Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
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Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le Tribunal faisait déjà salle comble. Ce n'était pas tous les jours que l'on ouvrait le procès d'un sorcier et de ses complices. La date du jugement interlocutoire avait été annoncée en chair, criée dans les rues, placardée à certains murs de Braktenn. Chacun qui se trouvait en disposition d'informations importante se voyait prier de venir témoigner à la barre. Le clair-obscur de la fin de journée tapissait les boiseries de la salle d'audience, quadrillait le parterre, tatouait les visages des ombres projetées par les croisées des fenêtres. Sous les regards des statues d'airain érigées au quatre coins de la grand' Chambre, on se pressait à prendre place le long des bancs en gradins. Les portes grinçaient, le parquet gémissait sous les pas, le bois craquait tel un corps usé par tant de jugements que les ans avaient vu se succéder là.
Les vivantes ombres des greffiers se tenaient prêtes à tout consigner. La lumière cinglante le long des lances que tenaient les gardes rappelait à chacun qu'aucun débordement ne serait tolérée. Au milieu du brouhaha des rumeurs, trois coups de maillet. La voix de l'huissier clama :
-- La cour !
Grand vacarme. Tout le monde se levait pour accueillir d'abord les dix jurés en robe noire qu'il allait s'agir de convaincre dans un sens ou dans l'autre... puis les trois juges en tenue rouge : Bontempoix, qui avait rassemblé l'ensemble des données, son collègue le juge rapporteur qui devrait en faire la synthèse et orienter son réquisitoire, un dernier auquel reviendrait la juste évaluation des sentences puis leur prononciation. Tous s'assirent dans un même mouvement. L'huissier annonça encore :
-- Son Éminence, le Cardinal Matthieu Cassin.
La populace se signa au passage du prestigieux ecclésiastique. Pour lui, une place était réservée dans le box des accusateurs, légèrement surélevé pour que plane sur l'assemblée le regard de jugement de ce monde et de l'autre. Enfin, on ordonna :
-- Faites entrer les accusés.
La petite porte du fond s'ouvrit, pour projeter au visage des deux inculpés la lumière qu'ils n'avaient quasiment pas vue depuis des jours et des jours, enfermés qu'ils étaient au fond de leur cachot. Lumière et sensation d'immensité, comme celle que devait ressentir le taureau lâché dans la grande arène après une trop longue période de claustration dans le noir d'un box. Les bruits des chaînes résonnèrent : les menottes aux poignets de Louise. Hyriel n'en portait pas, de sorte à ce qu'il se déplace lui-même sur ses béquilles sans qu'il fallut le traîner. Mais deux gardes l'entouraient de très près. La foule se penchera pour scruter les deux accusés, aux vêtements salis et aux visages sans doute marqués par la fatigue de ces trop nombreuses journées passées dans les geôles. On les fit asseoir au milieu de la salle, sur la rudimentaire sellette, en contrebas du regard des juges et de l'accusateur.
Trois jours que Lénius ne tenait pas en place. Qu'il devait s'efforcer de dormir assez pour espérer être en forme s'il devait parler au Tribunal - alors que son cœur n'était clairement pas à l'envie de sommeil. En boucle, il revoyait le sinistre trajet de son ami en cage. Il réentendait la douce voix de Claire-Marie, qui lui avait prodigué tant de réconfort et de tendresse. Elle à qui il avait promis et juré d'aller en leur nom à tous deux faire son maximum au procès. Sa bonté, la lueur céleste de ses yeux, la tendresse de ses gestes étaient pour la gargouille une source vive d'espoir où il puisait pour ce jour grave. L'invalide s'était préparé. Aujourd'hui, pas d'habit de bouffon. Pas d'instrument de musique. Mais une mine on ne pouvait plus sérieuse - autant que le lui permettaient les torsions de son visage - et une tenue de circonstances : bottes et bas noirs, chemise, manteau brun. Une aubergiste avait eu la bonté et le courage, certes contre quelques pièces d'or, d'affronter la corpulence de la gargouille et les sacs spongieux de sa chair pour l'aider à se changer.
De l'argent, Lénius venait d'en donner aussi aux huissiers à l'entrée du Tribunal, afin qu'ils daignent soulever à quatre sa chariote à travers la volée de marches puis dans la grande salle. Il fallait être riche pour se payer le luxe d'être dépendant. Partout. Tout le temps... Et riche, il ne l'était pas. Il sauterait des repas cette semaine, tant pis ! En avançant au milieu de l'assistance, comme d'habitude l'infirme peina à ne pas écraser quelques pieds, à ne pas heurter de chevilles. Si cela arrivait, il hochait la tête par habitude et présentait des excuses devenues si routinières. Il laissa couler sur lui, telle l'eau sur les plumes d'un canard, les banals regards curieux ou dégoûtés pour sa grotesque silhouette. Il n'accorda pas le moindre regard au Cardinal Cassin. Lénius ne se concentrait que sur les accusés. Hyriel... Louise... Les voir ainsi lui fendit le cœur. Il roula jusqu'à eux. Il s'efforça de garder un visage digne pour son ami, aux épaules duquel son énorme bras tordu passa, le temps d'une accolade. Il se tourna aussi vers Louise à qui il offrit un léger sourire plein d'émotion. Plus d'une fois, il l'avait côtoyée au Lupanar. Il avait toujours apprécié la conversation de Louise, son caractère, sa grande bonté pour les autres filles et même pour les esclaves de l'établissements alors que beaucoup les traitaient en moins que rien. Hyriel et Louise étaient dignes. Ils ne devaient pas... Lénius allait ouvrir la bouche mais n'eut pas le loisir de leur parler : déjà, on le sommait d'aller se trouver une place pas trop encombrante dans l'assistance. La séance allait commencer. A regrets, l'invalide s'arracha de la compagnie des deux accusés.
Enfin. Il allait payer. Le comte ne décolérait pas de l'envoûtement de sa femme et de sa fille. Le sort de Kalisha était encore incertain. Il n'était pas impossible que, puisqu'elle avait elle-même introduit le démon au domaine, elle soit appelée à cette barre à la prochaine audience. Selon ce qui allait se jouer en ce jour... Quant à Florentyna, la famille de Fromart l'acceptait comme fiancée pour le jeune Alduis, faisant apparemment fi de sa récente mauvaise expérience au contact de cette vile créature jugée en ce jour. Marthe et Prosper dardèrent leurs regards les plus méprisants sur les deux accusés : le sorcier... et une femme qui - d'après ce qu'on murmurait autour d'eux dans les bancs - était une catin. Sa complice au Lupanar. Une des trop nombreuses victimes des envoûtements de ce suppôt du Diable.
Fiers, droits, bien habillés, l'intendante et le comte traversaient les bancs. Ils baissaient leurs chapeaux pour saluer les uns et les autres. Petits sourires polis. Bonnes manières. Ils prirent finalement place. Prosper haussa son menton bien poudré. Marthe lissa les plis de sa robe.
Coup de maillet. Le juge rapporteur prit la parole :
-- La séance est ouverte. (Un temps) Au nom de sa très gracieuse et très chrétienne majesté Gérald Der Ragascorn, souverain du Saint Empire Monbrinien, ces deux accusés ont été placés en les mains des magistrats du Parlement de Braktenn ici réunis, pour y répondre de leurs crimes et être jugés en matière de foi. Nous inculpons Hyriel pour avortements, préparation et trafic de philtres criminels, exercice illégal de la médecine, sorcellerie, usage de costume et fausse identité, envoûtements et provocation à l'idolâtrie. Et nous inculpons Louise Michalet pour complicité au trafic desdites potions et desdits avortements, avec possible circonstance atténuante qu'elle soit elle-même une envoûtée. (Un temps) Pour siéger avec moi à ce tribunal et partager le poids du verdict, je vais solliciter le conseil d’autres juges et des membres du jury ici présent.
Il se leva et approcha de Louise et Hyriel.
-- Accusés, conformément à l'ordonnance monbrinienne de l'an de grâce 1231, vous avez droit de solliciter le concours de quelqu'un de vos connaissances en tant qu'avocat. Désirez-vous faire appel à une personne que nous ferons chercher dans les plus brefs délais si elle n'est pas déjà présente en cette assemblée ?
[Note MJ.
Et c'est parti ! Pour le bon déroulement de ce RP collectif tout comme de la procédure, je propose d'annoncer en HRP les différentes étapes ~ Dans un premier temps @Hyriel Radgery et @Cassandre Velasquez (Louise) peuvent s'installer, ainsi que toutes celles et ceux qui sont venus dans l'idée de témoigner - ou simplement d'écouter et d'interagir avec d'autres personnes de l'assistance, voire avec la Cour et les accusés selon l'évolution. @Irène d'Aubeville Matthieu peut aussi prendre place dès à présent, ce sera très bientôt à lui pour son réquisitoire ]
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Son moment de « gloire » était arrivé. Heureusement, il était libre de ses mouvements, c’était toujours ça pour sa dignité… La lumière dans ses yeux ne manqua pas d’aveugler Hyriel mais il plissa les paupières et avança. Le chemin était tout tracé, ses yeux pourraient se réhabituer en chemin. Le visage fermé, le regard droit devant lui, Hyriel béquilla jusqu’à sa place. Autant ne pas s’attirer des ennuis en souriant à la foule, ou en ralentissant le pas pour s’inquiéter de Louise. Il lui adressa tout de même un regard en s’asseyant, encourageant autant qu’interrogatif, et salua les juges d’un signe de tête respectueux avant de poser ses béquilles au sol.
Il tourna alors la tête et vis arriver son ami Lénius. Il lui sourit, incroyablement ému et reconnaissant, et lui rendit son accolade.
« Merci d’être venu, mon ami. »
Seule Louise aura sans doute pu entendre, voire les gardes, car il avait parlé bas pour ne saluer que lui. Il s’écarta quand on le fit partir et continua de lui sourire avant de se réadosser. Il n’accorda pas un regard à ses anciens patrons.
Laissant cette pauvre Irène aux bons soins de Guillaume, Cassandre et Florentin, Eugène avait mijoté une petite tambouille pour se décolorer rapidement et se blanchir les cheveux. Il avait adjoint à ça un peu de maquillage pour se vieillir et accentuer des rides, avant de se grimer d’un vieux chapeau à bords tombants et de vieux vêtements. Récupérant un bâton, il s’était rendu à la prévôté, courbé, pour assister au grand événement dont tout le monde parlait. Il se posta dans un coin et vit arriver les accusés. Son cœur se serra en voyant ses amis dans cette sinistre position… Il n’eut alors aucun mal à repérer Lénius et s’avança vers lui, discrètement, se glissant comme une vieille ombre au milieu de la foule. Quand l’avocat eut pris une nouvelle place, Eugène s’approcha et lui donna un très léger coup dans le bras.
« Oh, excusez-moi… » aura murmuré une voix soufflée, légèrement chevrotante, fruit de nombreux entraînements au cours de la journée.
Un instant, ses yeux cesseront d’être plissés quand il croisera le regard de leur ami et un très léger sourire étirera le coin de sa lèvre, pour signifier à Lénius qu’il n’était pas seul à soutenir leur ami, même si lui ne se contenterait que de visiter.
Coup de maillet. Hyriel écouta les chefs d’accusation sans broncher. Il suivit du regard le juge qui s’approcha de lui et baissa la tête à sa question. Un regard rapide à Lénius et il acquiesça.
« Si la cour est d’accord, j’aimerais pour ma part bénéficier de la défense de mon ami Lénius, ici présent. »
Il le désigna du regard avant de revenir au juge, sans s’attarder, même s’il crut reconnaître le vieillard courbé qui baissait la tête, sous son chapeau. Son cœur se réchauffa un petit peu…
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Finalement, ils avaient décidés de les faire sortir de leur cellule et un procès se tenait dans cette grande salle effrayante, là où les gens se rassemblaient peu à peu sur les bancs ou dans les escaliers. Après plus deux semaines de captivité, enchaînée au mur, Louise avait beaucoup perdu de son tonus musculaire et quand on l'avait détaché elle n'avait pas su se relever tout de suite. Un garde , croyant à une comédie, l'avait même giflé avant de découvrir, quand elle s'était mise debout, que la malheureuse vacilla et s'écrasa au sol. Les soldats lui laissèrent après cela un peu de temps pour désengourdir son corps enraidi mais Louise éprouva des difficultés à avancer dans les couloirs; les muscles encore tétanisés. Elle observait en même temps Hyriel se mouvoir avec ses béquilles et regrettait de ne pouvoir le soutenir.
Une fois installés sur leur banc, Louise prit discrètement la main de son ami et lui adressa un sourire timide. Que pouvait-elle dire ? Rien. Que des banalités. Alors, autant se taire. Ils risquaient tous deux leur vie. Surtout lui. Elle releva la tête vers les juges qui prononceraient bientôt la condamnation. Allaient-ils écouter ce diable de cardinal ? Elle aurait bien prié. Mais elle avait essayé, de toutes ses forces, depuis son arrestation pour que le guérisseur ne soit pas capturé. Dieu n'y avait pas répondu. Il se rangeait de leur côté. De ceux des puissants.
Elle tourna la tête quand HYriel nomma pour eux un défenseur et reconnut parmi la foule le visage singulier de Lénius. Un habitué du lupanar. Mais qui ne venait plus depuis la reprise en main de l'établissement. Il avait eu une passe une fois. Elle se rappelait de son étonnement quand elle s'était approchée de lui, dissimulant son étonnement pour ce physique si atypique, et l'avait traité comme un client ordinaire, sans lui accorder un regard de curiosité pour l'une de ses formes particulières. Malgré son dégoût de la chose, elle s'était donnée pour lui offrir un beau moment et tous deux avaient su discuter amicalement. Louise fit ainsi un sourire au troubadour.
"Oui, je souhaite moi aussi cet homme pour défenseur."
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Ce jour-là, Thierry se rendit à la prévôté de fort bonne heure et se retrouva dnas les premiers arrivants. Il se plaça dans un recoin de la salle, de sorte à pouvoir tout vu, mais sans être lui-même aperçu. Il observa les juges et le cardinal prendre place avec une impassibilité totale. Le début de la pièce débutait et les acteurs se mettaient en place. Les accusés faisaient ensuite leur apparition. Un catin, nommée Louise, serait aujourd'hui jugée comme complice du guérisseur. Il avait entendu beaucoup de rumeurs à son sujet mais peu d'informations faibles. Aussi attendait-il les chefs d'accusations pour imprimer une meilleure idée à son sujet. Cela viendrait bien assez vite. Ce serait la seconde scène du premier acte, lorsque les personnages auraient été présentés au public.
Hyriel prit soudain la parole et nomma le troubadour Lénius au poste de défenseur. La dénommée Louise le confortait dans ce choix. Thierry pivota le regard vers l'infirme puis chercha la silhouette de Matthieu, étouffant un rire intérieur. Il lui tardait de découvrir sa réaction. L'élément burlesque venait de faire son apparition. La pièce promettait d'être une comédie fort divertissante.
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La session du matin avait été éprouvante. Matthieu avait dû rapidement rentrer et se jeter dans son lit pour prendre un peu de repos. Il avait enfoncé la tête dans son oreiller avec cette sensation horrible de se craqueler de partout. La fêlure n'avait pas disparu, elle était toujours là. Il entendait des choses. Des phrases... des souvenirs ? Non, impossible. Ça ne pouvait pas être ça. Ça ne pouvait pas être lui. Il ne reconnaissait pas ce petit garçon joyeux, généreux rieur. Ce n'était pas lui... C'était impossible. Il n'avait pas été comme ça, jamais... Alors d'où venait tout cela ? Pourquoi cela continuait à lui marteler le crâne alors qu'il était loin du sorcier ?
En voyant l'heure tourner, il avait décidé de se reprendre. Il s'était levé, avait bien déjeuné avec Cecilia. Son enthousiasme et ses questions sur le procès l'avait quelque peu détendu. En rester à la théorie lui convenait bien plus. Cependant, il savait qu'il allait bien devoir y passer en fin d'après-midi. Il avait passé le reste du temps qui lui restait à relire quelques chapitres du Malleus Maleficarum puis ensuite à prier en majorité. Il avait imploré la Trinité de lui accorder sa grâce et de lui venir en aide. Après un moment, il avait commencé à se détendre. La foi lui permettait toujours de revenir à l'essentiel.
