Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
C'était cela une salle de procès ? les gens venaient y assister comme pour un spectacle ? Louise aurait cru que la justice serait quelque chose de plus digne. Pourtant, à voir ces nobles qui se rassemblaient dans les premiers rangs ou cette masse laborieuse dans les escaliers lui donnaient l'impression qu'ils ne venaient là que pour être vu. Pour montrer avoir de l'importance, puis se vanter d'avoir assisté à l'affaire dont tout le monde parlait. Elle soupira et eut un regard triste en tournant la tête vers Hyriel.
"Des singes... Nous ne sommes que des singes qu'ils viennent voir."
Elle murmura ces paroles dans un profond désespoir. Le procès s'ouvrit officiellement et les juges, ces impressionnants hommes, dotés de ces longues perruques blanches. Louise tremblait des conséquences qui allaient suivre mais malgré tout elle eut la force de poser la main sur celle de Hyriel. Si seulement cela pouvait l'aider à sentir de la force et du courage. Elle sursauta à ce moment d'entendre Lénius annoncer prendre leur défense. La catin contempla ct homme rencontré sur son lieu de travail plusieurs fois, stupéfaite. Elle appréciait sa compagnie, oui, mais n'aurait jamais cru que l'infirme aurait un tel coeur pour s'attaquer à une cause désespérée. Elle lui adressa un sourire et ses yeux commencèrent à verser quelques larmes.
"Merci..."
Brusquement, le diabolique inquisiteur prit enfin la parole. Louise ne chercha même pas à s'intéresser au sens de ses paroles. Il ne disait que des stupidités. Il ne méritait pas que l'on entende. si seulement tout le monde pouvait subitement se boucher les oreilles. Elle se pencha vers Hyriel et murmura tout bas :
"Imagine-le dans les latrines...."
Cette seule pensée lui fit naitre un sourire mais elle le masqua en plaçant sa main sur sa bouche. Lorsque la scène pénible s'effaça, Lénius prit la place. Louise se força à écouter, par respect pour son ami qui se détenait pour eux. Elle comprenait que le troubadour faisait référence à la Grèce antique. Au lupanar, certains nobles laissaient entendre des paroles sur cette culture ancienne qu'elle ne maitrisait pas. Elle revint cependant quand Lénius évoqua les bouc-émissaires. Elle se redressa et opina d'un léger hochement de tête. Oui, c'était ça. Elle s'attrista de l'entendre que celui-ci eut besoin des services de Hyriel. Sa main se posa à nouveau sur celle de guérisseur. Elle la garda tout le temps où Lénius aborda la question de comment les invalides étaient traités. Cela ne pouvait que le blesser. Puis, son esprit se perdit quand de nouvelles connaissances obscures revinrent. Pourquoi parlait-il de rat dans une barque ? Il délirait ?
Puis, elle sursauta quand Lénius eut du mal à à s'exprimer. Les gens commençaient à s'exciter et à se moquer. Louise pleura. de désespoir. De dépit. Elle se recroquevilla, misérable, et sanglota sans pouvoir s'arrêter. Elle ne se reprit que quand Lénius aborda la question de la médecine. Elle écouta plus attentivement, priant pour que cela soit entendue. Mais cela redevenait compliqué. La catin se tendit, surpris quand celui-ci l'évoqua elle. Il la défendait. Elle baissa la tête. Le méritait-elle vraiment ? Non, HYriel le méritait bien plus. Elle... Elle ne méritait pas. Heureusement, il revenait sur lui. Oui, c'était mieux. Il ne fallait pas troubler les juges. Seul Hyriel comptait.
Sa main resta cependant tout le long sur celle de Hyriel.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Toujours est-il qu’avant que le « spectacle » commence, que d’agitation – Bon d’accord, un peu à cause d’elle… - d’ailleurs que de monde à ce procès. La présence de certains, était-elle même nécessaire ? Ou plutôt, vu que c’était un lieu public, avaient-ils réellement la moindre idée, de l’importance de ce qui se jouait ici ? Ou n’était-il là que par simple sadisme, ou manque d’activité, comme les gens de l’antiquité qui venait voir des hommes et des femmes se faire manger par des lions, ou… Brûlé vif, en masse. De l’agitation donc, aussi à cause d’un « Boréalion », un écrivain semblait-il, un jeune écrivain. Auquel elle ne fit pas plus attention, car comme le signalait la comparse de la jeune groupie, le Cardinal allait commencer son sermon, non, son réquisitoire pardon.
L’ACCUSATEUR :
L’introduction fût pathétique, sommes toutes un ramassis de généralité qui sembla n’avoir de but, que de justifier ce qu’il allait sortir comme solennels ineptie, et se faire mousser en passant. Oui, monsieur était aller dans les appartements privés d’Ippolito, la belle affaire. Vous ne savez pas qui est Ippolito ? Ippolito ALDOBRANDINI, ou peut-être le connaissez-vous en tant que « Clément VIII », son « nom papale ». D’ailleurs elle aurait bien entendu l’avis de celui-ci, puisque son père était avocat, lui-même ayant fais des études de droit. Comment l’a-t-elle connu ? Simple, à l’occasion d’une rencontre à Florence, en Toscane, lors de son premier voyage là-bas avec Leandro, et 2 ans plus tard : Ippolito qui était déjà lui-même alors Cardinal, devint le nouveau pape ! Relations par laquelle, elle se vit être parmi les premiers, à commercé du café – Même si elle préfère le vin, mais l’argent n’a pas de goût – car, avait-il dit « l'arôme du café était chose bien trop agréable pour être l'œuvre du Malin et qu'il serait dommage que les Musulmans en aient l'exclusivité » quel blagueur cet Ippolito, enfin pardon… Sa sainteté.
Alors pour le reste, depuis quand, les enseignements du Seigneur, dise qu’il faut cramer les sorciers et les prostitués ? Ou que les invalides et infirmes son des créatures maléfiques… Attention, seulement par moment. Oui, parce qu’il y en a oui, y en a non, comme Dyonis. Comme par hasard – Vous la voyez la mousse, comment elle prend bien ? – « Leurs difformités de naissance sont des signes qu’ils ont des prédispositions à se faire entraîner du côté du mal. » les dires d’un grand malade donc, alors que du peux qu’elle se souviennent, les infirmes sont… Ah mais oui, non, c’est normal : même les religieux de l’évangile – les pharisiens donc, des « serviteurs et enseignant de Dieu » qui ont crucifié Jésus, rappelons-le – tenait plus ou moins le même discours. Le Cardinal étant un « religieux zélé » semblait-il, tout était finalement normal, tout est, sous contrôle… Vint un moment ce pendant ou, elle blêmit et se tourna lentement vers Winston : les avortements… En-dehors de toutes les autres accusations, aussi ésotérique que pouvait l’être un œuf au plat, pouvait-elle laisser passer cela ? Le géant noir lui-même, semblait tomber des nues, n’osant même pas regarder vers la Donna. Oui… Non. Oui, cela méritait le bûcher, voir bien pire encore, juste pour cela !
« Il a arraché des bébés aux ventres de leur mère. » quel horreur – une larme perle alors sur sa joue – à ce moment précis, ce n’était plus un pseudo-sorcier, mais carrément un démon ! Elle restait donc juste voir, s’il aurait ce qu’il méritait ! – Oui, tout le fil de pensée, de réflexion, tout avant… Envoler ! Pouf d’un coup ! – comment pouvait-on laisser passer et faire tel ignominie ! Ce n’est pas comme-ci était déjà arriver, un nombre incalculable de fois quand elle était à Djerdan… Il y a des nuits, ou elle les entendait hurler presque à mort ! Au matin, certaines avaient disparu, pour toujours. Brusquement perdu dans les limbes de son passé, elle entendit le Cardinal parler « d’envoutement ». Il aurait été lui-même « victime », « malgré mes défenses et malgré la connaissance des sorciers » avait-il ajouter, il était supposé être là, pour les protéger, lui ? On n’était pas sorti de l’auberge…
Non, mon « éminent » monsieur, aurait-elle voulu lui dire, ce qui vous arrive, c’est ce qui arrive quand vous croyez avoir laisser votre passé derrière vous, et que les fantômes de celui-ci, ressurgissent subitement, en vous demandant, en vous suppliant, de tenir vos promesses. Promesse de justice, de vengeance, de sang… Elle sembla alors « absente » pendant un moment quand elle fût brutalement sortie de sa torpeur par : « La mort par le bûcher ». Sursautant son cœur sembla vouloir sortir de sa poitrine, le souffle court, frémissante, tremblante… Heureusement une main rassurante, se posa sur son épaule : Winston.
- Tout va bien Madame ? Voulez-vous sortir ? Je… Comprendrai, si vous souhaitiez ne pas rester.
- Elle mit un temps avant de répondre, reprenant contenance – N-non, ça va. J-Je te remercie, ce n’était rien… De grave.
- Bien, je ne suis pas loin.
LA DEFENSE :
Et Winston repart, se préparer à ce qu’elle lui a demandé en tout début. D’ailleurs, il serait bête de partir, sans voir comment l’avocat de la Défense, allait s’en tirer. Comment il allait tirer son épingle du jeu, afin de défendre ce qui paraissait alors, à son avis : indéfendable ! Entrée en matière, qui avait le mérite de les faire voyager – puisqu’il passe de l’Italie à la Grèce, ou il faudrait qu’elle aille faire un tour un jour, vu les statues des hommes de là-bas… - dans la méditerranée. Introduction, qui fût un tantinet… Trop érudite à son goût, mais cependant très bien ficelé sur le long terme. « Que peur et ignorance soient les principaux guides des accusations pesant sur eux » il avait raison, comme pour ceux qui est de « quérir ces praticiens dont les prix vous sauvent ou damne, selon que vous êtes Grand ou gueux » plus jeune, encore avec ses parents, elle failli mourir faute d’argent pour un médecin, heureusement, il y avait-eût Mérine et… Ses cadeaux. Aurait-elle préféré mourir ? Peut-être… Peut-être que Mérine serait encore en vie, si elle avait cessé immédiatement cette relation. Qu’ils seraient tous encore en vie, sauf elle. Cependant, là encore, alors qu’il prononçait le mot « envoûtement », elle pensa que nombre d’homme – partenaires de commerce ou, amants - lui avait dit, et lui disait toujours qu’elle était « envoûtante » : serait-elle pour cela une sorcière ?
En fait, les dires de cet homme, était d’une telle logique – bien plus que l’emplumé écarlate d’avant – mais en vérité, elle l’attendait sur un point, bien particuliers. Voici alors que lui, qui parle de « dérèglement », en est lui-même soudainement victime ! Pauvre homme, dans un moment si important, elle en resta bouche légèrement ouverte ! Même du côté des accusées, la surprise fût comminatoire, à l’écoute des pleurs venant de la femme. Que de courage il avait dû lui falloir pour venir ici, encore plus pour assumer le rôle qu’il tenait en cet instant et… Une dose de plus, pour supporter et reprendre après les railleries. Moqueur qu’elle cibla d’un regard meurtrier… Si seulement, elle ne devait pas se faire aussi discrète, à cause de ce religieux phallus sur patte qu’elle devait voir demain ! Heureusement, il y eut se vieillard parmi l’assistance, qui fût comme un apaisement, autant pour l’avocat infirme que pour elle.
Ainsi, l’avocat reprit son plaidoyer – Et avec lui, les réflexions de Despina, sur les accusés – il semblait investi d’une telle force ? Energie ? Les mots lui manquaient pour décrire ce qui se dégageait de se soi-disant impotent, qui paraissait bien plus à même que certains, qui plus elle réfléchissait : semblait vouloir condamner l’accusé, plus pour son propre bien, que celui d’autrui… Le saligaud ! « Des dizaines, dont j’espère que certaines vont parler en ce Tribunal. » encore fallait-il qu’elle l’entendent, sur le sujet qui la fâche. Qui plus est, comparé cet Hyriel à Léonard – De vinci donc, si elle ne se trompait pas – était un peu pompeux. Cependant, elle croit reconnaître ce que le médecin « officiel » lui-même, ayant consulta Soraya après coups, lui a citer « Tout est poison et rien n'est sans poison ; la dose seule fait que quelque chose n'est pas un poison. » d’un certains « Paracelse » - Ou Philippus Theophrastus Aureolus Bombast von Hohenheim… On comprend pourquoi on l’appel que « Paracelse » - médecin et croyant – Que demande le peuple de plus ? – arrive alors le sujet de la fameuse affaire d’avortement.
Entre « L’égoïsme et l’imprudence de ces hommes qui engrossent mais n’endossent jamais la responsabilité » et « car tueraient-elles la chair de leur chair si elles avaient de quoi l’élever ? » effectivement, mais cela n’excusait toujours pas la chose, et pour « Du reste, qui peut dire à quel moment de la semence devient vie pleine et entière ? » elle n’était absolument pas d’accord ! Du moment que la dîtes « semence » grandissait, cela ne voulait-il pas dire qu’elle est en vie, se disait-elle pour l’avoir vécu. Ce petit être, quelques soit sa forme à l’origine… Elle grandi. Elle grandi, elle se développe et… Et elle bouge ! Elle se meut à l’intérieur de vous… Comment en arriverait-elle à là, si elle n’était pas « pleinement vivante » dès le début ? 9 mois. 9 longs mois, à l’imaginer, à le sentir, à l’espérer, tant avec hâte, qu’avec crainte et… - La fêlure… - Il faut tenir. Tenir bon. Ne pas craquer ! Traîtresses ! Maudites larmes ! Selon elle, c’est « facilité » la chose, pour une même finalité : s’il n’y a pas deux morts, il y en a toujours un, et c’est celui qui n’a rien demander. Pourtant, le reste des dires de l’avocat, lui fait comprendre certaines choses, qui n’excuse quand même en rien l’acte, mais voilà… Oui, voilà un des « parce que », du pourquoi le projet, dont elle parlait à Dyonis avant de venir. Despina ne croyait pas à l’utopie, mais elle espérait au moins, que cela contribuera à amoindrir ces « assassinats d’innocents ». Enfin, cet homme en chariote, eût une pensée, un mot pour la complice, qu’il devait connaître, bien que l’allusion à Jésus fût assez inattendue, car lui les fréquentait, pour les amener sur le droit chemin, et non pour les aider à y rester : la sainte mentionnée, n’en étant du coup plus une après l’avoir suivi. D’ailleurs, que pourrait-elle faire à ce sujet, elle qui fût concerné ? pas grand-chose, même pas devenir « Sainte Despina » - On en est loin… Très loin… - Car tant qu’il y aura des gens, pour se faire de l’argent sur le dos, des hommes qui pense plus avec ce qu’il y a entre leur jambe, que dans leur tête, ce ne serait pas gagné. Deux problèmes, qu’elle ne pouvait tout bonnement pas gérer. Sinon, une à la fois, mais il n’y aurait alors plus assez de place à Edenia… Et on l’accuserait sûrement de monter une sorte de, sectes ? Sectes… Féministe ? Comment elle l’appellerait : « La Monbrinat insoumise » ?
Toujours est-il que dans sa dernière ligne droite, l’avocat de la défense mis l’accent sur : le Cardinal ?! Ligne directrice, rejoignant les propres réflexions que se faisait Despina, sur le compte pharisien des temps modernes. Oui, comme tout à chacun, Monsieur son éminence avait sûrement un éminent secret, que l’accusé connaissait, et pour qu’un secret tombe dans l’oubli, il fallait en éliminer tous les témoins. Comme on l’avait fait, avec elle et sa famille… - Et là, elle part en live sur le cassin… - secret, qui pourrait avoir un lien avec elle, avec ce qui est arrivé à Mérine, et au reste de sa famille. Secret, qui se paierait… Mais non. Malgré son déguisement pourpre, il avait l’air bien trop jeune. Il devait même avoir le même âge. Une chance pour lui. C’était maintenant, selon le juge de la cour, le moment des témoignages. Allait-elle s’en tenir, à ce qu’elle avait convenu avec Winston ?... Le grand noir en blanc, en tremblait lui-même d’avance.
LA TEMOIN :
C’était le moment, c’est donc avec tous son bagage d’élégance et de charme, qu’elle s’avança avec assurance, dans sa robe champagne et ses gants de soie blanche : elle une noble, « pour » ces individus, quel ne connaît personnellement, ni d’Eve, ni d’Adam – peut-être que c’est de famille… - En approchant de l’avocat de la Défense, elle lui laisse dans un sourire, un rapide : « Excellent plaidoyer. » et va s’installer à la barre. S’il y a bien une chose, que Despina à retenu d’une des ses rares lectures des évangiles, au cas où l’occasion se présenterai – D’où son sourire espiègle, derrière son petit voile de dentelle blanche – c’est Matthieu 5 v34-35 ou Jésus dit « Mais moi, je vous dis de ne jurer aucunement, ni par le ciel, parce que c'est le trône de Dieu ; ni par la terre, parce que c'est son marchepied ; ni par Jérusalem, parce que c'est la ville du grand roi. » - Qui pourrait être accompagné de Jacques 5 v12 « Avant toutes choses, mes frères, ne jurez ni par le ciel, ni par la terre, ni par aucun autre serment. Mais que votre oui soit oui, et que votre non soit non, afin que vous ne tombiez pas sous le jugement » - voilà là encore bien une superstition : croire que le fait de faire jurer sur un « livre saint », obligera à dire la vérité…
C’est donc à ce moment précis, qu’elle décline son identité :
- Dame Cordélia McDAN de Braktenn, en Monbrina, en 1565.
Oui. Bah quoi ? Elle n’a pas menti aucunement : McDAN est son nom de jeune fille, écrit sur son acte de naissance – c’est donc elle – et Cordélia son 2nd prénom d’adoption, dont elle a les papier – c’est donc toujours elle – et elle est bien né à Braktenn. Quand on lui tend les évangiles, elle regarde vers le Cardinal – Il est là pour guider ou pas, il connaît les évangiles non ? – et d’une voix désolée :
- Ô votre éminence, êtes-vous sûr, que je dois jurer sur les évangiles ? Il me semblait, que notre Seigneur à ni jurer, ni faire de serment, sur quoi que ce soit ? – elle baisse alors la tête, et soupir – Mais soit, je m’y soumets – elle tient donc les évangiles entre ses mains et – je fais serment, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité – Du coup non, elle n’a pas sorti le verset… Faut rester discret paraît-il –
Ayant dressé les plis de sa robe dorée correctement, elle se tient droite, se joignant les mains en avant – être assise ça aurait été bien aussi, mais bon… Chipotage de noble – elle s’éclairci la voix :
- Par ou pourrais-je commencer – dit- elle dubitative… Ou pas – il a juste sauver, une de mes meilleurs amies – Elle part donc sur un des mots clé de Lénius « sauver », et ils n’ont pas besoin de savoir, que Soraya est juste sa cuisinière – Quels ont été les circonstances m’interrogerez-vous ? Les plus simples du monde – poursuit-elle avec les juges. Il y a quelques temps, Soraya, mon amie donc, et sœur de Winston ici présent – elle se tourne vers lui - Pourrais-tu faire signe je te prie – Le géant noir de blanc vêtu fait signe de la main – Merci. - Elle poursuit avec le jury – Elle semblait avoir de plus en plus de mal à respirer, et beaucoup de fièvre : c’était la fièvre quarte ! – elle revient au juges - Nous ne le savions point alors. Ayant donc fait chercher médecin, un de mes employés cependant, m’amena le prévenu : "Hy-Hyriel" ? – Dit-elle en le regardant – vous m’excuserez si j’écorche votre prénom – Elle vient au Cardinal – il vaut mieux que ce soit son prénom, que lui, n’est-ce pas votre éminence ? – Coquine va ! Elle va alors chercher le Jury – Plus près donc que notre médecin, grâce au ciel. Soit, Monsieur Hyriel, nous fût d’un donc d’un grand secours, et la soigna, je me rappelle avec des plantes de mon jardins – Oui, un « grand » jardin. D’où « Edenia ». Ils ne peuvent donc pas dire, qu’il se trimballait avec des plantes, déjà pré-envoûté - de la menthe, de la lavande, de l’oranger ainsi que d’autres plantes – autres plantes dont elle se rappel, mais quel omets volontairement, ceux qu’elle a cité étant de nom plus « nobles » et « agréables » au niveau image. Ah bah c’est une commerçante hein – apaisant ainsi, les divers maux de ma chère Soraya, jusqu’à ce qu’ils disparaissent tous complètement – elle se tourne de nouveau vers les juges - Je précise que le prévenu ne me reconnait pas, car il ne m’a pas vu. – On ne peut pas dire qu’il l’a « envoûté » - J’ai cependant pu l’observer à l’œuvre à distance, entre deux de mes occupations. – Elle se tourne vers le Cardinal faussement penaude – Ô oui, je sais votre éminence, la curiosité est un vilain, vilain défaut, mais j’aime savoir ce que l’on fait sous mon toit, comprenez-vous ? - Au tour du Jury – Et dans ce cas précis, je n’ai rien noté qui présentait une quelconque sorte de… Sorcellerie, ou que sais-je. Mais de main qui s’agite, de part et d’autre, ou je ne sais quelle drôlerie de cirque. En tous cas, son éminence doit être plus au fait, puisqu’il dit l’avoir expérimenté – Se tournant vers ce qu’elle avait reconnu comme un groupe de médecin - C’est alors qu’un de vos confrères, "officiel" dirons-nous, arriva. Il m’assura du bienfait des soins prodigués par Monsieur Hyriel, qui n’était évidemment plus là. Affirmant que s’il ne l’avait pas fait – elle revient au jury, et poursuis tristement - ma pauvre Soraya serait très probablement passer de vie à trépas. Comment l’assuré me direz-vous ? – Elle revient tour à tour au Cardinal et groupe de médecin - Il se trouve que ce médecin, dont je puis vous donnez l’identité, a suivi les enseignements d’un professeur d’université, homme de science, mais avant tout médecin et bon chrétien, se nommant "Paracelse". Un de ces grands noms - Philippus Aureolus Theophrastus Bombast von Hohenheim - donc, dont parlait Monsieur ici présent – désignant Lénius d’un geste gracieux de la main – quel était cette phrase déjà, qu’il m’avait citer – Réfléchissant, faussement… Mais toujours sans mentir, et d’un ton très enthousiaste – « Tout est poison et rien n'est sans poison ; la dose seule fait que quelque chose n'est pas un poison ». - Et revient au Jury, sur le sujet qui l’a fâché elle - J’ai entendu les chefs d’accusation contre Monsieur Hyriel – Elle se tourne de nouveau vers lui désoler – Vous m’excuserez de toujours vous appelez par votre prénom, je n’ai pas votre nom – et revient aux Juges – Je passerai sur les accusations d’envoûtements et de sorcellerie, car bien des gens – surtout les hommes… - dise de moi que je suis « envoûtante », et j’ai qui plus est des employés infirmes de naissance - elle revient au Cardinal – diriez-vous alors, que je suis une sorcière, ou maîtresse de démons ? – Oh oui, oui, traite-là de sorcière, là devant tout le monde, oui !... Elle revient au Jury – Ma… Un membre, de ma propre famille, était « différente » dirons-nous, de naissance. Comme les disciples de notre, Seigneur Jésus, est-ce mes parents qui ont péché, pour qu’elle soit né différente ? – Elle reprends les juges – Veuillez-excuser cette digression vos honneurs, c’est que le sujet me touche personnellement. – Regarde vers les accusés - Tous comme le cas de Madame la prévenue, que je n’oublie pas, au contraire. Accusez de complicité d’un acte que j’abhorre et ne cautionne point : l’avortement – Elle revient au jury – cependant, qui sont réellement les responsables ? Sinon ceux, qui pousse ses femmes au bout de l’horreur ? Car la défense, la bien souligné : avec, ou sans aide… Elles le font, et le feront encore, et malheureusement au péril de leur jeune vie. Il n’y a pas d’excuse à avoir, ou donner. Juste un manque total de responsabilité, d’humanité – elle regarde vers le Cardinal – et d’accompagnement. Après tout, ce sont parfois des enfants du secret, et quand un secret menace d’être dévoilé, on préfère l’éliminer – Dit-elle en fixant le Cardinal. Mais elle avec les juges – D’ailleurs, je m’interroge soudainement, en tant que citoyenne : Si Monsieur Hyriel - Elle se tourne vers le prévenu donc – possède les pouvoirs maudits, qu’on lui prête, d’implanter des souvenirs dans nos esprits. Comment l’a-t-on capturé ? Ou pourquoi ne nous envoûte-t-il pas tous, pour sortir par la grande porte ? – revient au Cardinal – Puisqu’il semble avoir si facilement, fait plier un homme de Dieu, tel que vous, votre éminence ? – Elle revient au Jury – Ô ne tenez pas compte de ces derniers mots je vous prie. – Oui, mais c’est dit, et dans les têtes, sur quoi elle revient au juges - Des questions qui resteront sans doute sans réponse, pour moi me direz-vous, puisque ce n’est pas mon affaire – Ou juste l’affaire de tous. Elle s’incline donc, convenablement et respectueusement devant chacun - Votre éminence, je ne manquerai de saluer le saint père de votre part, quand je le reverrai, vos honneurs, membres du jury.
Et elle retourne altièrement à sa place, sans faire de vague - elle en a assez fait comme ça. Parce qu’après tout, si c’est un « sorcier » si puissant, qu’il a réussi à toucher l’intérieur, du Cardinal… Quelle réelle protection, celui-ci pourrait-il donner à ses ouailles ? Surtout, si un autre pseudo-sorcier apparaissait de nouveau, avec une horde de fidèles infirmes, d’impotents et bras cassé en tous genre... Mais comme cet Hyriel n’est pas plus sorcier, qu’elle n’est Reine d’Angleterre. La réelle question est, quel vilain petit secret ce « pieux homme » cache, et veut faire disparaître par le feu, tel la peste ! Elle ne le saura sans doute, effectivement jamais elle-même.
Invité- Invité
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Roméo Menthon, 24 ans
Négociant en tapis
- avertissement - handiphobie, racisme:
- un esprit plus étroit qu'un petit pois.
Cela faisait deux jours que Roméo trépignait à l’idée de témoigner à ce procès. Le corps de Julie était tout juste rongé par les vers, mais sa haine et sa colère brulait plus farouchement encore que le bucher qui calcinerait bientôt ce misérable sorcier. Même les vers ne méritaient pas de s’empoisonner à sucer sa chair démoniaque putréfiée. Oh certes, ce n’était pas lui qui était en cause, mais l’autre monstruosité avait bien raison : il fallait un bouc émissaire. Ça faisait du bien aux nerfs. Et puis il y en avait assez de tous ces maudits gueux d’infirmes qui mendiaient dans les rues parce que l’hôpital général en était surchargé. Ça faisait tache. Tenez, pas plus tard qu’hier, il avait encore dû virer à grand renfort de coups de balai ce cul-de-jatte qui avait jeté son dévolu sur sa vitrine pour y accoler son misérable dos bossu. Et pour quoi ? Pour l’espoir d’obtenir un pauvre rilch jeté à la va-vite tandis que l’on détournait le regard. Qu’ils aillent au diable ! Tous autant qu’ils étaient ! Ils étaient la fange de cette cité, ils encrassaient les trottoirs plus sérieusement que la bouillasse qui s’écoulait entre les pavés. Que devait-on faire de ces individus incapables de se tenir fiers et droits comme devait l’être l’Homme ? Rabaissés au statut d’animaux, de sous-hommes, ils ne méritaient dans le meilleur des cas que l’esclavage. Mais qui voudrait s’encombrer de pareils boulets ? Non, le mieux restait encore de leur offrir le salut éternel en les envoyant à la potence sans attendre, délivrés du mal qui les rongeait, incapable de contaminer les êtres purs de leur maladie démoniaque.
Roméo côtoyait Romain depuis plus de dix ans déjà et il avait noué avec lui une amitié sincère aussi bien dans leur voisinage que sur les comptoirs de taverne qu’ils ne manquaient jamais de visiter ensemble. Du fait de leur différence d’âge, Roméo avait toujours vu en Romain, un exemple à suivre, jugeant son père bien trop laxiste et débonnaire à l’extrême. Le lendemain de l’arrestation, son ami lui avait tout raconté et l’avait incité à charger le sorcier en témoignant contre lui. Il n’avait pas tort après tout : cela lui ferait du bien d’avoir un véritable coupable à fustiger pour son deuil. Et tant pis si ce n’était pas le bon. Les guérisseurs, les infirmes, c’était tous les mêmes : pourris jusqu’à la moelle ! Comble du luxe, celui-ci rentrait dans les deux catégories à la fois ! Bon débarras ! Et surtout aucun regret à avoir. D’ailleurs si la populace pouvait enfin ouvrir les yeux sur leur sort, ça n’en serait que mieux.
C’était après cette femme insolente envers le cardinal qu’il se présenta à la barre. Vraiment ! Avait-on idée d’oser parler ainsi à un aussi éminent personnage ?! Quel manque d’éducation ! Déjà le Ministre des Affaires étrangères et maintenant ce saint homme ! Il avait même craint pendant un temps qu’elle n’amène son nègre à la barre… Etait-on à la ménagerie ou à un procès?
Penaud, son chapeau entre les mains, il s’approcha des jurés qu’il salua bien bas, de même que les deux avocats -surtout le cardinal- avant de déclamer son identité :
—Roméo Menthon, né à Braktenn 15 février 1573, fils de Charles et Jeanne-Marie Menthon, témoin à charge.
Une main sur le cœur, l’autre sur les Évangiles, il prêta serment.
Et puisse Dieu me pardonner.
Et il entama son récit chapeau de feutre au bout de ses bras ballants, le regard perdu vers l’horizon.
—J’ai beaucoup hésité, car la douleur est encore trop présente malgré mes prières et malgré que je la sache désormais auprès de notre Seigneur, elle et l’âme de mon enfant. Ou devrais-je dire de nos enfants ? Je ne sais trop et vous laisserai seuls juges. il fit tourner nerveusement son chapeau entre ses doigts lorgnant sur le ventre rebondi d’une femme Je… Il y a trois mois, nous attendions un heureux évènement, Julie et moi-même. Notre deuxième enfant. sa voix vacilla Tout allait bien, et aujourd’hui j’aurais dû être père si… Tout a commencé avec des maux de tête dont elle se plaignait constamment de même que sa vision qui fatiguait. Le médecin l’a saigné à plusieurs reprises, mais cela ne faisait qu’empirer. Un beau matin, je l’ai retrouvé vomissant tout ce qu’elle pouvait avant de s’effondrer… Et... il se tourna vers le cardinal Votre Éminence… Je sais… Je sais que je n’aurais pas dû… Je m’en repends tous les jours… Si vous saviez comme je regrette chaque jour qui passe cette décision !
Il se mordit les lèvres tremblantes, yeux brillants tandis que ses mains froissaient son couvre-chef nerveusement et qu’il reportait son attention vers la salle.
— J’ai fait appel à un guérisseur il se tourna vers Hyriel avant de revenir vers l’assemblée j’étais désespéré… Je ne savais plus vers qui me tourner alors que je priais déjà nuit et jour notre Seigneur de lui accorder un prompt rétablissement. Il est venu, l’a ausculté et nous a remis une petite fiole. Le lendemain, ses jambes avaient gonflé comme celle d’un cochon de broche et elle gisait là, inconsciente, sur le sol, à se débattre contre le Malin qui secouait son corps comme une vulgaire poupée de chiffon ! Je suis sorti en hurlant de chez moi pour que l’on me ramène un médecin ou un prêtre, mais c’était trop tard, son sang se répandait déjà sur le sol quand Romain Bellanger est arrivé en compagnie du chirurgien. Ma femme. Ma femme était morte. souffla-t-il d’une voix étranglée Il… Il a tenté de sauver mon petit. Mais quand il lui a ouvert le ventre pour le délivrer de son tombeau de chair, ce n’était pas un, mais DEUX bébés qu’il trouve ! Ce maudit sorcier, fils de Satan, avait par je ne sais quel moyen fait germer un deuxième petit dans le giron de mon épouse qui prit la place du mien comme ces maudits coucous le font !
Son visage se ferma, crispé de rage et de terreur, les mains tétanisées autour de son chapeau.
—Ceci était mon témoignage et j’accuse le dénommé Hyriel d’acte de sorcellerie et d’exercice illégal de la médecine si tant est que l’on puisse dénommder médecine le recours à ces pratiques impies !
Il s’inclina, salua les jurés et retourna à sa place.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
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- A quoi vous attendez de la part de lui ?
Peu après avoir ses salutations à la noblesse, celle dont le commerçant se sentait fier d'être bon ami, et de surtout avoir assuré son soutien au comte de Monthoux pour cette pénible épreuve qui lui tombait dessus, Romain s'éloigna et retrouva son ami Roméo Menthon. C'était un jeune homme pour lequel il ressentait une profonde fierté. Autrefois, il venait se réfugier chez lui et se plaignait de son père trop laxiste, qui osait laisser des mendiants s'installer devant la devanture de leur négoce de tapis. Il osait même parfois les inviter à leur table et leur disait de temps en temps de rester dormir. Quelle indignité ! Romain s'était assez vite attaché à ce garçon et ressenti une vive admiration à son égard. Bien plus que pour l'avorton qui lui avait tenu lieu de fils. Pourquoi n'était pas lui qui avait jailli des cuisses de son épouse ? il aurait si fier de transmettre son nom à Roméo.
