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Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé]

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Message par Lucinde Tiéran Lun 22 Mar - 12:46

Après les dérives de certains témoins qui ne faisaient que jacasser et troubler l’ordre - au point qu’elle fut surprise que seul le témoignage prêtre soit invalidé - ce fut l’entrée du Premier Conseiller qui attira l’attention de Lucinde. En retard et en sueur. Mais elle ne l’en écouta pas moins partager ses informations.

Les témoignages se poursuivirent, plus concrets et concis que le vaste étalage de sottise qu’elle avait précédemment constaté - malgré ce manque de respect flagrant et dit si naturellement qu'elle crut avoir mal entendu. A retenir : d’un côté, cet Hyriel était totalement démoniaque, et de l’autre, il était absolument adorable. Des deux, il ne respectait pas les lois. Lucinde aurait aimé pouvoir dire que dans ce cas, la condamnation était la conséquence logique - pas forcément au bûcher, parce que ces histoires de sorcellerie ne tenaient pas debout, mais condamnation tout de même. Cette affaire opposait ses deux aspects les plus inconciliables : son goût pour l’ordre inconditionnel d’une part, puis de l’autre son statut de fugitive et son tempérament de battante, prête à tout pour avancer. Son plus grand conflit de valeur. Ce devait être cela qui la rendait si irritable aujourd’hui.

Elle s’enquerrait de temps à autre de l’état de Cecilia… Ses grands tourments semblaient avoir reflué - elle la surprit même à sourire à l’évocation des dames qu’elle avait aidées.

Les accusés se défendaient mutuellement. Bien joli. Cela ne faisait que prouver qu’ils n’espéraient plus grand-chose pour eux-même. Elle apprécia cette clarté dans les réponses du présumé sorcier. Des réponses ordonnées et sensées… Elle ne vit aucune hypocrisie dans sa façon de prendre la faute pour lui : quand une cause était perdue, il fallait réorienter ses priorités. Sauver ce qui pouvait l’être au lieu de s’acharner sur ce qui était vain.

Elle ne se serait pas permis d’en faire la remarque, mais certaines des questions du cardinal, elles, frisaient la mauvaise foi. Elle chassa de son esprit le père endeuillé vengeur qui ne lui rappelait que trop certaines plaies récentes, s’efforça de faire de même pour les nouvelles impertinences de la femme voilée, puis pinça légèrement les lèvres aux arguments du jeune noble… Elle était désolée pour lui, mais elle doutait que la mémoire auditive d’un musicien ait le moindre poids pour l’accusateur qui n’hésitait pas à remettre en doute des éléments plus concrets que ceux-là.

Elle rendit à Cecilia son sourire attendri. Il était vrai que ce garçon était touchant… Avec un peu de volonté et de rigueur - il moins de mièvrerie - il pourrait donner quelque chose. Mais pourvu de le vouloir et de s’en donner les moyens, n’importe qui pouvait atteindre n’importe quel objectif.
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Message par Coldris de Fromart Lun 22 Mar - 15:14




avertissement -Racisme, allusions sexuelles :

Loin de se laisser démonter, Thierry répliqua poursuivant la bataille de chiffonnier qu’il avait déclenché. Coldris roula des yeux. Ce n’était pas le moment de régler ses comptes. C’était le problème avec lui, il ne savait pas faire la part des choses. S’il se présentait en qualité de témoin à décharge alors il devait s’en tenir à ce rôle et laisser celui de Thierry d’Anjou, prêtre débauché et aigri de côté. Enfin, ceci dit, il n’avait pas tort dans sa conclusion et il était parfaitement bien placé pour savoir que le pouvoir était un feu dévorant, quel qu’il soit. Un feu qui devait être circonscrit par des liens forts et stables. Il n’en était que plus conscient maintenant, alors qu’il ne restait plus que de fantomatiques souvenirs pour le contraindre.

Évidemment, Matthieu demanda à ce que les jurés annulent le témoignage. Ce qui fut fait sans discuter. C’était prévisible et malheureusement justifié. Grossière erreur que d’avoir provoqué le Cardinal alors même que son plaidoyer était intéressant.

***

Lorsque la grenouille s’éclipsa, le taureau se leva. Il n’était pas question de laisser passer un affront supplémentaire quand bien même celui-ci ne lui était pas destiné. Étrangement, ce qui n’aurait dû être qu’une simple formalité au vu de la réalité des outrages et de sa qualité de représentant du pouvoir royal se transforma en bouillonnement du murmure. Coldris fronça les sourcils. Il n’y avait pas à débattre lorsque le troisième homme du pays vous déposer une telle requête. Il en pouvait y avoir là-dessous que des choses obscures, à commencer par un soupçon de corruption. Raison de plus pour fouiller l’identité de cette mystérieuse personne qui leur faisait plus peur que le Ministre des Affaires étrangères et de la guerre. Les mains se levèrent et l’impitoyable homme d’Etat nota scrupuleusement le nom de chacune de celle qui était restée à terre. Un regard polaire assorti d’un sourire carnassier fut tout ce qu’il daigna leur accorder.

Fuyez, pauvres fous.

Il se tourna alors vers Matthieu dont il lut brièvement la reconnaissance désolée pour son échec et ignora royalement la grenouille qu’il comptait bien épingler. Mais c’était mal le connaitre que de s’imaginer qu’il s’arrêterait simplement pour avoir trébuché. Rien que pour ce refus, il avait de quoi ouvrir une enquête pour corruption et accointance commerciale douteuse, juste assez pour passer un beau coup de balai dans le milieu de la justice. Tiens, il pourrait sans doute même refiler le bébé au baron, après tout, la moralisation c’était son cheval de bataille non ? Et puis au moins, il ne viendrait pas fouiner chez ses gouverneurs pendant ce temps.

Quand on parlait du loup justement on finissait par l’invoquer. Il était peut-être là le grand sorcier que l’on cherchait : jamais en retard, ni en avance d’ailleurs. Il arrivait toujours précisément à l’heure prévue. Coldris esquissa un sourire : mais un peu essoufflé tout de même. Cela ne l’empêcherait pas de recevoir la couronne de laurier de l’entrée la plus remarquée. Le comte se pencha à son oreille et c’était pour une fois une litanie des plus réjouissantes qu’il s’empressa de compléter.

— Oh je le sais bien, nous avons eu bon nombre de différends politiques à ce sujet voyez-vous. Je m’étonne même de ne point trouver son molosse zakrotien sur ses talons tant il semble l’affectionner. Pensez-vous qu’il ait le privilège de dormir au pied de son lit ? Entre nous, mon cher ami, plus rien ne m’étonne avec le Premier Conseiller, depuis sa prodigieuse nomination. Rendez-vous compte, il a réussi l’exploit d’une ascension plus rapide que la mienne !

Coldris afficha un sourire en coin. Oh, il en tirerait les conclusions qu’il voudrait. Jalousie ou… Sorcellerie. Toujours était-il que personne n’ignorait qu’il était lui-même ministre depuis la succession de Gérald à feu leur bon roi Clément II.

Il suivit toutefois son témoignage avec intérêt, notant au passage l’envoutement et la guérison miraculeuse (ou diabolique ?) de son esclave. D’ailleurs, depuis quand ce dévot de Dyonis fréquentait-il des présumés sorciers ? Ah oui ! Depuis qu’il avait décidé d’occuper le poste de Premier Conseiller. L’espace d’un instant, l’idée d’intervenir pour signaler ce fait à la Cour lui traversa l’esprit. Après tout, il n’allait pas se parjurer sur les Saintes Écritures, pas lui. Il scruta la réaction du cardinal et… non, ce serait pour une prochaine fois. Autant utiliser à bon escient cet atout. Il ne pouvait néanmoins s’empêcher de s’amuser de l’ironie de la situation. Décidément, ces procès étaient comme des poupées gigognes : on en découvrait toujours un de plus à provoquer au fil de l’eau.

Deux témoins à décharge se succédèrent et qui eurent le bon ton de s’en tenir aux faits -Dieu merci- puis se fut au tour du comte de Monthoux -à qui il adressa un regard de soutien de pure circonstance-. Ses yeux d’un bleu limpide voguaient de ceux porcins de Prosper qui s’enhardissait tout au long de son discours à ceux roulants comme de petits galets en bord de grève d’Hyriel. Matthieu en revanche devait se frotter les mains d’une telle déclaration qui s’acheva en apothéose sur l’injonction du comte au baron d’aller se faire soigner. Inutile de dire qu’il lui fallut rassembler toute sa maitrise de lui-même pour ne pas partir dans un violent éclat de rire qui aurait été fort mal venu. Vint alors le témoignage de l’intendante de Monthoux qui semblait terriblement proche de son patron. La nuit, tous les chats étaient peut-être gris, mais de toute évidence, Prosper n’avait guère meilleur goût en ce qui concernait les femmes que pour… eh bien tout le reste. Mais peut-être avait-elle des talents dans l’entretien des poutres en plus de ceux des parquets qu’elle semblait tant affectionner, qui pouvaient le dire à part son seigneur ? Il nota cependant le nom de Phaïdée dont il se souvenait pour l’avoir fréquenté au lupanar. Il se souvenait également que c’était le comte qui avait été chargé de choisir les présents à remettre à l’ambassadeur d’Espagne. Une tâche qu’il avait confiée non sans un certain amusement au comte, toujours ravi de servir au mieux les intérêts de la couronne. C’est sur les derniers mots prononcés par cette beauté plus que relative que furent clos les témoignages, laissant l’accusé crouler sous une avalanche de questions plus idiotes les unes que les autres.
Enfin à celle sur son petit-fils, il n’hésita même pas et se leva dès la fin de la réponse de l’accusé afin de se rendre à la barre et posa sa main sur les Évangiles.

— Moi, Coldris Roderic Godefroy de Fromart, vicomte de Fromart et Ministre des Affaires étrangères et de la guerre, né le 9 décembre 1544 en mon fief, jure sur les Saintes Écritures de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Son témoignage ne changerait pas l’issue du procès, mais il était inconcevable de laisser demeurer ce flou, ne serait-ce que pour son petit-fils qui avait tant placé d’espoir en la visite d’Hyriel. Bien sûr, il n’était pas là pour connaitre la vérité, mais aurait-il pu croiser ses petits yeux verts pleins d’espièglerie et lui mentir honteusement en piétinant ses rêves les plus chers ?

— Permettez d’apporter quelques précisions que le prévenu ignore sur ce jeune garçon afin que vous puissiez décider en votre âme et conscience de ce qu’il en fut réellement ce jour-là. Adéis est le fils unique du marquis Démétrius d’Aussevielle, illustre famille monbrinienne, et de ma fille. Messieurs les jurés, vous aurez sans doute eu le plaisir de côtoyer son grand-père, Virgil d'Aussevielle, feu Procureur du Roi, rappelé par notre Seigneur il y a deux ans. Si tel est le cas, vous vous souviendrez incontestablement de lui comme d’un homme pieux, droit et intègre. Je connais Démétrius depuis sa naissance et je puis affirmer qu’il ne diffère en rien de son père et qu’il s’évertue à transmettre les mêmes valeurs chères à son cœur à son fils. Tous deux pratiquent régulièrement l’aumône comme le faisait en son temps Jésus, sans se soucier des différences de chacun, qu’ils soient infirmes, vieux ou encore anciens lépreux. Il est vrai que mon petit-fils s’est approché de l’inculpé en échappant à la vigilance de sa mère, car du haut de ses quatre ans, il voulait déjà se faire sa propre opinion de celui qui était victime de l’opprobre sans écouter les jugements aveugles et hâtifs de chacun. Aussi puissant puisse être le présumé sorcier ici, je doute qu’il n’ait pu envouter un cœur aussi pur et baigné de tant de foi que ne l’est celui du petit Adéis. Il n’était en outre, pas différent de celui que je connais à son retour, m’ayant simplement fait part de sa tristesse à avoir été le témoin de cette condamnation de la foule sur le simple motif de leur peur et de sa différence. Votre Éminence, Messieurs les Juges, je m’en remets à la sagesse de vos esprits et de vos cœurs pour le traitement de ces informations.

Il s’inclina légèrement et retourna à sa place afin d’assister à la réponse suivante d’Hyriel, puis l’on appela à la barre la prétentieuse dévote de la semaine des quatre dimanches dont le nom lui parlait sans avoir encore mis le doigt sur la raison. Il ferma brièvement les yeux. Le cardinal avait mal posé sa question en réalité. À sa place, il aurait orienté la question différemment, car qui s’accointait de nègres n’avait qu’un pas à faire pour s’adonner à la sorcellerie. L’on savait bien que c’était là des choses auxquelles ces ethnies païennes aimaient tout particulièrement s’adonner. Elle pouvait dire ce qu’elle voulait, âme ou pas, ces peuples demeuraient inférieurs et il était fort dégradant de se lier d’amitié avec ces… êtres. À ses allégations sur la sorcellerie, il osa un regard en coin à Matthieu : pensait-il à la même chose que lui ? Etre qualifié d’envoutante était largement suffisant pour ouvrir une enquête pour sorcellerie. Trouver des témoins ravis de participer n'était pas chose bien compliquée et l’on n'était plus à un bûcher près après tout. Surtout après avoir blasphémé ouvertement et provoqué un cardinal. Quelle idiote ! La question suivante était adressée au candide garçon. Réponse honnête qui ne convaincrait pas l’oiseau de Dieu, il le savait déjà.