Après cette séance, il ne sentait plus aucune fêlure. Réalité ou illusion ? Peu importe, pour le moment, cela suffirait. Il avait respiré un bon coup, enfilé sa plus belle pourpre de cardinal puis avait poussé la porte. Il s'était rendu au tribunal, accompagné de Cecilia. Ils s'étaient séparés pour qu'il entre en étant présenté. Il l'avait laissé choisir sa place tout en lui recommandant de se placer de sorte de pouvoir observer attentivement. Il espérait qu'elle ne serait pas toute seule.
Il attendit, patiemment, que les juges entrent. Seul, il ferma les yeux un moment. Tout allait bien se passer... Il n'avait aucune raison.
On l'annonce.
Matthieu relève la tête et s'avance, la tête droite, le visage dur, le regard froid. Il incarne l'autorité de l’Église. Il est l'envoyé du pape. Le garant de la justice divine.
Inquisiteur, pour ce tribunal.
Lentement et avec gravité, il va s'installer dans le box des accusés. Il s'assoit dans son fauteuil, confortablement. La séance promet d'être longue. Il a intérêt de se trouver bien. En tous cas, la vue est imprenable. C'est la moindre des choses... Ainsi, il pourra surveiller de près les accusés et tout le reste de l'assemblée. Il espère que tout se passera bien.
Il parcourut du regard les bancs. Il y trouva rapidement Cecilia. Il crut bien reconnaitre Lucinde près de lui. Bien. Elle qui était si inquiète de savoir un sorcier dans la nature, elle devait être rassurée à présent. Il vit aussi le comte et sa gouvernante, auxquels il adressa un hochement de tête respectueux. Un prêtre également. Matthieu ne s'y arrêta pas mais se demandé si c'était le fameux prêtre de Saint-Eustache qui faisait tant parler de lui. Si c'était le cas, il espérait qu'il ne se permettrait pas une intervention. L'évêché se chargerait bien assez tôt de son cas.
Puis il tomba sur... Un singulier puzzle. Matthieu fronça aussitôt le nez. Encore un infirme ! Décidément, c'était une épidémie ! Sans doute était-il venu soutenir son camarade. Qu'ils aillent tous au diable ! Matthieu serra ses doigts sur ses accoudoirs. Il faudra plus d'un procès pour tous les éliminer, mais au moins, il espérait leur faire peur, les obliger à se reculer, à cesser de tourner le peuple vers le péché.
Instinctivement, il redressa le menton quand on annonça les accusés. Enfin, les voilà, tous deux. La prostituée ne l'intéressait que peu. Sans doute une victime plus qu'une coupable selon lui. Peu importe. Celui qu'il voulait, qu'il tenait, enfin, c'était Hyriel. Lui et personne d'autre. Cet après-midi se jouait le premier acte de ce qu'il espérait être un retentissant succès.
Alors que le silence se faisait enfin, le juge énonça l'entrée en matière. Matthieu se tenait toujours aussi droit mais avait croisé les doigts. Il attendait avec patience. Il esquissa un sourire aux charges. Bien, voilà qui était fait et dit. Ses yeux scrutèrent les deux accusés quand le juge les autorisa à prendre un avocat. Il écarquilla les yeux en entendant un nom qu'il avait déjà perçu parfois dans la bouche des badauds. Un infirme pour défendre un infirme démoniaque ? Bouffonnerie ! Mais il ne pouvait rien dire. c'était leur droit. Et à bien y réfléchir, il venait d'enfoncer le clou et de lui offrir un argument supplémentaire. Les doigts de Matthieu craquèrent en se resserrant les uns autour des autres mais son esprit jubilait déjà, impatient.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le grand jour était arrivé. Cecilia avait été angoissée toute la journée. Dès le matin, quand le cardinal était parti pour l’interrogatoire, elle avait prié pour lui, longtemps, pour que la justice l’inspire autant que pour qu’il résiste aux paroles tentatrices du démon, s’il était bel et bien dans l’esprit du sorcier. Quand il était revenu, il était chamboulé. Elle n’avait pas osé le déranger mais se rongeait les sangs en attendant d’avoir de ses nouvelles. Que lui avait dit le sorcier pour le mettre dans cet état ? Était-il en proie au doute, lui aussi ? Mais si lui-même doutait alors comment pourrait-elle, elle, jeune novice n’ayant même pas passé vingt années sur cette terre, ne pas douter ? Ce serait impossible… Ou alors, au contraire, elle ne devait pas douter. Elle devait être enthousiaste, pour lui rendre le sourire. Elle le ferait.
Quand il sortit pour manger, elle l’accueillit avec un immense sourire et toute sa joie. Elle lui posa beaucoup de questions sur le procès, son déroulé, ses tenants et aboutissants et sur toutes sortes de choses. Elle voyait que cela le détendait alors elle continuait.
Elle se retira de son côté pour prier également, que la justice se fasse. Sa foi avec elle, elle vérifia que tout était en ordre de son côté et alla rejoindre le cardinal pour se rendre au tribunal. Elle ne doutait pas qu’avec son bel habit, magnifiquement sombre et si élégant, il ferait impression et dissuaderait les fauteurs de troubles ou les mauvais esprits de faire des difficultés… Elle se sépara de lui en l’encourageant et entra, légèrement angoissée, avant d’apercevoir Lucinde dans la foule et de la rejoindre. À deux, elles pourraient plus facilement se frayer un chemin jusqu’aux meilleures places, comme l’avait suggéré le cardinal !
Elles trouvèrent donc un petit coin, au milieu de tous ces gens. Elle reconnut le comte, visible par tous. Évidemment, il venait… mais pas son épouse et sa fille. C’était sans doute mieux. On annonça alors le cardinal et elle sourit en se signant, ravie de le voir si déterminé. Tout se passerait bien, il était assuré !
Entrèrent alors les accusés, le sorcier ainsi qu’une femme qu’elle ne connaissait pas. Était-elle sorcière, elle aussi ? Elle vit alors un homme, qu’elle avait plusieurs fois aperçu en ville dans ses promenades, souvent de loin, puis pendant le trajet vers la prison. Il était l’ami du sorcier… mais si le sorcier était coupable, alors lui aussi ?
Elle n’eut pas le temps d’y réfléchir qu’il trouva une place, puis que l’on prononça les chefs d’accusation. Elle se mordit la lèvre. Il était vraiment dangereux… mais le cardinal ne craignait rien, Dieu était avec lui. Elle se mordit la lèvre en voyant qui était appelé comme avocat. S’il était lui aussi coupable, alors il essayerait d’entourlouper la justice et de tromper le cardinal… Non, cela n’arriverait pas, le cardinal saurait voir la vérité. Forte de cette conviction, Cecilia regarda vers Lucinde, afin de voir si tout allait bien, n’osant pas parler toutefois et se contentant donc de ses yeux pour poser sa question.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Et puis, elle pourrait déterminer une chose : si son père était actuellement en ville. Lui, ou les Coutrenielle. Dans le premier cas juste pour se méfier, dans le second, pour rassurer Marie-Laurence sur son sort – elle n'obtiendrait pas le moindre soutien spontané de la dame sans que ce soit absolument nécessaire, elle ne lui ferait pas cet affront. Elle lui avait déjà donné toutes les armes nécéssaires : rigueur et volonté. C'était avec cela que l'on obtenait absolument tout.
Elle entra après avoir replacé une mèche indisciplinée dans son voile avec tout le naturel du monde. Elle n'aimait pas l'idée d'être cernée si les évènements tournaient au vinaigre. Oh, non, elle n'aimait vraiment pas cela.
Dans la salle, aucun visage familier. À part... À part celui de la jeune soeur qui entrait justement. Elles se reconnurent immédiatement, et Cecilia fendit la foule pour la rattraper et la mener vers les premières places. Lucinde était légèrement sceptique quant à cette dernière idée – elle aurait préféré rester bien en retrait – mais soit, elle ne fit pas de manières pour la suivre. Le moins qu'elle pouvait faire pour celle qui l'avait extirpée de ce très mauvais pas, c'était de la soutenir. Lucinde se demandait bien comment une âme aussi pure que la sienne pourrait affronter les dérives de l'Inquisition. D'ailleurs, elle vit bien le trouble que sa sauveuse tentait de masquer. Oui, elle serait là. La gratitude, cela ne servait à rien, mais elle le lui devait quand même.
Cecilia demeurait silencieuse. Quelque chose en elle semblait… altéré. Et pourtant, il valait mieux qu'elle prenne conscience du monde, de ce qu'il était. Pour son propre bien. Lucinde espérait seulement que cela n'arrive pas trop abruptement. Un procès pour sorcellerie ! Ce n'était décidément pas une bonne manière d'initier à l'injustice.
Plus par réflexe que par réelle conviction, Lucinde se signa à l'arrivée du cardinal. Elle aurait pu penser "c'est amusant, il faisait moins le fier l'autre jour", mais cela ne lui effleura pas l'esprit. Il savait tenir la dignité de sa fonction quand il le fallait, et cela ne méritait pas d'être tourné en ridicule par une faible aptitude à la conversation. Pour le reste – et cette idée de renforça avec l'entrée des accusés – cela ne signifiait pas pour autant qu'il avait raison. Lucinde était fort bien placée pour savoir que cela ne voulait rien dire.
Elle écouta la liste des chefs d'accusation, lèvres pincées. Eh bien, même elle n'en avait pas tant ! Enfin, soit. Elle ne croyait pas que l'homme amené soit si éminemment diabolique que prétendu, et cela n'avait rien à voir avec un envoûtements quelconque. En revanche, elle ne s'aveuglait pas quant aux crimes concrets qu'il aurait pu commettre. Elle aurait tout le procès pour se faire une idée.
Le choix de l'avocat laissa la rouquine plutôt sceptique. Elle espéra que le curieux infirme avait suffisamment de bagout pour faire oublier le reste. Sinon, le choisir, ami ou non, était une idée stupide. Enfin, soit. Après tout elle se fichait éperdument que ce prétendu sorcier s'en sorte. Cela ne changeait rien pour elle.
C'était seulement que... Le fait l'énervait. Qu'était-ce a part du suicide ? Un dernier pied de nez ? Le sien, si on venait à la retrouver et qu'elle ne croyait plus s'en sortir, ce serait de trancher la gorge d'un homme qui n'avait pas le droit de lui survivre. Oui, lui trancher la gorge. Quitte à ce qu'on la tienne coupable de quatre meurtres supplémentaires.
Elle s'enquit de Cecilia d'un regard.
Celle-ci avait visiblement eu la même initiative. Lucinde acquiesça : elle, elle le vivait excessivement bien.
— Votre foi vous protège, lui souffla-t-elle pour tenter de la rassurer. La justice saura faire valoir la vérité.
Elle n'était pas intimement convaincue de ce qu'elle disait, mais soit... Si cela pouvait aider Cecilia.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Les journées se suivaient et ne se ressemblaient pas, sauf sur un point : elles étaient toutes plus occupées les unes que les autres, mais ce n’était pas pour déplaire à Coldris que de maintenir son esprit en constant éveil. L’oisiveté réveillait ses étourneaux et juguler leurs piaillements intempestifs lui demandait plus d’énergie que tout le reste s’il ne voulait pas se faire noyer sous leurs noires plumes.
En cette fin de journée hivernale se tenait le procès du fameux présumé (mais déjà jugé coupable) sorcier. Un évènement qu’il n’aurait raté pour rien au monde, excepté sans doute une soirée avec Sa Majesté, car on ne pouvait rien lui refuser de tel. Un procès, c’était comme une représentation au théâtre : on y allait autant pour profiter du spectacle qu’être vu y assister. Quelle différence y avait-il ? Il s’agissait d’une pièce à représentation unique, ce qui ne la rendait que plus précieuse encore. Pour le reste, il n’y avait guère de différence : une scène, des acteurs, des spectateurs, des bancs et chaises. Dans le meilleur des cas, on avait même le droit à une interaction entre l’estrade et l’assistance à la façon d’une comedia del’Arte.
Pour celle-ci, Coldris comptait bien être assis aux premières loges. Ce qui ne l’avait pourtant pas empêché d’arriver à la dernière minute. Nous l’avons dit : il fallait être vu y assister. Cela impliquait donc de faire une entrée discrètement remarquée. Il était un homme important, puissant et terriblement affairé à la bonne marche du Saint-Empire : il était exclu d’arriver en avance. Qu’importe que les meilleures places soient prises, on lui en cèderait une, bon gré, mal gré.
Le visage sévère, le regard perçant, la stature droite et rigide, il s’avança du pas franc de l’homme qui connaissait son pouvoir. Il salua ici et là quelques notables déjà installés ici et là d’un signe de la tête, et de quelques mots pour les plus chanceux. Dans l’ombre d’une colonne, il remarqua la silhouette familière de Thierry, pour qui il esquissa un léger sourire en coin. Arrivé au premier rang, il adressa un regard au cardinal puis s’étendit un peu plus en courtoisie avec le comte de Monthoux -proximité familiale oblige-. Il se rendit ensuite à l’emplacement sur lequel, il avait jeté son dévolu : ce petit carré de sièges dédiés à la haute aristocratie monbrinienne. Bien entendu, tous les sièges avaient été pris d’assaut. On se leva pour saluer « Son excellence » et après quelques regards en chien de faïence, on se décida à lui céder deux places pour le prix d’une. Coldris se fit une gageure de noter intérieurement leurs noms tout en spéculant sur le service qui lui serait imploré d’ici quelques jours, semaines ou mois. Il les remercia avec le sourire et s’installa à son tour, sous le regard quasi réprobateur d’un autre noble.
- Eh bien mon cher comte, vous n’espériez tout de même pas que je manque le procès du siècle ? railla-t-il de son habituel ton empreint de sarcasme.
Les trois coups furent frappés par le juge, ouvrant la représentation. Coldris s’installa confortablement. Il avait hâte de voir les protagonistes à l’œuvre et ce qu’il avait vu de l’inculpé laissait présager du grand spectacle. D’ailleurs, Thierry avait-il prévu d’y participer ? Sans doute. Rien que pour le plaisir de faire suer à grosse goutte le cardinal Cassin. Bien, bien.
Il ne manquait qu’un peu de champagne pour profiter pleinement de toute cette mascarade.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Eltinne Mirrier, 39 ans
Un procès pour sorcellerie. Mascarade ridicule d'un pouvoir corrompu. Mais l'endroit idéal pour épier et envoyer au comte un rapport plus fourni que "Mademoiselle passe ses journées à dormir" ou "Mademoiselle est sortie".
Sortie seule ! Le matin même, encore ! Et revenue avec le sourire ! Éléonore, sourire ?! Non, vraiment, c'en était presque plus inquiétant que de la voir se lamenter. D'autant plus inquiétant après qu'elle lui eût avoué la raison de sa bonne humeur : "j'ai croisé Alduis".
En y repensant, Eltinne, qui était arrivée bien en avance pour se placer, se rappela avec dégoût de la lettre que sa protégée avait reçue. C'était qu'il avait eu le toupet d'insister, cet espèce de... La faire changer d'avis ?! Non mais ?! Son refus n'était-il pas bien assez clair ?! Dire qu'il lui avait parlé... Ils. Avaient. Parlé. "C'était juste en attendant Alduis", avait protesté la petite. Mais du "juste en attendant", c'était déjà bien trop. On voyait bien où cela menait.
Et comme si cela ne suffisait pas, il fallait qu'il se fasse encore remarquer en arrivant. Elle ne put s'empêcher de grimacer. Après presque vingt-trois ans, elle ne le détestait que plus. Tout était exclusivement de sa faute. Tout ce qui avait pu lui arriver de négatif. Coldris de Fromart était responsable de tout, c'était plus facile ainsi. Elle aurait pu aussi lui remettre sur les épaules la grèle qui détruisait les récoltes ou même les maux qui avait cloué Éléonore au lit ces derniers mois. Et de manière très concrète. Tout ce qui ne fonctionnait pas était simplement de sa faute.