Pendant le réquisitoire, Roméo et lui avaient répété une dernière fois, à voix très basse, les rouages de leur merveilleux plan. Le sorcier à qui il devait d'avoir subi une agression d'une sauvage allait payer. Une dame vint apporter un premier témoignage. les complices grimacèrent que celle-ci évoque les soins du guérisseur. C'était trop positif. Heureusement, ils modifieraient le cours du procès ! la justice leur reconnaissante ! Le temps que dura ses commérages de bonnes femme, les deux camarades se moquèrent du nègre que la femme avait désigné.
Lorsque son ami se présenta pour témoigner, Romain le suivit, prêt à prendre sa place dès que celui-ci aurait fini. Tout se déroulait bien. Avant de s'avancer vers la barre, Romain posa la main sur l'épaule de son camarade afin de montrer à la Cour son soutien.
"Je me nomme Romain, Bellanger, libraire, né Braktenn le 18 Janvier 1543.
Il jura sur les évangiles de dire la vérité. Le serment ne lui posa aucun cas de conscience. Depuis longtemps, il ne croyait plus rien, sauf au bien-fondé de sa librairie.
"Je m'adresse à cette Cour entériner les déclarations que mon ami Roméo Menthon vient vous faire. Depuis plusieurs jours, il s'inquiétait de la santé de son épouse. Une femme si gentille. Une bonne chrétienne. Pieuse. Il a eu peur ce matin-là. Je lui avais dit de ne pas confiance à un guérisseur? Surtout un infirme. Ces êtres sot des démons ! Je le sais bien ! J'en ai élevé un ! J'ai voulu en faire un homme respectable ! Un bon chrétien ! Il ne faisait que les pires bêtises ! Incapable de s'(amender ! J'ai suivi cette affaire, inquiet. Cet homme a donné cette fiole. Sur le moment, la malheureuse Julie a paru mieux. Puis... Puis..."
Sa voix se mit à trembler et il simula de pleurer.
"Puis, comme Roméo vous dit le lendemain fut la tragédie. Julie mourait dans des souffrances atroces. Le chirurgien nous dit n'avoir jamais vu chose pareille. C'est de la sorcellerie ! Par bonheur, le brave homme a su extraire les bébés alors qu'un faible souffle ls animait encore. Ils ont pu être baptisés ! Leurs âmes est au moins sauve ! Mais ce n'est pas le pire ! Le pire.. Le pire ! Je suis allé me recueillir sur la tombe de Julie, enterrée avec ses deux enfants, et j'a vu cet homme, ce diable de guérisseur, il profanait la tombe et a sorti les bébés ! J'ai voulu intervenir mais ce sorcier m'a assommé de ses monstrueuses béquilles !"
Il marqua une petite pause et ajouta :
"Je confesse avoir sans doute eu peur d'essayer d'oublier ce incident. Mais je ne voulais pas rouvrir les plaies de mon ami. Je vous prie de m'en excuser.
Sur ces derniers mots, Romain s'éloigna et retourna vers Roméo, fier de ce magnifique témoigngage, continuant à jouer cette comédie du désespoir.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Les témoignages commencèrent, en défilé. Hyriel approuvait Louise : c’était un spectacle et les acteurs défilaient l’un après l’autre… Il s’était retenu de rire, derrière sa main, à l’astuce de son ami quant à Matthieu et elle l’avait détendu. Absorbé par ses pensées de diagnostic et remèdes, il n’aura pu que resserrer sa main autour de la sienne quand ses nerfs et ses larmes auront lâché pour leur ami.
Au premier témoignage, il resta de marbre, bien que serrant les dents au cruel rappel du fait qu’il n’avait plus de nom. Pour ça, il ne la remerciait pas. Il reconnut au passage Winston et lui accorda un regard avant de s’étonner intérieurement de voir un témoignage se transformer en plaidoyer. Bon, c’était gentil mais si c’était pour assortir le cardinal à son habit, vu les pique insensées – bien qu’amusante, peut-être, dans un autre contexte – qu’elle lançait. Bah, si elle voulait jouer avec le feu…
Le deuxième et le troisième témoignage ne le laissèrent pas de marbre, toutefois. Non, non, non non non non, il n’avait jamais, jamais, jamais fait ça ! Tout le long du témoignage de ce… Roméo, qu’il ne connaissait ni d’Ève, ni d’Adam, Il aura pâli et secoué la tête, terrifié, horrifié et désolé. Non, il n’avait pas fait ça, il mentait, il mentait ce salaud ! Il le laissa finir, impuissant et trop stupéfait pour faire autre chose.
« Il ment, votre honneur… »
Une parole… un simple murmure pour les juges ; la stupéfaction le tenait encore. Un autre le suivit directement, l’idiot lanceur de pierres, et ce fut une nouvelle claque pour Hyriel. Il l’appuyait. Ce salaud appuyait son ami, contre lui, quand bien même il le confondait avec cette poule mouillée d’Alexandre. La lumière se fit dans son esprit. Ils s’en fichaient, de lui, ce n’était pas personnel. Juste deux fumiers frustrés qui se faisaient un plaisir de l’enfoncer. Il écarquilla les yeux en secouant de nouveau la tête. Un rituel ? De la violence ? Mais quel abruti ! Sa respiration s’accéléra ses muscles se tendirent. Le libraire n’avait même pas fini qu’Hyriel se penchait en avant, à défaut de pouvoir se lever, mobilisant tout son souffle pour se faire entendre.
« Ils mentent ! Éminence, vos honneurs, ils mentent, tous les deux, il ne sont que des parjures éhontés ! Je ne connais pas M. Menthon, et je suis désolé pour son épouse mais ce n’est que pure mensonge ! Et M. Bellanger le soutient car il veut se venger de son fils infirme comme moi, qui avons partagé la même cellule, au point de m’avoir pris pour lui pendant mon transfert en cage. Ils en veulent aux infirmes et aux médecins, autres que moi, qui n’ont pu soigner un mal incurable. »
Il reprit son souffle un instant en se tournant vers le marchand de tapis, plus calme, soucieux de se défendre malgré ce qu'en diraient les juges.
« Je suis navré pour votre épouse, sincèrement, mais permettez-moi de vous apprendre qu’il est des fois où deux enfants grandissent dans le ventre de la mère au lieu d’un, il n’y a rien de diabolique là-dedans et je suis certain que des parents de jumeaux dans cette ville pourront vous le dire, et pourront rajouter qu’il n’y a aucun moyen de savoir s’il y a un ou deux enfants dans le ventre de la mère, au moins avant les derniers mois où le ventre maternel est plus gros. Vous ne pouvez pas dire que le charlatan venu vous voir, si tant est que ce n’est pas aussi une invention, a rajouté le bébé. Votre semence et la matrice de votre défunte épouse ne sont pas diaboliques. »
Et ce serait inutile. Et il se ferait réprimander – peut-être pas par une claque, cette fois. Mais il devait se défendre. S’il devait être condamné, ce serait pour ses crimes, pas pour ceux d’un autre, ni pour des inventions.
Roméo Menthon, vingt-quatre ans, presque vingt-cinq, marchand. Beaux habits, cheveux courts, imberbe, fier, menton en avant.
Romain Bellanger, cinquante-quatre ans, presque cinquante-cinq, libraire. Beaux habits, cheveux mi-longs châtains, légères barbes et moustaches, suffisant.
À la prochaine…
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Autour du vieil homme au grand chapeau, certains voisons acquiescèrent à ses mots de bons sens, alors que les autres paraissaient y réfléchir. Les gêneurs qui s'étaient permis d'injurier Lénius finirent par se calmer, repris par le grand-père autant que par les regards désapprobateurs de la Cour. L'assistance aura réagi tout le long des premiers témoignages, tantôt par de vagues hochements de tête, tantôt avec curiosité, tantôt par des cris horrifiés notamment aux interventions des deux derniers Messieurs. On ne se priva pas de gratifier l'accusé de cris portés par l'écho :
-- Monstre !
-- Sorcier !
-- Qu'il retourne en Enfer !
Sans compter les chuchotis serpentant de ça de là : "Tous des parasites ces infirmes..." "Que c'ui là serve de l'çon !" Et soudain, sursaut général : Hyriel osa s'insurger contre les deux braves sieurs occupés à parler à la barre. Un "Oh" diffus et étiré papillonna le long des bancs. A la première intervention de l'inculpé, un juge le rappela à l'ordre d'un sobre :
-- Accusé, vous n'avez pas la parole.
Le témoin reprit. Le respectable libraire Bellanger enchaîna. Mais à nouveau, à peine venait-il d'aligner les derniers mots de sa prise de parole que la voix du sorcier s'éleva une seconde fois ! Coups de maillet. Le magistrat répéta, plus agacé déjà :
-- Accusé, silence !
Mais il poursuivait, livide, outré. Les juges s'accordèrent pour le laisser parler. Les deux premiers croisèrent sévèrement les doigts devant la bouche et gardaient un regard de glace sur Hyriel. Leur collègue adressa un coup d'œil au sieur Bellanger : en effet, il se souvenait de cet homme, de la malheureuse histoire de son fils adoptif, de la fureur du bourgeois qui depuis n'avait pas décru. Il était connu dans Braktenn pour exécrer les invalides, ce qui pouvait être pris en ligne de compte. Quand enfin l'inculpé se tut, un magistrat le réprimanda d'une voix tonnante :
-- Pour la dernière fois, accusé, vous êtes prié de ne parler que si l'on vous interroge ! Encore un incident de ce style et vous serez expulsé de votre procès, qui continuera sans vous ! (Un temps. Se tournant cette fois-ci, pour faire bonne mesure sur conseil discret du magistrat voisin, vers les deux derniers témoins) Messieurs, le parjure est chose grave et punie d'excommunication. Sachez que vos dires - tout comme ceux de chacun prenant parole à cette barre - seront vérifiés d'ici la prochaine séance. Confirmez-vous vos dépositions respectives ?
Les deux hommes acquiescèrent avec vigueur et dans les formes. Quelques coups de maillet calmèrent une fois encore l'assistance où se répandaient des injures contre Hyriel. Imperturbable, le juge ordonna :
-- Que reprenne l'enregistrement des témoignages.
Marthe se sera signée pendant l'épouvantable témoignage du dénommé Roméo. Elle laissa voir sa mine la plus affligée. Le pauvre ! Et sa pauvre femme ! Cette créature des Enfers ne méritait décidément que le bûcher. Et dire qu'ils l'avaient eu à Monthoux ! Qu'aurait-il encore pu faire s'ils ne l'avaient pas arrêté à temps. Les chardons apparus comme par sorcellerie dans son lit n'était qu'un maigre aperçu de ses maléfices. Elle hocha plusieurs fois la tête en soutien à l'intervention de Romain Bellanger. Bientôt... ce serait à elle et au comte de témoigner.
Le comte qui d'ailleurs se scandalisa, dans un premier temps, du témoignage de cette mystérieuse femme voilée. Elle osait sous-entendre que l'institution ne faisait pas son travail comme il le fallait en demandant de jurer sur la Bible. Puis elle ne ménagea pas ses piques - elles, à peines voilées - contre le Cardinal. Quant à cette Soraya... allez savoir ce que le démon boiteux lui aura implanté comme mal tout en la "soignant". Heureusement, les dénommés Roméo et Romain - ce brave libraire qui avait tout son soutien pendant son témoignage - faisaient éclater la vérité quant à cette vile créature. En dépit de ce que le sorcier pouvait clamer dans la foulée - quelle audace ! - et dont il fallait espérer que la Cour ne serait pas dupe. Il fut heureusement remis à sa place. Les prochains témoins allaient arriver. Prosper se préparait déjà pour son passage.
Son cœur reprenait un rythme correct. Ses muscles commençaient enfin à se détendre. Avait-il été bon ? Il n'en savait strictement rien. Il avait fait au mieux et était trop épuisé maintenant pour analyser en détail sa performance. L'inquiétude ne le quittait pas. Heureusement, il avait pu entendre tout au long de son discours les interventions de soutien du "grand-père" dont la voix lui fout tout à fait reconnaissable. Merci, Eugène. Merci du fond du cœur... Merci également à Louise qui venait d'adresser une expression de soutien à l'invalide - prenant sur elle tant on voyait bien qu'elle était à bout de nerfs. Il lui rendit un regard reconnaissant, quoique relativement sobre : distance de l'avocature oblige, puisque c'est ce qu'il incarnait en ce moment. Et ses pleurs... ses pleurs lui fendirent le cœur. Quand elle serait libre - car il espérait bien qu'elle ne serait pas sanctionnée trop durement - l'infirme irait la prendre dans ses bras, la remercier, tout faire pour la soutenir dans sa nouvelle vie. Car il lui paraissait clair qu'elle ne retournerait pas au Lupanar.
Alors que la première témoin descendait - cette femme voilée, sûrement une dévote - Lénius l'entendit le complimenter pour son plaidoyer. Il hocha faiblement la tête, ému.
-- Merci, Madame, murmura-t-il.
Puis il se concentra sur ses paroles. Hm... Très audacieuse, cette dame, à remettre en cause dès le début la procédure de serment sur les Textes. Puis à s'en prendre au Cardinal. Une audace... que le saltimbanque pouvait cependant comprendre, pour lui-même pratiquer l'imprudence un peu trop souvent au goût de ses amis. Il tiqua aussi quand elle souligna l'absence de nom de famille d'Hyriel. Aïe... Pourvu que cela ne retienne pas trop l'attention de la Cour ni ne leur donne des idées... Pour le reste, il se rangea à tout ce que soulignait cette Cordélia. Que le dosage seul faisait le poison, excellent rappel : rien de démoniaque. Qu'Hyriel devrait être reconnu comme sauveur par plus d'un en cette ville ! Elle reprenait même là une petite partie de son plaidoyer, ce qui lui tira un léger sourire.
Mais ensuite... ensuite ! Lénius sentit la colère bouillonner en lui quand il écouta les témoignages des deux autres salauds. Comment osaient-ils ! Ils affabulaient, c'était évident !
-- Mensonges... grommela-t-il à part soi, ayant peine à retenir les contractures de fureur le long de ses mains.
Le détail ne l'intéressa même pas - hormis pour compatir au sort de la défunte épouse. Mais Hyriel n'avait rien à voir là-dedans, c'était impossible ! Quant à cette ordure manipulatrice et arriviste de Bellanger, il restait égal à lui-même. Lénius prit sur lui pour ne rien laisser paraître de sa colère tout au long des deux témoignages. Il regardait son ami, effaré et livide. Lénius frémit quand il prit la parole. La Cour allait le réprimander ! Ce qui ne manqua pas. Pourvu, au moins, que les explications d'Hyriel, comme d'habitude très claires, logiques et pragmatiques, trouvent un chemin jusqu'à l'esprit de ces juges et des membres du jury. S'il restait un tant soit peu d'intelligence dans ce Tribunal...
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
De l'agitation attira son attention et il découvrit une femme importuner le ministre des affaires étrangères. Thierry, sous un masque impassible, riait. Qui celle-ci soit, elle apprendrait, tôt ou tard, à ne pas s'asseoir sans saluer correctement son voisin et surtout sans connaître leur identité. Quel dommage ! Ce pourrait être l'une des dernières erreurs de sa vie. Il ne fallait pas fâcher les tauraux. Que voulez-vous ? Ils s'emportaient si facilement et se mettaient ensuite à charger jusqu'à l'importun se retrouve transformé en charpie. Elle se retira mais un homme la remplace, aux meilleures manières, mais le prêtre sut que ses flatteries mielleuses agaceraient Coldris. Ses poings se serrèrent dans son dos. Dieu qu'il pouvait haïr ce diable de librairie ! Toutes ces années, il avait maltraité Alex et sa mère. Son esprit occultait, une fois de plus, que la faute lui revenait. Que c'était lui qui avait abandonné Rosina et poussé à retourner auprès de son époux violent et tyrannique. Cela se révélait cependant bien plus confortable de charger le commerçant de tous les maux. Pour sa conscience.
Finalement, le calme s'imposa peu à peu dans la salle et l'antagoniste de cette farce grotesque prit la parole pour déclamer le long monologue. Dès le début, Thierry se retint de rouler des yeux. Comme cela se révélait pratique d'invoquer le Pape et de prétendre à une mission. Quelle belle mission ! Une mission de tous les importuner, oui ! Pourquoi l'Eglise ne laissait-elle pas les gens vivre en paix ? Certes la société avait besoin d'être tenue, mais pas au point de restreindre la sexualité et les soins. Il eut ensuite de rire en entendant le cardinal affirmer que le devoir de l'Eglise serait de protéger le peuple. Quelle merveilleuse excuse pratique ! Et quelle manque de créativité ! Il pourrait un peu se renouveler mais non il préférait reprendre les formules uses jusqu'à la corde. Le texte du comédien se révélait bien mauvais. Heureusement, le sien serait d'une grande originalité et apporterait un vent de fraicheur dans ce tribunal.
Le cardinal entrait à présent dans le vif du sujet avec sa marotte favorite : les infirmes. Il veillait même à ne pas parler de ceux résultant d'un accident de vie et magnifiait le Premier Conseiller. Un léger sourire lui vint. N'avait-il pas déclaré avoir acheté deux esclaves infirmes lors d'une certaine vente pour éviter de regrouper trois infirmes dans une même maison ? Que ce serait le moyen de conjurer le Diable ? Il oubliait lui-même ses propres sornettes.
Le point suivant, les avortements, serait le plus difficile à défendre. Néanmoins, grâce à sa rencontre, dans une église, avec Hyriel, de leur entretien dans un confessionnel, le prêtre avait réfléchi à de bons arguments qui pourraient atténuer ce chef d'accusation qui menaçait le guérisseur du pire.
La suite lui fit lâcher un soupir. Cet imbécile s'en prenait à la rhétorique pour affirme que le pouvoir des mots de Hyriel serait démoniaque. Pourtant, dans ce réquisitoire, il agissait de même. Nul besoin de magie quand on possédait l'éloquence !
La conclusion, là aussi, ne révélait pas la moindre surprise. La mort par bûcher. Décidément, il s'agissait d'une ouverture de pièce sans la moindre saveur. Heureusement, il se trouvait présent pour apporter à l'œuvre toute sa quintessence !
Le spectacle se poursuivit pour permettre l'entrée en scène du défenseur. Thierry ne put réprimer un sourire d'amusement en observant la gargouille émettre les premières paroles. Cela tournait décidément bien à la farce. Une farce absurde et baroque ! Une farce dont lui serait le héros, que tous loueraient, et le cardinal deviendrait le dindon. L'orateur s'exprimait bien mais l'évocation de la Grèce et de la notion de Pharmakos causa une grimace au prêtre. Tout ceci ne parlerait pas à cette salle venue se divertir. Les juges comprendraient mais ils avaient besoin de sentir la plèbe inculte pencher du côté de l'accusé. Or, si celle se perdait dans cette logorrhée, elle s'endormirait et le guérisseur serait à la merci du cardinal. La suite se déroula mieux. Il abordait les soins et la reconnaissance que les gens témoigneraient à celui qui lesa vait sauvé. Naturellement, l'agitation autour du convoi ne pouvait que s'expliquer de cette manière. Mais cela serait-il entendu ? Il eut un sourire quand Lénius déclara que l'envoûtement se trouvait dans l'œil de celui qui ne comprend pas et cherche un coupable. Superbe pique. Le cardinal la détesterait mais lui s'en régalait. Le couplet sur les infirmes était bien amené mais Thierry sentit que Lénius se perdait à mi-chemin. Non, il fallait pas demander à la foule de se questionner sur ce qu'elle ferait si demain il seraient estropiés. Grossière erreur ! Dans son réquisitoire, le cardinal avait insidieusement flatté le pouvoir et déclaré que le Premier Conseil – ce maudit Dyonis – remplissait ses devoirs et s'en prenait ouvertement aux invalides de naissance. De temps en temps, au milieu du discours, ses oreilles surprenaient une voix qui semblait faire l'interprétation des points obscurs du discours. On aurait pu croire à une coïncidence, à un bête bavardage, mais les occurrences revenaient de manière trop précises pour que celles-ci surviennent par hasard. Un homme s'appliquait à traduire. Bien. Il avait un allié quelque part pour s'amuser à éduquer les manants. Cela risquait de brouiller les esprits. Le passage qui porta à présent sur cette mythologie égyptienne lui plut et elle prouvait l'érudition de l'orateur. Malheureusement, elle serait bien trop abstraite pour le bas peuple ignare. Ils ne que connaissaient que bien vaguement les civilisations grecques et latines, alors leur évoquer celle des pyramides... Non, c'était là une nouvelle erreur.
Brusquement, au moment de citer Cicéron, Lénius sembla prit d'un malaise et des imbéciles en profitait pour rire. Il se dressa de toute stature autoritaire et cria d'un ton sec :
« Silence ! »
Il remarqua à ce moment un vieil homme qui intervenait lui aussi pour réclamer aux mauvais plaisantins de se taire. Le timbre de sa voix le fit tressaillir intérieurement. C'était celle de la voix. Hyriel avait décidément un bel allié dans la salle. Le prêtre fit mine de l'ignorer et reprit, sévère :
« Le premier que j'entends prendre la parole pour troubler inutilement ce procès verra ses péchés dénoncé en chaire dès demain. Premier et dernier avertissement. »
Il tourna un bref instant la tête et adressa un léger remerciement silencieux au vieil homme pour cette intervention puis dirigea le regard vers Lénius.
« Je vous prie de prendre, sieur avocat, dès que vous vous sentirez mieux. Nous saurons attendre. »
La salle retrouva son sérieux et Thierry distingua la silhouette de Coldris qui venait lui aussi de se lever. Sans doute pour réagir à ces stupidités. La plaidoirie put ensuite reprendre. Lénius abordait le cas des avortements des deux accusés. Tout ceci constituait la partie la plus dangereuse. Il approuvait la sagesse des paroles mais l'hypocrisie de cette société ne vudrait jamais le reconnaître. Elle préférait que de nombreux enfants naissent, quitte à les voir envahir les rues, sans ressources, s'entasser dans les orphelinats ou remplir les fosses communes. Il poursuivait la démonstration en louant la dénommée Louise et en faisant jouer la sensibilité. Cela pouvait fonctionner. Finalement cela se finit sur une apostrophe véhémente pour l'acquittement. Le final était là de toute beauté. Une parfaite résolution.
Les témoignages allaient à présent commencer. Thierry devint plus attentif que jamais, soucieux des moindres détails, et retint un soupir en découvrant la femme ayant importuné Coldris s'avancer vers la barre. Qu'avait-elle encore trouvé pour se faire remarquer ? Il pria pour que celle-ci ne dise rien de compromettant. Comment en être sûr ? Quand on se retrouvait à s'installer, sans en demander la permission, aux côtés d'un ministre, on pouvait aisément s'attendre au pire. Quoique... Cet incident pourrait jouer en la faveur. Il lui serait peut-être possible la déclarer folle et de rappeler ce qui venait de se passer dans la salle, que cela prouvait que cette dame ne possédait pas les facultés mentales nécessaires pour témoigner.
Il la remarquer toucher Lénius et sembla lui murmurer quelque chose. Elle s'approcha de la barre et déclina son identité. Thierry tourna un bref instant la tête vers Coldris. Les noms venaient de se graver dans sa formidable et dès son retour son ami s'en irait aussitôt tout rechercher à son sujet. Cette Cordélia déclarait que Hyriel aurait soigné sa meilleure amie d'une mauvaise fièvre qui serait la sœur d'un grand Noir que la femme désignait dans l'assistance. Le prêtre grimaçait. Elle aurait mieux fait de s'abstenir de l'associer à son récit. Les personnes tel que cet homme étaient encore plus mal considérées que les infirmes. Ne possédait-elle donc pas le moindre sens commun ? Au moins, il lui reconnaissait le bon sens de mentionner qu'un médecin reconnu avait validé les soins prodigués par Hyriel. Cela serait utile. Il grimaça cependant de s'entendre poursuivre et s'égarer sur les infirmes en sa possession. Thierry jugea que cela sortait de son témoignage. Elle se perdait. Elle aurait bien mieux été d'en rester aux soins seuls. La concision, c'était une qualité. Elle en rajoutait même en évoquant les avortements et son dégoût de la chose. Non, ceci allait beaucoup trop loin. Elle noyait ses premières déclarations et celles-ci devaient à présent être oubliés. Quelle sotte ! Il jeta un regard au cardinal et l'imagina sans mal se réjouir du pain béni dont elle venait de le servir.
Finalement, elle retourna à sa place. Après en avoir trop dit. Après avoir sabordé son propre témoignage. Thierry se jura de remettre en lumière les soins pratiqués sur cette Soraya. C'était sur cela et uniquement sur cela que la foule devait être acquise.
Un autre témoin s'avança, qui appartenait à la paroisse Saint-Eustache, étonnamment pieux, que Thierry connaissait bien. Son fils Alexandre lui en parlait souvent, agacé de ses rencontres avec son père adoptif, frustré de sentir que le libraire le préférer à lui. Il s'attendait au pire. Le prêtre ne fut pas déçu. Son témoignage relatait la mort affreuse qui avait frappé cette malheureuse Julie Menthon, pour laquelle il n'avait pu lui accorder les derniers sacrements. Elle était partie bien trop rapidement. Le veuf instrumentalisait cette mort pour incriminer Hyriel. Certes, les faits pouvaient laisser croire que... Pourtant, avec un peu logique, il serait logique de comprendre que parfois certaines maladies n'étaient pas soignables. Il s'agissait d'un fait que tout médecin devait apprendre et accepter. Son esprit se souvenait également de ses deux bébés. Il les avait enterré en même temps que leur mère. Quel imbécile que ce Roméo Menthon ! Les grossesses gémellaires étaient des raretés mais celles-ci survenaient malgré de tout de temps en temps, mettant alors la santé de la mère en grand péril. Il allait devoir chasser les obscurités de ce témoignage glaçant.
Dès la fin de ce récit, le libraire Bellanger se présenta à la barre et Thierry, sans entendre le premier mot, devina que tout ne serait que mensonges. Il l'entendit confirmer la version de son ami, puis ajouter avoir surpris Hyriel profaner la tombe de Julia Menthon pour en extraire les corps de ses deux enfants. Le prêtre roula des yeux, exaspéré, devant de pareilles sornettes. La pièce commençait à bien mal tourner. Il entendit Hyriel s'insurger et tenter de se défendre. Il s'efforçait même d'exposer avec calme les faits. Le prêtre nota cela et réfléchit à un moyen de l'utiliser. Naturellement, un juge le somma de se taire. Ou son attitude se retournerait contre lui.
Les scènes s'étaient assez enchainés. La pièce atteignait son climax.
Le Deux Ex Machina devait apparaître.
Les spectateurs passifs qui contemplaient cette pièce, qui se déroulait pour le moment sans grande surprise, méritaient de voir enfin surgir le coup de théâtre. Quoi de mieux qu'un prêtre pour apporter un Deux Ex Machina ? Il fixa un bref instant Coldris avant de s'avancer et le pria intérieurement de ne pas s'étouffer. Sa côte était-elle rétablie depuis ce pénible incident avec son fils ? Ce serait préférable.
Thierry marcha d'un pas lent et calculé, la tête haute. Le personnage clé d'une pièce se devait de ménager le suspense et de retenir l'attention. Il s'arrêta devant les accusés et posa la main sur celle de Hyriel.
« Courage, mon fils. »
Il s'éloigna pour se présenter à la barre, la main posée sur les évangiles. Pour une fois, son serment serait respecté. Ou presque.
« Je suis le père Thierry d'Anjou, curé de Saint-Eustache, né à Braktenn le 5 Décembre 1551. »
Il se tourna en direction du cardinal, dissimulant toute intention belliqueuse, tout en gardant en même temps de l'attention pour la salle, puis débuta :
« J'ai rencontré cet homme sur la Grande Place le 26 Septembre dernier. Suite à une blessure mineure, je cherchais un écrivain public pour rédiger une lettre urgente. Nous nous sommes rendus dans une église proche, celle de Sainte-Cécile, et nous avons travaillé dans le confessionnal par souci de confidentialité. A cette occasion, cet homme a souhaité se confesser. »
Thierry baissa la tête, revenant vers Hyriel, et posa à nouveau la main sur celle du guérisseur.
« Mon fils, leur avez-vous dit ce dont nous avions discuté l'autre jour ? Non, bien sûr que non.»
Il redressa la tête et poursuivit :
« Ce jour-là, cet homme que j'ai entendu était lourdement rongé par les secrets en lui. Il était... perdu. Mal. Il a reconnu devant moi avoir pratiqué des avortements, cela est un fait, mais il a aussi expliqué ce qui le motivait. Qu'il avait compris que les femmes qui réclamaient cet acte ignoble le feraient avec ou sans lui. Or, de part sa science des plantes, il savait que bon nombre guérisseurs sont expéditifs et que le remède abortif tue aussi bien la mère que l'enfant. Or, dans son esprit de bon chrétien, il redoutait que la mère soit ainsi vouée à la damnation. Il a a accepté, contraint, de pratiquer la chose en suppliant ces mères d'aller rapidement faire pénitence. »
Le prêtre baissa le regard vers Hyriel, espérant que celui-ci ne contredirait pas sa version. A moins d'être idiot, il ne le ferait pas. Il lui offrait là une chance inestimable.
« Je lui accordé l'absolution pour ces péchés. »
L'argumentation se révélait difficile et le crime d'avortement restait difficilement explicable. Thierry en avait conscience. Néanmoins, ce mensonge sur la repentance créerait un doute raisonnable. Cela pouvait lui éviter le bûcher et Claire en serait enchantée.
Il attendit quelques instants, le temps que les informations s'imprégnent dans les esprits puis poursuivit :
« De là, nous avons ensuite discuté de son savoir sur les plantes, de sa pratique... Je vous assure qu'il n'y a rien de démoniaque, ni d'acte de sorcellerie là-dedans. Il ne donne que des conseils que tous ceux et celles ayant du bon sens sont susceptibles de connaître ? Le thym soulage les affections respiratoires, une tisane de tilleul lutte contre les insomnies... Ce sont des remèdes dont j'entends parler depuis des années à l'église, en surprenant quelques conversations. Certes, on pourrait accuser Hyriel de pratique illégale de la médecine ? Néanmoins, en ce cas, par souci de justice, je demanderai de condamner toutes ces femmes et tous ces hommes qui proposent des remèdes à leurs voisins pour soulager un mal de ventre ou toute autre affliction. Est-ce crédible ? Bien sûr que non. Du reste, puis-je mentionner que Hyriel ne fait pas payer ses remèdes. De tout ce que j'ai pu apprendre à son sujet, je n'ai entendu personne me dire autre chose. Il ne fait que rendre service. Souhaiteriez-vous alors l'accuser du crime de charité chrétienne ? »
Le postulat de départ était bien basé. Il convenait à présent d'invalider les témoignages gênants.
« Je respecte la douleur du sieur Menthon et je lui exprime à nouveau toutes mes condoléances pour le décès de son épouse et de ses enfants. Je me suis d'ailleurs chargé de bénir leurs corps et de la cérémonie de leurs funérailles. Le chagrin et le désespoir troublent le jugement. Nous, dans cette Cour, devons garder un esprit rationnel. Le corps humain est un terrain complexe et ses déréglements échappent encore à notre entendement. Parfois, alors qu'une maladie paraît traitée, il peut survenir une complication, une rechute, et le patient meurt. Ce sont des impondérables de la médecine. Quant à ces deux bébés dans le ventre de Feu Madame Menthon, il n'y a là nulle trace de sorcellerie, mais il s'agit d'une grossesse gémellaire. Le cas est rare mais il arrive que certaines femmes donnent naissance à deux enfants en même temps. Citons que plusieurs Empereurs Romains, tels que Commode, qui ne le fit pas tant que cela, ou Marc-Aurèle. Ce fut également le cas pour le roi Charle VII de France dont l'épouse mit deux jumelles au monde. Néanmoins, ces naissances sont extrêmement complexes et même le plus habile des médécins peut difficilement sauver la mère. Parfois, elles ne viennent même pas à bout de cette grossesse. Comme celle malheureuse madame Feu Menthon. J'en appelle à présent aux mères présentes dans cette salle ? Souvenez-vous de cette douleur atroce à donner vie à un seul enfant ! Vous, mesdames, je suis assuré, que vous comprendriez la souffrance et la difficulté d'en sortir deux en même temps ! »
Il venait de faire de son mieux pourra atténuer tout le fiel de ce témoignage, sans risquer d'accuser publiquement le marchand de tapis. Pour celui du libraire infâme, il ne prendrait pas de gants.
« Néanmoins, pour l'accusation suivante, celle du sieur Bellanger, qui se trouve isolée, dépourvu de témoins, j'aimerais émettre un doute raisonnable. Puis-je remettre dans la mémoire collective que cet homme, lors du transport de Hyriel vers la prévôté, lui a jeté une pierre et l'a même un temps confondu avec l'image de son fils infirme ? J'ai cette sensation dérangeante que celui-ci utilise le malheur de son ami pour nuire à l'accusé et régler ainsi ses dettes envers sa rancune ! »
Le prêtre baissa à nouveau le regard, touchant une fois de plus la main de Hyriel.