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Message par Éléonore de Fromart Lun 22 Mar - 18:36

Entre l’arrivée surprise du Premier Conseiller - information à retenir -, les témoignages vides qui ne serait de toutes façon pas écoutés, les étalages d’absurdités et les gentilles tentatives de défenses mutuelles qui ne menaient à rien, Eltinne n’avait fait que ressasser cette satisfaction - certes puérile - que voir la requête de Coldris de Fromart rejetée lui avait apportée. Tant pis pour les fous qui finiraient certainement très mal… De toute façon, ils étaient corrompus, tant pis pour eux.

Son nez se fronça légèrement lorsque le Ministre vint à la barre. Il l’exaspérait ! Sincèrement ! Pourquoi ne pouvait-il rien dire de stupide, de compromettant, de… répréhensible ?! Pourquoi jouait-il si bien son jeu ? Comme si un homme pareil pouvait croire en quoi que ce soit ou se soucier de qui que ce soit d’autre que lui même ! Oh, non, vraiment, il avait une influence excessivement néfaste sur son humeur - dire qu’il avait parlé à Eléonore ! Qu’essayait-il de faire, au juste, en intervenant ? Et comment pouvait-on encore seulement l’écouter prêcher des principes que son esprit étriqué et égoïste était même incapable de concevoir ?

Elle suivit la suite sans aucun entrain, s’efforçant de retenir les tensions ou connivences qu’elle percevait à l’avant de salle et d’ignorer - et c’était très difficile - la présence du vicomte de Fromart.
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Message par Boréalion Lun 22 Mar - 18:37

Le sort s’acharnait visiblement contre lui ! Non content de l’isoler et le rendre presque invisible dans cette salle, il menait désormait juste à côté de lui le prêtre qui venait de briller par sa sotte arrogance. Il consulta du regard une Héloïse pas plus convaincue que lui par cette irruption. Un homme comme lui devait être relativement regardant quand à ses fréquentation… D’après ce que Célénian avait appris - autant par son attitude que par ce qui avait été rapporté de lui -, celui-là n’était pas exactement le genre de personne avec qui il était valorisant de s’afficher… Pire encore : eut égard à son dernier dérapage, il pourrait même parvenir à lui voler la vedette si quelqu’un de plus intéressant décidait de venir vers eux.

Mais il n’était pas là pour faire son intéressant - il avait promis à Héloïse de se tenir tranquille. Alors il s’efforça de se montrer aimable… et discret, et de ménager une certaine réticence pour ne pas que ceux qui devaient les regarder s’imaginent des amitiés entre eux. On verrait seulement la vérité : que le grand Boréalion savait se prendre sur lui lorsque les circonstances l’exigeaient. Oui, on le verrait. Et cela ne nuirait nullement à son prestige.

— L’inspiration est partout. Puis, comme je l’ai toujours dit, la matière première des véritables auteurs n’est pas le langage, mais le monde lui-même !

Ce gisement minier dans lequel il allait chercher ses idées foisonnantes, celui dans lequel il puisait tous ces détails qui donnaient à son oeuvre cette texture, cette profondeur, cette vérité émotionnelle inimitable. Certes, il en rajoutait quelquefois un peu sur certains sentiments, mais qu’ils soient maudits, ceux qui avaient le toupet de trouver cela mièvre ! L’autre scribouillard anglais cité par l’avocat faisait bien pire, et bien moins palpitant. De toute manière, personne ne l’égalait, lui. Et ce n’était qu’une question de temps avant que le grand Boréalion ne soit aussi réputé en europe qu’il ne l’était à Monbrina ! Ce n’était lent que parce que lui-même s’était montré réticent à s’aventurer hors de son pays.

Son instinct protecteur de grand frère s’alarma lorsque l’on évoqua Héloïse. Il la consulta du regard, mais celle-ci n’attendit pas pour se présenter.

— Héloïse Martéis, sa soeur, se présenta-t-elle d’un ton grinçant d’hypocrisie qui signifiait “nous ne vous retenons pas”.

Mais le prêtre demeura à leurs côtés. Les deux adelphes firent abstraction de sa présence - ainsi que de son premier commentaire - pour se concentrer sur le procès. Célénian se replongea dans son état d’éponge à émotion, cherchant à capter la moindre parcelle d’idée. Bien conscient qu’il était en public et observé, l’écrivain tâcha toutefois de ne pas trop se perdre et de rester lucide.

— C’est évident, répondit-il distraitement au curé lorsqu’il chercha la comparaison.

Quant à ses réflexions suivantes, tandis qu’Héloïse les ignorait superbement, son frère s’en laissa distraire. Non mais dites donc ! C’était qu’il était gonflé ? Avait-il conscience de la médiocrité de sa propre intervention, et de ce que sa façon de régler ses comptes en public - bien que cela ait nourri l’imagination de l’auteur - avait nuit à son propre témoignage ? La preuve : il avait même été invalidé ! Non, vraiment, il n’avait pas de commentaires à faire. Le père d’Anjou ne faisait donc manifestement pas partie des élus, lui non plus… contrairement à son voisin.

L’arrivée du Premier Conseiller - le fameux nouveau Premier Conseiller dont Célénian avait appris la nomination par les courriers de Madame de Guiroi - avait elle aussi quelque chose de spectaculaire. Il suivit la progression de l’homme au crochet jusqu’à la barre - avec un bref acquiescement au commentaire du curé - et se replongea dans sa méditation. Que de parcelles de monde qui auraient peut-être un jour l’honneur d’étoffer l’un de ses romans.

— Sans doute, admit-il, légèrement frustré qu’on ne le laisse pas réfléchir en paix. Il était un artiste, et un artiste, cela ne se perturbaiat pas en plein travail !

Deux femmes passèrent ensuite, elles aussi porteuses d’une émotion et d’une matière intéressante… Puis ce fut au tour du comte de Monthoux. Célénian, qui s’était jusque là efforcé de croire qu’il avait mal entendu, fut obligé d’entendre qu’il s’agissait bien de la famille à laquelle il avait songé… Et dire qu’il avait encore vu Mademoiselle Florentyna et sa belle-mère la semaine précédente… Elles ne semblaient pas plus ensorcelées que n’importe qui d’autre ! Il échangea un regard avec Héloïse : pourrait-elle lui rappeler d’envoyer un mot à Monthoux pour prendre des nouvelles - il ne se disputerait pas la conversation du comte à la sortie, il valait était de ceux que l’on acclamait, pas de ceux qui grappilaient les miettes d’attention.

Quant à savoir si le comte de Monthoux était quelqu’un de bien… Il n’avait jamais été désagréable avec lui, et il était content qu’il laisse sa fille le mécener… Pour le reste… Il n’avait rien aucun autre mérite à lui vanter. Quand à Mademoiselle Florentyna, c’était vraiment quelqu’un de sympatique, et de très impliqué dans sa carrière. Il eut presque osé dire “une amie”. Mais il n’avait pas besoin de s’étaler là-dessus pour l’instant.

Il regarda le présumé sorcier d’un autre oeil, maintenant qu’il savait que sa mécène de défendait. Avant d’être un criminel, un sorcier ou quelqu’un qui risquait une mort atroce, il était un grand sujet d’intérêt. Célénian était sûr que l’on aurait pu trouver plein de choses à raconter sur quelqu’un de tel… Oh, même si un bûcher devait être très instructif à regarder, même si la réaction de quelqu’un dans cette situation devait être très intéressante à retranscrire, il ne souhaitait pas que c’ait réellement besoin de se produire… Ce devait être vraiment horrible d’y assister... D’autant plus qu’il ne semblait absolument pas le mériter…

Enfin, comme le répétait son voisin bien trop bavard - qui semblait d’ailleurs enfin décidé à se taire, de quoi pousser Célénian à se demander quand quelqu’un se rappelerait enfin de sa présence - l’issue semblait inévitable… Lui, il ménagerait mieux le suspense s’il devait écrire un tel évènement.

— On appelle ceci de la culture, cher cardinal, et comme l'intelligence, moins on en possède, plus on l'étale.

— Certains n’ont pas manqué de l’illustrer, répliqua Héloïse avec une pointe de condescendance tandis que Célénian se laissait absorber par le jeu de question-réponse.

Le commentaire sur l’audition et la musique produite par les béquilles avait quelque chose de particulièrement intéressant, par exemple. Il attendait la suite avec impatience.
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Lun 22 Mar - 20:26

Le moins que l’on peut dire est que l’entrée du seigneur de Frenn aura produit son petit effet – ce qu’il n’aime pas particulièrement, être remarqué. Mais il n’a pas eu le choix pour tenter d’aider Hyriel et la stupeur est vite remplacée par la déférence que les juges et presque toute l’assistance lui adressent la parole. Après son témoignage, deux femmes du peuple avancent à la barre. Dyonis les trouve aussi courageuses que dignes, et surtout efficaces à s’en tenir aux faits – non sans insister sur leur grande piété, ce qui saura, espère-t-il, toucher le public autant que Son Éminence.
Descendent alors, pompeusement, lentement, le comte de Monthoux et sa contremaître lèche-pompes. Il tique en entendant que l’accusé a usé d’une deuxième fausse identité, cette fois à cause des affiches que lui-même a fait placarder en ville. Avec le recul, devant les bienfaits d’Hyriel pour Aud, ces avis de recherche, le baron les regrette. Toutefois il est trop tard pour ces sentiments et il ne le dira certainement pas. La suite cependant lui semble relever bien davantage de la superstition qu’autre chose. Fariboles. Des chardons apparus comme par magie. Des yeux qui maudissent. Deux nobles dames envoûtées. Venant de la part de Prosper dont il connaît l’étendue de la stupidité, de tels arguments trouvent encore moins que d’ordinaire leur chemin jusqu’à la raison du seigneur.
Mais ce qu’il entend en conclusion de l’intervention du comte de Monthoux vient l’estomaquer par-dessus tout. A-t-il. Vraiment. Osé ? L’espace de deux secondes, le Premier Conseiller est là, figé, le regard en suspend, comme à se demander s’il a bien entendu. Cet immonde goret au bavardage inversement proportionnel à son intelligence vient réellement de sous-entendre qu’il pouvait être là par fruit d’un envoûtement ? Et l’invitait à se faire soigner ? Il songe un instant à souligner devant tous l’incommensurable stupidité du personnage – par exemple avec ce cadeau déplacé offert à l’ambassadeur d’Espagne, mais il faut rester centré sur le sujet principal : le sorcier et sa complice.

« Je suis fort aise, cher Monsieur le comte, d’apprendre que votre épouse et votre fille sont à présent en parfaite santé. » Rétablies d’une maladie fictive mais il vaut mieux le taire. Dyonis reste prudent. « Ayez l’obligeance de continuer de veiller à la bonne santé des vôtres, et de vous assurer qu’il n’y ait nul complot ou faute politique de poids en votre domaine avant que d’en aller voir chez autrui. J’invite n’importe lequel de mes homologues à signaler la moindre défaillance dans mes humeurs ou l’exercice de mes fonctions si jamais il s’en trouve. » (Un temps, toujours de son ton égal en froideur et sans un regard de plus vers le sot seigneur.) « À présent peut-on redevenir sérieux ? »

C’est le moment des questions. Aux accusés d’abord, auxquels on ne peut pas enlever la dignité de leurs volontés de se protéger l’un-l’autre. À moins que cela ne témoigne d’un sentiment de peine perdue ? Leurs réponses leur vaut l’estime de Dyonis pour leur clarté : ils ne cherchent pas à faire des tonnes et demeurent simples. Hyriel répond même avec méthode et rationalité, direct et factuel. Le baron ose espérer qu’apparaisse là bien davantage un esprit scientifique qu’un démon à l’œuvre.
Quant le cardinal reprend la parole, Dyonis s’attend bien à être interrogé – notamment sur la pauvre Aud, de ce qu’il a cru comprendre de l’estime que cet ecclésiastique porte aux colonisés et aux individus passés entre les mains du guérisseur. Les précédents témoins prennent la parole.
Dame Despina et Nehalan s’expliquent. Dyonis fronce les sourcils aux obscures débats remués par le cardinal et la négociante quant à la nature des Indiens, dignes de ceux de Valladolid – voilà qui les emmène loin… quand il faut concrètement retenir que le prévenu a soigné une membre de la maisonnée. Nehalan fait preuve de clarté et d’honnêteté, une nouvelle fois. D’altruisme véritable, également, soucieux de secourir l’herboriste quand d’autres viennent surtout se donner en spectacle et régler leurs chamailleries. Avec un peu d’entraînement et davantage d’assurance, de rigueur aussi, le jeune Torienel pourrait se tracer une belle carrière, se fait-il la remarque. Le seigneur de Frenn est touché du reste par l’inquiétude de Nehalan pour ses proches, soucieux de ne pas les voir impactés par sa prise de position publique. S’il n’avait pas été en représentation en un moment si grave, il en aurait esquissé un sourire attendri – tout comme à la mention de son oreille de musicien, certes touchante mais qui en l’occurrence n’était pas pertinente pour convaincre en ce contexte.