Mais aujourd'hui, c'était un autre bouc émissaire qu'on jugeait. Parce qu'après tout, ce n'était que cela. Il fallait remettre les maux de la société sur quelqu'un, et cela tomberait sur cet infirme. Oh, c'était peut-être bien un criminel, mais ce n'était pas celui-là qui causait le plus de tort. Il n'était que le sacrifice d'un pouvoir corrompu.
Elle essaya de se concentrer. Le comte voudrait du concret. Pas le moindre froncement de sourcil du ministre. Alors, Eltinne essaya de se concentrer uniquement sur les évènements. Après tout, Coldris de Fromart ne pouvait plus rien faire. Éléonore était cette beaucoup plus fragile et naïve qu'elle-même à cette époque, mais elle était beaucoup mieux surveillée et plus docile. Il n'arriverait pas à lui gâcher la vie.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Célénian acquiesça. Oui, oui. Se faire discret, se faire discret... Allait-elle lui reprocher d'être le plus grand auteur de Monbrina ? Qu'était-il censé faire ? Ignorer les amis qui le saluaient ? Ridicule ! Si elle n'était pas contente, elle n'avait qu'à pas l'accompagner. Après tout, il ne lui avait même pas demandé de venir.
Bon, soit, il ferait un effort. Mais c'était bien par conscience professionnelle. Pour pouvoir suivre le procès sans qu'on ne le dérange trop.
Il alla ainsi s'installer, se contentant de rendre les salutations qu'on lui adressait – ce qui semblait déjà trop au goût de sa charmante et envahissante soeur qui marchait à son bras.
Lorsqu’il avait annoncé assister au procès, elle l’avait sommé de ne surtout pas arriver dans les derniers. Elle n’avait pas besoin d’une entrée remarquée, pas pour cela. Comme si c’était son genre de se faire remarquer quand il ne fallait pas, non mais ?! Quoi qu’elle en dise, il savait très bien accepter de ne pas être en permanence le centre de l’attention. De toute façon, il savait bien qu’il était plus intéressant que toute cette comédie, il n’avait pas besoin se se le prouver.
Soit. Ce fut sans susciter plus d’émoi qu’ils allèrent s’installer, et attendirent qu’il soit temps que cela commence. Sans un mot l’un pour l’autre. Célénian en finit même par se sentir lésé. Il était là, tout de même ! Pourquoi venait-elle si c’était pour l’ignorer ?
Il suivit avec attention l’ordre des annonces, et d’un regard, se fit une idée de chacun. Il essayait de noter des détails qu’il pourrait réutiliser. Des tics, un regard particulier, une ambiance. Evidemment, les figures de ses propres personnages venaient agrémenter sa pensée et étoffer son raisonnement.
A l’entrée des accusés, il chercha le moyen d’apercevoir ce regard que l’on disait si étrange. C’était toujours une piste intéressante. Toutefois, il fut tiré de ses réflexion par la main d’Héloïse qui lui comprimait le bras. Qu’avait-elle ? Il ne savait pas trop comment réagir. Il ne savait plus, avec elle.
Ils ne venaient pas pour revendre de la haine. Ni l’un ni l’autre. Après tout, une idole de son envergure ne s’abaissait pas à cela. Ces gens étaient-ils coupable ? La justice le dirait bien, ils verraient.
Il fronça les sourcils quand sa soeur le pinça.
— Qu’est-ce que cette… chose ? lui demanda-t-elle, avec une grimace.
Ses yeux passèrent de la jeune femme à la “chose” en question. Celui qu’on avait désigné pour défendre le sorcier et sa complice. “Chose”. Héloïse n’avait jamais été une grande poétesse. Célénian fut surpris par le physique pour le moins particulier de l'avocat de fortune... Ça, c'était intéressant ! Il se rendit compte qu'il ne savait pas du tout ce que cela représentait, comme vie. Il fallait qu'il se renseigne. Un détail intéressant à exploiter...
Il ne répondit pas à Héloïse. Elle lui avait dit de se faire aussi petit qu'une souris et il l'a prendrait désormais au mot. Il. Ne. Lui. Répondrait. Pas. Il ne mendierait pas son attention. C'était à elle de le faire.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
A leur étreinte qui se défit, Lénius adressa un dernier regard d'encouragement à son ami. Puis à Louise. Il rejoignit sa place, pressé par les soldats, mais sans leur accorder véritablement d'attention : il alla à son rythme, paisible, sérieux, sans se laisser déstabiliser. Autant se préparer à la gravité. En se garant tant bien que mal, par quelques mouvements avant-arrière-côté de sa chariote encombrante, l'infirme sentit une légère bousculade à son bas. Un vieil homme qui présenta ses excuses. En relevant vers lui ses petits yeux, troublés par la rougeur et derrière l'éclat de ses bésicles, Lénius fut intrigué par son sourire en coin. Alors, il le reconnut. Il fut assez bon comédien - fort de son expérience de comique des rues - pour dissimuler son agréable surprise : Eugène ! Costume bien réussi, lui dit-il d'un simple clin d'œil. Sa présence lui mit du baume au cœur. Hyriel n'était pas seul. L'invalide resta de marbre au déroulé des chefs d'accusation. Certains vrais, il le craignait... et d'autres complètement grotesques ne trahissant qu'un amas de superstitions jugeant le guérisseur coupable d'office.
Il entendit la demande du magistrat, les réponses des accusés. Lui, avocat. Coup dans la poitrine. Lent hochement de tête. Oh, Lénius s'était préparé à témoigner. Il avait en tête une partie de ses arguments, et des tournures qui sauraient les porter. Être désigné avocat toutefois ? L'éventualité lui avait traversé la tête et il s'était appliqué à penser ce rôle. Au cas où. Mais l'entendre se concrétiser le chargea d'un coup brusque de toute sa solennité. De toute la confiance qu'Hyriel et Louise mettaient en lui, aussi. Il n'allait pas falloir les décevoir. Il ne les décevrait pas. Lente inspiration. Regard concentré, droit devant, pénétrant. Son corps se travailla à dégager ses restes de noblesse, rouillés, enfuis si longtemps... Pas question d'être la gargouille que tout le monde ne croisait que rire au coin des lèvres, aux carrefours de Braktenn.
-- Accordé, résonna la voix du magistrat à la réponse des deux accusés. Il se tourna vers Lénius et ne retint pas une brève grimace de répulsion. Lénius qui gardait ses énormes mains posément immobiles aux accotoirs de son fauteuil. Statue sur son socle. Le drôle de virage que dessinait son corps était désormais empreint d'une rigidité franche qui, quelque part, donna fermeté et aplomb à sa corpulente personne. L'envie de pouffer passa dès lors au juge - malgré tout étonné - qui acheva : Acceptez-vous de porter cette charge comme il convient ?
-- Avec dignité et gravité, répondit-il, de sa voix sonore mais sans rien de chantant aujourd'hui. Franche et sèche. Les latinisants auront reconnu le dignitas et gravitas de la formule consacrée. Certains ici voulaient assister à une pantalonnade ? Oh, ils avaient raison : c'en était une. Le simple fait d'orchestrer des procès en sorcellerie tenait du grotesque. Les tenants de telle accusation relevaient aux yeux de Lénius de pires bouffons que lui. Il fallait cependant jouer le détestable jeu : pour la vie de son ami et de Louise.
On lui indiqua d'avancer vers la place conforme à son rôle dans la pièce. Il sentait tous les yeux couler dans son dos. Force de l'habitude : il reconnaissait ce mauvais air de malaise quand l'attention se braquait sur lui. Pour le coup il ne pourrait pas la désamorcer via le rire. En se déplaçant, Lénius avait vu le visage bouffi du Monthoux, les traits émaciés de son chacal d'intendante, la mine chafouine de Thierry d'Anjou à qui il tenait toujours un chien de sa chienne... mais qui ferait peut-être aujourd'hui encore du beau travail comme lors du procès de Tristan et Alexandre ? Les autres restaient inconnus. Des nobles, des basses branches, des qui attiraient tous les gestes déférents et des discrets. Lesquels étaient là pour s'amuser et lesquels y croyaient ? Lesquels accableraient son ami, lesquels auraient le courage de le soutenir dans ce qui semblait si tragiquement joué ? Eh bien, lui, qu'il soit tragique. Même s'il devait payer. Même si cela en ferait le prochain sur la liste de ce Cardinal si sûr de sa personne, à regarder et juger le monde en contrebas comme ce Dieu contempteur au-dessus de l'humanité-fourmilière.
On s'installait autour. Des damoiseaux. Des femmes du peuple et d'autres nobles, des âgées et des jeunettes. Quelques grands personnages firent évidemment une entrée remarquée et, tout comme au comte de Monthoux, l'assistance leur adressa les politesses qui s'imposaient. Ainsi Prosper ne manqua-t-il pas l'arrivée de Coldris de Fromart : le Ministre resta d'abord strict auprès d'une colonne, en brève compagnie d'un curé rapidement aperçu une fois au domaine. Puis le futur beau-père de Florentyna s'approcha et prit place auprès de lui. Prosper le salua d'un sourire, d'un élégant signe du coin du chapeau. Il poussa un soupir navré à l'intervention du vicomte : oh, certes, le procès du siècle... Malheureuse affaire... Mais qui semblait amuser Coldris plus qu'autre chose ? Le sarcasme de son ton pointait vers cela.
-- Oh croyez bien que j'aurais préféré me passer de cette sombre affaire. Mais puisque nous en sommes là, oui, ce procès va rester longtemps dans les annales de notre bonne capitale. (Un temps) Je suis touché de votre présence, ajouta-t-il pour la politesse, se décidant à ignorer les petits indices qui lui disaient que le Ministre prenait la chose avec ironie.
Un infirme comme avocat ? Et quel infirme ? Un monstre ! Un tas de chair et d'os mal assemblé ! Le visage du comte fut traversé d'un rictus mauvais. Eh bien ! Si le sorcier commençait dès le début à se perdre lui-même ! Croyait-il faire usage de ses adeptes ? Mais le bricolage-sur-roues parla. Correctement. Hm... Combien de temps l'illusion durerait-elle ?
Et le juge de reprendre :
-- La parole est à l'accusation, ici représentée par Son Éminence Matthieu Cassin, démonologue, inquisiteur et envoyé de Sa Sainteté le Pape. La Cour vous écoute, Votre Éminence, pour votre réquisitoire.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Un poids au cœur, c’est ce qui fut ôté d’Hyriel quand son ami accepta la charge. Il se détendit aussitôt et s’autorisa un soupir, soulagé, tout en serrant à son tour la main de Louise. Il avait eu peur qu’il n’ose pas venir comme avocat, seulement comme témoin, et qu’ils doivent se défendre seuls, mais ils seraient aidés par le meilleur avocat de cette maudite ville, il n’en doutait pas. Il remercia leur ami d’un signe de tête souriant.
Il retourna la tête vers l’assistance et ne manqua pas de repérer le Ministre des Affaires étrangères avec le comte et sa bonne amie l’intendante. D’autres étaient encore arrivés également mais il ne leur accordait aucune attention, surtout que les juges appelaient le cardinal. Ils étaient parties intégrantes d’un spectacle, désormais. Une tragédie, comme les aimait Eugène. Place donc au méchant, qui allait faire son sombre réquisitoire…
Lénius l’avait reconnu. L’autre coin de ses lèvres s’étira au clin d’œil et il reporta son attention sur la scène, car c’était bien une scène qui se jouait devant eux, simplement que la fin n’était pas visible d’avance, même si elle était présagée. Une fois que l’attention générale se sera écartée de Lénius, il se permettra, sous couvert de son manteau, de poser une main encourageante sur son épaule. Hyriel n’était pas seul, certes, mais Lénius non plus. Même s’il ne pourrait probablement pas intervenir là, Eugène était tout de même notaire, à l’origine, et connaissait ses lettres. S’ils échouaient à se tour, ils monteraient quelque chose d’encore mieux pour le prochain.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
C'est ainsi que tout à commencer, avec Winston. Une requête, loin de se douter de qui allait suivre :
- Si cela, ne peut attendre que nous rentrions, pourquoi pas - soupira-t-elle – quel est donc cette requête, mon cher Winston ?
- Pourriez, je vous prie, parler en faveur, de l’homme qui a sauvé la sœur, de votre humble serviteur ?
- Elle arque sourcils dubitatif – Mais… Qu’est-ce que c’est, que ce ton suppliant ? Mon « humble serviteur » ? Tu ne veux pas m’appeler maîtresse non plus ?
- Cela vous déciderez-t-il ?
- Elle fait de grands yeux, et lui donne un coup de poing au bras – M-mais ça ne va pas ?! Mais de qui parle-tu ? Du…
Et là elle remet : le pseudo-sorcier ! Ciel ! Cyriel ? Airelles ?! HYRIEL ! – Un truc en el donc – un jour Soraya eût semble-t-il de plus en plus de mal à respirer et beaucoup de fièvre – la fièvre quarte ! ! ! – et alors que qu’il fallait faire chercher le médecin, on ne sait par quel stratagème extraordinaire, cette " Hyriel " est arriver comme une oasis en plein désert, et la soigner avec : du orties ! Des Orties et de la menthe entre autres plantes - pour la fièvre, seulement - en rajoutant : aubépine, lavande, oranger etc... Pour la respiration ! Quand le médecin "officiel" est arriver, il lui assura que si cela n’avait pas été fait, Soraya aurait passer l’arme à gauche - un disciple de l'enseignement d'un certains "Paracelse", croyant lui-même de surcroit. Tous cela pour dire une chose : elle avait une dette envers lui, elle, Winston et surtout Soraya.
- Arquant un sourcil - Winston, je vais te taper.
- Vous venez de le faire madame.
- Toujours aussi sérieuse - Jusqu’à ce que mort s’en suivent.
- Ah…
- Elle poursuit avec un sourire en coin – mais emmène-moi d’abord, à ce foutu procès.
- Enthousiaste – Comme vous voudrez madame !
C’est donc ainsi, qu’ils arrivèrent à ce fameux procès de la mort qui tue… Entrée, ou elle fût profondément choquée par un spectacle ignoble : De l'argent, accepter par des huissiers, pour qu’un malheureux hère, puisse accéder à la grande salle. Ou était donc passer, la compassion et l’empathie, que l’on prêtait à la nature humaine ? Ou même la charité du christianisme, bon sang !
- Winston, fait en sorte que cet homme, récupère son argent.
- Mais, comment madame ?
- Elle se tourne vers lui, agacer – Il faut vraiment, que je réfléchisse à tout ?
- Non madame – Il arque un sourcil – vous pourriez y pourvoir, pour exemple ?
- Toucher… - Winston, Je te hais. Mon argent est entre tes mains, je pars m’installer.
- Bien madame.
Toutefois, on ne va pas dans une fosse aux lions, sans regarder qui est présent au préalable, et pour cela, heureusement qu’elle a pensé à amener sa coiffe, à voilure en dentelle blanche, afin de dissimuler son visage. Qui allait pour le coup très bien avec sa robe champagne, et sa cape d’hiver. Qui y avait-il donc dans l’assistance ? Quand le juge rapporteur annonça « sa très gracieuse et très chrétienne majesté Gérald Der Ragascorn », elle failli pouffer de rire, très chrétienne oui. Et elle-même, était reine des abeilles… Oh voilà qui était intéressant, son « rendez-vous » de demain : Thierry d’Anjou, soit elle en tiendrait compte. Ainsi, alors que tous le patacaisse se mettait en place, elle s’en chercha une elle-même, quand elle vit que l’on céda deux places pour le prix d’une, à… Mr.FROMART. Haussant un sourcil, elle se dit que c’était tellement attentionné de lui avoir réservé une place – C’est faux… Elle le sait. Mais c’est Despina… - ainsi donc, elle prend naturellement, comme un rien, auprès du grand monsieur aux yeux bleus – Après qu’il soit content ou non, il ne l’a pas payé non plus sa place, et ce n’est pas écrit son nom dessus… Despina suicidaire ? Non, pas du tout… - elle le salut tout de même d’un « Monsieur » sans le regarder.