« Mais notre accusé a réagi tout à l'heure à ces témoignages. Avecses mots, il vous a expliqué lui aussi le souci de certaines femmes qui se retrouvent à porter deux enfant. C'était une émotion sincère. Un instinct. Elle prouve sa bonne foi ! »
Il lâcha finalement la main du guérisseur et se tourna exclusivement vers le cardinal. Le prêtre poursuivit avec calme :
« Quant à cette utilisation de pouvoirs que vous auriez subi de sa part, votre éminence, ou que les dames de Monthoux auraient subi, je ne vois rien de mgique ou de démoniaque là-bas. Le langage seul et la capacité à s'exprimer permet au tout et à chacun d'imprimer des images et de créer un doute raisonnable. Vous en avez usé vous-même lors de votre réquisitoire. J'en use en ce moment pour défendre cet homme et lui éviter un châtiment bien trop sévère. Les commerçants de cette ville en usent eux aussi pour persuader leurs client d'acheter leurs marchandises. Est-ce faiblesse que de trébucher sur des mots ? Peut-être. Dans ce cas, cela signifie que vous êtes faible si votre foi se laisse troubler par des paroles mêmes habiles. »
Il lui restait un dernier argument, le plus personnel, mais aussi le plus jouissif. Thierry tourna un instant la tête vers Coldris et un sourire cruel naquit. Son fils était en sécurité. Matthieu ne pouvait plus rien contre lui. Il revint vers le cardinal et reprit d'une voix doucereuse :
« Dites-moi, votre éminence, possédez-vous une bonne vision ? »
Sans lui laisser le temps de répondre, le prêtre poursuivit :
« Vous avez eu jusque très récemment un esclave qui se nommait Alexandre. Un esclave qui partage une bonne partie de mes traits et, pour cause, il s'agit de mon fils. Or, en dépit de nous avoir aperçu côté à côté à plusieurs reprises, pas une fois, vous n'avez soupçonné ce lien. »
Thierry jubilait intérieurement de lui cracher enfin cette vérité au visage.
« Je rajouterais à cela que le 12 Septembre dernier, pendant le baptême de votre neveu, votre esclave Tristan a été enlevé, à quelques mètres de vous, sans que vous ne vous soyez rendu compte du rapt. »
Désireux de conclure sur un geste splendide, le prêtre marcha vers Lénius et demanda dans une intonation comique :
« Me permettriez-vous ?
Sans attendre la réponse, il attrapa les bésicles que portait Lénius et retourna vers le cardinal pour les lui tendre dans une ultime provocation.
« Ces lunettes vous aideraient peut-être à mieux contempler la réalité, votre éminence. »
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
- Trigger warning : « Handophobie très sauvage et racisme ! »:
- Là, ça y va, attention…
En parcourant quelque peu l’assemblée du regard pendant son réquisitoire, Matthieu avait pu rencontrer des figures convaincues… et d’autres moins. Il appréciait particulièrement d’accrocher de temps en temps le regard de Cecilia, autant pour se conforter que pour lui donner quelques enseignements et l’encourager à bien écouter pour voir la manière de faire.
Le regard du ministre des Affaires Étrangères l’inquiétait davantage, aussi préféra-t-il éviter son regard qui semblait le sonder, notamment quand il aborda sa propre faille. Logique, mais il fallait bien consolider l’argumentation et leur expliquer la dangerosité de l’individu.
Lorsqu’il fut arrivé au bout, il s’autorisa à souffler et resta droit. Il lui semblait avoir mené à bien sa mission première. C’était déjà ça… Il se tourna vers les juges et inclina bien respectueusement la tête avant de se rasseoir. Matthieu grinça des dents à la mention du sinistre avocat mais il n’en laissa rien paraître. Tant pis, se dit-il. Un infirme et un bouffon, c’est tout ce qui y avait pour le défendre ; par là-même, il se discréditait lui-même.
Ses yeux s’étrécirent pour observer l’infirme. Le simple fait qu’il lui adresse la parole lui était insupportable. Instinct de sorcellerie pour lui aussi ? Autre chose ? Il préféra ne pas se poser la question pour le moment.
L’introduction le surpris cependant. La Grèce Antique ? Sa première réaction fut de se demander comment un bouffon des rues pouvait-il connaitre ce genre de chose. Il était bien placé pour savoir que le grec n’était pas un enseignement aisé, Bélyl avait eu beaucoup de chance d’y avoir accès, de même que Jeanne et leur fratrie du temps où ils étaient jeunes. Alors d’où sortait-il cela ? Matthieu haussa un sourcil. Tout cela était plus qu’étrange mais son esprit combatif revint prendre le dessus et laissa cette question de côté pour le moment. Oh, il y avait bien des choses à attaquer… Non seulement il prenait pour exemple des païens qui sacrifiaient de façon barbare des animaux pour leurs fausses idoles mais en plus, il employait un terme plus qu’ambigüe. Quand on touchait à la traduction grecque, on savait qu’il fallait faire très attention au sens des mots et à leur contexte. Pharmakos n’était pas un remède dans ce cas mais bien un poison. L’avocat venait de tendre le bâton pour se faire battre… Il leva d’ailleurs les yeux au ciel. Des boucs-émissaires, bien sûr, la belle affaire… qu’il était facile de retourner l’accusation en se plaçant en victime… Mais il ne serait certainement pas dupe et espérait que les juges non plus. Il resta de marbre malgré son envie brûlante de répondre, son menton posé sur ses mains jointes. Il haussa de nouveau un sourcil quand il se tourna vers lui. Espérait-il vraiment le convaincre ainsi ? Et surtout, pensait-il qu’il ne percevait pas l’évidente pointe d’ironie derrière ?
La suite le laissa tout aussi sceptique. Le ton scandalisé était somme tout assez bateau. Oh mais il ne niait pas qu’il pouvait soigner, surtout des infirmes comme lui ! C’était bien pratique : il récompensait ses semblables pendant qu’il assassinait les honnêtes gens et les corrompait. Là était tout le problème et il était simple et clair comme de l’eau de roche.
Il se redressa à sa question et plissa les yeux. Son esprit crut y voir une histoire de paille de de poutre se glisser là-dedans. Il espérait que l’infirme n’osait pas telle chose à leur nez et barbe. La suite l’étonna d’ailleurs alors qu’il lui donnait raison mais… pour mieux retourner l’argument. Soit. Mais il maintenait et il tiendrait fermement. Les gens étaient incapables de voir la réalité, aussi simple soit elle. Les infirmes les menaient sur la voie du mal en se faisant passer pour de pauvres hères. La preuve était sous leurs yeux, ce pseudo avocat ne faisait que dérouler des excuses usitées jusqu’à la corde. Matthieu roula des yeux alors qu’il prenait encore des exemples païens et plus que discutables. Les mouvements du Soleil étaient encore un terrain dangereux sur lequel mieux valait ne pas s’aventurer avec l’Église. Cet avocat de cirque avait donc décider de s’enfoncer bien bas…
Soudain, il sembla se produire un miracle. Au milieu de ses paroles impies, le diable en fauteuil se mit à bredouiller, à perdre ses moyens. Matthieu se redressa, un sourire presque sadique aux lèvres. Il se retint de trop montrer sa joie cependant. Enfin ! Un signe divin, à n’en pas douter, qui venait montrer la faiblesse de ce discours et renvoyait le monstre à ses erreurs et à ses excuses pour voiler la vérité. Sans cautionner, il fut plutôt satisfait du mouvement de foule qui, ainsi, se rangeait à son avis. Il espéra un instant que l’orateur balourd comprenne ce signe et se retire mais il réussit à se reprendre. Matthieu retient un grognement, d’autant que la référence au Christ ne lui plut pas, pas plus que l’intervention d’un grand-père comme celle d’un autre homme qu’il reconnaissait un peu mais sans s’y attarder, bien trop véhémentes qui firent fondre la vérité de la foule comme neige au soleil.
Le reste le fit tout autant secouer la tête. Balivernes ! Quand bien même ce ne serait qu’une connaissance, un agencement de plantes, cela restait une connaissance contre-nature, des recettes démoniaques chuchotées à l’oreille. Et mensonge, encore et encore ou aveugle ignorance. S’il l’avait vu faire, il était alors soit dupe, soit complice. Les questions de Matthieu lui revinrent en tête. D’où lui venait cette culture, toutes ces références ? Là aussi, il y avait peut-être quelque chose à creuser. Après l’un, pourquoi pas l’autre ? S’il pouvait avoir le sorcier et le complice, le retentissement n’en serait que plus grand. Il gardait encore cette idée en en venant à Homère et Shakespeare.
Il faillit bien pouffer à la suite. Ridicule ! Jamais personne n’aurait été si affecté en à peine deux semaines avec une nouvelle tête. Cela ne tenait pas, même un idiot le verrait. Son dialogue sur les gens de petites conditions lui fit esquisser une moue. Il déplaçait le débat et cela n’avait plus rien à voir. Qu’il ait été grand ou petit, peu importe, il l’aurait tout autant sanctionné pour sa sorcellerie.
Il haussa un sourcil à son introduction sur la médecine. Au moins, il admettait que c’était un irrespect profond. Le reste le fit soupirer. Encore un ramassis de sornette et de la poudre aux yeux pour les détourner de la malfaisance de l’individu. Il secoua la tête à ses propos. Inacceptable ! Comment pouvait-on accuser des hommes de science qui connaissaient leur métier et vouaient leur vie à celle des autres ? Et revoilà qu’il partait sur Léonard… Décidément ! Au moins, il rappela le bon sens du mot qu’il employait. Très bien ! Mais il n’empêchait qu’il s’enfonçait seul et, lui, Matthieu, achèverait de faire pencher la balance pour que ce sorcier paye !
L’évocation de l’avortement rendit son regard un peu plus dur. De nouveau, il soupira avec agacement. Des excuses, toujours des excuses ! C’était un péché, un point c’est tout ! S’il fallait faire un choix, certes, les hommes étaient à mettre en cause mais les femmes n’avaient qu’à endosser leur responsabilité ! Elles avaient choisi cette vie, elles se savaient déjà perdues mais ce n’était pas une raison pour persister encore plus dans le péché. Ces enfants étaient des vies, déjà existantes et consistantes dans leur corps et elles choisissaient en leur âme et conscience de les détruire. Pire, ce sorcier leur en donnait les moyens et des moyens terribles. Il gardera une figure droite et froide. La société et ses possibles dysfonctionnement n’étaient pas son problème. Son problème, c’était l’hérésie.
Le reste ne l’intéressait pas. La prostituée pouvait vivre, mourir, aller au fond d’un couvent ou être clouée au pilori, tout cela lui était parfaitement égal. Elle se transforma d’ailleurs en fontaine de façon bien pathétique. La fin le fit se redresser un peu plus. Oh, mais il jugeait, que cet avocat ne s’en fasse pas. Et il jugeait bien, il ne pouvait en être autrement. Cependant, la suite le mit aussitôt sur la défensive.
Quoi…
Non…
Il n’oserait pas ?
Ses yeux s’étrécirent jusqu’à devenir deux pierres dures et froides. Comment osait-il ? Ses doigts se serrèrent sur les accoudoirs presque à faire craquer le bois. Il savait, lui aussi.
Oh oui, il le ferait. Et de toute façon, il y parviendrait sans doute sans mal avec cette étrange culture qui méritait d’être creusée. Lui aussi cachait des choses et il découvrirait lesquelles, à n’importe quel prix ! Alors qu’il se fixait sur sa figure, pourtant, quelque chose en lui se troubla. Il lui sembla voir… Quelque chose de familier. Comme une image qui se superposait à la gargouille. Un visage tout aussi abîmé, des jambes atrophiées mais un sourire amical.
Matthieu allait faire une grimace, comme si ce non lui avait fait mal mais il se retint de justesse. Il resta de marbre, sans un mot, sans un bruit. Seul son regard traduisait un avertissement pour l’avocat du diable.
Conclusion passable et Matthieu se détourna, dédaigneux mais intérieurement troublé. Quel était ce nom ? Cette image ? D’où cela venait-il ? Était-ce cet infirme qui avait provoqué cela ? Avait-il aussi des pouvoirs ? À creuser…
Il jeta un bref coup d’œil à Hyriel. Ce dernier semblait relativement satisfait. Il espérait le faire bien vite déchanter. Il se tourna ensuite vers l’assemblée, cherchant à voir qui serait assez bête pour le défendre et qui serait au contraire assez courageux pour les soutenir dans leur noble cause.
La première qui s’avança fut une femme. Matthieu fut interloqué de voir qu’elle semblait plus habillée pour un dîner au château que pour un procès. Était-elle là par erreur ? Non, visiblement, si elle témoignait. Il attendit donc et l’observa de bas en haut avant qu’elle n’ouvre la bouche. Elle commença par remercier l’infirme. Ça partait mal, à moins qu’elle ne soit adepte de rhétorique. Il patienta pour le témoignage, plus méfiant.
Le nom ne lui dit rien. En revanche, l’adresse qu’elle lui fit le fit cligner des yeux. Pardon ? il allait la réprimander quand elle répondit elle-même à ce qui semblait en réalité une question rhétorique. Matthieu ne sut alors se positionner. Cherchait-elle seulement à jouer avec le feu ou était-ce une véritable question sacrilège ? Quel culot et un manque de tenue total, quel que soit la réponse !
Il tapota le bois de son siège quand elle commença. Donc, scène de sauvetage. Emotion. Larmes dans les chaumières… Bon, et ensuite ? De plus, elle parlait d’une… de la sœur d’un noir ? Ses yeux s’écarquillèrent. Mais ces personnes-là n’avaient pas d’âme ! Et aucune morale ni bonté ni capacité à connaitre le Seigneur ! Les pieux hommes de Valladolid les avaient jugés en tant que tels ! Comment pouvait-on en prendre un à témoin ? Il aurait volontiers crié à l’hérésie mais jugea bon de ne pas faire d’esclandre. Il devait laisser parler les témoins… Quand bien même c’était de purs contes abracadabrantesques ! Enfin que dire sur une pareille histoire ? Hyriel avait donc sauvé une sans-âme ? Matthieu esquissa un léger sourire. Voilà qui enfonçait un peu plus le clou ! Au fond, peut-être était-ce pour le mieux, toutes ces pseudos-défenses. Cela lui donnait bien du grain à moudre pour un moulin qu’il espérait bientôt enflammé.
Il tomba des nues quand elle se tourna de nouveau vers lui. Mais par tous les Saints, à quoi jouait-elle ? Il jugea bon de la fustiger du regard. Avait-on jamais vu quelqu’un, quel que soit son rang social, faire preuve d’autant d’irrespect ? Avaient-ils gardé les moutons ensemble pour qu’elle s’adresse ainsi à lui avec une telle familiarité ? Nous décidément, rien de tout cela n’allait ! C’était une parodie, une farce ! Lui qui avait cru voir le bouffon auparavant, visiblement, il s’était trompé.
Il la foudroya du nouveau du regard quand elle osa recommencer une interpellation. Allait-elle se taire ou fallait-il qu’il exige qu’on la traine dehors ? Non, il devait rester calme… Il se força à souffler, à s’apaiser. Tout était pour le mieux, il fallait qu’il se le répète. Avec de telles baragouinages, elle ne faisait que pousser un peu plus le prévenu vers l’échafaud. Tout cela était parfait. Il se raccrocha à cette pensée et demeura parfaitement serein.
Il se pinça l’arête du nez alors qu’elle partait en digression. N’avait-on pas dit un avocat ? Et à choisir, la gargouille avait au moins un verbe qui, il fallait le dire, était plutôt plaisant. Ici, entre considérations simplistes et idioties niaises et larmoyantes, il n’y avait pas grand-chose. Mais encore une fois, tant mieux pour lui.
Il faillit bien rire quand la bien piètre avocate réévoqua l’absence de nom. Encore un clou d’enfoncé ! À ce rythme-là, ils pourraient bientôt fermer dix cercueils ! Et il faillit bien de nouveau se passer une main sur le visage quand elle se présenta comme « envoûtante » aux yeux de certaines personnes. Et elle avait des employés infirmes, allons bon… Voulait-elle passer aussi au cachot ? Matthieu regarda d’un œil nonchalant les juges et les gardes. À ce compte-là… Il lui accorda de nouveau un regard incendiaire. Si elle s’amusait à jouer les provocatrice, il n’hésiterait plus longtemps à l’envoyer en cellule.
Il fronça ensuite les sourcils. Un membre de sa famille ? Sa sœur puisqu’elle évoquait ses parents. Pourquoi alors le taire et prendre autant de précaution si c’était pour se trahir ? Définitivement, il y avait quelqu’un qui devrait aller réviser son Cicéron… Il l’écouta d’une oreille blasée et impatiente qu’elle arrive à la fin. Le regard qu’elle lui lança à la mention « d’accompagnement » fut rendu plus noir que la nuit. Oh, comme cela le démangeait de descendre et lui donner une bonne paire de claque pour lui remettre les idées en place et lui apprendre à qui elle devait respect et obéissance au même titre qu’à son roi. Jamais il n’avait vu créature plus insolente !
Son raisonnement ensuite le fit soupirer. S’il utilisait ses pouvoirs au grand jour, il serait perdu voyons ! Il aurait aussitôt tous les gardes à ses trousses et serait aussitôt jeté dans les flammes sans passer par la case procès dès qu’il serait rattrapé. Or, il devait bien le reconnaitre, l’homme était habile et dissimulateur. De plus, si elle était mieux renseignée, elle saurait que les sorciers n’ont pas tous les mêmes types de pouvoir et que certains leur sont inconnus. De plus, hypnotiser toute une assemblée pour en réchapper était bien trop ardu et épuisant ! Mais pouvait-on reprocher à la plèbe d’ignorer cela ? Et, après tout, il n’avait pas à s’en inquiéter, ces arguments pouvaient être facilement démontés pièce par pièce.
Elle se prit de nouveaux éclairs foudroyants de la part des yeux de Matthieu. Par pitié que quelqu’un la fasse taire ! Et elle demande de ne pas tenir compte de ses mots ? Sait-elle à quoi sert un greffier ? Réfléchit-elle seulement avant de parler ? De toute évidence, non, pas du tout.
La fin le fit passer au rouge. Dieu, qu’il aurait eu envie de hurler ! Le Pape ! Sa Sainteté ? Si pur, si détaché ! Lui, connaitre une femme pareille ! Mensonge ! Tout n’était que tromperies et affabulations dans ses paroles venimeuses ! Il lui adressa une expression qu’il espérait terrifiante pour l’inciter à se reculer le plus loin possible, voir à sortir ! Enfin, fort heureusement, elle avait fini… Qu’elle aille donc saluer la poussière de la rue plutôt !
Fort heureusement, le deuxième témoin fut bien moins véhément. C’était un garçon qui lui sembla bien sous tous rapports, un peu plus jeune que sa sœur et à la figure sage. Cette fois, il l’accueillit par une ombre de sourire encourageant et se redressa pour écouter cette fois avec sérieux. Il fut choqué d’entendre une telle histoire atroce. Il se signa aussitôt, songeant à cette malheureuse femme qui avait dû tant souffrir. Cependant, la suite le fit hausser un sourcil. Potion mortelle d’accord mais les deux enfants ? Il secoua la tête. Cela dépendait. Il attendit que le jeune homme finisse et surtout son tour pour éclairer cette histoire. Il hocha la tête à la fin, le remerciant.
Il lui fit signe discrètement d’approcher et le bénit avec un air sincèrement affligé et concerné.
- Je prierai pour votre femme et vos enfants. Si vous avez besoin de quelque chose, votre enfant aîné et vous, n’hésitez pas à venir me voir.
Ils enchainèrent sur un témoignage qui complétait le précédent. Cet homme lui disait quelque chose mais il ne parvenait pas à le remettre précisément malgré sa grande mémoire. Il hocha de nouveau la tête avec un air navré, d’autant que l’homme semblait très concerné par la lutte contre le démon et les infirmes qui se faisaient son réceptacle. Il se signa de nouveau en louant Dieu que les enfants aient pu être baptisés. Puis ses yeux s’arrondirent. Une profanation de plus ? Ce sorcier n’avait aucune limite ! Il inclina de nouveau la tête pour lui pardonner son oubli et sa peur. La chose était commune, il n’avait pas à en avoir honte.
Cependant, voilà que le sorcier jugea bon de s’éveiller et de hurler. Matthieu tourna aussitôt vers lui un regard orageux. Comment osait-il remettre en cause la parole d’hommes respectables qui juraient sur l’Évangile ? Quelle damnation que cet homme-là ! Cependant, il laissa les juges faire leur travail, quoique sa voix le démangeait. Mais il avait assez parlé et le territoire était ici celui de la justice. Il n’était qu’une aide de Dieu.
Les juges demandèrent le silence, ce qu’il espérait qu’on respecterait un minimum. Il inclina la tête vers eux puis, après que les hommes eurent réitéré leur serment, ce qui confirma à Matthieu qu’ils étaient tout à fait dans leur bon sens, il se leva, bien droit et calme.
- Si vous me permettez juste une question, messieurs les jurés. Après quoi, nous pourront clore ce témoignage.
L’autorisation obtenue, il se tourna vers le sieur de Menthon.
- Monsieur, pourrais-je vous demander, pour éclairer votre témoignage si le ventre de votre femme vous paraissait plus gros à l’approche du terme ? Ma belle-sœur a elle-même vécu une grossesse gémellaire, ainsi je saurais vous dire si ce deuxième enfant était l’effet d’un mauvais sort ou non.
Il attendit la réponse et, une fois que ce fut réglé, reprit tranquillement sa place en attendant le prochain témoignage. Ce fut l’homme qui s’était élevé contre les voix se moquant de l’avocat qui s’avança. En détaillant sa figure, il arrondit les yeux. Non… Non pas lui… Ce… défroqué, névrosé, ce prêtre qui l’avait privé du baptême de son propre neveu ! Le démon, le maudit ! Et il venait témoigner en… jurant sur les Saintes Écritures ! Sacrilège ! Hérésie ! Comment n’avait-il pas encore été radié après tout ce qu’il avait fait ! Maudite lettre qu’il n’avait songé écrire que bien trop tard au Pape alors que le sort de ce misérable aurait dû être réglé bien avant !
Les mains de Matthieu se serrèrent sur les accoudoirs, à en faire blanchir ses jointures, avec plus de violence encore qu’auparavant. Ce… non pas ce prêtre, il ne méritait pas ce titre… Cette créature déshonorait leur sainte profession, l’Église toute entière ! Il ne pouvait le laisser témoigner, il ne pouvait pas !
Alors qu’il allait hurler à l’assemblée les crimes de ce parjure, une voix le retient.
Bien sûr… Comme cette femme indocile, il devait le laisser parler et n’agir qu’à la fin ! Ainsi, il ferait deux procès en un. Ce témoignage faussé et indéfendable donnerait le coup fatal au sorcier et, dans le même temps, il ferait fuir ce curé maudit, la queue entre les jambes. Il se dressa alors, fier et droit. C’était comme les coups de fouet de son oncle. Il allait falloir endurer. Ensuite, il pourrait frapper.
Il commença encore une fois par une belle histoire qui ressemblait bien trop à une jolie fable qu’on dirait à un enfant pour l’endormir. Pathétique. Toujours les mêmes arguments, les mêmes excuses.
Vint un instant plus dur.
L’absolution…
Il osait…
Le bois de ses accoudoirs semblait prêt à se fendre, comme sous un coup de tonnerre puissant. Matthieu se contint, se rappelant le fouet, la douleur. Tout cela avait été bien pire. Ces paroles étaient injurieuses mais bientôt, oui bientôt, il allait toutes les retourner à son avantage et il le mettrait à terre. Non, plus bas encore que terre. Il serait mort pour la société et pour toute la communauté évangélique.
Il enchaina par les sempiternelles justifications sur les plantes qui, à force de se répéter, ne faisait que montrer toute la faiblesse et la pauvreté de leur argumentaire. La mention de la charité lui arracha un souffle agacé. Mais quelle plaisanterie… Encore un morceau de la farce qu’ils avaient décidé de jouer tous ensemble visiblement. Il ne fit que répéter également ce qu’ils savaient concernant les jumeaux. En revanche, il osa contester l’honorable et pieux sieur Bellanger. Matthieu secoua la tête. Encore un peu de patience…
Il se tourna vers lui, plus dur mais il s’accrochait. Il lui semblait d’ailleurs… Mais oui… Stupide qu’il était ! Ces provocations étaient délibérées ! Exactement les mêmes auxquelles il avait eu le droit chez sa sœur ! Il voulait le pousser à bout. Quel dommage… Dieu était avec lui et avait depuis longtemps délaissé ce prêtre déchu. Il commençait de toute façon à avoir l’habitude qu’on lui reproche son argument. Il s’y était préparé et ce n’était jamais que la troisième attaque. Alors même si elle venait de lui, elle était désormais bien inutile.
Faible ?
Lui ?
Matthieu faillit bien éclater d’un grand rire cynique. Lui, face à tous ses collègues ou presque, face à cette parodie de curé, il avait tenu tous ses vœux et se présentait au Seigneur sans aucune hypocrisie. S’il y avait un faible ici, ce n’était certainement pas lui.
Le sourire sur le visage de son adversaire lui fit hausser un sourcil et sa question encore davantage. Il sentait venir la provocation. Patience… la piège se refermait et c’était son interlocuteur qui lui-même le tendait et tombait dedans. Douce ironie…
Il plissa les yeux et faillit bien soupirer. Quoi encore avec Alexandre ? Décidément, ce garçon était un aimant à problème… Il ne regrettait pas de s’en être débarrassé…
La révélation le laissa un moment coi. Il retint fort heureusement sa mâchoire pour lui éviter de se décrocher. Les mots s’intégrèrent à son cerveau. Il retint encore une fois son rire mais intérieurement, ce fut le triomphe. Jamais, jamais il n’aurait pensé pareil aveu ! Tout ça pour le défier ! Dieu, quelle bêtise ! Se croyait-il intelligent ? Au vu de son visage, oui. Parjure, hérétique et stupide. Parfait. Jamais il n’aurait pensé avoir une telle combinaison pour avoir un témoin qui pousse définitivement Hyriel vers l’abysse.
Un sourire cruel, répondant à celui de Thierry mais tout aussi voire plus terrifiant s’étira sur ses lèvres alors que ses yeux le fixaient avec jouissance.
Puis il se détourna et se leva encore une fois lentement, reprenant une figure grâce, et semblait-il, peinée. Il se centré sur les juges, tâchant d’éviter la mine d’Hyriel, qu’il devinait déconfite, pour garder son sourire à l’intérieur de lui. Quelque part, il le plaignait, lui qui avait eu à subir, à cause d’une stupide querelle qui ne le concernait ni d’Eve ni d’Adam, une chute de plus. Une voix calme et posée, tranquille, avec juste ce qu’il fallait de tristesse, s’éleva alors vers les juges.
- Messieurs, j’espère que vous me pardonnerez de prendre ainsi la parole si cavalièrement et sans réelle demande de votre avis. Cependant, il me semble clair qu’il faut cesser là ce témoignage honteux.
Il apitoya encore davantage sa mine.
- Voyez-vous, cet esclave, Alexandre, m’a rapporté lui-même qu’il voulait aller surveiller ce prêtre. Il m’a rapporté des horreurs que je ne saurais vous conter sans rougir et m’a supplié de le laisser se rendre à l’église pour veiller à ce que ce prêtre ne souille pas davantage l’édifice religieux, ce que je lui ai bien sûr accordé.
Il tendit une main vers le prêtre défroqué.
- Et je comprends aujourd’hui pourquoi… le malheureux enfant qui fait d’ailleurs beaucoup pour échapper à sa condition d’infirme en étant le plus pieux possible, voulait en réalité expier les fautes de son père ! Je comprends sans mal qu’il m’ait tu ce qu’il savait à ce sujet… Et moi qui lui avait promis d’agir… J’ai pourtant tardé à écrire à notre saint Pape pour lui demander d’intervenir, par le biais de l’évêché ou en personne, certain que la traque du sorcier demeurait la priorité.
Il secoua la tête. Il s’exposait de nouveau mais c’était la vérité et une vérité nécessaire bien qu’il se félicitât intérieurement de lui avoir laissé sa liberté suffisamment de temps pour qu’il lui livre ce beau témoignage qui lui permettrait de mettre un terme à ce procès rapidement et sans heurt. Un véritable plateau d’argent… Il se redressa un peu plus, pointant du doigt désormais le témoin.
- Cependant, cette fois, je n’hésiterai pas. Je vous demande, vous qui êtes incarnations de la justice de ce pays, de rayer ce témoignage de ce procès, de le compter pour nul, voir même aggravant pour l’accusé qui est défendu par un prêtre qui avoue devant tous sans honte et je crois – mais si cela me révulse – avec fierté qu’il a un enfant ! Il a osé juré sur l’Evangile et dire donner l’absolution, alors même qu’il a rompu ses vœux, pas seulement une fois à ce qu’on m’a dit, et eut un bâtard. Un tel prêtre ne saurait être nommé ainsi et ne peut ainsi témoigner ici sans être accusé lui-même de parjure !
Il retourna à Thierry, aussi neutre que possible mais il commençait à avoir du mal à cacher sa joie.
- J’ajouterai, monsieur, pour vous seul, que votre accusation concernant Tristan est hors sujet puisqu’il s’agit d’un procès pour sorcellerie et que, d’autre part, cet événement était entièrement de votre faute. Dois-je vous rappeler que c'est en faisant pression sur ma sœur, par un caprice digne d’un enfant que vous avez discrédité ma présence et que vous avez ainsi privé mon neveu d’un oncle aimant à son baptême ? J’ai à peine pu voir la cérémonie avant de devenir m’en retourner, seul.
Et allez, un argument bien pathétique de plus, pour attendrir un peu plus le public ! Tout cela était vraiment trop beau… Dans ses yeux brillaient un feu ardent et une jubilation à la hauteur de la sottise de l’argumentaire du prêtre. Dans ceux-ci semblait danser une question ; alors, qui est le monstre aux yeux de tous à présent ? Il se rapprocha un peu plus, de manière à baisser le ton pour n’être que peu entendu.
- S’il y a poutre, monsieur, elle est dans votre œil, non dans le mien. Et vous devriez rendre ses lunettes à cet avocat de fortune et plutôt lui emprunter son éloquence. Pour vous, bien entendu.
Alors qu’il attendait la réponse des juges, il se tourna vers Hyriel et ses yeux semblait lui dire « Alors c’est tout ce que tu as trouvé pour te défendre ? Un bouffon grimaçant, une fausse dévote et un prêtre défroqué ? Laisse-moi rire… »
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Selon Lénius, les deux prétendus criminels n’étaient que des boucs émissaires, des φαρμακα. Voilà qui s’opposait en tous points à la vision du Cardinal. Nehalan secoua discrètement la tête.
Tout élève studieux qu’il était, il prit soin de noter l’appel à des références culturelles de valeur, tout comme cette façon d’englober toute l’assemblée dans son exorde. Il ajouta que le plaidoyer semblait déconstruire une à une les accusations portées plus tôt, avec un certain panache, par l’envoyé du Pape. Satisfait de son compte-rendu pour le moment, le jeune homme se cala contre le dossier, pour observer la suite du procès.
Alors qu’il venait de citer Cicéron, modèle de l’art oratoire dont il avait passé des heures à étudier le De oratore, l’infirme se mit à bégayer. A son plus grand effarement, les railleries se mirent à pleuvoir sur le pauvre homme. Pourquoi se comporter de manière aussi bestiale ? La cause de ces persiflages serait-elle l’infirmité de Lénius ? Cela n’en devenait que plus révoltant. Quand quelqu’un se trouvait en difficulté, il lui semblait que la bonne chose à faire était de lui porter assistance, pas de le regarder se débattre en riant. D’autres avaient visiblement la même opinion que lui, mais d’avantage de courage, puisqu’ils se levèrent pour réclamer silence et respect. Un prêtre et un vieillard, qui venaient réchauffer son cœur, par leur résistance à l’effet de groupe. Ils auraient tout aussi bien pu se contenter de pincer les lèvres et se taire, comme lui. L’infirme pu profiter de ce répit pour reprendre son discours comme si de rien était.
Quand il aborda la question des avortements, le jeune homme détourna le regard, peu au fait de se genre de chose, c’est à peine s’il comprenait toute l’entièreté de la signification du mot. Alors pour ce qui était de savoir si cet acte était répréhensible ou non, de décider si les motivations qu’il y avait derrière pardonnaient le crime, il ne fallait pas attendre grand-chose de lui. Il préféra donc se concentrer sur la foule, les postures du Cardinal, des accusés, de la Cour, observa avec fascination les décors sculptés dans la pierre, jusqu’à ce que l’avocat passe à autre chose.