Son tour vient. « Aud est valide et en parfaite santé. » répond-il d’abord, avant de rester concentré, prothèses croisées devant lui en écoutant les questions enrobées de précautions oratoires. Si sa fonction de Premier Conseiller peut impressionner même l’accusateur et peser de son poids en faveur d’Hyriel dans ce Tribunal, Dyonis n’en serait pas mécontent. Il reste donc aussi imperturbable et direct pour la suite de ses réponses : « Je comprends vos inquiétudes pour le bien de l’Empire mais je peux ré-affirmer que strictement rien n’a changé en moi depuis la venue du prévenu à Frenn. Chacun de mes gens, vassaux, collègues, congénères et supérieures (le seul supérieur étant le roi) vous le pourraient confirmer et je n’ai nulle crainte à ce que vous les interrogiez si le besoin vous en prenait. » Il n’a rien à cacher, rien à se reprocher, et rien n’a changé en lui… après le 12 septembre du moins. Aussi n’affiche-t-il nulle tension, nulle hésitation dans sa voix et écoute-t-il les réponses suivantes.
Il est fort surpris d’entendre cette étrange question quant à un événement non moins surprenant : le petit fils de son collègue des Affaires étrangères aurait grimpé sur la cage de l’accusé ? La scène devait être à la fois cocasse et attendrissante. Bien entendu, le vicomte se lève aussitôt pour assurer la parfaite santé mentale du jeune Adéis et la qualité de son éducation. Son intervention est tout à fait pertinente : nulle sorcellerie. La curiosité d’un petit garçon remuant, le concours parfois joueur des causes et des effets, rien de démoniaque. Dyonis aura un minuscule hochement de tête pour la prise de parole du ministre. Cela aussi, pourvu que cela ramène un peu de raison ici et aide Hyriel.

Grave moment qui approche. Chacun a parlé. Conformément au déroulement des audiences, Dyonis sait ce qui vient : Cour et Jurés vont se retirer pour délibérer, puis les peines intermédiaires seront prononcées à leur retour. Autant être réaliste : Hyriel sera déclaré coupable pour les avortements, les trafics de philtres, l’exercice illégal de la médecine et les fausses identités. Rien qu’avec cela, le mieux que l’on peut lui souhaiter est une flagellation, ou l’enfermement en un lieu de repentir, ou la réduction en esclavage. Il ne sortirait pas sans rien. Le baron espère cependant qu’à l’issue de la seconde session de la procédure criminelle, il ne quitte pas la prévôté pour se diriger vers le bûcher.
La prostituée, au moins, semblait s’être attirée la sympathie de la Cour et du Cardinal voyant en elle une pauvre femme dans la détresse et / ou envoûtée. Elle ne sortirait sûrement qu’avec quelques coups de fouet, ou d’ici un ou deux mois de prison supplémentaires. Il entend d'ailleurs Louise le bénir, mais préfère demeurer neutre et ne pas réagir, pour son propre bien et afin de demeurer le sobre homme de loi.
Dyonis Howksley de Frenn
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Message par Le Cent-Visages Lun 22 Mar - 22:56

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Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 Lzoniu10

Lénius, troubadour difforme en fauteuil roulant, 27 ans

— Votre Éminence, engagea Lénius, mes références culturelles ne m’ont en aucune façon été enseignées par Hyriel. Son savoir est essentiellement médical et botanique, l’on ne peut pas tout avoir. Pour vous répondre quant à leur provenance : quand on est invité – pour ne pas dire sommé – à venir divertir un certain nombre de Grands en leur fiefs, l’on entend énormément de conversations de haute volée. Leur érudition me profite, surtout lorsque je reste parfois des semaines entières, et je peux me réjouir d’avoir la mémoire excellente. Je soulignerai du reste que j’ai précisément mobilisé ces références aux croyances païennes, quant à la cause des phénomènes, non pour y souscrire. Mais pour montrer que l’esprit évolue toujours dans une fine connaissance de la nature.

Sans en faire davantage, Lénius se tut. Il s’inclina une nouvelle fois devant le Cardinal et la Cour, avant de céder la place aux autres témoins interrogés. La tension remontait en lui à mesure que le procès avançait et il n’écoutait que dans les grandes lignes les réponses suivantes, gardant plutôt toute son attention – vibrante de soutien – pour Louise et Hyriel.
Cette dernière remerciait le baron de Frenn et dans le secret de son cœur, l’infirme dut reconnaître lui aussi ses qualités en ce jour. Notamment pour envoyer ce porc de Monthoux non pas sur les roses mais dans la flaque de boue qu’il méritait. Lui et sa contremaître. Un jour, Lénius les épinglerait, ces deux-là ! Il s’en fit la promesse ! Puis Thierry parla de nouveau : autant il l’avait admiré la première fois, autant pour le coup… il partait en cour de récréation avec le Cardinal, à régler de vieux comptes sans aucune attention pour Hyriel ! Lénius fut dépité : le curé d’Anjou venait-il aider le guérisseur ou faire son numéro ?! Il appelait même l’inquisiteur par son prénom !
Au moins, il y avait ces deux femmes aussi humbles et bienveillantes que raisonnables, le jeune noble au discours très prometteur, et le Ministre des Affaires étrangères en personne qui déchargeait Hyriel de l’accusation d’envoûtement sur son petit fils.

— Merci pour vos bons vœux, Votre Éminence, enchaîna Berthe. Et oui, Hyriel a soigné beaucoup d’aut’ gens en ville ! Les p’tits du savetier. L’aînée de la mère Fanchon. Un bébé encore au berceau chez les vanniers du bout d’la rue. Oh et pas que des enfants ! La bonne du curé… Un vieux soldat qu’a mal cicatrisé d’son combat pour Mornoy. Et au moins cinq serviteurs et esclaves rien que dans le coin Est de Braktenn, à c’qu’on dit.

La Cour et le Jury suivirent avec une grande attention les réponses de chaque témoin, ainsi que de l’avocat, aux questions posées par le Cardinal. D’ici la seconde audience, les juges consulteraient Son Éminence quant à ce qu’il aura pensé de chacune des réponses obtenues à l’instant. Le verdict final allait en dépendre. Sans commentaire et sans trahir quelconque émotion, Ces Honneurs enregistraient chaque réponse, des plus complexes voire osées – comme celles de Dame Cordélia ou du père d’Anjou déjà largement discrédité, et qui en plus se permettait d’appeler le Cardinal par son prénom ! – aux plus simples et sincères du moins en apparence – comme ces deux femmes ou le fils Torienel. Les deux accusés leur firent le soulagement de répondre avec sobriété, sans s’épancher en larmes ou autres stratagèmes d’apitoiement. On trouvait même une certaine rationalité dans leurs discours respectifs… mais cela n’enlevait en rien à la partie des crimes dont ils s’étaient eux-mêmes reconnus coupables d’ailleurs. Cela tentait peut-être même de déguiser les autres, dans le cas de l’estropié aux potions. Clair et nets furent également le seigneur de Frenn, le sieur de Menthon, le Ministre des Affaires étrangères ou encore l’avocat de la défense.
Tout était entendu. Un coup de maillet sonna le silence dans la salle et la fin officielle de cette première étape. Au centre de myriades d’yeux de l’assistante, Bontempoix déclara, protocolaire :

— Seigneurs, Dames, gens de Braktenn, la Cour remercie chacun d’entre vous pour les pièces apportées à l’affaire par vos témoignages. Elle va maintenant se retirer pour délibérer.

La forêt des robes rouges et noirs, celles des jurés et des magistrats, se mit en branle pour disparaître derrière la porte théâtralement surélevée au bout d’un escalier au fond de la salle. Le temps que dureront les concertations, curiosité et appréhension bruisseront dans l’assistance, sans que ne surgisse toutefois un mot trop haut alors que guettait l’œil et les armes sévères de nombreux vigiles. L’on devait se prémunir de toute tentative de sabotage de la fin de séance, ce moment où la tension atteignait son point d’orgue. Ce sera au bout d’une demi-heure que l’enfilade des magistrats et membres du jury reviendront gravement reprendre leurs places, autour des deux accusés en contre-bas, comme insectes piégés dans cette immense toile tracée par les carreaux au sol.

— Accusés. Veuillez vous lever pour entendre les sentences ci-après. Silence de plomb. Louise Michalet est déclarée, à la majorité des voix, coupable de complicité aux avortements et trafics de potions instigués par ledit Hyriel. Lui sont reconnus toutefois, en circonstances atténuantes, l’urgence de la situation professionnelle de ces filles ainsi que la très probable influence néfaste du prévenu sur ses actions. En conséquence de quoi, nous, Parlement de Braktenn, la condamnons à être menée demain matin à la Grand’ Place pour y recevoir quinze coups de fouet, avant d’être relâchée. (Un temps) Nous condamnons aussi les prostituées Claudine et Lucie, pour avoir accepté d’être avortées des mains profanatrices de l’accusé, à la réclusion en un couvent pour le restant des jours qu’il plaira à Dieu de leur accorder. (Enfin, tous se tournent vers Hyriel) Le dénommé Hyriel est déclaré coupable d’avortements, de fabrication et trafic de philtres, d’exercice illégal de la médecine, d’usage de déguisements et fausses identités. Étant néanmoins entendu que de nombreux points restent encore à élucider malgré ses interrogatoires et prises de parole devant vous, la Cour ne peut encore pas se prononcer quant aux derniers et plus graves chefs d’accusation. Afin de faire la pleine lumière sur ces derniers éléments, et au vu de la culpabilité déjà grande du prévenu… mais aussi et surtout afin de connaître de lui d’éventuels complices, clients et autres victimes… nous condamnons Hyriel à être, demain à l’aube, entendu sous la question – donnée de la main des tourmenteurs de la Prévôté et sous la supervision de Son Éminence Matthieu Cassin.

L’annonce souffla son vent glacial dans l’assistance. On grimaça à la seule idée de la douleur à venir pour Louise et Hyriel. Certains se signaient. Adressaient des regards affligés notamment à la catin… Mais on pourra entendre aussi quelques expirations satisfaites trempées de ricanements :
— Les tenailles des bourreaux lui f’ront cracher le morceau !
— Le démon fait çà toujours moins son fier sous la torture !
— S’y pouvaient purger la ville de tout son réseau, on dormira plus en paix sous peu !
— C’tout c’qu’il mérite, ce faiseur d’Anges…
— Et son répugnant avocat avec lui !


— Accusé, reprit le juge en fichant ses yeux dans ceux du malheureux guérisseur : La Cour met tout en œuvre pour obtenir le salut de votre corps, et à défaut, au moins celui de votre âme – au nom de la justice de l’Empire et de l’Église. Nous vous enjoignons à vous montrer raisonnable si vous souhaitez écourter les peines qui vous attendent, puis échapper aux flammes du bûcher. Nous vous exhortons à moins de mystère quant à vos origines, à votre initiation, et aux personnes de votre entourage déjà plusieurs fois mentionnées et dont les rôles demeure suspects. (Clamant ensuite à tous) La séance est levée ! (Sur un coup de maillet retentissant, le magistrat se tourne vers les commis de salle) Gardes, reconduisez Louise Michalet dans son cachot. Et menez Hyriel au deuxième sous-sol, qu’il soit tenu sous haute surveillance dans le couloir des interrogatoires.

Il n’était en effet pas rare que des condamnés à la torture essaient de se mordre la langue jusqu’à se l’arracher, voire de l’avaler en préférant d’ores et déjà la mort. En prévention de telles tentatives, toute la nuit des geôliers se relaieraient pour ne pas lâcher d’un œil Hyriel bientôt enchaîné dans l’antichambre des supplices. Le guérisseur et sa complice furent séparés sans ménagement. Les bruits de chaînes retentirent tandis que l’un et l’autre allaient disparaître chacun derrière une porte. Tout le reste de la salle vrombissait déjà du bruit des spectateurs qui se levaient, parlaient, partaient.