Et voilà que ça va commencer, et quel début – Non, pas l’autre épouvantail rouge écarlate, avant ! Oui, le gars en chariote – quel courage, et quelle dignité, de la part de cet homme quel avait aperçu au début. Si la plupart des gens de cette assistance, avait ne serait-ce que la poussière du courage, de dignité et d’honneur, se trouvant à ses pieds – ou ses roues… - quel bien bel et meilleur empire, serait Monbrina… Peut-être même, qu’elle serait encore vivante.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Il venait à peine de s’asseoir, ravi de disposer d’une place libre à ses côtés afin de conserver un minimum de distance avec ses semblables. Coldris les connaissait tous : des nobles sans histoire, impérialistes convaincus. Il ne se sentait donc pas inquiété outre mesure, d’autant plus que Valmar se tenait toujours debout dans l’allée à surveiller les dernières allées et venues avant de prendre place à sa gauche. Et puis, l’assassiner au milieu d’un procès pour sorcellerie n’était sans doute pas la chose la plus intelligente à faire, enfin…
Il adressa quelques mots au comte de Monthoux, bien trop sérieux à son goût pour assister à cette représentation. Certes, il était directement concerné, mais que craignait-il ? Il n’était que la malheureuse victime de cette affaire diabolique.
— Allons c’est parfaitement normal. J’espère que votre épouse et votre fille se portent mieux. Nous avons tous grande hâte de faire sa connaissance.
Tous, tous, peut-être pas. Le principal concerné était incontestablement le moins impatient de tous. Coldris était désireux de la rencontrer enfin, Bérénice enjouée comme toujours à l’idée d’une telle nouvelle et Sarkeris, puisque c’était une femme, il était par définition curieux et ne manquerait pas de donner son avis sur la question.
Le comte n’eut pour ainsi dire pas le temps de répondre qu’une femme voilée s’installa à côté de lui avec un vague « Monsieur » tout juste articulé, sans un regard. En revanche, autour d’eux les regards de réprobation et les murmures outrés plurent comme un triste mois de novembre. Où se croyait cette grossière grenouille de bénitier ? Il la détailla de haut en bas. Il ne la connaissait pas. Il en était certain. Valmar s’était déjà glissé dans son dos, fidèle comme son ombre, prêt à intervenir.
— Lorsque l’on s’adresse à moi c’est « Votre Excellence », petite impertinente lâcha-t-il glacialement. D’autre part, cette place est déjà prise et je ne crois pas vous avoir autorisé à l’occuper. Je vous conseille donc de la libérer dans les plus brefs délais avant que mon garde ne s’en charge.
Il fallait être fou ou parfaitement inconscient pour oser venir s’asseoir ainsi à côté de lui, sans la moindre once de politesse élémentaire. De toute évidence, les batraciens s’imaginaient ne pas être assujettis à l’étiquette en vigueur. Toute trace de bonne humeur apparente s’était évaporée de son visage, mais il était hors de question de laisser ce malencontreux et misérable incident lui gâcher la représentation.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
- Oh mille excuse, mon bon prince. Je ne voulais point vous blessez. Permettez-moi de me faire pardonnez, en vous offrant un présent digne de vous, après ce procés.
Elle se lève alors gracieusement, altière, et s'inclinant convenablement, le salut de nouveau :
- Votre excellence.
Despina, petite ? Non, dans la moyenne, Impertinente ?... Joker ? Rancunière... Oh de jolies oiseaux.
Ainsi file-t-elle à la recherche d'une autre place, rejointe par Winston à qui elle confit :
- Winston, fais-moi penser à aller voir notre ébéniste. J'ai un cadeau à envoyer, tu sais à quel point je suis généreuse.
- Winston baisse et balance la tête, dépité - Oh... Madame - soupir - comme il vous plaira.
Il serait temps donc, que le "spectacle" commence. Winston lui retourne à proximité de l'avocat de la défense, mais n'oubli pas de garder un oeil sur la Donna...
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le libraire Bellanger avait fermé exceptionnellement son commerce quelques heures plus tôt afin de se rendre au tribunal et assister à ce procès sulfureux qui faisait grand bruit dans la capitale depuis l'arrestation du sorcier. Il ne se souvenait que trop de leur rencontre, cet animal dans sa cage, là où se devait être sa place, et encore plus l'agitation qui s'était suive, et avait longtemps retardé ce convoi. Quelle indécence ! Il ne se rappelait que trop également de ce cette créature surgie du néant et qui l'avait assommé. Par ailleurs, refusant de laisser l'affront impuni, l'homme s'était rendu dès le lendemain à la prévôté pour déposer contre celle qui l'avait agressé devant témoin sur la voie publique. On avait enregistré sa plainte et assuré que l'on ferait ce que l'on pourrait pour capturer cette femme géante. Il espérait de tout coeur que la démarche porte ses fruits.
Une bien mauvaise nouvelle était tombée depuis : cet avorton d'Alexandre avait &té libéré de sa geôle. Le bougre échappait encore aux flammes du bûcher. Quelle peste ! Tout le long de la journée de la veille et celle d'aujourd'hui, des gens avaient passé à la librairie pour lui annoncer d'une voix railleuse que son fils avait été libéré. Quels gredins ! Quels fats ! Un jour, Alexandre payerait ! Il se le jurait !
Néanmoins, le libraire dissimulait habilement ses émotions et en entrant dans le tribunal, il fit même de grands sourires en saluant quelques commerçants qui venaient le saluer. Ils échangèrent quelques mots, des banalités, puis il se décida à s'avancer vers le comte de Monthoux. Un aussi bon client, pris dans untel piège, il se devait de le flatter et de l'assurer de son soutien. L'homme s'inclina poliment devant le noble pour présenter dignement ses hommages mais ignora la domestique à ses côtés.
"Bonjour, messire, je suis bien aise de vous rencontrer en cette pénible journée. J'ai entendu, comme chacun, votre... histoire et croyez combien je suis sensible. je vous recommande de ne pas culpabiliser. Au contraire, messire, dans cette affaire, vous fûtes des plus honorables. Recueillir un infirme, lui donner sa chance... J'ai eu moi-même cette faiblesse avec le bâtard que mon épouse a un jour ramené. Je pensais en faire un homme bien. Malheureusement, ces infirmes ont le mal dans le sang. C'est ainsi. De sorte, messire, si nous sommes coupables d'une chose, messire, vous et moi-même, c'est uniquement du crime de gentillesse."
Le libraire s'apprêta à prendre congé afin de ne pas importuner le comte plus que nécessaire lorsqu'une certaine agitation attira son attention. Il tourna la tête et remarqua une femme qui venait de s'installer auprès du ministre des affaires étrangères sans la saluer dignement. Sans le moindre souci pour l'étiquette. Quelle sotte ! Sans surprise, Coldris de Fromart lui rappela avec sévérité les bons usages du monde civilisé et lui demanda de quitter cette place qui serait réservé. La dame partit mais non pas sans manifester une profonde condescendante. Et ses excuses... Elle se révélaient bienpiètres. A sa place, lui n'aurait même pas oser répondre et aurait fui rapidement. Quelle folie lavait pu lui passer par l'esprit pour passer outre de son rang ? Sans doute, de celle qui avait autrefois poussé son épouse à le quitter. Les femmes étaient si inconstantes. De par leur nature.
Désireux de plaire à un personnage aussi prestigieux, dont il suivait la carrière depuis le tout premier jour, qu'il avait par ailleurs même lancé, le libraire s'avança vers le ministre, en ignorant l'impertinente qui ne méritait pas mieux, et s'inclina le plus respectueusement que possible.
"Votre Excellence, je ne vous avez pas vu ! Quel plaisir de vous croiser ! J'espère que le pénible incident que vous venez de subir ne ternira pas votre humeur. Il y a de ces gens, on se demande ce qui leur passe par la tête ! Ah la la.. Que ce doit être pénible d"'être ainsi importuné par des personnes dépourvus d'éducation."
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Alors que les retardataires arrivaient, Matthieu scrutait les visages, cherchant ceux qu’ils devraient fixer pour achever de les convaincre. Certains étaient sceptiques, il en avait bien conscience. Sans doute se pensaient-ils intelligents. Foutaises !
Il était coupable. Il allait le montrer.
Il pourrait ainsi enfin le faire disparaître. Lui, seul témoin conscient de sa fragilité devait disparaître. Il n’avait pas d’autre alternative.
Personne ne doit jamais voir que tu pourrais te tromper, que tu es fragile.
Personne. Jamais.
Naturellement, ce fut le ministre qui fit la plus grande entrée en fanfare. Matthieu se retint de plisser les lèvres. Il n’aimait toujours pas ce qu’il dégageait et aurait préféré qu’il soit absent. Il semblait d’ailleurs que tout le monde se soit donné rendez-vous. Comme à un spectacle. Matthieu serra un peu plus les doigts sur les accoudoirs. Ce n’était pas un jeu. C’était très sérieux, de pauvres âmes étaient en jeu.
Mais tous ceux qui le remettaient en cause allaient voir… A la fin de ce procès, il rentrerait à Rome victorieux, le pape le remercierait et lui rendrait grâce pour sa mission accomplie. Il sauverait ainsi de l’errance des milliers de brebis égarées. Il les remettrait sur le droit chemin, une à une s’il le fallait.
Coldris semblait pourtant décidé à se faire remarquer. Quoique… cela ne semblait pas de son fait, plutôt d’une jeune femme bien audacieuse qui avait décidée de s’installer sans autorisation près de lui. Matthieu leva les yeux au ciel. Ils avaient bien besoin d’un conflit avant de commencer… Heureusement, elle s’écarta relativement vite. Ce fut cependant pour qu’un cireur de pompe s’approche. Il soupira. Ils auraient visiblement de tout avant que cela ne commence véritablement…
Il vit encore entrer, dans les derniers quelques autres personnes qu’il ne connaissait pas, ou auquel il ne fit pas attention. Seul un jeune homme retint son attention. N’était-ce pas le fameux auteur de roman que sa sœur adorait tant ? Il leva les yeux au ciel. Décidément, tout le monde venait ici pour se faire voir… Tout cela était ridicule…
Quand la Cour accepta le piteux avocat, Matthieu soupira, même s’il espérait le tourner en sa faveur. Ce ne serait pas avec une telle gargouille que le sorcier parviendrait à se tirer de là… Qui croirait en son innocence après qu’il ait fait appel à une créature qui semblait recrachée par l’Enfer pour le défendre ?
La formule qu’il employa le fit étrécir les yeux. Infirme, mais pas sot. Cependant lui aussi connaissait son Cicéron, et sur le bout des doigts. Malgré tout, il nota que l’homme moins homme que monstre avait de la culture. Il allait falloir la jouer fine. Mais cela, de toute façon, c’était au programme depuis le début.
Ce fut alors son tour. Son moment.
Il ne devait pas échouer.
Il n’échouerait pas.
Ce sorcier finirait sur le bûcher, emportant ses failles avec lui, ne laissant qu’une résolution de fer.
Avec tout autant de dignité et de gravité, il se leva – se dressa – lentement. Comme un chêne solide et ferme, il ancra ses pieds dans le sol et prit une grande inspiration. Nul besoin de papier, sa mémoire et sa foi étaient ses seules guides.
- Très honorables membres de la cour, mesdames, messieurs… (léger silence, comme méditatif) Avant que je ne revienne à Braktenn, le pape m’a fait appeler autour de lui dans ses appartements privés. Il m’a invité à contempler les passants dans la cour du Vatican en contrebas. Il m’a alors demandé ce que je voyais. J’ai répondu que le voyais des fidèles. Le Saint Père m’a alors repris. Dans sa grande sagesse, il m’a expliqué que ce n’étaient pas que des fidèles ; il s’agissait du peuple de Dieu. Parmi eux se trouve toujours des brebis égarées, parfois tentées par le démon. Dans sa grande sagesse, il m’a expliqué que nous devions protéger toutes ces personnes, pour le salut de leur âme, afin qu’elles passent toutes le portail de Saint Pierre.
Il parlait d’une voix calme, posé, presque paternelle. Matthieu se tourna un peu plus vers la foule.
- En revenant ici, j’étais investi d’une mission. D’un devoir. Un devoir que j’ai toujours fait passer en priorité.
Il fit de nouveau une pause. Pause parce qu’il se surpris presque lui-même. Ce n’était pas ce qu’on lui avait appris. Clarence ne lui avait jamais dit de protéger. Il fallait toujours punir.
Punir. Punir. Punir…
Jamais aider, protéger. Pourtant, cette envie, ce désir, il l’avait gardé. Gardé d’où d’ailleurs ? Une pièce semblait lui manquer dans le puzzle. Puzzle que ces failles avaient commencé à découvrir. Pendant des années, il s’était pensé comme un tableau. Une seule et même toile. Unie, harmonieuse. Il semblait pourtant qu’il y ait plusieurs parties. Et certaines lui manquaient.
Il se secoua intérieurement. Ce n’était pas le moment de s’attarder sur cela. Il avait une mission. Un devoir. Celui-ci passait avant tout.
Au moins, sur ce point, son grand-oncle et lui avait été toujours d’accord.
- Ce devoir, noble assemblée, c’est celui de vous protéger. Lorsque Notre Seigneur a quitté ce monde, il a laissé des disciples, pour guider les hommes, dont notre vénéré Pape est un héritier. Nous, cardinaux, sommes les serviteurs de cet héritage. Par là même, notre rôle et de vous aider à y voir clair et à avancer sur le chemin qui vous mènera au Bien, selon les enseignements de Notre Seigneur.
Grande inspiration. L’entrée en matière était faite. Maintenant…
- Il est donc nécessaire de vous protéger. Vous protéger car ces créatures, qui rôdent dans l’ombre. Ces serviteurs du malin qui se cachent parmi nous, prêts à bondir sur la moindre bonne âme et à la corrompre.
Il releva la tête et parcourut l’assemblée avant de pointer un doigt accusateur et un regard noir vers ses adversaires du jour.
- Ces êtres, comme notre bon Pape nous l’a enseigné, se cachent souvent sous la figure des infirmes. Leurs difformités de naissance sont des signes qu’ils ont des prédispositions à se faire entraîner du côté du mal. (pause) Et à en entrainer d’autres avec eux.
Il se tourna de nouveau vers la foule.
- Je vous l’accorde, tous ne sont pas ainsi, ce serait faire une généralité grossière. Certains, tel le Premier Conseiller de notre bien-aimé Roi, sont des personnes sérieuses et raisonnables, aptes à rendre service aux autres et à rendre le monde meilleur.
Son regard se durcit de nouveau. Il prit une nouvelle grande inspiration. Il déroula de nouveau son doigt vers Hyriel.
- Mais cette créature de Satan, elle ne mérite aucune indulgence. Aucune pitié. Vous l’avez entendu dans l’accusation : il a arraché des bébés aux ventres de leur mère. Il les a tués avant même qu’ils viennent au monde et l’a avoué, sans aucun remord. Il a concocté d’infâmes potions, pour empoisonner, pour rendre malade. Pour tuer. Nous en avons retrouvé des quantités au Lupanar et ce ne sont sans doute pas les seules. Ce genre d’action, ce mal, ne doit pas rester impuni.
Il ancra un peu plus ses pieds dans le sol et appuya ses mains sur la barre.
- Mais il y a plus grave, honorable assemblée. Cet homme, est un véritable sorcier, doué de pouvoirs surnaturels.
Il prit un air plus grave encore.
- J’ai été moi-même témoin de ses sortilèges et de ses maléfices. D’autres ici sont dans le même cas.
Il posa en particulier son regard sur Cecilia, le comte de Monthoux et Marthe. Il se redressa.
- En effet, dites-moi donc, vous tous ici, pourquoi deux honorables femmes, nobles et bien éduquées, l’une en particulier par un comte d’une illustre lignée, dans la plus pure foi chrétienne, une jeune fille raisonnable, réservée, se seraient toutes deux mis à pleurer des torrents pour un simple jardiner, à peine quelques semaines auparavant ? Comment expliquer la violence qui a été celle de la comtesse ? Comment expliquer qu’il ait fallu les enfermer et examiner leurs âmes ? Comment expliquer une telle détresse dans leurs yeux, sinon par un envoûtement ?