Vint alors la péroraison du discours, partie qu’il savait être cruciale. Le public retiens toujours le début et la fin mieux que ce qu’il se passe entre le deux. C’est pour cela qu’une attention toute particulière doit être portée à l’introduction et à la conclusion, lui avait un jour expliqué son précepteur. Il pu se rendre compte par lui à quel point il avait raison. Lénius venait de leur offrir une remarquable performance. Les derniers mots qu’il avait prononcés, comme ceux du Cardinal, résonnaient plus fort que les autres sous les voûtes de la prévôté. Les spectateurs, pendus à leurs lèvres, auraient été emportés par l’un ou l’autre des discours, plaidoyer ou réquisitoire, mais il était certain qu’ils auraient été transportés, tout comme lui. Il en voyait certains, la mine perplexe, essayer de démêler le vrai du faux, tout comme lui.
La froideur du juge le surpris. D’autant plus lorsqu’il incita le public à venir témoigner, non sans rappeler les risques encourus. Qui pourrait bien avoir suffisamment de courage pour venir à la barre le premier ? Pas lui en tout cas. Il ne pourrait pas parler devant une telle assemblée, il n’était d’ailleurs même pas sûr d’avoir SON aval pour ce genre d’initiative. Qu’est-ce que son histoire ridicule pourrait-bien apporter de toute façon ? Non, il ne témoignerait pas. D’autres le feraient bien mieux que lui. Il ne savait même pas s’il voulait être favorable aux accusés ou non. Et si son témoignage avait l’effet inverse que celui désiré ? Non c’était décidément bien trop risqué.
Quelqu’un se décida finalement. Une femme, tout de blanc vêtue, s’avança vers le pupitre. Nul de pouvais voir le visage de la dénommée Cordélia, un bien joli prénom, peut-être un peu trop innocent pour autant de verve. Il ajouta à ses notes qu’elle n’aurait pas dû s’attaquer aussi directement au Cardinal, qu’il était toutefois une bonne idée de citer toutes les plantes utilisées par le médecin, cela permettrait ainsi de prouver qu’elles n’avaient aucun effet néfaste. Il souligna plusieurs fois l’emploi d’un argument d’autorité pour appuyer sa démarche. Si un médecin « officiel », avait approuvé les traitements administrés par Hyriel, cela voulait bien dire qu’il disposait d’un certain savoir, qu’il avait de surcroît mis à la disposition du bien. Il se permit de nouveau de rêvasser lorsqu’elle aborda les avortements, elle ne témoignait même plus, elle donnait son avis. Or il lui semblait bien que l’assemblée était appelée à témoigner, non à tenter de faire une pâle copie du plaidoyer de l’infirme.
Dès qu’elle eut regagné sa place, un autre témoin se présenta, à charge, nota-t-il aux côtés de son patronyme. Le dénommé Roméo Menthon accusa avec verve le soi-disant sorcier d’avoir tué sa femme et d’avoir dédoublé son enfant, appuyé par un second témoin, qui en profita pour régler des comptes avec son fils. Nehalan secoua la tête. Qu’avait-il donc tous avec les femmes enceintes et les nourrissons ? Ce n’était pas le seul problème soulevé tout de même ! Et puis, pour avoir deux jumeaux pour frères, il savait parfaitement qu’il s’agissait là de quelque chose de naturel, pas d’une quelconque sorcellerie. Si Madame votre mère, en avait été victime, jamais ses parents n’auraient ensuite fait confiance à l’accusé ! C’était tout bonnement ridicule.
Hyriel semblait du même avis que lui, puisqu’il s’insurgea contre les témoins. A ces mots, le jeune homme fronça les sourcils. Il sentait que son
intervention était sincère, mais il voyait aussi le regard éploré de Menthon. Un homme accusé de meurtre et promis au bûcher aurait de toute manière tenté de se dédouaner de cette faute. Si cette histoire avait été vraie, le sorcier aurait sans doute réagi avec une verve identique. Cela ne faisait qu’appuyer l’histoire racontée par le marchant de tapis, à ses yeux. Pourtant si l’accusé était sincère, il était normal qu’il ne se laisse pas accuser à tors sans rien faire. Mais s’il était réellement un sorcier maléfique, n’aurait-il pas voulu entraîner le plus de personnes dans sa chute, et par conséquent faire excommunier les deux commerçant en les accusant de mensonge ? Sauf que cette histoire était si dégoûtante, qu’elle lui semblait à la fois vraie et fausse. Le désespoir de Menthon frappait son cœur, mais comment une chose aussi horrible pouvait-elle bien arriver ? Comment était-ce possible ? En même temps, pour inventer ce genre de détails, il aurait fallu qu’il ait l’esprit très mal tourné.
Le blondinet aurait voulu se prendre la tête entre les mains mais la bienséance l’empêchait de se faire remarquer de la sorte. Il ne savait pas dans quel camp il se trouvait. En définitive, Hyriel était-il coupable, ou non ? Et la…prostituée, pour qui personne n’était réellement venu témoigner ?
A peine le juge avait-il ramené le silence, à grand renforts de maillet, que l’homme d’église qui était intervenu plus tôt se présenta à la barre. Nehalan plissa les yeux, en voyant cette silhouette replète s’avancer. Ce visage lui disait quelque chose. Tout devint clair lorsqu’il déclina son identité. Le prêtre de Saint-Eustache ! Le jeune homme se sentit frissonner. Il avala sa salive une fois, deux fois, trois fois, se ratatina sur son siège, espérant que la personne devant lui suffirait à le dissimuler de son regard maléfique. S’il y en avait bien un qui possédait une aura démoniaque en cette salle, il ne doutait plus à présent, c’était le témoin actuellement à la barre, pas l’accusé dont il semblait vouloir prendre la défense.
Le mot confessionnal raisonna dans ses oreilles plus que les autres. Il tournait en boucle dans son esprit, inscrit en lettres de feu à mesure que des rires diaboliques s’élevaient au cœur du brasier. Des yeux porcins, un sourire qui s’étalait d’une oreille à l’autre comme un vicieux serpent, oh oui, c’était bien lui ! Des flashs de souvenirs remontaient à la surface un à un.
Un éclat de rire. Un sourire mystérieux. Un magnifique calice. Et puis… Et puis… Nehalan ferma les yeux, grimaçant. Trop tard. Il relevait sa soutane. Au son de son témoignage s’ajoutait le bruit de… de l’urine tombant à grands flots jaunâtres dans cette coupe, souillée à jamais.
« Pisser dans ce calice, mon garçon, c’est véritablement honorer le Christ », lui murmurait sa voix de perfide reptile. Il l’entendait encore lui demander ce qu’il ferait. S’il allait continuer de respecter les convenances.
Nehalan ne pouvait pas le laisser chambouler sa mémoire plus longtemps. Il ne voulait pas continuer de suivre le déroulement de cette journée. Ah il avait été bien puni de sa faute, et pas comme il le pensait ! Il secoua la tête avec vivacité, se redressa, la tête bien droite. Il n’aurait plus jamais affaire avec ce prêtre. Aujourd’hui c’était un témoin comme les autres, qu’il écoutait comme les autres. Avec la même attention, ni plus, ni moins.
Il inscrivit son nom d’une main fébrile, tout en essayant de comprendre où il en était dans son discours. Il avait accordé l’absolution au sorcier. Bien. Il utilisa la religion pour fortifier son histoire. Bien. Il fortifiait la réponse d’Hyriel quant aux accusations des deux marchants par un second témoignage. Bien. Comment pouvait-il faire preuve d’autant de sérieux ? Qui était cet homme qui lui avait ordonné de blasphémer et qui maintenant défendait un sorcier de manière tout à fait respectable ? Comment pouvait-il être à la fois complètement… dépravé et aussi sérieux ? Comment pouvait-il parfois même se montrer presque sage ? Tout cela était fort désappointant. Fort peu convenable. Soit il était dépravé, soit il ne l’était pas. Il ne pouvait pas… pisser devant le Christ et quelques semaines après discourir ainsi ! Pourquoi tout le monde s’obstinait-il à être si compliqué ? Comment était-il sensé s’y retrouver au juste ? Entre les sorciers maléfiques mais en fait non, les pères et maris éplorés mais menteurs, les prêtres dépravés mais dotés d’un semblant de bonne conscience ?
Le prêtre eu soudain un sourire cruel. Un sourire effrayant, qui se rapprochait bien plus de ce qu’il avait pu observer en ce jour maudit du 8 décembre. Que mijotait-il ? L’annonce qu’il fit ensuite lui apporta la réponse. Une telle insolence… Revendiquer la paternité, lui, un homme de Dieu ? Et quel fils… Alexandre, son fils ? Comment pouvaient-ils être aussi différents ? Tous les enfants ressemblaient à leurs parents, non ? Est-ce qu’il ressemblait à Monsieur votre Père lui ? Non. Certainement pas. S’il était marié, il n’irait pas déshonorer sa femme lui. Il ne franchirait jamais la porte de ce genre d’établissement de mauvaise vie de toute façon. Il n’avait rien contre les prostituées, en soit, ce n’étaient pas elles qui causaient du tort, mais bien les sales porcs immondes qui leur rendaient visite.
Le Cardinal sut toutefois remettre les choses à leur place avec dignité, avec une pique finale tout à fait bien choisie, pour répondre à ce prêtre qui s’était vraisemblablement fourvoyé sur sa vocation. Entretenir des prostituées ou bien récurer des écuries, voilà qui lui aurait sans doute bien mieux convenu. Thierry rejoignit sa place, laissant la place à un autre témoin. Personne ne se leva. Au bout de ce qu’il lui sembla une éternité, il n’y avait toujours personne à la barre.
Et si lui, il allait témoigner ? Mais que pourrait-il faire, face à pareil scandale, comment pourrait-il se tenir en face de tous ces gens, en sachant que parmi eux, deux yeux aux lueurs de fin du monde le regarderaient ? Et qu’est-ce que son histoire pourrait bien apporter ? En voyant les joues rougies par les larmes de Louise, le visage tendu d’Hyriel, il ne pouvait s’enlever de la tête qu’ils étaient innocents. Le sorcier lui avait sauvé la vie. C’était tout de même grâce à lui s’il était ici, la moindre des choses serait de faire tout son possible pour l’aider en retour, non ? Mais, s’il avouait que ses parents avaient fait appel à lui, leur serait-il porté préjudice ? En outre, Monsieur Retmer lui avait bien spécifié qu’il était là pour observer. Que dirait-il s’il le voyait monter sur cette estrade ? Pourrait-il seulement avancer jusque là-bas sans s’étaler sur le sol, parler devant cette assemblée sans perdre ses mots, se montrer suffisamment éloquent ?
Tellement de risques. Tellement de barrières dressées en face de lui. Serait-il capable d’en triompher ? Il n’était pas un guerrier, pas un soldat. Il ne savait pas se battre. Une voix au fond de son cœur lui murmurait pourtant que s’il restait assis là, il le regretterait plus tard. Que ce silence était un signe pour lui de se lever. Il lui suffisait de si peu de choses. Se lever. Marcher jusqu’à l’estrade. Raconter comment il avait été soigné. Regagner sa place. Un protocole très simple en apparence.
Il prit une nouvelle feuille, et y griffonna rapidement les points clefs d’un discours que lui avait enseigné son maître. Se présenter. Accrocher l’assistance et s’attirer sa bienveillance. Narratio, Argumentatio,Péroraison. Rien de bien compliqué. Il en avait étudié des discours. Il venait d’en entre plusieurs, des bons comme des moins bons. Il pouvait le faire. Il devait le faire. Le blondinet se leva presque d’un bond, le cœur battant la chamade. Le regard fixé sur le pupitre, premier objectif à atteindre, il traversa la salle en s’efforçant de ne pas défaillir.
Nehalan posa ses mains sur le pupitre en face de lui. Il y était parvenu ! Il se trouvait devant l’assemblée ! Maintenant il ne pouvait plus reculer. Il ferma un instant les yeux pour calmer ses peurs, puis parcouru la salle du regard, les entrailles nouées. Tous ces visages rivés sur lui, devant comme derrière, semblaient chercher la faille, le jauger de bas en haut. Mais surtout, ces yeux aux multiples couleurs, ces visages fermés, lui rappelaient à quel point l’instant était grave. La vie de deux personnes se jouait, et par son témoignage, il allait contribuer à leur jugement.
Le jeune homme ne regrettait pas sa décision. Il était terrifié, il avait probablement enfreint les limites qu’IL avait posé, pourtant il savait qu’il était à sa place. Il se trouvait du côté de la justice. Il ne doutait plus. Son Eminence et ses fidèles serviteurs avaient beau l’accuser de tous les maux, il en était convaincu à présent, Hyriel était un homme bon. Or on ne brûlait pas les hommes bons, on les remerciait pour leur grandeur d’âme.
Le jeune homme posa un regard fébrile sur les quelques notes rédigées à la vas-vite d’une main tremblante. Il n’avait pas droit à l’erreur. L’heure était venue de montrer à Monsieur Retmer que son enseignement tyrannique avait porté ses fruits. Une dernière inspiration, puis il se lança.
« Nehalan de Torienel, né le 12 août 1580 à… il hésita un instant puis repris, peu sûr de lui, Torienel. »
Il posa sa main sur les évangiles pour prêter serment, avec se sentiment terrifiant d’accomplir une chose irréparable, indéfectible.
« Je jure de dire la vérité, rien que la vérité, toute la vérité. »
A présent qu’il s’était acquitté des formalités, les choses sérieuses commençaient. Il se tourna vers la Cour pour commencer son discours. C’était eux qu’il était le plus important de toucher, puisque c’était eux qui rendraient le verdict final. La voix de son maître lui revint à l’esprit. Il ne devait pas non plus négliger le public, car un jugement qui a la faveur du peuple est toujours mieux légitimé.
«Votre Eminence, Messieurs les jurés, dans votre grande bonté, pardonnez le manque d’expérience, prix de ma jeunesse, tout comme la faiblesse de mes mots, en comparaison de la maîtrise, dont vous et l’avocat de la défense ici présent, avez su faire preuve devant cette assemblée. Je vous conjure d’écouter de vos oreilles sages les paroles sincères prononcées par un cœur éprit de justice. »
Le bon discours, s’il repose évidemment sur des arguments de valeur, se différencie du mauvais discours par son exorde et sa péroraison. La captatio benevolentiae, c’était fait. Il devait maintenant narrer son histoire, son témoignage, avec concision et justesse. Point de fioritures, de la précision.
« Il y a trois ans de cela, en octobre 1594 plus précisément, je tombais gravement malade. Pris d’atroces quintes de toux, alité jours et nuits sans pouvoir rien avaler, je failli bien trépasser ; mes parents, de bons chrétiens qui se rendaient à l’église au moins deux fois par semaine, consultèrent bon nombre de médecins très certifiés. »
Il frissonna au souvenir des nombreuses saignées, lavements et autres remèdes qu’il avait dû endurer pendant toute une semaine. Bien qu’altérées par la fièvre, ces terribles expériences resteraient à jamais gravées au fer rouge dans sa mémoire. S’il pouvait éviter de voir se reproduire ce genre de situation affreuse, il ne s’en porterait que bien mieux.
« Ils usèrent chacun leur tour de tous les remèdes à leur connaissance, tentèrent chacun des subtilités de leur art, en vain. Malgré tous leurs bons soins, tous leurs efforts, chaque jour me rapprochait un peu plus de la mort. Je me souviendrais toujours du martellement de ses béquilles sur le sol, qui m’avait tiré de ma torpeur ce matin-là. Je ne saurais dire quel traitement il m’administra avec certitude. Je me souviens simplement du goût du thym, identique aux infusions qu’on me servait enfant. Si cet homme est un sorcier, en ce cas ma nourrice aussi, et probablement toutes les mères qui font un peu de cuisine. »
Aussitôt qu’il eut finit sa phrase, Nehalan le regretta. Hyriel n’était certainement pas uniquement accusé de sorcellerie pour administrer des breuvages non reconnus par la communauté scientifique. Il aurait également pratiqué des avortements et envoûté de pauvres innocents. Il en était parfaitement conscient, mais il venait de sous-entendre le contraire, de laisser penser qu’il n’était qu’un benêt qui se pensait instruit. C’était peut-être le cas au fond. Il venait de faire une grossière erreur. Comment rattraper cette bêtise ? Les secondes de silence s’égrenaient. S’il ne reprenait pas sous peu, il subirait à son tour les quolibets de la foule. Il jeta un coup d’œil paniqué à ses notes. Seulement là, au pied du mur, il n’y comprenait plus rien. Il lui faudrait faire sans. Déglutissant, le blondinet reprit la parole, la voix légèrement tremblante, avant de reprendre de l’assurance, ses deux paumes fermement appuyées sur le pupitre, comme un naufragé s’agrippe à un morceau de bois en pleine tempête.
« Il est cependant vrai que vous l’accusez de maux autrement plus graves que la confection de remèdes à base d’aromates. Du fait de mon jeune âge, je ne puis me prononcer sur la question des avortements sans me détacher de l’honnêteté dont il sied de faire preuve en ce lieu. Je puis toutefois affirmer une chose : je suis intimement convaincu que, tout sorcier qu’il est peut-être, ses intentions ne sont pas mauvaises. Je me souviens encore de sa voix douce, au ton bienveillant, alors qu’il demandait qu’on lui procure de l’eau. Je me souviens de ces gestes précautionneux. Mais je me souviens surtout du silence de ce médecin à son entrée dans ma chambre, de sa mise au travail presque immédiate, et des longues négociations que les autres médecins avaient tenues sur la valeur de leur prestation, au pied de ma couche, avant même de chercher à me soigner. Est-ce une offense à Dieu, que de faire preuve de générosité et d’abnégation ? »
Le jeune orateur en herbe fit une pause. Il sentait que c’était le bon moment, et il avait surtout besoin de reprendre sa respiration. Pour faire bonne mesure, il parcouru l’assemblée du regard, tout en prenant bien soin d‘éviter l’endroit où son tortionnaire d’un jour avait posé son postérieur ensoutanné. Avec un peu de chance, il avait réussi à sauver les meubles. Le plus dur restait de reprendre.
« Votre Eminence, la loi divine n’est-elle pas celle-là même qui prime au-dessus de toutes les autres ? »
Nehalan se retint de sourire, fier de son idée. Il n’en pensait pas un mot, ce qui en soit était faire preuve d’un certain manque de sincérité, mais dans la mesure où il ne faisait que répéter des paroles maintes fois entendues, il ne rompait pas réellement son serment. Il était d’ailleurs persuadé que la Cour était convaincue qu’il s’agissait-là d’une vérité immuable. Il ne faisait donc qu’énoncer une vérité, que nulle réelle autorité en cette salle ne viendrait contester. Du moins il espérait, sinon son idée qu’il pensait brillante éclaterait bien vite en mille morceaux.
« Si tel est le cas, si les écarts des formalités administratives de cet homme, et ses pouvoirs de sorcier, n’ont servi que des fins honorables, n’ont causé nul tort, et ont respecté les premières injonctions de notre Seigneur, pourquoi serait-il punit ? Il est peut-être différent de nous, certes, mais, d’une part, ne sommes-nous pas tous différents, et d’autre part, si sa différence ne lui sert qu’à faire le bien, pourquoi l’en empêcherait-on ? »
Il garda son regard vissé sur le cardinal, interrogateur.
« Je ne cherche pas à me faire l’avocat de l’accusé. Je m’interroge simplement, toute jeunesse égarée que je suis. Je me demandais également, pourquoi l’on jugeait une…prostituée, pour avoir noué des liens, et tenté de venir en aide à l’un de ses amis. Est-ce un pêché d’apporter assistance à qui en a le besoin ? A fortiori lorsque cette personne ne cherche qu’à faire le bien, elle aussi. J’ai grande confiance et grand respect pour vous, Eminence, et vous, juges, mais ce jourd’hui je suis perdu. Depuis que je suis entré ici, j’observe la justice être rendue au nom du Seigneur, alors que me reviennent les enseignements chrétiens dont j’ai pu bénéficier, bien différents de ce qui se joue ici. J’essaie donc de laisser la voix de la Justice guider mon cœur, comme je suis certain que vous le ferez, à la lumière de cet ensemble de témoignages. Mon cœur me souffle que cet homme et cette femme n’ont jamais eu l’intention de faire du mal. Il ne voit pas de justification à leur mort. A partir du moment où le sorcier a sauvé ma vie, j’avais une dette envers lui, en témoignant ici en sa faveur, j’espère pouvoir en alléger l’inestimable poids. »
Il se tourna à présent vers Hyriel.
« Sans vous, je ne serais pas ici, tout comme d’autres personnes dans cette assemblée, j’en suis certain. Je ne vois pas pourquoi il paierait de sa vie, pour toutes celles qu’il a sauvées. »
Maintenant, il devait s’arrêter. Il espérait qu’il n’avait pas été trop mauvais et avait sût rester à sa place de témoin. Cela il en doutait. Il voyait cependant mal comment il aurait pu faire pire celui qui lui avait précédé. Il n’avait pas insulté le Cardinal, lui. Il n’avait pas non plus terminé par une révélation grandiloquente mais surtout révoltante.
« Eminence, Messieurs les jurés, assemblée de Bratkenn, je vous remercie de l’attention que vous aurez portée à mon témoignage. »
Les jambes tremblantes, il attrapa sa feuille qui ne lui avait servi à rien, au final, puis s’en retourna à sa place, la tête haute, bien qu’il ait manqué de trébucher. De nouveau assis, sur le banc de bois, son sourire s’agrandit. Il l’avait fait ! Il les avait tous affrontés, jusqu’à la fin ! Qu’importe ce qu’IL dirait, cela ne l’empêcherait pas d’être fier de lui. Oh, bien sûr, il avait fait quelques erreurs, et un orateur expérimenté aurait produit bien meilleurs discours, mais en cet instant, il laissait simplement cette fierté presque jouissive s’emparer de lui. Il ne lui restait plus qu’à croiser les doigts pour que sa performance ait été à la hauteur.
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Après le cardinal, vint le tour de l’avocat. Cecilia était curieuse de voir ce qu’il allait bien pouvoir dire. S’il était un artiste de rue, pouvait-il rivaliser avec un cardinal ? Elle fut impressionnée dès le début de son discours. Elle ne connaissait pas les lettres antiques, aussi apprit-elle cette notion, de bouc-émissaire. Mais c’était un rituel païen… ce ne pouvait pas être le cas ici… Quoique la suite la fit douter. N’était-ce pas par peur qu’ils étaient condamnés ? Non, le sorcier avait sans doute fait des crimes : le cardinal, connaisseur, l’affirmait ! Mais s’il se trompait, malgré tout ? Parce que le reste de la défense était à l’avantage de l’accusé, bien entendu, et se tenait… Mais comment savoir ?
Elle se figea quand il commença à souffrir. Que lui arrivait-il ? Et ces gens qui se moquaient de lui, pourquoi ? Pourquoi étaient-ils si cruels alors qu’il souffrait ? C’était injuste… Heureusement, un vieil homme, un prêtre et le juge les firent taire. Ils avaient raison ! Et l’homme se remettait difficilement. Elle devrait peut-être aller l’aider ? Non, elle ne pouvait pas… Mais il avait peut-être besoin d’aide ? Que devait-elle faire ? Son questionnement intérieur s’interrompit de lui-même quand il reprit son discours. Mais aurait-elle dû aller l’aider ? Ne risquait-il pas d’aller mal ? Pourrait-elle seulement faire quelque chose ?
Elle écouta la suite de son raisonnement en s’efforçant d’être attentive. Elle était d’accord pour la médecine, même si elle gardait un peu de réserve, mais ne savait pas quoi dire sur l’avortement. Il avait raison mais… mais… mais… les deux positions avaient leurs arguments… Elle ne savait pas quoi dire. Quoi penser.
Elle retrouva de la certitude en étant touchée par la défense de la prostituée, pauvre femme abattue par la pression. Oui, elle était convaincue qu’elle avait seulement agi dans l’intérêt de ses filles, même si cela l’avait amenée à consulter un sorcier. Elle avait seulement été poussée à la limite. La fin du discours impressionna Cecilia et elle déglutit difficilement en regardant vers Lucinde, guettant ses réactions.
Arriva le premier témoin. Une femme, une dévote, à son apparence. Elle porte toutefois la main à sa bouche en entendant son insolence quant au serment. Comment ose-t-elle ? Ses yeux s’écarquillèrent ensuite de plus en plus à chaque nouvelle impertinence. Comment… Comment osait-elle, devant une assemblée tout entière, devant des ministres, devant un cardinal, plaisanter ? N’avait-elle qu’envie d’énerver les juges et d’exciter la colère du cardinal, sur elle et sur l’accusé ? Et elle s’accusait elle-même de sorcière, presque, dans ce qui ressemblait davantage à un plaidoyer qu’à un témoignage ? Et elle accusait le cardinal, avant de finir sur le sommet de l’insolence ? Et celui-ci semblait à deux doigts d’exploser. Qu’allait-il faire ? Elle ne voulait pas qu’il s’emporte et le regrette…
Cecilia se signa et formula une prière pour elle, en un murmure. Signore, te prego, abbi pietà della sua anima, perché non sa cosa sta facendo.
Arriva ensuite un autre témoin, elle le reconnaissait ! Elle l’avait croisé dans Braktenn !
Elle en fut d’autant plus horrifiée quand il prononça son témoignage et porta ses deux mains à sa bouche avant de se signer, secouant la tête, figée par l’horreur. Pauvre homme, pauvre femme… Alors ce sorcier était vraiment maléfique ?
Et l’autre homme étrange qui s’était trompé d’accusé et qui avait été assommé confirmait… mais… Et des rituels… mais… mais… Et ces gens autour d’eux, qui l’invectivaient… mais… mais…
Mais l’accusé s’insurgea. Il cria son innocence, accusa les deux témoins de parjures. Mais qui avait raison, qui ? qui ? Comment savoir ? Et le juge qui le faisait taire, et lui qui continuait, qui avait raison ? Comment savoir qui avait raison ?
Nouveau témoin. Un prêtre, cette fois, celui qui avait pris la défense de l’avocat. Il s’avança, donna son nom et Cecilia écarquilla les yeux. C’était le prêtre qu’elle ne devait surtout pas aller voir, d’après le cardinal. Qu’est-ce que cela voulait dire, s’il défendait le sorcier ? Il était mauvais aussi ? Ou avait-il de bons côtés ? Parce que le cardinal ne l’aimait pas donc il venait sans doute prendre la défense du sorcier…
Elle écouta son récit et esquissa une pointe de sourire en entendant le nom monbrinien de sa sainte-patronne avant de s’étonner du récit. Une confession. Mais pouvait-on absoudre des meurtres ? Quelle avait été la pénitence de cet homme ? Elle approuva le reste. Elle-même connaissait quelques remèdes avec les plantes, grâce au jardin des simples de leur couvent. Cela faisait-elle d’elle une sorcière ? Non, non, impossible…
Elle fut touchée d’apprendre qu’il ne faisait pas payer ses soins, charitablement. C’était une bonne chose pour lui et encore heureux ! S’il faisait payer les gens pour les ensorceler aussi, ce serait odieux ! Elle écouta la suite, touchée et portée par les paroles du prêtre. La fin l’horrifia. Lui aussi osait insulter le cardinal ? Mais… mais… c’était horrible ! Son sourire cruel l’effraya davantage et elle se signa quand il reconnut la paternité de l’enfant. Cet homme était-il réellement un prêtre ? Et il arrachait ses besicles à l’avocat ! N’avait-il aucun scrupule, aucune honte ? Comment était-il même possible d’être aussi insolent et aussi inconscient ?
Le Cardinal se leva alors et elle reporta son attention vers lui. Elle avait peur, autant qu’elle était rassurée. S’il pouvait parler, c’est qu’il n’allait pas si mal… Elle s’inquiéta toutefois à son air affligé. Oh non, elle ne voulait pas qu’il soit aussi triste, lui qui était un homme si bon… Elle écouta ensuite son récit à propos d’Alexandre, touché autant qu’effrayée par ce prêtre impie. Elle porta de nouveau sa main à sa bouche en apprenant que le pauvre cardinal n’avait pas pu assister au baptême de son neveu.
« Mio Dio! »
Elle le regarda alors s’avancer, craignant que le contact du prêtre lui fasse du mal mais tout sembla bien se passer. Et il regarda l’accusé. Quels amis il avait ! Mais était-il à plaindre ou à condamner ? Elle ne pouvait dire…
Un nouveau témoin arriva, jeune. Il devait avoir son âge… Le début de son discours la fit sourire, presque inconsciemment. Il avait bien du courage de venir témoigner devant une telle assemblée. Bien sûr que les juges lui pardonneraient, ce n’était que justice ! Elle retint son souffle au récit. Pauvre enfant… Il avait dû souffrir… Rien que rappeler ces événements semblait lui faire mal… Elle fut alors touchée par la douceur de son souvenir concernant l’accusé et elle le regarda avec étonnement. Lui qui était un affreux sorcier dans l’un était un doux médecin ici… mais… qui devait-elle croire ? Et s’il était gentil parce qu’il jouait la comédie ? Et s’il était méchant par mensonges ou peur des gens ? Comment les juges pouvaient-ils juger de tels dilemmes ? Perdue dans ses pensées, elle reprit en route les réflexions à voix haute du jeune homme. Elle les partageait, elle n’en fut que plus touchée. Mais elle n’avait pas la réponse… Quelqu’un l’avait-elle ? Mais qui ? Qu’il parle ? Tous ces témoignages étaient plus convainquants les uns que les autres, mais lequel donnait un vrai portrait de l’accusé ? Lequel ? Et comment savoir que c’était lui ?
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Dès qu’il engeagea, Lucinde comprit plusieurs choses. D’abord, la raison pour laquelle on l’avait choisi malgré son allure peu flatteuse - dont elle n’était pas elle-même affectée outre mesure, ce qui comptait, c’était ce qu’il pouvait faire. Second constat beaucoup plus frustrant : s’il commençait déjà si perché, elle n’était pas certaine de tenir la suite intellectuellement. Mais ce n’était pas important dans l’immédiat, puisque jusqu’ici, elle suivait.
Elle décortiquait les arguments un à un, les listait consciencieusement dans son esprit. Elle avait été trop peu concentrée pour le réquisitoire - preuve qu’elle avait encore besoin de temps avant d’avancer - mais il était temps de se reprendre, et de réfléchir correctement.
Lucinde sentit son nez se plisser. Reconnaissance. Naturelle. Son regard dévia un instant sur Cecilia. Non, cela n’apportait rien d’éprouver de la gratitude, et l’avocat infirme en était la preuve : il risquait de s’attirer des ennuis avec sa fameuse reconnaissance. La reconnaissance, cela vous mettait gratuitement en danger. Comme tous ces bons sentiments dont elle devait absolument se départir.
Ce qu’elle put néanmoins admirer - contrairement à ces abrutis inconstants qui ne savaient qu’amplifier le désordre - c’était l’effort qu’il fallut à l’infirme pour se reprendre, et poursuivre malgré cette étrange crise qui l’avait saisi. Quoi que cela puisse être précisément, la démonstration de volonté qui la canalisa méritait son respect : ne pas se plaindre, juste se battre.
En revanche, respect ou non, cette affaire d’avortement la laissait sceptique. Et ce même si, au fond d’elle, elle reconnaissait la logique non négligeable de ses arguments… N’avait-elle pas été longtemps en première ligne pour constater les dérives de grossesses trop pénibles, d’enfant qui étaient “de trop” ? Enfin soit, elle n’avait pas besoin de s’encombrer l’esprit. Elle y penserait plus tard, quand ce serait utile, si cela l’était de nouveau un jour. Sa crainte de ne pas suivre, par exemple, n’avait pas eu lieu d’exister.
Quoi qu’il en soit, il était bien une chose qu’elle devait se résoudre à penser : s’il fallait brûler quelqu’un, mieux valait que ce soit cet inconnu plutôt qu’elle.
Elle s’assurait de temps en temps que Cecilia ne semble pas trop affectée. L’ennui, c’était que la religieuse cachait beaucoup moins bien ses émotions qu’elle-même. Elle qui s’efforçait de garder une attitude relativement neutre. Elle se contentait de froncer le nez ou de pincer les lèvres lorsque les discours le voulaient, afin de ne pas sembler trop détachée non plus. Les masques d’impassibilité, c’était bien, mais pas toujours nécéssaire.
Vinrent les témoins. D’abord une insolente de premier choix, qui n’inspira à Lucinde qu’un profond dépit. Vraiment, n’avait-elle pas mieux à faire ? Les ennui qu’elle s’attirerait seraient mérités : ce comporter si stupidement était un manque flagrant de discipline ! Et, si elle prétendait le défendre, le seul effet de son témoignage déviant avait été d’enfoncer gratuitement l’accusé par ses multiples outrages.
Lucinde n’était certainement pas la plus pieuse des femmes, mais voir ainsi insulté le sacré la révolta. Ce qu’elle abhorrait par dessus tout, c’étaient les fauteurs de trouble.
Aussi, si elle ne comprit pas les mots murmurés par Cecilia, le sens lui en sembla évident. Elle était trop bonne.
Trop bonne, et trop sensible. Lucinde hésita à la conduire dehors en la voyant si horrifiée par le témoignage suivant. Elle se signa plus par automatisme qu’autre chose, puis posa un instant sa main se l’épaule de Cecilia dans l’espoir de la réconforter. Tout cela lui semblait un peu gros… Ayant elle-même porté des jumelles, elle trouvait toutefois cette histoire de coucous légèrement tirée par les cheveux. Que le témoignage - vivement contesté par l’accusé - soit confirmé ou non. En homme de bon sens - enfin, relativement - le cardinal tenta tout de même de vérifier cette histoire. Seule sa dernière précision prêtait à soupirer. Soupir intérieur, évidemment - elle, au moins, elle savait se tenir.