Lénius frôlait le malaise. La question… La question ! Non ! Par tous les diables, pas ça ! Après avoir été de plus en plus fébrile tout au long des dernières réponses de témoins puis de la sentence énoncée, Lénius blêmit et trembla à ce verdict. Pour Louise aussi, la pauvre Louise… il aura serré les dents à s’en fendre et froncé les paupières afin de chasser les larmes qui menaçaient. Mais la torture fut l’annonce de trop.

— Non ! Hyriel ! Hyriel… répéta-t-il, à peine entendu du public déjà sur le départ, seulement des accusés dont en même temps il essaya de se rapprocher.

On ne le laissa malheureusement pas aller plus loin. Des gardes firent barrage à son fauteuil. D’autres entraînaient son ami vers l’arrière, de leurs poignes vigoureuses serrées autour de ses bras. Les prunelles embuées de Lénius ne pourront que rencontrer une dernière fois celles des deux condamnés. Son ventre hurlait de douleur. Ses poings se comprimèrent. La torture… Depuis quant croyait-on qu’elle donnait à entendre la vérité ?! Il tenta un instant de se rassurer : Hyriel était de tempérament tenace, il en avait vues et vécues des horreurs, il tiendrait… La terreur et la peine le submergeaient néanmoins. Il ne devait pas rester là. C’était parfaitement inutile désormais, jusqu’à la prochaine séance. Les traits tordus par la souffrance, la gargouille se fraya tant bien que mal un chemin pour retrouver Eugène et le saluer discrètement. Puis sortir. Et si possible éviter le Cardinal : le dragon rouge le retrouverait bien assez tôt.

Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 Avt_lo11Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 Marthe11

Comte Prosper de Monthoux et Marthe, intendante du domaine

— Oh ! Cette grosse brute de Zakrotien ! pesta Prosper, alors que Coldris se scandalisait avec lui des orientations politiques douteuses de l’estropié qui leur servait de Premier Conseiller. Me croirez-vous si je vous dis qu’en septembre, je suis allé dîner à Frenn… où j’ai été nourri d’insolences décomplexées de la part de ce gorille… et que ce cher baron m’a empêché de le corriger comme il le méritait ?! Quant à son ascension, nous sommes d’accord, elle est douteuse. Avec tout cela à son actif, des accointances démoniaques ne me surprendraient même plus.

Prosper s’en frottait les mains. Il n’avait pas digéré sa visite à Frenn et avoir rien moins que le Ministre des Affaires étrangères rangé de son avis pourrait permettre d’orchestrer d’éventuelles futures disgrâces. Dyonis pouvait bien le railler sous ses grands airs sévères dans la réponse qu’il s’évertuait à lui faire ! Son heure viendrait. Mais pour le moment, on allait se faire la peau d’un premier invalide en guise d’apéritif sous forme de grillades. L’issue de la session fut délectable : la torture. Parfait ! Sa langue traîtresse cracherait enfin tout ce qu’elle avait essayé de dissimuler jusqu’à présent. Le comte espéra qu’on l’empêcherait seulement, le moment venu, de proférer quelque malédiction du haut de son bûcher. Sur de larges sourires à la sentence intermédiaire, le comte et Marthe prirent leurs dispositions pour quitter les lieux non sans leurs politesses et au-revoir aux Grands des alentours – à commencer par le futur beau-père de Florentyna.
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Message par Hyriel Radgery Mar 23 Mar - 8:59



C’était si bon d’entendre l’immense bêtise du comte se faire rembarrer par la raison du Premier Conseiller. Tout simplement délicieux !

Arrivèrent ensuite les questions. Eh bien ! Le Ministre des Affaires étrangères lui-même prenait sa défense – ou plutôt celle de son bout’chou de petit fils ! Hyriel le remercia d’un signe de tête respectueux. Il n’oubliait pas pour autant tous ses griefs contre lui mais il lui reconnaissait au moins son honnêteté. Mais c’était tout de même amusant de voir tous ces noms chez les ministres, alors que lui, il était, au moins là, juste « Hyriel ». Il avait pitié des greffiers, lui.

Le cardinal commença donc à poser ses questions. Hyriel écouta avec attention la réponse de Lénius, rassuré qu’il trouve une bonne excuse tout à fait plausible. Puis, comme l’écarlate ignorait superbement Hyriel, Hyriel l’ignora tout aussi superbement en retour. Et puis le cardinal, c’était du déjà-vu. Tout le monde n’avait d’yeux que pour lui depuis le début de cette mascarade. Le sol, en revanche, était le grand oublié de cette affaire, alors qu’il était si essentiel… Afin de lui rendre justice, Hyriel décida donc de s’y intéresser, de regarder les joints des carreaux, les alternances de couleur et toutes ces choses que l’on ignorait généralement. S’il y avait des gens qui en faisaient leur métier, c’était bien que ça devait être intéressant…

C’est ainsi qu’Hyriel écouta à moitié les questions du cardinal, les insolences abracadabrantesques de la grenouille, la nuance du menteur qui allait l’enfoncer et les bêtises du défroqué. Par respect, il tendit tout de même l’oreille pour écouter la défense du gentil petit gars qu’il avait soigné – il espérait qu’il n’aurait pas d’ennuis – ainsi que le Premier Conseiller, net et sans bavure, puis la mère, à qui Hyriel sourit. Il roula ensuite des yeux à cette affaire de disciples. Il fallait changer de rengaine, à un moment…

Les jurés et magistrats partirent ensuite. Au milieu des murmures, Hyriel tourna la tête vers Louise et lui sourit en lui prenant la main pour la rassurer. Et se rassurer, lui. Le temps passa, long. Qu’allait-on leur réserver ?

Quand, finalement, l’escouade judiciaire revint, Hyriel se tendit. Il dut lâcher la main de Louise pour reprendre ses béquilles et se lever, contractant et décontractant ses doigts autour du bois. Il regarda Louise, inquiet, durant l’énonciation de son verdict. Il grimaça pour le châtiment, humiliation et douleur publiques, mais se rassura un peu : elle serait libre ensuite… Il l’encouragea de tout son regard. Il fut rassuré quant aux deux femmes qu’il avait avortées, même si ce ne serait pas heureux.
Il releva la tête quand ce fut son tour et regarda les juges. Bien sûr qu’ils ne pouvaient pas se prononcer – c’est-à-dire « le déclarer coupable » – pour certains cas, vu qu’il n’était pas coupable de sorcellerie et compagnie. Il serra les dents à la condamnation et ferma les yeux pour prendre une grande inspiration. Le réveil allait être joyeux… Il ferma son esprit aux murmures incendiaires. Ne pas les écouter, ne pas les écouter… Il se concentra sur les fadaises du juge en lui rendant son regard.
Quand fut donné l’ordre de les emmener, il entendit Lénius et sa gorge se serra. Il aurait voulu aller lui donner une franche accolade une dernière fois, pour les rassurer tous les deux, mais on l’emportait déjà. Il essaya de capter son regard le plus longtemps possible, pour le rassurer, et, quand il ne le pouvait pas, il s’efforçait de capter celui de Louise, pour l’encourager et lui dire au revoir. Quand se reverraient-ils ? Si même ils se revoyaient…



Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 O8v9

Eugène, 23 ans Un vieillard

Une ombre de sourire naquit au coin de la lèvre d’Eugène à la répartie du Premier Conseiller au comte. Lui, au moins, il pouvait lui dire ses quatre vérités sans se prendre une claque, cela faisait plaisir à entendre.

Aux questions, il serra les poings sous son manteau. Le Ministre des Affaires étrangères. Alors c’était lui, Coldris Roderic Godefroy de Fromart, qui avait ravagé leur pays. Lui qui leur avait arraché leurs familles, leurs amis, leur maison et leurs terres. Eugène profita de tout le temps qu’il se faisait remarquer pour l’observer et retenir son apparence. Ils l’auraient.

Le reste du temps, rassuré quant à Lénius, il y alla de ses petits commentaires sur les réponses des témoins, à l’image de leurs témoignages, tout en gardant un œil sur Hyriel, dont l’esprit avait visiblement décroché. En même temps, il y avait de quoi…

Les questions s’achevèrent et les magistrats et jurés partirent délibérer. Eugène ne se faisait pas d’illusions : ni Hyriel, ni Louise ne seraient relâchés. Il priait toutefois, en son cœur, qu’ils n’aient rien à subir de trop… irréversible…
Les magistrats revinrent.
Eugène se redressa et se tendit, pour se figer à l’annonce des peines. Il se mordit la langue à celle d’Hyriel. La question… C’était déjà horrible pour un homme valide mais pour quelqu’un comme Hyriel, aux os de verres… Non, son pauvre ami… Et les autres, quand ils l’apprendraient… Son seul réconfort était qu’il le savait résilient et habitué à la douleur. Il résisterait. Il résisterait et il ne leur dirait rien. Dans tous les cas, il demanderait à Florentin et, surtout, à Guillaume, de se tenir prêts, pour le cas où leurs noms tomberaient. Et il verrait ce qu’ils pourraient faire pour Louise, ils ne la laisseraient pas sans soutien.

Quand la séance fut levée, il se rendit compte qu’il avait été trop figé pour contrer les insultes de la foule. Tant pis. Il ne devait pas traîner et retourner à leur grenier, pour assister Dame Irène et pour prévenir les autres. Il suivit toutefois Lénius du regard, pour le saluer. Il le rejoignit et posa une main sur son épaule, cachée au mieux sous sa cape.

« Bonne chance, mon ami, » aura-t-il murmuré avant de quitter la salle, enveloppé dans sa cape.

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Message par Cassandre Velasquez Mar 23 Mar - 10:30

Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 Louise11
Louise, 41 ans, prostituée au Lupanar

Louise gardait la main sur celle de son ami, soucieuse de lui assurer au moins sa présence. C'était désormais la seule chose dont elle soit capable. Elle l'entendit, inquiète, prendre ses responsabilités dans la question des avortements. Pourquoi ne laissait-il pas endosser cela ? Il ne serait que complice. Il risquerait moins. Maudit coeur ! Maudite sensibilité ! Hyriel, pourquoi devait-il être si bon alors que le monde entier était rempli d'êtres ignobles qui ne voulaient que sa perte ? Le reste des accusations auraient pu passer et lui accorder une sanction légère. Mais des avortements, face à un inquisiteur aveugle, non, ça ne passerait jamais.

Puis, cet inquisiteur justement reprenait la parole et interrogeait les témoins, soucieux de déceler des failles. Quand on cherchait, on trouvait. Quel idiot ! Elle se pencha discrètement à l'oreille de son ami et murmura :


"Je prie en ce moment pour demander à Dieu de rentre cet imbécile muet. mais ça ne semble pas marcher. Tirons-en les bonnes déductions."

Heureusement, Lénius se débrouilla merveilleusement pour justifier ses connaissances. En revanche la femme avec son voile trouva encore le moyen de se distinguer. pourquoi insistait-elle avec ses idées sur les personnes noires ? En soi, la démarche l'honorait et prouvait un bel esprit d'ouverture mais elle faisait preuve d'un fragrant manque de pratique. Comme ce curé de tout à l'heure. Ces gens, en dépit de leur instruction, ne savait rien. Ils connaissaient le latin, le grec et tout un tas de notions complexes mais ils ignoraient le plus important : comment raisonner et adapter son comportement à une situation. Louise se pencha à nouveau vers Hyriel et murmura :

"Je ne sais pas si l'âme des Noirs est noir mais eux tous dans cette salle elle l'est. Assurément. Il n'y a personne pour se racheter."

Au moins, le menteur affirmait s'être trompé sur l'état de son épouse. Mais ce ne serai jamais suffisant. Hyriel... Hyriel... Dans le même temps, le curé se retira après une dernière provocation au cardinal. Cela ne les aida pas mais toute personne qui ridiculisait cet imbécile trouverait grâce à ses yeux. De toute façon, à quoi bon espérer  Ils étaient perdus. L'idiot en rouge avait décidé du verdict avant même l'ouverture du procès. Alors que le prêtre se fasse plaisir !

Le petit garçon qui répondit à une nouvelle question se justifia à son tour. Il se trouvait être bien mignon, le bonhomme, mais ne connaissait rien de la vie. S'il croyait que son opinion ou son témoignage changerait quelque chose... Pauvre petit !

Louise tressaillit brusquement d'apercevoir le terrible ministre des affaires étrangères s'avancer à la barre. Elle se rappelait de cette visite singulière dans leur cellule pour en arracher Alexandre et son intérêt pour Hyriel. S'il intervenait, les juges pourraient lui tenir compte. Il avait un poids considérable. L'espoir revenait en elle avant de la fuir rapidement. Non, les juges n'en tiendraient pas compte. Ils étaient idiots. Ils avaient refusé d'invalider le témoignage de la folle qui avait grandement manqué de respect et de bienséance. Ils n'écoutaient que le cardinal. Ce procès était joué d'avance. Quoi qui se dise. Les dés étaient pipés et le destin avait décidé.

