une façon de parler, une stratégie pour la rassurer. C'était la seule explication qu'elle était en état d'accepter.

Je vous le promets.

C'étaient ces mots-là qui la dérangeaient. Comment pouvait-il promettre, si ce n'était que pour la rassurer ? Si c'était un mensonge ? Certes, certains parlaient de promesses à tort et à travers, mais pas un homme qui l'avait laissée partir avec des renseignements compromettants et sa seule parole comme garantie de ne pas les divulguer. Pas un homme qui, parmi toutes les qualités d'Ariste – Ariste avait toutes les qualités du monde, il n'avait eu que l'embarras du choix – avait souligné qu'il tenait ses promesses. Cela clochait.

Éléonore se sentit soudain oppressée par l'impression qu'il lui manquait un élément essentiel. Un élément qu'une partie d'elle-même soupçonnait déjà, mais sur lequel elle n'aurait jamais osé mettre de mots.

— Pardonnez-moi, il faut que je rentre, j'ai très peu dormi depuis que je vous ai rencontré…

Elle se mordit la joue. Que de dérapages ! Ne s'en abstenait-elle que lorsque cela aurait pu la tirer d'une situation plus embarrassante encore ?

Elle ne s'en rendit pas compte, évidemment, mais cela lui avait permis d'occulter cette dernière phrase totalement insensée et de l'enterrer très profondément. De l'oublier.

— Enfin... Ce n'est pas ce que je voulais dire. Seulement, il faut avouer qu'apprendre votre identité a déclenché un torrent d'émotions très fort qui...

Elle lui jeta un regard suppliant. Ne pouvait-il donc pas l'aider à cesser de s'embourber dans les sottises qu'elle débitait ?

— Voir quelqu'un qui l'a connu... Enfin... Côtoyé. Cela peut paraître absurde, mais cela m'a fait beaucoup de bien.

Elle inspira. Ariste. Elle expira. Gabriel ; elle devait parler à Gabriel. D'ailleurs, elle n'avait toujours pas reçu de réponse quant à cette histoire de grain de beauté. Elle prit une nouvelle goulée d'air et la conserva en elle longtemps pour s'empêcher de poursuivre ses âneries.

— Soit, je suis épuisée et j'ai encore une invitation à décliner.


Elle s'abstint de s'excuser. Elle retint courageusement toutes les idioties qui se disputaient dans sa gorge. Avec un peu de chance, il ne comprendrait même pas à quoi elle faisait référence. Et de toute manière, elle n'avait rien dit qui fut véritablement offensant. C'était un fait : elle allait juste refuser un dîner, n'était-ce pas tout à fait justifiable ? C'était du pur bon sens ! Même si une part d'elle même s'évertuait à faire basculer sa décision vers le risque et la folie...

Elle se leva promptement pour interdire à ses jambes de commencer à trembler. Pour interdire à ses épaules de se rappeler ce frisson... Pour se concentrer sur le moment présent, s'ancrer dans le réel et peut-être même retrouver la raison.

— Merci, Alduis. Je... Penses-tu... Pensez-vous que nous pourrions nous revoir, à l'occasion ? Un jour où j'aurai mieux dormi et dirai moins de sottises ?

Elle déglutit difficilement. Rejet pour rejet, elle allait s'en prendre plein la figure. Elle anticipait déjà la jolie lacérations de son orgueil quand, lui aussi, déclinerait.

Quoi qu'il dise, elle avait l'impression de s'être véritablement prise d'affection pour lui. Il avait quelque chose de touchant, au delà des mots. Elle n'aurait su le décrire... Ayant déjà balayé ce doute pernicieux, elle regretta de n'avoir pas apaisé son malaise avant d'annoncer son départ. Mais c'était trop tard. C'était dit : elle allait partir.

Toutefois, quoi qu'il réponde, ils se reverraient un jour où l'autre.
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