Nouveau témoignage. Un prêtre, oui… Dont le nom lui évoquait quelque chose sans qu’elle ne sache à quelle rumeur le raccrocher. Si le début de son récit la laissa pensive, elle fut affligée par la fin. Cuistre, insolent ! Mais qu’était-ce donc pour un spectacle ? Tous les impertinents de la capitales s’étaient donc donnés rendez-vous ici pour se faire remarquer ? C’était irrespectueux et puéril. Véritablement puéril. Elle se fichait certainement du sort de ce présumé sorcier, mais qu’il soit condamné parce que des imbéciles profitaient de son procès pour fanfarroner l’agaçait profondément.
L’intervention du cardinal était on ne pouvait plus légitime. Cet homme ne méritait pas de s’exprimer, et certainement pas pour proférer de telles sottises.
Heureusement, le témoin suivant relevait un peu le niveau. Enfin, un peu. Qu’avaient-ils tous à se sentir obligés de sortir du cadre de leurs témoignages. Pourquoi les témoins à charge - tout aussi farfelus qu’ait été leur récit - étaient-ils les seuls à relativement s’en tenir aux “faits” ? Il pouvait prétendre autant qu’il voulait qu’il ne jouait pas les avocats, ce n’en était pas moins le cas. Il était bien gentil, ce jeune homme. Sans doute même touchant… Et au moins, il leur épargnait l’impertinence de ses prédescesseurs. Toutefois, cela faisait tout de même désordre, et si elle n’avait pas été si détachée, Lucinde s’en serait franchement agacée.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à ses côtés, Prosper vivait le procès autant qu’il buvait les paroles du rouge-gorge affairé à faire la cour aux cervelles de moineau présentent dans l’assemblée. Coldris darda un regard sur son voisin à l’appel de la sentence : il semblait déjà trépigner à l’idée d’assister à une cuisson à la broche.
Scène 2. Lénius entre scène afin de présenter à l’assistance son plaidoyer. Pourquoi commençait-il par des propos si obscurs pour qui n’avait ni la science ni la culture pour les apprécier ? Oh certes son entrée en la matière était maline et Coldris voyait sans mal vers où il souhaitait les mener, mais tous ces gens dans la salle ? Le simple mot grec devait encore raisonner dans leur esprit tant ils avaient du buter dessus et s’y étaler de tout leur long. Connaissant le troubadour et sa capacité à conquérir les foules, c’était un choix pour le moins étonnant. C’était peut-être les jurés qui rendraient le verdict, mais on ne gagnait pas de guerre sans l’appui du peuple. Le pouvoir était là, dans le peuple. C’était comme bâtir un empire : il fallait convaincre chaque individu du bien-fondé de ses idées. Au moins, le passage sur les soins prodigués aura sans doute rappelé à certains ce qu’il devait à l’homme sur le banc des accusés. En revanche, les arguments scientifiques et les références mythologiques, c’était sans doute le meilleur moyen de les perdre à nouveau en cours de route. Si le cardinal rassemblait le troupeau et que Lénius égarait ses brebis, la partie serait vite jouée. D’ailleurs, il se retourna un instant pour embrasser la salle du regard : il constata quelques murmures, quelques yeux de merlans frits pas frais et un autre terriblement pétillant, charmante petite fleur déposée au milieu d’un tas de fumier.
— Ci, ci, ci, ci-céron ! Toujours moins rond que toi ah ah !
— Le gnome apprend à parler, eh eh ! Bel avocat pour un sorcier !
Toujours retourné, Coldris se leva et fustigea de ses prunelles séracs l’importun. Voilà pourquoi il fallait parlait simplement à ces gosses des rues de trente ans passés qui n’avaient rien de plus constructif à apporter au débat. Il salua cependant l’intervention de Thierry puis celle du vieillard avant que le maillet ne sonne la fin de la récréation. L’entracte serait pour plus tard. Il reprit place dans un grognement sourd et écouta la suite du plaidoyer.
Shakespeare, qu’il attendait avec impatience pour ce début d’année prochaine, mais là encore, il doutait fortement que Madame Ménard et son ivrogne de mari n’en aient quoi que ce soit à faire de ces grands hommes de lettres. Alors le vacher du coin…. À l’évocation des dames de Monthoux, il se retint de sourire tant l’idée qu’il en avait été différente, mais il salua l’argument ô combien plus sage et catholique que le sien. Il ne pouvait que se rangeait à sa description de l’ascension sociale. Évidemment, il était là, lui le fils de baron désargenté aujourd’hui Ministre des Affaires étrangères et proche du Roi, il lui devait bien ce petit acquiescement de la tête. Lui-même s’entourait souvent de tout type de personnage, préférant utiliser à bon escient les qualités de chacun. Quant à la médecine, c’était pour sa part vite vu : il n’avait aucune confiance en ces saigneurs dont l’ultime remède consistait à appeler le curé du coin à la rescousse. Quitte à choisir, il aurait plus volontiers confié sa vie au sorcier. Enfin. Si sa méfiance poussée à l’extrême lui en avait laissé le choix. Fort heureusement, les années de survies à Fromart semblaient l’avoir doté d’une constitution solide… Mais il fallut déjà que Lénius reparte sur d’obscures références. Qui dans cette salle connaissait Léonard ? Certains étaient sans doute déjà en train de se demander ce que leur vieil oncle venait faire dans cette sordide affaire.
Qui appréciait réellement d’ôter la vie de son plein gré ? Qui ? Ni les médecins, ni les bourreaux, ni les soldats sur leur champ de bataille. Pas même lui ne l’avait apprécié lorsque les circonstances l’avaient exigé, alors il voulait bien croire qu’Hyriel n’avortait pas les filles du lupanar de gaieté de cœur. Il prit une mine pensive, à défaut de pouvoir pleinement acquiescer sans heurter la sensibilité du comte dont les yeux s’exorbitèrent à ces paroles.
La conclusion le laissa sans voix. Pourquoi ? Pourquoi ? Ne se rendait-il pas compte qu’il venait d’imprimer involontairement dans l’esprit de tous ces braktennois la phrase « Brulez Hyriel », oh certes, c’était l’opposé de ce qu’il escomptait, mais les faits étaient là et Coldris en aurait mis sa main au feu : inconsciemment, c’était bien ces deux mots qui venaient de marquer au fer rouge le cœur de l’assemblée. Les mots étaient précieux et dangereux. Certains, comme des fleurs dans un massif, émergeaient tant et si bien qu’ils vous faisaient oublier le reste.
Il masqua sa déception. Il attendait définitivement mieux de Lénius dont il connaissait l’art de la parole. Thierry allait avoir du travail s’il espérait sauver le sorcier des flammes.
Scène 3. Les témoignages donc, où l’on venait faire sa confession publiquement. Bien évidemment, la première fut cette fameuse femme qui lui avait tant manqué de respect. Cordélia McDan de Braktenn née en 1565. Parfait. Il adressa un regard à Valmar qui inclina la tête sans un bruit. Dès ce soir, les archives seraient déterrées afin de découvrir qui était réellement cette insolente qui n’avait de noble que le nom. Insolente au point d’en provoquer le Cardinal. Il arqua un sourcil en sa direction. Quelle idiote finie. Même lui n’était pas assez sot pour parler ainsi. Qu’on lui arrache donc sa langue vipérine. Qu’est-ce que c’était que ce témoignage misérable ? Il lorgna l’homme. Winston. Un nègre. Étranger, donc. Intéressant. Il creuserait également son cas. Il est vrai que l’on allait toujours chercher un guérisseur au fin fond des bois en première intention. Coldris roula des yeux. D’autant plus qu’elle se permettait d’asticoter le rouge-gorge qui allait bientôt finir aussi pourpre que sa robe. Pourquoi les jurés ne la remettaient-ils donc pas à sa place ? Une farce. Tout ceci n’était qu’une vaste farce. Il pinça les lèvres. Évidemment que l’on accueillait toujours quelqu’un de cette façon pour soigner « une amie », sans même le remercier. Autant dire qu’elle était absente et donc incapable de fournir un témoignage recevable. Alors quoi, Winston était un esclave incapable de témoigner par lui-même au procès ? Quel dommage ! Son récit était peut-être vrai, mais cela ne collait pas. Elle ne témoignait pas pour elle, mais pour une autre, et potentiellement uniquement pour le plaisir de se faire une nouvelle fois remarquer. Ça empestait la dissimulation à plein nez. Il jeta à un regard à Matthieu, afin de voir s’il suivait sa logique. Dommage, on ne sauvait pas des hommes avec des mensonges. En revanche, pour condamner il n’y avait rien de mieux… Coldris écouta péniblement la suite tant la nausée le saisissait à chaque nouvelle pitoyable déclaration. Incontestablement la tirade la plus insipide de ce début de procès, où le témoin se prenait pour l’avocat du diable. Il est vrai qu’on n’était jamais assez bien défendu.
Quant à savoir si elle était elle-même une sorcière, c’était une excellente question. Qu’on la soumette donc à l’ordalie et le sujet serait réglé une bonne fois pour toutes. Au pire Dieu l’accueillerait n’est-il pas ? L’ironie de la chose lui extirpa un sourire en coin. On avait rarement vu un témoin aussi bien noyer le poisson qu’elle ne le faisait, peut-être même allait-elle réussir l’exploit inné d’allumer le bucher de celui qu’elle était venue défendre. Cette effrontée salutation laissa le cardinal rongé par un courroux qui menaçait d’exploser d’un instant à l’autre. Oh pour une fois, il le comprenait fort bien et comble de l’incroyable partageait même son opinion. Il décida donc de se lever pour prendre la parole, après tout il lui devait bien ça pour ce papier signé un peu plus tôt.
— Messieurs les jurés, permettez-moi en ma qualité de représentant du roi, d’intervenir un bref instant au vu de la situation afin de dénoncer l’outrage à religion et personne religieuse qui vient d’être commis à de multiples reprises au cours de ces dernières minutes, pouvant de fait s’apparenter à un blasphème. Un comportement parfaitement inacceptable troublant la bonne tenue de ce procès pour sorcellerie. En conséquence, je demande l’exclusion de l’audience de ce témoin ainsi que l’invalidité de son témoignage.
Sur ces paroles, Coldris s’inclina avec déférence et retourna à sa place, non sans un discret regard à Matthieu Cassin qui ne disait rien de moins que « tout le plaisir est pour moi, vous me revaudrez cela plus tard.» Et en effet, c’était peu dire qu’il appréciait cette petite vengeance impromptue pour cette impertinence déplacée dont il avait été victime à l’ouverture du procès.
Il n’était certes pas l’homme le plus pieux de Braktenn, mais à choisir entre l’oiseau et la grenouille, le choix était vite fait. Qui sait avec un peu de chance finirait-elle, elle aussi sur le banc des accusés ?
Ce fut ensuite deux témoins à charge qui se présentèrent successivement. Une histoire savamment ficelée qui ferait pleurait la matrone autant qu’elle arracherait ce frisson insidieux qui se propageait y compris le long de sa propre colonne vertébrale dans un murmure glacial. Il ignora les appels stridents et inspira profondément.
Les griffes crissaient frénétiquement le long des parois et son regard se perdit un instant de la vague.
Son cœur se mit à tambouriner. Il faisait si froid dans cette salle. Coldris réajusta machinalement son manteau sur ses épaules tandis qu’Hyriel réfutait les accusations en bloc et que la salle s’agitait. Lui, c’était son esprit, océan houleux qui tentait de se déchainer.
Ce n’était rien que des souvenirs. Ce n’était rien que des souvenirs.
Il aurait dû rire et s’amuser de toute cette agitation qu’avait semée le duo, mais il n’avait désormais plus qu’une obsession : celle d’apaiser son esprit. Il voulait entendre sa voix rassurante, mais il savait que s’il se laissait tenter elle l’entrainerait au large avant de le noyer dans les abysses.
C’était exclu. Complètement exclu, ici.
Il devait rediriger son esprit vers quelque chose. Quoi que ce soit. Que devait-il faire demain ? Mardi 23 décembre 1597. Il devait terminer d’éplucher le rapport du gouverneur d’Iswilyz. L’annoter. Faire ses remarques. Donner ses directives. Vérifier les chiffres. Tous sans exception. Puis le soir, il dinerait avec Éléonore de Tianidre, la petite brebis égarée dans son salon qui le prenait pour un serpent du Nouveau Monde. D’ailleurs, il n’en avait pas parlé à Thierry encore. Thierry dont ce fut le tour. Leurs regards se croisèrent dans une salutation muette.
Si Coldris n’avait pas été enchainé tant par son statut exigeant la neutralité que son alliance avec le comte de Monthoux, il aurait acquiescé au propos de son ami concernant l’avortement. C’était un beau témoignage doublé d’une défense soignée qu’il offrait aux jurés. C’était malin, très malin et il reconnaissait bien là son ami. La suite se révéla tout aussi fine et habile de sa part. Thierry aurait pu faire un bon avocat, c’était certain. Cela l’aurait peut-être mieux réussi que de finir prêtre. Il repensa aussitôt à Virgil, feu son ami le procureur de Roi et regretta que les deux hommes n’aient jamais pu faire connaissance. Il n’aurait certainement pas approuvé sa conduite peu catholique, mais sa foi ne l’avait jamais empêché de garder tant les yeux que le cœur ouvert. Qu’aurait-il dit à ce procès d’ailleurs ? Il aurait sans doute fait partie des premiers à le défendre. Il avait toujours été d’une justice et d’une grandeur que peu d’hommes peuvent se targuer de posséder. Il soupira et tenta de reprendre le témoignage en cours, n’écoutant que d’une oreille distraite la partie sur la femme Menthon pour ne pas risquer de sombrer à nouveau dans les limbes de son esprit. Cela ne l’empêcha pas d’apprécier à sa juste valeur le nouveau Thierry qu’il découvrait-là, bien loin de l’ami débauché qu’il connaissait. Il inclina d’ailleurs la tête en guise de félicitations à ce dernier. Quel gâchis d’en avoir fait un curé !
À l’interpellation du cardinal, il fronça les sourcils. Il reconnaissait bien cette lueur qui scintillait… Qu’allait-il donc sortir cette fois-ci ? Au fond, il s’était montré presque trop correct jusque-là. Ah Alexandre ! Un sourire se dessina avant même d’entendre la chute. Il fallait dire qu’Alexandre avait également besoin de lunettes : il avait eu son père biologique sous son nez tout ce temps sans même remarquer la ressemblance frappante qu’il y avait entre eux ! Et ce même après toutes les perches tendues ! Ah et ce mot de la fin ! Merveilleux. Il en oublia même son trouble récent ! Seule ombre au tableau : ses idées vengeresses risquaient de nuire à son témoignage et de desservir le présumé -mais déjà coupable- sorcier. Dommage. À croire que tous les témoins venus plaider sa cause le faisaient avec un fagot de petits bois bien secs. D’ailleurs, Matthieu ne se gêna pas pour lui en faire la remarque. C’était de bonne guerre. Coldris plissa les yeux. Il arriverait un moment où à force de jouer avec le feu -sans mauvais jeu de mots-, il ne pourrait plus éteindre l’incendie déclenché. Le cardinal venait de marquer un point, c’était indéniable. Il pencha légèrement la tête dans l’attente du retour des jurés tandis que les deux hommes en robes se battaient comme des chiffonniers. Du rouge ou du noir, il n’y en avait aucun pour rattraper l’autre, dans ce puéril affrontement.
Un nouveau témoin se présenta -à décharge-. Un jeune homme dans la fleur de la candeur. À celui-ci, le ministre fut tenté de lui offrir un broc d’huile. Le prochain aurait droit aux allumettes. C’était d’ores et déjà décidé. À moins que l’on ne finisse étouffé à force d’ingérer du Cicéron par tous les orifices. Il reconnaissait qu’il parlait plutôt bien dans sa naïveté, mais cette humilité mielleuse était affreusement pénible. Le gamin était définitivement plus amusant lorsqu’il suivait ses cours de catéchèses avec Thierry. D’ailleurs, en parlant de jeunesse égarée, il devrait songer à se perdre du côté du lupanar un soir. Histoire de se faire une opinion sur l’avortement. Et de compléter son éducation. Qu’était-ce donc que ce petit prince élevé dans son cocon de soie ? On avait bien assez de charmants papillons en la présence des femmes pour jouer de sensibilité.
« Envoutement » conclurent muettement les lèvres de Coldris dans un sourire amusé.
Désolé, mais lorsqu’on témoignait à décharge dans un procès pour sorcellerie, il fallait s’en tenir aux faits et rien qu’aux faits, sans jamais tenter de défendre l’accusé sous peine de fournir du combustible à l’inquisiteur en passant pour un être envouté. Un exercice d’équilibriste qui, il fallait l’admettre, avait vu tous ses funambules achever leur course au fond du précipice, comme joyeux pantins désarticulés pleins de bonnes intentions.
La morale c’était bon pour les faibles. Quant à la bonne volonté, elle n’existait pas. Un charmant mensonge teinté d’hypocrisie dont les Grands de ce monde se repaissaient copieusement.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Deux autres témoignages furent enregistrés. Celui du curé de la paroisse de Saint-Eustache, déjà connu des services comme très mauvais prêtre en rupture de ses vœux et père d'un fils adultérin ! Ce que ne manqua pas de souligner le Cardinal Cassin, et à juste titre. La pruderie de la plupart des membres du jury s'éveilla quand Son Éminence réclama l'annulation de son témoignage. Et puis... il était l'envoyé du pape en personne ! Autant abonder dans son sens ! Pourtant, il avait prononcé certaines choses intéressantes. Le pouvoir des mots, la confession que l'accusé serait venu lui faire de ses péchés - serait-il donc un bon chrétien ? Malheureusement, pour couronner le tout il y eut cette provocation finale dont il aurait largement pu se dispenser. Pas étonnant que le cardinal ait réagi et réclamé le retrait de son dépôt.
Après un bref débat dont les chuchotis s'entendirent voleter dans la salle, depuis le box des jurés, un vote à mains levées scella leur décision. Un secrétaire la rapporta aux juges. Eux aussi y mirent leur concours. L'instructeur clama :
-- Le témoignage du père d'Anjou est déclaré comme nul et non avenu, pour ses abus au sein de clergé, son manque de dignité à exercer pleinement sa fonction, et ses insolences envers Son Éminence.
Dans la foulée, le vicomte de Fromart se leva et ordonna qu'il soit fait le même sort au témoignage de la femme voilée, elle aussi insolente et sur le fil du rasoir à plusieurs reprises. Il y eut cette fois-ci davantage de remous parmi les membres du jury. Certains avaient très bien reconnu sa voix. Et la remirent sans difficulté en dépit du voile. Il s'agissait d'une très puissante femme d'affaires ! Une richissime aristocrate avec laquelle on ne faisait pas bien se brouiller... Certains jurés entretenaient même des affaires en ce moment avec elle. Et leur vote était à main levée, à visage découvert. On non... Non, non, non ! Autant ne pas se la mettre à dos ! On débattit dans le box. L'assistance ne pourrait pas entendre les jurés, mais voir de loin que de vives imprécations s'échangeaient, à en croire les énergiques gestuelles. Enfin, on trancha. On vota. La décision fut rapportée aux juges et l'instructeur reprit la parole :
-- Le témoignage de Dame Cordélia McDan est retenu. Veuillez poursuivre l'audition des témoins.
Un très jeune homme se présenta. Aristocrate. Cultivé et raffiné pour son âge, à en croire son discours d'une qualité qui impressionna la Cour. Pour un orateur de seize ans, il faisait preuve d'un grand raffinement en dépit de quelques petites maladresses ici et là. Et son témoignage fut touchant. Il s'attira quelques "oooooh" attendris dans l'assistance. Plus encore, pour la Cour : lui, il avait le bon goût de n'injurier personne et de faire les choses dans les formes, avec tout le respect qui se devait aux Juges et au Cardinal. Comme tous les autres avant lui, il fut remercié d'un petit hochement de tête. Qui donc allait arriver encore ?
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Eltinne Mirrier, 39 ans
Le playdoyer fut engagé. Malgré son apparence peu flatteur, le dénommé Lénius énervait moins Eltinne que le cardinal. Ou bien seulement par le fait qu’il citait une vérité immuable et agaçante : tout était affaire de bouc émissaire.
Enfin, soit, c’était sans importance. Si elle était là, c’était surtout pour connaître le déroulement de la séance avant qu’il ne soit altéré par les rumeurs. Ainsi, elle en aurait un résumé fidèle. A défaut de pouvoir se fier à ce que l’on disait de l’affaire, elle saurait ce que chacun en aurait dit.
L’envoûtement, elle ne le voyait pas non plus : juste l’endoctrinement d’un pouvoir corrompu. Que le pouvoir soit corrompu et endoctrine, c’était inéluctable… Mais les dérives actuelles était trop marquées pour être tolérables. C’était absurde et improductif, et, pour ne rien gâcher, c’allait mener Monbrina à la ruine.
Et avec tout ça, il fallait que Coldris de Fromart chasse dans la salle d’audience. Oh, bien sûr, il restait presque discret, mais rien ne trompait son oeil averti : il chassait en permanence. Il s’amusait à gâcher des vies, car il ne savait faire que cela. Heureusement qu’Eléonore avait été rapidement éloignée de lui.
Lui qui était bien plus incommodant que ces intrigants qui s’amusaient à insulter leur monde. Si au moins l’influence du pouvoir pouvait leur faire dire des choses productives !
Elle tentait de rester davantage attentive au défilé de témoins qu’au ministre. A commencer, d’ailleurs, par la sotte qui lui avait permis de s’illustrer un peu plus tôt, et qui se permettait de se moquer du cardinal - quelle idée ?!
Et la voilà qui lui donnait encore l’occasion de démontrer son autorité, c’était absolument pénible ! Quoique… Dieu tout puissant, mais c’était absolument merveilleux ! Elle dissimula son visage, comme outrée par l’affront fait au représentant du roi mais… tout ce qu’elle cachait, c’était un sourire irrépressible. Oh, bien sur, tous ceux-là prendraient cher pour cet affront - la frontière entre le courage et la folie suicidaire étant largement bafouée - mais, en attendant, Eltinne jubilait. Elle jubilait d’autant que le grand Coldris de Fromart devait ronger son frein.
Elle parvint tant bien que mal à retrouver une contenance pour faire semblant d’écouter les témoignages suivants, dont l’absurdité profonde ne parvint pas à entamer l’immense satisfaction qu’elle éprouvait. Cela faisait un bien fou ! Elle n’avait plus ressenti de tel épanouissement depuis… Depuis… Enfin, depuis longtemps. Elle savait combien cette jouissance serait éphémère, mais n’était-ce pas la meilleure des raisons pour la savourer pleinement ?
Enfin… Pleinement, mais en notant tout de même le déroulé des évènements. Et surtout : le visage des jurés qui avaient osé s’opposer au roi. C’était toujours utile. Et puis… Elle sourit distraitement au jeune garçon qui venait témoigner. Il semblait aussi candide que sa petite Eléonore. C’en était touchant.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Bientôt, dans la salle tenue en haleine par la mention d’une sinistre sentence, fut lancé le playdoyer. Décidément, l’avocat lui plaisait bien ! Il n’en devenait que plus intéressant - bien que moins que le plus grand des auteurs monbriniens, évidemment.
Oh, mais ce n’était pas de la mauvaise foi ! Célénian reconnaissait volontier qu’il savait parler - et bien parler. Et que même si tous n’avaient pas les références de son discours, il savait certainement toucher. Oui, ce devait être bien difficile, d’être dans une telle situation… Oh, mais il n’était pas sot non plus ! Il n’allait pas croire tout ce qu’on lui racontait uniquement parce que c’était bien dit, il valait mieux que ça. Mais cela n’en avait pas moins quelque chose de touchant.
Il récupéra son bras quand Héloïse s’y arrima à nouveau. Tout cela pour quelques bégaiements et du mouvement dans la salle - encore des sots qui cherchaient à se faire remarquer, alors que lui, qui aurait eut une opinion bien plus enrichissante, était réduit au silence.
Il suffit de quelques mots à l’invalide pour perdre toute sa sympathie. Quoi ?! Comment ça ? Il citait un pauvre petit scribouillard anglais et pas celui qui faisait la fierté de tout Monbrina ? Il espéra que ce soit seulement de l’anti-patriotisme, et qu’il ne soit pas visé personnellement par l’insulte. Mais de quoi avait-il l’air, maintenant ? Et si cela laissait croire à certains qu’il ne méritait pas son prestige ? Non, il ne devait pas le prendre personnellement : s’il n’avait pas été nommé, c’était simplement parce que ce pauvre homme avait des références limitées.
Héloïse bloqua son genoux et lui lança un regard sévère avant même qu’il ne se mette à trembler. Une anticipation comme seule Delphina en était capable. Curieux. De toute façon, il n’avait plus envie de l’écouter, voilà !
Il se concentra plutôt sur les réactions populaires… Et celle de la complice qui se mettait manifestement à pleurer. Des témoignages, des protestation et une ribambelle de petits détails pour étoffer ses idées.
Héloïse, malgré elle, se laissa toucher par les maux de l’infirme qui tenait lieu d’avocat. Oui, au fond, ce devait être difficile de ne pas avoir pu naître comme les autres… Quoique manifestement, cela ne l’avait pas empêché de s’instruire, ça ne devait pas être si terrible que ça.
Alors que cette pensée perdait son attention, elle balaya la salle du regard, croisant fugacement le regard d’un homme sans lui accorder la moindre attention. Ignorer ceux qui cherchaient à se faire remarquer était un art dans lequel elle excellait - question d’expérience.
La crise de begaiements de la crispa. Etait-ce… Douloureux ? En tout cas, cela créait du grabuge, et cela n’avait rien de rassurant au vu de toute cette populace qui pouvait à tout moment devenir dangereuse. Et Célénian qui la repoussait encore. Elle voulait bien faire des efforts, mais s’il faisait tout pour l’ignorer, elle pouvait agir de la même manière - l’expérience ne s’aquerrait pas toute seule.
Et maintenant, à cause de “cette chose”, elle allait entendre parler de ce plaidoyer pendant des mois ! Elle voyait déjà son frère trépigner de frustration, en répétant que de toute façon, ce clown infirme ne connaissait rien à rien. Franchement, il pouvait bien se plaindre et plaindre ceux qui lui ressemblaient, ils n’étaient pas les seuls à rencontrer des difficultés. Elle, elle était une femme, avait un époux franchement inutile et un frère franchement susceptible. Chacun portait sa croix.
Pour le reste, elle n’avait pas envie de réfléchir. Elle n’aurait pas dû venir : cette affaire la faisait frissonner d’horreur.
Chacun y allait de sa petite opinion. Célénian regrettait de n’avoir rien à dire sur cet Hyriel et de ne pas pouvoir témoigner. Assurément, lui, il aurait tout fait basculer, quoi qu’il dise. Parce que c’était lui. Mais il n’avait rien à dire, et n’aurait certainement pas été jusqu’à se parjurer pour attirer l’attention, il valait mieux que ça.
Oh, il n’avait pas manqué de reconnaitre le libraire que Delphina n’appréciait pas. Elle l’avait toujours trouvé particulièrement antipathique. Célénian, lui, trouvait qu’il en faisait toujours trop. D’abord, il n’était pas doué pour avoir l’air sincèrement admiratif, et ensuite, il essayait toujours de ramener les choses à lui. Quelques années plus tôt, c’était limite s’il n’avait pas prétendu être responsable de son succès en pleine séance de dédicaces. Et cela, ça ne passait pas. Pas du tout !
Cet homme-là était de ceux qui racontaient n’importe quelle ânerie pour se rendre intéressant, et son témoignage ne valait rien. En plus, même s’il y avait eu du vrai dans son histoire, il en rajoutait, c’était évident, ou alors Célénian n’y connaissait rien - ce qui n’était évidemment pas une option.
Quoi qu’il en soi, l’accusé lui semblait bien plus sincère - et il n’aurait pas pu être ensorcelé même si cet homme avait eu des pouvoirs étranges.
Se faire ensorceler… Tout ça était fort intéressant… Il se laissa partir dans ses rêveries, ne raccrochant que lorsqu’à la barre, le prêtre se moqua du cardinal. Héloïse semblait absolument scandalisée. Elle avait raison : ce n’étaient pas à eux de produire les coup de théâtre. Il aurait trouvé bien mieux, lui ! Il était heureux qu’à lui, au moins, on ait retiré la parole.
La retirer pour la donner à un jeune homme que Célénian écouta à peine. A retenir : l’accusé l’avait soigné. Il décrocha et se laissa entraîner dans ses pensées, bercée par une intrigue semblable au récit du petit noble. Non, c’était mauvais, très mauvais ! Il ne trouvait plus rien qui en vaille la peine. Et bientôt… Bientôt, il serait relégué à l’éternelle indifférence. Et l’avenir serait alors à l’image de ce fichu procès : centré sur les autres. Avec Héloïse pour bloquer son genoux et plus personne pour reconnaître son talent.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
L'homme est essoufflé. Terriblement pressé, aussi. Tout s'est enchaîné si vite en cette journée ! D'abord, le retour de sa chère Lavinia au château familial. Puis l'inspection des entreprises de cette Donna Despina, avec laquelle il a finalement noué une intéressante relation pour les affaires de sa fille, et puis... et puis ! Toutes ces confidences de la part d'Eldred ! A peine le Zakrotien avait-il terminé... que le baron s'était souvenu que la première session du jugement du sorcier se tenait... aujourd'hui-même ! Fin d'après-midi ! Il doit y être. Il doit absolument rendre à Hyriel monnaie de sa pièce et exposer devant la Cour les bienfaits du guérisseur auprès de sa jeune esclave Aud. Être équitable : telle a toujours été la philosophie du Premier Conseiller. Fidèle à ses habitudes, Dyonis se promet qu'il sera neutre, factuel et transparent : la Justice ensuite ferait son œuvre et il ose croire que ces Messieurs du Tribunal auront le discernement nécessaire dans cette affaire. Après tout, la Cour avait bien en septembre modéré les pécheresses ardeurs du baron, quand il s'était égaré à demander la corde pour les deux malheureux Tristan et Alexandre... En l'occurrence, comme il l'a promis à Eldred, il ne peut rester les bras ballants. Si cet Hyriel a commis des crimes, cela ne regarde en rien le baron. Lui, il ne fera que sa part : énoncer, sans ne rien celer, ce qu'il sait de l'individu. Que le bien qu'on lui doit soit mis dans la balance, au même titre que le reste. Ainsi, à peine achevé son entretien avec Eldred que le seigneur s'est précipité vers ses écuries, a fait sceller les meilleurs coursiers, quitté Frenn et traversé la ville au grand galop encadré de ses vigiles, dans l'espoir d'arriver à temps.
Et Dieu merci, il est là à temps. Deux huissiers s'inclinent profondément et lui ouvrent les portes - non sans un fond de surprise à voir ce personnage si strict et intraitable en matière de règles... arriver si honteusement en retard. Bien sûr, à l'entrée du Premier Conseiller, des nuées d'yeux se seront retournées vers lui. Bouches arrondies. Murmures de surprise. Ciel... Dyonis aurait clairement préféré arriver dans les temps et ne pas se faire autant remarquer - chose qu'il n'a jamais apprécié.
Le seigneur a encore le souffle court en traversant l'allée entre les bancs - c'est qu'il n'aura bientôt plus l'âge de ce genre de folies ! Son front est humide et ses joues rougies de sa course folle en plein hiver. Pourtant, il avance toujours avec sa dignité de statue. Tête haute, épaules carrées et bras martialement le long du corps. Démarche détachée et visage fermé. Son sévère habit noir contraste avec la froideur de ses yeux bleus, attachés à picorer ici et là ce qu'il lui faut de renseignements quant à la composition de la salle : beaucoup de plèbe - les procès de sorcellerie ont toujours grand succès ; le Cardinal Cassin, très digne en accusateur ; le Ministre des Affaires étrangères dont il note aussi la présence au passage ; le bouffon difforme dont il a pris la défense sur le marché aux esclaves le jour de l'acquisition d'Eldred. Quelques bourgeois, quelques nobles - le seigneur Prosper et son intendante, évidemment ; le jeune Torienel. Une très riche dévote voilée qu'il reconnaît aussitôt comme étant Despina, vue il y a à peine quelques heures - même stature, même robe champagne.
Enfin arrivé au bout de l'allée, non loin du regroupement des témoins et juste à côté des deux accusés, sous le nez des Juges, les yeux acier de Dyonis croisent ceux de Thierry. Il restera inébranlable. Quand bien même la dernière fois qu'il était entré dans ce Tribunal, c'était pour jouer le rôle de l'accusateur contre Tristan et Alexandre. Ce rôle aujourd'hui occupé par le Cardinal - dont Dyonis connaît d'ailleurs bien les théories douteuses quant aux infirmes. Un élément capital à prendre en compte : il ne faudra surtout pas laisser penser, devant cette assemblée, qu'un infirme vient défendre un infirme. Non, il n'est là qu'en personne de loi et en dépositaire d'informations quant à un prévenu. C'est donc pour ne rien laisser croire d'une complaisance que Dyonis porte un instant son regard polaire et tranchant sur les accusés. Une femme qu'il connaît peu, vue pendant l'interpellation des anciens patrons du Lupanar. Et Hyriel. Quelles retrouvailles, Hyacinthe Galthym.