Les questions reprenaient et le cardinal pensait que l'esclave soignée du Premier Conseiller était infirme. Louise ne cacha pas un sourire en entendant la réponse : valide. Bien fait pour cet imbécile condescendant qui croyait tout savoir ! L'homme en rouge se tourna vers elle et l'accusait d'avoir voulu amené la pauvre Cassandre à Hyriel pour en faire une disciple. Elle lui jeta un regard noir et lâcha malgré elle un mot dangereux.


"Idiot..."

Elle se reprit aussitôt :

"Je ne connaissais pas Hyriel avant cette date. Si vous désirez avoir des précisions, le lupanar avant Septembre dernier était tenu par des gens épouvantables.  Les conditions de vies étaient terribles et appeler u médecin pour une petite esclave, si tant est qu'un aurait voulu se déplacer pour cela, était impensable. Les patrons avaient décidé de laisser mourir l'enfant. C'est cela la seule vérité. moi, je ne voulait qu'elle vive. Seulement qu'elle vive. Alors je suis allée la porter à ce guérisseur dont j'ai entendu parler. C'était le seul espoir qui me restait. Un espoir minuscule. A chaque pas, avec le poids de l'enfant sur mon dos, brûlante de fièvre, je croyais que as respiration allait s'éteindre. Elle était condamnée, votre éminence. Si je n'avais pas agi, elle aurait été accueillie par Saint-Pierre."

Louise termina ces expliqua et le fixa d'un regard assassin, chargé de toute sa haine. Comment ne pouvait-il pas comprendre ? Il fallait n'avoir jamais été malade, n'avoir vu d'agonie pour refuser de comprendre. Quel idiot ! Quel idiot !

Finalement, la course retira et le temps des délibérations, Louise serra fort la main de son ami. Qu'allait-ils annoncer ? Son esprit imaginait déjà le pire. Lorsque les juges revinrent pour annoncer le verdict, elles= se leva en premier en devançant l'appel puis se tourna pour aider Hyriel à se mettre debout. Personne ne se souciait de son état alors que c'était là une chose difficile dans as triste condition. Louise écouta le sort qui lui était réservé avec indifférence. La flagellation ? Seulement ? tant mieux. Comme cela, demain, elle serait libre de trouver un moyen d'aider son ami. Peu importaient les risques que cela causaient. Son esprit réfléchissait déjà un plan et entrevoyait de contacter l'esclave Phaïde. Elle avait été si proche de Hyriel. Elle avait du caractère, de la débrouillardise... Toutes deux auraient sûrement une idée de plan pour sauver leur camarade.

Avant que le gardes m'emmènent Hyriel, Louise accrocha le bras e son ami et déposa un baiser à son front.


"Courage."

Elle se laissa ensuite emmener par les gardes en silence. Cette nuit serait productive. Elle réfléchirait jusqu'à l'aube s'il le fallait mais elle réussirait à imaginer un plan pour sauver Hyriel.
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Message par Invité Mar 23 Mar - 20:42

Les questions de l’âne rouge s’était poursuivi, les réponses aussi. L’avocat, interroger en premier, fût égale à lui-même, aussi excellent que dans son plaidoyer, mais… C’était une chose de retenir des informations, aussi quantitative soit-elle, s’en était une autre de savoir les réinvestir. Soit, évidement, elle était passée après et, comme à son témoignage, elle eût son lot de quolibets, d’insulte, de raillerie, parmi les bruits de foule… Elle cru même entendre quelqu’un la traitée de « blasphématrice » et pas qu’une fois, cela entre tant d’autres noms d’oiseaux… - On l'avait déjà traité de jument, de truit, de chienne... Alors des noms d'oiseaux - Oh mais ça c’était sans compter, le fait qu’elle avait « sûrement corrompu les jurées ! » pourquoi ne pas avoir carrément dit, qu’elle les avait « envoûté », « ensorcelé » tant qu’on y était, puisque c’était le sujet principal de toute cette comédie, à l’insu de ce pauvre Hyriel ! « Pleutres » même, avait-elle entendu auparavant… Du négociant de tapis…
 
Ce fut d’ailleurs, le second à répondre aux questions du Cardinal, après le jeune Nehalan, toujours, tout en innocence. Musicienne elle-même, elle doutait aussi que l’oreille, même « absolue », puissent être un argument de poids. Cependant, à la question, tout à fait légitime du jeune homme « Ils n’auront pas à souffrir de cette intervention, Monsieur le Cardinal ? » elle tourna lentement la tête vers celui-ci. Il ne manquerait plus que cela…

Il y eût aussi cette mère, Berthe, mais le Cardinal ignoré royalement le témoignage de l’autre femme, la prostituée. Celle-ci, faisait pourtant montre, d’une réelle sincérité, de part sa volonté de repentir, de changer de vie : Tiphanie ! Tiphanie DUBOIS, oui. Elle ne l’ignorerait pas, elle. D’ailleurs, ce ne fut pas la seule, le Monthoux aussi, ne fut pas inquiétez des questions, de l’éminence, on se demande pourquoi : pourquoi mettre en périls, mettre en doute, un si beau et magnifique témoignage… En « faveur » du prévenu.
 
Vint alors le tour, de cher Dyonis De FRENN. Qui avait donc si, intelligemment, et délicieusement remis, ce porc de Monthoux, à sa place… Si ce n’est qu’il prit pour elle-même, une sérieuse leçon. D’ailleurs, qu’aura-t-il pensé de ses propres réponses, donné au Cardinal… Car une fois de plus, sous les interrogations du pantin écarlate, les réponses reste simple, courte, concise… Admirable. Qu’avait-elle fait ?...
 
Evidement, arriva le tour des accusés, enfin, seulement de la prévenue. Cela devenait insoutenable, elle pourrait bien défaillir, si cela devait continuer encore longtemps, à force de se retenir, de se contenir ! Du peu qu’elle avait réussi à contenir…
 
Quand ce fut la douche froide : quelque coup de fouet en place publique, pour la prévenue et… l’indécision, conduisant à « la question » - ou autrement, la torture – supervisé par cette sinistre fiente de porc encapuchonner de pourpre ! Elle n’était maintenant plus que, spectatrice.
 
L’avocat tentant de rejoindre le prévenu, celui-ci tentant d’encourager ses amis. Quel courage, quel résilience… qu’avait-elle fait ? Que n’avait-elle pas fait ? Les gens sortaient du tribunal, et elle, restait là…
 
C’était le problème, elle avait perdu, l’objectif de vu. Elle s’était défendue, plutôt que l’accusé au dernier instant. Misérable. Pathétique. Winston avait sûrement trop de respect pour elle, pour lui dire en face, qu’elle l’avait déçu.
 
Même si beaucoup, ne s’était pas gêner, pour l’exprimer. Elle avait déçu, Winston. Sûrement déçu Dyonis, mais surtout Hyriel…
 
- Dame… Cordelia, tout va bien ?
- Elle ne le regarde même pasQuel question… - Stupide ? Non… Non, elle ne pouvait s’en prendre à lui. Non !d-dîte à propos. J’aurai, bien mérité… De me détendre, après tous celadit-elle, en pensant au vin, l’attendant à Edenia, alors des larmes viennent à ruisseler sur son visage
- C’était pour vous prévenir, que je m’en allais, m’acquittait de ma tâche, comme convenu.


Et bah non, une fois de plus, ses précieuses bouteilles s’éloignait d’elle… Encore ! Elle se contenta d’un signe de la tête. Pourquoi, l’avait-il amenée ici ? Pourquoi… Comme à cette vente d’esclave. Certes, cela avait pu, en quelques sorte, ce rattrapé mais… Là, qu’est-ce qui allait rattraper… Ses fautes. Elle était libre de dire : non. Tous comme Eve, était libre de dire non, au serpent. Ou Adam à Eve, quand elle lui proposa le fruit défendu… Si seulement… Elle s’imagine, attacher au poteau. Tel andromède offerte au monstre des mers. Attacher, au milieu des fagots, regardant au ciel… Elle brûlerait. Elle brûlerait, elle et son orgueil, sa fierté mal placer, ses souffrances, ses péchés, ses fautes, sa rancune, sa haine… à la place de cet Hyriel, et surtout… Mis à part peut-être à Winston ou Soraya, elle ne manquerait à personne. Elle n’aurait alors, qu’une seule, humble et non moins pathétique, requête : qu’on ne lui mette pas de cagoule, car elle a peur dans le noir…
 
Pendant ce temps, Winston s’en va trouver Lénius et Tiphanie, d’abord la jeune femme :

- s’inclinant devant la jeune femme - Veuillez m’excusez, Dame DUBOIS. Dame D… McDAN, souhaiterai s’entretenir avec vous, au sujet de votre souhait de… Reconversion professionnel, et de vie. Voudriez-vous me suivre ? Je ne ferai qu’un léger détour, pour voir Mr l’avocat.


Ainsi, il attendra la réponse de Dame DUBOIS, avant d’aller rejoindre l’avocat :


- Monsieurdit-il en s’inclinantje suis Winston MOKOKAOMO, serviteur de Dame McDAN. Je souhaitais vous témoignez, personnellement, tous mon respect et ma sympathie. Je viens aussi vous rendre, au nom de Dame McDAN, ce que vous fûtes forcer de céder, pour un droit d’accéder tout à fait libre et légitimeIl lui rends des sousce fût ignobles de la part de ces hommes, d’accepter de vous une quelconque somme, pour un acte qui se pouvait faire, sans monnayage.

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Message par Thierry d'Anjou Mer 24 Mar - 11:35

Aux côtés de l'auteur Boréalion, Thierry perçut que sa présence semblait l'agacer en dépit du sourire de façade que l'auteur avait construit pour lui répondre. La femme à ses côtés se présenta et le prêtre s'inclina.

"Héloïse ? Quel nom charmant ! Au moins, autant que vous !"

Malgré la politesse, elle se montrait encore plus hostile que le frère. Thierry réprima un sourire. Il les énervait ? Ils ne supportaient pas sa présence. Alors, il resterait. Rien ne se révélait plus amusant que d'imposer sa présence à des gens qui se refusaient de chasser celui ou celle qui l'importunait.

Ainsi, il s'amusa à ces commentaires cocasses, là où Boréalion ne répondait que de bien courtes affirmations. Quelle pauvreté pour un auteur si réputé. Il dissimula le sourire impertinent qui aurait pu lui venir puis reprit d'un faux air innocent :


"Heureusement que vos dialogues sont mieux construits que votre conversation. Autrement, on se poserait quelques questions;"

Il s'agissait d'une provocation et d'une insulte. Pas même déguisée. peu importaient. Il éprouvait trop envie de jouer. Rien de mieux qu'un intellectuel qui se pensait certainement important pour cela. Cela promettait d'être drôle !

Fier de cette réplique, il laissa l'auteur la digéra et répondre. Le procès se poursuivit et les réponses aux questions de l'oiseau rouge continuaient.

Thierry observait le petit garçon répondre avec ingénuité aux interrogations du cardinal. La précision sur ses oreilles de musicien et l'inquiétude pour ses parents qui pourraient être informés de sa présence à ce procès faillit le faire éclater de rire. Quel sot ! Au même âge, Alexandre se débrouillait bien mieux et se révélait parfaitement autonome en dépit de l'infirmité qui marquait péniblement son corps. Il devait demander la permission à son père adoptif avant de sortir mais il savait comment procéder et réussir à obtenir son accord. Son fils inventait même de brillants stratagèmes pour réussir à le contrôler et le forcer à rester à l'église. Le père se souvenait d'une fois, quand son garçon avait quinze ans, où il avait réussi à soudoyer des gamins des rues qui le poursuivaient méchamment et le forçaient à reprendre la direction de l'église. Le lendemain, Alexandre s'était amusé, d'un ton gentil, en lui demandant si sa sortie de la veille s'était bien déroulée. Voilà un enfant élevé ! En comparaison, ce petit Nehalan n'était qu'un bébé. peut-être suçotait-il son pouce en cachette.

Le prêtre eut peu après un sursaut d'apercevoir son ami s'avancer à son tour. Depuis quand se mêlait-il d'un banal procès ? Son sens de l'observation s'accrut. Quelque chose d'important devait exister ici. S'intéresserait-il à Hyriel pour ses talents avec les plantes ? Dans sa position, ce pourrait être utile, oui. Le serment sur la Bible le fit sourire. Coldris jurer de dire la vérité ? La main sur des textes sur lesquels il aurait préféré cracher dessus ? Thierry retint un rire et écouta avec attention ce qui allait suivre pour décoder les mensonges que son compagnon de débauche livrerait à cette cour. Il l'entendit à sa surprise rapporter le cas de son petit-fils Adéis qui s'était approché de la cage. Cela, il en avait bien eu connaissance grâce aux rumeurs quia avaient circulé. Thierry s'apaisa en comprenant finalement le but de la manœuvre : Coldris ne faisait que défendre l'honneur de l'enfant et s'arrangeait pour que personne ne puisse le soupçonner de sorcellerie ou d'envoûtement. Il le protégeait. Comme lui-même aurait protégé Alexandre ou Claire. Pour leur famille, ils auraient fait n'importe quoi.