Il prit de nouveau une inspiration, plus tremblante mais il espérait que personne ne l’entendrait. Ce qu’il allait dire appuyait sa réflexion mais le mettait également en danger et l’exposait. Il le savait bien mais considérait que sa personne ne comptait pas. Il devait aller jusqu’au bout.
- Moi-même, j’ai malheureusement été victime de ces maléfices. J’ai pu constater son intrusion, dans mon propre esprit, sans que je puisse y remédier, malgré mes défenses et malgré la connaissance des sorciers. En un instant, il a exercé sur moi sa force maléfique et si ma volonté ne s’était pas éveillée et ne s’était défendue, elle aurait sombré dans les abysses où il a voulu l’entrainer. Il a même eu la capacité de créer des souvenirs, de les implanter dans mon esprit. De fausses images, conçues pour embrouiller l’entendement, pour le corrompre.
Il observa cette fois les juges.
- Ainsi, messieurs, j’espère que vous pouvez voir à quel point cet individu est dangereux. À quel point c’est un poison pour la société. Il s’insinue partout et corrompt même les âmes les plus nobles. Je plains toutes celles qui ont croisé son chemin et qui ont subi ses mauvais sorts. Le comte de Monthoux lui-même, a subi pour son malheur un regard qui l’a maudit. Certains d’entre vous ont pu avoir également une idée de sa puissance, lorsque des hordes d’invalides sont venus le soutenir au cortège, prouvant sa capacité à provoquer l’idolâtrie. Il avait comme une cour entière autour de lui. Regardez encore ce qui lui sert à ce moment d’avocat ! De nouveau, un infirme ! Tous ensemble, ces serviteurs du Mal, ils complotent, ils souhaitent notre ruine, notre perte.
Il pointa de nouveau Hyriel.
- Et j’ai de bonnes raisons de penser que celui qui se tient devant vous est leur chef, celui qui détient tous les pouvoirs et dispense à ses disciples les enseignements visant à nous détruire.
Il marqua une pause, plus longue, pour que tout le monde puisse prendre en considération ses paroles. Il arrivait à la fin. Il ne se sentait fort heureusement pas épuisé. Au contraire. Tout cela le galvanisait, l’emportait. Il allait gagner cette bataille, coûte que coûte. Il l’emportait et montrerait à tous leur vérité. Le monde serait alors en paix.
- Et moi, pour vous, peuple ici rassemblé, je veux être un protecteur. Je veux tous vous préserver de ses maléfices. Et ses victimes comme cette pauvre femme qui se tient à son côté et est très certainement elle aussi sous son emprise, je veux les libérer.
Ses pupilles se remirent à briller, comme si tout le feu de l’Enfer y était rentré. Sa voix tonna, assourdissante comme un coup de tonnerre, un signe du jugement dernier venu en avance.
- Pour ce faire, il n’y a qu’une seule et unique solution. Pour espérer libérer ce monde de ses mauvais sorts et de son emprise, il n’y qu’une purification qui sera efficace.
Il laissa tomber la dernière phrase avec force et violence. Cinq mots. Une sentence. Terrible.
- La mort par le bûcher.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Perdu au milieu de la salle, Nehalan ne voyait plus Monsieur Retemer. De nombreux sièges étaient déjà occupés. Vers l’avant, il semblait que ce soient des personnes haut-placées. Techniquement, il faisait partie de la noblesse et se sentait parfaitement légitime d’aller s’installer avec eux. Mais il voyait depuis la porte d’entrée qu’il y avait de l’agitation et le regard de l’un d’entre eux glaça son sang dans ses veines. Il ne préférait pas se mettre en position indélicate. Monsieur votre Père aurait sans doute souhaité qu’ils s’asseyent dans l’endroit réservé à la noblesse. Rien que pour cela, il rechignait encore plus à s’installer parmi ces gens. Les coins les plus désertés par les spectateurs car offrant une vue moins agréable du procès qui allait se jouer lui semblaient bien plus attirants. Muré dans la discrétion, il pourrait prendre des notes, ainsi qu’IL le lui avait demandé et observer ce qui se jouait.
Il se faufila entre les groupes de gens qui se formaient, murmurant diverses choses, allant de la révolte à l’insulte pure, à l’encontre des deux accusés. Il ne faisait aucun doute que l’homme au visage familier qu’il avait aperçu dans la cage de métal quelques jours au paravent en ferait partie. A sa gauche, on roulait des yeux, les lèvres pincées, on se signait, ou bien on riait, on souriait, comme si tout ceci n’était qu’une vaste mise en scène, un spectacle donné en divertissement aux Bratkennois.
Une fois assis, le jeune homme attendit encore quelques minutes, avant que le calme ne se fasse, et que l’huissier présente les différents protagonistes. Le cardinal et les juges, ne représentaient aucun visage connu mais son attention fut d’avantage retenue lorsque l’on appela les accusés. La femme menottée ne lui disait rien, « catin » murmurait un homme à côté de lui en la regardant passer. Le second accusé en revanche… Le Toc-Toc raisonna dans ses oreilles. Un visage flou s’imposa à lui. L’homme. Cet homme était le mystérieux médecin qui était venu le voir, 3 ans plus tôt. Après son passage, tout était allé mieux. Avant qu’il ne vienne, il grimaça au souvenir de la douleur qu’il avait ressentie durant ces longs jours. Cet homme était son sauveur. Il l’avait soulagé de sa souffrance, et sûrement évité une mort certaine, comment pouvait-il être accusé, de quoi d’ailleurs ? De tout un tas de choses très graves, selon ce que venait de dire l’huissier. Mais, cet homme lui avait sauvé la vie, et il en avait sûrement sauvé des tas d’autres. Ne méritais pas plutôt des louanges, pour de tels exploits ?
Le jeune homme ne savait guère qu’en penser. Il suivit d’un œil distrait ce qui se disait, préférant s’appliquer à griffonner quelque chose qui satisferait son maître, ce qui n’était guère une tâche facile. Il décida de noter les noms et rôles des protagonistes du procès. A ce moment, le cardinal se leva, du haut de sa loge. Dans longue robe pourpre, il avait quelque chose de vraiment impressionnant. Il écouta son discours, absorbé par tant d’éloquence, de maîtrise des mots. Tout ce qu’il disait, semblait, si… vrai ! Instinctivement, il lui aurait immédiatement donné raison. Il ne réalisa l’ampleur de la peine proposée que quelques minutes plus tard. Le bûcher ? Une mort si douloureuse ? Pour un être qui avait voué sa vie à sauver les malades ? Qu’est-ce qui prouvait qu’il était coupable de sorcellerie ? et s’il était un sorcier, l’avait-il ensorcelé ? La seule fois où il avait été en contact avec lui, le sorcier avait guéri sa maladie, ses sortilèges n’étaient peut-être pas mauvais ?
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
La présence de Lucinde à ses côtés était un réconfort pour la jeune sœur. Seule au milieu de tant de gens, plus grands qu’elle pour certains, elle aurait sans doute eu peur, surtout que les procès sont animés…
Un petit sourire naquit sur ses lèvres en croisant le regard de la jeune femme et elle se rassura de son hochement de tête. Ses paroles la détendirent et elle hocha la tête. L’entendre dire était plus efficace qu’elle ne l’aurait pensé.
« Vous avez raison. Ces juges sauront faire la part des choses. »
Elle reporta son attention autour d’elle. Des gens continuaient à arriver, même parmi les nobles. Ils allaient et venaient, une femme se faisait renvoyer d’une place qu’elle avait apparemment prise… Elle espérait de tout cœur que rien de fâcheux ne se passe…
L’appel du cardinal interrompit ses pensées. Instinctivement, ses talons se relevèrent et son corps s’étira, comme si cela l’aiderait à mieux entendre. Elle ne le quitta plus du regard, pour l’encourager si elle le pouvait. Elle fut émue par son récit, si doux, malgré tout, de son entrevue avec il Papa, si inspirante. Avec ce qu’elle savait de cet homme, par les récits du prêtre du couvent et de ses sœurs, elle ne doutait pas que cela fut vrai. Elle se laissa ensuite porter par ses paroles, un sourire aux lèvres en l’entendant parler de sa mission, celle-là même pour laquelle on l’avait envoyée apprendre auprès de lui. Elle ne put contenir un frisson en l’entendant répéter les crimes de l’accusé, en détail, terribles. Et il avait avoué, en plus ? Quelle horreur… Elle avala difficilement sa salive quand il parla des deux dames de Monthoux, qu’elle-même était allée voir. Les pauvres femmes… même si ce n’était pas forcément un envoûtement, de ce qu’elles avaient dit, mais un emportement de la jeunesse… à moins qu’elles soient d’un naturel calme et que le sorcier les ait envoûtées pour qu’elles s’emportent… Elle porta une main à sa bouche quand il reconnut en avoir été victime, lui-même. C’était donc pour cela qu’il était si chamboulé ? Il luttait contre les forces du mal ! La suite l’impressionna encore plus. Elle avait vu l’infirme, l’avocat, s’approcher de la cage et discuter. Ils semblaient amis… mais qu’ils soient membres d’un même culte, qui souhaitait leur perte… Non, c’était trop horrible…
La sentence qu’il demandait arriva et Cecilia se raidit. Elle avala sa salive, difficilement. Elle n’aimait pas les bûchers, c’était cruel, mais ce serait le seul moyen… C’était si horrible d’en arriver là… Elle ne voulait pas qu’ils en arrivent là… Il fallait que cet homme soit innocent, pour son propre bien… mais il semblait tellement horrible… Elle tourna son regard vers les juges. Que Dieu les guide dans leur choix et fasse éclater la vérité à travers eux…
Instinctivement, toutefois, elle se rapprocha légèrement de Lucinde, présence réconfortante dans cette salle. Et si les juges se trompaient ? Et s’ils brûlaient un innocent ? Et s’ils libéraient un coupable ? Il fallait que la vérité éclate, le doute ne pouvait subsister…
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
A défaut de pouvoir la couper des évènements - ce qui, en outre, n’eut pas été productif - la rouquine lui rappela à quoi elle devait se raccrocher. Cela sembla fonctionner. Pourquoi faisait-elle cela ? Pourquoi ne pouvait-elle s’empêcher d’être réconfortante ? Elle chercha : il fallait une raison bien triviale et absolument pas altruiste pour qu’elle puisse se rassurer. Ainsi se persuada-t-elle qu’elle agissait par pur intérêt. Pour la garder dans la manche… Même si la part la plus rationnelle d’elle-même lui rappela qu’une petite novice italienne n’eut pas été d’un grand secours si les choses tournaient mal.
Mal… Comme avec un procès pour sorcellerie. Quelques brebis égarées tentées par le démon ? Si ce n’était que ça ! Se mettre au service des autres, cela se retournait contre vous - voilà pourquoi il fallait s’efforcer d’agit par pur intérêt. Voilà pourquoi les scrupules ne menaient nulle-part !
Un devoir. Un priorité. C’était cela, précisément cela. C’était ainsi qu’elle tiendrait : sa résolution d’abord. Réfléchir dans l’ordre, agir en conséquences, et tout se passerait bien. Cette morale-là, avec ou sans surplus de bonté, avait toujours été efficace. Réfléchir dans l’ordre, c’était aussi réfléchir par soi-même. Elle savait y voir clair toute seule.
Réfléchir dans l’ordre, c’était ne pas se laisser emporter par le flot de paroles, et se concentrer sur l’argumentaire, pour avoir avoir les armes suffisante pour en démonter un similaire si le jour devait venir. On n’était jamais trop préparé au malheur, elle l’avait trop bien appris.
Bébés. Morts. Ventre de leur mère. Lucinde fronça le nez. Non seulement parce qu’en dépit de son sens pratique tout rationnel, l’avortement la révulsait, mais surtout parce que le choix des mots la ramenaient à ce grossier incident qui avait tout gâché.
Des pouvoirs surnaturels… Oui, une certaine mauvaise langue lui en avait vantés, à elle aussi. Maintenant, tous devaient se répéter qu’elle en possédait bel et bien. Elle n’y croyait pas. Tous les exemples cités par le cardinal auraient pu s’expliquer autrement… Les souvenirs soi-disant implantés, par exemple, semblaient être le revirement d’une bonne vieille crise de déni. Du déni comme… Comme rien du tout.
Lucinde leva les yeux vers le fameux accusé. Au fond, ce n'était pas ce procès qui déterminerait concrètement ce qu'il avait fait ou non. Mais si beaucoup étaient venus le soutenir, ce devait être qu’il n’était pas plus nuisible qu’un autre. De toute façon, qu’il soit coupable ou innocent, elle s’en moquait bien, non ? Qu’il finisse brûlé, ce n’étaient pas ses affaires. Elle devait uniquement penser à elle, et à être prête si d’aventure on la rattrapait. Se sentir mieux préparée l’aiderait à mieux dormir, et elle ne pourrait pas avancer sur ses résolutions tant qu’elle ne dormirait pas mieux.
Et cette pauvre Cecilia qui semblait si tourmentée ! Tout cela, ce n’était pas fait pour elle… Et si elle devait le voir brûler… Lucinde aurait dû se réjouir que la jeune femme prenne conscience de la violence du monde, mais au fond… Une part d’elle ne voulait pas que cela arrive. Parce que c’eut été dommage, à bien y penser, de ternir ce qu’il restait d’innocence. Mais là, elle pensait avec des bons sentiments stupides, pas avec sa tête.
Tant pis, elle serait tout de même là pour réconforter sa sauveuse si affectée par la situation. Si inquiète, sans doute, de savoir si la justice rendue serait la bonne, comme elle-même aurait pu l'être dans une autre vie pas si lointaine.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Au lieu que le prince a pour lui la majesté de l’empire, l’autorité des lois, l’appui de ses amis, et tout ce qui fait la défense de l’État ; et si à tout cela se joint la bienveillance du peuple, il est impossible qu’il se trouve quelqu’un d’assez téméraire pour conjurer.
Le Prince, XX, Nicolas Machiavel
Comment pouvait-on être à la fois si dévote et si impertinente ? Cela ne collait pas. Il observa de nouveau l’insolente. On pouvait se voiler pour deux raisons : parce qu’on rêvait secrètement d’épouser Dieu ou… pour passer inaperçue. Des femmes, il en avait fréquenté, et de toutes piétés, il pouvait dire avec certitude qu’impudence et bigoterie n’allaient jamais de pair. En revanche, pour quelqu’un qui souhaitait rester discrète, c’était raté. Il en déduisit donc qu’elle tenait à conserver son identité secrète, mais que cela allait à l’encontre de sa personnalité si… ostentatoire. Alors qu’elle se levait si mielleusement que Prosper devait en avoir la bave aux oreilles, il lui répondit d’un sourire charmant en inclinant la tête :
- La cause est entendue…
Et elle l’était un plus d’un titre puisqu’il comptait bien mener son enquête sur cette personne.
… Vous me faites tant d’honneur, cela me rappelle mon ouvrage favori. Ma dalla parte del principe è la mestà del principato, le leggi, le difese degli amici e dello stato che lo difendano : talmente che, aggiunto a tutte queste cose la benivolenzia populare, è impossibile che alcuno sia sì temerario che coniuri.
Devait-on y voir une pure notion de culture politique ou une menace tout juste voilée ? L’affaire était laissée au juge. Il inclina la tête imperceptiblement la tête avant une ultime salutation.
—Madame.
Il n’adressa en revanche pas le moindre regard à la silhouette qui libérait la place et se tourna aussitôt vers son garde du corps.
— Venez donc vous asseoir, Valmar, la séance va s’ouvrir d’un instant à l’autre. déclara-t-il simplement.
Coldris nota que la fallacieuse grenouille de bénitier venait d’être remplacée par le crapaud des incunables actuellement fort occupé à astiquer la grassouillette silhouette du comte qui en frétillait de bonheur sur son assise. Il fallait croire qu’on ne pouvait jamais être tranquille puisque d’un bond, c’est face à lui qu’il se retrouva à lui faire la cour.