"V... Votre Excellence désire..." engage un juge, déconcerté par une pareille entrée de la part d'un pareil personnage politique - rien moins que le deuxième homme de l'Empire : que leur vaut cet honneur ?
"Témoigner" coupe Dyonis. Pas le temps pour les circonvolutions : à peine cela fait qu'il devra reprendre la route pour rejoindre sa prochaine réunion - une série d'amendements des lois portant sur les sénéchaussées et baillages. Il ôte son chapeau.
"Nous vous en prions." l'invite le magistrat, désignant la barre des témoins.
Dyonis avance d'un pas. On lui présente les Évangiles. Un éclat de lumière rampe le long de son crochet alors qu'il le pose sur le livre et engage, concentré et monocorde comme à son habitude :
"Je - Dyonis Enguerrand Aurèle, baron Howksley de Frenn et Premier Conseiller de l'Empire, né le 30 septembre 1548 - jure sur les Saintes Ecritures de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité." (Un temps. Il se tient droit et se tourne au mieux pour embrasser du regard juges, jurés, Cardinal et au moins une petite partie de l'assistance.) "Le 15 septembre de cette année, le prévenu a été par moi reçu à Frenn. Il s'est présenté comme Hyacinthe Galthym, paysan. Mon enquête des jours qui ont suivi m'a vite révélé qu'il s'agissait d'une identité purement fictive. Hyacinthe, donc, me livrait contre la récompense offerte par l'Empire le sanguinaire Martin de Zakros, dont il sera inutile de rappeler à cette barre l'énormité des crimes." Dyonis ne dit rien de Sylvère : c'est Hyriel que l'on juge, il s'en tient donc aux faits concernent ce seul individu - d'autant qu'il a promis à Kalisha l'abandon des poursuites concernant le brigand d'Aiguemorte. "Il est vrai que j'ai déclenché les poursuites pour tromperie sur identité : j'avais dans l'idée qu'il faut avoir des manigances à cacher pour prendre costume et faux nom, je voulais en savoir davantage." Et il dit la vérité : telle avait été sa première réaction : on ne pouvait être net avec un faux nom et des accointances avec Sylvère d'Aiguemorte - cela méritait interrogatoire. "Toutefois, l'honnêteté - et le devoir d'inspection de sa propre conscience auquel doit se livrer tout bon chrétien dans l'espoir de s'améliorer - me pousse aujourd'hui à dire ce que j'aurais dû considérer en priorité... plutôt que ma colère à la découverte du délit : sans Hyriel" (et sans Sylvère, bien évidemment) "Monbrina aurait-il été débarrassé aussi efficacement de ce Martin de Zakros ? Cet incendiaire, ce tueur en série, ce tortionnaire qui a sévi des années sur notre sol, impunément, au nez à la barbe des Grands de l'Empire. Mis hors d'état de nuire en une journée grâce à l'homme ici présent."
Bref regard vers Hyriel - mais sans s'attarder, et toujours aussi distant - ainsi qu'une sincère pensée vers Sylvère afin de l'associer à cette prouesse. Le mentionner ici cependant ne serait pas de bon aloi. Dyonis plisse le front, ordonne ses paroles pour la suite.
"Le 18 octobre de cette année, l'accusé a rencontré l'une de mes esclaves - la jeune Aud, une excellente et irréprochable servante - afin de la soigner. Aud avait été l'une des trop nombreuses victimes de Martin de Zakros. Torturée dans son domaine, traumatisée, elle est arrivée à Frenn pleine de terreurs. Des effrois tels qu'elle n'en dormait plus. Qu'elle s'épuisait à la tâche et se sentait en permanence coupable de tout. Comme épiée par un fou dangereux toujours près à la tourmenter. Depuis sa consultation auprès d'Hyriel, Aud a retrouvé le sommeil. Ses humeurs sont également mieux réglées. Ses hantises la laissent petit à petit en paix. Elle reprend confiance en elle, assistée en outre de tout le soutien que chacun de mes gens travaille à lui porter au sein de mon domaine. Cependant rien de ces premiers pas vers le mieux n'aurait été possible sans l'intervention de ce guérisseur." (Un temps) "Auprès d'Aud, Hyriel a été bienfaisant en tout. N'est-ce pas œuvre très chrétienne que de venir au secours du plus humble de ses prochains ? Et exemplaire esprit de discernement que de ne pas se refuser à soigner une servante de l'homme qui a pourtant ouvert une procédure contre vous ? Aud, du reste, je le répète, est une domestique modèle. Elle n'a jamais fait la moindre histoire en mon domaine - bien au contraire. Elle est discrète, travailleuse, bienveillante, d'une grande sensibilité, et n'a jamais montré le moindre symptôme négatif après son entretien avec Hyriel."
Un instant, Dyonis songe à ajouter à l'éloge du guérisseur qu'il n'avait demandé aucune rétribution à Aud. Mais il se ravise : déclarer son geste gratuit pour une esclave, c'est sous-entendre que Dyonis ne l'a pas payé en tant que propriétaire d'Aud - et donc révéler que c'est en cachette qu'Eldred a emmené sa camarade servile consulter Hyriel ! Car oui, si Dyonis avait su cette démarche, il aurait évidemment rétribué le guérisseur - d'autant que c'était avant qu'il n'apprenne qu'Hyriel et Hyacinthe Galthym ne formaient qu'une seule et même personne. Mais Eldred avait raison : aurait-il donné l'autorisation pour qu'Aud se rende auprès d'un sorcier... L'esclave et le maître connaissaient la réponse... Aujourd'hui, sachant à rebours le bien qu'Hyriel a fait, Dyonis aurait agi différemment. Et si l'herboriste sort vivant de ce procès, le baron le retrouverait et le paierait. Il s'en fait la promesse. Comme l'avait dit Eldred, venir témoigner en sa faveur est déjà une première façon de lui payer son dû aujourd'hui. Pour le seigneur de Frenn en cet instant, ce n'est que justice.
"Vos Honneurs, Votre Éminence, Messieurs les jurés, gens de Braktenn. Je vous remercie pour votre attention et remets ma déposition au discernement de cette Cour."
Dyonis incline la tête. Il se recoiffe de son chapeau et s'apprête à faire demi-tour, mais se ravise au bon moment quand il se souvient que les témoins devaient rester disponibles sous la main de l'accusateur et des juges pour répondre à d'éventuelles question. Le Premier Conseiller recule donc de quelques pas et demeurera silencieux, immobile, avec les autres témoins. Le regard neutre et ses prothèses croisées devant lui, il suivra les prochains événements.
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Quand le seigneur de Frenn eut terminé de parler, deux femmes s'avancèrent d'un pas timide vers la barre des témoins. Elle ne se connaissaient ni d'Eve ni d'Adan mais se reconnurent d'instinct comme deux témoins bien modestes - qui allaient faire presque tache après tous ces importants personnages ayant pris la parole... Aussi trouvèrent-elles en cela un genre de solidarité qui n'eut guère davantage besoin de s'exprimer autrement. La plus grande adressa une brève révérence à la Cour et au Cardinal, de ses mains relevant à peine les pans de sa robe et de son tablier, puis posa avec respect et timidité la main sur la Bible.
-- Berthe Giroux, drapière, née le 23 juin 1570. Je jure de dire la vérité, toute la vérité, rien qu'la vérité. (Un temps) Messieurs les Juges, Votre Éminence. J'ai entendu dimanche dernier, à la messe, l'appel en chair à v'nir témoigner. J'ai pas hésité. C'est que, voyez-vous, je suis mère de quatre petiots. Le dernier, y m'a fait il y a deux ans une très méchante maladie. J'avais pas les moyens pour faire v'nir un docteur bien comme il faut, moi. J'ai essayé toute seule les recettes de bonne fame que toutes nos grand mères connaissent, mais c'était plus grave que ça apparemment... On m'a recommandé Hyriel. J'ai eu çà un peu peur j'vous avoue, mais j'peux vous dire que j'aurai tout fait pour mon petiot. Alors je l'ai fait. Et il est venu, et croyez-moi qu'j'ai vite plus eu peur du tout, Messieurs les Juges. Une pleurésie, il a dit que Benjamin avait. Il a donné tous les remèdes. Il est je sais pas combien d'heures sur ses journées pour v'nir voir mon fils jusqu'à ce qu'il soit remis sur pieds. Mon fils a survécu ! Y était d'nouveau frais comme un gardon. j'aurai dit que c'était un miracle, mais seul Notre Seigneur Jésus en fait, alors non. En plus, Hyriel m'a expliqué tout ce qu'il avait fait et mis dans ses remèdes. (déplace à tâtons les yeux vers le Cardinal, humble, mains jointes) Y a pas d'magie Votre Éminence. C'était... comme une recette très bien expliquée, même moi qu'ai pas étudié, j'ai suivi. Et on est tous très bons chrétiens sous mon toit. Le Curé de la Sainte-Famille peut vous le certifier ! Vous pouvez être sûr que si j'avais vu quoi qu'ce soit qu'était péché ou Satan, ah ça que je vous l'aurai chassé l'Hyriel ! Mais non, que du bien il a fait. Il est poli, et savant, et il sait bien expliquer. Et puis il m'a fait payer cinq rilchs. Juste cinq rilchs ! C'est rien ! Mais parce qu'il a çà bien vu que c'était dur pour nous depuis qu'le père il a passé l'arme à gauche. J'connais pas beaucoup de médecins qui auraient fait ça. Ou qui seraient même venus. (Un temps, regard ému vers Hyriel) Encore merci pour Benjamin et pour la famille. J'suis bien chagrine de vous voir là. (à la Cour) J'ai vu que du très généreux et du très chrétien chez Hyriel, Messieurs. Des petiots comme le mien, je suis certaine qu'il en a sauvé d'autres. Et d'autres gens aussi, plein d'autres gens comme ça vient d'être dit. Merci de m'avoir écoutée, Messieurs les Juges et Votre Éminence.
Elle recula. La brunette avança à son tour, fit la même révérence un peu maladroite que la précédente femme - mais où l'on voyait qu'elle mettait tout son cœur. Elle toucha le Livre, pencha la tête et s'engagea :
-- Tiphanie Dubois, née le 5 mars 1579. Je jure de dire la vérité, Vos Honneurs, Votre Éminence, Messieurs les jurés. (Elle releva la tête et agença ses mots.) Je travaille au Lupanar de Braktenn. Mais Madame Isabelle peut vous assurer que je suis bonne chrétienne. Je vais à la messe, à confesse aussi, je prie pour mes péchés... J'espère bien changer d'vie aussi vite que j'trouverai un aut' travail, mais c'est pardi pas facile. Je... Pour Madame Louise d'abord, je peux vous dire comment que c'est une fille généreuse. Elle a toujours pris soin de tout le monde. Elle lit nos lettres quand nous on peut pas, elle se coupe en quatre pour que tout aille bien, elle a même chassé des mauvais clients qui voulaient... des choses... 'fin c'est pas le sujet. Louise, c'est une femme en or. C'est bien qu'elle soit devenue co-gérante. Et c'est pour not' bien à toutes qu'elle a amené Hyriel. Il nous a toujours soignées et pour pas cher quand on avait le mal. Il préparait aussi des p'tits produits de beauté, mais des bons, parce qu'il nous a expliqué qu'il y en a qui sont faits avec des choses dangereuses pour le corps. C'est vrai... c'est vrai qu'il a avorté Claudine et Lucie, mais c'était de gaîté de cœur pour personne ! Je l'ai jamais vu faire le moindre mal. Il est attentif, il est patient, il est très précautionneux. Puis c'est pas l'argent qui l'intéresse, ni le pouvoir ou quoi. (Un temps) Et surtout, il y a une de nos esclaves... qu'on croyait qu'elle allait mourir au début de cette année ! Surtout que les anciens patrons, ils faisaient rien pour aider ! Louise, elle a été courageuse ! Elle a emmenée la petite esclave à Hyriel. Et une semaine après, elle était toute guérie ! Et Hyriel l'a fait gratuitement. Y mérite pas la mort, Messieurs... Y a peu de gens de bien comme lui en vérité... (Dernier coup d'œil à la Cour) Merci pour vot' attention.
En s'en retournant, Tiphanie évitera de regarder Louise et Hyriel. Elle aurait bien voulu les encourager mais elle se mettrait à pleurer. Et puis, il ne fallait pas que ça en remette une couche dans la "provocation à l'idolâtrie" et ces bêtises-là.
C'était à présent le père d'Anjou qui se présentait à la barre. Celui-là même qui avait mis un jour le pied au domaine pour soustraire l'esclave Jérémie en prétendant le soumettre à un interrogatoire. Soit. Il n'y avait jamais eu de suites. Prosper et Marthe en étaient restés là jusqu'à avoir vent des frasques sexuelles de ce curé d'un bien mauvais genre. Et il osait venir ici se pavaner ! Sans compter qu'il terminait son numéro sur une irrévérence envers Matthieu Cassin ! Heureusement, le Cardinal rappela bien vite les errances de ce prêtre et son témoignage fut même rejeté ! Formidable démonstration que tout cela ! Qui venait défendre Hyriel ? Une bigote insolente - peut-être donc pas si bigote que cela ; un ecclésiastique débauché ; un tas de chair tordu sur roues ; une jeune noble bien gentil mais... jeune et naïf précisément ; une pauvresse, une catin ! La lie de la société au service de cette idole diabolique.
Et puis... et puis il y eut le Premier Conseiller en personne. Qui se servit une entrée fracassante comme si son retard ne suffisait déjà pas à le distinguer. Il suait comme un bœuf, lui un homme si digne ! Prosper jugea à cet instant le Cardinal Cassin bien magnanime avec une certaine partie des éclopés : apparemment, même les infirme par accident se laissaient corrompre par le vil poison de cette créature béquilleuse. Franchement ! Qu'avait à gagner le seigneur de Frenn à se montrer dans un procès comme celui-ci. Il ne devait pas être en pleine possession de lui-même. Quoi-que...
-- C'est surprenant, ne trouvez-vous pas, notre Premier Conseiller volant au secours d'un sorcier ? chuchota-t-il au vicomte de Fromart. Mais moi je peux vous affirmer, pour avoir un soir dîné avec lui, qu'il est plus que complaisant avec ses esclaves. Surtout ces sauvages de Zakrotiens. Alors à présent, le voir plaider pour un suppôt du diable. C'est à se demander pour qui le baron travaille véritablement...
Prosper l'écouta d'une oreille. Une esclave soignée ? La belle affaire ! Un petit bienfait donné ici d'une main - de même qu'avec cette mère de famille qui vint ensuite à la barre - n'effaçait en rien les crimes empilés de l'autre main. Le comte et son intendante écoutèrent à peine la catin qui parla ensuite. Ils se concentraient plutôt sur leurs propres dépositions, imminentes. Le seigneur de Monthoux et la contremaître descendaient gravement les marches, tant pour le bien de la charge pondérale du sieur... que pour la lente solennité qu'il était bon d'afficher. Prosper tout comme Marthe se décoiffèrent de leurs chapeaux devant la Cour et le Cardinal. Ils s'inclinèrent, touchèrent la Bible, jurèrent.
-- Prosper Firmin Ebenezer, comte de Monthoux, né le 8 février 1543. Messieurs, Votre Éminence, j'ai eu le malheur d'être abusé par le sorcier que l'on juge en ce jour. Il s'est présenté en tant que Louis Floret, jardinier sans histoire. Il portait une teinture et s'était arrangé pour que rien dans son attitude ne me laisse reconnaître le sournois serpent qui m'avait déjà maudit de son regard des Enfers, en septembre devant l'estrade de Monsieur Greeglocks ! Avez-vous vu ces yeux ? Ne sont-ils pas la marque de son inhumanité ?! (Ses joues flasques tremblotent alors qu'il secoue la tête pour se reprendre) Je n'ai donc embauché... sur recommandation de ma pauvre femme, envoûtée par lui ! (Après tout, Matthieu Cassin avait levé le lièvre quant à Kalisha et Florentyna... Il pouvait en remettre une couche. Et laver la réputation des Monthoux : elles n'étaient qu'envoûtées.) La malheureuse princesse djardanne, grâce à Dieu secourue par une novice de Son Éminence à l'instar de ma fille. Car oui ! Ma pauvre Florentyna a elle aussi subi les invocations démoniaques de l'accusé ! Il n'y a qu'à voir comment toutes deux se sont conduites, en possédées, furieuses, pleureuses, insultantes, lors de l'arrestation d'un vulgaire domestique ! Qui n'est pas le seigneur de Vinci quoiqu'on vous en dise. Ce n'est pas par le mérite qu'il s'est attiré les sympathies. Mais par des sorts ! Ceux-là même qui, allez savoir gardent peut-être aussi mon épouse stérile. Et sa maudite serre... Je suis sûr que tout ce qui en sortira sera maléfique. Je la ferai détruire. (Un temps, longue inspiration pour prendre son air le plus sérieux) Nous avons eu la preuve aujourd'hui encore que ce démon boiteux sait ensorceler même les plus nobles êtres. La princesse Djerdanne d'abord... et à présent... (il tourne un regard mielleux et plein de compassion vers Dyonis) vous, Votre Excellence. C'est bien pour entrer en contact avec vous, un homme d'un si grand pouvoir en cet Empire, qu'il est venu vous trouver ce 15 septembre. Sûrement plus encore que pour Martin. Or vous avez raison : on ne prend pas un faux nom si on n'a rien à cacher... Vous êtes grand et digne, ne succombez pas au complot que cet être abject tente sûrement d'instituer grâce à d'autres invalides et grâce à des sympathisants de nature aussi faible qu'en ont femmes et esclaves. Mon épouse et ma fille en sont sorties, de son emprise, vous pouvez vous faire aider.
-- Marthe Georgette Cloissonnier, née le 29 mai 1532. Messieurs les Juges, Messieurs les Jurés, Votre Éminence, je souscris à tout ce qu'a déjà souligné le seigneur de Monthoux. J'ajouterais seulement qu'en tant qu'intendante de son domaine, j'ai surpris plusieurs comportement douteux de l'accusé en tant qu'employé du château - statut dont-il aurait dû être heureux et reconnaissant. Mais au lieu de cela, il a pris un jour un malin plaisir à esquinter un morceau d'un de nos luxueux parquets. Autant de plaisir, sans doute, à voir rien moins que Madame la comtesse et Mademoiselle Florentyna prenant irrationnellement sa défense alors que je l'avais dûment corrigé. Enfin, il se passait des phénomènes étranges au domaine. Plusieurs fois, j'ai retrouvé des chardons dans ma couche. Arrivé là comme. Par. Enchantement. Du reste, il ne se tenait pas vraiment au strict protocole quant à l'interdiction d'accointances entre gens libres et esclaves. Une certaine Phaïdée, une ancienne catin ! et une esclave ! ...était de ses bonnes relations. Remarquez... entre êtres infâmes...
Tous deux remercièrent et saluèrent avec les plus grandes politesses, avant de rejoindre le groupe des témoins. Ils se tiendront bien sûr à l'écart de toutes ces vermines - ou ces malheureux envoûtés - ayant osé prendre la défense du sorcier.
Thierry arriva comme une lueur d'espoir. Oh certes, Lénius lui gardait un chien de sa chienne - tout comme à Alexandre - pour la façon méprisable qu'ils avaient eue de descendre Tristan en flèche devant son maître. Pour, par opposition, sauver les miches du petit Bellanger en mettant en valeur à quel point, lui, était si vertueux, si doux, si dévot, si éternellement victime, si tout cela. Toutefois, l'avocat d'un jour savait discerner les affaires et voir les choses en nuance : aujourd'hui, Thierry était un allié. Et un allié brillant. Lénius eut en effet bien conscience - une fois la pression retombée et sa lucidité retrouvée - que certaines de ses références avaient pu égarer Monsieur et Madame Tout-le-monde... Le père d'Anjou apportait donc un excellent contrepoint et Lénius saurait lui en être reconnaissant. Pour Hyriel.
La plaisanterie finale du prêtre amusa même la gargouille, qui prêta volontiers son concours et ses lunettes à la petite pirouette. Son amusement demeurera toutefois intérieur : l'heure n'était pas à rire, l'avocat aura gardé un visage parfaitement sérieux. Seul une petite œillade entendue à Thierry lui aura signé son soutien.
Mais bien évidemment, Matthieu revint en détail sur le passé douteux du prêtre ! Par tous les diables ! Ne pouvait-on pas l'espace d'un instant ne pas tout mélanger, éviter les attaques ad hominem, se concentrer uniquement sur un discours ?! Oui, le curé avait fauté et avait déjà été jugé une fois pour cela. Ne pouvait-on passer à autre chose ? Lénius lui-même mettait en ce jour de côté ses griefs envers les d'Anjou-Bellanger. Il estima de même puérile de revenir sur ces vieilles affaires de baptême, de Tristan, d'Alexandre, qui n'avaient rien à voir avec le procès du jour. La gargouille demeurera placide, patiente.
Rien de ce que dirent ensuite le Monthoux et sa serpillère d'intendante n'étonnèrent ni n'intéressèrent vraiment Lénius. Stupide. Attendu. Sans aucune preuve rationnelle, simplement des interprétations pseudo-morales des phénomènes ! Il plaignit seulement de tout cœur les deux femmes en question - et cette pauvre serre qui devait être magnifique et n'avait rien demandé - avant d'adresser un regard navré à Hyriel que tous avaient apparemment décidé d'enfoncer... Tous, ou presque. Et que dire des paroles consternantes du comte au Premier Conseiller ?! Comment osait-il ! S'entendait-il ? Quel mépris alors qu'il ne devait pas arriver à la cheville de la noblesse du seigneur de Frenn.
Car oui, pour lui aussi - lui, le baron à qui il devait l'asservissement de Tristan... et encore ! ç'avait failli être la potence ! - Lénius eut la capacité de mettre en suspend sa rancune. Aujourd'hui, il devait reconnaître que le Premier Conseiller faisait preuve d'une grande générosité et d'un rare sens de la justice. C'était à se demander si cet homme-là fut le même à avoir, en septembre, intenté un procès à deux innocents garçons. Fi. En ce jour, Dyonis se rachetait un peu aux yeux de Lénius.
Enfin, la gargouille se montra très sensible aux témoignages du jeune Nehalan de Torienel et de ces deux femmes du peuple. Ce genre de moments avaient le pouvoir de montrer que parfois, les choses les plus logiques et évidentes sortent des bouches les plus jeunes ou les plus socialement défavorisées. Pas un accroc. Des paroles certes maladroites, mais pleines de bon sens et d'humilité. Oh ! Grand merci à eux.
-- Si chacun a désormais parlé en son âme et conscience, la Cour invite maintenant les deux accusés à prendre eux-mêmes la parole pour leur défense.
Et quand ceci sera fait, le Magistrat ajoutera :
-- Nous ouvrons maintenant la dernière phase de cette séance avant première délibération. Votre Éminence, en tant qu'accusateur vous avez le loisir désormais de poser toutes les questions qu'il vous plaira aux témoins, à l'avocat de la défense, et bien entendu aux accusés. (Un temps) J'en ai moi-même quelques interrogations à soumettre aux prévenus avant que de vous donner la parole.
Du haut de son pupitre, il pencha son ombre sur le guérisseur et la prostituée assis en contrebas. D'abord à Hyriel :
-- Accusé, premièrement : persistez-vous à nier ce que vous avez déclaré ce matin en interrogatoire - à savoir que vous n'avez jamais été au service du Diable d'aucune façon ? Que tous ici l'entendent. Deuxièmement : vous avez déclaré avoir été baptisé, communiant et confirmé en notre Sainte mère l'Église. En tant que bon croyant, faites-nous donc état ici plus précisément de ce en quoi vous croyez. Assurez-nous que vos croyances ne sont pas hérétiques. Troisièmement : comment envisagez-vous en tant que chrétien, et en ayant entendu les enseignements de Son Éminence, votre infirmité ? Quatrièmement : dans quelles circonstances et comment avez-vous convaincu la princesse Kalisha, comtesse de Monthoux, de vous employer au domaine de Monsieur le comte ? Cinquièmement : un petit garçon de rien moins que la famille de Fromart a été vu grimpant aux barreaux de votre cage au cours de votre transfert. Nous a-t-il échappé que vous connaissiez les proches de Monsieur notre Ministre des Affaires étrangères ? Ou est-ce là encore un ensorcellement visant à insidieusement vous immiscer auprès des Grands de l'Empire ? Et dernièrement : le seigneur de Frenn a souligné que vous êtes venu le trouver sous une fausse identité. Pourquoi ?
A Louise ensuite :
-- Accusée, avez-vous été la complice d'Hyriel en votre âme et conscience ou reconnaissez-vous avoir fait l'objet d'un ensorcellement ?
Là-dessus, et après les réponses des inculpés, tous attendaient les questions du Cardinal Matthieu.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
La main toujours posée sur celle de son amie, soucieuse de lui témoigner sa présence et de l'apaiser un peu, Louise se concentra au maximum de ses capacités pour suivre les témoignages qui allaient être dit. Son visage restait tendu mias impassible, comme lorsqu'elle s'offrait aux hommes.
Une dame s'avança et exposa que Hyriel avait soigné la sœur de son domestique. C'était positif. Sauf qu'elle se mettait à digresser et à remettre le système en question. Cela n'allait pas les aider. Au contraire, cet imbécile de cardinal affirmerait que cette attitude prouvait son ensorcellement. Elle murmura à son ami :
"Un témoignage, c'est comme une passe, tu sais. Plus c'est long, moins c'est agréable."
Un homme s'avança ensuite pour déposer sur le cas de son épouse défunte dû à une grossesse gémellaire qui aurait bien mal tournée et accusait Hyriel d'en être responsable. Le chagrin troublait sa raison. Louise serra les dents en entendant Hyriel s'énerver et protester. Elle comprenait que son ami veuille laver son honneur mais cette attitude jouerait en sa faveur. Rapidement, la catin tira sur son bras pour l'insister au calme alors que les juges le sommaient de se taire.
"Hyriel... Je comprends ta douleur, ta colère, ton ressentiment... Mais si tu agis ainsi, ça se retournera contre lui."
Etait-ce un argument ? En réalité, quoique ce procès amène, Louise pressentait que seul le bûcher attendait son infortuné ami. Le troisième témoin, un libraire, confirma cette intuition en inventant un conte sordide. Hyriel profaner des tombes ? Quel imbécile ! Elle serra la main de son ami un peu plus fort, au point de lui écraser les doigts.
"Tu restes calme."
La séance reprit et un prêtre s'avança à présent. Louise redoutait que celui-ci apporte son soutien au cardinal mais à son étonnement il apportait d'excellents arguments en faveur de Hyriel. Quel saint homme ! Elle sourit à son ami.
"Quelle chance que tu as eu de t'être fait un tel ami."
Mais le curé commençait à s'en prendre personnellement au cardinal. Il réglait ses comptes. Cela se sentait. Mais au moins cette histoire pouvait jouer en faveur de Hyriel. Son visage pâlit d'effroi quand l'inquisiteur réclama le retrait de ce témoignage. Elle poussa un long soupir, désespérée. Tout était perdu. Elle n'eut même pas le coeur d'observer le si gentil gentil, si candide, s doux, qui venait défendre à son tour le guérisseur. Il y eut une intervention du ministre des affaires étrangères pour réclamer l'invalidité du témoignage de la dame Cordélai. malheureusement, les juges déclinèrent et annulèrent que les aproles du prêtre. Elle soupira. Tout était donc bon pour condamner Hyriel. Tout était perdu.
Brusquement, les portes du tribunal s'ouvrirent et, comme au théâtre, un personnage inattendu surgit. Le Premier Conseiller. Louise le contempla s'approcher, hagarde, et déposer pour rapporter le fait que que Hyriel lui avait livré le monstre de Rottenberg et insistait que cela vaait mis un terme à ses folies. Instinctivement, elle se signa.
"Soyez béni, messire."
Il évoquait à présent les soins prodigués à une de ses esclaves. Louise continua de sourire, enchantée. Cet homme avait du poids. On entendrait sa parole. Hyriel allait être sauvé. Oh oui, elle voulait y croire. D'ailleurs la femme qui s'avança ensuite prouvait que quelque chose avait changé. Enfin, de merveilleux témoignages. Utiles. Elle sourit de l'entendre parler modestement de as vie de mère, du souci pour ses enfants. Voilà ce que les juges avaient besoin d'entendre. Louise ne s'attendait pas à la personne qui suivit et contempla , hagarde, Tiphaine s'approcher de la barre. Sa collègue dressait un portait élogieux à son éloges, al décrivait comme une femme gentille, courageuse, loyale.. Toutes ces paroles eurent raison de ses barrières protectrices et Louise éclata en sanglots, émue par une si merveilleuse preuve d'amitié.
Alors que Louise essuyait ses larmes, lecomte de Monthoux commençait son témoignage et chargeait sans la moindre surprise Hyriel de tous les maux. Son intendante fit de même. Elle fronça cependant les soyrcils à un moment et murmura à son ami :
"C'est quoi cette histoire de chardons ?"
Les témoignages étaient à présent clos. Louise fixa avec attention les juges et entendit leurs questions. Elle fixa Hyriel qui se préparait à répondre et se décida à lui envoyer une bourrade de coude pour le faire taire rapidement. Elle s'était jurée de le protéger. Elle s'y tiendrait.
"Je ne suis en aucun cas complice de Hyriel, ni ensorcelée. Ce serait lui plutôt mon complice. Tout commença lors de la maladie de notre petite servante, Cassandre Velasquez, si vous avez besoin de confirmer mes dires. Comme l'a exposé plus tôt Tiphaine, elle semblait condamnée. Mais j'ai entendu parler d'un guérisseur qui ferait des miracles en forêt. Perdue pour perdue, j'y suis allée. Il l'a soigné. quand je suis retournée la chercher, devant cet acte, j'ai eu cette idée de lui demander de venir au lupanar aider mes collègues. Nous avons toujours besoin de soins. Et les avortements, oui, il y en a. Il y en a toujours eu. Vingt ans que je fais ce métier. J'ai eu le temps de voir nombre de mes collègues périr dans une tentative pour retirer un enfant qu'elle ne pouvait élever. Qui aurait fin à al rue ou malheureux dans un orphelinat. Alors, par souci pour mes collègues, je voulais leur donner une possibilité d'avorter en sécurité. Sans risquer leur vie. J'ai tout organisé. Hyriel n'a rien fait que venir et de m'obéir."
Elle tourna la tête vers son ami, sévère, le priant silencieusement de se conformer à sa version.
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le commentaire de Louise sur le long témoignage-plaidoyer aura fait sourire Hyriel. La présence de son amie à ses côtés avait au moins quelque chose de rassurant.
Injures, quolibets. Hyriel se brida, prit sur lui, comme il le faisait avec les enfants du village. Il se mordit la lèvre, conscient que son amie avait raison, mais ne put se tenir. Les fausses accusations, c’était hors de question. Il concentra toute son énergie à contrer les témoignages, à tenter de rétablir la vérité, au mépris des injonctions des juges. Il les remercia d’un hochement de tête en se rasseyant et se referma. Il avait usé sa chance. Il espérait ne pas avoir à réintervenir pour se défendre de mensonges… Il se rassura un peu à la question du cardinal. C’était déjà ça, même s’il n’avait aucun espoir quant à la réponse du marchand. La main de Louise serrant la sienne eut, paradoxalement, l’effet de le détendre. Il pouvait se concentrer sur quelque chose. Il hocha la tête et murmura :
« Je reste calme. »
Arriva un nouveau témoin. Il le reconnut. C’était le père complétement idiot, égoïste et qui ne songeait qu’à s’amuser sur le dos des autres. Il lui accorda pour tout remerciement à son encouragement un regard neutre. Il ne savait même pas s’il venait à charge ou à décharge… Il écouta le témoignage et se força à ne pas réagir. Mensonge mais… bon. Après tout, au point où il en était, tout était bon. Il écouta la suite sans réagir. Bien. À décharge. Il haussa un sourcil au sourire de Louise, émettant de sérieux doute, vu le personnage, et se retint de soupirer quand ça partit en plaidoyer et en attaques. Décidément, tant de gens s’improvisaient avocats pour répéter les mêmes choses ! Il préférait Lénius, c’était plus agréable à entendre, et de loin ! Mais bon, il n’allait pas cracher là-dessus… si seulement ces deux énergumènes savaient se tenir ! Ne se rendaient-ils pas compte qu’en provoquant le cardinal, ils l’enfonçaient, lui ? Mais à quoi bon lui lancer un regard pour lui faire comprendre sa bêtise ? Il ne s’intéressait plus à lui, il se donnait seulement en spectacle, et Hyriel ne put qu’enfouir sa tête dans une main en soupirant. Il n’écouta même pas le cardinal. Qu’on en finisse et qu’on le fasse brûler, puisque c’était décidé d’avance, mais qu’on arrête cette torture inutile… Il releva la tête et croisa le regard du cardinal et ne put que soupirer. À part Lénius, qui s’était très bien débrouillé, il n’avait rien demandé et, aussi curieux que cela puisse paraître, il était d’accord avec son adversaire sur la bêtise de ces témoins.