Peu après, pour une fois Dyonis lui fit plaisir. Entre le rouge et le noir, son coeur choisissait celui qui évitait l'extrémisme. Par ailleurs, Thoerry comprenait les motivations de son ennemi. Que ne ferait-on pas pour le pouvoir ? Non, son seul et unique crime restait d'avoir osé s'en prendre à son fils. Cela, rien ne l'en laverait. Il sourit cependant de l'entendre confirmer que son esclave était une femme valide et en parfaite santé. Naturellement, cela ne changera pas la donne. Le cardinal était déterminé à brûler le guérisseur. Aucune de ces interventions ne modifierait le destin. Pauvre Claire ! Comment lui annoncerait-il la nouvelle ? Il la chassa de ses pensées. Pas maintenant. Il préféra se réfugier dans son cynisme habiuel..


"Pourquoi ce procès, au fait ? Manifestement, tout est décidé. Qu'on brûle cet homme e que la farce cesse !"

Les témoignages des deux femmes se poursuivaient et Lénius expliquaient ses connaissances. Comme si cela serait utile ! Quand le rouge était tiré, il fallait le boire ! Et quand le rouge décidai, les victimes brûlaient. La cour se retira finalement pour délibérer. lors de son retour, le verdict tomba. Prévisible. La catin allait être en fouettée en place publique. Dommage ! Malgré son âge, elle restait jolie mais risquait bientôt de ne plus l'être. Sans compter que la patronne du Lupanar, si morale, ne la reprendrait. Elle aurait mieux fait de se faire elle aussi enfermer avec deux femmes qui avaient avortées. Elles auraient eu le confort du toit et de la nourriture. Malgré son dégoût pour les monastères, le prêtre ne pouvait que s'incliner qu'ils offraient une meilleure protection que la rue. Elle acceptait le sort dignement. Sans se plaindre. En même temps, cela aurait été stupide. Il entendit ensuite pour Hyriel et blêmit. La question. Que Dieu ait son âme à ce malheureux ! Claire... Non, il ne lui dira jamais. Il prétendrait que son ami était simplement enfermé. elle ne devait pas savoir. Autrement.. Non, il ne pouvait la torturer avec des idées aussi affreuses.

Alors que Hyriel était emmené par les gardes, les idiots de la salle se réveillaient. Il se décida à quitter Boréalion sa sœur pour s'avancer vers le groupe des rieurs, la mine austère, et imposa toute son autorité :


"Silence ! J'ai averti une fois déjà que le moindre commentaire serait puni d'une dénonciation en chaire dès demain ! Et j'en vois deux que j'avais sermonné tout à l'heure ! Vous autres, si vous ne voulez pas connaître leur sort de demain, taisez-vous et sortez ! Tout accusé, pu importe son crime, a le droit à sa dignité ! Alors, silence !"

Désormais indifférent à ce qui se passait ailleurs dans cette salle, il fixait les mauvais plaisantins, sévère, et leur interdisait de poursuivre leurs moqueries grasses et stupides.
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Message par Irène d'Aubeville Mer 24 Mar - 23:30

Avertissement : « Handiphobie et racisme très sauvages »:
Event 9 ¤ [22 décembre 1597] Procès de Louise et Hyriel - 1/2 [Terminé] - Page 3 Cardin13
Cardinal Matthieu Cassin, 31 ans

Malgré sa réduction au silence, le prêtre continuait ses insolences. Cependant, encore une fois, il souffla et s’exhorta à la patience. Il avait été invalidé, donc sa parole ne valait plus rien. Donc c’était comme si sa bouche s’agitait sans qu’en sorte le moindre son. Il parlait dans le vide. Et il resterait quoiqu’il en soit sur sa position. Ça avait été sa faute. Sa sœur aurait pu faire un pas vers lui ce jour-là, il l’en avait empêché. Ça, il ne lui pardonnerait jamais.

Sa pupille se dilata cependant lorsqu’il prononça son prénom. De quel droit le prenait-il ainsi pour un enfant avec ce ton paternaliste ? Idiot ! Mais il devait rester calme… Des babillages, du vide, encore. Matthieu se permit le luxe d’admirer les murs et la foule plutôt que lui. Il n’en avait rien à faire de ses leçons de morale. Venant d’un prêtre qui ne respectait rien, cela n’avait aucune valeur. Lui, il servait l’Eglise, son Dieu et correctement. Il leva les yeux au ciel à ses encouragements pitoyables. Il aurait bien voulu appeler les gardes pour le faire déguerpir.

Sa dernière provocation ne lui fit ni chaud ni froid. Il détourna le regard et se projetait déjà pleinement vers les éléments intéressants et les questions à poser.    

Cependant, chose surprenante, il y eut tout d’abord un témoignage supplémentaire. Le ministre des Affaires étrangères ! Il déglutit, se sentant toujours à l’aise en présence de cet homme. Fort heureusement, il vint seulement démentir l’envoûtement de son petit-fils. Matthieu détendit les épaules. Ça ne changeait toujours absolument rien. Enfants, invalides, esclaves. Il avait sa liste, tout cela suivait un ordre précis et logique. Rien d’inquiétant pour lui. Envoûtement ou pas, tout pouvait s’expliquer. Il hocha la tête vers le ministre mais ne s’aventura pas à lui poser une question. Plus il demeurait à distances l’un de l’autre mieux ce serait, il en était convaincu.

Ensuite, Matthieu attendit patiemment les réponses à ses questions, toujours debout, le regard inquisiteur. Naturellement, il fallut commencer par l’avocat. Les bras croisés, il haussa un sourcil. Oh non… Ce n’était pas de considérations linguistiques dont on parlait dans les dîners. Tout cela cachait quelque chose, c’était évident ! Il hocha cependant simplement la tête. Patience. C’est ce qui lui avait le mieux réussi jusqu’ici.

Ensuite l’insolente… Bon… Matthieu commençait sérieusement à la soupçonner de quelques méchantes affaires. Accepter son témoignage passait moyennement mais son attitude, simplement sa façon de venir à la barre… Cela titillait son instinct de chasseur. Il y avait dans cette âme une prédisposition de proie. Il avait bien l’intention de creuser de ce côté-là également.

À peine ouvrit-elle la bouche qu’il faillit bien lever les yeux au ciel. C’était elle qui n’était pas attentive. Ou très maladroite. Peut-être pas forcément dangereuse mais il se méfiait toujours. Il fallait toujours se méfier des sots, certains allaient bien plus loin qu’on ne le croyait.  Il faillit se pincer l’arrête du nez. Elle l’avait montré et demandé de se désigner et elle osait dire qu’elle n’avait rien précisé ? Très bien, sa rhétorique n’était donc pas un problème, c’était déjà cela… il faillit s’étrangler à la suite. Mais dans quel monde vivait-elle ? Et elle disait connaître le pape. Ah, mais il y était ! Elle connaissait en réalité un pape… mais de presque cinquante ans auparavant… Il ne résista pas au plaisir de se pencher en avant très lentement avec un regard hautain. Autant, lui aussi, montrer sa culture.

-Vous avez raison et les Indiens ont bien été considérés comme des peuples capables de reconnaitre et d’accueillir la foi et la Sainte Lumière de Notre Seigneur. Cependant, son successeur, Sa Sainteté Jules III, a présidé à la controverse de Valladolid et a donc approuvé, par les saints hommes qui ont dirigé ce congrès, l’âme des Indiens. En revanche, il a été très clair quant au sort qu’on doit réserver à des peuples sans âme comme les nègres. Leur peau de charbon ne peut héberger une âme, c’est tout ce qu’il y a de plus logique. Ces peuplades d’Afrique ont donc été rejetées et pour le mieux !


Là. Bien, cela étant fait, les autres absurdités qu’elle semblait pouvoir débiter à la seconde. Il nota le reste et écouta d’autant plus attentivement à la suite. Il haussa un sourcil presque désespéré. « Diffamation » ?  Pour reproduire ces propres mots ? Cette femme avait-elle seulement un peu de jugeotte ? Le sous-texte était pourtant clairement là. Elle devrait mieux réfléchir à ses propres termes. Le doute germait sérieusement dans le for intérieur de Matthieu. Au moins, elle a la décence de s’incliner de façon convenable en se retirant. Il renifle et se redresse. Passons.

La réponse de Roméo confirma bel et bien ce qu’il pensait. Il hocha la tête. Décès mais pas de sortilège pour la gémellité. Inutile de davantage charger la mule. De toute façon, il avait déjà presque tout ce qu’il voulait.

Le frêle jeune homme fut le suivant à répondre. Matthieu l’écouta attentivement mais trouvait effectivement cela un peu léger. Malgré tout, il n’avait pas tort, qui portait un pareil appareillage dans tous le royaume. Et si jamais les parents venaient au procès confirmer… Tout penchait donc vers sa seconde option. Guérison intéressée comme celle des enfants. Nehalan s’inquiéta alors Matthieu ne put s’empêcher d’être sincèrement touché. Il acquiesça en tâchant de le rassurer.

-En aucun cas, ce n’est pas leur faute, voyons. Je prends bonne note de votre réponse, jeune homme et je vous remercie.

Ce fut ensuite le tour de la brave paysanne. Matthieu lui sourit et hocha la tête, un peu pensif. Des enfants en majorité. Quel hasard ! Une femme proche de la religion. Pour endormir les bonnes âmes, bien entendu. Un soldat invalide. Naturellement… Et d’autres infâmes. Bien ! Tout fut soigneusement noté dans son esprit.

Plus délicat, le Premier Conseiller qui avait d’ailleurs bien remis à sa place le comte. Matthieu en grimaça légèrement pour lui mais se garda bien d’intervenir. Après tout, c’était leur affaire et il ne semblait pas y avoir que le procès en jeu. Il préférait les laisser laver leur linge dans leur propre lavoir et s’occuper du sien…

La réponse le satisfit à moitié mais cela demeurait logique. Esclave, sans doute étrangère à la consonance de son nom. Bien. Il hocha humblement la tête à la suite.

-Très bien, je vous remercie.

Plus qu’un et ils arriveraient au bout. Il n’y avait pas assez pour le condamner en une fois mais ce n’était pas l’objectif premier de Matthieu avec cette séance. Le terrain avait déjà été bien préparé. Il suffisait d’enfoncer un peu plus le clou et il espérait que la question qu’on lui accorderait, il en était sûr, les aiderait à faire avouer le sorcier.

Cependant la catin osa le défier. Matthieu lui lança un regard noir.

-Faites attention à ce que vous dites, nous avons eu suffisamment d’insolence pour aujourd’hui.


Sa voix avait tonné une fois de plus, sérieusement agacée. Qu’avaient-ils tous aujourd’hui ? Décidément, cette ville méritait un bon nettoyage ! Naturellement, elle nia. Matthieu tapota la barre, commençant à s’impatienter. Malgré tout, il se raisonna. Si elle était envoûtée bien sûr qu’elle ne dirait rien mais il avait espéré qu’un peu de vérité lui sorte de la bouche. Manque de chance, cela ne semblait pas être le cas. Bien entendu, elle sortie un couplet bien pathétique qui le fit soupirer. Quand se décideraient-ils à trouver de meilleures excuses ? Ce n’était pas ainsi qu’ils allaient éloigner le sorcier du bûcher !

Malgré tout, il ne pouvait s’empêcher de serrer les dents en imaginant Cassandre malade. Mais peut-être exagérait-elle considérablement les faits. Ce serait possible, afin qu’on considère l’accusé comme un malheureux, toujours avec cette « charité » qui revenait. Pauvres aveugles… Voilà bien pourquoi il fallait des hommes comme lui pour venir leur ouvrir les yeux ! Il soutint le regard malade de la pauvre femme avant de se tourner vers les juges. Il en avait fini et comptait bien garder ses cartes en main pour la prochaine manche.

Il attendit avec patience la délibération, jetant de temps en temps des coups d’œil à Cecilia. Elle semblait suivre et il commençait à connaitre son regard. Quand elle avait celui-ci, c’était que son cerveau tournait à plein régime ! Tant mieux, il avait hâte d’entendre ce qu’elle avait pensé de tout cela.