— Que voulez-vous, hier un usurpateur et aujourd’hui un titre de toute évidence acheté, la noblesse n’est plus ce qu’elle était. Si vous le voulez bien nous discuterons éventuellement plus tard indiqua-t-il pour chasser diplomatiquement cette vieille connaissance aussi imposante que son voisin -mais pour des raisons différentes-
Le calme revint juste à temps pour l’ouverture. L’exposition fut faite, les protagonistes présentés au public et Coldris nota non sans ironie que le prévenu se faisait défendre par une gargouille. Il se rappela aussitôt de l’histoire d’Adéis et du Monsieur Gargouille-qui-n’avait-pas-d’ailes. C’était donc lui. Les choses promettaient d’être pour le moins intéressantes ! Lénius. Le fameux Lénius en personne qu’il avait aperçu de-ci, de-là au palais à l’occasion. Une langue bien pendue. Décidément, il ne regrettait pas d’être venu assister à ce procès qui s’annonçait enflammé.
S’en suivit la première scène de cet acte, entièrement dédié au réquisitoire de Matthieu et que Coldris écouta avec la pleine attention du passionné de mots qu’il était.
— Parmi eux se trouve toujours des brebis égarées, parfois tentées par le démon.
En parlant de brebis tentée par la curiosité et les expériences nouvelles, il songea à la sienne qu’il devait revoir le lendemain. Il était curieux de diner en sa compagnie et de faire un peu plus ample connaissance, et qui sait, dans sa grande sagesse il la guiderait peut-être sur de nouveaux chemins.
Ces serviteurs du malin qui se cachent parmi nous, prêts à bondir sur la moindre bonne âme et à la corrompre.
Coldris réprima un rire de justesse. Rien que cela ? Prêt à bondir comme un chat enragé sur les nourrissons innocents et sans défense ? Que de niaiseries ! Inutile de se demander pourquoi il aimait tant se soulager joyeusement dans les bénitiers. Matthieu Cassin, ou l’art de se faire passer pour Saint-Michel tuant le dragon, peut-être l’avait-on mal baptisé après tout ? Il écouta le visage sévère son allégation sur les infirmes, lui n’y voyait que le manque de chance. C’était comme avoir une mauvaise main en début de partie de cartes. Il n’y avait rien de malin, juste une fortune malicieuse.
Ce qui était surtout diabolique en revanche, c’était la façon dont le Cardinal invoqua ce cher Dyonis pour servir sa rhétorique de manière tout à fait prodigieuse ! Un argument inattaquable par la défense, car l’auditoire y verrait sa bonne foi dans la mention de la prise en compte de l’individualité et parfaitement irréfutable, car il avait bien spécifié que son réquisitoire était contre les « invalides de naissance ». Merveilleux ! Pour un peu, il en aurait applaudi l’oiseau pourpre.
C’était ensuite à un bel appel à la pitié mêlé de terreur que Coldris assista. De quoi faire frémir l’assemblée et lâcher quelques cris de stupeurs ou de condamnations de la part de certains spectateurs déjà acquis à la cause. En même temps, il suffisait de parler poupons pour que la majorité des bonnes femmes présentes en aient le poil qui se hérisse et le cœur qui se sert, sans penser un seul instant que les putains que visitaient leur mari ne pouvaient se laisser engrosser chaque mois. Joyeuse hypocrisie sociétale que voilà.
Mais il y avait plus grave que ces horreurs encore : Hyriel avait été doté par leur Seigneur (restait à déterminer lequel et c’était là tout l’objet de ce procès) de cet appendice fabuleux que l’on nommait communément langue et qui servait -entre autres plaisirs- à communiquer. Il eut alors confirmation de son hypothèse sur l’absence des deux femmes. Il adressa un regard navré de circonstance au comte alors que cette simple idée d’envoutement lui donnait envie de rouler des yeux à en passer pour fou. Il lui aurait bien fait part de sa propre hypothèse quant aux transports soudains des deux femmes, mais… il doutait qu’il n’ait envie de l’entendre, il se contenta donc de la garder pour lui. Après tout, il avait bien vu avec quelle facilité l’homme nouait le contact lors de sa visite aux geôles, il imaginait sans mal les deux jeunes femmes ingénues pendues à ses lèvres. Et il n’y avait rien de démoniaque là-dessous.
La suite de ce réquisitoire acheva pourtant l’exploit de lui arracher un plissement des yeux. Lui ? Victime de maléfice ? De fausses images ? Allons bon ! L’abus du vin de messe semblait dangereux pour la santé.
Il était bien placé pour savoir qu’il suffisait parfois d’un seul mot pour briser les chaines verrouillant solidement les malles où elles étaient enfermées. Il n’y avait rien de magique, là-dedans, c’était simplement ainsi.
Et lui, par quoi pouvait-il être hanté ? De quelles images son esprit l’abreuvait-il ? Coldris fixait Matthieu qui continuait de dérouler son argumentaire, labourant allègrement le champ avant d’y semer ses graines. Mais tout ce qui intéressait désormais le vicomte était ses insidieux souvenirs qui semblaient tant le déranger. Corrompre. C’était le mot qu’il avait employé. C’était donc quelque chose qui allait à l’encontre de la personne si horriblement pieuse qu’il était aujourd’hui. Mais quoi ? Le mystère restait pour l’heure entier.
Son doigt se pointa vers le malheureux Hyriel, qui, non content d’être sorcier était désormais le roi des démons, celui qui dansait au clair de lune en s’enduisant le corps de sang de vierges et commandait aux invalides. Il ne put retenir ses sourcils de s’arquer, tant cela était ridicule. Dans d’autres circonstances, il aurait eu du mal à retenir un rire moqueur, mais il représentait le Roi. Son stoïcisme était de rigueur. Il préférait se concentrer sur le récit qu’il en ferait le lendemain au Roi. Quel dommage, il aurait adoré être aux premières loges de ce spectacle grandiloquent. Être roi n’avait décidément pas que des avantages.
Le Cardinal Cassin acheva son discours avec en emphase et en conclusion, il n’y avait vraiment que des idiots sans fond pour accepter de pareilles sornettes. Pourtant au vu des têtes qui s’agitaient à ses dernières paroles, il fallait croire que le démon envouteur d’âmes creuses de cette salle se trouvait en réalité vêtu de pourpre. Affaire à suivre.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Eltinne Mirrier, 39 ans
Que trop attentive aux faits et gestes du Ministre, Eltinne ne manqua rien de l’altercation avec cette femme qui n’avait manifestement ni esprit ni manières. Le seul résultat avait été de donner à Coldris de Fromart l’occasion de démontrer son autorité et de faire son intéressant. Il n’en manquait pas une ! Et dire qu’il y avait encore des gens pour venir ostensiblement le flatter. Comme s’il en avait besoin….
Eltinne soupira. Décidément, ce séjour en ville avait une mauvaise influence sur son humeur. Et le sort jouait à la mettre face aux plus sottes erreurs de sa vie ! C’était franchement pénible !
Elle ruminait ces regrets lorsque le cardinal engagea son réquisitoire, manifestement convaincu par les inepties qu’il débitait. Retourner l’esprit des gens, ce n’était pas l’apanage des sorciers…
Elle se concentra, jaugea la salle. Son regard déviait systématiquement. Pour elle-même et en silence, elle râlait et trouvait à redire à chaque mot de ce réquisitoire frauduleux. Et son regard déviait encore vers le plus corrompu - elle en était certaine, parce que ça ne pouvait être que lui - des hommes de cette salle. Encore une fois, c’était de sa faute ! Il l’empêchait de se concentrer avec le désagrément ausé par son existence. N’aurait-il pas pu, lui, se retrouver à la place de ces accusés de circonstances qui - quoi qu’ils aient pu faire ou non - étaient certainement bien moins nuisibles ?
Le bûcher… Oui, cela, c’aurait pu convenir pour lui qui devait bien se rire de toute cette mascarade. Pas tous les torts, pas tous les torts… Bien sûr qu’il avait tous les torts. Heureusement, elle avait éloigné de lui sa petite Eléonore qui était encore plus naïve qu’elle-même à l’époque. Mais ce n’était pas suffisant : cette ville était trop dangereuse pour une enfant si innocente. Il faudrait la ramener au plus vite à Tianidre, là où elle serait en sécurité.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Il n’aimait pas rester en retrait. Il n’était pas fait pour cela. Absolument pas. Si, même sans rien faire, il avait eu droit à l’attention de ceux qui avaient les moyens de le connaître, des troubles-fait lui avait volé l’intérêt de ses admirateurs, et même d’Héloïse. Héloïse qui bloqua son genoux d’une main ferme et avec un regard sévère quand il se mit à l’agiter.
Il acquiesça. D’accord, il se tenait tranquille. Et il se laissait entrainer par le spectacle. Décrire les visages, les émotions, les mouvements de foule. L’horreur peinte sur les visages à la mention de l’avortement. Les cœurs qui se serraient, l’inquiétude qui se propageait, les regards qui, par vagues, convergeaient vers le présumé sorcier, les commentaires chuchotés qui n’étaient, pour les oreilles de l’écrivain, qu’un bruissement étouffé. La tension de la salle, beaucoup plus marquée derrière lui qu’à l’avant, où les plus grands, pour la plupart, masquaient mieux leurs émotions. Cette émotion, oui, cette émotion. Les mots du cardinal la faisaient germer, et la foule s’en emparait.
Dire les mots avait plus de poids que de les écrire, malheureusement. Car écouter, presque tout le monde pouvait le faire. Ce qu’il aurait dû faire pour étendre son public, c’était des lectures ouvertes à tous, et pas seulement aux lettrés. Ou s’arranger pour que les aventures du chevalier Trestinian soient jouées dans les rues. Bien jouées. Il fallait trouver quelque chose. Trouver quelque chose pour que plus de monde ait accès à son talent ! Pour pouvoir créer sur les foules cette même émotion, sans pour autant qu’il faille brûler quelqu’un à la fin.
Car c’était bien cela, l’enjeu. Héloïse, en s’accrochant à son bras, lui rappelait que ce n’était pas juste une histoire, ce qui se passait ici. Héloïse qui était, malgré tout, la première dont il guettait les réactions.
Héloïse avait tenu à venir, et heureusement ! Livré à lui-même, le grand Boréalion n’aurait pas pu s’empêcher de se faire remarquer. Il était comme ça, elle le savait. Sans Delphina pour le canaliser, il était incapable de se tenir tranquille. On retrouvait alors le Célénian de leur enfance, dévasté par ce qu’il jugeait être un manque d’attention.
Alors, l’attention, elle essayait de la lui porter. D’autant plus après que sa jambe ait eu la tremblote - signe qu’il s’apprêtait à faire son intéressant. Elle lui montra quand elle était choquée - un avorteur -, quand elle était sceptique - certes, c’était un infirme et une catin, mais n’était-ce pas un argument un peu faible ? - quand avait peur - ces histoires d’envoûtements, cela ne la rassurait pas trop -, quand elle trouvait tout cela difficile - peut-être que si c’était un sorcier, le bûcher était requis mais n’était-ce pas atroce ? - et à chaque fois, elle avait l’impression qu’il faisait exprès de l’ignorer. Monsieur Boréalion et ses caprices d’artistes, qui croyait que le monde tournait autour de son nombril, que tout lui était dû, et qui, quand il trouvait une idée bonne, se persuadait qu’il en était à l’origine. Franchement, parfois, il était pénible.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Du remous, inévitable, se fit dans le public. Léger accrochage entre le Ministre et une mystérieuse femme, élégante mais irrévérencieuse – ou inconsciente et provocatrice. Bien sûr, le comte arrondit des yeux outrés en soutien à Coldris, en se demandant qui pouvait être cette riche dame voilée. Arriva le libraire Bellanger, comme d’habitude tout de miel, ce qui consola le seigneur Prosper et n’échappa point à Marthe. Tous deux le saluèrent et l’écoutèrent ramener encore l’affaire à lui, en parlant de son gamin. Décidément, une obsession. Le comte acquiesça avec compassion et dit :
— Je vous remercie de votre sollicitude, mon ami. Oui, mon domaine fut mal récompensé de sa charité mais notre bonne justice va vite faire son œuvre. Pourvu que ce procès serve d’exemple. Que chacun en apprenne la méfiance que l’on se doit d’avoir vis-à-vis de ces créatures.
Il lui sourit, puis le laissa se tourner vers le Ministre pour avoir ce bref échange sur l’importune qui venait de se faire remarquer. Navré, le comte acquiesça à deux ou trois reprises : oh oui, même dans la noblesse, tant d’arrivistes et de malappris au milieu de ceux qui arboraient un fier titre depuis des générations ! Aux nouvelle que Coldris demanda ensuite des deux femmes, il souffla :
— Oui, mieux, je vous remercie. Il tarde aussi à Florentyna de rencontrer sa belle-famille.
Plus loin, des spectatrices se désintéressèrent deux secondes de l’ouverture de l’audience en reconnaissant le beau jeune homme installé juste à côté d’elle avec une jeune dame. Une s’égosilla :
— Mais… c’est l’écrivain Borélion ! Oh ! Oh lala… Et je n’ai rien sur moi pour un autographe !
— Enfin, ma chère, lui souffla sa voisine, plus raisonnable quoique émoustillée elle aussi, tout en s’éventant. Je ne suis pas sûre que ce soit le moment. Chut ! Cela commence ! Le Cardinal va parler !
Confuse, la première finit par reporter son attention sur le réquisitoire, après un regard parcourant l’assemblée. Des gens du peuple, une nonne, de jeunes seigneurs comme ce blond tout discret à prendre des notes. Sur un banc : cinq médecins venus en groupe défendre leur digne profession s’il y avait lieu, scandalisés par ce sorcier qui se permettait d’empiéter sur leurs platebandes !
Voilà qu’arriva le premier grand moment : Son Éminence se levait, majestueux, faisant coup de pinceau écarlate attirant tous les regards au milieu de ce tableau. Imperturbable dans les valeurs qu’il défendait, il parla avec une dignité et une aisance forçant le respect du comte. Tout ce qu’il disait était si fort ! Prosper hocha la tête à plusieurs reprises, grimaça lorsqu’il fut question de ces avortements – oui ! ce criminel méritait le bûcher ! – et entendit autour de lui les murmures, soupirs et autres manifestations de terreur et de pitié animant l’assistance. Prosper se mordit la joue en entendant le Cardinal évoquer ouvertement l’ensorcellement de Kalisha et Florentyna. Diantre… Pour la discrétion, c’était fichu. Il hocha la tête au regard de compassion de Coldris, puis carra les épaules dans ce qu’il pouvait dégager de fierté quand inévitablement d’autres voisins se tournèrent vers lui, pleins d’affliction et de commisération. Au moins, ainsi que le soulignait Matthieu Cassin, elles n’avaient été que victimes. Bientôt, tout Braktenn pourrait se rendre compte qu’elles allaient mieux. L’honneur serait sauf. Enfin, le doigt pointé sur le sorcier comme une flèche. La sentence demandée. Très juste. Le bûcher. Cette créature ne méritait rien d’autre ! Prosper suggérerait volontiers aux gens d’armes, le moment venu, de faire arracher sa maudite langue avant de le conduire vers son supplicie, afin de prévenir quelque ultime insolence ou tentative de malédiction.
Un silence admiratif plana sur l’assistance après le réquisitoire. Seuls quelques chuchotis filtraient. Les membres du jury réfléchissaient, prenaient des notes. Puis la voix d’un des juges résonna :
— La Cour vous remercie, Votre Éminence, pour cette éclairante entrée en matière. Il pourra vous être demandé de poser plus tard vos questions aux témoins qui viendront parler, aux deux accusés ou même au dénommé Lénius. (Un temps) La parole est à l’avocat de la défense.