Il retrouva un peu – un tout petit peu – d’espoir quand arriva le suivant. Il ne le reconnaissait pas mais, en même temps, il lui disait quelque chose… Leur rencontre devait dater… La lumière se fit dans son esprit au bout de quelques secondes, quand il s’approcha. Le jeune garçon qu’il avait soigné, dans un château ! Il avait bien grandi et semblait un fringant jeune adulte ! Ses traits et son humeur se radoucirent en l’entendant. Oh, cela ne ferait sans doute pas pencher assez la balance pour le sauver des flammes mais il lui était reconnaissant. Et il lui pardonnait bien de jouer les avocats, lui aussi. Il lui sourit plus sincèrement quand il s’adressa à lui et inclina la tête avec humilité avant de le regarder partir.
Pour les réfutations de témoignages, Hyriel soupira de nouveau. Qu’importe, après tout ? Ils l’avaient plus enfoncé qu’autre chose, le mal était fait. Ce fut toutefois à son tour de serrer la main de Louise pour la rassurer. Elle ne craignait rien, elle. Elle ne craignait rien. C’était lui, le bouc émissaire qui prenait tout, pas elle.
Il sursauta quand la porte s’ouvrit et ne put masquer sa surprise. Oh. Lui. Il était fait. Pourquoi on ne le brûlait pas directement avec sa chaise, déjà ?
Il déglutit et leva les yeux vers le Premier Conseiller pour le saluer d’un hochement de tête respectueux, aussi innocent que gêné. Il écouta son témoignage et fut frappé par sa neutralité. Il énonçait les faits, simplement, et soulignait ce qu’il avait fait. Il nota l’absence de Sylvère dans ses mots et comprit que c’était pour ne pas lui porter préjudice. Il lui en fut reconnaissant pour son ami. Il le remercia d’un signe de tête respectueux.
Il sourit également aux deux femmes qui vinrent témoigner ensuite, pour lui et pour Louise. Oh, ça non plus, ça ne ferait rien, il ne se faisait pas d’illusion, mais il leur était reconnaissant pour leur courage et pour leur honnêteté, pour leur simplicité – à l’inverse des deux pies – et pour leur bonté. Il tourna son sourire vers Louise pour la réconforter, même s’il devinait que ce n’était pas de la tristesse qu’elle manifestait. Il lui caressa l’épaule, se voulant rassurant.
Et puis vinrent ses deux anciens patrons. Il prêta à peine attention aux témoignages du porc et de la pie. Il croisa simplement les bras et s’adossa à sa chaise, roulant des yeux à chaque énormité, tant et si bien qu’il en eut mal à la fin. Il ne put que hausser les épaules à la question de Louise. Il n’en avait pas la moindre idée.
Vint le temps des questions. Il les écouta toutes, plus farfelues les unes que les autres, et s’apprêtait à répondre quand un coup l’interrompit. Louise ! Il l’écouta et se rassura. Elle ne mentait pas pour le sauver en se condamnant, simplement qu’elle s’attirait la faute sur lui. Il retourna un sourire à son regard sévère et se redressa sur sa chaise pour répondre à son tour, après s’être éclairci la gorge.
« Je confirme ce que vient de dire mon amie, mis à part que la responsabilité ne repose pas que sur elle mais aussi sur moi, qui ai accepté d’aider les filles. »
Là. Elle allait lui en vouloir mais il était hors de question qu’elle prenne pour lui. Il regarda un instant l’assemblée, qu’importe ce que diraient les juges.
« J’en profite pour remercier ceux qui nous ont défendus, cela fait chaud au cœur. Pour ce qui est des questions, je continue de nier : je n’ai jamais été au service du Diable, en aucune façon. Pour ce qui est de la foi, je ne suis malheureusement pas aussi connaisseur que les ecclésiastiques dans notre assemblée donc je vous prie de pardonner la naïveté et la pauvreté de mes propos. Je crois en Dieu, en la trinité, en la résurrection, en l’intercession des saints, en leurs miracles… en la foi prêchée dans les églises, somme toute. Pour ce qui est de mon infirmité… comme je l’ai dit à Son Éminence et à l’un de vous, je l’associe aux hasards de la vie. Nous avons tous des traits différents, l’infirmité ou la validité ne sont pas différentes. »
Il avala sa salive, le temps de rappeler à sa mémoire le mensonge sur sa rencontre avec Kalisha.
« J’avais besoin de me cacher pour échapper aux poursuites engagées par Son Excellence et j’ai entendu dire qu’elle cherchait un jardinier. Ayant quelques connaissances en la matière, j’ai tenté ma chance, rien de plus. »
Un fond de vérité…
« Pour cet enfant, je ne le connaissais pas avant notre rencontre lors du transfert. Il était là, il a accouru vers moi, nous avons discuté, c’est tout. Ce petit garçon est l’innocence même. »
Il leva les yeux vers son grand-père, qu’il connaissait désormais de vue et qu’il avait reconnu, espérant qu’il l’appuie sur ce point. Pour la dernière question, il réfléchit un instant avant de relever la tête.
« À propos de la fausse identité, je dirais simplement que j’ai cherché à retarder l’inévitable : en me présentant comme herboriste, j’aurais été arrêté directement, quand bien même ce n’était pas le sujet dont il était question. En me présentant comme paysan, j’ai pu repartir libre. »
Lui, Sylvère et Florentin, mais il se garda bien de les mentionner. Il ne fallait pas les mêler à ça.
Il se renfonça sur sa chaise et déglutit, attendant la claque – ou équivalent juridique, tout en consultant muettement Lénius et Louise, inquiet de leurs réactions.
Eugène aura écouté les injures de la foule, impuissant, dépassé. Heureusement, elles auront fini par se taire. Il aura écouté le reste avec inquiétude, pour son ami. Que cela ne se retourne pas contre lui… Il perdit tout espoir en écoutant le témoignage suivant et n’eut la force de rien dire. Seulement de retenir. Thierry d’Anjou, quarante-six ans, tête d’idiot, suffisant, curé de Saint-Eustache.
Il sourit en entendant le témoignage du jeune Torienel. Il lui rappelait lui-même, au même âge, quand il apprenait le métier avec son père. Il reconnut ses références classiques et l’approuva par ses maugréments pour aider la foule. Ce petit gars irait loin…
Eugène chassa cette pensée aussitôt qu’elle arriva. Ce n’était pas l’heure de la nostalgie. Il fut de toute manière estomaqué par l’arrivée du Premier Conseiller en personne, remarquée, et par son témoignage en faveur d’Hyriel. Il l’approuva au moment du passage sur leur poulet par des « Mais cet homme est un héros ! » avant de ressortir les approbations habituelles, de même aux deux femmes qui eurent le courage d’aller témoigner et à qui il sourit. Il n’eut aucun effort à faire pour retenir les noms et descriptions du comte et de s’on intendante : ceux-là étaient gravés dans sa mémoire, sans doute à tout jamais.
Il écouta ensuite les réponses des deux accusés et fut touché par la volonté de Louise de se sacrifier pour leur ami. Il ne fut pas surpris quand celui-ci corrigea et l’écouta répondre, glissant habilement des mensonges dans sa réponse – ou, plutôt, des flous – et l’approuva, comme les autres fois, par des murmures et des acquiescements sonores, priant pour que cela fasse effet et que les juges entendent les réponses comme il se devait.
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
- Avertissement « HANDIPHOBIE ET RACISME TRÈS SAUVAGES »:
- Toujours la même chose…
Même si certains témoignages étaient bien ridicules, Matthieu fut ravi de trouver un peu de soutien, notamment chez Cecilia. Cependant, en particulier à l’épisode de l’impertinente, il eut la surprise de trouver une aide salvatrice grâce au ministre qui se leva pour demander le retrait de son témoignage. Eh bien, il ne s’attendait pas à tant de soutien. Il lui accorda un léger sourire. Léger, mais sincère. Peut-être pas si mauvais que ça finalement…
Lui-même, après sa demande, attendait fébrilement la suite. Il sourit avec une certaine satisfaction mais afficha comme une humilité reconnaissante au jugement. En revanche, il plissa un peu les lèvres quand la demande de Coldris fut rejetée. C’était bien étrange. Il fronça les sourcils devant l’air gêné des juges. Oh, il devait y avoir quelque affaire louche là-dessous ! Enfin bon, peu importe, il n’allait pas contester. Il se rassit et haussa un sourcil inquisiteur vers Thierry, encourageant le prêtre à retourner à sa place, voire à filer dans un trou à rats qui lui siérait mieux. En revanche, il adressa un regard sincèrement désolé à Coldris qui le remerciait d’avoir au moins essayé.
Alors que le calme revenait un peu plus, un frêle jeune homme vint à la barre. Matthieu haussa un sourcil. Il semblait bien jeune mais noble, vu comment il était habillé. Jeune mais il devait avoir l’âge de sa nièce, donc il avait le droit de témoigner. Dommage, car il sentait que c’était à décharge… Et en effet. Matthieu soupira tout en écoutant. Cela semblait inattaquable, avec une innocente candeur qui ne paraissait pas du tout feinte. Et lui aussi, il maîtrisait son Cicéron. Matthieu se retint de grincer les dents. Ils étaient pourtant bien partis…
Cependant, le témoignage l’intrigua quelque peu. Il ne se souvenait que du thym et d’un bruit ? C’était léger… Matthieu sourit. Et une question de notée dans sa tête, une ! Il fut dubitatif face à son rattrapage. Maigre défense… Mais décidément, tout le monde avait décidé de se faire avocat ! Il se redressa à sa question et lui fit comprendre clairement que non. Ce sorcier n’avait rien de charitable ou de chrétien. Et lui commençait à être intimement convaincu que si le sorcier avait soigné d’autres personnes, c’était pour se couvrir et donner le change. Ce serait une astuce ingénieuse et digne de son esprit tordu ! Le reste fut assez idéaliste. Matthieu se rassura donc en se disant que cela restait des paroles d’enfants. Au moins, cette fois, pas d’insolence.
Alors qu’il attendait le prochain témoin avec nonchalance, une entrée fracassante le fit presque sursauter. Le Premier Conseiller ? Diantre ! Matthieu se montra quelque peu surpris mais attendit. Il se montra particulièrement attentif pour d’éventuelles questions, car ce témoignage auraient plus de poids que les autres.
Le début le fit presque sourire. Usage de faux nom, pour changer… Il haussa un sourcil néanmoins. Lui, rendre un service à l’Empire ? Oh non, l’appât du gain sans doute avait été le seul motivateur de ce geste ! Quoi d’autre ?
Il tendit l’oreille à la suivre. Encore un soin mais pour une esclave… Une infâme ! Décidément, à la seule exception du jeune noble, il ne soignait que ceux de sa race pour l’instant s’il en croyait les dires. Coïncidence ? Certainement pas et il avait bien l’intention de le faire valoir ! Et encore cette évocation de la charité chrétienne… Balivernes ! Il dissimulait et dupait les bonnes gens tel que le respectable Premier Conseiller, voilà tout !
Matthieu trouve cependant de bon ton de hocher la tête avec révérence à la fin de son discours. Il fallait montrer un certain respect envers lui, c’était le decorum minimum. Ainsi en allait du jeu avec les puissants…
Vinrent ensuite deux femmes qui semblaient bonnes et respectables. Matthieu leur sourit pour les rassurer, espérant qu’elles soient à charge. Manqué, encore ! Il se rembrunit mais garda à l’esprit sa théorie. Sauver un noble chétif pour se faire bien voir – si c’était bien lui – puis un petit enfant pour paraître gentil auprès des paysans. Mais en réalité et en majorité, il soignait des infirmes… Tout cela avait un sens et il pouvait très facilement le retourner. Il nota quelques questions supplémentaires en attendant, patiemment. Au moins, le témoignage de Berthe lui montrait également qu’il savait les noms exacts des maladies. Savant… et par un savoir diabolique, il en était certain ! Il ne croyait pas à cette histoire de recettes, il avait sans doute prononcé des formules quand la brave dame avait le dos tourné ! Il l’avait dupée, comme tant d’autres avant elle sans doute malheureusement… Quant à cette histoire de prix, encore une manière d’endormir les esprits ! Et il n’avait certainement pas besoin d’argent vu ce que le Malin devait lui promettre !
Quant à l’autre, heureusement elle était plutôt venue pour la pêcheresse. Tant mieux ! Il écouta plus attentivement quand elle parla un peu d’Hyriel. Cependant, il ne crut pas à cette bonté qu’ils persistaient à tous mettre en avant. Toujours des excuses et des mauvaises ! Il dupait donc tout le monde… Encore une esclave de plus.
Heureusement, après tout cela vint un témoignage bien censé et lucide ! Celui du comte de Monthoux et de son intendante. Il les approuva de la tête. Les yeux oui, très juste, il faisait bien de le souligner ! Alors qu’il parlait d’envoûtement mais de sa femme sur la voie de la guérison, il jeta un regard très fier à Cecilia avec un hochement de tête. Elle faisait très bien son travail et pouvait être contente d’elle !
Il approuva ensuite la décision de tout détruire. En effet, qui pouvait savoir quelles plantes maléfiques il avait dû planter ! En revanche, la suite l’étonna, si bien qu’il ne put pas le cacher. Le premier Conseiller ? Il dissimula un sourire derrière sa main. Il n’aurait pas osé mais maintenant que la porte était ouverte… Une nouvelle question à poser ! Et ce qu’il soulignait par la suite était tout à fait juste. Décidément, que de bonnes choses ! Il haussa un sourcil au témoignage de Marthe et prit cela très au sérieux. Ça restait du domaine de la farce mais cela ressemblait bien à de la sorcellerie !
À présent, c’était au tour des accusés. Matthieu se crispa de nouveau sur les accoudoirs, espérant qu’il ne fasse pas de nouveau le malin. Non, certainement pas dans ce cadre, du moins il l’espérait, ce serait se discréditer et, avec les précédents témoignages, il ne pouvait se le permettre…
Cependant, ce fut d’abord la prostituée qui parla. Matthieu plissa les yeux mais elle ne fit que des déclarations sans importances, des tentatives bien futiles de sauver son ami. Définitivement, elle devait avoir été envoûtée !
Il arrondit les yeux à sa déclaration suivante. Quoi ? Cassandre ? Non, impossible ! Pas elle ! Elle était si pieuse, si intelligente ! Jamais elle ne serait tombée dans son piège… À moins que… Oui… Il avait ensorcelé Louise pour lui ramener d’autres personnes malades, pour les mettre à leur tour sous son contrôle. Bien sûr ! Ça semblait si évident ! Et sa pauvre nièce était donc tombée dans un affreux piège. Son regard se fit plus noir encore. Comment avait-il osé toucher à sa famille ?
Brûler ce sorcier devenait absolument capital. Il en allait de la santé mentale d’une nièce certes adoptée mais qu’il appréciait déjà beaucoup ! Il devait la sortir de ses griffes !Quant à l’explication de la catin pour les avortements, il les balaya de la main. Stupides excuses pour protéger son maître. Il ne la laisserait pas se sacrifier pour couvrir ce monstre !
C’est alors que le sorcier prit la parole. Matthieu conserva une attitude glaciale. Il ne l’aurait plus et il espérait qu’il n’aurait plus personne. Il était coupable, s’il existait encore un doute, il n’était désormais plus permis !
Cependant, à cet instant, il se produisit une chose bien étonnante. L’accusé se dénonçait lui-même. Matthieu resta interdit. Avait-il compris que la partie était perdue ? Il avait bien vu son regard fatigué et las après les premiers témoignages après tout… Ou alors voulait-il qu’on épargne son esclave pour qu’il puisse la faire agir à sa guise à l’extérieur et ainsi lui permettre de s’échapper ? Le doute persistait en lui et rien de tout cela ne lui plaisait…
Il remerciait avec un ton mielleux débordant d’hypocrisie ses défenseurs. Matthieu grimaça. Encore tout pour se faire bien voir ! C’était sa stratégie de prédilection, il pouvait le constater à présent !
Il laissait les juges avoir le privilège de poser les questions en premier et analysa attentivement chacune des réponses. Il niait évidement mais était-ce étonnant ? Matthieu soupire. Il débitait de nouveau des absurdités qui, il espérait, ne serait pas entendu par la foule. À sa justification quant à sa fausse identité pour se rendre chez le seigneur de Frenn, il plissa les yeux. Cela semblait bien maigre comme défense et il était facile de s’engouffrer dans la brèche… Il se cachait donc bien, il avait des choses à cacher !
Quant au malheureux enfant, très certainement tout aussi ensorcelé, il en resta aux faits, en surface. Cependant, il reconnaissait que ce garçonnet était dans une innocence juvénile. Parfait pour être manipuler donc ! Il nota de nouveau scrupuleusement dans son esprit. Il secoua la tête à la suite. Mensonge… mensonge éhonté. Dissimulateur, affabulateur, tout pour tromper un honnête seigneur !
Enfin, après cela, ce fut de nouveau son tour. Il acquiesça dans la direction des juges et se leva de nouveau avec une grande et droite dignité.
-Merci à vous, honorables juges.
Il prit le parti pour sa part d’ignorer Hyriel. Il ne contait que de belles histoires, en privé comme en public, cela ne servait à rien. Il faudrait attendre la torture pour espérer en tirer quelque chose… Matthieu préféra donc se tourner vers les témoins et l’avocat, pour tirer certaines choses au clair… Pour ce dernier, il en avait préparé une pour déjà se dégager le terrain pour une possible future accusation…
Il croisa les bras dans son dos.
-Avocat, j’aimerais savoir d’où vous viennent ces références païennes citées tout au long de votre discours ? Vous ont-elles été enseignées par l’accusé ici présent ?
Il espérait déjà gratter la surface et voir ce qu’il en ressortirait. Il se tourna ensuite vers l’insolente fausse dévote. Il avait bien peu de goût à revenir vers elle mais même si son témoignage avait été retenu, il avait d’autres moyens de le discréditer. Il garda une figure neutre et demanda sur un ton calme :
-Vous vous êtes donc basée sur la recommandation d'un noir ? Avez-vous conscience que ce sont des sans-âmes ?
Ça c’était fait. Si elle confirmait, elle se mettait en faute face à l’Église. Mieux valait selon lui nier et ainsi se noyer dans la confusion d’une justification. Ainsi, il pourrait la montrer comme fausse et indigne de confiance. Il ne s’arrêta pas en si bon chemin enfonça encore le clou.
-Confirmez-vous qu’il n’a donc soigné que votre amie ? Ou avez-vous aussi eu des échanges avec l’accusé ? Avez-vous vous-mêmes des affinités avec les pratiques de sorcellerie puisque vous vous dites envoûtante ? En ce cas, est-ce l’accusé qui vous les a enseignées.
Bien. Voilà qui était fait, encore une fois. Ce serait, il l’espérait, suffisant pour lui faire peur et lui renvoyer à la face ses insolences. Il se tourna ensuite vers Nehalan. Plus délicat, aussi prit-il un air compatissant avec le jeune homme.
-Je souhaite que Dieu puisse entendre et exaucer les prières de vos parents quant à votre santé. Concernant l’accusé et votre témoignage, comme vous avez décrit votre état comme grave et confusant, êtes-vous sûr que c’est bien cet homme qui vous a soigné qui se tient ici si vous ne l’avez pas vu ? Vos parents pourraient-ils confirmer ?
S’il s’était trompé ou s’il doutait, cela suffirait également à remettre tout en question. Mais au cas où, il conservait sa théorie bien rangée dans un coin de sa tête. Il se tourna ensuite vers la brave dame Berthe vers qui il inclina la tête.
-Je loue Dieu qu’il ait permis à votre enfant de vivre et je prierai pour que sa bonne santé dure longtemps. Vous dites que l’accusé a certainement soigné d’autres enfants ? Avez-vous des exemples par chez-vous ou pas du tout ?
Si oui, il restait dans sa théorie, un enfant de temps en temps pour sauver la face. Si non, il l’appuyait encore davantage. Un coup d’éclat avec un enfant innocent pour bien faire pleurer les dames comme elle dans les chaumières et le tour était joué, on le louait comme un saint et il pouvait de l’autre côté mener ses activités illicites en toute impunité, en cachette.
Plus délicat encore, vint les questions au Premier Conseiller. Il décida de partir d’abord sur quelque chose de léger :
- Cette esclave que l’accusé aurait soigné, était-elle infirme ?
Voilà, maintenant il allait voir. Quoiqu’il en soit, elle restait une inférieure, une sous-femme, soit une infâme de la même classe que le sorcier. Tout cela resterait donc parfaitement logique. Il serra un peu les dents, pesant chacun de ses mots avant d’enchaîner.
-La question suivante m’est plus difficile à vous poser et j’espère que vous ne la trouverez pas impertinente : avez-vous remarqué un changement en vous depuis sa venue, des images qui vous apparaissent de façon étrange ou des visions qui ne semblent pas être cohérentes avec votre esprit ? Comprenez que je puisse craindre, si le comte de Monthoux voit juste, qu’un grand de notre Empire soit tombé sous sa coupe !
Il espérait avoir été assez précautionneux… Il ne s’agissait pas de froisser un témoin qui pour l’instant restait relativement neutre, dans la grande sagesse et impartialité qu’était la sienne. Enfin, il se tourna vers Louise, qu’il jugea d’un regard bien méfiant.
- Vous avez parlé de votre aventure avec une petite esclave. Cependant, comment avez-vous entendu parler de ce guérisseur ? Pourquoi pas un médecin ?
Ses yeux se firent plus sévères.
-Vouliez-vous, en réalité, apporter une autre disciple à votre maître et lui laisser tourner l’esprit d’une pauvre enfant ?
Pour cela, il semblait avoir retrouvé quelques accents de colère. Il ne laisserait pas Cassandre être ainsi maltraité et sous emprise. S’il apprenait qu’elle l’était, malheur à celui qu’il fixait de nouveau d’un regard incendiaire !
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
- Lui tenant à l'oreille - Dame Despina, je suis sincèrement...
- Sans quitter Coldris des yeux, elle le coupa tout aussi bas - Idiot… Il n'a fait qu'aboyer, la meute n'a pas encore mordu. Regagne ta place, prestement !
Effectivement, il avait « demandé », mais réponse n’avait pas encore été donner. Observant le coin du jury, il sembla y avoir bien du remous ceux-ci, qui finirent par déclarer : « Le témoignage de Dame Cordélia McDan est retenu. Veuillez poursuivre l'audition des témoins. » pas signe, pas un regard de la part de la Donna. Juste un semblant de sourire. Ou peut-être juste à leur attention, question de politesse un « Je vous en remercie ». Non, ce n’était pas fini, à sa suite, s'en suivirent 2 tristes individus qu’elle reconnut. Non pas qu’elle les connaisse personnellement, mais se tournant vers Winton, elle les avait remarqués. Remarqué se moquer de celui-ci. Le géant non plus, ne les avait pas loupés... Qu’ils soient témoins à charge, ne l’étonna alors nullement.
Des maux de tête, trouble de la vision… Des saignés à plusieurs reprises, mais quelle bêtise ! Et ils se demandait pourquoi ces troubles… « mais cela ne faisait qu’empirer » ce qui n’étonna donc pas Despina. « Je l’ai retrouvé vomissant » certes, toutes les femmes ne vivait pas la maternité, de la même manière, mais elle-même avait été victime de nausée pendant… Qu’elle était enceinte. Cela n’avait pas durée longtemps, c’était juste au début. Leandro la pensée malade… Cruel dilemme : elle voulait venir avec lui, mais ne voulait pas l’empêcher, d’accomplir son devoir. C’était sa faute… Tout était de sa faute… Elle n’avait pas perdu son bébé… Elle l’avait tué, elles les avaient tués, Leandro, et le bébé… En prenant la mauvaise décision… « Il… Il a tenté de sauver mon petit. » elle n’a rien pu faire. Elle ne pouvait rien faire. Elle était, impuissante…
- De nouveau, encore, la main de Winston se pose sur son épaule – Tout va bien Dame Despina. Ne… Ne vous laissez pas sombré.
- Séchant rapidement une larme, se tournant vers lui – E-Evidement, que – dans tour vers Winston, elle capte Coldris – je vais bien.
Qu’arrivait-il donc, au vieux flagorneur ? Les affres de la vieillesse qui le rattrape ? Lui si excellent ! Si… Si troubler. Winston voyait qu’il se passait quelques choses, mais c’était au-delà de sa portée, Despina elle le voyait. Elle le reconnaissait… Elle l’expérimentait, bien plus d’une fois par jour. Elle aurait pu, dans d’autres circonstances, pensée qu’elle pouvait en tiré avantage. Non. Non. Elle reprit le procès en cours de route, c’était alors au tour d’un libraire : Romain Bellanger. « Ces êtres sont des démons ! Je le sais bien ! J'en ai élevé un ! » Parlait-il bien, d'un enfant ? De son propre enfant ?! Quant à l’histoire du chirurgien qui dit « n'avoir jamais vu chose pareille » bah voyons ! Quel type de médecin, n'a jamais vu de grossesse gémellaire... Ne serait-ce qu’en théorie, dans son enseignement ? Elle demandera bien sûr, au même médecin qui avait ausculté Soraya, pour confirmer qu’elle allait mieux. Par contre, comble de la « bêtise » "une profanation de tombe", plus à cause de « Assommé de ses monstrueuses béquilles ! » Et tout le monde évidement, semblait trouvé cela normal… Il y a bien 10 jours elle avait parlé de sa jambe casser, ou après un certain temps elle avait eu besoin elle-même de béquille. Ce n’est pas si facile que ça, de tenter de frapper quelqu’un, et de garder l’équilibre, et elle le savait par expérience – Winston pour être exact… Qui a bien évidement dû, la ramasser par terre… - Alors quant à un infirme comme Hyriel, ayant semble-t-il continuellement besoin de béquilles pour se déplacer, se défaire de celle-ci pour creuser une tombe ! Car pendant qu'il devait creuser, de préférence avec une pelle... Comment tenir debout !
Evidemment, l'accusé s'insurgea, normal. La spontanéité de sa réaction, ses arguments et ce "Bellanger le soutient car il veut se venger de son fils infirme comme moi"… Présente incognito -ou presque- elle savait maintenant, sur quelle liste mettre ces deux hommes : l'un négociant en tapis, l'autre un libraire, c'était noté. C’était cependant, sans oublier, certain chuchotis et regards en coin... A son encontre. Ils pouvaient parler, elle n’était pas une « professionnel » du témoignage, si tant est que cela existe, il n’avait qu’à le faire eux, cette bande de couards hypocrites ! Elle avait, et continuait à ronger son frein, oh s’il trouvait qu’elle avait dépassé les bornes, qu’ils viennent le lui dire en face… Elle leur donnerait de quoi, avec toute la douceur et délicatesse dont elle était capable ! Oh oui elle a "Remis en question", le fait de jurer sur les évangiles... Elle en sourit en même, car voilà bien des gens qui avait dû les lires, aussi souvent qu'elle, des gens très instruits de ces choses donc... D’ailleurs sur la question, arriva le coureur de rempart clerical.
Ce fut donc à décharge qui plus est, tiens donc ? Quoi que ce soit qu'il dise, elle devait garder son objectif de demain en tête ! Surtout, qu'elle l'avait bien entendu "Le premier que j'entends prendre la parole pour troubler inutilement ce procès verra ses péchés dénoncés en chaire dès demain." Avait-il alors parlé pour eux, ou pour lui ? Surtout en entendant la fin du témoignage de celui-ci. Tout avait semble-t-il été si parfait, elle en fut même surprise, mais la fin, n'avait pas justifier les moyens. Un père... Père, avait-il avouer. Comment, cela ce pouvait-il ? Détails donc à noter, que cela avait fini en règlement de compte, en rouge et noir. Le curé défroqué, n’eût alors pas la même chance qu’elle « Le témoignage du père d'Anjou est déclaré comme nul et non avenu, pour ses abus au sein du clergé, son manque de dignité à exercer pleinement sa fonction, et ses insolences envers Son Éminence. » il semblait qu’elle avait été « insolente » aussi, selon le vieux grigou, et avoir en plus « blasphémer », toujours selon celui-ci, définition qu’il devrait peut-être revoir, soit.
Vint alors, un charmant jeune homme, un véritable plaisir pour les oreilles - et les yeux… What ?! Despina ! Couchez sale bête ! Couchez ! – le jeune garçon exhalait le parfum même de la naïveté de l’innocence. Quel verbe, quelle éloquence, malgré ses quelques petites hésitations, dans ce témoignage qui plus est : à décharge. Elle lui demanderait bien quelques leçons – Couchez ! Couchez j’ai dit Despina ! Retourne dans ton bac à sable ! – Hum… En l’écoutant, elle espérait de tout cœur, que le pauvre jeune homme ne se ferait pas trop dévoré par la vie. L’innocence contrairement à ce que l’on pouvait en dire, était si précieuse. S’il pouvait rester ainsi, le plus longtemps possible… Pour elle c’était trop tard, on la lui avait prise bien tôt, trop tôt. Quand celui-ci passa à proximité d’elle, elle ne put s’empêcher de se lever et d’applaudir silencieusement, et dans un sourire :
- Vous avez était, excellent, Mr.De TORIENEL – S’inclinant comme devant n’importe quel Seigneur –
Cependant, ayant à peine repris sa place les portes du tribunal explosèrent ! Non, mais c’était tout comme ! Et qui était donc arrivée : l’excellent Dyonis… Etc… De Frenn – Oui, son identité à lui était quand même plus longue que la sienne – qu’il a vu en ce début d’après-midi même. Si elle avait su, elle serait venue – Et surtout si Winston lui avait fais sa requête plus tôt… - elle serait venu avec lui. Certes, peut-être en retard, mais il n’était jamais trop tard pour bien faire ! Le pauvre venait à peine d’arriver, qu’il était déjà en rouge et en sueur, le voyage jusqu’à ici ? Peut-être, les affres de l’âge ? C’était aussi possible, ça lui allait en tous cas mieux, qu’à l’autre – Oh Despina, c’que tu peux être désagréable… - toutefois, elle aperçoit là encore l’enquêteur hors-pair, à la recherche de la moindre information visuel, tous comme elle l’avait elle-même avant le début du procès. Quand elle le sent, elle le sait, elle sourit de nouveau ; ce n’était pas si difficile non plus, mais il l’a vu. La question était, pourquoi sa présence, ici ? « V... Votre Excellence désire... » sert alors d’introduction à « Témoigner » simple, clair, et précis – Pas comme certain(e)… - il début donc son apport au procès, à décharge ! Tiens donc ? Entre un curé – défroqué certes – absolvant le pseudo-sorcier, et le 2nd homme du gouvernent se déplaçant exprès pour celui-ci, à sa décharge. Ce procès ne manquait pas de délicieuse surprise, et quel prestance – Tu, te, CALME ! - « Hyacinthe, donc, me livrait contre la récompense offerte par l'Empire le sanguinaire Martin de Zakros, dont il sera inutile de rappeler à cette barre l'énormité des crimes. » Cet Hyriel, un héros national ? Voilà qui devait faire saigner les oreilles de certains – Et Despina, ça l’amuse – forte heureusement, l’on pourrait compter sur ces messieurs de la médecine présent aujourd’hui, mais ce n’est pas finis, lui aussi, une de ses « meilleurs amies » à eût recourt aux soins d’Hyriel – Mais comment elle jubile intérieurement… - mais il est vrai, que plus sérieusement : cet Hyriel, ne méritais vraiment pas, le bûcher. Elle aurait tellement voulu exprimer pleinement sa joie, son contentement librement… Quelle frustration !
Il était cependant dit, qu’un bonheur n’arriverait point seul : 2 autres témoins à décharge, pour le compte, DES accusés, cette fois-ci. Elles aussi, simples et concises. Toutefois, le deuxième plus son attention « J'espère bien changer d'vie aussi vite que j'trouverai un aut' travail, mais c'est pardi pas facile. » aussitôt, elle fait signe à Winston, et lui demande tout bas :
- Winston, noté Tiphanie DUBOIS. Si ce n’est pas facile, et si elle le désire tant, je peux peut-être lui faciliter les choses.
- Bien Dame Despina, après ou avant ma mission de l’avocat ?
- Sans mauvaise plaisanterie, elle sera plus rapide à sortir de ce lieu.
- Bien Dame Despina, comme vous voudrez.