Lorsque les juges revinrent, il se leva respectueusement. Il écouta avec attention les sanctions même si celles de Louise ne l’intéressait guère. Elle serait bientôt libérée de l’emprise du sorcier et reprendrait simplement sa vie comme avant. Il fut légèrement fébrile pour ce qui concernait Hyriel mais fut satisfait qu’il soit au moins déjà chargé de tout ce qu’il était possible de faire dans cette première partie. Parfait ! C’était déjà cela de pris. La question suffirait sans doute à élucider les derniers mystères. Il esquissa un sourire triomphant. Tout cela était parfait ! À présent, ils entraient dans l’acte II. Il approuva les directives du juge et attendit de les voir disparaitre dans les cachots.

L’avocat difforme faillit faire de nouveau son numéro mais les gardes l’arrêtèrent. Bien. Matthieu attendit pour sa part que la Cour tout entière soit partie et que les premières personnes s’en aillent pour se lever. Il sortit tranquillement, le pas léger et se dirigea vers Lucinde et Cecilia tout en ignorant soigneusement les personnes qu’il préférait éviter, notamment Thierry qui braillait comme un âne ou la fausse dévote. Il avait mieux à faire que de dépenser son énergie pour eux.
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Message par Nehalan De Torienel Sam 27 Mar - 19:43

Chacun répondait aux questions du cardinal, avec plus ou moins d’insolence mais toujours avec sincérité, lui semblait-il. A la réponse de son Eminence, le blondinet se rassit, rassuré quant au sort de ses parents. Il était prêt à assumer les conséquences de son témoignage, quelles qu’elles puissent être, mais il s’en serait éternellement voulu s’il y avait eu des retombées sur ses géniteurs. Malgré le peu d’affections qu’ils lui témoignaient, cela ne l’empêchait pas de chérir Monsieur votre père et Madame votre mère de tout son cœur.

Soudain, alors que la Cour avait clos les témoignages et éclaircissait certains points avec l’accusé, un homme se leva et se dirigea à grands pas vers le pupitre des témoins. Il venait des sièges réservés aux nobles, c’était donc un personnage d’importance. Une hypothèse qui se vit appuyée par les regards mi-effrayés, mi-admiratifs qui se tournaient vers lui au rythme de ses enjambées, puis confirmée par son serment. Le ministre des Affaires Etrangères. Encore un homme dont la prestance en effrayait plus d’un, lui compris. Absorbé par son histoire dont il ne comprenait pas tous les tenants et les aboutissants, Nehalan avait le sentiment que les prunelles de l’homme le transperçaient de part en part, aussi sûrement qu’un sabre bien aiguisé. Là où le charisme du Premier Conseiller lui avait semblé rayonner, l’aura qui se dégageait de ce ministre lui donnait la chair de poule.

Le temps d’intervention de la population était à présent terminé. Les témoins avaient parlé, répondu aux questions, les accusés s’étaient défendus, le moment le plus crucial se présentait à eux. L’ensemble des juges se retira pour délibérer, laissant la salle en proie aux bavardages, insultes et autres pronostics sur l’issue du procès. Le jeune attendit sagement sur son banc, prêtant une oreille discrète à ce qui se disait ça et là, mais rien d’intéressant n’en ressorti. Inconsciemment, il se redressa sur son banc quand la Cour refit son apparition.  

L’annonce des sentences le bouleversa. Le bûcher ne fut pas mentionné, toutefois la voix de glace du juge enserra sa gorge, un nuage gelé grossissait en elle, à mesure que les phrases s’écoulaient de sa bouche. Quinze coups de fouet. Il n’avait jamais tâté de quelconque badine, mais il se doutait que la peine annoncée devait être suffisamment douloureuse, puisque la prostituée n’avait en aucun cas été acquittée, il fallait donc qu’elle soit punie. Or une punition n’était jamais une partie de plaisir pour celui qui en subissait les conséquences. Le juge avait d’ailleurs précisé que le châtiment serait rendu en place publique. La pauvre femme se retrouverait humiliée, en plus de devoir subir une souffrance physique qu’il imaginait très grande.

Le sort des deux autres prostituées ne lui semblait pas trop dur à supporter, la chose qui le révoltait d’avantage, c’était qu’elles soient inculpées suite à des aveux de l’accusé et punies sans autre forme de procès. Des peines avaient été attribuées à des personnes non présentes dans la salle. Elles ne figuraient même pas sur la liste des accusés ! Personne n’avait été les quérir ! Le jeune homme n’osait imaginer la surprise qu’elles auraient quand des gardes viendraient les arracher à leur vie sans qu’elles puissent savoir pourquoi.

Il se mordit les lèvres en entendant la suite. La Question. La torture. Un homme avait parlé avec sincérité, avait été brillamment défendu, de nombreux témoins avaient confirmé ses bonnes intentions, alors qu’est-ce qui les poussait à croire qu’il avait menti ? Pourquoi aurait-il menti, il devait savoir que cela aurait des conséquences néfastes sur sa santé. Les tenailles du bourreau. Qu’allait-on lui faire subir au juste ? Et dans quel but ? Lui faire avouer des choses fausses pour que sa souffrance cesse ? Pourquoi appelait-on cela la justice, quand elle ne servait pas réellement la justice, mais les intérêts d’autrui ? La cour était tout acquise à la cause du Cardinal. Peut-être même depuis le début. Pourquoi donner un procès, s’ils en connaissaient déjà l’issue ? Il ne leur avait pas fallut longtemps pour délibérer. Tout juste la moitié d’une heure. Ils n’auraient pas osé avoir prévu à l’avance de soumettre Hyriel aux pires tourments tout de même…

Nehalan resta figé sur son siège de longues minutes, perdu dans ses pensées, pendant qu’on emmenait les accusés déclarés coupables, que la foule se levait, que les gens s’invectivaient, que tous sortaient. Combien de temps avait duré le procès ? Le jeune homme avait l’impression de sortir d’un rêve au goût amer. Il le voyait à présent : nulle justice n’avait été rendue. Il y aurait pu y avoir cent témoins en faveur du sorcier, il avait le sentiment que cela n’aurait rien changé à l’issue de la séance. Les dés étaient pipés. A quoi donc avait servit sa ridicule intervention, sinon à le donner en spectacle ? Il n’avait même pas su rester dans le cadre du témoignage. Il avait fallu qu’il s’étende sur des sujets qu’il ne maîtrisait pas. La dame Cordelia avait tort de lui dire qu’il avait été excellent.

Le jeune homme finit par se ressaisir. Il se leva mécaniquement et se laissa emporter par la vague, le regard vide. Le soleil qui transformait chaque flocon de neige échoué sur le sol en diamant ne réussi qu’à lui tirer un léger soupir. La nature était si belle… mais il ne pouvait se résoudre à sourire, quand il voyait cet homme qui lui avait sauvé la vie être traîné comme une vulgaire serpillère, quand il entendait les rires des badauds à l’annonce des horreurs qu’il subirait le lendemain, pendant que lui s’éveillerai sous son édredon. C’était si injuste !

On lui saisit brusquement le bras. La poigne de fer l’obligea à se retourner. Celui qui l’empoignait si durement n’était autre que Lui. Il n’avait jamais été violent de la sorte avec lui. Oh bien sûr il avait eu droit à des remarques méprisantes, à de nombreuses reprises. Mais le précepteur ne l’avait jamais atteint physiquement. Le ton sec qu’il prit ensuite acheva de lui donner envie de disparaître sous terre.

- Qu’est-ce que c’était que ça ? A quoi pensiez-vous ? Vous avez mis votre famille en grand danger ! Imaginez un peu la honte qui pourrait s’abattre sur Monsieur votre père d’être publiquement associé à cette vulgaire canaille !

- Je… Je pensais que vous seriez fier de moi, avoua-t-il honteusement. Je voulais vous montrer comment j’avais bien retenu vos leçons.


Le soufflet parti. La paume de la main du précepteur claqua contre sa joue. Nehalan senti les larmes lui monter aux yeux. Cela faisait si mal ! Il n’osait imaginer ce que ressentiraient Louise et Hyriel. Et lui qui osait se plaindre de sa douleur ! Quel nigaud !

« Si tu avais retenu mes leçons, tu serais resté à ta place ! Tu déshonores ton nom ! Tes frères ne se seraient jamais permis une telle impertinence, eux. Et sèches tes pleurs ridicules. Les hommes ne pleurent pas mon garçon. C’est là l’apanage des femmes. Tâche de retenir cette simple leçon pour commencer. Nous rentrons. »

Le jeune blond se laissa entraîner par Monsieur Retmer, détournant la tête pour qu’il ne voie pas la larme solitaire qui dévalait sa joue. Il avait raison sur toute la ligne. Il n’était qu’un nigaud, doublé d’un stupide benêt. Il méritait bien cette punition. Il n’avait jamais été souffleté. Voilà qui était fait. On ne lui avait jamais tant manqué de respect, il en faisait maintenant l’expérience. Il était tellement descendu dans l’estime de son professeur, qu’il ne méritait même plus le vouvoiement dû à son rang. Voilà qui lui apprendrait à se sentir pousser des ailes.
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Message par Cecilia Candore Dim 28 Mar - 11:11


La jeune sœur fut ravie de voir que Lucinde l’approuvait quant au jeune homme.  Ce garçon irait loin !

Le procès continua. Le Ministre des Affaires étrangères vint défendre le petit garçon escaladeur. Alors ce petit était… Il était… Un petit-fils de ministre ? C’était incroyable ! Tant mieux alors qu’il soir défendu : il étai trop innocent pour être convaincu d’envoûtement, il était juste un petit enfant qui voulait jouer ! Les derniers répondirent ensuite aux questions et les jurés se retirèrent pour délibérer. Cecilia, elle-même, se mit à réfléchir, tant qu’elle ne vit rien des regards autour d’elle, pas même celui du cardinal. Après avoir entendu tous ces discours et tous ces témoignages, quel verdict pourrait-elle donner, si on le lui demandait ? C’était une question réellement épineuse. Il y avait autant de pour que de contre et tout s’opposait. Peut-être fallait-il interroger de nouveau l’accusé ? Et sa compagne, à son sens, méritait la liberté, elle n’avait rien fait de mal.

Les jurés revinrent et Cecilia blanchit. Une liberté… mais des coups de fouets ? C’était horrible ! Inhumain ! Ce n’était pas chrétien ! Et la torture pour le sorcier ? Non, non, non, c’était ignoble ! La jeune sœur porta une main à sa bouche, horrifiée. Et le cardinal allait superviser cela ? Comment ? Lui qui était un homme si bon… Non… Elle lui demanderait d’être gentil, de ne pas faire de mal à un autre être humain. Si cela se trouvait, il s’y opposerait et proposerait une autre solution, dans sa grande bonté…

Et tout le monde commença à partir, une fois la séance levée. Cecilia ressentit un pincement au cœur en voyant la détresse de l’avocat. Comment pouvait-on douter qu’il était un ami proche du sorcier après cela ? Mais cela serait en sa défaveur si le sorcier était coupable. Elle n’eut pas le temps d’aller lui témoigner son soutien qu’il partait déjà. Et puis elle devait se reprendre, le cardinal n’aimerait pas la voir céder à la panique. Elle devait raisonner, comme lui. La jeune sœur s’efforça donc de prendre une grande inspiration avant de lisser les plis de sa robe. Elle se composa ensuite un sourire – car sourire physiquement amenait le sourire dans l’esprit, elle le savait d’expérience ! Elle se tourna ensuite vers Lucinde.

« Alors, Madame, que comptez-vous faire désormais ? Avez-vous besoin d’être raccompagnée ? »

Elle vit alors arriver le cardinal et ses questions et doutes lui revinrent en tête. Toutefois, elle jugea que ce n’était pas le moment de lui soumettre toutes ses interrogations, aussi se tint-elle droite et les garda-t-elle pour plus tard.

« Éminence ! Vous avez été grandiose ! Vous méritez une bonne infusion au chaud pour vous remettre de toutes ces émotions ! »

Et elle lui soumettrait ses doutes, une fois qu’ils seraient un peu plus au calme. Il saurait y répondre !

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Message par Lucinde Tiéran Dim 28 Mar - 16:26

Malgré tous les témoignages qui mettaient en valeur les bonnes actions du dénommé Hyriel, Lucinde ne se faisait pas d’illusion sur la suite. Le retour des jurés ne fut suivi d’aucune grande surprise. Il n’échapperait pas à la condamnation pour ses infractions à la loi - ce que Lucinde ne contestait pas malgré sa situation personnelle - et puisqu’ils n’avaient pas de preuves de en ce qui concernait la sorcellerie, ils les lui feraient cracher.

A côté d’elle, Cecilia semblait absolument horrifiée par la perspective qu’un homme soit torturé. Lucinde avait seulement serré les dents. C’était atroce, mais le monde était ainsi. Soumis à la question, il n’y avait qu’une seule chose à déterminer : ses priorités. A partir de là, ce devenait une épreuve comme une autre. Atroce, oui, mais pas insurmontable quand on avait le mental.