Doigts croisés, regard droit devant lui étonnamment glacial derrière ses lunettes, Lénius était resté hermétique au remous perçus en l’auditoire. Ne comptaient que Louise, Hyriel, et la grave mission dont il était investi. Se concentrer. Inspirer. Réviser dans sa tête les quelques formules qu’il avait déjà préparées. En bon comédien, il devrait improviser sa déclamation à partir d’un canevas préétabli. À la différence qu’aujourd’hui il avait laissé les blagues et chansons du bouffon loin, très loin de sa personne vêtue de sombre et sobre. Quand le Cardinal prit la parole, Lénius alla chercher au plus profond de lui l’énergie de son stoïcisme, pour affronter le chapelet d’horreurs qui allait être débité. Et cela commença. Pauvre, pauvre Hyriel… L’avocat improvisé ne put se retenir de regarder vers lui et de penser au courage qu’il lui faudrait le long d’un tel réquisitoire.
Le Cardinal dégageait une indéniable prestance. Sa voix portait, ferme et sûre dans ses convictions, tout en sachant avoir la subtilité de tirer ses temps forts et faibles, ses crescendos et accalmies telle une baguette de chef d’orchestre jouant des cordes sensibles du public. Ses arguments, Lénius s’y attendait. Une vie entière de moqueries et stéréotypes essuyés lui parut presque en cet instant avoir été une préparation pour ce moment-là. L’envoûtement, oui oui. Hyriel, idole des soirs de Shabbats et manitou d’une horde d’infirmes venant le secourir, eh bien voyons. Bien sûr, l’avocat en prit pour son grade et il ne réagit qu’en demeurant souverainement indifférent : le monstre en avait entendu et vu tant d’autres. Les invalides, hôtes de prédilection de Satan – avec cette subtilité que le cardinal prit tout de même d’en exclure les accidentés, notamment le Premier Conseiller. Habile, l’homme. Bien. Lénius nota mentalement tout ce dont il aurait besoin et avait intérêt d’être à la hauteur.
Ce beau salaud de Dyonis. Qui n’était pas là d’ailleurs. Au dernier procès, c’était lui à la place du Cardinal pour mener l’accusation. Pour demander la corde contre Tristan et Alexandre, sentence heureusement commuée en asservissement. Depuis, la gargouille ne l’avait pas revu – mais pas oublié. Pour l’heure toutefois, il fallait se recentrer : son tour venait. Le juge l’appelait à la barre.
Temps figé. Extrême tension concentrée autour de lui, remontant ses membres, enserrant son crâne. Lénius avait évidemment l’habitude de parler en public, d’improviser, de se mettre un auditoire en poche, mais aujourd’hui… Aujourd’hui on ne riait pas. Quoique, il aurait ri jaune de cette sinistre mascarade si la vie d’Hyriel et Louise n’était pas en jeu au dénouement de cette pièce. Ses énormes paluches empoignèrent ses roues. Il habita la scène du jour. Se positionna de sorte à côtoyer Louise et Hyriel, mais à moitié tourné vers l’assistance dont il s’agirait d’aller cueillir chaque membre au plus profond par les vibratos de mots, les tableaux de gestes et coutelas de ses regards. Sans oublier les juges, jurés et le Cardinal. Très audible, distincte, forte d’années de théâtre, sa voix engagea :
— Vos Honneurs, Votre Éminence, Messieurs les jurés, Seigneurs, dames et gens de Braktenn. (Un temps) Puisque le Cardinal nous a invités à Rome, c’est vers la Grèce que je vous convie à tourner nos regards. Cette Grèce archaïque, avant qu’elle ne rayonne par la Raison qui en fait aujourd’hui encore un modèle. En ces temps reculés, il était courant de torturer un Pharmakós : c'est à dire un individu désigné – souvent parmi les esclaves ou les infirmes – pour porter injustement les maux du peuple et en être châtié. J’ai crainte, chère assistance, (Son timbre monta d’un cran en énergie et il déploya vers Hyriel et Louise son énorme bras certes tordu, mais fort en cet instant de son solennel geste d’avocature) que l’homme et la femme assis sur cette sellette ne nous tiennent lieu de Pharmakóï : de bouc-émissaires. Que peur et ignorance soient les principaux guides des accusations pesant sur eux. (Un ton au-dessus) Que tous ! si nous les condamnons, (un temps, plus bas et sombre) nous fourvoyons dans ce qu’il est de plus primitif en nous, et ferait tache sur la Justice… comme sur le noble rôle de guide que, (se tournant avec déférence vers le Cardinal) Votre Éminence, Sa Sainteté vous confia. Braktenn et cette Cour valent mieux qu’une foule malade ayant besoin d’un bouc-émissaire.
Les ecclésiastique, les Saints et bondieuseries, Lénius en bouffait au fond de lui. Oh il prenait garde à ne pas le laisser deviner à chacune de ses représentations. Aujourd’hui toutefois, davantage encore que son double langage, il fallait adopter la stratégie de la piété. Donner des arguments pour toutes les mangeoires. Du rationnel pour les uns, du pieux pour les autres, de l’émotif pour les instincts reptiliens faciles à travailler par ce biais. Avançant un peu pour faire face au public, il poursuivit :
— Sorcellerie et provocation à l’idolâtrie ? C’est la manière dont vous qualifiez ce dans quoi je ne vois qu’estime et reconnaissance ? Oui, Hyriel a été suivi, lors de son transfert, par de nombreuses gens soucieuses de son sort. (Main au cœur – celle où il y avait le moins de cloques et sacs spongieux) Dont j’ai fait partie. Autant de personnes qui n’étaient que reconnaissance envers le guérisseur de talent venu un jour à leur secours. Moi-même, j’ai été soigné par celui (scandalisé) que l’on traite en criminel ! (Un temps) Reconnaissants patients. À plus forte raison qu’Hyriel prodigue gratuitement et chrétiennement son bon secours à ceux qui sont trop dans le besoin pour quérir ces praticiens dont les prix vous sauvent ou damne, selon que vous êtes Grand ou gueux. Mais aussi : des amis. Comme nous aurions les nôtres prenant souci en une situation similaire. La chose est naturelle ! Où est l’envoûtement ? (Ses yeux parcourent lentement l’assemblée) Dans l’œil de qui au mieux ne comprend pas, au pire cherche un coupable.
Il revint auprès des accusés et tourna légèrement sa chariote en direction du Cardinal et de la Cour. Son ton demeurait égal, détaché : il devait faire oublier l’invalide en lui pour que seule raison ne parle, comme s’il n’était pas directement concerné. L’appel à l’émotion sur sa petite personne était le degré zéro de l’argumentation, il s’agissait de prendre de la hauteur.
— Certes il y eut présence d’infirmes. Là encore, n’est-il pas naturel que le cours des événements nous rapproche de qui nous ressemble, et que nous ayons inclination à aider ceux dont la situation nous est familière ? Les infirmes… sont ces commodes boucs-émissaires. À leur corps les résume-t-on et par le diable les explique-t-on, quand ils gênent. Pourtant, certains deviennent invalides par accident de guerre, de déplacement, infection : ceux-là, ainsi que Son Éminence l’a suggéré, (regard vers le Cardinal) ne sont pas hôtes du démon. Le Cardinal a raison : (retour à la foule) vous ! Chacun ici ! Seriez-vous prédisposés à accueillir le Malin si demain un hasard vous estropiait ? Allons plus loin toutefois ! Les invalides de naissance ne peuvent être que le fruit de causes naturelles, de maladies dont la connaissance nous est limitée. Que fait-on en ce cas ? L’on se réfugie trop vite dans le surnaturel. L’on sait aujourd’hui scientifiquement les mouvements du Soleil, quand les anciens égyptiens l’attribuaient à la barque de Râ. Hier, les dérèglement du Ciel tels que l’orage furent mis au compte des Dieux. Demain, nous connaîtrons les causes réelles des dérèglements du corps et comprendrons qu’il n’y a pas plus de disposition de ces êtres que les autres à accueillir le Malin. Seulement… que fait-on quand on ne comprend pas ? L’on a peur, l’on désigne différent, coupable. « Ce qu’il voit tous les jours ne l’étonne guère, quand bien même il en ignore la cause. Ce qu’il voit rarement, d’office il en… il en… il en f- fait un... un monstre. » écrit Ci… i-i… Ci… Ci-cé-ron…
Non… Non… Non ! Horreur ! Pas cela, pas maintenant ! Lénius avait déjà beaucoup parlé et la douloureuse tension spastique de ses muscles venait le torturer. Il avait tenu jusque là. Au mépris de sa souffrance il avait contraint son visage à la plus noble droiture, mais sa voix venait de casser en même temps que l’abjecte grimace s’était de nouveau occupée de tordre sa bouche en fer à cheval.
— Ci, ci, ci, ci-céron ! Toujours moins rond que toi ah ah ! se moqua aussitôt un spectateur.
— Le gnome apprend à parler, eh eh ! Bel avocat pour un sorcier !
Des poignards en la chair de Lénius. D’ordinaire, il se serait moqué des moqueurs. Pas aujourd’hui. Ces rires le torturaient. Son corps le torturait. Il avait mal. Mal des autres et de lui-même. Et honte. Ne pas regarder Louise et Hyriel. Que pensaient-il de lui en cet instant ? Et ce public… Ne serait-il toujours que ramené à sa grimace quand bien même il s’éreintait à être brillant ? Le maillet rappela l’auditoire au calme. Silence sinistre. Lente inspiration. Lénius ferma un instant les yeux, le temps de reprendre le pouvoir sur ses propres muscles. Il ne laisserait pas son corps être son pire ennemi. Drainant toutes ses forces, ignorant la douleur de l’exercice, il reprit une face droite et poursuivit :
— ...écrit Cicéron, tandis que le Christ enseigne en défendant un aveugle de naissance : « Ni lui ni ses parents ne sont plus pécheurs que vous. »
Bon. La mention au Christ ramena le public au parfait silence et au respect. Rasséréné, l’avocat renoua avec l’élégance que sa voix avait su tenir :
— Ce que j’ai démontré des infirmes, peut l’être aussi des décoctions pour lesquelles vous dites Hyriel sorcier. Je l’ai ouï expliquer son travail quand il me soignait : nulle formule, mais un déroulé semblable à une recette. Il vous les pourrait détailler ! Chaque science, chaque art a sa partition à apprendre à haut degré pour exceller. (Un temps) Je l’ai vu faire en son atelier : nul rituel satanique. Juste l’emploi de plantes dont il connaît les vertus et qui sont à nos pieds, communes, demandant la science d’être travaillées. (Avec un petit sourire) De même, beaucoup d’entre nous savons notre alphabet… mais seuls des Homère ou Shakespeare font merveille de ces vingt-six petits caractères !
Sa voix redevient grave, solennelle et admirative alors qu’il désigne Hyriel d’une main ouverte :
— Or un homme brillant toujours émerge ! Reconnu parfois des puissants ! Ainsi peut-on expliquer, sans le Diable, l’attachement des dames de Monthoux à un individu savant en ses domaines, et qui a donné satisfaction à l’art des jardins. Un individu dont nous avons rappelé le dévouement envers les plus démunis… Vertus qui ne peut que toucher la chrétienne famille de Monthoux, autant que vous qui vous réclamez du Seigneur. (Ouvrant les bras comme pour énoncer une évidence) Or l’histoire n’est-elle pas riche de gens de petite condition ayant fini par voir leur talent salué, auprès des Grands ? Parfois jusqu’en devenir amis ? Ésope, Épictète, esclaves : au panthéon des lettres et déjà reconnus de leur temps. Guillaume Juvénal des Ursins, humble fils de drapiers, assez remarquablement doué pour devenir chancelier de Charles VII…
À ce dernier point, ses yeux parurent cueillir ici et là plusieurs membres de l’auditoire. D’un de ces regards que savaient faire les comédiens, adressés à personne mais que chaque spectateur pouvait prendre pour soi. Du côté des nobles bancs, Lénius savait que plus d’un se reconnaîtraient dans la description des ascensions sociales. Oui, plus d’un aristocrate, plus d’un ministre entendrait qu’un individu de rien mais doté de tout pouvait s’attirer des attachements rares dans les hautes sphères.
— Oui, Vos Honneurs, Votre Éminence, vous me rétorquerez qu’il y a exercice illégal de la médecine. (Très grave moment. Celui des concessions. Lénius ne pouvait pas s’asseoir sur les lois qui avaient été concrètement enfreintes par Hyriel et qu’il fallait ne surtout pas ignorer dans son argumentaire. Mais plutôt en tirer profit.) Certes, Hyriel n’est pas diplômé. (Il monte d’un ton et ouvre sa large paume) Mais soyons honnêtes ! Connaissez-vous le prix des entrées en faculté ? Une cruelle sélection par valeur d’or et non par valeur intrinsèque ne l’aurait qu’exclu ! Or l’excellence pousse parfois hors champ officiel, telle une plante aux insoupçonnées vertus à côté de laquelle on passe. (Un temps, scandalisé) Combien de morts le scalpel officiel fait-il ? Combien de vies le rebouteux officieux a-t-il sauvées ? (De toute sa force, enjoignant lesdits sauvés à ne pas avoir peur de se manifester) Des dizaines, dont j’espère que certaines vont parler en ce Tribunal. (Un temps, plus calme) Il est temps que le corps médical fasse bon accueil aux pratiques naturelles qu’il a la vanité de mépriser… parce qu’elles n’ont pas le bon goût de se présenter en latin ! Oui, Hyriel a sauvé illégalement. Et malheureusement durant son parcours il n’a eu le choix que de faire sous fausse identité, sous le coup d’une poursuite, lui qui a avec un ami lavé Monbrina d’un criminel dont l’abjection est encore en vos mémoires. Hyriel, disais-je, a agi illégalement. (Main à l’épaule de l’accusé, l’autre main ouverte en geste circulaire allant des juges à l’assemblée) Mais il a sauvé ! (Un temps) L’immense Léonard, dont nous révérons aujourd’hui les travaux, eut au début du siècle en Italie à braver l’illégalité pour disséquer et faire progresser la connaissance du corps comme jamais. Combien de héros aujourd’hui reconnus démontrèrent que la limitation était dans certaines coutumes ? (Croisant les doigts devant lui) Et pour clore cette question des plantes, notons que Pharmakós, qui désigne le bouc-émissaire, signifie aussi : antidote et poison à la fois. Telle est la nature de toute chose ! Le dosage et l’usage en font un antidote ou un poison. Un sage ne saurait reprocher à Hyriel l’usage d’une plante pour elle-même sans considérer proportions et finalité, autant qu’il ne viendrait à nul esprit de condamner tout usage d’une lame ! Une lame blesse quelquefois, cependant la plupart du temps elle cuisine, sculpte, partage le pain de ce jour !
Lénius abaissa ici légèrement la tête, solennel comme devant un drame.
— La mesure à garder devant loi et us invite à réfléchir aux avortements qu’Hyriel a pratiqués. L’acte est tragique, douloureux, j’en conviens. Toutefois considérons ce qui l’amène et n’est jamais traité en amont : l’égoïsme et l’imprudence de ces hommes qui engrossent mais n’endossent jamais la responsabilité ; la misère de ces femmes réduites à vendre leur corps, ou sans le sou – car tueraient-elles la chair de leur chair si elles avaient de quoi l’élever ? Elles sont les premières à souffrir ! Elles perdraient leur ouvrage une fois découvertes enceintes ! Du reste, qui peut dire à quel moment de la semence devient vie pleine et entière ? (Un temps) Sans compter que ces femmes qui s’avortent le feraient… (un ton plus fort ici pour souligner l’évidence) avec ou sans les préparations d’Hyriel. Condamnez son action : vous n’éradiquerez pas la pratique, mais vous livrerez celles qui y son réduites au péril de perdre moult sang, de se rendre traumatisées à vie, voir d’y périr. Condamnez les potions d’Hyriel : vous n’ôterez qu’un outil, non le fait.
Lénius se déplaça du côté de Louise.