Elle avait des champs, une bergerie, des chevaux… Edenia était rempli d’activité, elle lui trouvera bien quelque chose, si elle souhaitait réellement changer de vie, au plus vite. Si les accusés était condamné, elle ne serait pas venue non plus pour rien. Quand malheureusement, cette ambiance de ciel bleus et d’oiseau chantant la mélodie du bonheur en chemin, fût souillé par l’entrée en scène de cette orchidoclaste grassouillet de comte de Monthoux, et sa chiabrena d’intendante… Oooh tout deux faisaient un merveilleux couple d’arrière-faix de truie larde ! Bah quelle horreur, on aurait dit la même gelée qu’à la cour d’Angleterre, quand il secouait la tête ! Surtout pour sortir des âneries, rien que d’y pensée, elle dû réprimer un haut le cœur. En plus « La malheureuse princesse djerdan, grâce à Dieu secourue par une novice de Son Éminence à l'instar de ma fille » quand elle pense au Cardinal, elle se demande alors bien ce qu’a pu faire la dite novice… Mais la nausée n’était pas finie ! Non, non non ! Il a osé attaquer son… Le premier conseiller ! Elle se pinça si fort les lèvres, retenant sa respiration, les poings serrés, elle devait rouge à faire peur ! - Le Frein Despina ! Le frein ! Le Frein ! – parce qu’il fallait ENCORE supporter l’autre, qui tous ce qu’elle avait à dire se résumé à « J’ai trouvé des mauvaises herbes dans mon lit c’est diabolique ! » elle avait envie de lui dire, que le seul fait que l’on puisse trouver quoi, ou qui que ce soit dans son lit, été insensé mortecouille !
La délivrance, arriva-t-enfin quand ils reprirent leur place ! Elle se senti alors revivre – Elle le sentirai encore plus, avec un bon verre de vin, une bouteille, non… Déjà Avec l’autre Vicente elle s’en était promis 2, et bien ce sera 3 en rentrant ! – Oui, parce que ce n’était toujours pas terminé : l’heure des questions de l’accusateur, le Cardinal, aux témoins, à l’avocat et aux accusés… Oh bon sang. Elle n’était pas sortie de l’auberge… Ainsi le juge posa ses questions, et alors que la question de la femme avait été la dernière, c’est elle qui répondit la première. Après quoi Hyriel repris… En fait, abstraction faite des circonstances, ils formaient un joli petit couple, se protégeant l’un l’autre, c’était déjà largement mieux que le précédent…
Il allait pourtant encore falloir, encaissez l’emplumer écarlate… C’était le moment de « l’interrogatoire », et cela ne présageait rien de bon. Le Cardinal se levant, elle senti un léger frisson la parcourir. Ce n’était pas vraiment de la peur, non. C’était de l’appréhension – Qui pouvait s’apparenté à la crainte, non ? – elle ne le craignait pas lui, aucunement, non, mais elle. Allait-elle tenir, s’il « s’attaquait » à elle ? Elle le savait, sa pseudo-anonymat ne l’était sûrement déjà plus pour certains, et l’enquête de Dyonis sur elle plutôt, le confirmait. Elle ne le serait plus pour très longtemps… Peu importe, elle n’avait menti à aucun moment, mais c’était ses projets qui étaient en périls, ou plutôt son projet final. Il commença évidement son office, par l’avocat de la Défense. « Avocat, j’aimerais savoir d’où vous viennent ces références païennes citées tout au long de votre discours ? Vous ont-elles été enseignées par l’accusé ici présent ? » références païennes, références païennes… On appelait cela de la culture, bougre d’âne rouge ! Depuis quand était-ce un péché, d’avoir de la culture, d’être instruit ? Mais elle ne craignait pour cet homme, elle avait confiance en lui, e la répartie qu’il donnerai à cet agité de la robe. Quand il se tourna vers elle…
Son cœur se mit à battre plus que de raison, mais elle prit sur elle. Elle respira lentement, sereinement, l’accusateur tira ses traits enflammé… Directement sur Winston. Oui, il ne l’avait pas nommé, mais pourquoi sinon, ces questions « Vous vous êtes donc basée sur la recommandation d'un noir ? » elle ferma les yeux, alors que celui avait enchaîner d’une flèche en plein cœur « Avez-vous conscience que ce sont des sans-âmes ? » elle hésitait à tourner les yeux vers Winston. Elle hésitait à beaucoup de choses à cet instant précis… Les yeux toujours clos, elle se pinça fortement les lèvre… Comment ne pas se trahir, comment ne pas trahir Winston, Soraya ou… Elle se sentait coincé, prisonnière, frustré… Comment osait-il, traité des gens de sans âmes au nom de… L’Eglise.
Tous s’éclaira soudainement, l’église – Elle ouvre les yeux – elle avait Winston. Elle savait pourtant, à quoi s’attendre de la part des gens, des « grands » de ce monde, mais à quelques exceptions, cependant, semblait-il : Dyonis, au coin de l’œil. Ce n’était pas le preux chevalier qui la délivrerait, du dragon rouge, voulant rôtir cet homme et cette femme, de ses flammes : Ils étaient dans le même bateau. Il avait certainement, ses « sordide » petits secrets, comme chacun, comme elle, mais… Il n’était pas les autres. Tournant la tête vers Winston, celui-ci lui sourit, et s’inclina légèrement… Pourquoi ? Elle savait pourtant, à quoi s’attendre de la part du monde, pourquoi paniquer ? Elle s’était préparée. Celui-ci était passer à d’autres questions, elle revint donc à lui « Confirmez-vous qu’il n’a donc soigné que votre amie ? Ou avez-vous aussi eu des échanges avec l’accusé ? Avez-vous vous-mêmes des affinités avec les pratiques de sorcellerie puisque vous vous dites envoûtante ? En ce cas, est-ce l’accusé qui vous les a enseignées. »
Ainsi, elle ferma de nouveau les yeux prit une profonde respiration, puis sourit.
Il s’agissait, de ne pas essayer d’être la plus maline. Juste de dire la vérité. Elle se rappelait son témoignage, et il semblait que… Lui non. Elle s’avança d’un pas, vers l’éminente personne du Cardinal :
- Veuillez excusez, votre éminence, la possible maladresse que je vais avoir, mais il me semble que vous n’avez pas tout à fait prêté attention, à mon témoignage – Dit-elle très sereinement, se tournant vers juges et jurées – si vous le permettez, vos honneurs et jury, avec le concours du greffier, je souhaiterais rappeler que je n’ai jamais mentionné, que c’était un homme d’ethnie d’africaine - Assez ! De dénommer les gens, par leur couleur de peau ! – qui m’avait recommandé l’accusé. J’ai bien dit « l’un de mes employés » - Elle attends confirmation du greffier - qui si vous le souhaitez, tous comme ce médecin dont je vous ai parler, qui se nomme Réginald DeBRANCOURT, peut venir se soumettre à la question. Clint ZILLIAN, un Monbrinien donc, bien de chez nous. – ça, c’est fait. Elle revient au Cardinal, pour la question « épineuse » - quant au fait, que les personnes d’ethnies africaines, soit sans âme… Je ne sais sur quelle base, cela est affirmer. N’est-ce point là une superstition ? Car je me range moi-même, évidement, du côté de l’Eglise votre éminence. Car selon ce que j’ai appris de mes précepteurs, de vos confrère, l’Eglise même, en la personne du Pape Paul III, définit dans deux de ses lettres, que – Allez, petite effort de mémoire, allez ! – Oui ! Que les Indiens, considéré eux même avant cela, comme sans âme, était de « véritables êtres humains » - Avec une âme donc – quel rapport avec Winston me direz-vous – Appelons un chat, un chat, il est noir, c’est le meilleur exemple. – l’une de ses lettres « Sublimis, Deus » dit « les dits Indiens et tous les autres peuples, qui peuvent être plus tard découverts par les Chrétiens » en parlant de l’acquisition de la foi chrétienne, entre autres domaines. Lettres – Oh se sourire subtile cacher – que vous devez, je suppose, connaître, votre éminence, en votre qualité de Cardinal. Afin de nous en partager, les sages enseignements.
Elle aurait pu parler du fait, que ses lettres « interdisait absolument » l’esclavages en lui-même… Mais elle n’était pas là pour changer le monde, non. Ce monde, ne se changerait pas en un jour, juste dans un procés. Elle avait laissé planait un « suspens », quant à ce que contenait ces lettres dans son « entre autres ». Entre autres, qu’elle ne se gênerait pas de dévoiler, comme à tous ceux qui lui avait reproché, d’être ami avec des « sans âmes ». Le Cardinal, irait-il à l’encontre ce qu’elle venait de dire, voire de citer. Dire qu’un pape a menti ? Serait-il aussi défroqué, moralement, que ce Thierry d’Anjou ? Elle le saurait bien vite, mais elle passa à la suite :
- Du reste, non, votre éminence, le prévenu n’a soigné personne d’autres, que Soraya, sinon je l’aurai dit. Soraya, qui je le confirme, et l’affirme, va très bien, et ne souffre d’aucune… Bizarrerie diabolique, elle est pour ainsi dire, restait la même, et en bonne santé. Je confirme aussi, que l’accusé et moi, n’avons eût aucun échange. J’avais alors d’autres chose à faire, à cette époque, que de palabrés inutilement, alors que les affaires de mon domaine requarrait mon attention. Mais ainsi que je l’ai précisé, dans mon témoignage – Elle soupire, quelques peu coupable – j’ai « épier » monsieur, à quelques occasions, entre deux affaires, mais quand je voulu faire, convenablement, sa connaissance et le payer pour sa peine, il n’était plus là – se tourne vers Hyriel – et je m’en excuse – revient au Cardinal – quant à ce qui est, des pseudos-affinités à la sorcellerie que vous me prêtez, ce qui pardonnez-moi, mais s’apparente assez à de la diffamation – Aïe… Bon ça passe, ou ça casse… - j’ai bien précisé, que l’on disait de moi, que je suis envoûtante, pas que je me qualifiais moi-même d’envoûtante. Mais si le fait de s’apprêter convenablement, afin d’être d’une apparence agréable au gens, est considéré comme de la sorcellerie à Monbrina, l’on ne m’aura pas informé. Sur quoi, je vous pardonnerai bien cette, diffamation, faite je l’espère, bien malgré vous. Et m’excuse tout autant, des possibles maladresses, que j’aurai pu avoir à votre égard, dans ce temps de paroles. – Elle s’incline alors convenablement, devant éminence – Votre éminence.
Bon, ça c’était fait. Maintenant… Il fallait ENCORE attendre, les autres. Il y eut après elle, le jeune Torienel, qui chercha à noyer dans le doute. Cette Dame Berthe « Vous dites que l’accusé a certainement soigné d’autres enfants ? Avez-vous des exemples par chez-vous ou pas du tout ? » à quoi ce serpent, s’attendait-il comme réponse, et pour quelles raisons ? Des questions qui semblaient bien fade, mais qui cachait certainement de subtilités obscures. Quand arriva alors, le tour du Premier conseiller. Qu’allait-il lui réserver ? En qu… Mais oui. Il cherchait potentiellement, à se basé ses prochaines accusations, sur des généralités, un effet de masses ? Surtout, comme elle l’avait compris, avec les infirmes… Quel enflures… Oui, il avait bien intérêt, à peser ses mots avec le Sieur DeFRENN. Elle s’en voudrait, qu’il finisse par se balancer lui-même au bout d’une corde – Pas très chrétien ça, comme pensée Despina – Déjà sa fine et aiguisée amie la démangeais - Alors ça non plus, encore moins… - quand arriva le tour la prévenue accompagnant Hyriel. Mais là, quelque chose avait changé, cela sembla plus personnel : cela se ciblait, sur « une petite esclave » une esclave qui soudain devint « une pauvre enfant ». Il en faisait une affaire personnelle. Un lien spécifique avec elle ? C’était un ecclésiastique, pas d’enfant : une nièce ?
Invité- Invité
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Roméo Menthon, 24 ans
Négociant en tapis
Roméo remercia d’une profonde inclinaison du buste le Cardinal pour sa sollicitude qui le touchait profondément. Il n’avait besoin de rien à part de vengeance.
À la prise de parole du ministre de la guerre, Roméo opina vigoureusement du chef. Il était temps que cesse cette insolence blasphématoire ! Où était donc passé le respect dû au Clergé ? Il fut néanmoins surpris de découvrir que cette requête prêtait à discourir et pire encore, à s’achever sur un échec.
— Pleutres ! lança-t-il du fond de la salle.
Il fut rappelé à la barre par une question du Cardinal. Il resta pensif un instant. Était-elle plus grosse ? Oui ce n’était pas faux. Ceci dit, elle passait son temps à se gaver de nougat à longueur de temps… Il hésita à mentir mais, au fond, répondre avec honnêteté, donnerait plus de poids encore aux allégations de l’accusateur en concédant ce point qui le ferait passer pour raisonnable et objectif face aux témoins.
— À bien y réfléchir, je pense que c’était effectivement le cas. Je n’ai pas fait le lien sur le moment, notamment à cause de son mal-être. Peut-être n’était-ce là qu’un cadeau de Dieu et non du Diable, mais cela ne change en rien mes propos sur son décès. déclara-t-il avant de s’incliner et de prendre congé des jurés.
Coldris de Fromart- Ministre des Affaires étrangères - Ami du grand prêtre du Lupanar
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Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Le cardinal l'ignorait et se tournait vers les juges demander pour demander le retrait de son témoignage. Classique. Il existait une faille et ses paroles pouvaient causer un certain tort. Par conséquent, cela se révélait logique de les censurer. Les procès fonctionnaient ainsi : on ne cherchait pas la vérité, on affirmait sa vérité. Le prêtre eut cependant une surprise en l'entendant mêler le nom d'Alexandre à sa démonstration puis se rappela une rencontre avec son fils, quand celui-ci défendait le barbare zarkotien, où il avait énoncé avoir tout révélé de ses sévices à son maître. Il s'étonna cependant bien plus d'entendre Matthieu louer la vertu d'Alexandre et lui reconnaître des qualités. Ses lèvres se pincèrent. Il avait beau le détester, son honneur de père le retenait de trop blesser un homme qui encensait son enfant.
Alors, quand le cardinal revint vers lui pour se défendre sur l'incident du baptême, Thierry répondit de manière beaucoup plus calme.
« Ce jour-là, si vous rappeliez mieux, vous vous souviendrai que j'ai eu un coup de sang lorsque vous faisiez une scène chez votre sœur et surtout quand vous osiez déclarer que la nourriture terrestre était vile. Une colère impulsive, sans calcul, pour laquelle, je me suis excusé quand nous nous sommes revus à l'église. J'ai même proposé que vous baptisiez votre neveu en geste de pardon. Vous étiez invité à vous joindre à nous. Si vous êtes resté à cette colonne, loin, ce n'est que de votre décision. »
Il l'attaquait à présent, mordait même pour rendre les coups. Thierry dissimula un sourire et se refusa à les rendre. Au contraire, jouer les bons curés, sensible au pardon face au vilain inquisiteur austère, cela serait beaucoup plus marquant.
« Matthieu... »
Le prêtre s'exprima sans la moindre insolence dans la voix, prenant un regard navré.
« Un jour, vous serez âgé, savez-vous, avec de l'expérience, mais aussi des regrets ? Nous avons beau croire au Paradis et la Vie Eternelle, celle que nous devons vivre en entendant ici-bas est longue. Si vous persistez dans l'intransigeance, elle deviendra même étouffante. Dans votre cas, vous avez au moins la chance d'avoir pu choisir votre vocation. Certains prêtres ne le sont que parce que leur famille les y pousse. Il viendra cependant un jour où à force de ne sonder que le mal, de croire le décéler partout, vous éprouverez une solitude terrible. Une solitude effroyable. Prenez-y garde et apprenez à établir des liens. Ou sinon... »
Son regard se remplit d'une tristesse qui, pour une rare fois, n'était pas feinte.
« Ou votre vie, Matthieu ne vaudra pas mieux que la mienne. Elle sera aussi pitoyable. »
Sur cette dernière parole, Thierry se retourna et rendit ses bésicles à Lénius.
« Je regrette, mon cher, de ne pas avoir pu faire plus. Le restevous appartient. »
Il posa la main sur l'épaule du troubadour dans un signe d'encouragement, puis marcha vers les accusés pour toucher leur main à chacun.
« Courage, mes enfants. »
Peu après, le prêtre commença à s'éloigner pour revenir dans le public, d'un air digne, avec celui d'une personne dont la conscience serait en paix. Il s'immobilisa soudain et se retourna vers le cardinal pour l'interpeler. Cette fois, Thierry se composa un visage réellement feint, simulant un sourire doux :
« Matthieu... La véritable victoire, c'est de reconnaître quand l'on doit cesser de s'obstiner. »
Sans attendre la réaction du cardinal, malgré son envie de connaître comment celui-ci prenait cette ultime provocation, le prêtre disparut dans la foule pour retourner dans cette anonymat d'où lui pourrait tout surprendre du déroulement de ce procès. Il tourna un bref instant la tête pour croiser le regard de son ami Coldris et échanger discrètement une œillade complice.
A ce moment, Thierry le fit se relever et réclamer au nom du Roi la sortie de la dame qui l'avait préalablement importuné et permis des insinuations douteuses lors de son témoignage. Cela ne pouvait effectivement passer. Néanmoins, les juges ne tinrent pas compte de l'intervention du puissant ministre. Uniquement celle du cardinal. Etrange. Qui pouvait être cette femme ? Le prêtre se jura de le découvrir. Et quand ce serait fait, il apporterait avec satisfaction toutes ces bonnes informations à son ami. Le religieux fixa les juges qui venaient de faire connaître leur décision et leur souhaita, pour leur propre bien, que cette Cordélia ne dissimule aucun secret louche ou leur existence confortable ne serait plus. Le grand Coldris de Fromart ne se contrariait pas : principe de survie.
En cherchant une bonne place, Thierry remarqua la présence du fameux Borélion, se rappelant aussi des informations qui le disaient de retour dans la capitale, et songea à s'installer près de lui. Nouer de bonnes relations avec les gens d'influences n'était-ce pas sa spécialité ?
« Bonsoir, sieur Borélion, j'avais bien entendu ouï quelques rumeurs de votre retour en ville. Seriez-vous venu à ce procès dans l'espoir d'une inspiration ? Il y a sûrement matière à écrire belles intrigues que votre talent rendrait, comme pour chacun de vos ouvrages, passionnantes ! »
Il tourna la tête vers la dame qui l'accompagnait et adressa un sourire avant de la saluer convenablement.
« Cette belle jeune femme serait-elle une de vos parentes ? Ou une amie ? Je suis enchantée, madame, de faire votre connaissance. »
Le prêtre entendit à ce instant un nouveau témoin se présenter à la barre et tourna la tête pour apercevoir le garçon qui venait de prêter serment. Il rit intérieurement en le reconnaissant puis s'exclama pour ses deux voisins, railleur :
« Je ne savais pas que les enfants pouvaient témoigner de nos jours. »
Le garçon commençait en s'excusant de ne pas être un bon orateur du afit de son âge. Thierry songea que ce serait amusant de réaliser un commentaire de l'exercice de style pour ses deux voisins.
« Nous devions aisément qu'un enfant ne pourra jamais posséder le talent oratoire que disposerait un grand auteur. »
L'enfant plantait le décor de l'histoire et brossait un cadre d'une famille chrétienne mais il se perdait trop dans le détail.
« L'introduction est bien pensée mais les détails rendent confus le discours. Il perd notamment l'auditeur à évoquer les infusions de sa nourrice. Dans un roman, les disgressions sont les bienvenues et enrichissent le caractère d'une scène mais dans l'ort oratoire les phrases ne doivent avoir qu'un seul but : convaincre. »
La suite se révéla encore plus longue et peu utile. Personne ne se souciait d'entendre son opinon sur les avortements s'il n'avait rien à dire dans le cadre de l'affaire.
« Là, il se perd complètement sort du sujet. Quel dommage ! Il possède une bonne éloquence mais l'art de réaliser de superbes phrases n'est malheureusement accessible qu'à quelques élus. »
Le garçon se permettait à présent d'interpeler le cardinal et l'interroger sur la nature de l'accusé. S'il avait pu Thierry aurait éclaté, avant même d'apercevoir la tête de Matthieu. Quel bonheur que les enfants candides : ils se permettaient l'insolence, sans penser à mal, et cela donnait chaque fois à des scènes délicieuses.
« Il a ici perdu toute idée de son témoignage et prend trop libertés. Certes, il parle bien, mais trop vite, sans avoir eu le temps de réfléchir. Quel dommage ! »
L'enfant, après un long passage, se retira alors qu'une entrée remarquable se fit. Thoerry se tourna et découvrit Dyonis entrer. Il réclamait même de témoigner.
« Que de coups de théâtre, mon cher Borélion, décidément ! Auriez-vous imaginer cela ? Notre Premier Conseiller ici ! Décidément, cette histoire devient incroyable ! »
Il écouta cependant avec attentionet en silence les paroles de son ennemi. La plaidoirie se révélait intérrésante. Surtout cette intervention salutaire dans le cas du monstre de Rottenberg. Si Lénius se débrouillait bien, en insistant sur ce point, il pourrait faire reconnaître un service rendu à l'Empire. Le bûcher s'éloignerait. La grâce royale pourrait d'ailleurs intervenir. Comme cela avait eu lieu, heureusement pour Alexandre et Tristan. La suite, sur les soins prodigués à cete esclave mlatraité par le fou sanguinaire, le laissent sceptiques. Là encore, l'inquisiteur aveugle déclarera que Hyriel aurait envoûté la jeune fille. Peut-être Dyonis aussi. Du fait de son crochet, cet imbécile risquait de suggérer que son infirmité le rendait vulnérable à la suggestion de la sorcellerie. Il soupira.
« Les jeux sont faits. Il ne reste qu'à aller chercher les fagots et l'huile. »
Deux femmes du peuples, une mère de famille et une catin, se présentèrent pour défendre les accusé. Cela atténuerait peut-être les charges. Quoique... Avec unhomme aussi aveugle que le cardinal Cassain, il parierait que celui-ci saurait se retourner leurs paroles à son avantage. Il lâcha à ses voisins le bon mot qui s'improvisa dans son esprit :
« Il est bien plus difficile de démontrer l'innocence d'un innocent que de défendre un coupable. »
Thierry faillit ensuite s'étouffer d'apercevoir le comte de Monthoux s'avancer à la barre avec le dragon qui lui tenait lieu d'intendance. Pour ce témoignage, connaissant les liens qui unissaient cette famille à Borélion, le prêtre jugea bon de ne pas le critiquer. Il se rattraperait tôt ou tard avec Coldris devant une excellente bouteille. Tout en écoutant d'une oreille distraite leurs stupidités, il se tourna vers l'écrivain et déclara :
« C'est quelqu'un de bien ce comte, ne trouvez pas. Très ouvert aux hommes de culture et doté d'un goût sûr pour soutenir sa fille qui est votre mécène. »
Les dépositions étaient closes. La parole revenait aux accusés pour se défendre. Ou pour leur donner l'illusion de se défendre. Qui, dans cette, n'avait-il pas compris que les jeux étaient faits ? Il songea un instant à sa petite Claire et se résolut à chercher un moyen de la tenir loin des prochains événemenyts. Si Hyriel brûlait, elle ne le verrait. Il se refusait à la laisser assister à une agonie aussi atroce. Et puis, s'il la retenait quelque part, avec une bonne histoire, il pourrait peut-être réussir à laa persuader que le guérisseur s'en était tiré et vivait loin des ennuis. Elle serait rassurée et passerait à autre chose. Son âme se révoltait tant à cette idée de l'imaginer souffrir d'un deuil terrible.
La défense des accusés se révélait faible. Matthieu n'aurait aucun mal à la démonter. D'ailleurs, il prenait à son tour la parole pour interroger Lénius sur les références grecques. Il murmura faiblement :
« On appelle ceci de la culture, cher cardinal, et comme l'intelligence, moins on en possède, plus on l'étale. »
Il serra ensuite les dents à la question posée à la dame outrageuse et son esprit commença dangereusement àsombrer. Les Noirs, des sans âmes ? Il se revit enfant, quand il pleurait après une méchante remarque de sa mère ou de son frère aîné, et que Catherine, la jeune servante esclave venait le réconforter avec tendresse. Qu'avait-elle pu devenir ? Sa mère de cœur, qu'il avait si peu connu, avait une âme. Ou personne n'en disposait.
Thierry s'arracha aux limbes du passé alors que le cardinal s'attaquait au Premier Conseiller. Combien d'interventions avait-il raté ? Il se maudit de sa faiblesse. A quoi bon contempler les bons moments perdus ? Ils ne reviendraient pas.
Matthieu interrogeait à présent la Louise sur cette petite esclave et soupira sur cette question du médecin. Quel imbécile ! S'il s'intéressait un peu plus au peuple, il saurait que les personnes de cette profession coûtait cher et rechignaient à se rendre dans les bordels. Et surtout il aurait dû se renseigner sur les anciens propriétaires du Lupanar. Quand on dirigeait une enquête, on établissait tous les faits et on ne laissait aucune zone d'ombre.
Dans un souci de rappeler son bel esprit, Thierry se tourna vers Borélion et déclara :
« Nous aurons prochainement un excellent feu pour nous réchauffer de la bise de l'hiver. »
Re: Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]
Son Eminence réclama l’exclusion de ce témoignage. Nehalan nota rapidement la procédure dans un coin de sa feuille. Cette requête, accordée par la Cour, lui paraissait à la fois bonne et mauvaise. Il eut été malséant de conserver une trace écrite de pareil scandale. Cependant…retire le témoignage signifiait également que toute la partie en faveur de l’accusé ne serait pas retenue, or il en avait besoin. C’est ce qui acheva de le décider. Peut-être pourrait-il essayer d’aider le sorcier, à sa mesure ?
Lorsqu’il passait près de la femme en blanc, celle-ci lui fit une remarque qui le gonfla de fierté. Il avait été excellent ! De retour à sa place, il se rappela que cette femme avait quand même failli voir son témoignage effacé, elle aussi, pour insolence et manque de respect. Son compliment lui faisait plaisir, mais pouvait-il vraiment y accorder de l’importance sur la valeur de son intervention ? Il en doutait.
Peu après son passage, un homme fit une entrée fracassante. Au vu du crochet qui étincelait à la place de sa main, et du comportement des juges avec lui, il en déduit qu’il s’agissait du premier conseiller. Quelle prestance il avait ! Quelle dignité ! Et tous ces gens qui s’aplatissaient devant lui… Il venait de rencontrer un homme puissant. Tout dans son attitude glaciale, dans ses phrases simples, directes, clamait la puissance, et tout, dans le regard des juges, dans leur manière de le désigner, témoignait du respect qu’ils avaient pour sa personne.
Les deux témoins suivant le touchèrent de façon autrement plus douce. Ces deux femmes, dont la vie n’avait épargné ni le passé, ni le présent, et n’épargnerait certainement pas le futur, se tenaient face à cette assemblée dragonne, l’une soutenant l’autre. Elles montraient à elles deux plus de courage qu’il n’en aurait jamais. Le bondinet cligna plusieurs fois des paupières. Que lui arrivait-il ? Il n’avait aucun droit de pleurer. Aucune raison. Cette faiblesse se tari aussitôt qu’elle était apparue, avec les deux témoins qui se présentèrent à la suite des jeunes femmes. Ils étaient des personnages importants, pourtant il ne parvenait pas à éprouver de respect pour ce tas flasque et le manche à balais qui se tenait à côté de lui. Tout cela lui paraissait ridicule. Attaquer le Premier Conseiller lui avait mis la puce à l’oreille, comment pouvait-il se permettre une chose pareille ? Il lui semblait entendre un taureau enragé croisé avec un serpent prendre d’assaut tous les personnages importants qui se trouvaient dans la pièce. Il ne parvenait qu’à éprouver de l’antipathie pour ces deux êtres, même s’il n’aurait su l’expliquer entièrement. Il se dégageait d’eux une aura désagréable qu’il ne supportait guère.
Ce fut ensuite au tour des accusés de se défendre. L’un après l’autre, ils endossèrent la totalité des fautes de leur camarade de fortune. Nehalan compris à cet instant que les choses étaient bien plus compliquées qu’il ne l’aurait cru. Si Louise affirmait qu’elle avait agit de son plein gré, elle serait condamnée pour avoir été complice des crimes, elle disait ne pas avoir été envoûtée mais si elle l’avait été c’est exactement ce qu’elle aurait dit, ce qui ajoutait une charge supplémentaire aux accusations qui pesaient sur Hyriel. En voulant l’aider, elle se condamnait elle-même et alourdissait la peine de son ami. Quoi qu’elle dise ou que lui ajoute, rien ne semblait plus pouvoir les sauver, à part les quelques témoignages qui avait été recueillis.
Le Cardinal se tourna alors vers divers membres de l’assemblée, pour les questionner. Il ne prêta guère attention à ce qui se disait, jusqu’à ce qu’il comprenne que l’on s’adressait à lui. Il se redressa précipitamment, de peur de l’avoir trop fait attendre. Il inclina respectueusement la tête pour le remercier de ses prières, même s’il n’avait aucunement répondu à ses questions. Il serait trop impertinent de le lui faire remarquer à voix haute.
« Je suis certain qu’il s’agit de cet homme, Eminence. Sauf votre respect, bien que j’aie effectivement affirmé être très mal en point se jour-là, je sais reconnaître les sons. Son visage me dit vaguement quelque chose, mais l’étrange musique que produisent ses béquilles sur le sol, je puis vous assurer que c’est exactement la même. Mes parents ne sont pas en ville, mais ils pourraient effectivement confirmer mon histoire si la mémoire auditive d’un musicien ne vous suffit guère comme preuve. »
Il allait se rassoir, peut satisfait de la fin de sa phrase, quand il eut soudainement une inquiétude qu’il ne pouvait résoudre que d’une seule manière.
« Ils n’auront pas à souffrir de cette intervention, Monsieur le Cardinal ? »
Si son témoignage venait à causer du tors à sa famille, il ne s’en remettrait jamais. Il voulait simplement aider le sorcier, pas faire subir les conséquences de sa sensibilité à Monsieur votre Père et Madame votre Mère. Il espérait que cette question n’avait pas été prise pour de l’impertinence, tout comme cette histoire de mémoire auditive. Qu’il avait été stupide. Qu’est-ce que cela pouvait changer, qu’il joue de la musique ? Rien du tout. Il aurait eu envie de se donner un soufflet pour ce sursaut d’impulsivité.
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Comme Lucinde semblait maîtresse d’elle-même ! Elle ne faisait que pincer les lèvres ou froncer le nez de temps en temps mais nul doutait qu’elle devait être scandalisée ou transportée à l’intérieur, comme tout le monde ! Comment ne pas l’être quand de telles horreurs étaient proférées ?
Après le témoignage de l’insolente, un homme imposant se leva et réclama l’annulation de son témoignage. On le lui refusa. Mais pouvait-on vraiment annuler ainsi un témoignage ? Était-ce juste, pour l’accusé ? Elle faisait confiance aux juges et aux jurés mais… tout de même…
Lors des horreurs proférées, elle se rassura en sentant sa main sur son épaule et se força à fermer les yeux pour respirer profondément. Le cardinal saurait s’occuper de cela et, elle, elle n’était pas seule et elle devrait réussir à l’aider. Elle en était capable, il le faudrait.
On annula le témoignage du prêtre. Pourquoi ? Pourquoi lui et pas l’autre ? Parce que c’était le cardinal qui l’avait demandé ? Mais il était l’accusation, il pourrait ainsi annuler tous les témoignages qui lui sembleraient trop bons ? Mais comment cela fonctionnait-il ? Comment ?
Elle sursauta quand les portes s’ouvrirent et suivit d’un regard stupéfait l’entrée de cet homme imposant à la main en crochet. Elle porta la main à sa bouche, stupéfaite, quand il se présenta et l’écouta réciter son témoignage. Décidément, cet accusé avait fait de tout ! Et un homme comme le Premier Conseiller ne pouvait mentir ! Cela ferait-il libérer aussitôt l’accusé ? Apparemment non. Peut-être après…
Elle sourit en voyant s’avancer deux femmes courageuses et les recommanda à Dieu dans une prière mentale. Arriva ensuite les anciens employeurs du sorcier. Ils proféraient contre lui des horreurs. Elle sourit toutefois, contre toute attente, quand il évoqua le cas de son épouse et de sa fille. Il n’avait pas à s’inquiéter, elles étaient parfaitement repenties ! Elle croisa alors le regard du cardinal et son cœur se gonfla de fierté. Elle qui avait eu peur d’échouer, elle avait vaillamment réussi ! Cela lui redonnait confiance et elle pourrait aider plein de gens à l’avenir !
Virent ensuite les questions de la cour. La courtisanne répondit la première, s’accusant elle-même, et semblait défendre son ami de la dédire. Pourquoi ? Et lui confirmait. Pourquoi ? Pourquoi s’accusaient-ils ? Et le cardinal semblait aussi perplexe qu’elle… Le sorcier répondit alors aux questions et Cecilia se força à écouter, pour en tirer un enseignement auprès du cardinal ensuite. Vint ensuite son tour de poser ses questions aux différents témoins. Naturellement, l’insolente demeura fidèle à elle-même et il sembla à Cecilia qu’elle se contredisait mais elle n’en était pas sûre. Le négociant nuança toutefois son propos. C’était probablement une marque de sincérité ! Mais, après tout, comment savoir ? Elle se fierait au cardinal. Le prêtre, lui aussi, continuait dans son insolence, comme si l’accusait n’existait plus et qu’ils réglaient leurs comptes entre eux. Le jeune homme, lui, demeura simple et calme. Ce jeune homme irait loin, elle en était sûre ! Elle ne put s’empêcher de sourire à Lucinde pour voir si elle l’approuvait, elle aussi.
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