Elle eut un léger sourire en voyant la religieuse se reprendre en mains. C’était ce qu’il fallait : qu’elle reste forte. Qu’elle apprenne à ne pas se laisser personnellement affecter par ces choses-là. C’était un apprentissage difficile, mais l’ancienne sage-femme l’en croyait capable. Non : elle voulait qu’elle en soit capable. C’était Madame de Coutrenielle qui savait déterminer ces choses-là juste en voyant quelqu’un.

— Je vais bientôt retourner travailler, ce n’est pas si loin, répondit-elle lorsque sa sauveuse l’interrogea. Si vous avez besoin de soutien, n’hésitez pas à me solliciter.

Elle le lui devait bien, après tout. Mais en l’occurence, elle voyait davantage Cecilia se réfugier simplement dans sa foi. Chacun devait trouver ses propres défenses, mais la rouquine doutait qu’il fut une bonne idée de suivre aveuglément celles de Matthieu Cassin, qui semblait en pleine crise existentielle non-avouée. Dans ses mots et son attitude, Lucinde avait senti que par moments, il tentait autant de se convaincre lui-même que de convaincre l’assemblée. Il était trop extrème dans ses positions et une part de lui s’en rendait compte. Lucinde reconnaissait ces symptômes, parce que… Non, il n’y avait pas de raison particulière : elle les avait indentifiés, voilà tout.

Manifestement, penser au cardinal l’invoqua. Et ce fut une petite Cecilia toute admirative qui l’accueillit. Admirative, et qui ne montra pas un signe de ce qui l’agitait. Oui, elle avait cette force.

Parce qu’elle n’allait pas s’enfuir comme une voleuse, plus réservée tout de même, elle ajouta :

— Vous avez été très convaincant. Je prierai pour que la vérité soit démontrée.

L’ennui étant que la vérité n’était probablement pas ce qu’il avait envie de faire dire et qu’il y avait très peu de chances pour qu’elle éclate.
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Message par Coldris de Fromart Dim 28 Mar - 21:42



Coldris écouta avec une attention toute spectaculaire la répartie de Matthieu. La seule chose qui manquait à ce procès était de quoi se restaurer. Siroter un bon verre de whisky en jouissant de la performance (ou non) des différents acteurs en place, là cela aurait été parfait !
Ultime scène de ce premier acte : la délibération des Juges. Louise écopa de quinze coups de fouet. Pour ainsi dire une bagatelle vu les accusations qui pesaient sur elle. C’était humiliant certes et elle trouverait sans doute le temps long y compris les nuits suivantes mais elle serait libre ensuite. A choisir, il préférait largement ça à la réclusion dans un monastère ou un couvent.
Quant à Hyriel, sans surprises, car c’était pour ainsi dire inscrit sur le programme des festivités, il serait mené à la question. Euphémisme pour « torture ». Coldris lui aurait volontiers conseillé d’avouer dès que possible avoir baisé les pieds du diable pour obtenir ses puissants pouvoirs (en ponctuant d’un diabolique crachat pour la forme.) puisque de toute façon, quoi qu’il dise ou ne dise pas, il était déjà condamné au bûcher. Autant s’éviter d’atroces souffrances supplémentaires et risquer de vendre ses accointances.

Lorsqu’il croisa finalement les yeux de l’inculpé, ce fut pour le gratifier d’un regard de soutien mêlé d’assurance. A ses côtés, Prosper se félicitait de l’issue, lui acquiesçait lentement, mais c’était vers le sorcier que toute son attention était dirigée. Que n’était-on pas prêt à subir pour espérer survivre ?

La salle se vidait, mais Coldris patientait écoutant ça et là les bribes de conversations qui se faisaient et se défaisaient autour de lui, puis lorsqu’enfin le moment lui sembla opportun, il se dirigea vers le cardinal qui avait bien mérité quelques mots pour sa performance exceptionnelle sur les planches.

— Toutes mes félicitations pour votre réquisitoire, Votre Éminence.

… et il était du feu de Dieu.

Un large sourire illumina son visage à sa plaisanterie mentale que Matthieu Cassin n’apprécierait sans doute pas à sa juste valeur. Dommage.

— Auriez-vous quelques minutes à m’accorder ? Je souhaiterais vous faire part de la proche chasse que j’organise et laquelle j’espère bien vous convier.

Le cardinal roula des yeux. Pourtant il était bien chasseur professionnel, non ? Les yeux brillants de malice, Coldris se décida à éclaircir son invitation.

— Tibi mecum in eodem est pistrino vivendum.

Si avec cela il ne comprenait pas qu’ils ramaient tous deux dans la même galère, eh bien tant pis pour lui, cela ne l’empêcherait pas de clamer le haro seul.

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Message par Boréalion Lun 29 Mar - 20:52

— Heureusement que vos dialogues sont mieux construits que cos conversations. Autrement on se poserait quelque question.

Célénian maudit la présence d’Héloïse et sa promesse de se tenir tranquille.

— Parce que je rédige mes dialogues comme s'ils ne s'adressaient qu'aux meilleurs lecteurs et que je ne construis de conversation que lorsque mon interlocteur en vaut la peine, répliqua-t-il sans réfléchir.

C’était décidé : ce prêtre ne méritait pas son attention. Il prit exemple sur Héloïse qui l’ignorait superberment - excepté pour ce commentaire cassant comme elle aimait tant en dire - et écouta les dernières précisions apportées, en se racontant des histoires d’enfant horriblement malades et en essayant de trouver des mots à mettre sur l’état d’esprit de leurs parents.

Les délibérations passèrent très vite tant le jeune auteur était absorbé par toutes les idées qui s’accumulaient dans son esprit. Comment pouvait-on se trouver incapable d’écrire plus de trois phrases - médiocres - quand on avait à la fois son génie et son talent ? C’était aberrant !

Les condamnation tombèrent. Héloïse sembla vraiment terrifiée par l’annonce de la torture, et il frictionna maladroitement son épaules pour tenter de la rassurer. De son côté, la jeune femme ne comprenait pas comment son frère savait prendre ça avec un tel détachement, comme s’il ne s’agissait que d’une histoire inventée. Un être humain, un vrai, allait être soumis à la question… Et même s’il s’agissait d’un dangereux criminel et peut-être même d’un sorcier, c’avait quelque chose d’ignoble… Rien que l’idée lui en donnait la nausée.

Le verdict rendu, la salle commença à remuer. Célénian fut accaparé par quelques lecteurs qui tenaient absolument à lui rappeler combien son oeuvre était formidable… Comme s’il avait besoin qu’on rajoute de l’eau à son moulin. Mais le pire, ce fut de son petit numéro de l’homme très occupé qui, après quelques paroles et un peu de charme parce qu’il était tout de même des plus aimables, dut absolument abandonner ses pauvres lecteurs qui, il le savait, désespéraient de le retrouver lors de son prochain salon - à se demander si ce n’était pas lui qui incitait à l’idolâtrie.

Oh, mais le pire était bien qu’il ne s’arrêta pas en si bon chemin : s’il se sentait pressé, c’était bien qu’il avait une idée derrière la tête ! Et quelle idée !
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Message par Dyonis Howksley de Frenn Mar 30 Mar - 11:06

Pas mécontent de voir le goret de Monthoux avoir la décence de se taire après qu'il l'a remis à sa place, le seigneur de Frenn suit avec appréhension la fin des réponses faites à l'accusateur. Le Cardinal remercie le baron pour ses éclaircissements. Il écoute Louise s'en tirer à bon compte, encore une fois factuelle et simple. Il ne peut s'empêcher de serrer les dents au souvenir des abominables premiers patrons du Lupanar. En plus de tous leurs sévices, il n'est pas étonnant qu'ils n'aient eu strictement aucun soucis d'une esclave. Le Premier Conseiller rend grâce au Ciel d'avoir pu mettre le nez dans ces sordides affaires et mettre sous les verrous les tenanciers criminels. Louise fait bien de rappeler de pareilles choses : cela ne peut que mettre en valeur sa bravoure, d'avoir porté à bout de bras l'établissement. Il l'approuve d'un hochement de tête. Chacun se rappellera ici de la fracassante descente de police menée par Dyonis au Lupanar en septembre.

Vient la délibération. Lèvres pincées, le seigneur adresse une prière au secret de son cœur. Puisse la Cour être rationnelle. Quand l'équipée judiciaire revient, les peines tombent. Le fouet pour Louise. Quinze coups. Peine douloureuse et infamante, mais pas insurmontable. Elle pourra changer de vie ensuite. Or elle ne manque pas de soutien, comme le montre déjà le geste de l'avocat à son égard : elle sera aidée après le supplice. Quant à Hyriel... La torture. Sans vouloir se l'avouer, le baron s'y attendait. Il lève les yeux au ciel, espérant que si le guérisseur est vierge de toute accointance démoniaque, le Très-Haut lui donne la force de tenir bon dans les tourments. Un court instant avant que les gardes ne l'emportent, Dyonis lui aussi - à l'instar de Coldris - pose un regard plein de fermeté et de soutien sur Hyriel. Cet homme là, si Sa Majesté en entendait parler... il ne serait pas impossible que son destin bascule en bien. Gérald Der Ragascorn n'est plus à une fantaisie près avec ses infirmes.
En quittant la salle, au milieu de l'allée qui s'ouvre respectueusement sur son passage, le Premier Conseiller ralentit quelques instants ses pas auprès de Nehalan de Torienel, qui semble aux prises avec des voix courroucées de son intervention. Voilà qui est triste. Dyonis, lui, ne l'a pas trouvé mauvais. Loin de là. Le jeune noble aura même fourni l'un des meilleurs témoignages de cette audience. Pour le moment, le seigneur de Frenn ne dit rien, ne fait rien, cependant il note soigneusement le nom de Nehalan dans son esprit. Il ne devrait pas avoir à rougir de sa prise de parole.
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Message par Le Cent-Visages Mar 30 Mar - 11:07

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Lénius, troubadour difforme en fauteuil roulant, 27 ans

Alors qu'ils allaient quitter le tribunal, Tiphanie Dubois et Lénius furent rattrapés par le géant serviteur noir de Dame Cordélia. Toute décontenancée, la jeune femme offrit une maladroite petite révérence.

-- Me... me parler ? (elle écarquille les yeux en entendant qu'il s'agit de ce qu'elle disait de son souhait de changer de vie) Oh... Vraiment c'est... Madame est très bonne. (On la sent encore méfiante malgré tout, cependant elle ne peut pas ne pas saisir cette opportunité et aller écouter ce que lui propose la riche notable.) Je vous suis de ce pas.

Lénius à son tour, bouleversé à l'idée de savoir son ami très prochainement torturé, entendra vaguement quelqu'un arriver vers lui. Tout à sa douleur, il n'y fit d'abord pas vraiment attention. En se concentrant davantage cependant - c'était bien à lui qu'on s'adressait - il s'efforça de sécher ses yeux et de se redresser pour découvrir le fameux Winston, homme de main de la femme au voile. L'avocat resta un peu sonné, secouant la tête et répondant d'une voix blanche à ses marques de respect et de sympathie :

-- Je... vous remercie.

C'était vraiment gentil de sa part, cependant l'invalide doutait sérieusement de sa véritable capacité à avoir défendu Hyriel. Rien ni personne n'y avaient réussi : malgré les discours des uns et des autres, il partait vers d'abominables supplices. Lénius en avait envie de vomir. Cette Cour abjecte semblait avoir déjà tout programmé. Les pseudo-témoins à décharge et lui, pesudo-avocat, n'auront été que des moulins à vent dans cette gigantesque mauvaise farce ! Pris par cette réflexion, tout comptes faits, Lénius revint sur son premier jugement auto-critique : il ne saurait jamais s'il avait été bon ou médiocre - il aurait pu discourir admirablement, cela n'aurait rien changé à ce que ces ordures décident de torturer Hyriel. Mais pour l'heure, il s'en revint non sans étonnement à Winston qui lui rendait généreusement son argent :

-- C'est fort généreux de votre part. (Un temps, rangeant ses pièces) Vous savez, je me suis accoutumé à ce que rien dans ce fichu monde ne soit gratuit - et à devoir compenser ce que j'ai de disgrâce et de... poids... par un brin de monnaie ou de flatterie. Quoi qu'il en soit grand merci à vous. Et puisque quelque chose me dit que Dame Mc Dan n'est pas totalement innocente à votre geste, voudriez-vous bien me conduire jusqu'à elle ?

Les bonnes manières exigeaient qu'elle soit remerciée elle aussi. C'est ainsi que Tiphanie Dubois et Lénius suivront Wnston à l'extérieur de la salle du tribunal - le temps d'un bref échange avec la noble femme dans le couloir.
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