— Un mot, enfin, pour cette femme assise elle aussi à la place des accusés. Accusée, de quoi ? D’avoir eu un cœur maternel l’ayant poussée à tout faire pour sauver une petite servante malade. D’avoir rencontré un homme aussi bon qu’érudit et efficace. D’en avoir fait profiter un établissement où peu de médecins officiels auraient mis le pied. Son âme est bonne et après tout, si ses mœurs sont en cause, Jésus n’a-t-il pas fréquenté lui-même des prostituées et reconnu une sainte en une d’elles ? (Il revint au centre de la scène et engloba public, Cardinal, juges et jurés dans un dernier mouvement avant d’entamer sa conclusion.) Jugez donc en votre âme et en votre cœur, à l’aune de ce que j’espère avoir apporté comme nouvel éclairage. Vous ne serez pas envoûtés si vous le faites. (Sa voix ici devient douce et admirative, par anticipation flatteuse envers l’auditoire qui saurait être raisonnable) Simplement des êtres de raison capables du doute. (Tourné vers le Cardinal) Comme vous, Votre Éminence, qui pensez avoir été ensorcelé… alors que ce n’était que la manifestation de votre conscience au travail dans ce que l’esprit humain fait de mieux : évoluer, se remettre en question, grandir. Hyriel ne vous a pas ensorcelé… mais son histoire a sans doute plutôt attisé en vous quelque sujet plus complexe qu’on ne vous l’aurait appris… J’en reste là, ce n’est pas le procès de vos instructeurs que l’on mène ici. (Un temps. Oui, il avait osé aller sur ce terrain. Et oui, tant pis si Matthieu Cassin le prenait pour prochaine cible. Il fallait sauver Hyriel et pour cela, découvrir aux yeux de l’assistance combien la faille n’était pas du côté de l’accusé. Dans un ultime envoi, de son ton sonore il s’en revint à tout un chacun) Chère assemblée ! Brûlez Hyriel et vous ôterez à cette ville l’un de ses meilleurs guérisseurs et plus admirables sujets. Brûlez-le, c’est vous qui vous serez consumés dans la superstition et la crainte de ce que vous ne connaissez pas assez. Vos Honneurs, Votre Éminence, cher jury et gens de Braktenn, je vous en conjure, en hommes de raison et en bons chrétiens, acquittez Louise Michalet et Hyriel. Je vous remercie.
Un long silence revint faire résonner, autant contre les murs qu’au fond des esprits de chacun, le discours qui venait de s’élever. Lénius était épuisé. Lénius avait mal de tous ses muscles. Le feu au fond de la gorge. Allons, un dernier effort… Celui de s’interdire de trembler alors que les spasmes revenaient. Reste sage, ma face de gargouille. L’avocat attendit, aussi espérant que terrifié.
— La Cour vous remercie pour cet argumentaire, reprit froidement le juge. J’invite maintenant l’assemblée à la coopération, et l’incite à prêter son concours à l’œuvre de Son Éminence dans sa lutte douloureuse contre la sorcellerie. Sans mensonge sous peine d’amende et d’excommunication. Que chaque témoin à charge ou décharge se présente à la barre, décline son identité, puis tienne les Évangiles en ses mains pour faire serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
De l’animation, beaucoup d’animation avant que ne débute vraiment ce procès. Mais ce n’était rien. En un coup d’œil furtif, il repéra quelques personnes qu’il avait soignées, d’autres pour qui il avait écrit de longues lettres, certains les deux, en donnant un conseil pour le mal dont ils parlaient dans une lettre, par exemple. Mais ce n’étaient là que petites gens et, à moins que l’un trouve assez de courage pour venir témoigner ensuite, cela ne lui servirait à rien, malheureusement.
Le cardinal fut alors appelé et il s’avança. Hyriel se tendit, appréhendant ce qui allait suivre. Il tâcha de ne rien laisser paraître qu’une expression fermée. Une mission, ben voyons… Tous plus aveugles les uns que les autres mais il fallait reconnaître que ce serait efficace, malheureusement.
« Il est donc nécessaire de vous protéger. Vous protéger car ces créatures, qui rôdent dans l’ombre. Ces serviteurs du malin qui se cachent parmi nous, prêts à bondir sur la moindre bonne âme et à la corrompre. »
Oh, ça, il était tout à fait d’accord. Il fallait empêcher ces pauvres gens d’être corrompu par un terrible diable rouge, véhément, qui essayait d’endoctriner tout ce qui passait à sa portée. Mais bon, cette vérité serait muselée, comme tant d’autres, parce que le mal était déjà fait…
Un simple roulement d’yeux contenu sous des paupières fermées plus longtemps que la normale accueillit la remarque sur les infirmes disposés au mal. Il avait l’habitude mais ce n’en était pas moins douloureux. Quand il pointa le doigt vers lui pour débiter son propos, Hyriel lui rendit un regard qu’il s’efforçait de conserver neutre, même s’il bouillait intérieurement. Tout ce qu’il disait, tout, tout était présenté sous le pire angle possible. Il espérait que Lénius saurait bouger la chandelle, pour que tous puissent voir la chose dans son ensemble. Sinon, il le ferait lui-même mais il ne savait pas parler en public et cela se ressentirait…
« Mais il y a plus grave, honorable assemblée. Cet homme, est un véritable sorcier, doué de pouvoirs surnaturels. »
Et c’est parti…
Hyriel prit une grande inspiration pour se calmer quand le cardinal se fit passer pour la victime de ceux-ci. Il contint toutefois un sourire quand il parla du cas des femmes de Monthoux, surtout en voyant la tête de celui-ci. Lui qui voulait être discret…
Et alors la secte d’invalides, ce fut le pompon ! On en parlait, de sa secte de cardinaux ? Non ! Eh bien les invalides, c’était pareil. Juste des amis. Et pas des hypocrites comme les cardinaux, en plus. Cet homme ne connaissait décidément rien aux relations humaines…
Il se rassura quand il présenta Louise comme victime. C’était déjà ça, elle risquerait moins…
Un frisson le parcourut quand il annonça la sentence souhaitée. Alors que la foule réagissait, il releva lentement la tête vers le cardinal et sa tenue qui évoquait déjà les flammes du bûcher auquel il le vouait. Il ne soutint pas indéfiniment le regard du cardinal – pour ne pas l’envoûter, ce serait malvenu – et reporta son attention sur les juges. Le religieux n’aimait pas son insolence ? S’il l’envoyait brûler, Hyriel se ferait un plaisir de lui montrer ce que c’était, que d’être insolent à la Radgery, et de parler sans peur pour ses amis.
De ses amis, on appela alors l’un, Lénius, qui parlerait bien mieux que lui pour les défendre, Louise et lui, il en était sûr. Il tourna la tête vers lui et le regarda approcher, plus calme, plus détendu. Oh, certes, qu’un infirme appelle un infirme pour sa défense en ferait jaser d’autres que le cardinal mais il était sûr que ses mots convaincraient l’assistance.
Il fut soufflé dès le début. Ça, il ne connaissait pas. Il s’adossa donc sur son siège pour boire les enseignements de son ami avec un léger sourire, intéressé. C’était toujours bon à savoir ! Il l’écouta ensuite redresser les choses, déplacer la chandelle pour que l’assistance voit l’ensemble de la chose, sous son jour véritable, là où le cardinal choisissait les pires angles de vue. Son cœur se pinça quand Lénius rappela la cruelle situation qui était la leur. En effet, là où les autres étaient grands, blonds, timides, eux, ils étaient infirmes. On les distinguait entre eux mais seulement ensuite. Ils étaient avant tout infirmes. Pourtant, n’étaient-ils pas avant tout des humains, simplement lésés par la fortune, comme le rappelait son ami ?
Son analyse scientifique le fit légèrement hocher la tête. En effet, il était persuadé que tout cela avait une cause bien naturelle, qu’il fallait trouver. Pourquoi certains naissaient ainsi sans qu’il n’y en ait d’autres dans leur famille ? Pourquoi d’autres, comme lui, étaient issus d’une lignée d’impotents, si l’on remontait sans tenir compte du sexe de la personne… Mais toutes ses pensées s’interrompirent en un instant. Dès la première hésitation de son ami. Hésiter, ainsi, ce n’était pas normal et il ne reconnaissait que trop bien ce genre de bafouillements : quelque chose le gênait. Les idées s’agencèrent très vite, à force de l’habitude, et il comprit sans peine que c’était la maladie de son amie qui revenait. Il se redressa sur sa chaise et se pencha en avant, oublieux de tout le reste, seulement effrayé pour son ami. Il lui fallait… de l’achillée, de l’ail, de l’angélique archangélique, de la camomille et de la chélidoine, de la sauge et du thym pour… non, pas le temps de faire un bain pou ses membres douloureux… Il lui fallait une décoction-infusion d’angélique, basilic, de plante de calament, de lavande, de sommités de lotier, de marjolaine et d’oranger pour le soulager… En plus, le basilic, la lavande, la marjolaine et l’oranger aideraient son souffle, de même qu’un peu de menthe sur le plexus…
Les coups du marteau le ramenèrent à la réalité mais il ne put détacher son regard de son ami. Il se remettait, peu à peu. Un sourire de soulagement étira les lèvres d’Hyriel. Si l’on pouvait trouver un petit avantage dans leurs situation, infirmes de naissance, c’est qu’ils savaient se battre, même si c’était difficile, depuis leur plus tendre enfance. En même temps, s’ils ne le faisaient pas, ils ne passaient que pour des semi-humains…
Hyriel se réadossa, entièrement soulagé, quand son ami reprit sa phrase où il s’était arrêté, comme si de rien n’était. Oh, il se doutait bien qu’il avait mal en lui-même, mais il était persuadé qu’il pourrait achever et se reposer ensuite. Il le méritait. Et il connaissait ses recettes donc il pourrait se soigner. Puis Eugène l’aiderait sans doute. L’herboriste écouta donc la suite, sur les soins, la figure de nouveau neutre, et eut joie à entendre dit de belle et efficace façon ce qu’il avait essayé de rentrer dans le crâne du cardinal et du juge, le matin même. Tout en écoutant, il jetait des coups d’œil dans leur direction, pour voir leurs réactions. Il profita que Lénius soit près de lui, main sur son épaule, même, pour lui adresser un sourire qui se voulait encourageant. Il eut un instant envie de poser sa main sur celle de son ami, pour lui exprimer sa gratitude et son soutien, mais se ravisa : tout ce qu’il ferait pourrait être interprété contre lui alors autant qu’il ne fasse rien. L’autre excité serait capable de dire qu’il l’envoûtait par le toucher, ou une bêtise du genre…
Il reconnut, dans son nouvel appel au grec, ce que lui avait un jour appris Eugène, sur cet amusant double sens, rejoignant l’idée que sa maîtresse lui avait enseigné. Les dosages, toujours faire attention aux dosages… Il eut plaisir également, en lui-même, de voir Lénius redire ce qu’il avait essayé de faire comprendre, sur l’avortement, et approuva par gestes qu’il n’y prenait aucun plaisir. Peut-être que l’entendre dire d’une autre bouche aurait plus d’effet… Il sourit ensuite à Louise quand Lénius s’approcha d’elle, pour la rassurer. Il en était convaincu, elle sortirait de ce procès punie pour des crimes imaginaires, sans doute, mais bien mieux lotie que lui et ça le rassurait. Ce procès n’aurait jamais dû être le sien, juste le sien, à lui, Hyriel, le seul « fautif », même si la chose était amplement discutable. Il se mordit ensuite la lèvre quand Lénius exposa la vérité au cardinal. Il serra les dents et se crispa pour son ami. Oh, le religieux n’oserait pas le gifler en public, comme il l’avait fait les autres fois où il se l’était entendu dire, mais il allait exploser, il en était certain. Lénius ne méritait pas cela… Il oublia un instant ses tracas, galvanisé par cette magnifique fin, et il mit de côté ses craintes un instant pour sourire à son ami, le cœur gonflé de reconnaissance. Il était excellent. Merveilleux et excellent.
Eugène serra les dents en percevant l’agitation du côté des nobles. Il ne fallait pas que cela dégénère, ni que cela excite leur haine contre les accusés, ni que cela déconcentre Lénius.
Sa mâchoire se contracta quand on appela le cardinal. Hyriel allait en prendre plein la figure… Le réquisitoire commença simplement, par parler de lui, cardinal bienveillant. Il connaissait son Cicéron, le bougre… Le reste ne le fit que se tendre de plus en plus. Le cardinal usait de l’art et des outils de la rhétorique pour fabriquer une arme ciselée, une arme mortelle, un poison qui s’insinuait dans les esprits. Il aurait été fort… s’il n’était pas lui-même victime. Il n’était qu’un vecteur empoisonné, pas la source. Il ne faisait que répandre en étant lui-même atteint, comme un pestiféré. Au vu des murmures autour de lui, il était évident que cette peste se propageait peu à peu dans les esprits… Eugène regarda de nouveau Lénius, inquiet. Il serait le remède, il le fallait…
Il frissonna à la demande de bûcher. Il ne fallait pas que cela arrive. Il secoua la tête, effrayé, et ne put que souffler un « Il n’est de pire monstre pour l’homme que l’homme… », s’efforçant de conserver son timbre âgé. Il eut alors une idée. Et si… après tout, on écoutait les anciens, et puis les foules réagissait facilement aux mots entendus… Oh, il allait s’amuser. Il ne pouvait peut-être pas assister Hyriel en se faisant remarquer mais il agirait dans l’ombre et ferait sa part pour aider.
On appela justement Lénius. Il n’osa pas se faire remarquer, ni le déconcentrer, mais l’encouragea de tout son cœur. Il sourit intérieurement à son accroche. En effet, c’était bien trouvé, et cela ferait sans doute écho chez les juges et les nobles. Son commentaire sur la foule malade pourrait en plus jouer sur leur ego mais, surtout, elle lui donnait une porte. L’air bougon, il secoua la tête et souffla, de sa voix de vieillard : « Bien sûr, nous sommes au-dessus de ces pratiques, c’est injuste. »
Il se garda bien de sourire, demeurant dans son rôle, mais espéra de tout cœur que son idée fonctionnerait. La suite lui donna une nouvelle porte et il hocha la tête. « Oh oui, c’est bien vu, tout le monde ferait ça pour un ami… » Ah, c’est dans ces moments-là que la réputation des vieillards à penser à haute voix était utile ! Ainsi, là où le cardinal était un poison, Lénius était un remède et lui, vieillard quelconque, s’en faisait le vecteur – ou le rappel, voire un peu des deux.
Pendant son passage sur la condition des invalides, il ponctua par des « Il a raison ! », des « Ah oui, mon petit neveu… très gentil… » Il se tut toutefois en voyant son ami hésiter. Et alors les autres dans le public qui s’y mettaient. Ah c’était du joli ! Il n’eut pas réfléchir longtemps et prit sa plus belle voix de vieillard, tout en veillant à tourner le dos aux nobles pour que Monthoux ne le reconnaisse pas, malgré son chapeau.
« Impertinents ! Ne voyez-vous pas que ce jeune homme a mal ? Diriez-vous de même de vos enfants, de vos frères ou de vos sœurs, de vos parents même, s’ils bégayaient sous la souffrance ? Vous devriez au contraire l’encourager dans votre cœur et admirer son courage de parler malgré cela ! »
Là, et maintenant, tu t’écrases, mon grand…
Il croisa donc les bras et se renfrogna sous son chapeau, l’air boudeur. Il aurait pu rire intérieurement mais il était trop occupé à s’inquiéter pour son ami pour ça. Il ne se détendit que quand il reprit son discours. Il s’assurerait tout de même que tout aille bien quand ils se retrouveraient. Il approuva ensuite par des marmonnements le reste du discours de son ami. Se faire discret, maintenant, mais ne pas abandonner son office de soutient pour autant. Il se crispa quand Lénius s’adressa au cardinal, avec vérité – mais ne dit-on pas que la vérité blesse particulièrement quand elle n’est pas assumée ? Il sourit à la fin et approuva d’un vigoureux hochement de tête, fidèle à son rôle, même s’il ne parla pas, pour ne pas troubler le silence… religieux ?
Le juge appela ensuite les témoins. Hyriel comme Eugène sentirent la peur s’insinuer en eux-mêmes. Qui témoignerait ? Quel témoignage fourniraient-ils ? Ce serait pour le meilleur… comme pour le pire.
Hyriel Radgery- Sorcier, herboriste, écrivain public ~ Pharmakós de service
- Fiche perso : ¤ Diable ? Médecin ? Sorcier ? À voir...
¤ Les trois comparses
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